Blog éclectique & sans sujet précis - Mot-clé - Antiquité<p>Si ça me passe par la tête, si ça n’intéresse que moi, alors c’est peut-être ici. Ou pas.</p>2024-02-13T09:44:49+01:00L'éditeur est le propriétaire du domaineurn:md5:bf83720a7189bba489682d945b972671Dotclear« Géohistoire » de Christian Grataloupurn:md5:478cf37f9b6a32f203931aaeb6a7c9a92023-12-29T18:48:00+00:002023-12-29T18:48:00+00:00ChristopheHistoireAfriqueAmériqueAntiquitéauto-organisationcartescatastropheChinecivilisationclimatcolonisationcomplexitédémographiedéveloppementeffondrementEmpireEmpire romainesclavageEuropeguerregéographiegéologiegéopolitiquehistoireimpérialismeIndeMoyen Âgeorganisationperspectivepolitiquepouvoir d’acheterpétroleRenaissanceRussiesociétés primitivestempséconomieémerveillementénergieévolution<p>Les achats d’impulsion sont parfois les meilleurs. <em>Géohistoire</em> veut nous faire sentir <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/geohistoire">tout l’impact de la géographie sur la manière dont tourne le monde</a>. Christian Grataloup nous expose la trame sous-jacente à l’histoire de bien des Empires, plus liée aux vents de mousson ou aux flux de capitaux à l’échelle continentale qu’aux généraux et mouvements politiques. La domination européenne est en bonne partie une conséquence de sa géographie. Notes de lectures.</p>
<h2>Il était une fois l’humanité…</h2>
<p>Et ça commence très tôt, par <em>Homo erectus</em> et sa lente diffusion à travers le monde, du moins les parties habitables accessibles à pied sec. Dès cette époque, notre espèce montre une rare adaptation à tant de milieux différents, des savanes africaines aux forêts humides aux steppes neigeuses de l’ère glaciaire. Des bras de mer sont franchis. Nos atouts : le feu, la construction de maisons, l’aiguille à coudre.</p>
<p><a href="https://arenes.fr/livre/geohistoire-2/" title="Géohistoire (Christian Grataloup, Arènes, 2023)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/.Geohistoire-Christian_Grataloup-Arenes_2023_m.jpg" alt="Géohistoire (Christian Grataloup, Arènes, 2023)" class="media-right" /></a></p>
<p><em>Homo sapiens</em> va encore plus loin, et même l’Amérique est envahie. À la fin de la glaciation ne restent inoccupées que des îles du Pacifique ou l’Islande, conquises vers l’An Mil au plus tard, et des zones polaires comme l’Antarctique.</p>
<h2>Axe & périphéries</h2>
<p>L’essentiel de l’histoire, de la démographie, des échanges de l’humanité, et depuis l’Antiquité, sont regroupées autour d’un « Axe » de l’Eufrasie (terme qui inclue bien l’Afrique dans le monde). Au départ, l’Axe va grossièrement de Gibraltar à la Chine du Nord via les côtes méditerranéennes, la Perse et l’Inde. Avec le temps, l’Axe s’épaissit, en premier lieu en incorporant toute l’Europe jusque la Scandinavie et Îles britanniques.</p>
<p>Sur cet axe s’échangent des biens ou des monnaies, et aussi des métaux précieux, une spécificité de l’Axe. Les latitudes étant voisines, les méthodes de culture ou domestication diffusent. Les idées circulent aussi, à commencer par les religions (monothéismes, bouddhisme…). Mais aussi des agents pathogènes : la Peste Noire est l’exemple le plus flagrant. Au fil du temps, toute la population de l’Axe acquiert une immunité à des germes, souvent transmise par des animaux d’élevage, et que d’autres peuples isolés ne connaissent donc pas, bientôt pour leur plus grand malheur.</p>
<p>Les Empires sur l’Axe se créent et se renouvellent en réaction à des menaces externes : Rome face aux barbares, la Chine ou les Empires indiens face aux envahisseurs des steppes. On note que les capitales (Pékin, Delhi, Trèves…) ont tendance à être proches des frontières menacées.</p>
<p>Des régions restent à la marge. L’Afrique d’abord, peu intégrée, peu peuplée, en contact toutefois avec l’Axe via quelques routes au travers du Sahel, et surtout toute la côte est. L’Insulinde est une zone fragmentée mais bien connectée à dominante commerciale. Sont à peu près isolés l’Australie et tout le monde polynésien, de Taïwan à l’île de Pâques, malgré les talents de navigation de ses habitants. Surtout, le continent américain entier est isolé depuis des dizaines de millénaires. Géographiquement beaucoup plus segmenté que l’Axe, il est aussi sans grand mammifère domesticable (et mangeable), ce qui aura son importance pour le développement des sociétés.</p>
<h2>Économies-monde polycentriques</h2>
<p>Les Empires sont des blocs en partie nés des impératifs de la culture (notamment la riziculture) et des attaques des nomades. D’autres parties de l’Axe évoluent en « économies-mondes », faute d’ennemi contre lequel s’unir. Il s’agit de l’Insulinde et, plus encore, de l’Europe. Celle-ci, bien que déchirée entre d’innombrables entités une fois disparu l’Empire romain, conserve son unité. Les frontières de l’Europe médiévale, et leur évolution, se repèrent très vite par la carte des mariages royaux. L’Europe, tout au bout de l’Eurasie, ne craint pas vraiment un envahisseur à grande échelle. Les Mongols s’approchent mais sont trop loin de leurs bases.</p>
<p>Étonnamment, une excroissance de l’Europe exposée, elle, aux attaques des steppes, reproduit le schéma de la conquête impériale à l’ancienne : la Russie. Une double origine et un dilemme national dont les conséquences perdurent.</p>
<h2>Les vents, les épices et l’or</h2>
<p>Pendant des millénaires, l’essentiel des échanges entre grandes masses humaines se fait via l’Océan Indien, de l’Afrique à la Chine. Les latitudes propices à la mousson permettent d’aller d’est en ouest et de ouest en est, sans trop de danger. La Route de la Soie n’est qu’un chemin secondaire, terrestre, plus dangereux, et lent, même si la Chine tente systématiquement d’en sécuriser les tronçons proches quand elle n’est pas sur la défensive.</p>
<p>Les périphéries fournissent ce dont les autres ont besoin : esclaves africains notamment, et depuis des siècles ; des fourrures ; des métaux précieux. La Chine et l’Inde exportent des biens manufacturées, textiles en premier lieu (cotonnades indiennes, soie…), mais aussi thé ou porcelaine. L’Insulinde exporte ses fameuses épices, dont le sucre. De tout cela les Européens sont friands. Mais ils ne peuvent rien produire eux-mêmes, et surtout pas la canne à sucre qui craint l’hiver. Et l’Europe n’a pas grand-chose à exporter, à part un peu de verre.</p>
<p>Pendant deux millénaires, l’or et l’argent européens servent à acheter des biens manufacturés ou des épices asiatiques (à destination des plus riches, bien sûr), et ces métaux précieux restent en Asie. Puis les techniques de navigation atteignent un niveau permettant d’aller plus loin, et le monde commence à changer.</p>
<p>D’un côté, la Chine impériale n’a pas <em>besoin</em> d’aller chercher des ressources ailleurs. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zheng_He">Flotte des Trésors de Zheng He</a> va peut-être loin, mais reste une exception trop coûteuse pour être renouvelée aux yeux de l’autorité centrale.</p>
<p>De l’autre, l’Europe a épuisé ses mines et manque de monnaie précieuse pour ses échanges. La multiplicité des acteurs, le rôle majeur des marchands, permettent les expériences. Le premier pas est la conquête de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Macaron%C3%A9sie">Macaronésie</a> par les Espagnols et les Portugais, un marche-pied dans l’Atlantique. On y inaugure le modèle de la plantation de canne à sucre avec esclaves africains. Les Portugais sont les premiers à dominer les vents et à acquérir les techniques pour arriver d’abord en Afrique noire, et acheter l’or du Mali sans intermédiaire. De comptoir en comptoir, les Portugais parviennent dans l’Océan Indien, profitent eux aussi des moussons, et mettent la main sur le très lucratif commerce des épices avec l’Asie.</p>
<p>Jusque là, pas de changement fondamental : l’Europe ouvre une voie d’accès périphérique (toujours lente et dangereuse) à l’Asie, mais l’on reste dans les échanges au sein de l’Axe. Le Portugal (1 million d’habitants) n’est démographiquement pas capable de tenir plus que des comptoirs, et craint plus ses rivaux européens envieux que les peuples « découverts ».</p>
<p>Christophe Colomb va tout changer. La connexion entre Ancien et Nouveau Monde était inévitable, et des contacts avaient déjà eu lieu (Vikings au nord et Polynésiens au sud). Une fois compris le régime des vents dans l’Atlantique et la nécessité de s’écarter de l’Afrique pour en profiter au mieux, il était fatal que les Européens accostent dans les Caraïbes ou au Brésil. Les Chinois ou les Japonais auraient pu le faire un jour ou l’autre, mais les Espagnols ont été les premiers à établir des colonies en Amérique, suivis par tous leurs voisins.</p>
<p>Ce qui intéresse les Européens, ce sont les contrées avec un climat sans hiver, en premier lieu pour la canne à sucre. Pour éviter la fuite des esclaves noirs, les îles sont privilégiées (et Louis XV sacrifiera pour elles bien les arpents de neige canadiens.) Les Anglais et les Français vont aussi au nord, à la recherche d’une voie directe vers l’Asie. Le prosélytisme, la curiosité scientifique ou le goût de l’exploration sont d’autres moteurs, mais annexes aux besoins commerciaux.</p>
<p>La conquête de l’Amérique du Centre et du Sud est rapide et facile. Les maigres effectifs hispaniques, avec à peine quelques chevaux et armes à feu, sont massivement aidés (involontairement, du moins au début) par les agents pathogènes inconnus des Amérindiens, et contre lesquels les habitants de l’Axe sont à peu près immunisés. L’effondrement de la population américaine (environ 90 % !) entraîne des troubles sociaux qui achèvent les sociétés. Tant de territoires sont libérés de l’agriculture (en Amazonie notamment) que le reboisement se traduit par une chute du CO₂ atmosphérique, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Little_Ice_Age#Destruction_of_native_populations_and_biomass_of_the_Americas">possible cause du Petit Âge glaciaire</a>. La main d’œuvre locale disparue, et faute de pouvoir motiver sa propre population à aller trimer dans les plantations, l’Europe se rabat sur la traite négrière à grande échelle, amplifiant la saignée du continent africain.</p>
<p>Grataloup se risque parfois à des uchronies. Parmi elles : des virus mortels auraient-ils pu traverser l’Atlantique dans l’autre sens ? Adaptés à une longue cohabitation avec beaucoup plus d’animaux d’élevage, les Eufrasiens avaient les probabilités pour eux… mais il n’aurait pas été impossible que nos ancêtres subissent une saignée symétrique à celle des Amérindiens.</p>
<h2>La domination européenne</h2>
<p>L’or et l’argent américain résolvent la crise monétaire européenne, on frôle même la surproduction. Parallèlement et grâce à ces ressources, le goût du sucre, du thé, du café, du tabac, du chocolat, se répand dans toute la société européenne, les besoins augmentent, justifiant la création des diverses Compagnies des Indes orientales. D’abord entreprises capitalistiques commerciales concurrentes destinées aux expéditions commerciales risquées, celles-ci finissent absorbées par leurs États respectifs, après avoir installé des ribambelles de comptoirs, devenus colonies ou protectorats. L’Europe exporte ses rivalités internes sur toute la planète. Colonies et protectorats changent de main, les guerres de la fin du règne de Louis XIV ont un impact sur tout le commerce mondial, et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Sept_Ans">Guerre de Sept Ans</a> est quasiment une guerre mondiale.</p>
<p>Enfin, l’accès des Européens à des territoires sans hiver leur permet de tenter de produire eux-mêmes ce qu’ils achetaient avant. Après les cultures de la canne à sucre, du café et du chocolat se déploie celle du coton en Amérique du Nord (toujours grâce à la traite), ce qui permet de ne plus acheter d’indiennes (le tissu indien). Le thé reste longtemps une denrée qu’il faut acheter cher à la Chine. Pour rééquilibrer les échanges, les Britanniques (d’abord, puis avec les Français) du XIX<sup>è</sup> siècle se font narcotrafiquants : ils imposent aux Chinois l’opium des Indes britanniques (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerres_de_l%27opium">Guerres de l’opium</a>).</p>
<h2>Révolutions</h2>
<p>Grataloup va jusqu’à suggérer que les nouvelles habitudes occidentales basées sur les productions tropicales ont alimenté la Révolution industrielle, qui a d’abord démarré par une meilleure alimentation : thé et chocolats sucrés représentent en effet quelques calories en plus. L’hévéa aussi en est un élément important.</p>
<p>La transition démographique commence en France, en partie grâce aux améliorations des routes au XVIII<sup>è</sup> siècle, éliminant les famines. Cumulant supériorité maritime, puis technologique et industrielle, et enfin démographique (¼ de la population mondiale en 1900), l’Europe impose son modèle d’États aux frontières délimitées, ce qui n’est pas une évidence partout. Surtout, les différents pôles européens créent chacun un Empire, d’un type nouveau puisqu’il associe une métropole dans le nord très éloignée de colonies, généralement tropicales. Certaines de ces colonies deviennent des États de culture européenne indépendants (États-Unis en premier lieu puis Australie, Afrique du Sud…).</p>
<p>La seconde vague de colonisation européenne au XIXè siècle tient plus de l’affrontement impérial qu’autre chose. Les nouvelles colonies, notamment africaines, ne rapportent pas autant qu’elles coûtent.</p>
<p>La domination européenne ne dure pas deux siècles. Le polycentrisme, qui a stimulé les découvertes et conquêtes, provoque le suicide de l’Europe dès 1914. Plus tard, le Tiers Monde reste centré sur ces régions tropicales tant convoitées par d’autres. La transition démographique rebat les cartes. Une autre géographie se met à influer sur les rapports de force dans le monde : celle du Carbonifère, dont nous brûlons les forêts fossilisées.</p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-G%C3%A9ohistoire-%C2%BB-de-Christian-Grataloup#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/877« L’odyssée des gènes » d’Évelyne Heyerurn:md5:4ad6250b8a59c8bd8d02356d1191698c2021-04-05T19:12:00+02:002021-04-05T18:13:04+02:00ChristopheGénéalogie & ancêtresAfriqueAmériqueAntiquitébase de donnéesChinecivilisationclimatcolonisationcomplexitéculturedémographieenfantsEuropeexaptationgénéalogiegéographiehistoirelyrismemobilitémytheperspectiveracismereligionsciencesociétés primitivestempsthéorieécologieémerveillementévolution<p>(Oui, enfin une chronique d'un livre récent !)
Depuis quelques années, l'étude génétique des fossiles a progressé à pas de géants, ainsi que celle des écarts entre deux populations actuelles. Évelyne Heyer résume l'état des connaissances de manière accessible et lisible.</p>
<p>Résumé subjectif (<em>commentaires personnels en italiques</em>) :</p> <p>Les gènes mutent en permanence. Par quelques passages peu techniques, Évelyne Heyer explique clairement de quelle manière on peut lister et exploiter les écarts afin de remonter aux ancêtres communs de deux populations, et estimer les transferts démographiques entre elles.
Chaque exemple de sa fresque historique est l’occasion d’illustrer un concept : dérive génétique dans les petits groupes isolés, possibilités offertes par les différents types de code génétique (mitochondrial, chromosomes X ou Y…) ; ou d'expliquer une technique ou difficulté : recherche d'ADN dans les os, dents, les bulbes de cheveux, difficultés de conservation dans certains sols… <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/L_Odyss%C3%A9e_des_g%C3%A8nes-%C3%89velyne_Heyer.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.L_Odyssée_des_gènes-Évelyne_Heyer_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>Un chercheur qui cherche des volontaires pour ses études dans des régions reculées peut avoir quelques surprises : la cordialité d'un administrateur quasi-soviétique d'Asie centrale, la surveillance du FSB ouzbekh, le blocage d'une région où est tombé un Soyouz, les frontières à passer en douce après avoir perdu un passeport, l'accueil et l'aide spontanés des nomades, les ravages de l'alcoolisme dans le Kouzbass, la musique hyper-sophistiquée des Pygmées, ou une véritable Vallée des Rois dans l'Altaï.</p>
<p><em>Depuis longtemps, je dévore tout ce qui est démographie dans </em>Pour la Science<em> ou </em>Science & Vie<em> ; je savais par exemple que les </em>Homo sapiens<em> non africains avaient rencontré Néandertal en arrivant au Moyen-Orient, et que leurs descendants, nous comme les Aborigènes d'Australie, avions gardé quelques pour cents de gène néandertaliens. Je savais aussi qu'à côté de Néandertal existaient au moins 2 ou 3 espèces comme Denisova, qui elles aussi nous ont légué quelques gènes. Je ne savais pas que la chronologie de l'histoire de l'humanité était aussi bien établie.</em> Résumé :</p>
<h4>−200 000 et −300 000 ans en Afrique : apparition de l'homme moderne</h4>
<p><em>Le livre n'en parle pas, mais cela se passe pendant l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Glaciation_de_Riss" hreflang="fr">avant-dernière glaciation</a></em>.</p>
<p>La limite entre <em>Homo erectus</em> et <em>Homo sapiens</em> est un peu floue.</p>
<h4>−120 000 ans : séparation des Khoe & San</h4>
<p>Leurs descendants sont les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/San_(peuple)" hreflang="fr">derniers chasseurs-cueilleurs du Kalahari</a>.</p>
<h4>−100 000 ans : <em>Homo sapiens</em> en Asie</h4>
<p>La Chine a été colonisée il y a plus de 100 000 ans. Par contre, ces premières vagues, et même les suivantes évoquées plus bas, y compris celle qui se croisera avec Denisova et ira en Australie, n'ont pas laissé de trace génétique.</p>
<h4>−70 000 ans au Moyen Orient : Sapiens rencontre Néandertal</h4>
<p>(<em>Donc pendant la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Glaciation_de_W%C3%BCrm" hreflang="fr">dernière glaciation</a>, entre −100 000 à −10 000 ans environ</em>).</p>
<p>La rencontre a commencé vers −70 000 ans. Il semble avoir suffi de 150 métissages laissant une descendance, dans quelques groupes sortis d'Afrique, de quelques milliers d'individus au total, pour expliquer la diffusion des gènes vers notre espèce. Les deux groupes manquaient-ils d'intérêt l'un pour l'autre, ou les hybrides étaient-ils généralement stériles ?</p>
<p>Se sont-ils rencontrés paisiblement et romantiquement, ou violemment ? Les gènes ne le disent pas, mais le chromosome X (masculin) semble peu touché par le métissage : peut-être les hommes métis étaient-ils plus facilement malades (ils n'ont pas de deuxième chromosome X, mais un Y), peut-être le croisement était-il asymétrique (cela se rencontre), avec une attirance entre femmes <em>Sapiens</em> et hommes de Néandertal, sans que le symétrique soit vrai.</p>
<p>Les métis sont donc les ancêtres des Européens, Asiatiques, Amérindiens… Quelques-uns sont manifestement retournés en Afrique, où l'on retrouve quelques traces génétiques de Néandertal.</p>
<p>Les Européens ont environ 2 % de gènes néandertaliens. Mais c'est très peu quand 99,87 % du génome est identique. Les Néandertals souffraient cependant de consanguinité, les premiers métis semblent en avoir pâti. Il n'est pas facile de savoir à quoi nous servent à présent les gènes restants. Certains sont liés au système immunitaire ou à la kératine, peut-être à la résistance au froid, car Néandertal était adapté au climat de l'Eurasie de l'époque glaciaire.</p>
<p>Bizarrement, des gènes <em>Sapiens</em> de l'époque, et disparus depuis, ont été retrouvés chez certains Néandertals. Le croisement a été à double sens.</p>
<h4>D'autres croisements, d'autres espèces</h4>
<p>Les croisements sont encore plus compliqués en Asie : des habitants de Nouvelle-Guinée ont hérité jusqu'à 6 % de gènes de Denisova, cousin de Neandertal, les Tibétains ont hérité de gènes d'adaptation à la haute altitude. Des preuves de métissage Denisova-Neandertal existent aussi.</p>
<p>En Afrique existent des traces de métissage de <em>Sapiens</em> avec d'autres espèces dont on ne sait rien. En Indonésie, pendant des centaines de milliers d'années, a existé un « homme de Florès », peut-être descendant d<em>'Homo erectus</em>, mais dont l'ADN reste inconnu (le sol tropical conserve mal les fossiles). L<em>'Homo luzonensis</em> est un cousin philippin datant d'autant moins 50 000 ans.</p>
<blockquote><p>« Cela fait finalement très peu de temps que nous sommes la seule espèce d'humains sur Terre. »</p></blockquote>
<h4>−60 000 ans : séparation des pygmées</h4>
<p>Pendant ces mélanges en Asie, les pygmées sont devenus un groupe à part, lui-même scindé en deux il y a 20 000 ans.</p>
<p>La raison de leur petite taille reste discutée : adaptation à la forêt, dérive génétique dans de petits groupes… Il y a plus de différences génétiques entre ces deux groupes pygmées, de même culture pourtant, qu'entre Européens et Asiatiques ! Ce qui d'ailleurs peut se généraliser à l'Afrique, puisque les non-Africains descendent tous d'un petit groupe, qui n'a emporté qu'une partie de la diversité génétique originelle de l'Afrique (même si elle a ajouté ses mutations, adaptations et métissages avec Neandertal et Denisova).</p>
<h4>−50 000 ans : colonisation de l'Australie</h4>
<p>Toujours pendant la dernière glaciation, le niveau bas des mers permet aux hommes en provenance d'Asie (métissés de Néandertal donc) d'arriver jusqu'en Australie. Les Aborigènes actuels sont les descendants directs de ces premiers colons. Dispersés en Asie, on trouve encore les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9gritos">Négritos</a>, qui seraient les descendants directs de ces anciennes populations.</p>
<p>Les fondateurs, même à cette époque, étaient forcément des marins, et assez nombreux, vu la diversité génétique des Aborigènes. Les populations du bloc Nouvelle-Guinée-Australie ont ensuite été séparées par les mers, les déserts, et, peut-être, leur système parental très complexe.</p>
<h4>−40 000 ans : <em>Homo sapiens</em> en Europe</h4>
<p>La génétique n'a pas modifié l'histoire déjà connue de Cro-Magnon et de ses voisins. Elle confirme une organisation en petites bande de chasseurs-cueilleurs, et des unions entre membres de bandes proches. Mais il est surprenant de retrouver le même phénomène que chez les Pygmées : une séparation génétique entre Est et Ouest de l'Europe malgré une proximité culturelle sur tout le continent.</p>
<p>Autre surprise : les Cro-Magnons et leurs voisins étaient plutôt noirs aux yeux bleus ! L'éclaircissement de leur peau a été très progressive, jusque pendant le Néolithique. Le problème est complexe : la peau claire est apparue plusieurs fois, avec des gènes différents, dans différentes populations dans le monde.</p>
<p>Les yeux bleus des Européens dateraient des débuts de colonisation. Les cheveux roux seraient apparus un peu avant. Ces caractères sans bénéfice évident ont pu se répandre par préférence sexuelle. (Autres exemples : les yeux bridés ou la barbe.)</p>
<h4>−40 000 ans : <em>Homo sapiens</em> en Asie</h4>
<p>On l'a vu, l'Asie était déjà colonisée. Les populations actuelles sont plus proches des Européens que des Australiens, et il doit s'agir de la même vague qui s'est séparé en deux branches, Europe et Asie. La frontière, floue, a permis des migrations entre elles. Le rôle de l'Asie centrale (source ou convergence) est flou : c'est un « mille-feuilles d'histoires de migrations », y compris aux temps historiques.</p>
<h4>−37 000 ans : disparition de Neandertal</h4>
<p>Parmi les innombrables causes possibles, de l'inadaptation au génocide par <em>Sapiens</em>, Évelyne Heyer en raye une : la consanguinité. Elle n'était pas forcément plus élevée chez les Néandertals que chez certains chasseurs-cueilleurs. Par contre, la diversité génétique était faible, et les Néandertals subissaient déjà une très lente décroissance démographique bien avant de rencontrer les <em>Sapiens</em>. Il n'est pas encore sûr que la consanguinité se soit renforcée ensuite, suite au morcellement du territoire.</p>
<h4>−15 000 ans : première découverte de l'Amérique</h4>
<p>Via le détroit de Béring ou les Aléoutiennes, comme il était déjà connu. Mais y a-t-il eu un peuplement plus ancien, par les côtes ou en dérivant depuis l'Afrique ? Les indices archéologiques sont ténus. Génétiquement, il n'en reste aucune trace.</p>
<h4>−10 000 ans : l'agriculture</h4>
<p>L'agriculture est apparue à peu près simultanément à plusieurs endroits de la planète.</p>
<p>(<em>Cela m'avait longtemps intrigué. J'avais compris qu'un assèchement avait conduit les populations à se regrouper autour des grands fleuves, par exemple. En fait, l'apparition de l'agriculture correspond à la fin de la glaciation et aux modifications climatiques qui ont eu un impact sur tout le globe.</em>)</p>
<p>L'explosion démographique a-t-elle suivi ou précédé l'apparition de l'agriculture ? Habituellement, on pose que la nourriture plus abondante a permis d'augmenter la population. Mais Heyer penche pour la seconde hypothèse. En effet, l'ADN permet de calculer le moment où l'effectif d'un groupe a fortement augmenté (la proportion d'ancêtres communs dans un petit groupe est plus grande), et les dates calculées sont nettement antérieures aux premières traces d'agriculture. Il a existé des populations non agricoles assez importantes pour laisser des grands monuments (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%B6bekli_Tepe" title="fr">Göbekli Tepe</a>) ou de premiers centres urbains (Jéricho). Le néolithique serait d'abord marqué par la démographie, qui a rendu nécessaire l'intensification de pratiques agricoles déjà embryonnaires chez des chasseurs-cueilleurs.</p>
<p>L'enchaînement causal reste très flou. On ne sait même pas si, au Moyen-Orient, il y a eu migration des convertis à l'agriculture ou diffusion culturelle auprès des chasseurs-cueilleurs. Par contre, il y a bien eu diffusion par des migrations vers l'est (Asie du Sud) et l'ouest (Europe).</p>
<p>Sont apparus en même temps que l'élevage et la démographie galopante : les caries, la malnutrition, des maladies contagieuses comme la rougeole, la tuberculose — pas forcément des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zoonose" hreflang="fr">zoonoses</a> d'ailleurs, même si celles-ci vont devenir fréquentes.</p>
<h4>−6000 ans : l'agriculture en Europe</h4>
<p>L'agriculture se répand en Europe par l'est, depuis l'Anatolie, et n'atteint la France que vers 5000 av. J.-C.</p>
<p>La « continuité génétique » n'est pas facile à établir, par manque de fossiles d'époque avec un ADN en bon état. On sait toutefois que les premiers agriculteurs européens descendent des migrants anatoliens, qui se sont mélangés ensuite aux anciens chasseurs-cueilleurs. Le mode de vie de ces derniers a disparu en quelques millénaires.</p>
<p>Il semble que les nouveaux venus aient apporté la peau claire en Europe, utile si la nourriture contient moins de vitamine D.</p>
<p>(<em>Si je suis bien, les blonds aux yeux bleus sont des métis de Cro-Magons noirs, pour les yeux, et d'Anatoliens pour la peau.</em>)</p>
<h4>Le lait</h4>
<p>Les premières traces d'utilisation du lait (faisselle, fromage) remontent à 6500 av. J.-C. en Anatolie ; un peu moins en Europe.</p>
<p>Normalement un mammifère adulte ne possède plus l'enzyme pour digérer du lait… sauf les humains descendants d'éleveurs. Cela dépend énormément des populations, et les Africains, Européens, Asiatiques concernés ne possèdent pas les mêmes mutations.</p>
<p>La pression de sélection sur un gène peut se mesurer, et elle a été importante pour propager ce caractère (existant, jusque là peu utile) dans certaines populations (Finlandais, Irlandais, Touaregs…), mais pas dans d'autres (Chinois, Amérindiens). Des techniques comme la fermentation du lait permettent de se passer de la mutation.</p>
<p>(<em>Certains disent carrément que le lait est un poison. C'est excessif, mais son utilité pour un adulte dépend donc surtout de ses ancêtres. Quant à l'alimentation paléolithique, quoi qu'elle ait pu être, nous n'y sommes plus adaptés.)</em></p>
<h4>Ötzi, Âge du Bronze et culture Yamnaya</h4>
<p>Vers 3300 ans av. J.-C., dans le Tyrol, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%96tzi">Ötzi</a> était assassiné dans des circonstances qui resteront à jamais obscures. Son génome est proche des… Sardes !</p>
<p>L'histoire génétique de l'Europe ne s'est pas arrêtée avec l'arrivée des cultivateurs anatoliens. Un groupe se répand entre 3000 et 1000 av. J.-C. (<em>en gros, pendant l'histoire de l'Égypte antique classique, de l'unification jusque la fin du Nouvel Empire</em>), provenant du nord de la Caspienne, identifié comme « culture <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_Yamna" hreflang="fr">Yamnaya</a> », nomade, inventeur du chariot à bœufs et des poteries en forme de cloche, entre autres, et a massivement influencé les génomes européens (et centre-asiatiques : leurs traces se retrouvent jusque dans l'Altaï).</p>
<p>(<em>Et ce ne sera pas la dernière invasion de nomades venus de ces steppes…</em>)</p>
<h4>L'Europe génétique actuelle</h4>
<p>5000 ans de guerres, invasions et acculturations diverses ne changèrent ensuite plus grand-chose : les gradients génétiques des Européens d'il y a un siècle (avant l'exode rural et les migrations massives du XXè siècle) suivent la géographie.</p>
