Quel­ques mil­liers d’années dans notre futur, la Terre est enfin réu­ni­fiée au sein de l’Empire de Linn : un étrange État basé sur la force et l’escla­vage, où la guerre con­tre Mars se mène avec des épées, des arcs et des lan­ces, mais où les dépla­ce­ments s’opè­rent en astro­nef inter­pla­né­taire (il fau­dra accep­ter le para­doxe) ; une civi­li­sa­tion où la science n’est plus, et ce qui en reste est aux mains des prê­tres de l’atome, ado­ra­teurs d’Ura­nium, Plu­to­nium et con­sorts (le livre date des années 50 et est là mar­qué par les préoc­cu­pa­tions de son épo­que) ; un monde qui mani­fes­te­ment sort d’une période de bar­ba­rie suite à l’effon­dre­ment de la civi­li­sa­tion inter­pla­né­taire bien long­temps aupa­ra­vant.

La belle-fille de l’Empe­reur accou­che d’un fils mutant, aux os défor­més. Con­tre toute attente, l’enfant est laissé en vie, et un vieux sage prend son édu­ca­tion en main. Le petit Clane, en marge de la Cour minée par les intri­gues poli­ti­ques, gran­dit alors et devient un des prê­tres de l’atome.
Au moment où il com­mence à accu­mu­ler un savoir et un pou­voir tech­ni­que immen­ses, pio­chés dans les rui­nes des anciens dis­pa­rus, il est forcé de s’impli­quer dans les sor­di­des com­plots de la Cour. Puis défer­lent des enva­his­seurs bar­ba­res des lunes de Jupi­ter. Ils ne repré­sen­tent que le pre­mier des dan­gers mor­tels que le « Sor­cier de Linn » va évi­ter à son peu­ple.

Ce cycle en deux tomes est du pur Van Vogt. L’action est très réduite, les batailles sont rela­tées plus que décri­tes, tout est dans le rai­son­ne­ment. Les per­son­na­ges réflé­chis­sent beau­coup et se com­por­tent de manière pres­que trop ration­nelle (l’enva­his­seur Czinc­zar capi­tule sur le champ en cons­ta­tant la puis­sance de Clane, de la même manière qu’un joueur d’échec aban­donne après la perte de sa dame). On retrouve le mythe du « surhomme » à la Van Vogt, c’est-à-dire celui que le savoir et la for­ma­tion intel­lec­tuelle ren­dent pres­que invin­ci­ble (voir le Gos­seyn du Monde des à ou le savant nexia­liste de la Faune de l’Espace, deux autres très bons clas­si­ques du même auteur).

La for­ma­tion de Clane et le jeu des intri­gues poli­ti­ques mou­che­tées ou mor­tel­les de la Cour sont bien sûr les par­ties les plus inté­res­san­tes. Inté­res­sante éga­le­ment la décou­verte de la civi­li­sa­tion des Riss et les rai­sons et con­sé­quen­ces de l’effon­dre­ment de la civi­li­sa­tion pré­cé­dant celle de Linn.
Mais la fin de cha­cun des deux tomes est trop vite expé­diée : le mutant dégaine son atout et l’adver­saire capi­tule. Un peu frus­trant. Les per­son­na­ges secon­dai­res (la famille de Clane notam­ment) sont trop peu déve­lop­pés. Un roman assez froid donc (comme tout Van Vogt), et qui plaira à des gens comme moi ainsi qu’aux ama­teurs d’échec et de clas­si­ques de SF.