<blockquote><p>« À tel point qu'à partir de l'ADN d'un individu contemporain, on peut retracer son origine à 500 km près. »</p></blockquote>
<p>Exceptions : les Basques, les Sardes, les Siciliens. Les Basques ne sont pas, comme on a pu le croire, un isolat des chasseurs-cueilleurs du Néolithique ; ils ont subi en gros les mêmes mélanges que les autres, mais seraient restés plus isolés depuis la fin de l'Âge du Bronze. Les Sardes par contre n'ont pas subi le dernier mélange, et restent proches des contemporains d'Ötzi. Les Étrusques ou les Minoens étaient peut-être aussi dans ce cas.</p>
<p>Et les Indo-Européens là-dedans ? Il n'y a pas forcément diffusion simultanée d'une langue et d'une population. Les langues indo-européennes ont conquis presque toute l'Europe, et au-delà (Hittites, Iraniens, certains Indiens…), et aucun scénario n'explique encore cela clairement.</p>
<h4>Le cheval & l'Asie centrale</h4>
<p>Dans les plaines kazakhs, vers 3000 ans av. J.-C. (<em>donc au moment où les Yamnayas conquièrent l'Europe et où les Égyptiens comment à penser aux pyramides</em>), le cheval est domestiqué. 1000 ans plus tard, depuis l'Oural, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_de_Sintachta" hreflang="fr">Sintashtas</a> (Yamnayas mâtinés d'Européens) se répandent vers l'Asie centrale, et laissent des traces génétiques jusqu'en Inde.</p>
<p>L'Asie centrale se dessèche peu après, poussant les peuples à devenir nomades ou éleveurs se mélangeant allègrement au fil des générations : la région devient encore plus un véritable patchwork génétique.</p>
<h4>Bantous & pygmées</h4>
<p>Toujours vers 3000 ans av. J.-C., en Afrique, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bantous" hreflang="fr">Bantous</a> (des agriculteurs) diffusent depuis le Cameroun dans toute la moitié sud de l'Afrique, et fragmentent le territoire des Pygmées (chasseurs-cueilleurs).</p>
<p>Les deux peuples cohabitent, avec prédominance des Bantous : les Pygmées ont adopté les langues de leurs voisins non Pygmées, et échangé des gènes régulièrement. Heyer a constaté que ces échanges se font surtout des non-
Pygmées vers les Pygmées. Explication : les femmes pygmées, bien que considérées comme inférieures, peuvent épouser des hommes bantous (pas l'inverse), mais finissent généralement par retourner avec leurs enfants dans leur village. La taille des descendants est directement liée au degré de métissage, car de nombreux gènes sont impliqués dans la taille des pygmées (et en aucun cas la malnutrition).</p>
<p>À cause de la rapidité de leur expansion, les Bantous sont relativement homogènes linguistiquement et génétiquement. On retrouve tout de même les traces génétiques des populations absorbées, notamment ce qui a trait à l'adaptation locale.</p>
<h4>1000 ans av. J.-C. en Océanie</h4>
<p>Au moment où les Bantous terminent leur expansion (<em>époque de Ramsès Ⅲ et de la Guerre de Troie</em>),
<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vanuatu#Peuplement_initial" hreflang="fr">Vanuatu</a> est atteinte par l'homme.</p>
<p>D'où venait-il ? Les habitants sont un mélange génétique de Nouvelle-Guinée et d'Asie du Sud-Est (plus précisément Taïwan, suggère l'archéologie). Les premiers habitants, par contre, ne seraient pas passés par la Nouvelle-Guinée, le mélange avec les Papous est ultérieur.</p>
<p>Il faut attendre l'an 1000 de notre ère pour que la Nouvelle-Zélande et Polynésie soit conquises, jusqu'à l'Île de Pâques.</p>
<h4>1000 ans av. J.-C. : les Scythes</h4>
<p>Les « barbares » <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Scythes" hreflang="fr">scythes</a>, de langue iranienne, très anciens nomades éleveurs de chevaux des steppes de la Hongrie à la Mongolie, étaient craints des anciens Grecs. Leur origine est un mystère.</p>
<p>La réponse d'Heyer : génétiquement, ils descendraient des Shintayas des steppes d'Asie, et non de celles du Caucase, et se seraient mélangés aux nombreuses populations rencontrées. La relative homogénéité culturelle n'est pas génétique.</p>
<h4>Endogamie</h4>
<p>Heyer a participé à une longue étude génético-linguistique en Ouzbékistan (pays ethniquement très mélangé) : la proximité linguistique est corrélée à la génétique, mais ce n'est pas systématique, et des phénomènes de remplacement linguistiques sont prouvés ici ou là. Les mariages s'y font préférentiellement entre gens culturellement proches, quitte à parcourir de grandes distances, d'où divergence génétique. Le phénomène se retrouve entre castes indiennes, entre catholiques et protestants néerlandais…</p>
<p>À <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Boukhara" hreflang="fr">Boukhara</a>, Heyer a constaté elle-même que les quelques familles <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Juifs_de_Boukhara" hreflang="fr">juives ouzbekhs</a> sont génétiquement proches de celles du Caucase (une histoire remontant à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nabuchodonosor_II" hreflang="fr">Nabuchodonosor</a>). Ils sont aussi moins mélangés avec leurs voisins et les communautés juives proches, que ne l'ont fait les Ashkénazes d'Europe, très métissés… à moins que la tradition orale ait oublié l'arrivée récente d'un groupe important.</p>
<p>L'endogamie totale reste cependant exceptionnelle.</p>
<h4>IXè siècle : les Vikings en Islande</h4>
<p>L'Islande, isolée, avec sa généalogie millénaire, est un paradis de généticien. Les études récentes montrent que les premiers colons étaient moitié Scandinaves, moitié Gaéliques. Ces derniers ont laissé moins de descendance, car sans doute socialement inférieurs (des esclaves ?). Les chromosomes X et Y montrent que l'ascendance scandinave est surtout paternelle, mais les lignées maternelles sont écossaises. Ne pas oublier que l'Irlande était déjà en partie viking.</p>
<p>Par son isolement et sa petite taille, la petite population islandaise a subi une dérive génétique qui la rend bien identifiable.</p>
<h4>De Gengis Khan aux Maoris</h4>
<p>Selon un article de 2003, le conquérant aux nombreuses épouses serait l'ancêtre de 10 % des hommes actuels de son ancien Empire (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_mongol" hreflang="fr">le plus grand de l'Histoire</a> avec le britannique). Plus rigoureusement, des variants génétiques sur le chromosome mâle Y, propres aux Mongols (pas forcément le Khan) remonteraient à cette époque. Ce n'est possible qu'avec un fort succès reproducteur sur plusieurs générations. Les groupes concernés sont fortement patrilinéaires, et leurs généalogies officielles ne sont pas que mythiques, mais recoupent bien la génétique. Le statut social et la capacité à avoir beaucoup d'enfants s'héritent par les pères. Les hommes ont alors tendance à partager des Y proches. Le phénomène se retrouve même dans les sociétés patrilinéaires moins strictes, comme l'Occident actuel.</p>
<p>Le phénomène se retrouve ailleurs et même, inversé, chez les Maoris, et plus généralement chez les chasseurs-cueilleurs, où l'ADN mitochondrial montre que le succès reproductif des femmes se transmet aux filles. Les raisons sociales sont nombreuses.</p>
<p>On peut donc détecter le système de parenté de civilisations par leurs gènes. Les haplogroupes peuvent être datés (comme l'a été celui de Gengis Khan). En Eurasie, la patrilinéarité aurait émergé pendant l'âge du Bronze (1000 à 2000 av. J.-C.).</p>
<p>Les études d'Heyer au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Touva" hreflang="fr">Touva</a> et en Mongolie retrouvent la patrilinéarité, mais aussi sa conséquence : les femmes ont beaucoup plus la bougeotte que les hommes. Ce phénomène concerne les ⅔ de l'humanité, mais pas toute l'espèce. Pourquoi sommes-nous le seul grand singe à varier les modes sociaux ?</p>
<h4>Les esclaves africains</h4>
<p>Il n'y a bien sûr pas d'archive de la provenance exacte des esclaves africains déportés aux Amériques. Les informations issues de l'ADN s'affinent au fur et à mesure que les bases de données s'enrichissent. Les Afro-Américains viendraient d'Afrique Centrale et de l'Ouest. Les esclaves ont retransmis quelques pour cent de gènes pygmées.</p>
<p>S'y ajoutent généralement des gènes européens, dans des proportions très variables selon les individus (y compris 95 %, puisque la règle locale veut qu'une goutte de sang noir fasse de vous un Noir...). Même des suprémacistes blancs possèdent des gènes noirs : la couleur de peau n'est pas un indicateur très fiable, et peut simplement ne pas avoir été sélectionnée.</p>
<p>Le chromosome Y (mâle) est souvent européen, alors que l'ADN mitochondrial (féminin) est généralement africain, alors que les esclaves étaient surtout des hommes ! Cela se voit aussi en Amérique du Sud (chromosome Y européen, mitochondries amérindiennes), là aussi dans des proportions très variables : les colons prenaient femme (au mieux) sur place. Chaque région d'Amérique a son histoire marquée par la disparition plus ou moins complète des Amérindiens, l'arrivée des Européens et des esclaves africains (pas partout), les taux de mélange, le degré d'isolement, les déportations, les maladies importées d'Europe ou d'Afrique…</p>
<h4>Le Québec & l'effet fondateur</h4>
<p>Comme l'Islande, le Québec est un paradis pour généticiens. La population, longtemps faible, a explosé, les mouvements de population sont documentés, et les archives généalogiques sont complètes.</p>
<p>Comme les hivers rigoureux limitent les maladies, les familles nombreuses y deviennent la norme. Les quelques milliers d'aventuriers et d'orphelines sous Louis XIV sont 70 000 un siècle après, quand la colonie devient britannique. Les colons suivants sont exclusivement britanniques et ne se mélangent pas aux francophones. L'Église catholique lance alors la « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Revanche_des_berceaux" hreflang="fr">guerre des berceaux</a> » : la natalité reste très élevée que dans les années 1960.</p>
<p>La description de l'exploitation à grande échelle des registres paroissiaux est passionnante. Une motivation : les maladies génétiques propres aux Québécois, à priori une conséquence de la consanguinité. Surprise : les populations victimes ne sont pas plus consanguines que les autres !</p>
<p>Il est parfois possible de remonter à <em>la</em> personne ayant importé la mutation au Québec au XVIIe siècle. Quelques dizaines de personnes sont ancêtres de <em>toute</em> une région, voire d'une bonne partie des Québécois francophones !
En théorie, au bout de 10 générations, un individu représente ½¹⁰ ~ 0,1 % du patrimoine de ses descendants (et en pratique, souvent absolument rien), mais ce sera beaucoup plus s'il se retrouve plusieurs fois dans l'arbre d'une personne. Les mutations portées par l'ancêtre finissent donc par avoir une grande fréquence dans la population. À l'inverse, certaines maladies génétiques de France sont absentes du Québec. C'est l'« effet fondateur ».</p>
<p>Ce n'était pas vraiment une découverte, mais Heyer a été surprise de l'ampleur de l'effet en si peu de générations pour une population devenue importante. L'effet a été amplifié par celui des « enfants utiles » : ceux qui meurent jeunes , ou partent, sont neutres quant à l'évolution d'une population donnée. Par exemple, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Saguenay%E2%80%93Lac-Saint-Jean" hreflang="fr">Sagueney-Lac-Saint-Jean</a> était un front pionnier, il y avait de la place, et les enfants de familles nombreuses restaient facilement dans la région.</p>
<p>Heyer donne un autre exemple en France : une vallée du Jura possédant sa maladie génétique endémique létale. Les malades portent la même mutation, et il n'y a pas d'ancêtre commun récent (XVIIIe siècle). Il fallait expliquer une persistance aussi longue, malgré la sélection naturelle, dans une population réduite et pas isolée. La cause s'est avérée sociologique : les habitants les plus ancrés, propriétaires des terres, avaient plus d'enfants et formaient une sorte de noyau stable ; les arrivants, sans terres, avaient tendance à repartir après une ou deux générations.</p>
<h4>Généalogie génétique</h4>
<p>Après 40 générations, la plupart des Français descendent sans doute de Charlemagne : la population de l'époque est très inférieure à celle de nos ancêtres potentiels s'ils étaient tous différents. De plus, une part notable n'a pas laissé de descendance jusqu'à nos jours : des branches peuvent s'éteindre relativement rapidement, mais d'autres personnes ont de nombreux descendants. Cela se calcule, et à supposer qu'il y ait quelques migrations à longues distances de temps à autre :</p>
<blockquote><p>« En Europe, tous nos ancêtres communs ont vécu il y a a entre 1 200 et 2 000 ans environ : tout individu (…) qui a laissé au moins un descendant jusqu'à nos jours est l'ancêtre de tous les individus actuels. »</p></blockquote>
<blockquote><p>« Le premier ancêtre généalogique commun à toute l'humanité daterait de seulement 3 000 ans. »</p></blockquote>
<blockquote><p>« Il y a à peine 5 000 ans, nous avions tous les mêmes ancêtres ! »</p></blockquote>
<p>Et parmi les habitants de cette époque, 60-80 % ont encore des descendants, donc :</p>
<blockquote><p>« Si vous entriez dans un village ou une cité d'il y a 5 000 ans, la plupart des personnes que vous croiseriez seraient les ancêtres communs à toute l'humanité. »</p></blockquote>
<p>(<em>Ce qui veut quasiment dire, cher lecteur, qui que tu sois, que les pyramides ont sans doute été construites par nos ancêtres communs ; et que nous descendons tous des premiers pharaons ou de Gilgamesh, de Papous, de Pygmées, de Maoris et de Sibériens. D'un côté, j'ai du mal à croire qu'en si peu de temps des Amérindiens de 3000 av. J.-C. aient pu transmettre leurs gènes à toute l'Eurasie, vu que les contacts étaient à peu près coupés jusqu'aux grandes explorations. D' un autre côté, pour un <a href="https://www.histoire-pour-tous.fr/dossiers/5313-vikings-decouvrent-ameriques.html" hreflang="fr">Leif Erikson</a> ou une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pocahontas" hreflang="fr">Pocahontas</a> qui ont laissé une trace dans la grande Histoire, combien d'aventuriers, de nomades, de bannis, de pirates violeurs, ou d'esclaves razziés très loin de chez eux ?</em>)</p>
<p>Les tests ADN sont à la mode, surtout aux USA. Les bases de données existantes sont un problème de vie privée, car notre ADN est commun avec nos parents. Y fouiller permet de débusquer des criminels, mais aussi de révéler des secrets de famille. Quant aux tests d'origine, ils ne possèdent aucune rigueur. Or l'extrême-droite américaine a tendance à les utiliser.</p>
<p>Paradoxalement, nos ADN sont très similaires, mais les différences permettent de désigner des populations distinctes (restées dans un même endroit et se mariant avec ses proches voisins). Quant à en déduire des « races », c'est illusoire : des populations très différentes peuvent posséder un même caractère (cas des maladies génétiques) ; si un caractère est précis, il ne concerne qu'un tout petit groupe (ex : l'adaptation à l'altitude des Tibétains). La notion n'est même pas fonctionnelle en médecine, et ne recouvrirait même pas les notions historiques et sociales. Évidemment, ceux qui parlent de races en arrivent très vite à les hiérarchiser, à réduire un individu à sa race (essentialisme), à oublier tous les aspects culturels, sociaux et environnementaux, en aucun cas liés aux gènes, voire qui les déterminent. On connaît les conséquences.</p>
<p>Si un humain ne semble pas spontanément raciste, il serait volontiers ethnocentriste, et privilégie naturellement son groupe, même non apparenté, tout en étant assez ouvert à l'étranger. L'essentialisme en fait un raciste.</p>
<h4>Les migrants</h4>
<p>250 millions de migrants en 2015, dit l'ONU. La plupart migrent à des distances très variables, généralement entre pays du Sud, et ce ne sont pas forcément les plus pauvres qui migrent, et pas forcément vers des États en dépression démographique. Aujourd'hui encore, 95 % des gens restent dans leur pays de naissance.</p>
<p>Dans le passé, les migrants ont toujours fini par se mélanger aux occupants précédents, à quelques quasi-génocides près (États-Unis). Le « taux de mélange » est très élevé dans nos sociétés, et quasi-total en 3 générations. En France, le mélange est la norme, mais il est beaucoup plus lent aux États-Unis. Au sein d'une même région du monde, l'endogamie est très variable, variant parfois d'une famille à l'autre. Si les femmes bougent plus (patriarcat oblige), les hommes qui quittent leur village vont plus loin. Un Californien aux yeux bleus bridés et à la peau sombre conclut le chapitre : l'allongement des distances va conduire à des brassages plus variés et des phénotypes nouveaux.</p>
<h4>Nos descendants</h4>
<p>La sélection naturelle ne nous changera pas en quelques siècles (<em>modulo cataclysme</em>). Le petit doigt de pied est inutile, il pourrait disparaître sans souci (comme nos queues autrefois), mais il faut une mutation, qui ne se diffusera que très lentement puisqu'il n'y a aucune pression de sélection dessus.</p>
<p>Si sélection il y a encore, elle est soit liée aux polluants (impact sur la fertilité de certains hommes, par exemple), et dans ce cas sans doute peu durable, ou variable ; soit à la sélection sexuelle, lors du choix du conjoint, les exemples étant des caractères visibles, en premier lieu la taille. L'exemple est développé : la taille est fortement héréditaire, mais son augmentation rapide au XXè siècle montre que le milieu a aussi un rôle majeur. Un plafond (génétique) semble atteint dans certains pays (Suède), d'autres populations grandissent ailleurs sans pouvoir espérer grandir autant. Par contre, la diversité génétique semble favoriser les plus grandes tailles, les divers mélanges génétiques vont donc jouer un rôle. (Surtout que nous serions inconsciemment plus attirés par des gens au système HLA différent du nôtre ! (<em>donc sans que l'apparence physique joue un rôle</em>))</p>
<p>Pour compliquer les choses, il y a l'épigénétique, c'est-à-dire l'expression des gènes (version amoindrie de l'hérédité des caractères acquis). Typiquement, une disette peut avoir un impact sur les quelques générations suivantes, pas plus loin. À l'inverse, l'augmentation de la taille peut bénéficier de cet effet, dans le bon sens.</p>
<p>La population humaine est gigantesque, et un caractère se propage lentement, et son environnement varie beaucoup plus vite que la sélection naturelle : impossible de savoir comment nous évoluerons — jusqu'à ce que nous isolions une petite population sur une planète. (<em>D'ailleurs, tous les films de science-fiction non immédiate me semblent faux à cause de cela : la population de Mars ou Cérès, après quelques générations, sera aussi diverse que l'équipage de Star Trek, mais ne ressemblera à aucun phénotype actuel.</em>)</p>
<h4>L'espérance de vie</h4>
<p>Quant à l'espérance de vie, son envolée en deux siècles tient à la réduction de la mortalité infantile et une meilleure hygiène de vie. Elle plafonne voire recule dans certains pays pour des raisons sociales (sida en Afrique, vodka en Russie, obésité aux États-Unis…). Une augmentation tiendrait à présent à la prolongation de la vie des personnes âgées (marginalement) ou simplement… l'amélioration de l'intégration sociale des moins favorisés ! Il ne semble pas y avoir de gène des centenaires. L'espérance de vie en bonne santé est une autre voie où progresser encore, mais le calcul est très délicat.</p>
<h4>Transition démographique</h4>
<p>(<em>On m'en parlait déjà au collège, je trouve fascinant de la voir se réaliser.</em>) L'augmentation de la population tient au délai entre diminution de la mortalité et diminution de la natalité (plus court en France qu'en Angleterre, d'où des augmentations de population différentes au XIXè siècle). L'Amérique latine, l'Iran… sont en train de terminer leur transition démographique. L'Afrique est très hétérogène sur ce point. Les pays industrialisés sont souvent tombés à 1 enfant/femme (Japon, Allemagne, Pologne…).</p>
<p>Parallèlement l'espérance de vie grimpe, la population mondiale continue de grimper. Le pic serait entre 9 et 11 milliards entre 2050 et 2100… si la transition se réalise partout. Après les révolutions néolithique et industrielle, quel sera l'impact d'une transition écologique ?</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-odyss%C3%A9e-des-g%C3%A8nes-d-%C3%89velyne-Heyer#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/859« Comment l'Empire romain s'est effondré » de Kyle Harper : climat, maladie et chute de Romeurn:md5:4f899faacaf05ab1676fc0a7561ba6062020-02-08T19:36:00+01:002020-12-06T22:46:13+01:00ChristopheHistoireadministrationAntiquitéapocalypseargentauto-organisationByzancecataclysmecatastrophechaoschristianismecivilisationclimatcommunicationdommagedysfonctionnementdécadencedémographiedéterminismeeauEmpire romainFrancsGrandes InvasionsgéographiegéologiegéopolitiquehistoireimpérialismeIndemortMoyen ÂgemulticulturalismeMérovingiensnatureorganisationperspectivepessimismereligionsociétés primitivestempsuchronievolcansécologieéconomie<p>Les causes et le processus de la chute de Rome font débat depuis des siècles, et les théories ne manquent pas. Le livre de Kyle Harper s'étend de l'apogée de l'Empire (milieu du IIè siècle sous <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Marc_Aur%C3%A8le" hreflang="fr" title="Marc Aurèle">Marc Aurèle</a>) à l'effondrement des Byzantins devant l'Islam conquérant. Kyle Harper, se fondant sur les recherches pluridisciplinaires de ces dernières années, insiste sur deux facteurs qui n'expliquent peut-être pas tout, mais beaucoup de choses : le climat, et les maladies. Finalement, on s'étonne que cet Empire ait tenu aussi longtemps.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Kyle_Harper_Comment_l_Empire_romain_s_est_effondre.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Kyle_Harper_Comment_l_Empire_romain_s_est_effondre_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>(<em>Comme d'habitude, les commentaires personnels sont en italique</em> ; le reste est prise de notes de ce dont je veux me souvenir.)</p>
<p>Kyle Harper est professeur à l'université d'Oklahoma. Le titre original <em><a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691166834/the-fate-of-rome" hreflang="en">The Fate of Rome</a></em> contredit un peu le propos, qui est, justement, que l'Empire romain a remarquablement tenu pendant le demi-millénaire couvert par le livre, malgré une suite de catastrophes sanitaires et la dégradation du climat,. La chute de Rome n'a rien eu d'un phénomène régulier. Après les pertes effroyables de la Peste antonine sous Marc Aurèle, la démographie et le commerce se rétablirent. Après la Peste de Cyprien, l'Empire fut envahi et sombra dans le chaos pendant une génération (crise du IIIè siècle), mais les Empereurs-soldats danubiens reprirent les choses en main, et tout semblait aller pour le mieux quand déferlèrent les Huns. Une fois l'Empire d'Occident dépecé, celui d'Orient partit à la reconquête, mais son élan fut brisé par l'apparition de la Peste, dont il ne se releva pas, facilitant la conquête arabe. Le reste ne fut qu'une agonie s'étalant sur des siècles, avec quelques hauts et beaucoup de bas (voir tous les détails dans d'anciens billets sur l'Empire byzantin : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/25/11-byzance-i-formation-invasions">formation</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/26/19-byzance-ii-de-l-apogee-justinienne-a-la-castastrophe">apogée justinienne & catastrophe</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/27/21-byzance-iii-nouveau-redressement-et-agonie">nouveau redressement & agonie</a>).</p> <p>L'Empire qu'Auguste avait fondé devait compter de l'ordre de 70-75 millions d'habitants sous Marc Aurèle. Évidemment, tout ce qui ressort de la démographie de cette époque ne peut être qu'évalué indirectement : les sources précises ne sont généralement que locale, et si Rome comptait 1 million d'âmes et n'était pas la seule métropole, l'essentiel de la population restait paysanne. La paix, une certaine stabilité grâce à l'assimilation des élites locales, des routes commerciales sûres, le fameux génie civil romain, évitaient les famines généralisée. L'approvisionnement restait bon : Rome ne s'écroula pas sous la surpopulation. Par contre, l'hygiène était ignorée, et les habitants des villes devaient être victimes en permanence de maladies contagieuses, notamment oro-fécales, du paludisme... Le poids du bouillon de culture permanent se lit dans les squelettes, plus petits qu'avant et après l'Empire. En conséquence, mortalité infantile élevée et espérance de vie faibles ne pouvaient être compensés que par une natalité élevée.</p>
<p>Quoiqu'il en soit, cette population crût globalement pendant les deux premiers siècles après l’avènement d'Auguste, profitant d'un optimum climatique et de conditions plus favorables qu'actuellement. En conséquence, l'armée ne manquait pas de recrues, et les impôts permettaient de la payer : les frontières étaient tenues.</p>
<p>Des villes surpeuplées, un bouillon de culture permanent, des communications pas très rapides mais internationales, des armées en déplacement : c'est un environnement idéal pour une maladie infectieuse. En 165, au sortir d'une guerre victorieuse contre la Perse, apparut la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_antonine" hreflang="fr">Peste antonine</a>, qui ravagea l'Empire depuis le Moyen Orient jusqu'à la Gaule. En suivant le témoignage de Galien, entre autres, Harper finit par l'associer à la variole, apparemment inconnue des médecins romains. (Une leçon au passage : si la vaccination a éradiqué la variole il y a peu, des réservoirs animaux de virus voisins existent toujours…) Pour Harper, les virus antiques n'étaient pas que ceux que l'humanité connaissait depuis le Néolithique ou avant, et notre époque n'a pas l'exclusivité des maladies émergentes : la nature n'arrête pas de nous jouer des tours.</p>
<p>Les pertes, peut-être 20 % de la population, effacèrent les gains démographiques depuis Auguste, mais la civilisation tint bon, les structures étatiques et commerciales subsistèrent, les frontière tinrent. Une conséquence fut le regain de religiosité, au profit du culte d'Apollon le guérisseur : même habitués aux épidémies, les Romains restèrent frappés par celle-ci.</p>
<p>L'Empire continua tant bien que mal, intégrant de plus en plus les élites des populations périphériques à son fonctionnement. Caracalla fit de tous les hommes libres de l'Empire des citoyens. Malgré les virus, la population effaça peu à peu les pertes. Mais, variabilité solaire aidant, l'optimum climatique méditerranéen, son humidité atypique, ses événements El Niño rares, était passés, le climat était plus sec. Il semble que les crues du Nil aient été moins hautes.</p>
<p>La « Peste de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cyprien_de_Carthage" hreflang="fr">Cyprien</a> » frappa de 249 à 262, juste après la célébration du millénaire de Rome. Il est difficile de savoir quelle était précisément l'agent. Harper penche pour un filovirus, du genre d'Ebola. Les conséquences furent funestes pour l'Empire : l'effondrement démographique et commercial, puis bancaire et fiscal rendit l'armée impuissante face à des attaques simultanées sur toutes les frontières. Les Perses occupèrent la Syrie, les Goths passèrent le Danube et descendirent en Grèce, Francs et Alamans se répandirent en Gaule, même l'Italie fut touchée. Des provinces firent sécession (Palmyre avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Septimia_Bathzabbai_Z%C3%A9nobie" hreflang="fr">Zénobie</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_des_Gaules" hreflang="fr">Empire des Gaules</a>), et les Empereurs connaissaient tous une mort violente : la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_du_troisi%C3%A8me_si%C3%A8cle" hreflang="fr">crise du IIIè siècle</a> dura 20 ans.</p>
<p>L'Empereur Aurélien redressa la situation et réunifia l'Empire. Comme bien d'autres après lui (jusqu'à Justinien) il provenait des zones frontières très militarisée du Danube. Les modifications structurelles furent nombreuses : élites sénatoriales écartées du pouvoir militaire, prédominance du rôle de l'armée (avec le besoin impérieux de la solder), villes de l'intérieur à nouveau fortifiées et plus petites qu'auparavant, recrutement militaire plus difficile, peuples barbares fédérés pour garder les frontières à la place de soldats trop rares, dont une partie accédera aux plus hautes places dans l'Empire.</p>
<p>Les religions antiques, faillies, ne se relevèrent pas de l'épidémie, elles furent supplantées par de nouvelles. Aurélien adorait le Sol Invictus, et les Chrétiens sortirent de la marginalité — à la grande horreur de ceux qui les accusaient d'être responsables des catastrophes en refusant de sacrifier aux dieux ; d'ailleurs, en prônant la compassion, et donc les soins aux malades, la maladie les frappaient moins violemment...</p>
<p>L'Empire survécut donc une fois encore, et l'Antiquité tardive commença. Le climat du IVè siècle entrait dans un cycle assez favorable mais inconstant, et la récupération dépendit beaucoup des provinces. La population continuait de subir les épidémies habituelles autant, sinon plus, que dans les siècles précédents. Par exemple, le climat instable et les disettes entraînaient un exode vers les villes, bouillon de culture fatal à bien des nouveaux arrivants.
Mais on ne relève pas de pandémie.</p>
<p>Pendant les années 300, la civilisation romaine subit d'innombrables transformations, de la christianisation à la centralisation, et à l'amorce de la séparation en deux ensembles distincts. Rome n'était plus depuis longtemps la résidence du pouvoir, l'Empereur étant souvent aux frontières, comme à Trèves. En conséquence, Constantinople était situé parfaitement entre les deux principales menaces, sur le Danube et sur l'Euphrate.</p>
<p>Selon le scénario d'Harper, les évolutions climatiques continuèrent de créer de nouvelles menaces pour Rome. La première, l'assèchement des steppes asiatiques, provoqua la migration des Huns (véritables réfugiés climatiques !) et par ricochet le déplacement des Ostrogoths, puis Wisigoths, peuple fédéré qui demanda l'asile à Constantinople. Accueillir en-deça du Danube un peuple qui guerroierait pour lui semblait d'abord une aubaine pour l'Empire, mais l'incompétence romaine mena à leur révolte, une guerre ouverte, et la pire défaite romaine depuis Hannibal à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d%27Andrinople_(378)" hreflang="fr">Andrinople en 378</a>. Leur soumission par Théodose ne fut que partielle.</p>
<p>Ce ne fut que le premier coup de boutoir. L'armée de l'Antiquité tardive n'était plus celle des siècles précédents, faute de volontaires, pas seulement pour des raisons démographiques. Elle comptait pourtant un demi-million d'hommes qui auraient dû tenir le choc — si Orient et Occident était arrivés à s'entendre. Les Wisigoths déjà installés se rebellèrent ; d'autres arrivèrent de l'extérieur, notamment lors de la fameuse traversée du Rhin en 406. Il ne s'agissait pas de raids mais de migration de peuples sous la pression des Huns. Quand en 410 les Goths d'Alaric firent le siège de Rome pour rançonner l'Empire, puis pillèrent la ville, un symbole tomba. Incapable de conserver sa coordination avec l'invasion ou la sécession de ses provinces, l'Empire d'Occident ne put reprendre la main ni se défendre dans les années suivantes contre les attaques des Huns d'Attila. L'Empire d'Orient dut y faire face également dans les Balkans. Ironiquement, les maladies locales qui avaient tué tant de Romains brisèrent parfois l'élan d'envahisseurs peu protégés contre le paludisme ou les bouillons de culture des villes.</p>
<p>L'Empire d'Occident n'était plus (officiellement en 476), chose facile à tracer dans les constructions de <em>villae</em>, la disparition des flux commerciaux ou l'effondrement de la population des villes. En ville, la saisonnalité des décès change : autrefois, nombre d'adultes, immigrés de fraîche date, tombaient en masse l'été, victimes des virus locaux ; ceux-ci semble disparaître. Économiquement, une entité surnage : l'Église.</p>
<p>L'Empire d'Orient, lui, était sorti à peu près intact de l'épreuve, encore politiquement stable, riche de son commerce, de ses métropoles Constantinople, Alexandrie, Antioche... À partir de 527, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Justinien" hreflang="fr">Justinien</a>, Empereur énergique, entama de grandes réformes, bâtit beaucoup, fit la paix avec la Perse, lança ses troupes à la reconquête de l'Afrique puis de l'Espagne, de l'Italie. Tout semblait alors lui sourire, quand la nature frappa.</p>
<p>Alors qu'après 450 avait commencé un « petit âge glaciaire de l'Antiquité tardive » (jusque 700), en 535 commença une série d'éruptions volcaniques (en 2005, j'avais rapporté ici un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/11/03/23-le-krakatoa-et-l-histoire-du-monde" hreflang="fr">documentaire accusant le Krakatoa des malheurs des Byzantins</a>). Partout 536 fut l'« année sans été », et les décennies 530 et 540 furent les années les plus froides depuis des siècles.</p>
<p>Pendant le IIIè siècle le commerce avait allègrement repris, ainsi que le crédit bancaire, permettant des échanges lointains, jusqu'en Inde et en Orient : j'ai appris que la Route de la Soie (et du poivre) passait aussi par la Mer Rouge et l'Océan Indien. Constantinople en profitait encore sous Justinien. Le cataclysme suivant provint probablement de là : en 541, Péluse, en Égypte, est la première ville touchée par la peste.</p>
<p>L'ADN a montré que la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_de_Justinien" hreflang="fr">Peste justinienne</a> de 541-543 a été provoquée par le bacille <em>Yersinia pestis</em>. Il allait saper la démographie de l'Europe pour deux siècles, avant de revenir frapper à la fin du Moyen Âge (Peste noire du XIVè siècle), et régulièrement jusqu'au XIXè siècle. La bactérie parasite des puces, elles-mêmes parasites de rongeurs, et en premier lieu les rats noirs. L'Empire romain était pour eux un pays de cocagne : des villes et des réserves de grains partout pour soutenir une natalité galopante, de nombreuses voies de communications sur terre et mer pour se répandre partout. Certes, le virus et les puces ne s'attaquent que faute de mieux aux humains (et à d'autres espèces qui ont pu servir de vecteur) ; mais une fois les rats eux-mêmes décimés, la promiscuité de l'époque favorisait la transmission des puces et des virus. Pourtant, le rat noir était bien connu des Romains. Mais le climat du VIè siècle plus froid a pu favoriser la végétation, l'explosion des populations de rongeur, favoriser la diffusion du virus.</p>
<p>Si la peste avait déjà frappé localement dans la passé dans des variantes moins virulentes, la peste de Justinien valait bien la Peste noire. De plus la population romaine était affaiblie par les problèmes climatiques et son lot de virus habituel. Résultat : un taux de mortalité de 80 % et la disparition de peut-être 50 % de la population. La peste dépeupla Constantinople et Alexandrie, frappa jusqu'en Bretagne et en Bavière, épargna sans doute plus les zones désertiques (Maures, Arabie...) et les nomades. Faute de bras, on ne récolte plus, la famine s'installe. Suite à la dépopulation, le cours du blé s'effondre et le système bancaire aussi, puis les finances de l'Empire.</p>
<p>Justinien se maintint mais l'élan était brisé. La Peste revint régulièrement dans les décennies suivantes dans toute la Méditerranée, jusqu'après la conquête arabe, à chaque fois violemment, profitant des flux commerciaux. Partout l'archéologie indique une population en décroissance et une économie anémiée sur le long terme. Une bonne crue du Nil provoqua des inondations dans le delta, faute de bras en amont pour gérer l'irrigation. Justinien ne put qu'à grand peine contenir les Avars (eux-mêmes réfugiés climatiques selon le documentaire susnommé ?). Tout autour de la Méditerranée l'économie des divers États périclitait et la population des villes descendit à des niveaux ridicules. En Italie, le royaume ostrogoth reprenait la route de la prospérité, mais l'attaque des Byzantins et la peste entraînèrent l'effondrement des restes de la civilisation romaine. Les nouveaux États qui se formeraient, comme l'Empire franc, seraient plus continentaux.</p>
<p>Les années suivantes, l'Empire romain d'Orient épuisé, toujours à la recherche d'argent et de soldats, dut poursuivre sa guerre inexpiable contre les Perses, et perdit du terrain dans les Balkans et en Italie.</p>
<p>Le coup de bambou final fut religieux. Comme pour les crises précédentes, la crise climatique, la peste, l'effondrement de la civilisation, provoquèrent une poussée de croyances apocalyptiques. Le pape Grégoire le Grand pensait la fin du monde proche. Les Chrétiens n'étaient pas les seuls touchés, au contraire, et le thème est majeur dans l'Islam, apparu au VIIè siècle. Les Arabes profitèrent de la guerre qui épuisait les Perses et les Byzantins pour s'attaquer aux deux, et en peu d'années les Romains perdirent Égypte et Orient, ne sauvant leur capitale que de justesse.</p>
<p>Kyle Harper arrête là son histoire. L'Empire romain d'Orient, réduit à un bout de Grèce, romain uniquement que de nom à présent, ne disparut formellement qu'en 1453. Il eut entretemps quelques belles années (par exemple <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/27/21-byzance-iii-nouveau-redressement-et-agonie">vers l'an 1000</a>). Peut-être aurait-il pu survivre jusqu'à nous sous une forme ou une autre.</p>
<p>Sur le fond, rigoureusement, je ne suis pas qualifié pour juger de la pertinence. Il y a eu de nombreuses théories sur la fin de l'Empire romain, celle-ci a le mérite de s'appuyer sur les dernières recherches scientifiques en démographie antique, climatologie, biologie... Je trouve parfaitement plausible qu'une civilisation urbaine, ignorante des règles de base de l'hygiène, paie un tribu effroyable aux maladies. Basée sur l'agriculture, elle était forcément soumise aux caprices du ciel, lequel s'est détérioré pendant cette période. Et de tout temps, faute de rentrées fiscales, les limites de l'organisation d'un État apparaissent de manière fragrante, et il peut difficilement contenir le chaos social ou les agressions extérieures. L'impact du climat a joué un rôle dans la Révolution française, peut-être en Syrie récemment.</p>
<p>Il n'y a pas de déterminisme là-dedans. L'Empire a réagi différemment à trois épidémies massives en quatre siècles, et Harper montre bien ce qui a résisté et les évolutions sociales en conséquence. Au bout d'un certain temps, épidémies, climat, menaces extérieures et problèmes intérieurs se conjuguent, « les étoiles s'alignent », les problèmes s'accumulent jusqu'à la rupture — mais changer un des facteurs aurait pu modifier la donne.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Comment-l-Empire-romain-s-est-effondr%C3%A9-%C2%BB-de-Kyle-Harper-%3A-climat%2C-maladie-et-chute-de-Rome#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/856« Guerres & Histoire » n° 32 d’août 2016 : l’armée invincible d’Alexandre le Grandurn:md5:effea9c5e805582f883f07253649f26b2016-09-13T00:00:00+02:002020-02-08T18:02:38+01:00ChristopheHistoireAntiquitébon sensEmpire romainguerrehistoireimpérialismenationalismeoptimisationperspectiveraclée<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerresEtHistoire_32.jpg" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) "> <img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerresEtHistoire_32_s.jpg" alt="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " /> </a> C’est le dossier principal de ce numéro. J’ai traité les autres thèmes dans le billet précédent. <em>Commentaires perso en italique.</em></p>
<p>D’un pays quasiment barbare, il a fait la première puissance mondiale de son époque : d’où vient le succès d’Alexandre le Grand ? Notes :</p> <h3>La Macédoine</h3>
<p>La Macédoine, à la limite de la culture grecque mais sous-développée, possédait d’<strong>abondantes ressources naturelles</strong> (dont des pâturages pour les chevaux)... et <strong>humaines</strong>.</p>
<p>L’armée macédonienne était celle d’un <strong>peuple en armes</strong>, sans mercenaires, manifestement avec aussi des professionnels, avec une bonne cavalerie noble. Plus tard, Alexandre utilise le nationalisme grec pour les unir contre les Perses (et châtie les mercenaires grecs rencontrés en face).</p>
<h3>Philippe</h3>
<p><strong>Philippe</strong>, le père d’Alexandre et véritable fondateur de la puissance macédonienne, s’inspire des <strong>phalanges de hoplites grecs</strong> (de lents rouleaux compresseurs) et améliore le système. Il essaie de refuser les grandes batailles, évite les longs sièges, préfère la « petite guerre » à base de petits combats et de surprise. Profitant des éternelles guerres entre cités grecques il soumet tout le monde. Déjà il vise la Perse.</p>
<p>Alexandre, formé par son père, sait faire fructifier l’héritage de son père et commence par mater les rébellions. Il hérite aussi de bons officiers.</p>
<p>Techniquement, <strong>la « phalange du pauvre » de Philippe</strong> vise à reprendre le principe des <strong>rangs serrés</strong> (jusque là invincibles face à la cavalerie) mais en <strong>allégeant</strong> le coûteux équipement et en <strong>allongeant les lances</strong>. Les sarisses, longues mais légères, ont une allonge supplémentaire face aux Grecs, écrasent les Perses trop légèrement protégés, et, dressées, offrent une protection contre les flèches. Ces phalanges moins lourdes sont bien plus <strong>mobiles</strong> que leur équivalent grec.</p>
<h3>La stratégie</h3>
<p>À côté des phalanges (l’enclume), les Macédoniens misent sur leur <strong>cavalerie</strong> (le marteau, négligé par les Grecs) qui s’occupe du choc : <strong>les cavaliers macédoniens osent charger l’infanterie</strong> ! La procédure exacte reste discutée : des chevaux ne chargent pas un mur de lances ! Il aurait pu suffire de les laisser approcher doucement (à revers) pour qu’ils passent entre les lances puis arrivent aux boucliers ennemis, pendant que les phalanges clouent l’ennemi d’un autre côté, jusqu’à dislocation de l’unité adverse.</p>
<p>L’armée macédonienne, autour des phalanges, utilise de <strong>nombreux autres types d’unités</strong>, pour protéger les flancs par exemple. Il le faut aussi pour intégrer des unités issues des pays conquis. Leur roi coordonne tout cela : Philippe et Alexandre maîtrisent le <strong>combat interarmes</strong>. La bataille ne se limite pas à un grand choc où les unités légères ne sont qu’accessoires.</p>
<h3>Préserver la conquête</h3>
<p>L’Empire perse (monstre de 50 millions d’habitants peut-être) a une dynastie à la légitimité fragile, une armée utilisant beaucoup l’infanterie légère, les archers et les mercenaires... grecs ! Les satrapes (gouverneurs) sont très autonomes : Alexandre sait les retourner pour assoir son propre pouvoir et assurer ses arrières.</p>
<h3>Mais aussi...</h3>
<p>Les ingénieurs grecs se montrent utiles pour l’artillerie de jet (innovation pendant les batailles) et les sièges (Tyr, Gaza).</p>
<h3>La fin</h3>
<p>L’Empire d’Alexandre n’a finalement comme limite que la fatigue de ses soldats après la conquête de la vallée de l’Indus. À la mort (de maladie ?) du conquérant, ses généraux se partagent les territoires. Puis il s’empressent de se faire la guerre pendant plus d’un siècle, avec des armées alourdies, moins formées, moins fiables.</p>
<p>Avant qu’une armée de citoyens-soldats sans général de génie mais encore mieux organisée, adaptable et manœuvrable mette tout le monde d’accord : la légion romaine.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-32-aout-2016-l-armee-d-alexandre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/827Légendes & lasagnes culturelles : « Le Cycle du Graal » de Jean Markaleurn:md5:d3d95b043f44be08b20f24788aeda4d32016-01-06T00:00:00+01:002016-06-12T13:26:00+02:00ChristopheTemps et transformationsAntiquitéchristianismechâteauxcivilisationCroisadesculturefantasyGrandes Invasionsguerre saintehistoirelivres luslyrismemagieMoyen ÂgemulticulturalismemythemèmemémoireMérovingiensperspectivequêterecyclagereligionsignifiésociétés primitivestempsthéologieémerveillementévolution <p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_1.jpg" title="Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_1.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_1_s.jpg" alt="Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_1.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Markale">Jean Markale</a>, dans les années 90, a entrepris une réécriture dans un style moderne de <em>tout</em> le Cycle du Graal : au total deux pavés de mille pages dans mon édition incluant la Table Ronde, les vies d’Arthur & Merlin, Lancelot & Guenièvre, Yvain, Gauvain, Galaad, Bohort, Viviane, Morgane, Tristan & Yseult et j’en passe beaucoup.</p>
<p>Un travail titanesque donc, surtout qu’il ne s’agit pas d’une simple réactualisation du style d’une mythologie « achevée », mais aussi de l’arbitrage, la fusion, la synthèse, l’harmonisation de plusieurs versions dans différentes langues d’Europe de l’Ouest écrites et traduites sur plusieurs siècles dans différents contextes religieux et politiques, leur compilation, leur mise en cohérence.</p>
<p>L’ensemble se présente sous la forme d’une suite de nouvelles pleines de digressions, aux ambiances parfois très différentes, reliées de manière un peu lâches, malheureusement souvent répétitives (il y a <em>beaucoup</em> de jeunes filles à sauver d’un infâme méchant auquel le preux chevalier fera mordre rapidement la poussière). C’est parfois très primaire et binaire, sauf peut-être vers la fin.</p>
<p><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8527589h/f13.item" title="La Table Ronde, de « Messire Lancelot du Lac » de Gautier Moap, 1470, Gallica via Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Table_ronde_Messire_Lancelot_du_Lac_de_Gautier_Moap_1470_Gallica_Wikimedia_Commons_Domaine_public_m.jpg" alt="Table_ronde_Messire_Lancelot_du_Lac_de_Gautier_Moap_1470_Gallica_Wikimedia_Commons_Domaine_public.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<h3>Un gros patchwork culturel</h3>
<p>Il ne semble pas que les universitaires aient beaucoup porté Markale dans leur cœur donc on prendra ses interprétations avec des pincettes, mais il reste malgré tout clair que le Cycle du Graal agrège :</p>
<ul>
<li>des histoires issues de la mythologie celte, parfois si anciennes que l’on peut parler de chamanisme (notamment lors des transformation d’humains en animaux) ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des légendes celtes, bretonnes, armoricaines, galloises, irlandaises, souvent pré-chrétiennes, agrégées au mythe parfois brutalement ;</li>
</ul>
<ul>
<li>une version historiquement peu correcte de l’invasion romaine et des Empereurs à l’époque de l’arrivée du Graal en Bretagne ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des personnages historiques réels des alentours des années 475-500 : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Roi_Arthur">Arthur</a> aurait été un chef de guerre celto-romain, ou une synthèse de plusieurs chefs ayant effectivement combattu les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l'Angleterre_anglo-saxonne">Saxons lors des Grandes Invasions</a>, et des allusions montrent qu’il n’était pas très respectueux des biens de l’Église de l’époque ; <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Merlin">Merlin</a> aurait pu être un chef de tribu un peu plus tardif ; le poète <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Taliesin">Taliesin</a> ; le roi <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Urien">Urien</a> et son fils devenu le chevalier <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Owain_mab_Urien">Yvain</a> ; voire <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fraimbault_de_Lassay">Lancelot / Saint Fraimbault</a> ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des histoires n’ayant pas forcément de liens avec le Graal à l’original ;</li>
</ul>
<ul>
<li>un vernis chrétien parfois très fin recouvrant à peine le fantastique celtique, parfois transposant des divinités celtiques en preux chevaliers (Lug / Lancelot) ou en magiciennes (Morgane), déplaçant l’Autre Monde celtique dans des royaumes imaginaires, ou transformant la quête du Graal originelle (sordide vengeance ? guérison d’une blessure du Roi Pêcheur dans ses parties sexuelles ?) en apologie de l’Eucharistie ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des réinterprétations médiévales du passé : Virgile passait pour un prophète ou un magicien ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des ajouts par des moines choqués par l’immoralité de ces chevaliers querelleurs, parfois pillards ou lubriques : Perceval/Peredur puant trop la mythologie païenne, il est remplacé par Lancelot comme nouveau roi du Graal ; mais Lancelot, ayant cocufié Arthur avec Guenièvre, ne pouvait décemment pas être le Bon Chevalier gardien du Graal, il a donc fallu inventer son fils Galaad, personnage transparent et fade, arrivé comme un cheveu sur la soupe et très vite débarqué ; les autres amants de Guenièvre ont été (mal) gommés, et les femmes globalement rabaissées ; tout est fait pour rendre les amours interdites inévitables <em>malgré</em> les personnages (filtre d’amour pour Tristan & Yseult, substitution de femme pour Lancelot et Brisane/Elaine) et l’on montre qu’elles mènent à la catastrophe : la guerre finale vient de l’adultère de Lancelot & Guenièvre enfin révélé ;</li>
</ul>
<p><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b2200046b/f3/" title="Chrétien de Troyes, Gravure de 1530, BNF"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Chrétien_de_Troyes_Gravure_1530_BNF_Domaine_public_s.jpg" alt="Chrétien_de_Troyes_Gravure_1530_BNF_Domaine_public.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<ul>
<li>des réécritures à la mode de l’amour courtois par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chr%C3%A9tien_de_Troyes">Chrétien de Troyes</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_de_Boron">Robert de Boron</a>, au top des <em>playlists</em> des trouvères et troubadours du XIIè siècle (en plein renouveau médiéval, à l’apogée de la féodalité et au plus fort des Croisades), et par bien d’autres dans tout l’Occident chrétien (Italie, Allemagne, Angleterre des Plantagenêts, cour d’Aquitaine...), qui ont lié, remixé à divers degrés et inséré au chausse-pied beaucoup d’histoires existantes, à commencer par Lancelot, et connecté le Graal et Jésus ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des éléments typiques de la société médiévale telle que clercs et nobles l’idéalisaient : code de l’honneur chevaleresque, amour courtois, vassalité bien ordonnée, ignorance et mépris des vilains, assimilation des beautés physiques et morales, quelques mentions antisémites, un prosélytisme chrétien <em>très</em> agressif ;</li>
</ul>
<ul>
<li>des échos des remous de la société de l’époque, comme des piques envers les chevaliers pilleurs, ou une allusion de Chrétien de Troyes à l’exploitation des ouvrières dans le textile en Champagne (plus d’un demi-millénaire avant Marx) ; des relents de l’affrontement de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Bouvines">Bouvines</a> entre Philippe Auguste et l’Empereur allemand ; des traces de besoins d’affirmation du pouvoir des Plantagenêt (les versions de leur époque affirment qu’Arthur est bien mort, inutile d’attendre son retour d’Avalon).</li>
</ul>
<h3>De quoi/qui parle-t-on en fait ?</h3>
<p>Ajoutons des confusions entre personnages : Arthur fait un enfant à sa sœur, mais est-ce Morgane ou Anne ? Perceval s'est vu dépouillé par Lancelot de bien des histoires. Combien de personnages, fées, sorcières, déesses différentes Morgane agrège-t-elle elle-même ? Et Viviane/Mélusine ? Et ne parlons pas de Merlin ! Markale a pas mal arbitré pour nommer les personnages.</p>
<p>Il y a même un mystère sur le concept même du Graal : chaudron ou corne d’abondance celtique pré-chrétienne, récipient du sang du Christ, vengeance, guérison symbolique, quête mystique de soi-même, tout cela à la fois ? Jean Markale a tranché pour la version chrétienne mais mentionne les autres interprétations.</p>
<h3>Le Moyen Âge n’était pas une période rose</h3>
<p>Certains traits médiévaux agacent. On fait peu de cas de la vie humaine. Les chevaliers s’entretuent à la moindre provocation, et le vainqueur épouse la femme du perdant trucidé (Uther Pendragon & Ygerne). Un sens de l’honneur disproportionné mène à des guerres fratricides et bien des morts inutiles. Les jeunes filles sont toutes les plus belles que l’on peut imaginer, à part une poignée de sorcières hideuses, dont la moitié se retransforment en magnifiques jeunes filles quand le jeune homme est chevaleresque.</p>
<p>En matière de religion, le niveau d’ouverture d’esprit approche celui de Daesh : qui ne se convertit pas est passé au fil de l'épée. Ces preux ne doutent pas un instant de l’aide de Dieu.</p>
<p>La misogynie règne : ces dames s’enflamment toutes pour un rien, parfois sans avoir vu le valeureux chevalier, n’ont d’yeux que pour les guerriers vainqueurs, sont hautement capricieuses (revers de la médaille de l’amour courtois) et ont souvent la cuisse légère. On sent que l’idéal de virginité avant le mariage et de monogamie n’est pas encore bien établi, et en tout cas allègrement ignoré par beaucoup. D’un autre côté, des personnages aussi exceptionnels ne peuvent avoir été conçus que de manière exceptionnelle, voire interdite : Merlin est fils d’un diable et d’une pieuse mortelle ; Arthur nait d’un adultère ; son fils maudit Mordret naîtra d’un inceste (dans les anciennes versions il n’ont pourtant aucune parenté.)</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_2.jpg" title="Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_2.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_2_s.jpg" alt="Jean_Markale_Le_Cycle_du_Graal_2.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<h3>En creusant un peu</h3>
<p>Les anciennes coutumes celtes surnagent et surprennent : le Graal n’est chrétien et médiéval que superficiellement.</p>
<p>Le couple Arthur/Merlin reprend la dualité roi/druide. Le roi n’est pas le moteur, juste le premier de pairs, et n’est pas le moteur de grand-chose dans toute la quête. Par tradition, il doit accorder presque à n’importe qui des « dons » sans savoir auparavant de quoi il retourne, d’où bien des dilemmes.</p>
<p>On répand des joncs pour accueillir les invités (normal pour des Celtes, mais le Moyen-Âge utilisait déjà les chaises). Les moines cisterciens ont laissé passer quelques allusions à des liens ouvertement homosexuels entre preux chevaliers (à la manière de la Grèce antique). Les références aux nuits de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nuit_de_Walpurgis">Walpurgis</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Samain_%28mythologie%29">Samain</a> abondent.</p>
<p>Les filiations celtiques sont plutôt matrilinéaires, il est donc normal que le neveu d’Arthur, Gauvain, soit son héritier. Les enfants sont confiés à d’autres familles pour être élevés. À la mode celtique, Lancelot ou Galaad ont été élevés par des femmes : chez la Dame du Lac pour le premier, chez des religieuses pour le second, plus tardif. On découvre que les femmes de l’époque se décoloraient déjà les cheveux en blond.</p>
<p>Quant aux mentions topographiques ou architecturales comme la forme des forteresses, elles remontent plus à l’Antiquité qu’à l’apogée du Moyen Âge.</p>
<p>Bref, un gros pavé pas très digeste, bien représentative de l’évolution culturelle occidentale, qui plaira aux fanas d’histoire.</p>
<p>Pour finir, <a href="http://boutdubois.blogspot.fr/2014/07/jean-markale.html">une interview de l’auteur</a></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Cycle-du-Graal-de-Jean-Markale#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/801« Guerres & Histoire » n°15 d’octobre 2013 : l’assassinat de la Luftwaffe, les châteaux forts japonais, Andrinople, la guerre du Kippoururn:md5:40afaf14fbe55fb16c3b8e60eed27eea2013-10-25T16:56:00+02:002016-07-07T13:24:48+02:00ChristopheHistoireAfriqueAllemagneAntiquitébon senscatastrophechâteauxcoup bascynismedommagedéshumanisationEmpire romainespionnageEuropegigantismeGrandes InvasionsguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationlivres luslogistiquemercenairemobilitéMoyen ÂgeorganisationperspectivePremière Guerre MondialeprovocationpétroleracléesaturationSeconde Guerre MondialespéculationsécuritétotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis <p>Avec « l’assassinat de la Luftwaffe » en gros titre, <em>G&H</em> fait dans le racolage digne de ces revues militaires qui bavent devant le matériel, surtout celui avec croix gammée. Si je ne connaissais pas le sérieux de la revue et son manque d’admiration pour la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, je me serais méfié.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_13.jpg" alt="GuerreEtHistoire_13.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>En fait, point d’hagiographie des ailes allemandes, mais la description de l’opération soigneusement planifiée visant à briser la chasse allemande début 1944, en utilisant les bombardements sur l’Allemagne comme appât, et dans le but de conquérir la maîtrise du ciel avant le Débarquement.</p>
<p>À part ça, excellent numéro, avec les analyses de fond habituelles. Je suis à chaque fois fasciné par les tendances de fond ou les modèles mentaux des différents adversaires qui expliquent bien des événements. Et en même temps, bien d’autres choses ont tenu à si peu...</p>
<p><em>Comme d’habitude, les remarques personnelles sont en italique.</em></p>
<h3>Le prisonnier miraculé</h3>
<p>Le soldat soviétique Sacha Volkov raconte sa terrible odyssée dans l’interview qui ouvre le numéro. Prisonnier à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Koursk">Koursk</a> en 1943, il subit les terribles marches vers les camps de prisonniers, eux-mêmes souvent des mouroirs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, pour finir à Buchenwald. Il a survécu, mais il insiste sur sa chance.</p>
<h3>La guerre des Boers</h3>
<p>Entre 1899 et 1902, les Anglais en ont bavé pour mettre au pas et annexer deux États sud-africains fondés par d’anciens immigrants néerlandais (et français, des huguenots chassés par Louis XIV !). Ces teigneux fermiers, bien équipés en matériel allemand, n’ont été mis au pas que grâce au blocus naval, à la terreur, à la déportation des familles dans des camps de concentration au taux de mortalité effroyable. Un avant-goût des horreurs du XX <sup>è</sup> siècle...</p>
<h3>Opération Pointblank</h3>
<p>En 1943, les Alliés décident de se débarrasser de la Luftwaffe, condition <em>sine qua non</em> pour tenter un débarquement l’année suivante. L’année 1943 montre aussi que les bombardements massifs ne suffiront pas à faire plier le Reich, une illusion longtemps entretenue avant guerre (<em>en 1940, le Blitz avait pourtant montré que bombarder les villes ne cassait pas le moral des agressés, au contraire</em>). Pire, ils ont un coût humain effroyable pour l’attaquant : les forteresses volantes (B 17) ont beau être hérissées de mitrailleuses et voler en formation, mais sans escorte, elles se font souvent hacher menu (parfois plus de 30% de pertes).</p>
<p>La solution : escorter ces bombardiers par une chasse capable de les accompagner jusqu’à Berlin. Étonnamment, ce n’était pas prévu jusqu’ici : les réservoirs d’essence largables, pas si faciles à mettre au point sans altérer les capacités de l’avion, ne seront prêts que fin 1943, et l’avion idéal (P-51 Mustang) en 1944.</p>
<p>Cette escorte ne sert en fait pas à protéger les bombardiers. Début 1944 sa mission devient la destruction de la chasse allemande : les bombardiers ne sont plus qu’un appât. Les missions s’enchaînent, toujours plus massives (culminant en une bataille aérienne entre 2000 appareils le 24 février 1944 !). Les Allemands sont obligés d‘affecter des ressources énormes à la défense aérienne de leurs villes, et en quelques semaines de pilonnage intensif, la chasse allemande est laminée.</p>
<p>Göring n’avait pas prévu ces escortes lointaines et les chasseurs lourds allemands ne sont pas prêts face à la chasse allié. Ils deviennent la cible principale alors qu’eux-mêmes visent d’abord les bombardiers. Puis le cercle infernal s’enchaîne pour la Luftwaffe : pénurie de chasseurs, peu favorisés jusque là par la Luftwaffe au profit des bombardiers ; appareils pas assez vite construits par des usines elles-même cibles majeures, certes pas aussi gravement touchées que le pensent les Alliés, mais dispersées par crainte des bombardements ; pénurie de pilotes, de plus en plus vite et mal formés <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> ; siphonnage de tous les appareils disponibles pour la défense aérienne ; réquisition par la DCA de nombreux gros canons et de précieuses munitions qui manqueront sur le front...</p>
<p>L’opération Pointblank se révèle un succès total : en quelques semaines la Luftwaffe a perdu ses meilleurs pilotes de chasse et des milliers d’appareils, et peine à remplacer les avions quand les usines américaines tournent à plein. Les bombardiers se concentrent alors sur les voies de communications vers la zone du Débarquement, et le pétrole. La chasse allemande, dispersée sur trois fronts, laisse la totale maîtrise du ciel aux Alliés jusqu’à la fin de la guerre, ce qui facilitera grandement leur victoire.</p>
<p>Pointblank ne sera jamais rééditée. L’US Air Force acquiert son indépendance, et se concentre sur le bombardement, notamment atomique, revenant ainsi aux erreurs des débuts de la guerre. Le Vietnam et l’amélioration des défenses sol-air (guerre du Kippour) montrent que la supériorité aérienne n’est jamais un acquis. Surtout, les États-Unis considèrent le ciel comme leur chasse gardée et la base de leur puissance : on peut les considérer comme une <em>ouranocratie</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</p>
<h3>Guerre du Kippour</h3>
<p>Les espions annonçaient une attaque imminente, l’ennemi cachait à peine ses préparatifs, et ils avaient une connexion discrète sur ses communications : pourquoi la guerre du Kippour de 1973 fut-elle une telle surprise pour les Israéliens ? L’article rejette l’essentiel de la faute sur un péché d’orgueil (sous-estimer les Arabes après les victoires précédentes, et considérer que les Égyptiens n’attaqueraient pas tant qu'ils ne disposeraient pas de certains moyens de bombardements), et le refus du chef des renseignements extérieurs de ne pas activer ses « moyens spéciaux » (cette bretelle sur les communications égyptiennes) de peur de les griller. Israël croit à un exercice jusqu’au dernier moment, et passe à deux doigts de la catastrophe.</p>
<p>(<em>Cette peur de trahir ses sources au point qu’on ne les utilise même plus est courante chez tous ceux qui sont sur la défensive et ont peu d’atouts, comme les Anglais avec Enigma pendant la Seconde Guerre Mondiale.</em>)</p>
<h3>Andrinople</h3>
<p>Cette bataille marque peut-être la fin de l’Antiquité : les Goths écrasent l’armée romaine tout prêt de Constantinople. Pourtant les Goths étaient déjà des alliés (fédérés), venaient en réfugiés pacifiques, et on leur avait promis des terres en Thrace. La cupidité d’un gouverneur et l’incompétence de l’administration les poussent à la révolte <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.</p>
<p>Sous-estimation de l’adversaire (en partie déjà formé à la romaine !), incapacité de l’Empire à lever de grandes armées, stratégie inadaptée, indiscipline de troupes, et rôle décisif de la cavalerie lourde goth : c’est un désastre et l’empereur Valens y laisse la vie. Les conséquence directes sont finalement faibles (les Goths n’arrivent pas exploiter leur victoire, et le nouvel empereur d’Orient, Théodose, leur donne ce qui avait été promis au départ), mais symboliquement tout a changé : ni le prestige ni l’armée de Rome ne s’en remettront jamais, les Goths iront finalement piller les Balkans, Rome... et la cavalerie lourde dominera à présent les champs de bataille, comme tout au long du Moyen-Âge.</p>
<h3>Les châteaux forts japonais</h3>
<p>Même cause, mêmes effets : le Japon du XVè siècle se fragmente en seigneuries en guerre permanente, et comme en Europe un demi-millénaire plus tôt apparaissent des châteaux forts, à la fois résidence d’une lignée, centre de pouvoir et point de résistance majeur. Pourtant, le Japon connaît déjà l’artillerie, qui est à l’origine de la disparition des châteaux forts en Europe au même moment !</p>
<p>Le château fort japonais diffère cependant par sa structure. En raison des tremblements de terre, il se rapproche déjà plus de la cité fortifiée aux très épaisses murailles, quasiment des bastions, que des hauts châteaux élancés. L’artillerie ou la sape se révèlent donc beaucoup moins efficace. La conquête de ces châteaux pleins de pièges coûte très cher aux assaillants. (<em>Vauban aurait été ravi.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Le <strong>colonel Brémond</strong> devrait être aussi connu que Lawrence d’Arabie. Il commandait les quelques troupes françaises qui ont rendu de fiers services à la rébellion arabe de 1916. Mais la métropole lui accorda peu de moyens, et son talent littéraire était plus faible. (<em>J’adore les faces cachées des légendes.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Projet Habbakuk</strong> : en 1942, un projet de porte-avion géant insubmersible, à base de glace mélangée à de la pâte à papiers, enthousiasme Lord Mountbatten et Churchill. Le projet capote, à cause des difficultés techniques, et surtout parce qu’en 1943 les Alliés reprennent déjà le contrôle de l’Atlantique. <br />(<em>Encore un de ces projets fous pour les amateurs d’uchronie. D’un autre côté, si certains projets ont échoué, c’est effectivement qu’ils étaient vraiment infaisables ou avec un rapport bénéfice/coût trop faible. Un des avantages des Alliés sur les nazis était de savoir arbitrer en faveur du fiable/pas cher/facile à maintenir face au monstrueux/prestigieux/coûteux.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler</em></strong> : les chroniqueurs m’ont donné l’envie de me ruer sur cette biographie du maréchal soviétique (<strong>2014</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">chroniquée ici</a>) . Il n’avait reçu aucune instruction mais s’est révélé plus doué que les généraux allemands pour la guerre moderne ; il a survécu à toutes les guerres de la Russie et de l’URSS, et même au stalinisme. <br />(<em>Seul bémol : l’auteur comme le rédacteur de la critique font tous les deux partie du comité éditorial de la revue. Même si c’est ouvert, ça fait quand même un peu mauvais mélange des genres.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>J’aime bien la chronique dialoguée de Charles Turquin, à la fin : Waterloo et Bir Hakeim sont des victoires anglaise et française, mais... d’où venaient en fait les troupes ? <br />(<em>Rien de neuf sous le soleil. Aux Champs catalauniques, les Germains étaient majoritaires dans les troupes d’Attila comme dans celles d’Aetius.</em>)</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Un des numéros précédents avait décrit les lacunes fondamentales de l’armée allemande, notamment la recherche systématique des batailles décisives, un concept anachronique au XXè siècle. Les gaffes stratégiques majeures des nazis (guerre sur deux fronts, fascination pour le gros matos invulnérable mais trop coûteux à produire...) n’a été qu’une seconde couche.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Le traitement des prisonniers de guerre soviétiques relevait de l’extermination : 3,3 millions de morts, notamment de faim, et surtout en 1941-42 avant que les nazis se disent qu’il faudrait plutôt les faire travailler.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Pendant ce temps les Américains développent des moyens de formation considérables, retirent leurs pilotes expérimentés du front et les utilisent comme formateurs.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Terme forgé sur le modèle de la thalassocratie athénienne. C’est logique puisque les transports sont forcément aériens à l’échelle d’une superpuissance planétaire. Google ne connaît bizarrement qu’une occurrence du mot — comme quoi il n’indexe pas tout. Et je me demande si un jour il y aura une spatiocratie ou une cosmocratie ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Je sens comme une résonance avec notre époque...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/754« Pour la Science » de mai 2013 : complexité, créativité, médecine chinoiseurn:md5:f4b91406c03d0193a3b6bb4bc31775f32013-05-22T00:00:00+02:002016-07-06T12:00:26+02:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéauto-organisationchaosChinecommunicationcomplexitéconquête de l’inutilecosmologiedémographiedéshumanisationenfantsentropieintelligencemathématiquesmèmemémoireoptimisationorganisationparadoxeperspectivesantésociétés primitivesécologieévolution <p>Notes rapides sur le dernier numéro avant qu’il ne soit chassé des kiosques, <em>et avis personnels en italique</em> :
<img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/pls_427_1ere_de_couv_w1.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>Créativité</h3>
<p>La créativité humaine, la capacité à innover de façon continue, ne remonte pas à si loin, mais la date fait débat. Les fossiles africains montrent des évolutions culturelles, puis des régressions apparentes pendant des dizaines de milliers d’années.</p>
<p>La taille du cerveau n’est pas un critère suffisant pour être créatif, il faut savoir utiliser ces neurones et les interconnecter. Les individus actuels les plus créatifs sont de grands rêveurs, dont l’esprit vagabonde pour faire des analogies inédites avant de revenir au mode analytique habituel. Les neurones plus nombreux rendraient les souvenirs plus précis et pérennes, permettant leur connexion. Un exemple : l’hominidé qui se blesse à un buisson épineux ferait le rapport entre sa chasse et cet épisode <em>via</em> la chair blessée, et aurait ainsi l’idée de l’arme pointue.</p>
<p>Mais l’origine de la créativité humaine pourrait aussi être l’explosion des interactions avec la progression démographique d’il y a 100 000 ans. Une expérience montre que des enfants de maternelle écrasent les singes à des exercices de casse-tête simplement parce qu’ils communiquent, partagent et s’encouragent.</p>
<p>Ah oui : c’est le repos du cerveau, libre de divaguer, qui engendre la créativité. (<em>Pas le stress hystérique de la vie moderne...</em>)</p>
<h3>La médecine traditionnelle chinoise</h3>
<p>Les traités médicaux chinois remontent bien avant Jésus-Christ, mais les médecins ont traîné leurs racines magiques et religieuses jusqu’au XXè siècle, et les théories étaient aussi fumeuses que celles des humeurs en Europe. La pharmacopée en constitue la colonne vertébrale.</p>
<p>Les gouvernements du début du XXè siècle, puis les communistes, affligés par l’état de leur médecine, admirant les succès techniques occidentaux, traumatisés par les succès japonais, imitateurs de l’Occident, décident de revoir toute cette médecine selon les normes scientifiques. La « médecine traditionnelle chinoise », pratique rationalisée d’inspiration traditionnelle, n’a donc que cinquante ans !</p>
<p>Au moment où la Chine s’ouvre à nouveau, certains Occidentaux découvrent cette médecine, et y voient le contrepoint du poids de la physique et de la chimie trop présents à l’Ouest. Ajoutons les problèmes de traduction, culturels, quelques experts ignares, la fascination pour du savoir millénaire, et un aveuglement parfois délibéré par rejet de la science : la mode prend.</p>
<p>Le gouvernement chinois est déchiré : d’un côté, cette passion occidentale pour sa médecine offre des perspectives d’exportation alléchante ; d’un autre côté il garde pour but d’extirper les superstitions et de rationaliser cette médecine, à l’occidentale. Si les anciens concepts fumeux reviennent en Chine même <em>via</em> l’Occident, on retourne à l’obscurantisme scientifique qui a mené la Chine à sa perte les siècles précédents. Les deux raisons poussent les Chinois à vouloir garder le contrôle sur l’enseignement de leur médecine, et n’en facilitent pas l’évaluation raisonnable.</p>
<h3>Complexités</h3>
<p><em>Bon cru pour l’article de Delahaye. Pour certains, ce seront des évidences réchauffées, mais j’ai une question existentielle de moins dans ma tête.</em></p>
<p>D’un côté il y avait la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Complexit%C3%A9_de_Kolmogorov">complexité de Kolmogorv</a>, où un objet pouvait être résumé au plus petit programme capable de le générer. En première approche, un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/ZIP_%28format_de_fichier%29">zip</a> d’un fichier estime cette complexité, elle est minimale dans les objets répétitifs, faible dans une fractale (le programme est simple), et maximale dans un nombre aléatoire, un circuit imprimé...</p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Profondeur_logique_de_Bennett">profondeur logique de Bennett</a> complète cette approche en tenant compte du temps de calcul nécessaire à ce programme : les motifs répétitifs restent simples ; les suites aléatoires, programmées avec une simple recopie de chiffres, redeviennent simples ; par contre la fractale ou le circuit imprimé exigent de longs calculs pour être reconstitués.</p>
<p>Suit un parallèle avec les arbres biologiques de créatures vivantes (indéniablement complexes), qui suivent un très long temps d’évolution/calcul. En conclusion : « On peut même rêver d'aboutir à une compréhension théorique profonde du développement de la complexité de l’univers et du vivant, qui rendrait définitivement caduques les élucubrations des créationnistes de l’<em>Intelligent Design</em>. » (<em>Personnellement, je doute que des équations mathématiques les convainquent...</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li><img src="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/f/fa/Latimeria_Chalumnae_-_Coelacanth_-_NHMW.jpg/320px-Latimeria_Chalumnae_-_Coelacanth_-_NHMW.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C5%93lacanthe">cœlocanthe</a>, ce poisson si proche des ancêtres des tétrapodes, redécouvert au XXè siècle alors qu’on le pensait disparu avec les dinosaures, ne survit pas en captivité. Des plongeurs sont allés le voir dans son milieu (<em>chapeau pour les heures de paliers de décompression à subir</em>) : c’est une bestiole placide, au métabolisme très lent, et curieuse.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pas compris grand-chose aux résultats de la <a href="http://public.planck.fr/">mission Planck</a>, sinon que le satellite a réussi l’exploit de mesurer une température proche du zéro absolu dans les profondeurs les plus lointaines de l’univers, avec un cent-millième de degré de précision. Les résultats vont servir à invalider certaines théories de physique très fondamentale.</li>
</ul>
<ul>
<li>On aurait trouvé un fossile de Néandertalien métis : ADN mitochondrial néandertalien, menton d’homme moderne !</li>
</ul>
<ul>
<li>La physique quantique en une minute, <a href="https://www.youtube.com/user/minutephysics" hreflang="en">c’est possible</a> ! <br /><em>Sympa, mais franchement, pas beaucoup d’infos de plus que dans une page écrite. Et à un débit qui ne rend pas forcément facile la mémorisation pour qui tout cela n’est pas déjà une évidence. Enfin, si ça peut aider certains...</em></li>
</ul>
<ul>
<li>On sait mettre au point du béton flexible : capital pour les zones sismiques !</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mai-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/746« La Guerre des Gaules » de Jules Césarurn:md5:42ae577b7d57170b59f0161e7e99d2dc2013-05-03T00:00:00+02:002016-06-27T13:00:14+02:00ChristopheHistoireAntiquitécitationcolonisationcoup basEmpire romainesclavageGauloisguerrehistoireHistoire de Francelatinlivres lusracléetemps <blockquote><p><em>History will be kind to me for I intend to write it.</em><br /> <br />L’histoire sera gentille avec moi, car j’ai l’intention de l’écrire.<br /> <br />Winston Churchill</p></blockquote>
<p>Deux mille ans avant Churchill, Jules <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Guerre-des-Gaules-de-Jules-C%C3%A9sar#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> avait appliqué la méthode en rédigeant à chaud ses fameux <em>Commentaires sur la Guerre des Gaules</em>. Censé être purement factuel, loué par Cicéron (rien que ça) pour la pureté de son style, le livre n’en glorifie pas moins subtilement son auteur.</p>
<p>En très résumé : c’est la faute des Suisses. Les Helvètes ayant décidé d'émigrer massivement et agressivement à l'autre bout de la Gaule, les tribus gauloises sur le chemin appellent à l’aide la puissance romaine proche (la côte méditerranéenne était romaine depuis longtemps). César intervient donc et après moultes batailles renvoie les envahisseurs chez eux, se fait reconnaître comme protecteur d’autres tribus, va soumettre d’autres Gaulois qui veulent du mal à ses protégés, et repousse une invasion germaine (déjà...).</p>
<p>César maître de toute la Gaule, les insurrections s’enchaînent. Vercingétorix n’est ni le premier ni le dernier de la liste des chefs gaulois engagés contre César, peut-être le plus spectaculaire. Avant même cet épisode, César a dû aller en Bretagne (actuelle Grande-Bretagne) mater les soutiens de certains insurgés gaulois.</p>
<p>Les alliances se font et défont, et des auxiliaires gaulois ou germains servent contre des Germains ou des Gaulois. Les séquences s’enchaînent de façon un peu monotone : un chef persuade son peuple de se soulever, trouve des alliés, attaque les Romains dans leurs cantonnements d’hiver ou pendant l’absence de Jules ; les Romains supérieurement organisés et valeureux tiennent bon et finissent par provoquer la fuite de ces Gaulois si braves mais « pusillanimes » et inconstants. Les insurgés, penauds, envoient députés et otages ; César en général pardonne (mais parfois il vend la population aux marchands d’esclaves, parfois il massacre toute la population d’une ville) ; et tout est bien qui finit bien jusqu’au soulèvement de l’année suivante.</p>
<p>César, sans trop forcer, se donne le beau rôle. Si Gergovie est un échec, il ne s’étend pas — de toute façon c’était la faute de soldats indisciplinés et de ces traîtres d’Éduens qui ont changé de camp.</p>
<p>Quelques mentions au passage sur la logistique : le ravitaillement en blé et fourrages est le souci principal des légions, et son point faible. Et en hiver les légions sont vulnérables, car obligées d’hiverner.</p>
<p>J’aurais bien voulu lire la <a href="http://archive.org/stream/caesarsgallicwa00danigoog#page/n75/mode/1up" hreflang="la">version originale dans le texte</a> mais mes souvenirs de latiniste sont bien lointains et même avec le Gaffiot à présent en ligne, ça n’aurait pas été faisable.</p>
<p>Évidemment, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Commentaires_sur_la_Guerre_des_Gaules">Wikipédia résume tout ça très bien pour les gens pressés</a>, et la version numérique se trouve sans difficulté en ligne. D’ailleurs, ce premier « vrai » livre (non technique) que je lis intégralement sur ma liseuse est aussi le plus ancien <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Guerre-des-Gaules-de-Jules-C%C3%A9sar#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Guerre-des-Gaules-de-Jules-C%C3%A9sar#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Inutile de le nommer plus avant. Rares sont ceux dont le nom a servi jusque 1918 comme titre de rang </em>supérieur<em> à celui de « roi ».</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Guerre-des-Gaules-de-Jules-C%C3%A9sar#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Non, je n’ai pas (encore) fini la Bible</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Guerre-des-Gaules-de-Jules-C%C3%A9sar#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/742Habemus papam dans le texteurn:md5:88ef067ed72becc902afaab0dbc47f772013-03-13T22:27:00+01:002013-03-13T22:27:00+01:00ChristopheDes formes des motsAntiquitécivilisationconquête de l’inutileculturelatinreligionémerveillement <p>J’ai entendu en direct le <em>habemus papam</em> sur BFM, et les quelques formules qui allaient avec, jusqu’au nom du nouvel évêque de Rome.</p>
<p>Je n’aurais jamais pensé comprendre un événement à la télé avec quelques secondes d’avance sur l’essentiel de l’humanité grâce à mes cours de latin au lycée.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Habemus-Papam#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/736« Guerre & Histoire » n°10 de décembre 2012 : Guerre de Cent Ans, Crimée, Pologne, Maison Blanche brûléeurn:md5:fae08c2dd2296d59b49fc4da560252912013-02-04T22:13:00+01:002016-03-21T12:59:32+01:00ChristopheHistoireAllemagneAntiquitécatastrophechâteauxEmpire romainGrandes InvasionsguerreGuerre de Cent AnsgéopolitiquehistoireHistoire de FranceMoyen ÂgemythemémoirenationalismeperspectivepolitiquePremière Guerre MondialesaturationSeconde Guerre Mondialeuchronieévolution <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/GuerreEtHistoire_10.jpg" alt="GuerreEtHistoire_10.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerre & Histoire n°10" /></p>
<p>J’aime bien ce magazine : à l’école ou dans les livres, on parle très peu de la science militaire alors que son rôle été capital. De plus, les auteurs ne se limitent pas à admirer les « gros tanks de la Wehrmacht qui auraient gagné la guerre si les Alliés avaient gentiment attendu 10 ans qu’ils les construisent en série », comme d’autres magazines, mais traitent aussi d’économie et de société : un précédent numéro parlait du rôle du pétrole dans la Seconde Guerre Mondiale<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Ici, ce sont les évolutions sociales pendant la Guerre de Cent Ans, avec les conséquences jusqu’à nos jours, qui font la couverture.</p>
<h3>Kippour, Crimée, Pologne, Maison Blanche cramée</h3>
<p>Rapidement, ce dont parle aussi ce numéro :</p>
<ul>
<li><strong>Un ancien jeune tankiste israélien</strong> raconte comment en 1973, surpris dans le Golan par l’attaque syrienne, son petit groupe de 13 chars a tenu tête, sans perte, à 450 tanks syriens, et en a détruit la moitié ! La formation, la motivation, et 6° de différence dans l’orientation du canon vers le bas, peuvent littéralement faire des miracles.</li>
</ul>
<ul>
<li>En France, la <strong>guerre de Crimée</strong> (1853-56) a été zappée de la mémoire collective, oblitérée par la défaite de 1870. Il ne reste que quelques noms de lieux, de stations, à Paris. Et pourtant, ce fut le premier conflit photographié. Les clichés présentés ici semblent surréalistes.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La cavalerie polonaise n’a jamais été assez stupide pour charger les panzers de la Wehrmacht en 1939 !</strong> Elle combattait normalement à pied, les chevaux n’étant que des moyens de transport adaptés à un pays aux mauvaises routes. Quelques rencontres imprévues ont été grossies par la propagande allemande, et le mythe perdure encore de nos jours.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La Guerre de 1812 entre États-Unis et Angleterre</strong> marqua sans doute le premier acte impérialiste américain, et ça a plus mal fini encore qu’en Irak. À cause notamment du blocus napoléonien et des mesures de rétorsion anglaises, et voulant « libérer » le Canada sous-peuplé, des « faucons » poussent le Président Madison à l’attaque au nord. Mais l’armée américaine n’est pas organisée, alors que les Canadiens, bien que majoritairement francophones, restent fidèles à la couronne britannique, ainsi que leurs alliés indiens ; enfin la Royal Navy domine les mers. Humiliation, la Maison Blanche flambe. En 1815, les deux camps signent le match nul, la chute de Napoléon éteignant la cause du conflit (et libérant nombre de ressources anglaises...).</li>
</ul>
<ul>
<li>En 451, la célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_champs_Catalauniques_%28451%29">bataille des Champs Catalauniques</a>, mythique sauvetage par le « dernier des Romains », <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aetius">Aetius</a>, des reste de l’Empire romain face aux hordes hunniques d’Attila, a plutôt ressemblé à une bataille entre d’une part des Germains soumis aux Huns (Ostrogoths surtout, Hérules, Gépides, Francs...) et d’autre part des Germains alliés aux Romains (Wisigoths, Alains, d’autres Francs...), sans beaucoup de légions romaines par contre, mais quelques mercenaires huns avec Aetius. Au final, Aetius laisse filer Attila pour éviter une hégémonie wisigothe en Gaule. Attila ira encore piller l’Italie et Aetius, trop puissant, sera liquidé par l’Empereur en personne.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Angleterre a connu au XVIIè siècle sa période républicaine, d’un puritanisme extrême assez difficile à comprendre de nos jours (est-ce qu’on pourrait rapprocher ce mélange de théocratie et de parlementarisme avec l’Iran d’aujourd’hui ?). Cromwell, homme fort du Parlement, a pu s’imposer et écraser l’armée royale grâce à sa <em>New Model Army</em>. Sans stratégie vraiment originale, elle se fondait d’abord sur le mérite et non le sang bleu, sur une base nationale et non régionale, et enfin une part de fanatisme puritain. Assez pour prendre le pouvoir, pas assez pour consolider un régime pérenne qui ne survivra pas à Cromwell.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong><em>Liberty ships</em></strong> : ces milliers de bateaux de transport identiques construits à la chaîne en quelques dizaines de jours parfois sont l’exemple parfait de la toute-puissance industrielle américaine au service des Alliés.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>Plan Schlieffen de 1914</strong> n'aurait pas été, comme on le pensait, vraiment conçu pour éviter la guerre sur deux fronts, mais était à l’origine le plan allemand contre... l’Angleterre (et non la Russie). Avec dans les deux cas la France comme adversaire secondaire à éliminer rapidement <em>via</em> la Belgique.</li>
</ul>
<h3>La Guerre de Cent Ans</h3>
<p>C’est une période charnière, chaotique, pleine de transformations douloureuses : une époque donc « intéressante » selon les critères de la vieille malédiction chinoise. Toutes les cicatrices ne sont pas refermées d’ailleurs, les vagues d’anglophobie et francophobie persistent encore parfois. (Rappelons qu’<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/03/18/318-les-guerres-oubliees-2">on peut considérer qu’il y a eu trois Guerres de Cent Ans</a>...)</p>
<h4>Chronologie</h4>
<p>Rappelons les grandes lignes de ce long massacre entre 1328 et 1453, en soulignant que les campagnes au Moyen Âge étaient brèves et entrecoupées de nombreuses trèves, d’où la durée.</p>
<ul>
<li><strong>Contexte</strong> : Les Capétiens, plus puissante monarchie d’Europe, devaient fatalement un jour rentrer en conflit ouvert avec les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plantagen%C3%AAt">Plantagenêt</a>, qui en plus de l’Angleterre possèdent de gros morceaux de la France (Normandie et Guyenne surtout). Il y avait déjà eu pas mal d’explications musclées avant que Philippe Auguste ne montre qui était le patron un siècle plus tôt. Finalement, des raisons économiques (Flandres) s’ajoutent, et ce sera une querelle dynastique qui déclenchera les festivités. Pour les détails, se référer à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/2005/11/21/34-les-rois-maudits-contexte-ii">mon billet sur le contexte des Rois maudits</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase I</strong> : Les Anglais ne cherchent qu’accessoirement la conquête, ils sont d’abord là pour piller. À Crécy les archers anglais écrasent l’armée de Philippe III. À Poitiers c’est carrément le fils de ce dernier, Jean II, qui se fait capturer, et comme rançon doit abandonner la moitié de son royaume à l’Anglais (mais il garde son trône). Autre catastrophe, la Peste Noire emporte un tiers de la population.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase II</strong> : Plus fûté que son chevalier de père, Charles V délègue au célèbre Du Guesclin les opérations militaires. Celui-ci préfère guérilla et harcèlement aux grandes chevauchées, et le résultat est là : les Anglais reperdent tout leurs gains. Fin du premier round et trève de quelques décennies.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase III</strong> : Le nouveau roi de France, Charles VI, devient progressivement fou. Les querelles pour sa tutelle mènent à une guerre civile entre ses oncles, cousins, et leurs descendants, divisés entre Armagnacs et Bourguignons. Le nouveau roi anglais Henri V en profite, s’allie aux Bourguignons, et prouve que les nobles français n’ont rien retenu de Crécy en les massacrant à Azincourt. La moitié de la France est occupée, et Henri V se fait reconnaître comme héritier de Charles VI, lequel déclare le Dauphin illégitime. Les deux rois meurent en même temps.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase IV</strong> : Le Dauphin et son « royaume du Bourges » résistent un temps à l’envahisseur, puis arrive le catalyseur : Jeanne d’Arc. Charles VII sacré à Reims, la réconciliations avec les Bourguignons signée, la reconquête commence, pendant que l’Angleterre connaît à son tour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Deux-Roses">guerre civile</a>. Les Anglais ne gardent que Calais. Fin du Moyen Âge.</li>
</ul>
<h4>Évolutions sociétales</h4>
<p>En un siècle, les armées féodales (temporaires, dominées par la chevalerie, peu soudées) sont devenues professionnelles (permanentes), puis modernes (disciplinées, avec beaucoup d’infanterie, de l’artillerie...).</p>
<p>Les Anglais innovent avec leurs fameux archers, issus des rangs des petits propriétaires. Malgré un entraînement étalé sur des années, ils étaient beaucoup moins chers que les lourds chevaliers français, forcément nobles, et beaucoup plus nombreux (l’Angleterre était bien moins peuplée que la France à l’époque).</p>
<p>L’entraînement d’autant d’archers et leur équipement nécessitaient une logistique, une planification, une proto-industrie et une quasi-conscription assez incroyables pour l’époque. Voilà pourquoi il y a tant de gens nommés Archer ou Stringer outre-Manche. Cette <em>gentry</em> a en conséquence gagné en poids fiscal puis politique : sont apparus alors les <em>Commons</em>, à côté des <em>Lords</em>, qui constituent encore aujourd’hui les deux chambres du Parlement britannique.</p>
<p>La France n’a pas compris ni cherché cette évolution. La levée en masse n’a jamais été à l’ordre du jour. La noblesse méprisait et la piétaille et ses ennemis, et était allergique au commandement unique : cela mena à Crécy, Poitiers puis finalement au massacre d’Azincourt.</p>
<p>L’armée permanente avait bien été inventée par Charles V, mais c’est l’élimination physique de nombreux nobles à Azincourt qui permet à Charles VII de moderniser le fonctionnement de l’ost royal, y compris son financement (la taille devient annuelle) et son recrutement (« gens d’arme » rattachés directement au roi, puis « francs archers » recrutés dans la population).</p>
<p>Enfin c’est l’artillerie qui fonde la puissance du roi de France : la noblesse n’a pas les moyens de se l’offrir, et ses châteaux ne résistent pas aux boulets. Bien qu’enrôlé, le peuple n’a toujours rien à dire. La suite, en caricaturant : absolutisme et Révolution violente.</p>
<p>Noter que cette émergence du peuple comme force militaire et politique était déjà ancienne et générale (milices italiennes qui fondent l’indépendance des cités ; communes des Flandres qui flanquent la pile à Philippe le Bel en personne ; cantons suisses...), et se poursuivra encore longtemps. Au passage, cela mènera à des batailles bien plus saignantes : fini l’esprit chevaleresque où on voulait d’abord des prisonniers à rançonner. (À rapprocher des Aztèques attaquant les Espagnols avec le même esprit...)</p>
<h4>Le nationalisme</h4>
<p>On savait déjà que le sentiment national français date de cette époque. Je me disais aussi que toute uchronie où les Anglais gagnaient impliquait une assimilation de l’Angleterre par la France : la noblesse anglaise étant parfois plus française qu’anglo-saxonne, ses conquêtes françaises auraient accentué le phénomène, et la différence démographique aurait fait le reste.</p>
<p>J’ai appris par contre que le sentiment national anglais a joué aussi, et contre eux : une victoire et la fusion des deux royaumes aurait mené à l’absorption par des Français honnis. J’aurais aimé plus de détails sur ce point...</p>
<h4>Évolutions technologiques</h4>
<p>L’armée anglaise est organisée autour de leur fameux arc, l’arme de destruction massive de l’époque, adapté à l’attaque par « saturation ». En face, les archers génois engagés par les Français misent sur la précision de leurs arbalètes, mais leur lenteur de réarmement les rend en fait plus adaptées aux sièges et aux batailles maritimes. L’arc perdra cependant de son importance suite à l’amélioration des cuirasses françaises à la toute fin de la guerre et plus tard à cause des armes à feu (plus chères mais plus faciles à maîtriser).</p>
<p>En face, les Français n’utilisent sérieusement l’artillerie qu’à la toute fin.</p>
<h4>La fin</h4>
<p>Quand Bordeaux tombe, Charles VII met fin à trois siècles d’affrontement entre Capétiens et Plantagenêt. Et c’est aussi par l’artillerie qu’au même moment les Turcs prennent Constantinople et achèvent l’Empire romain. Aux deux extrémités de l’Europe sonne ainsi la fin la fin du Moyen Âge.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Article d’ailleurs qui noie dans l’huile la crédibilité de toute uchronie où le Japon ou l’Allemagne gagne la guerre : dans une guerre archi-mécanisée, Américains et Russes avaient quasiment tout le pétrole, et ce que l’Axe a pu ou aurait pu atteindre était trop loin pour le ramener.</em> </p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/728« Pour la Science » de mars 2012 : pharaons au ¹⁴C & véritable hasardurn:md5:8394081bc662619215478ec35f6a80062012-04-11T23:06:00+02:002015-10-06T12:43:53+02:00ChristopheScience et conscienceAfriqueAntiquitéapocalypsebon senscomplexitéconquête de l’inutiledéterminismeexpertisehard sciencehistoiremathématiquesmémoirenatureperspectivesciencesimulationsociétés primitivestemps <p><img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/pls_413_couv_175.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />
Ce numéro est périmé<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, donc on va faire vite<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>. (<em>Commentaires personnels en italique comme d’hab’.</em>)</p>
<h3>Le bloc-note de Didier Nordon</h3>
<ul>
<li>« Les économies d’énergie commandent donc que l’on supprime les feux de circulation et que l’on confère aux voitures une priorité permanente sur les piétons » car les arrêts-redémarrages consomment beaucoup d’énergie. <br /> <br /><em>Dissertez sur la notion de « priorité d’une société »… Puis remplacez les feux rouges par les lois sur la pollution par exemple.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Un train annoncé à 14 h 22, puis en retard à 14 h 52, arrivé finalement à 14 h 47 est-il en retard de 25 ou en avance de 5 minutes ?<br /> <br /><em>Ne rigolez pas, l’embellissement des mauvais résultats est un art pratiqué dans beaucoup de hautes sphères !</em></li>
</ul>
<h3>Égypte ancienne et carbone 14</h3>
<p>Malgré deux siècles de décryptage intensif de hiéroglyphes, les archéologues hésitent sur les dates exactes des règnes des divers pharaons, et cela empire évidemment en remontant le temps : l’incertitude approche du siècle pour les plus anciens. Les Égyptiens ne tenaient pas de calendrier à origine fixe comme les Hébreux ou nous, et certains périodes troublées laissent peu de traces qui permettent de calculer leur durée… Même les références astronomiques peuvent être douteuses.</p>
<p>Le principe du carbone 14 est connu, mais un article expose les biais de la méthode, et comment calibrer les courbes. Au tout début, on supposait constante dans le temps la concentration en ¹⁴C par rapport au ¹²C car elle découle de l’action des rayons cosmiques sur le carbone atmosphérique. Il suffisait donc de mesurer la quantité restante de ¹⁴C (demi-vie : environ 5700 ans) par rapport au ¹²C pour savoir depuis combien de temps la matière biologique étudiée n’avait plus d’échange avec l’atmosphère (donc qu’elle était morte).</p>
<p>Cependant, la concentration atmosphérique de ¹⁴C varie dans le temps, et aussi avec le champ magnétique terrestre, le climat, la latitude, le type de créature (les deux isotopes ne sont pas <em>strictement</em> chimiquement identiques, les plantes ou les animaux ne les absorbent pas de manière identique), l’influence de l’océan et son inertie, ce qui introduit un biais dans les zones côtières, etc.</p>
<p>Bref, il faut une courbe de calibration, relativement tordue au final, créée notamment grâce au comptage des cernes des vieux arbres (on peut remonter à 11 000 ans, avant c’était la glaciation) ou aux coraux et carbonates marins (on arrive à -50 000 ans).</p>
<p>Au final, après une sélection d’échantillons assez drastique, les scientifiques de plusieurs pays sont parvenus à dater précisément (un quart à un demi-siècle près…) de nombreux règnes de pharaons. L’accord avec les diverses dates historiques supposées est bon, et permettrait de trancher pour les plus anciennes.</p>
<h3>L’impossible hasard</h3>
<p><em>C’est vraiment une constante : les articles de Jean-Paul Delahaye m’intéressent beaucoup une fois sur deux, sinon je suis carrément froid. Pas de milieu !</em></p>
<p>Le hasard pur a un critère : la suite doit être incompressible (non reproductible sauf à l’énumérer), et imprévisible (aucun système de pari ne peut gagner contre elle). Les irrationnels comme π ou √2 passent les pires tests d’imprévisibilité haut la main mais sont compressibles (leur définition suffit à tout recalculer).</p>
<p>Pour produire ce hasard deux moyens sont utilisés à notre époque : des algorithmes mathématiques (donc ce n’est pas du hasard pur non plus !) ou des systèmes à base de phénomènes quantiques… mais dans ce dernier cas rien ne permet d’affirmer réellement que ce hasard est bien pur. Les phénomènes physiques (jet de pièces) sont trop biaisés si bien contrôlés. (Au passage : le calcul du résultat d’un jet à la roulette est bien en pratique imprévisible, quoi qu’en disent des casinos trop heureux de faire croire à l’existence de martingales).</p>
<p>Pour la pratique (vénales machines à sous, secrète cryptographie, ou scientifiques méthode de Monte-Carlo), ce problème théorique fondamental n’a pas d’importance. « La théorie et la pratique divergent au maximum ! »</p>
<p>Dans le numéro d’avril suivant, Jean-Paul Delahaye répond à un lecteur en évoquant le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Oméga_de_Chaitin">nombre Oméga de Chaitin</a> comme nombre mathématiquement définissable mais totalement aléatoire (l’article Wikipédia sus-lié est passionnant, du moins la première partie que je suis parvenu à comprendre avant de décrocher).</p>
<h3>Divers</h3>
<p><img src="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/65/Hypsibiusdujardini.jpg" alt="http://tardigrades.bio.unc.edu/" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<ul>
<li>Les tardigrades sont d’adorables bestioles d’un demi-millimètre… et quasiment indestructibles, y compris après un voyage dans l’espace ! <br />(Image : Willow Gabriel and Bob Goldstein, <a href="http://tardigrades.bio.unc.edu/" hreflang="en">http://tardigrades.bio.unc.edu/</a>, <em>via</em> Wikipédia)</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article décrit les querelles entre scientifiques français (Wurtz & Berthelot notamment) sur l’hypothèse atomique pendant tout le XIXè siècle. Simples notations, hypothèses non scientifiques, existence réelle ou pas ?</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article décrit le contexte géologique de la région de Franceville au Gabon : ses roches contiennent les restes des plus vieux organismes pluricellulaires connus (<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2010">on en avait parlé rapidement</a>). Cette zone a notamment été peu perturbée par les tremblements de terre depuis cette époque.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’extinction massive du Permien (peu avant l’apparition des dinosaures ; <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien">tiens, j’en avais déjà causé</a>) aurait bien été causée<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> par les trapps de Sibérie, les kilomètres d’épaisseur de basalte crachés par des milliers de volcans, la libération de milliers de gigatonnes<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup> de chlore, soufre et autres saletés, avec (c’est la découverte) empoisonnement au mercure de toute la chaîne alimentaire à la clé.</li>
</ul>
<ul>
<li>La disposition des panneaux de la centrale solaire de Séville suit la même logique en spirale que la disposition des feuilles de tournesol. <br /><em>J’adore quand des ingénieurs redécouvrent ce que la nature avait déjà trouvé.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Les alligators de Floride ont trouvé leur prédateur : le python birman, en train de se répandre dans les Everglades, en attendant le reste des États-Unis.</li>
</ul>
<ul>
<li>On pense pouvoir descendre bientôt à une température d’un picokelvin.<br /><em>Glagla. En laboratoire uniquement, heureusement.</em></li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Façon de parler, la Connaissance est intemporelle. Pendant mes études, je prenais plaisir à feuilleter les premiers numéros de </em>Pour la Science<em>, d’une époque où je ne savais pas lire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Même pressé par le temps, vous savez que j’en suis incapable.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Est-ce une inesthétique répétition quand le verbe « causer » est utilisé dans deux acceptions différentes à la suite ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Ça sonne mieux que « 1 ou 2 pétakilogrammes ».</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mars-2012#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/683« Pour la Science » d’août 2011 : inflation cosmique, octonions, Antiquité polychromeurn:md5:d84fa64351651f749e287767fda94ace2011-08-23T00:00:00+02:002015-09-14T12:58:22+02:00ChristopheScience et conscienceabominationAmériqueAntiquitéargentastronomiebombe atomiquecomplexitéconquête de l’inutilecosmologiegigantismeguerrehistoiremathématiquesprise de têtesantéscienceSeconde Guerre MondialetempsuniversÉtats-Unis<p>« Petit » numéro dans le sens où rien de très frappant ne m’a été révélé.</p> <p>En très rapide (<em>et comme d’habitude avec mes commentaires personnels subjectifs en italique</em>) :</p>
<p><img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/full/_done_20110719_182833_PLS-2011-aout_406-fu-pls_406_couv_175.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’Antiquité était colorée</h3>
<p>Les statues et monuments antiques, que l’inconscient collectif conserve blanches et immaculées, étaient bigarrées en diable. L’article traite notamment des statues grecques, des fresques et frusques assyriennes ou babyloniennes <em>(et, ajouterai-je, c’est même valable pour les <a href="http://www.liturgiecatholique.fr/Amiens-la-cathedrale-en-couleurs.html?artsuite=1">cathédrales</a>)</em>.</p>
<p>Les robes et costumes étaient également colorés. Il y eut même tout un commerce du bleu égyptien pendant des siècles autour de la Méditerranée.</p>
<h3>Le retour des farines animales</h3>
<p>Une tribune prône le retour de l’utilisation des farines animales, interdites depuis la crise de la vache folle. Mais à présent, l’ESB a disparu, et utiliser des farines dans des conditions plus prudentes qu’autrefois (jamais au sein de la même espèce, ni quand une encéphalopathie transmissible est envisageable, avec des contrôles stricts) serait économiquement pertinent : le soja (importé voire transgénique) coûte dix fois plus cher que le déchet de boucherie (mangeable par des humains !), rejeté actuellement plus pour des raisons commerciales que sanitaires.</p>
<h3>L’inflation se dégonfle ?</h3>
<p>En cosmologie, l’<strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Inflation_cosmique">inflation</a></strong> avait, il y a 30 ans, semblé résoudre pas mal de problèmes dans la théorie du Big Bang : en enflant de façon démentielle en très peu de temps au tout début de son existence, l’Univers devenait ainsi plat.</p>
<p>Un article s’interroge (l’auteur semble vraiment dubitatif) sur certaines interprétations naïves des début de la théorie qui lèvent à présent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent, sur le pouvoir prédictif de la théorie, sur des théories qui pourraient tout aussi bien expliquer l’univers que l’inflation : inflation éternelle, univers cyclique…</p>
<p>Comme souvent en cosmologie théorique, impossible de trancher avec les éléments actuels : il faudra voir si l’inflation est confirmée par la découverte d’ondes gravitationnelles, prochainement (peut-être).</p>
<p><em>(Je ne prétends pas voir réellement compris les arguments pour et contre l’inflation ni même m’en souvenir dans deux semaines…</em>)</p>
<h3>Les omégas 3 c’est bon, mangez-en</h3>
<p>Les <strong>omégas 3 et 6</strong> sont des acides gras issus des plantes et primordiaux pour la santé. Ce qui est important aussi est l’équilibre entre eux, surtout si les apports en oméga 3 sont insuffisants. Les apports principaux chez l’homme ne sont pas végétaux mais animaux (laitages d’abord, puis produits carnés).</p>
<p>Pour augmenter les apports par la nourriture, il faudrait aussi que les animaux de boucherie mangent du lin, mais le lapin, ou les poules ayant mangé des escargots ayant eux-même mangé du pourpier, sont déjà de bonnes sources. L’effet est transgénérationnel : mesdames, mangez du poisson gras (saumon, maquereau, sardine…) pendant votre grossesse ! Les oméga 3 protègent en outre nos artères et contre la dépression. Si le commun des mortels satisfera ses besoins par une alimentation variée riche en huiles végétales (colza, noix…), certains cas graves nécessitent des capsules</p>
<h3>Dimension 8</h3>
<p>Les <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Octonion">octonions</a></strong> ont été inventés (découverts ?) au milieu du XIXè siècle, et peu étudiés depuis : ils sont la version en 8 dimensions des nombres complexes et des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Quaternion">quaternions</a>. Les nombres complexes sont utilisés massivement depuis la Renaissance, et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/William_Rowan_Hamilton">Hamilton</a> s’est consacré aux quaternions après avoir séché sur les triplets, où multiplication et division ne peuvent être définies de façon cohérente et utile (<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Pour-la-Science-de-septembre-2010">c’est pour cela que le Mandelbulb a été long à trouver</a></em>).</p>
<p>Au-delà de 4, ce n’est qu’en dimension 8 que l’on trouve à nouveau une algèbre utilisable. Graves, un ami d’Hamilton, inventa les octonions dans la foulée de la découverte des quaternions (dans l’optique de « pourquoi ne pas pousser le bouchon encore plus loin ; quitte à utiliser 3 imaginaires, pourquoi pas aller à 7 ? »), sans qu’Hamilton s’y intéresse vraiment. En effet, d’une part il était déjà accaparé par ses quaternions et leurs applications (description des rotations…) ; d’autre part la multiplication des octonions a le mauvais goût de ne pas être associative (en plus de ne pas être commutative comme déjà pour les quaternions) ; enfin Hamilton voyait sans doute mal l’utilité, même mathématique, des octonions.</p>
<p>Un siècle et demi plus tard, c’est la théorie des cordes qui ressort les octonions du placard poussiéreux des maths : on sait que cette théorie ne serait cohérente qu’en dimension 10 ; or c’est le nombre de dimensions d’un monde où les particules de matière et de force sont décrites par des octonions (dimension 8) parcourant des cordes (unidimensionnelles) dans le temps (unidimensionnel), cela en respectant la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Supersymétrie">supersymétrie</a>, théorie si belle qu’elle ne peut qu’être juste (<em>!</em>).</p>
<p>Ni la théorie des cordes ni la supersymétrie ne sont encore confirmées expérimentalement, mais les choses semblent bonnes dans le proche avenir… pour certains. Les octonions, pure curiosité mathématique, sont peut-être à la base de la compréhension du monde.</p>
<p><em>(Comme je dis toujours, les maths servent à fournir des outils à des physiciens cinquante ans plus tard, pour qu’ils découvrent des théories qui ne seront réellement utiles que cinquante ans plus tard.)</em></p>
<h3>L’argent de la bombe atomique</h3>
<p>Un article intéressant sur un aspect purement matériel du <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_Manhattan">Manhattan Project</a></em> : pour séparer les deux isotopes d’uranium (<em>le <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Little_Boy" hreflang="en">235 qui foudroya les Japonais</a> est naturellement noyé dans le <a href="http://cseserv.engr.scu.edu/StudentWebPages/IPesic/ResearchPaper.htm" hreflang="en">238 qui n’est bon qu’à faire des obus pour casser de l’Irakien ou du Serbe</a></em>) au sein de gigantesques <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Calutron" hreflang="en">calutrons</a>, il y avait besoin d’une quantité monstrueuse de cuivre, au point que cela aurait gêné la production de munitions, voire mis la puce à l’oreille à l’ennemi.</p>
<p>Le cuivre pouvait être remplacé par de l’argent : c’est carrément le Trésor américain qui fournit pas moins de 13300 tonnes du métal, déjà quasiment pur ! La surveillance et le soin de récupération de l’argent seront tels qu’il y eut même un excès quand le dernier lingot fut rendu… en 1970 ! Dès 1946 d’autres techniques de séparation isotopique furent employées mais certains calutrons restèrent longtemps en service.</p>
<p>Cet argent fut manipulé, transformé de manière complexe, et les appareils qui le contenait utilisés par des milliers de gens qui n’avaient aucune idée de ce à quoi ils contribuaient. <em>(Et que des ressources matérielles et humaines aussi démentielles aient pu être détournées aussi longtemps pour un projet dont le succès à court terme était plus qu’aléatoire, le tout malgré (grâce à ?) la guerre me fascinera toujours.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Les doigts se friperaient dans l’eau pour améliorer la préhension en milieu humide !</li>
</ul>
<ul>
<li>Les ultraviolets A sont moins dangereux que les B, mais ils représentent 95% des UV. Ils attaquent l’ADN de manière différente, un article donne tous les détails.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2011#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/658« Pour la Science » d’août 2010 : calmars géants, neutrinos et postpérovskiteurn:md5:bd40ed446a18ba65afd3a790da3264352010-08-21T18:03:00+02:002011-06-12T15:23:28+02:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéargentauto-organisationbon senscitationcivilisationcomplexitéconquête de l’inutiledéveloppementenfantsextraterrestresgigantismeguerregéologiehistoireintelligencenaturepsychologiesciencesociétés primitivesspéculationsécuritétempsténacitééconomieéducationémerveillementéonsévolution<p>Ce numéro n’est peut-être plus en kiosque, vu que j’ai déjà reçu le suivant. Mais baste, ceci me sert aussi à me rappeler plus tard de ce dont je veux me souvenir (et je suppose que la plupart de ceux qui tomberont par hasard sur ceci se contenteront du résumé et n’iront pas acheter le numéro, <a href="http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/archives.php">même en ligne chez l’éditeur</a>).</p> <p>En italiques, mes commentaires personnels.</p>
<h3>Chronique de Didier Nordon</h3>
<p>Pleins d’idées en une page, comme d’habitude. Notamment :</p>
<ul>
<li>La philosophie ressasse les sentences des Grands Anciens<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2010#pnote-625-1" id="rev-pnote-625-1">1</a>]</sup>, alors qu’objectivement toutes n’en valent pas la peine. À l’inverse, la science liquide sans état d’âme ce qui s’avère faux, se privant de l’étude de la survenue de l’erreur justement.<br /> <br />(<em>Mouais, un peu réducteur… comme toute provocation qui a un fond de vérité.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Les feux rouges sont inutiles : en nous fiant à un signe arbitraire et en laissant de côté l’important (regarder si personne ne vient), nous provoquons justement certains accidents. <br /> <br />(<em>Mouais. L’idéal, ce sont les deux : des règles et le bon sens. Toute mesure de sécurité ne vaut que si elle est strictement respectée (les grandes catastrophes sont l’accumulation de plusieurs négligences). Je me souviens effectivement de mon grand-père pompier qui disait que la nuit, les feux rouges étaient ignorés et qu’il fallait faire attention même au vert ; d’ailleurs à présent beaucoup de feux sont oranges la nuit. À l’inverse, j’ai connu bien des carrefours bloqués par des gens qui ne respectaient pas les feux et s’engageaient — ou, à l’inverse encore, s’engageaient parce que c’était vert même s’il n’y avait pas la place.</em>)</li>
</ul>
<h3>Vieux fossiles</h3>
<p>Des micro-organismes vieux de 2,1 milliards d’années découverts au Gabon repoussent carrément de 1,5 milliards d’années l’apparition de la vie multicellulaire. Les bestioles « complexes » datent surtout d’il y a 500 millions d’années.</p>
<p>(<em>Mine de rien, c’est un paramètre à rajouter au <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/06/08/54-le-paradoxe-de-fermi">Paradoxe de Fermi</a> : la lenteur de l’émergence de la vie multicellulaire pouvait être un signe de sa rareté dans l’univers. Là, il semble que ce soit le multicellulaire </em>complexe<em> qui ait mis son temps à apparaître.</em>)</p>
<h3>Vidéosurveillance et délinquance</h3>
<p>Une « méta-analyse » rassemble des études sur le même sujet, trie celles méthodologiquement douteuses, et fait une synthèse. La conclusion, en gros : la vidéosurveillance, présentée par beaucoup comme la panacée, n’est efficace que dans certaines conditions. Les caméras sont très dissuasives sur les vols dans certains parkings par exemple, mais à peine sur les violences physiques en ville. Il n’est pas facile de distinguer l’effet de la caméra et celui de l’éclairage amélioré à la même occasion… Le déplacement de la criminalité n’est pas non plus une évidence. La population est sans illusion sur l’efficacité mais plébiscite en général.</p>
<h3>Résilience</h3>
<p>Boris Cyrulnik résume ses travaux sur la résilience, c’est-à-dire la capacité de certaines personnes et enfants à se reconstruire, contre toute attente, après une catastrophe, une agression majeure, ou un abandon complet (voir le tragique cas des orphelinats roumains sous Ceaucescu). Cette capacité est acquise très tôt dans la vie, on peut distinguer un bébé de neuf mois « sécure » (qui a été stimulé et protégé, et est devenu curieux, sociable…) d’un autre qui ne l’est pas, et sera plus vulnérable en cas de catastrophe. Les liens avec la neurologie sont frappants (action sur l’hypothalamus, sécrétions de sérotonine…).</p>
<h3>La postpérovskite</h3>
<p>Kei Hirose a découvert la postpérovskite, un minéral dont l’existence au fin fond du manteau terrestre était inconnue. Quelle importance ? Une mince couche de ce minéral, aux très hautes pressions qui règne entre le noyau terrestre et le manteau inférieur (constitué de pérovskite, lui) , joue un rôle capital dans les transferts de chaleur du centre vers la surface de notre planète.</p>
<p>Cela n’intéresse que certains géophysiciens, pensera-t-on. Pourtant, l’impact sur la vie terrestre a pu être important : un refroidissement accéléré pourrait impliquer que la graine, au centre du noyau, n’a « que » un milliard d’années, et que le champ magnétique terrestre n’existait donc pas avant, interdisant à la vie de sortir de l’océan.</p>
<p>(<em>Même si plantes et animaux ont mis encore un bout de temps après cela à conquérir la terre ferme, ce facteur est lui aussi à prendre en compte dans la probabilité d’apparition de la vie intelligente. Surtout que la postpérovskite semble se former dans un domaine restreint de température et pression. Dommage, l’article ne dit pas combien de temps il aurait fallu sans ce minéral magique pour former la graine.</em>)</p>
<p>M’amuse aussi le lien entre expériences de laboratoire pour créer et étudier le minéral, et l’étude de la terre elle-même. (Un passage savoureux sur les difficultés à reproduire les pressions gigantesques du manteau avec des enclumes en diamant : « Avec mes collègues, nous avons ainsi perdu de nombreux diamants, ce qui a sérieusement entamé nos crédits de recherche et notre enthousiasme. »)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>La ville égyptienne d’Oxyrinchos a fourni aux archéologues des milliers de papyrus antiques. On y lit que cette ville, bien avant la conquête par Alexandre le Grand en -332, était déjà à moitié grecque. Commerçants et mercenaires héllènes présents depuis des générations ont fourni à la dynastie grecque des Ptolémés l’élite administrative pour la prise en main de l’Égypte jusqu’à la conquête romaine. Les Grecs ont gardé leur langue et leur mode de vie jusqu’à l’ère chrétienne et, s’ils ont fait beaucoup d’emprunts à la religion égyptienne, l’inverse semble faux.</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article décrit les progrès dans la détection des neutrinos, particules pourtant quasi-indétectables, qui ouvrent la voie à de nouvelles branches de l’astronomie.</li>
</ul>
<ul>
<li>Un gros article sur les <em>Architeuthis</em> ou calmars géants. (<em>Belles bêtes</em> !)</li>
</ul>
<ul>
<li>Les cachalots mangeurs de baleine ont existé il y a 12 millions d’années. Ils avaient des dents de 36 cm. (<em>Enfoncé, le tyrannosaure !</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Les chimpanzés se font la guerre, et il y a des morts. (<em>Plus le temps passe, plus on voit que l’homme n’est qu’un singe comme les autres.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>L’<a href="http://www.liberation.fr/vous/0101641554-outox-la-boisson-detox-ou-intox">Outox</a> est une intox : ses effets mesurés sont faibles, et explicables par la concentration en fructose et en acide citrique.</li>
</ul>
<ul>
<li>La chronique d’Ivar Ekeland explique que dans une entreprise les actionnaires ne sont pas responsables pour plus que leur part dans l’entreprise. Au pire pour eux, la société responsable d’une catastrophe (par exemple BP) serait liquidée pour payer les dégâts, mais ils n’auraient pas à payer plus. Dommage pour la société dans son ensemble.<br /> <br />(<em>D’un autre côté, est-ce que vous investiriez dans une entreprise si vous saviez que vous pourriez être amenés à couvrir les bourdes du dirigeant ? La société à responsabilité limitée est une des raisons du succès du capitalisme. Plus choquante est la prime de départ mirifique du patron même si, comme le remarque Ekeland, ça reste théoriquement une punition puisqu’il aurait touché plus en restant !</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>La SNCF fait n’importe quoi avec son fret. (<em>On n’a pas fini de voir des camions sur les routes.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Il serait possible de faire du caoutchouc en Europe, avec du pissenlit russe.</li>
</ul>
<ul>
<li>Hervé This étudie la vodka : les liaisons hydrogènes ont une influence sur le goût, et les impuretés ont un impact sur l’hydratation de l’éthanol.</li>
</ul>
<ul>
<li><a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Martin_Gardner" hreflang="en">Martin Gardner</a>, pilier du <em>Scientific American</em> (père américain de <em>Pour la Science</em>), est mort. Snif.</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2010#rev-pnote-625-1" id="pnote-625-1">1</a>] <em>Tiens, on dirait du Lovecraft.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2010#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/625« Atlas de Paris, évolution d’un paysage urbain » de Danielle Chadych & Dominique Leborgneurn:md5:514e2c3417b2cd0e7e8adc56743f14732009-04-07T00:00:00+02:002011-06-03T08:40:53+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesAntiquitécartesdéveloppementGauloisHistoire de Francelivres lusMoyen ÂgeorganisationParistempsévolution<p>Non, cet <em>Atlas de Paris</em> n’est pas un énième guide touristique avec rues et adresses des musées et restaurants, mais d’un bon résumé de l’histoire de la Capitale, des Gaulois à Delanoë. Il y a plein de cartes et j’aime ça.</p> <h3>Les traces du passé</h3>
<p>Le plan de la capitale, et bien des noms de lieux ou de rues archi-connus, prennent tout leur sens à la lumière de l’histoire du développement. Le plus flagrant est l’influence des différentes lignes de fortifications encore visibles dans le paysage : c’est évident pour le périphérique (ancienne enceinte de Thiers, au XIXè), très net pour les Boulevards des Maréchaux (qui longent cette même ancienne enceinte), ou les boulevards plus intérieurs qui ont remplacé les murailles de Philippe Auguste puis Charles V. Certaines rues un peu biscornues tout près du périphérique proviennent des limites d’anciens bastions. À l’inverse, il reste assez peu de marques évidentes de l’enceinte des Fermiers généraux (fin du XVIIIè).</p>
<p>Cette évolution concentrique, chaque enceinte se retrouvant débordée par le développement des faubourgs, est une constante de l’histoire parisienne. Je ne verrai plus les Champs-Élysées avec le même œil : anciennement c’était juste une grande allée en forêt à la sortie des Tuileries. D’autres pans entiers de la ville viennent de lotissements massifs sous François Ier, Richelieu, etc.</p>
<p>De nombreux quartiers ont été modelés par des bâtiments aujourd’hui disparus, par exemple le quartier du Temple (bâti autour de la gigantesque commanderie des Templiers... en banlieue sous Philippe Auguste).</p>
<p>Je suis resté rêveur devant le plan de Paris... sans Paris, avec les altitudes, et l’ancien méandre de la Seine : on fait vite le lien avec les zones inondables. Ou celui des toutes premières rues : <del>Paris</del> Lutèce au début de notre ère, c’était la Cité, les rues Saint-Honoré, Saint-Denis et Saint-Martin rive droite, plus trois rues dans l’actuel Quartier Latin rive gauche ; l’axe historique Saint-Jacques-Saint Denis étant <del>l’antique</del> la protohistorique route des Pyrénées au Rhin. L’île de la Cité a une histoire mouvementée également, puisque c’est le cœur de Lutèce, et longtemps le passage obligé pour traverser la Seine.</p>
<p>J’ai bien aimé l’histoire des ponts : montés souvent par des entrepreneurs privés qui voulaient rentabiliser, ils étaient garnis de maisons. À l’heure où l’on apprécie la disparition des frontières grâce à l’Europe, on oublie que franchir la Seine fut très longtemps soumis à péage...</p>
<p>Certaines peintures ou photographies reproduites dans le livre (dont une bonne partie du Musée Carnavalet, après tout dédié à la ville ; il faudra que j’y fasse un tour...) semblent surréalistes par l’impression bucolique qui en ressort ! La plus fascinante ouvre même le livre : une vue en ballon depuis l’observatoire en 1855 : la couronne des arrondissements extérieurs (en gros, entre l’enceinte des Fermiers généraux et celle de Thiers ) tient plus du village clairsemé que de la mégalopole !</p>
<p>Et au fil des pages tombent les petites perles de savoir : une rue se « perce », et effectivement c’est parfois comme creuser un tunnel ; les passages couverts attiraient magasin et clients plus que les rues habituelles... car il n’y avait simplement pas de trottoir dans les rues jusque tard dans le XIXè ; les guinguettes hors les murs n’étaient pas seulement conviviales, mais aussi bon marché car les marchandises importées dans Paris étaient soumises à l’octroi (les enceintes étaient aussi, sinon surtout, fiscales !) ; le premier rond-point de l’histoire fut aussi le plus grand (la Place de l’Étoile en 1907) ; etc.</p>
<h3>Deux petits regrets</h3>
<ul>
<li>Il n’y a pas de carte détaillée du Paris actuel, et il faudra se munir d’un plan (celui pour touriste en 30 pages avec index des rues suffira) pour voir le tracé de toutes les rues évoquées et les visualiser l’agencement ; cependant la plupart des cartes portent en surimpression les tracés actuels.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pas un mot sur la Tour Eiffel<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/02/02/Atlas-de-paris#pnote-532-1" id="rev-pnote-532-1">1</a>]</sup> ! Mais soyons honnête : du point urbanistique, elle n’a rien changé, ayant été plantée sur un terrain de l’École militaire à un moment où la ville avait quasiment atteint son expansion actuelle.</li>
</ul>
<h3>Bref</h3>
<p>Un ouvrage indispensable pour les Parisiens, et très intéressant pour les autres.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/02/02/Atlas-de-paris#rev-pnote-532-1" id="pnote-532-1">1</a>] <em>Là je fais mon provincial...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/02/02/Atlas-de-paris#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/532Les marges des déserts, berceaux des civilisationsurn:md5:f3bcdc86b231032268e0de808418bd012009-01-01T12:14:00+01:002009-04-13T10:40:06+02:00ChristopheHistoireAfriqueAmériqueAntiquitéauto-organisationcatastrophecivilisationclimatcomplexitéeaueffet de serreEmpire romainEuropeexaptationGrandes InvasionshistoireMoyen Âgeoptimismeparadoxesciencesociétés primitivestempsthéorietravailténacitéécologieéconomieéonsévolution<p>Une révé­la­tion sur la simul­ta­néité de l’appa­ri­tion de l’agri­cul­ture et de la civi­li­sa­tion dans les dif­fé­ren­tes par­ties du monde.</p> <h3>Simul­ta­néité du génie humain</h3>
<p>La révé­la­tion m’est venue grâce à un arti­cle du der­nier <em>Pour la Science</em> (n°375 de jan­vier 2009) : <em>Les mar­ges de désert, ber­ceaux des civi­li­sa­tions</em> de Bern­hard Eitel.</p>
<p>Jusqu’ici je m’étais tou­jours demandé com­ment il se fai­sait que les dif­fé­ren­tes civi­li­sa­tions humai­nes aient évo­lué sépa­ré­ment jusqu’à des sta­des pas trop dif­fé­rents les unes des autres, alors que l’huma­nité (<em>Homo sapiens</em>) a pres­que 200 000 ans au comp­teur. Cer­tes, au début, elle fut long­temps con­cen­trée en Afri­que<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#pnote-504-1" id="rev-pnote-504-1">1</a>]</sup>. Mais l’agri­cul­ture, l’écri­ture sont appa­rues en fait très récem­ment (je trouve des dates dif­fé­ren­tes sur le web, mais on tourne autour de 10 000 av. J.-C.). Un peu avant (-16 000), les chas­seurs déco­raient Las­caux.</p>
<p>Et atten­tion, on ne parle pas d’une décou­verte qui a donné un tel avan­tage à ses décou­vreurs qu’ils se sont répan­dus par­tout sur la pla­nète : l’agri­cul­ture a été décou­verte plu­sieurs fois, et l’écri­ture aussi. Si en Europe tout cela est bien de l’impor­ta­tion (il a même fallu pas mal de siè­cle depuis l’Ana­to­lie jusqu’à l’Atlan­ti­que), les Amé­ri­ques ont évo­lué indé­pen­dam­ment. Et mayas, aztè­ques, incas… con­nais­saient agri­cul­ture et écri­ture. Même si leurs civi­li­sa­tions ont été balayées par les Euro­péens, ces peu­ples n’avaient au plus « que » quel­ques siè­cles de retard sur l’Eura­sie. C’est un petit écart sur de tel­les durées.</p>
<p>Sans avoir trop réflé­chi à la ques­tion, je ne voyais que trois pos­si­bi­li­tés :</p>
<ul>
<li>une com­mu­ni­ca­tion entre les dif­fé­rents grou­pes : très dou­teux à l’échelle de plu­sieurs con­ti­nents, du moins avant l’inven­tion de la « civi­li­sa­tion », et cette com­mu­ni­ca­tion se fai­sait plu­tôt par migra­tion lente comme le néo­li­thi­que en Europe ;</li>
<li>une sorte de « fata­lisme », un groupe humain suf­fi­sam­ment impor­tant décou­vrant fata­le­ment l’agri­cul­ture au bout de tant d’années maxi­mum, et la masse cri­ti­que a été atteinte à peu près simul­ta­né­ment à plu­sieurs endroits à la fois car il y avait de nom­breux endroits où cela était pos­si­ble, et les pre­miers ont « étouffé » les autres ;</li>
<li>une cause exté­rieure glo­bale qui menait à l’agri­cul­ture et/ou la séden­ta­ri­sa­tion (laquelle est appa­rue la pre­mière ?), puis en cas­cade à l’explo­sion démo­gra­phi­que, les socié­tés, les États, etc. Mais quelle serait cette cause ?!?</li>
</ul>
<h3>La cause cli­ma­ti­que à dou­ble détente</h3>
<p>Selon l’arti­cle, c’est lumi­neux. La rai­son est cli­ma­ti­que : d’une part le réchauf­fe­ment de la pla­nète mar­que le pas après la fin de la gla­cia­tion ; d’autre part et assez con­tre-intui­ti­ve­ment, ce réchauf­fe­ment aug­mente la plu­vio­mé­trie dans les déserts.</p>
<ul>
<li>Nos ancê­tres se répan­dent un peu par­tout pen­dant les diver­ses gla­cia­tions et pério­des inter­gla­ciai­res jus­que la fin de la der­nière vers -18 000.</li>
<li>Il y a 8000 ans le cli­mat est devenu très clé­ment pour les chas­seurs-cueilleurs, et les déserts ont qua­si­ment dis­paru : le Sahara notam­ment est deve­nue une savane pleine de gibiers, sans qu’y sévis­sent les mala­dies tro­pi­ca­les. Eitel sug­gère que l’accrois­se­ment démo­gra­phi­que con­sé­quent y est la cause de l’inven­tion de l’éle­vage.</li>
<li>Après cette période de réchauf­fe­ment un léger refroi­dis­se­ment pro­vo­que un nou­veau dés­sè­che­ment des déserts. Les popu­la­tions, pié­gées, se réfu­gient dans les oasis - par exem­ple la plus grosse d’entre elles, le Nil ! Popu­la­tion impor­tante et néces­sité de s’adap­ter mènent à l’agri­cul­ture, l’irri­ga­tion, des sur­plus, du com­merce, des guer­res, une orga­ni­sa­tion crois­sante, des royau­mes, bref la société. Eitel note que ces royau­mes appa­rais­sent d’abord dans les endroits les plus secs et dif­fi­ci­les au bord du Nil, au sud !<br />Le phé­no­mène se repro­duit à d’autres endroits, notam­ment le Crois­sant fer­tile (au bord d’un désert et près de grands fleu­ves). Eitel détaille l’exem­ple récem­ment décou­vert du sud du Pérou : le désert de l’Ata­cama devenu humide est colo­nisé (plus tard qu’en Afri­que), puis s’assè­che et la popu­la­tion se regroupe dans des oasis flu­via­les. La den­sité de popu­la­tion a le même effet qu’ailleurs : séden­ta­ri­sa­tion, éle­vage, céra­mi­que, société, etc. <br />Un regret : l’arti­cle ne détaille pas l’évo­lu­tion dans les autres grands cen­tres de civi­li­sa­tion qui nais­sent à la même épo­que : la Chine, l’Indus, le Niger (même si ces deux der­niers sont là aussi des fleu­ves au bord d’un désert).</li>
</ul>
<h3>Pers­pec­tive</h3>
<p>Bref : expan­sion démo­gra­phi­que due à un cli­mat clé­ment, re-déser­ti­fi­ca­tion, con­cen­tra­tion, et inven­tion donc pres­que simul­ta­née de la civi­li­sa­tion à divers endroits.</p>
<p>Nous dépen­dons du cli­mat, ce n’est pas nou­veau. En marge de l’arti­cle, une courbe mon­tre que, plus récem­ment, celui-ci a joué un rôle : des opti­mums cli­ma­ti­ques ont vu l’apo­théose romaine ou l’expan­sion du Moyen Âge (entre l’An Mil et la Peste Noire, la popu­la­tion fran­çaise a plus que dou­blé !), et un refroi­dis­se­ment a mar­qué l’effon­dre­ment de l’Empire romain.</p>
<p>La ques­tion se pose quant à savoir si nous serons capa­bles de <em>nous</em> adap­ter au chan­ge­ment cli­ma­ti­que accé­léré actuel. Savoir qu’une période chaude n’est pas for­cé­ment syno­nyme de déser­ti­fi­ca­tion géné­rale redonne de l’espoir, encore ne fau­drait-il pas déboi­ser ni faire mon­ter le ther­mo­mè­tre trop haut trop vite…</p>
<p>Une leçon de morale pour finir : la « civi­li­sa­tion » (agri­cul­ture, société…) n’a pas été inven­tée par les peu­ples situés aux endroits les plus favo­ra­bles, mais par ceux qui, accu­lés par leur nom­bre et la raré­fac­tion des res­sour­ces, ont dû évo­luer pour ne pas dis­pa­raî­tre. « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort » et « c’est au pied du mur qu’on apprend à grim­per. »</p>
<p><strong>PS</strong> : Bonne année ! L’année 2009 pourra dif­fi­ci­le­ment déce­voir, ce sera son bon côté.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#rev-pnote-504-1" id="pnote-504-1">1</a>] <em>À moins que la théo­rie de l’évo­lu­tion simul­ta­née d’</em>Homo erec­tus<em> en </em>Homo sapiens<em> sur tous les con­ti­nents à la fois soit la bonne, mais j’ai cru com­pren­dre qu’elle était en perte de vitesse.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/504“Lest Darkness Fall” (« De peur que les les ténèbres ») de L. Sprague de Campurn:md5:2dd6e25edc2943f6d126f3999a1b820a2008-12-29T00:00:00+01:002011-06-02T18:23:45+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesAntiquitéByzancechristianismeEmpire romainFrancsGrandes Invasionshistoiremulticulturalismescience-fictiontempsthéologieuchronie<p>La tradition personnelle veut que je lise une uchronie en VO américaine à chaque Noël. <em>Lest Darkness Fall</em> n’est pas à proprement parler une uchronie, puisque le thème est le changement explicite du passé, mais ça ne change pas grand-chose au résultat — qui est jouissif.</p> <p><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Lyon_Sprague_de_Camp">Sprague de Camp</a> ne s’embarrasse pas d’explications sur les raisons qui ont précipité Padway, un historien américain du XXè siècle, en pleine Rome de l’Antiquité tardive, ce n’est de toute façon pas le sujet. Padway comprend très vite sa situation et essaie d’abord de survivre grâce à son astuce et sa connaissance de quelques inventions du genre du télégraphe optique ou de l’imprimerie, puis de sauver l’Europe des ténèbres.</p>
<p>Car, et c’est une des meilleures idées du livre, Padway n’a pas été précipité à une époque « classique » archi-connue, mais à une obscure page de l’Histoire : l’an 535. L’Empire Romain n’est plus qu’un souvenir, et l’Italie fait partie du royaume ostrogoth. Padway est le seul à le savoir, mais l’Empereur d’Orient Justinien<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/24/Lest-Darkness-Fall-De-peur-que-les-les-tenebres-de-L-Sprague-de-Camp#pnote-503-1" id="rev-pnote-503-1">1</a>]</sup> s’apprête à attaquer l’Italie, dans une longue guerre qui va ruiner la péninsule, et liquider définitivement la civilisation romaine. Sous la protection des barbares, celle-ci existe effectivement encore. Au nord, les Francs menacent. (Je suppose qu’un historien spécialiste trouverait à redire à tel ou tel détail, mais ne boudons pas notre plaisir.)</p>
<p>Le but de Padway est d’éviter ce Moyen-Âge obscur qui s’annonce. Autant que ses efforts, l’histoire donne un aperçu de ce que pouvait être la société multiethnique romaine de cette époque troublée, déchirée par les querelles religieuses, aux valeurs très éloignées des nôtres, et pas très favorables aux <em>start-ups</em> que tente de lancer Padway. Très vite, ce dernier devra se mêler de politique et de guerre.</p>
<p>Bref, un bon vieux classique<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/24/Lest-Darkness-Fall-De-peur-que-les-les-tenebres-de-L-Sprague-de-Camp#pnote-503-2" id="rev-pnote-503-2">2</a>]</sup> fort plaisant à lire.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/24/Lest-Darkness-Fall-De-peur-que-les-les-tenebres-de-L-Sprague-de-Camp#rev-pnote-503-1" id="pnote-503-1">1</a>] <em> <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/10/26/19-byzance-ii-de-l-apogee-justinienne-a-la-castastrophe">J’avais déja causé de Justinien et Bélisaire ici.</a></em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/24/Lest-Darkness-Fall-De-peur-que-les-les-tenebres-de-L-Sprague-de-Camp#rev-pnote-503-2" id="pnote-503-2">2</a>] <em>De 1938 !</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/24/Lest-Darkness-Fall-De-peur-que-les-les-tenebres-de-L-Sprague-de-Camp#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/503« Pour la Science » de décembre 2008 : sauropodes qui fermentent, mer Aral qui remonte.urn:md5:2ac77f157b3697c8438b8f4268b716022008-11-26T00:00:00+01:002011-06-02T11:00:19+02:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéauto-organisationcatastropheclimatconquête de l’inutileconquête spatialedinosauresdéterminismeeauenfantsenseignementgaspillageGauloisgéologieMarsmathématiquesoptimismeperspectivesciencetourismeécologieéducationémerveillement<p>Plein de petites choses.</p> <p>Un bon numéro de ma revue non informatique préférée. Sélection-flash (<em>en italique mes commentaires purement personnels</em>) :</p>
<ul>
<li>Un article sur la <strong>réforme du lycée</strong> où la part des sciences risque de ne pas sortir grandie, pour employer un euphémisme.<br /><em>Je ne ferai aucun commentaire sur notre Éducation nationale car je ne veux pas m’énerver.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Un petit article sur la <strong>vision des bébés</strong> : c’est très flou les premiers mois.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Union Européenne étudie comment encadrer le <strong>tourisme médical</strong> (<em>pas forcément un mal en soi</em>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Le meilleur article : <em><strong>Les sauropodes, géants habiles</strong></em>. <br />Les sauropodes, ce sont ces diplodocus, brachiosaures, titanosaures et autres bestioles, herbivores gigantesques, les plus pesantes créatures terrestres connues.<br />Les dernières découvertes établissent que ces animaux étaient bien terrestres et pas amphibies, à sang chaud, et nettement plus actifs que les représentations anciennes de l’imaginaire collectif.<br />Les causes du gigantisme de la famille sont floues. Fondamentalement, les sauropodes étaient de gigantesques sacs à fermentation de conifères, et plus gros le tas à fermenter dans le ventre, plus grande la chaleur et meilleure est la fermentation, ce qui encourage le gigantisme de la panse. Le reste (protection contre les prédateurs, taille utile pour atteindre les arbres) était probablement du bonus. De plus, les jeunes croissaient à une vitesse impressionnantes, ce qui en dit long sur la solidité de leurs os.<br />Me fait toujours sourire la correspondance de ces énormes animaux avec les oiseaux actuels : en l’occurence, l’article mentionne des vertèbres creuses (pour alléger le cou) et les gastrolithes (cailloux dans le gésier pour aider à la digestion).<br />La position exacte du cou reste matière à discussion, ainsi que leurs capacités cérébrales (ils étaient sociaux donc pas forcément si crétins que la tradition le dit).</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article a sans doute donné à un scénariste d’Hollywood les idées pour un film-catastrophe : <strong>la tempête solaire du millénaire</strong> nous pend au nez. J’en reparlerai ici. (<strong>Mise à jour</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/11/23/Le-bug-solaire-qui-nous-pend-au-nez">C’est fait !</a>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article sur <strong>les dunes de Mars</strong> peut intéresser du monde. <br /><em>Le plus important pour moi réside dans les réflexions sur les théories sur la formation des dunes qui ont dû être revues après confrontation avec les photos satellite des déserts martiens : quelques mesures contre la désertification sur Terre viendront-elles indirectement des enseignements des dunes martiennes ?</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Si vous êtes <strong>migraineux</strong>, un article vous apprendra que :</li>
</ul>
<ol>
<li>vous avez quelques centaines de millions de compagnons de souffrance, et :</li>
<li>la cause est une tare dans vos gênes.</li>
</ol>
<ul>
<li>L’autre article passionnant du numéro porte sur la <strong>Mer d’Aral</strong>, cette mer asiatique dont le niveau baisse constamment depuis des décennies à cause des plantations de coton ouzbekhs et kazakhs, et actuellement réduite à une fraction de sa surface d’autrefois. L’article relate les tentatives, notamment kazakhs, de sauver des parties de la mer ou au moins des écosystèmes parallèles. Le problème est principalement économico-humain (l’irrigation gaspille l’équivalent du débit des fleuves qui s’y jettent encore) mais la tonalité est optimiste.<br /><em><a href="http://www.dinosoria.com/mer_aral.htm">Voir aussi cette page avec quelques photos impressionnantes</a>.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Ceux que l’<strong>ordinateur quantique</strong> intéresse apprendront que des progrès ont été réalisés grâce à des chaînes d’ions. Moi j’attends de voir.</li>
</ul>
<ul>
<li>Cinq pages intéressantes sur l’<strong>historique de la jachère</strong>.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’article mensuel de l’excellent Jean-Paul Delahaye sur la <strong>dissection articulée de polygones</strong> m’a personnellement laissé froid. À voir tout de même, <a href="http://www.cs.purdue.edu/homes/gnf/book2/Booknews2/lalanne.html" hreflang="en">l’impressionnante photo d’une application en menuiserie</a>. Une autre application possible serait l’auto-organisation des nanoparticules selon le milieu.</li>
</ul>
<ul>
<li>Maintenant je sais comment fonctionnent les <strong>chaufferettes chimiques</strong> à base d’acétate de sodium en surfusion. Ce n’est <em>pas</em> le clic du petit bout de métal qui déclenche la solidification !</li>
</ul>
<p>Pas la peine d’acheter le magazine rien que pour ce qui suit, ce sont des brèves :</p>
<ul>
<li>Un petit article sur <strong>les rayons X émis par le scotch</strong> qui se déroule !</li>
</ul>
<ul>
<li>L’hypertension est en partie liée au manque d’H2S dans le sang. Oui, c’est le gaz des boules puantes.</li>
</ul>
<ul>
<li>« La conjecture d’ergodicité quantique unique, qui prédit le comportement des systèmes chaotiques quantiques, est en partie résolue. »<br /> <em>J’en suis fort heureux.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Une nouvelle méthode de prévision des tremblements de terre à base de détection de certains gaz libérés par les failles sous-marine évitera peut-être aux stambouliotes<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#pnote-494-1" id="rev-pnote-494-1">1</a>]</sup> de finir en grand nombre sous leurs immeubles le jour du Big One. <br /><em>N’achetez pas dans l’immobilier local sans certitude absolue du respect des normes antisismiques de l’immeuble. Dans ce cas, la corruption tuera.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Les Gaulois clouaient bien les têtes de leurs ennemis à leur maison.</li>
</ul>
<ul>
<li>Certains gènes s’expriment au hasard. <br /><em>Le déterminisme génétique pur et dur prend un nouveau coup.</em></li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#rev-pnote-494-1" id="pnote-494-1">1</a>] <em>Habitants d’Istanbul.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/494“The Da Vinci Code” de Dan Brownurn:md5:b7db22d90cfb7fa09ec8b9d7ee3b66da2008-07-24T19:26:00+00:002011-06-01T13:11:22+00:00ChristopheSur mes étagères alourdiesAntiquitéchristianismefoutage de gueulehistoirelatinMoyen Âgemythereligionémerveillement<p><em>The Da Vinci Code</em> ne restera pas dans les annales comme le livre du millénaire, mais le polar est honnête et prenant, j’ai eu du mal à le lâcher.</p>
<p>Si Brown pioche lourdement dans toutes les références religieuses « alternatives » autour de cette nouvelle quête du Saint Graal, il sait jusqu’où ne pas aller trop loin (pas de Cathares ou de Petits Hommes Verts à l’horizon, ni de Grande Conspiration totalement incroyable finalement).</p> <p>(Je sais, ce livre n’a pas besoin de publicité, et il est un peu tard pour en faire la critique. Ceux que ça gêne n’ont pas besoin de lire plus loin.)</p>
<p>Le mélange entre réalité historique « officielle », réalité moins connue, théories alternatives contestées, bancales, voire fantaisistes, ne doit pas induire le lecteur en erreur : il s’agit bien d’un roman, pas d’une attaque en règle contre le Vatican ou l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Opus_Dei">Opus Dei</a>. L’œuvre n’a pas du tout été appréciée par l’Église qui a en général réagi par le mépris et la pédagogie, quelques cardinaux outrés mis à part. Entre autres, <a href="http://insidecatholic.com/Joomla/index2.php?option=com_content&task=view&id=157&pop=1&page=0&Itemid=12" hreflang="en">un article</a> du magazine catholique américain <em><a href="http://insidecatholic.com/Joomla/index.php?option=com_magazine" hreflang="en">Crisis</a></em> flingue délicieusement le livre en relevant toutes les erreurs factuelles (<a href="http://www.catholiceducation.org/articles/persecution/pch0058.html" hreflang="en">miroir de l’article ici</a>) — dont certaines que j’avais relevées.</p>
<p>Le découpage a été prévu pour Hollywood : petits chapitres, accroche en fin pour forcer à tourner la page, dans la plus pure tradition des feuilletonistes. Certains « trucs » de l’écrivain de <em>thriller</em> chevronné finissent par énerver à la longue : Brown multiplie les allusions à des événements passés, ou à des découvertes des personnages, mais attend deux cent pages pour y revenir et développer. Point positif, la course-poursuite n’est qu’un prétexte : Brown s’intéresse plus aux symboles cachées et aux théories mystiques alambiquées qu’aux scènes d’action ou de romance, et je lui en sais gré. Même les « méchants » criminels ne sont pas des tarés psychopathes complets comme c’est si souvent le cas.</p>
<p>Fatalement, dans une quête aussi mythique, la fin déçoit à coup sûr. On fera avec. Je me suis tout de même fait avoir sur l’identité du <em>Teacher</em> (« le Maître » en VF ?).</p>
<p>Donc un polar bien foutu basé sur du vent et qu’on ne prendra pas plus au sérieux qu’une bonne uchronie. C’est même l’occasion de se renseigner sur les circonstances de la mise en place de l’Église et des choix des Évangiles dans les premiers siècles de la Chrétienté. (Mon livre de chevet actuel consiste justement en une analyse par de vrais historiens de tout ce qui est évoqué dans le <em>Da Vinci Code</em> et sépare le sûr du douteux et du pipeau complet. J’en parlerai peut-être ici.)</p>
<p>Mais tout de même : c’est bien Marie-Madeleine, pas Jean, assise à la droite de Jésus dans <em><a href="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/0/08/Leonardo_da_Vinci_(1452-1519)_-_The_Last_Supper_(1495-1498).jpg">La Cène</a></em> de de Vinci...</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/07/24/527-the-da-vinci-code-de-dan-brown#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/469« L’Histoire universelle des chiffres » de Georges Ifrah (4) : le système sumérienurn:md5:3bdfa01e2dc65bf634d972cdd1c210cc2007-05-10T22:40:00+00:002011-04-03T12:42:43+00:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéchiffreshistoire<p>Résumé d’un système pas si archaïque qui a tenu des siècles.</p> <h3>Le système sumérien</h3>
<p>Une fois imaginés les nombres et les décomptes réalisés, il faut s’en souvenir ! Le « stockage » sous forme physique peut se faire de plusieurs manières différentes, pas forcément écrites. Les encoches sur un bâton remontent au Néolithique ; les <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Quipu">quipus</a></em> des Incas existent ailleurs en de nombreuses variantes.</p>
<p>Mais ce sont les <strong>Sumériens</strong> qui, en inventant l’écriture vers 3000 av. J.-C., ont ouvert la voie vers les chiffres écrits. <br />Le cheminement est passionnant :</p>
<ul>
<li>Au départ, les dénombrements étaient « stockés » sous forme de petites billes d’argile.</li>
<li>Après l’invention du principe de la base, des petits et grands cônes indiquaient les différentes unités, et le total était stocké dans une petite sphère d’argile creuse scellée (<a href="http://www.col-camus-soufflenheim.ac-strasbourg.fr/Page.php?IDP=137&IDD=0#signet7">voir une photo</a>).</li>
<li>Pour éviter de l’ouvrir, les Sumériens ont fini par <em>écrire</em>, de manière stylisée, le contenu de la boule directement dessus.</li>
<li>Enfin, on s’est complètement passé de la boule creuse, et conservé les symboles : les premiers chiffres étaient nés !</li>
</ul>
<p>Il ne s’agissait cependant pas de chiffres et nombres comme nous les connaissons :</p>
<ul>
<li>chaque unité (en base mixte soixante/dix, rappelons-le : 10, 60, 360...) avait un symbole différent, ce qui interdisait de généraliser le système à l’infini ;</li>
<li>et chaque symbole était répété autant de fois que nécessaire (<strong>principe additif</strong>).<br />Par exemple, 164571 s’écrivait : 4 cercles troués (= 4x36000), 5 cercles (=5x3600), 4 encoches trouées (=4x600), 2 encoches (=2x60), 5 petit cercles (=5x10), et 1 petite encoche (=1x1).<br />C’est l’équivalent d’un MMMCLLXXXII (=3132) en notation romaine.</li>
</ul>
<p>Ce système sumérien a énormément évolué pendant des siècles d’utilisation en Mésopotamie. D’abord de manière mineure avec des variations de forme ou des raccourcis de notation pour certains nombres, puis en passant en écriture cunéiforme, plus adaptée à la technologie du poinçon sur argile.<br />Est apparue aussi la <strong>méthode soustractive</strong> pour éviter les longues énumérations (similaire au IV romain = V - I, qui remplace le peu lisible IIII).</p>
<p>Dans une certaine mesure, il était possible d’utiliser ce système pour du calcul écrit, sur une abaque et en effaçant les chiffres au fur et à mesure.</p>
<p>Plan :<br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/04/30/329-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-1">Partie 1 : Super-résumé</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/02/330-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-2">Partie 2 : Les premiers décomptes</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/09/331-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-3">Partie 3 : Les bases</a></em><br />
<em>Partie 4 : Le système sumérien</em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/11/333-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-5">Partie 5 : Les systèmes égyptiens, chinois, alphabétiques</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/14/334-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-6">Partie 6 : Le système maya</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/15/335-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-7">Partie 7 : Le système indien</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/18/336-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-8">Partie 8 : Les chiffres indiens en terre d’Islam</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/21/337-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-9">Partie 9 : La difficile transmission à l’Occident chrétien</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/22/338-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-10">Partie 10 : L’impact des chiffres sur le développement mathématique</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/23/339-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-11">Partie 11 : La mécanisation</a></em><br />
<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/05/24/340-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-12">Partie 12 : Les calculateurs électriques et électroniques</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/05/10/332-l-histoire-universelle-des-chiffres-de-georges-ifrah-4#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/297Clovis (4) : L’unification inachevéeurn:md5:61d049832a8456b564d73b750719a4612006-11-29T20:50:00+00:002010-11-16T21:32:24+00:00ChristopheHistoireAntiquitéchristianismeFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de FranceMoyen ÂgeMérovingiens<p>Clovis a éliminé nombre de ses parents. Ces actes sont « justifiés » par le système dynastique germanique.</p> <h3>La liquidation de la famille de Clovis</h3>
<p>Clovis semble à nos yeux un barbare sanguinaire pour certaines actions déjà peu reluisantes à l’époque : <strong>l’élimination systématique de tous ses parents</strong>, même lointains, qui auraient pu constituer une menace pour ses enfants.</p>
<p>Comme déjà exposé, la civilisation germanique ne donne pas de droit particulier aux aînés, et les héritages se déroulent plus latéralement que verticalement (principe de la <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Tanistry">tanistry</a></em>). Les veuves épousent souvent le frère de leur défunt mari, les unions incestueuses sont courantes, et la société explose en groupes endogamiques fermés unis par le sang.</p>
<p>Le massacre de sa parentèle permet donc à Clovis de garantir que ses fils hériteront, et non un oncle ou un cousin quelconque, et d’établir un début de transmission patriarcale. L’échec est cependant total puisque les Mérovingiens s’entredéchireront en permanence, et le principe du règne simultané des frères perdurera jusqu’au IXè siècle. Le <em>Regnum Francorum</em> sera cependant réunifié brièvement sous <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Clotaire_Ier">Clotaire</a> puis <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dagobert_Ier">Dagobert</a>.</p>
<h3>La consolidation</h3>
<p>Clovis vainqueur est également actif au niveau légal : la <strong>remise à plat de la loi salique et la promulgation du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bréviaire_d'Alaric">bréviaire d’Alaric</a></strong> tentent d’une part de supprimer certaines coutumes franques déplorables, notamment la <em>faide</em> (remplacée par des tribunaux et des amendes), ou les mariages incestueux (affirmation du patriarcat et des transmissions de père à enfant), d’autre part de supprimer les barrières entre Francs et Gallo-Romains pour une fusion ultérieure des deux ethnies (début d’État de droit à la romaine, maintien ou adaptation de lois romaines de l’époque impériale).</p>
<p>Le <strong>concile d’Orléans</strong> également constitue une étape importante : Clovis ne se pose pas comme chef de l’Église comme le ferait un roi arien, il coopère avec celle-ci et n’intervient pas dans les décisions des évêques (même s’il les a convoqués, leur pose des questions, et promulgue les canons du concile).<br />Ce concile vise à remettre de l’ordre dans l’épiscopat du royaume franc, à faciliter la conversion et l’assimilation des Francs convertis et des ariens, à limiter les incestes, à partager les tâches entre administration et Église, à restaurer les liens avec la papauté.</p>
<h3>Royaume inachevé</h3>
<p>Le royaume de Clovis est inachevé mais les base sont là : levée de la menace des ariens, des Goths, des Alamans..., unification religieuse, remise en état de la hiérarchie épiscopale, alliance avec l’Empire qui reconnaît Clovis comme son représentant en Occident... Mais il reste beaucoup à faire.</p>
<p>Clovis meurt en 511 à Paris, sa capitale définitive, et ce seront ses fils qui, malgré leur querelles internes, complèteront le travail : défense des frontières, conquête de la Burgondie, fusion des civilisations.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/29/284-clovis-4-l-unification-inachevee#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/253Clovis (3) : La gaffe de Théodoricurn:md5:861c3f972b0a10e4c3b34ffb74d777122006-11-28T22:36:00+00:002010-11-16T21:27:24+00:00ChristopheHistoireAntiquitéByzancechristianismeEmpire romainFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de FranceMoyen ÂgeMérovingiens<p>Les Ostrogoths dominaient l’Europe post-romaine. Mais leur roi Théodoric laissa filer l’alliance avec Byzance.</p> <h3>La gaffe de Théodoric</h3>
<p>Clovis à son baptême a déjà certes bien accru son royaume d’origine, entre Rhin et Loire, mais celui-ci reste fragile. De plus, le baptême n’améliore pas les relations avec les voisins ariens. Un début de conquête de la Burgondie est un échec, la solidarité entre ariens joue à plein, mais pas entre catholiques : les Gallo-Romains locaux se satisfont d’un Gondebaud qui lève au maximum les freins à la fusion entre Burgondes et Gallo-Romains (mariages mixtes, partage des terres, permis de port d’arme aux Gallo-Romains...) et laisse même ses fils devenir catholiques : ce royaume ne cèdera qu’après la mort de Clovis.</p>
<p>L’autre raison du succès final de Clovis est le <strong>soutien de l’Empire d’Orient</strong>.</p>
<p>Après la chute de Rome, le roi ostrogoth <strong>Théodoric</strong> domine l’Italie et les pourtours de l’Adriatique. D’une manière très paternaliste, il tente de maintenir l’équilibre entre les autres rois barbares plus jeunes que lui, et limite les frontières communes grâce à des royaumes tampons ; et malgré les différences religieuses il veut garder de bonnes relations avec l’Empire romain d’Orient, dont la puissance est intacte. Il doit évidemment aussi compter avec sa propre population romaine.</p>
<p>Mais <strong>Théodoric a effrayé l’Empereur</strong>. Les Byzantins n’ont pas oublié la raclée infligée par les Wisigoths à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d'Andrinople">Andrinople</a>, un siècle auparavant ; et une incursion ostrogothe en Illyrie déclenche un réflexe d’autodéfense de l’Empereur <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Anastase_Ier_(empereur_byzantin)">Anastase</a> : la flotte impériale menace les côtes italiennes.</p>
<p>Immédiatement se forme un axe Empire d’Orient - royaume franc.</p>
<h3>La fin des Wisigoths en Gaule</h3>
<p>Sa faiblesse relative n’empêche pas Clovis d’<strong>écraser les Alamans</strong> une deuxième et dernière fois (506), au point que Théodoric doit protéger et accueillir les survivants, et appelle Clovis à la clémence. Le roi ostrogoth apprécie peu la disparition de ce peuple qui faisait tampon entre lui et les Francs, et pousse d’autres peuplades (notamment les Thuringiens) à attaquer préventivement les Francs, sans succès notable.</p>
<p>L’année suivante, pendant que les troupes de Théodoric sont clouées par Byzance, Clovis passe une alliance avec les Burgondes de Gondebaud (qui, au final, jouent sur les deux tableaux entre puissances ariennes et catholiques) et envahit l’Aquitaine wisigothe. <br />La bataille décisive à <strong>Vouillé</strong> (507) voit la mort du roi wisigoth (<a href="http://www2.toulouse.iufm.fr/defi/citoyenn/instit/chrono/clovis1.htm">voir les détails sur ce site de l’IUFM de Toulouse</a>). Théodoric l’ostrogoth devient également régent du royaume wisigoth et contre-attaque : il récupère la Provence et des parties du royaume burgonde. Mais le mal est fait : <strong>Clovis est devenu l’égal de Théodoric</strong>.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/11/29/284-clovis-4-l-unification-inachevee">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/28/283-clovis-3-la-gaffe-de-theodoric#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/254Clovis (2) : Le risque du baptêmeurn:md5:edde53b8692768142a7aebac988cad3f2006-11-27T20:50:00+00:002010-11-16T21:18:22+00:00ChristopheHistoireAntiquitéchristianismeFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de FranceMoyen ÂgeMérovingiensreligion<p>Pour un roi barbare, se convertir au catholicisme ne se fait pas à la légère.</p> <h3>Le risque du baptême</h3>
<p>Dans la mentalité germanique, <strong>le roi est un chef de guerre, inspiré et protégé par les dieux</strong> (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Wotan">Wotan</a> en particulier). Un chef abandonné par les dieux est vite vaincu et abandonné par les siens. <br />Pour Clovis, abandonner ses dieux est un risque énorme, car <strong>ses soldats ne le suivront plus</strong>, voire le détrôneront.</p>
<p>Il n’est donc pas innocent que son fameux appel à l’aide du Dieu chrétien se déroule en 496 lors de la bataille de Tolbiac (contre une invasion des Alamans), alors que le roi franc est au bord de la défaite et <strong>se croit abandonné par ses dieux</strong>. La conversion ne se fera que trois ans plus tard, mais le Dieu catholique a prouvé sa « valeur militaire » pour Clovis. Pas suffisamment cependant pour ses soldats, qui auraient sans doute penché plus volontiers vers l’arianisme.</p>
<p>Ajoutons que la famille royale franque se voit aussi d’origine divine, et le baptême est un renoncement à cette prestigieuse lignée.</p>
<p>Effectivement, Michel Rouche pense qu’après la conversion de Clovis et de sa garde rapprochée (trois mille hommes tout de même), à <strong>Noël 499</strong>, ses conquêtes se ralentissent, en partie par faute de levées de troupes franques suffisantes : elles ne voient plus en Clovis ce protégé de Wotan. Heureusement pour lui, nombre de Gallo-Romains se rallient alors au nouveau baptisé, notamment les <strong>Armoricains</strong>, peuple indépendant en Bretagne (l’actuelle) - ce qui permet à leurs ennemis, les clans alains de l’Orléanais, de se soumettre aussi à Clovis. Ce dernier dispose aussi des restes de l’ancienne armée de Syagrius.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/11/28/283-clovis-3-la-gaffe-de-theodoric">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/27/282-clovis-2-le-risque-du-bapteme#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/252Clovis (1) : Le dernier des rois païensurn:md5:656b49cd155cd14ada1869efc2cbff752006-11-25T22:48:00+00:002010-11-16T21:16:18+00:00ChristopheHistoireAntiquitéByzancechristianismeEmpire romainFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de FranceMoyen ÂgeMérovingiensreligionthéologie<p>Notes sur le livre <em>Clovis</em> de Michel Rouche : au-delà des clichés, Clovis était un roi déjà sous influence gallo-romaine et chrétienne, mais sa conversion au catholicisme (et non à l’arianisme) a été culturellement délicate pour lui.</p> <p>Suite de ma lecture du passionnant <em>Clovis</em> de Michel Rouche. Tout ce qui suit provient de ce livre, à mes erreurs de compréhension près. Certaines dates et certains lieux semblent cependant discutés...</p>
<p>Plus que sur les exploits militaires, l’auteur insiste sur l’ensemble des raisons de la victoire de Clovis, pourquoi son royaume s’impose aux trois quarts de la Gaule, puis à la totalité avec ses fils.</p>
<p>J’ai parlé de la <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/11/09/262-les-grandes-invasions-en-gaule-resume">situation après les Invasions jusqu’à l’avènement de Clovis</a> dans une Gaule divisée en quatre. Et <a href="http://www.euratlas.net/AHP/histoire_europe/carte_europe_0500.html">cette carte de l’an 500</a> est un instantané pris peu après la chute de l’Empire d’Occident, au milieu du règne de Clovis.</p>
<h3>Chrétien</h3>
<p>La mémoire collective retient que Clovis se convertit après avoir appelé Dieu à l’aide sur un champ de bataille, et vaincu ; il gagne alors le soutien des Gallo-Romains et surtout de l’Église catholique, et conquiert la Gaule.</p>
<p>En fait, parmi les différents princes dans la Gaule immédiatement post-impériale, <strong>Clovis est initialement le seul non-chrétien</strong> ! <br />Les <strong>Wisigoths</strong> et les <strong>Burgondes</strong> sont par contre déjà chrétiens... mais <strong>ariens</strong>, adeptes d’une variante du christianisme considérée comme hérétique par la papauté, l’Empire d’Orient, et nombre de Gallo-Romains influents comme Remi de Reims ou Geneviève de Paris. Les Wisigoths, alliés aux <strong>Ostrogoths</strong> de <strong>Théodoric</strong>, ariens eux aussi, dominent la situation depuis l’Aquitaine et l’Espagne ; ils sont moins tolérants que les Burgondes (sud-est de la Gaule).</p>
<p>De plus, les <strong>Gallo-Romains</strong>, depuis la mort d’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Aetius">Aetius</a>, le vainqueur d’Attila, et la fin de l’Empire, sont en quasi-guerre civile, même entre catholiques : certains sont plus ou moins alliés aux Wisigoths (comme <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Syagrius">Syagrius</a>, « Roi des Romains » entre Somme et Loire, vaincu à Soissons puis égorgé par Clovis), d’autres aux Francs (Geneviève à Paris).</p>
<p>Quant au <strong>corps épiscopal</strong>, exilé par les Wisigoths, ou décimé, ou pas renouvelé, il n’a qu’une faible influence. Et la papauté à Rome, empêtrée entre les influences de Théodoric et de l’Empereur d’Orient et diverses hérésies, pense peu à la Gaule.</p>
<h3>Clotilde</h3>
<p>L’influence majeure sur Clovis est exercée par son épouse <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Clotilde_%28465-545%29">Clotilde</a></strong>. Il n’est pas exagéré de dire que la fondation de la France lui doit autant qu’à Clovis.</p>
<p>Clotilde est une princesse burgonde et catholique, nièce de Gondebaud, roi de Burgondie, qui est aussi le meurtrier de ses parents ! Cette jeune fille est également liée au clan des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Amales">Amales</a>, très prestigieuse famille dont la généalogie remonte à quatorze générations, et le jeune roi franc a besoin de ce <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Hypergamie">mariage hypergamique</a>. Gondebaud est réticent, mais cède.</p>
<p><strong>Clotilde est le moteur de la conversion de Clovis</strong>. Elle est la première à s’attaquer aux dieux germaniques, pour elle simples icônes de pierre ou de bois. <br />Viennent ensuite <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Remi_de_Reims">Remi</a> (évêque de Reims, un nostalgique de l’Empire et un anti-arien convaincu) et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sainte_Geneviève">Geneviève</a> (maîtresse de Paris, de père franc).</p>
<p>Une particularité de leur couple, selon Rouche, est que <strong>ce couple casse la logique barbare matriarcale et polygame</strong>. Même si Clovis a eu avant Clotilde une épouse barbare inconnue (la mère de Thierry, son premier fils), un mariage monogame stable, finalement catholique, va à l’encontre de la mentalité des Germains. <br />Michel Rouche insiste beaucoup sur ce matriarcat germain, où la mère est toute-puissante et détient une sorte de pouvoir, car elle désigne le père de ses enfants ; où les frères sont égaux et règnent ensemble ; et où les mariages incestueux sont fréquents.<br />Ce mariage monogame constitue un nouveau pas vers la romanité. L’intérêt d’un roi barbare aurait été de multiplier épouses et alliances, mais Clovis s’en abstient.</p>
<p>Assez connu est l’épisode du baptême dès la naissance des enfants du couple royal : le premier meurt très jeune, et Clovis en tient responsable Jésus ; trois fils (Clodomir, Childebert, Clotaire) et une fille (Clotilde) survivent : l’argument du « mauvais Dieu » tombe.</p>
<h3>La conversion</h3>
<p>Michel Rouche s’étend sur le chemin de Clovis sur la route du baptême. <strong>Pour un chef germanique comme lui, le processus de conversion est long et culturellement difficile</strong>.</p>
<p>L’<strong>influence de la société gallo-romaine</strong>, dans son royaume et ses environs, est le second facteur après Clotilde. Remi dès le départ prend contact avec le jeune roi et plus tard participe à sa catéchèse. Clovis n’oublie pas qu’il a hérité de titres officiels romains qui ne signifient plus grand-chose en pratique, mais indiquent une certaine continuité de la légalité romaine. <strong>Les Francs, depuis un siècle, sont dans l’orbite romaine</strong>.</p>
<p>Geneviève de Paris était déjà en contact avec Childéric, le père de Clovis. Anti-arienne également, à moitié franque, vite liée à Clotilde, elle est celle qui réussit lentement à réunir les Gallo-Romains à la faveur de l’avancée franque.</p>
<p>L’évolution mentale du chef franc est difficile sur un point : <strong>le rôle que lui octroient l’Église et Dieu</strong>. La doctrine est encore mouvante, et les discussions et luttes sur ce point continueront en gros tout le Moyen-Âge. Mais il est clair qu’il faut <strong>renoncer à la toute-puissance</strong> inspirée par un dieu : le Dieu chrétien ne règne pas par la force, et a même laissé crucifier son fils, chose inconcevable pour Clovis. Sa phrase d’indignation célèbre (« Si j’avais été là avec mes Francs, j’aurais vengé cette injure. ») est d’ailleurs révélatrice d’une autre tradition germanique, que le pardon cher au Christ n’a pas remplacé : la <em>faide</em>, <strong>la vengeance obligatoire</strong> entre familles, qui sera encore source de tant de sang versé entre Mérovingiens. (Et d’ailleurs même chez la très chrétienne Clotilde cette tradition ressurgira : elle enverra ses fils conquérir la Burgondie pour venger la mort de ses parents.)</p>
<p>D’autre part, la principale distinction entre catholiques et ariens se fait jour précisément sur ce sujet. <strong>Le dogme de la Trinité</strong>, chez les catholiques, sous-entend un partage des pouvoirs dans l’harmonie ; alors que le Dieu « unique » des ariens rend en quelque sorte le roi (choisi par Dieu) tout-puissant, et en fait aussi le chef de l’Église - optique parfaitement en phase avec la mentalité germanique païenne, et qui explique que Goths, Vandales, Burgondes... soient devenus ariens et non catholiques.<br />Les catholiques par contre s’attachent à un héritage du droit romain : l’<strong>État de droit</strong>, où un Empereur, aussi puissant soit-il, est tenu par les lois de l’État qu’il édicte lui-même. Cette notion est déjà bien présente à l’époque, et Clovis saura l’assimiler et la respecter.</p>
<p>Autre distinction entre ariens et catholiques : le <strong>culte des saints</strong>. Le commerce des reliques bat déjà son plein en ces temps, et les récits de miracles sont légions. L’illumination finale de Clovis se déroule peut-être lors de la visite au tombeau de Saint-Martin de Tours, un des principaux saints en Gaule en l’époque.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/11/27/282-clovis-2-le-risque-du-bapteme">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/25/269-clovis-1-le-dernier-des-rois-paiens#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/241La Gaule juste avant les Invasions barbaresurn:md5:789b29570c6515990602070a19adea592006-11-08T16:22:00+00:002010-11-08T19:49:07+00:00ChristopheHistoireAntiquitéEmpire romainFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de Franceuchronie<p>Résumé d’une période lointaine et fort mal connue.</p> <p>Je lis en ce moment <em>Clovis</em> de Michel Rouche (Fayard, 1996), sur le bien connu chef franc. Plus que ses conquêtes et sa dynastie, l’important est ici le contexte et la société de l’époque.</p>
<h3>Repères chronologiques</h3>
<ul>
<li><strong>-52</strong> (environ) : Capitulation d’Alésia et conquête définitive de la Gaule par César.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Ier, IIè, début du IIIè siècle</strong> : <em>Pax romana</em>, romanisation progressive, début de la christianisation (malgré les persécutions).<br /><strong>~100</strong> : Apogée de l’Empire sur la plupart des plans.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>IIIè siècle</strong> : Grande instabilité politique, nombreux Empereurs ; sécession temporaire d’un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_romain_de_Gaule">Empire gaulois</a>.<br /><strong>256-257</strong> : Premières invasions barbares (notamment des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Francs">Francs</a>), repoussées.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>IVè siècle</strong> : Christianisation de l’Empire (<strong>313</strong> : <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89dit_de_Milan">édit de Milan</a> ; <strong>380</strong> : religion d’État).<br /><strong>395</strong> : Pour faciliter l’administration, scission de l’Empire entre Occident et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_romain_d%27Orient">Orient</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>Vè siècle</strong> est celui de l’agonie de l’Empire d’Occident.<br /><strong>406</strong> : Début de la phase finale des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Grandes_invasions">Grandes Invasions</a> : plusieurs peuples (Vandales, Suèves, Alains...) traversent le Rhin gelé et se répandent en Gaule, Espagne.<br /><strong>451</strong> : Arrêt de l’expansion des Huns (bataille des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_champs_Catalauniques">Champs catalauniques</a>).<br /><strong>476</strong> : Chute de l’Empire d’Occident : le dernier Empereur est déposé.<br /><strong>481</strong> : Clovis devient roi des Francs Saliens, dont le petit royaume couvre le nord de la France.</li>
</ul>
<h3>Démographie</h3>
<p>La Gaule romaine des environs de l’an <strong>400</strong> est en <strong>crise démographique</strong> : mortalité infantile délirante, limitation des naissances, infanticides, mariages trop précoces et morts en couches fréquentes, durée brève des couples, prédominance du concubinage, natalité vacillante, <strong>dépeuplement</strong> de certaines parties.</p>
<p>Cet Empire, et la Gaule en particulier, sont en mutation : <strong>romanisation</strong> bien avancée (à la mode gallo-romaine, avec disparition progressive de la langue celte), <strong>christianisation</strong> partielle depuis les villes, avec la mise en place de règles du mariage et du couple plus strictes ; intégration de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/L%C3%A8tes">lètes</a> (supplétifs barbares, anciens prisonniers francs notamment) dans les régions frontalières, chargés de veiller sur les frontières.</p>
<h3>Les barbares</h3>
<p>Avant même la naissance de Jésus-Christ, les peuplades germaniques commencent à se répandre depuis la Scandinavie dans toute l’Europe non romaine, du Rhin à l’Ukraine, et remplacent, absorbent, soumettent, les peuples celtes sédentaires alentour. <br />Ces peuplades sont essentiellement nomades, avec une structure politique très lâche, des rois qui ne sont que des chefs de guerre temporaires. <br />Les différences ethniques entre elles sont assez floues et le mélange fréquent. Les Francs par exemple apparaissent assez tardivement.<br />La structure est matriarcale, avec des successions entre frères qui règnent simultanément (la tradition se conservera jusque dans l’Empire carolingien, trois siècles plus tard). Les <em>faides</em> (vendettas) interminables minent leur cohésion.</p>
<p>L’Empire romain les attire, et <strong>Rome doit faire face au danger sur toutes ses frontières européennes</strong> : sur le Rhin menacent les Francs, les Vandales, les Alamans ; et dans les Balkans les Goths exercent une énorme pression.</p>
<p>Les <strong>premières invasions</strong> en Gaule datent du milieu du milieu des années 200, après des siècles de <em>pax romana</em>. Des Francs notamment pillent de nombreuses villes, et depuis celle-ci sont fortifiées. Cette première vague d’invasions est repoussée par Rome malgré le chaos politique de ce IIIè siècle, et pendant encore un siècle les Barbares seront tenus à distance.</p>
<p>Matés, une partie des <strong>Francs</strong> (les Saliens) sont fixés comme « lètes » dans une partie de l’actuelle Belgique et deviennent des <strong>auxiliaires précieux et fidèles de Rome, intégrés dans l’Empire</strong>. Des généraux francs romanisés arriveront aux plus hautes fonctions dans l’armée, et lors de la principale vague d’invasion fin 406, les Saliens s’opposeront vigoureusement à la progression des envahisseurs. Clovis lui-même aura dès le début des titres de fonctionnaire romain. Cette fidélité à Rome des Saliens ne sera pas étrangère à leurs succès par la suite (soutien de l’Empire d’Orient, des populations gallo-romaines, de l’Église contre les Goths ariens...).</p>
<p>À l’opposé des Francs (géographiquement comme par leur rapport à Rome), les <strong>Goths</strong>, divisés entre orientaux (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ostrogoths">Ostrogoths</a>) et occidentaux (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ostrogoths">Wisigoths</a>) cherchent à s’établir dans l’Empire sans se romaniser - même si leurs rois sont volontiers acculturés. Jusqu’à la fin du IVè siècle, les Wisigoths sont tenus en respect au-delà du Danube, fixés dans la Dacie qui leur est cédée, et les Ostrogoths se contentent de leur empire dans l’actuelle Ukraine.</p>
<p>Numériquement, les Barbares germaniques ne sont pas si nombreux (quelques centaines de milliers au total), mais leur mobilité, la rapidité de leur progression, leurs succès militaires, ont marqué l’inconscient collectif.</p>
<h3>L’armée</h3>
<p><strong>L’armée impériale est sous-équipée</strong> : quelques dizaines de milliers d’hommes pour l’Empire d’Occident, pour une population estimée à 26 millions d’habitants ! Non application de la conscription à cause des besoins dans les domaines agricoles, crise des vocations due à une vie militaire trop dure et à la christianisation, guerres internes pour le trône impérial... Cette faiblesse numérique oblige les Empereurs à dégarnir certaines frontières quand d’autres sont attaquées, ou lors des guerres civiles.</p>
<p>Un système fiscal imparfait malgré une administration complexe ne permet plus d’augmenter les impôts ; et ceux-ci sont arrivés à un niveau où nombre de paysans préfèrent se transformer en brigands (les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bagaudes">bagaudes</a>), phénomène qui ira en empirant avec la désintégration de l’autorité centrale.</p>
<h3>Les barbares dans l’armée</h3>
<p>En conséquence, <strong>Rome a directement invité les barbares dans ses rangs</strong> : d’abord comme auxiliaires puis comme soldats de plus en plus nombreux ou comme prisonniers libérés et installés dans des régions dépeuplées (lètes), et enfin comme « peuples fédérés » entiers, avec leurs chefs et coutumes (cas des Francs en Gaule, des Wisigoths en Thrace sous Théodose, plus tard les Burgondes sous Aetius...). Le ver était dans le fruit.</p>
<p>Pour ces raisons, plus que d’« invasions », le terme de « migrations » semble plus adéquat (<em>Völkerwanderung</em>).</p>
<h3>Rome aurait-elle gagné ?</h3>
<p>Il est possible que la christianisation des Germains, si elle avait pu se faire assez rapidement, aurait pu éviter la catastrophe à Rome. Le christianisme, religion d’État à la fin du IVè siècle, devient alors le ciment de l’Empire - ou plutôt des deux Empires, d’Orient et d’Occident, puisque la coupure a lieu à ce moment. Certains disent que Rome s’est perpétuée par les royaumes barbares qui l’ont remplacée. Même si notre culture se base sur l’héritage latin, la civilisation et le commerce ont tout de même mis un demi-millénaire au bas mot à se remettre de la chute de l’Empire...</p>
<p>En résumé : l’Empire était en pleine mutation sur tous les plans. Il aurait pu survivre.</p>
<p>Mais les Huns ont frappé.</p>
<p><em>À suivre dans : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/11/09/262-les-grandes-invasions-en-gaule-resume">les Grandes Invasions en Gaule</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/08/256-la-gaule-juste-avant-les-invasions-barbares#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/227Supervolcans et supertélescopes (« Pour la Science » d’août 2006)urn:md5:93d5827bc82a358945bf43a1d3d894642006-07-23T19:36:00+00:002014-02-26T10:54:06+00:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéapocalypseastronomiecataclysmeenseignementgigantismegéologiepessimismesciencevolcansémerveillement<p>Un bon cru du magazine scientifique avec quelques articles scientifiquement « racoleurs ».</p> <p><a href="http://www.pourlascience.com/">Sous peu en kiosques</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#pnote-171-1" id="rev-pnote-171-1">1</a>]</sup>.</p>
<p>Que du bon pour un fanas de science, et notamment :</p>
<ul>
<li>Le <em>Bloc-notes</em> de <strong>Didier Nordon</strong> : à lui seul sa page justifie l’achat du magazine.<br />D’abord des réflexions sur la spécialisation : quand elle est poussée à fond comme de nos jours, il n’y a plus de communication, juste une juxtaposition de tours d’ivoire.<br />Les ravages du « flux tendu » appliqué aux étudiants : les semestres si courts ne favorisent pas la maturation des connaissances. J’ai moi-même dans bien des cas nécessité plus de temps pour digérer (quasiment au sens littéral) des connaissance et des concepts qu’il n’y en avait entre le cours et l’examen.<br />Enfin, le rôle trompeur de l’Internet : tout ce qui y circule n’est pas forcément vrai. Rien de nouveau sous le soleil, rappelle Nordon, la désillusion est la même à chaque révolution dans l’information : écriture, imprimerie...</li>
</ul>
<ul>
<li>Un résumé des exploits du télescope spatial <strong><a href="http://hubblesite.org/" hreflang="en">Hubble</a></strong>. <br />Le petit télescope est là-haut depuis seize ans déjà. Son maintien en fonction va nécessiter des investissements que les Américains ne vont peut-être pas consentir, alors que son successeur n’est pas encore prêt (le <a href="http://www.jwst.nasa.gov/" hreflang="en">James Webb</a> est prévu pour 2013). <br />Mais les télescopes spatiaux sont-ils encore utile, vu leur diamètre forcément réduit, et la taille de ce qu’on arrive à obtenir au sol ?</li>
</ul>
<ul>
<li>Coup de bol, c’est le sujet de l'article suivant (ainsi que d’un entretien avec l’astrophysicien Roland Lehoucq sur les limites de l’exploration astronomique).<br />Hubble a une taille réduite (miroir de 2,5 m de diamètre), il se fait enfoncer par les récents télescopes du <a href="http://www.eso.org/projects/vlt/" hreflang="en">Very Large Telescope</a> européen<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#pnote-171-2" id="rev-pnote-171-2">2</a>]</sup> dont les miroirs affichent un fier 8,2 m (déjà plus que le James Webb). De plus les progrès de l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Optique_adaptative">optique adaptative</a> (et le soutien de l’informatique) permettent de s’affranchir des turbulences de l’atmosphère, argument majeur à l’époque du lancement du projet Hubble.<br />Les télescopes spatiaux vont donc sans doute se spécialiser dans les longueurs d’onde filtrées par l’atmosphère (rayons X...).<br /><br />La taille des miroirs des plus grands télescopes double tous les 20 ou 30 ans, et cela va continuer. Le projet <strong><a href="http://www.eso.org/projects/owl/" hreflang="en">OWL</a></strong> ambitionne de passer rapidement à un <strong>miroir de... 100 m</strong> ! Si on veut observer efficacement les planètes extrasolaires de type terrestre, il faudra bien ça.<br />OWL est un monstre, l’article détaille les cauchemars techniques à relever, ou déjà résolus par les télescopes actuels (à plus petite échelle !) : coupole de protection de 100 m de haut <em>mobile</em> (autour du miroir, elle générerait elle-même des turbulences atmosphériques !) ; ossature déformable ; prise en compte de la déformation due au vent ; miroir géant composé d’une myriade de petits, orientables ; impossibilité financière de faire chacun de ces petits miroirs de la forme parfaite, mais identiques, d’où nécessité d’un autre miroir correcteur pour redresser ; système de contrôle d’optique adaptative hors de portée de l’informatique actuelle ; système de rotation de cette structure du poids de la Tour Eiffel ; etc. etc.<br />Coût : un milliard d’euros (on avait craint soixante au début...), une misère pour l’Occident qui dépense déjà bien plus dans certaines missions spatiales.<br /><br />Il y a d’autres projets en cours, moins ambitieux mais moins risqués : le <a href="http://www.tmt.org/" hreflang="en">TMT</a>, miroir de 30 m, coût 580 M€ ou le <a href="http://www.gmto.org/" hreflang="en">Magellan</a>, assemblage de sept miroirs de 8 m, à 400 M€. La concurrence pour l’argent du contribuable fait rage.<br /><br />Soit dit en passant, il existe d’autres moyens que des miroirs de plus en plus grands, en morceaux ou pas, pour améliorer les images venues du ciel. Les <strong>capteurs</strong> arrivent à 100% de récupération de la lumière reçue (autrefois quelques pour cent ; ce gain monstrueux a permis de virtuellement quintupler le diamètre des télescopes existant comme celui du Mont Palomar), cette piste est close. <br />Les <strong>télescopes spatiaux</strong> sont forcément petits (6,5 m pour le James Webb quand même), et ruineux à maintenir dans des conditions très dures. <br />L’<strong>interférométrie</strong> permet de rassembler les observations de plusieurs télescopes de taille « humaines » pour obtenir une résolution (finesse de détails) équivalente à celle d’un télescope classique de la taille de la distance qui les sépare ! Le hic, c’est que la sensibilité (la lumière collectée) n’est pas meilleure : les temps de pose sont énormes. <br />Difficile donc de se passer des télescopes géants dans l’avenir. <br /><em>Caveat</em> : l’auteur de l’article est l’un des responsables du projet OWL. Ça fait rêver quand même<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#pnote-171-3" id="rev-pnote-171-3">3</a>]</sup>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Un petit article sur le verre dans l’Empire romain répond à une question que je me posais depuis longtemps : <strong>depuis quand les fenêtres en verre existent-elles</strong> ? Les fenêtres des seigneurs du Moyen-Âge étaient-elles béantes ? J’ai ma réponse : le soufflage du verre a permis au verre de se généraliser dans les vitres (et la vaisselle) dès le Ier siècle après Jésus-Christ.<br />(Non, ça ne m’empêchait pas de dormir non plus).</li>
</ul>
<ul>
<li>Je me garde le résumé de l’article sur le <a href="http://www.apprendre-en-ligne.net/jeux/dilemme/home.html">dilemme du prisonnier itéré</a> pour plus tard. (Encore un sujet qui me passionne en laissant tout le reste du monde de marbre.)</li>
</ul>
<ul>
<li>Le plus spectaculaire pour la fin : les <strong>supervolcans</strong>.<br />Ils enfoncent <em><a href="http://www.imdb.com/title/tt0120461/" hreflang="en">Volcano</a></em> ou <em><a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm.html?cfilm=13910">le Pic de Dante</a></em>. En principe, il s’agit d’une gigantesque bulle de magma peu liquide qui rompt tout d’un coup : une couronne de volcans apparaît tandis que s’effondre la partie centrale dans de gigantesques nuages de cendres.<br /><del>Si</del> Quand ceux du Wyoming ou de Californie explos<del>ent</del>eront (et ce sera brutal), tout sera détruit à des dizaines de kilomètres à la ronde, et la moité des États-Unis seront recouverts de deux mètres de cendres (certains diront que c’est une bonne nouvelle). Le climat mondial sera passablement secoué pendant des années (et ce n’est une bonne nouvelle pour personne) : fleuves charriant des cendres, soleil masqué, refroidissement massif, destruction de la couche d’ozone, pluies acides massives. Quand je vois <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/2005/11/03/23-le-krakatoa-et-l-histoire-du-monde">ce qui est arrivé en 535 à cause du Krakatoa</a>, un volcan « normal », je tremble. <br />La bonne nouvelle est qu’un tel feu d’artifice n’advient que quelques fois par million d’années, et certainement pas durant nos existences à tous. Ouf.</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4 class="footnotes-title">Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#rev-pnote-171-1" id="pnote-171-1">1</a>] <em>À l’heure où j’écris ceci, le site affiche encore le numéro de juillet sur les <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/06/26/174-les-gaulois-pas-si-barbares">Gaulois, dont j’ai aussi parlé ici</a>.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#rev-pnote-171-2" id="pnote-171-2">2</a>] <em>Mais installés dans un coin archi-désertique du Chili.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#rev-pnote-171-3" id="pnote-171-3">3</a>] <em>Je suis de l’avis que la science moderne manque de Grands Projets bien visibles, genre conquête de la Lune ou instrument démentiel, pour enthousiasmer un minimum le grand public, pour la science ou dans notre capacité collective à « faire grand ». La Chine actuellement ne s’en prive pas (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Barrage_des_Trois-Gorges">barrage des Trois Gorges</a>, développement de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Chongqing">Chongqing</a> - ces exemples sont peut-être contestables sur le plan utilitaire, mais incontestablement grandioses). La tendance « c’est trop cher pour ce que c’est » a hélas la main sur les cordons de la bourse chez nous.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/07/23/189-pour-la-science-aout-2006#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/171Les Gaulois, pas si barbaresurn:md5:5491b7a502ecb964aa92f709d02c1bee2006-06-26T11:22:00+00:002010-10-31T18:09:30+00:00ChristopheHistoireAntiquitéEmpire romainhistoireHistoire de Franceuchronie<p>Les Gaulois n’étaient pas que des barbares mal dégrossis.</p> <p>Le dernier <em><a href="http://www.pourlascience.com/">Pour la Science</a></em> (juillet 2006) en fait son dossier : les Gaulois et les Celtes étaient loin d’être les barbares mal rasés que les Grecs et les Romains ont tant décrit. Depuis quelques temps, les archéologues tentent de se soustraire à l’optique romaine sur nos ancêtres.</p>
<p>Au moment de la conquête de César, leur civilisation était en voie rapide d’<strong>urbanisation</strong> (les <em>oppida</em>), la voirie existait, le <strong>commerce</strong> était florissant, y compris avec Rome. Dans une certaine mesure la romanisation avait déjà commencé (notamment en Narbonnaise, déjà romaine). Tout cela a en fait facilité et accéléré l’annexion puis l’intégration à l’Empire.</p>
<p>La « mauvaise » réputation du Gaulois s’est si longtemps maintenue dans les textes anciens en raison :</p>
<ul>
<li>du souvenir des invasions celtes des débuts de la République romaine (« Malheur aux vaincus ! », <em>dixit</em> <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Brennus">Brennus</a>), que les Grecs ont aussi connues ;</li>
<li>de la manie grecque puis romaine de considérer comme barbares tous les non-Grecs et non-Romains, surtout issus de pays aussi froids (!) : l’agriculture ne pouvant y prospérer (croient-ils), le paysan se transforme en guerrier pillard, courageux mais (forcément) sans cervelle ;</li>
<li>des besoins politiques romains (Cicéron, César...) d’avoir un ennemi identifiable (déjà, à l’époque...).</li>
</ul>
<p>Une fois ces Celtes chevelus matés, et latinisés en pacifiques Gallo-Romains glabres, l’archétype du barbare poilu et violent a été transféré aux Celtes et Germains d’outre-Rhin (ceux-là furent moins coopératifs).</p>
<p>L’amateur d’uchronies que je suis se demande donc immédiatement comment auraient évolué la Gaule et le monde si Rome n’était pas passé par là, et qu’un État gaulois indépendant presque aussi « moderne » que l’Empire était apparu. Mais ne serait-il pas resté un tampon entre Romains et Germains au fil des siècles, et Rome n’aurait-elle pas été condamnée à faire un jour ou l’autre ce que César a fait, à savoir <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Conquête_des_Gaules">se mêler des affaires internes de la Gaule, et mis tout le monde au pas</a> ?<br />Autre uchronie possible : <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Deuxi%C3%A8me_Guerre_punique">Carthage</a> supprime Rome de l’histoire, et ses alliés celtes prospèrent. Carthage aurait-il tenu strictement le même rôle que Rome, finissant aussi par conquérir ce qui après tout était un des greniers à blé du bassin méditerranéen ?</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/26/174-les-gaulois-pas-si-barbares#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/157Le Bug de l’An Zérourn:md5:df6fc872a40b595844ff38de0ed91b6b2006-05-31T22:33:00+00:002010-10-29T18:07:23+00:00ChristopheBug de l’An 2000 et d'autres tempsAntiquitéastronomiebugchiffreschristianismedysfonctionnementEuropeinformatiquemathématiquesMoyen ÂgemémoireMérovingienstemps<p>Il n’y a jamais eu d’année Zéro. Quoique.</p> <h3>Le changement de millénaire en 2001</h3>
<p>Je sais que cela fait un peu réchauffé, et le débat a été moins vif à l’approche de l’an 2000 qu’aux siècles précédents, paraît-il. Mais il y a une raison très simple pour laquelle le XXIè siècle et le IIIè millénaires ont commencé en 2001 et pas en 2000, et elle me fascine par sa simplicité<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/31/96-annee-zero#pnote-91-1" id="rev-pnote-91-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><strong>Il n’y a pas d’année 0, ni dans le calendrier julien, ni dans le grégorien.</strong></p>
<p>Et pourquoi ?</p>
<p>Parce que le <strong>zéro n’existait pas quand on a « inventé » le calendrier chrétien</strong> ! On remonte là au moine <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dionysius_Exiguus">Denys-le-Petit</a> en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/532">532</a>. <br />En Gaule, les descendants de Clovis s’étripaient joyeusement, l’Europe s’enfonçait dans la semi-barbarie, l’<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/10/26/19-byzance-ii-de-l-apogee-justinienne-a-la-castastrophe">Empire byzantin était à son apogée</a>, et l’Islam n’existait pas. <br />Ces gens-là évidemment ignoraient qu’ils étaient en 500 et quelques, de même que les Romains sous Auguste n’ont pas vu passer le début de l’Ère chrétienne (sauf <a href="https://www.coindeweb.net/humour/y2k.html#An0">ceux-là</a>).</p>
<p>Que Denys ait fait une erreur de trois, quatre ou six ans dans la date de naissance du Christ est ici un détail<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/31/96-annee-zero#pnote-91-2" id="rev-pnote-91-2">2</a>]</sup>. La numérotation des années qu’il étrennait ne pouvait commencer qu’à <strong>1</strong>.</p>
<p>Ironie du sort, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Zéro">les Indiens inventaient le zéro-nombre à peu près au même moment</a>. Si la papauté avait attendu quelques siècles de plus pour numéroter les années, peut-être aurions-nous fêté le IIIè millénaire à la Saint-Sylvestre 1999.</p>
<h3>Quoique</h3>
<p>Les calendriers occidentaux (au contraire de certains orientaux) comptent les années en cours, et pas écoulées (comme on compte un âge). <br />Donc la première année était la <code>1</code>, et il s’était écoulé un an depuis la naissance théorique du Christ à la fin de cette année-là. <br />Il s’était écoulé neuf ans à la fin de l’année <code>9</code>, et quatre-vingt-dix-neuf ans pleins à la fin de l’année <code>99</code>. <br />Pour faire un siècle (une durée de cent années) il a fallu attendre encore un an, à la <em>fin</em> de l’an <code>100</code>. Le second siècle ne commença qu’après, en <code>101</code>. Etc. jusqu’à nos jours. <br />Et à chaque approche d’un nombre rond, il a fallu rééduquer la population (totalement renouvelée depuis le précédent réveillon de changement de siècle).</p>
<h3>Mais l’année Zéro existe !</h3>
<p>Pour les astronomes, la situation est un peu différente. Pour faciliter les calculs astronomiques, un zéro est quand même bien pratique, assimilé à l’an <code>-1</code> du calendrier « classique ». En toute rigueur, un astronome pourrait effectivement parler de début du IIIè millénaire le 1er janvier 2000, mais il n’utilise pas alors les mêmes conventions que l’essentiel de l’humanité...</p>
<p>Tous les détails sur <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ann%C3%A9e_z%C3%A9ro">Wikipédia, article Année Zéro</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/31/96-annee-zero#rev-pnote-91-1" id="pnote-91-1">1</a>] <em>Beaucoup de choses me fascinent que les autres trouvent pénibles ou sans intérêt. C’est mon côté contemplatif.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/31/96-annee-zero#rev-pnote-91-2" id="pnote-91-2">2</a>] <em>Et vues les conditions de travail, voyage, communication, archivage... de l’époque, et le demi-millénaire écoulé entretemps, une belle réussite tout de même.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/31/96-annee-zero#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/91Byzance (I) : La formation et les invasions barbaresurn:md5:ce356d92f968d847f8f26abd480fa3bc2005-10-25T23:25:00+00:002010-05-02T13:00:34+00:00ChristopheHistoireAntiquitéByzancechristianismeEmpire romainGrandes Invasionshistoirereligion<p>L’Empire byzantin est issu de l’Empire romain, l’a remplacé pendant des siècles, reconquérant même certains de ses territoires. Puis il s’est étiolé et a été conquis par ses voisins. Grandeur et décadence d’un empire plus que millénaire.</p> <p><em>Première partie d’un résumé en 3 parties sur l’histoire de Byzance.</em></p>
<p><strong>NB</strong> : Des cartes de l’Europe siècle par siècle sont visibles chez <a href="http://www.euratlas.net/sommaire.htm">Euratlas</a>. J’avais fait un <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/09/15/10-euratlas">billet au sujet de ce magnifique site</a>.</p>
<p>La source principale de ce billet est un livre <em>Byzance, l’empire d’Orient</em>, version française raccourcie de <em>A Concise History of Byzantium</em> de Warren Treadgold, paru chez <em>Reader’s Digest</em> (leurs livres d’histoire sont en général bien faits même si la revue me tombe des mains). Littérairement c’est faible, on a du mal à suivre la tripotée d’empereurs, ça manque de cartes et de tableaux dynastiques, mais l’ensemble reste très intéressant. L’auteur accorde un grand poids aux épidémies et aux problèmes démographiques, financiers et monétaires (solde des soldats notamment) pour expliquer l’évolution de la politique impériale.</p>
<p>L’intérêt principal de ce livre est d’adopter le <strong>point de vue byzantin</strong> dès le début. En nos écoles, nous sommes plutôt habitués à suivre celui des Romains puis Gallo-Romains : Rome impériale, courte mention de la diversité ethnique romaine (grecque, égyptienne...), déliquescence progressive de l’Empire, qui semble craquer d’un coup devant les invasions barbares, chute de Rome en 476, fin de l’Antiquité, et on enchaîne sur Clovis et les rois fainéants...</p>
<p>Cela est simpliste. L’Empire romain d’Occident a survécu environ 500 ans à la République (elle-même semi-millénaire !), et après son apogée sous <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp14.htm">Trajan</a>, a connu <strong>maintes invasions précoces</strong> (par exemple celle repoussée par <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp18.htm">Marc-Aurèle</a> dès <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/166">166</a>), des guerres civiles pour le trône impérial tout comme des périodes de stabilité. Vue de l’est, la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/476">chute de Rome</a> n’est qu’une étape (très symbolique) dans une lente bataille contre des envahisseurs qui seront souvent repoussés.</p>
<p>Une précision : le terme de « <strong>byzantin</strong> » est issu de la cité originelle de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Byzance">Byzance</a>, site sur lequel la ville de Constantinople a été bâtie ; cependant il n’a été utilisé qu’à la Renaissance. Les Byzantins (de culture grecque) s’appelaient eux-même « <strong>Romains</strong> », et leur empire celui de Romanie.</p>
<h3>Formation</h3>
<p>L’apogée de l’Empire romain unifié <a href="http://www.empereurs-romains.net/empcarte03.htm">se situe dans les deux premiers siècles après Jésus-Christ</a> sans que cela soit forcément une période homogène : on y rencontre des empereurs fous comme <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp06.htm">Néron</a> comme des empereurs conquérants comme <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp14.htm">Trajan</a> ; les périodes de conquêtes (Dacie...) se mélangent aux guerres civiles. <br />Après Marc-Aurèle notamment les tensions s’accumulent : inflation, épidémies, invasions perses et barbares, sécessions (<a href="http://www.empereurs-romains.net/emp38.00.htm#gaules">Empire gaulois</a> par exemple)... Tant bien que mal, Rome tint bon au IIIè siècle et conserva bon an mal an sa prospérité et sa cohésion.</p>
<p>Il est à noter que l’est (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Afrique_%28province_romaine%29">Afrique</a>, Égypte, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Syrie">Syrie</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Anatolie">Anatolie</a>...) était plus riche que l’ouest (Italie comprise), et souffrit moins des guerres. D’autre part il existait une <strong>coupure linguistique</strong> entre zones latines (moitié ouest jusqu’en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Illyrie">Illyrie</a>) et zones plutôt dominées par la langue grecque (extrême-sud de l’Italie, Grèce, Balkans, Anatolie...). Ces deux parties eurent des destins totalement différents.</p>
<p><a href="http://www.empereurs-romains.net/emp47.htm">Dioclétien</a> (empereur en 284) fut le premier à diviser l’Empire en deux, selon cette frontière linguistique, pour en faciliter l'administration (tétrarchie). L’Occident perdit ainsi sa prépondérance. Les divers succès de Dioclétien permirent à l’Empire de bien aborder le IVè siècle. Mais la guerre civile recommença, et elle fut remportée par <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp55.htm">Constantin</a>.</p>
<p>L’empereur <strong>Constantin</strong> est le père de l’Empire byzantin de deux manières : d’abord il fonda la ville quasiment <em>ex nihilo</em>, sur le site de Byzance, facile à défendre (alors que d’autres grandes villes orientales auraient pu convenir comme capitale) ; ensuite il fut le principal artisan de la conversion de l’Empire au <strong>christianisme</strong>, alors minoritaire mais en expansion, en le reconnaissant, puis en se convertissant (aussi pour des raisons d’intérêt politique). Le rôle du christianisme est capital dans l’histoire byzantine.</p>
<p>Sous <a href="http://www.empereurs-romains.net/emp68.htm">Théodose</a>, dernier empereur de l’Empire unifié, le christianisme (orthodoxe) devint religion officielle. Ses enfants consacrèrent la partition de l’Empire.</p>
<h3>Invasions barbares : 400-507</h3>
<p>On se souvient des invasions barbares comme de celles qui déferlèrent notamment sur le Rhin en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/406">406</a>. On sait moins que <strong>l’infiltration avait déjà commencé depuis longtemps</strong> (peuples germaniques fédérés gardiens des frontières, grandes parties de l’armée romaine d’origine barbare) d’une part, et d’autre part qu’elle ne venait pas que de Germanie. <br />Les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Huns">Huns</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Wisigoths">Wisigoths</a> et les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ostrogoths">Ostrogoths</a> notamment s’attaquèrent à l’empire d’Orient via les Balkans. Les uns et les autres furent difficilement <strong>repoussés</strong> et renvoyés vers l’empire d’Occident, où ils se taillèrent des empires.</p>
<p>Pendant que le Vè siècle voyait <strong>l’empire d’Occident s’effondrer</strong> par pans entiers depuis la Germanie et la Gaule (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Suèves">Suèves</a> qui descendirent jusqu’en Espagne, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vandales">Vandales</a> qui poussèrent jusqu’à Carthage via l’Espagne, Francs de Clovis qui conquirent la Gaule...), ou depuis les Balkans (Wisigoths qui mirent Rome à sac en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/410">410</a> avant de fonder un royaume en Espagne, Ostrogoths qui conquirent toute l’Italie), l’Empire d’Orient tenait bon et se consacrait à ses <strong>querelles théologiques</strong>, qui à nos yeux semblent totalement surréalistes.</p>
<p>Le rejet de l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Arianisme">arianisme</a> n’était pas nouveau (dès l’époque de Constantin), mais la première moitié du Vè siècle vit des conciles rejeter le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Nestorianisme">nestorianisme</a>. <br />Puis l'Empire fut parcouru par l'<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Monophysisme">hérésie monophysite</a>, alors que les derniers païens disparaissaient. Ces <strong>querelles théologiques</strong> empoisonnèrent toute la politique impériale, extérieure comme intérieure, pendant des siècles et jusqu’à la fin, et s’entremêlèrent avec les <strong>luttes d’influence entre clans</strong> et régions de l’Empire. Les différences d’usage et de doctrine furent la raison majeure des relations souvent tendues entre Rome et l’Empire byzantin. Cependant elles témoignent de l’importance extrême que les Byzantins accordaient à la religion.</p>
<p>L’Empire s’organisait autour de cette Église unifiée, de sa capitale très moderne, mais aussi d’une <strong>administration</strong> et d’une <strong>armée</strong> puissantes et efficaces, héritées des réformes de Dioclétien et Constantin. <br />La partition de l’Empire et la déchéance occidentale firent de Constantinople le <strong>nouveau centre principal en Méditerranée</strong>, et favorisèrent l’<strong>homogénéisation linguistique autour du grec</strong>. Même si culturellement l’Égypte et la Syrie n’étaient que superficiellement héllénisées, ces deux riches provinces (sources de céréales et de commerce avec l’Orient) étaient administrativement et religieusement intégrées à l’Empire. <br />Les seuls ennemis étaient des royaumes barbares, certes remuants, et la <strong>Perse</strong>, globalement maintenue en respect. L’économie était à la mesure d’un empire aussi grand, stable et ancien. Politiquement, les successions au trône impérial s’effectuaient plus ou moins de père en fils, en tout cas en famille, le Sénat ayant un rôle mineur.</p>
<p>Cet Empire solide allait montrer toute sa puissance sous le règne de Justinien.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/10/26/19-byzance-ii-de-l-apogee-justinienne-a-la-castastrophe">La suite ici...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/25/11-byzance-i-formation-invasions#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/11Euratlasurn:md5:9fe28bc4600e016c92b833a6fba97db12005-09-15T11:24:00+00:002015-01-22T11:57:07+00:00ChristopheHistoireAntiquitéByzancecartesEmpire carolingienEmpire romainEuropeFrancsGrandes InvasionshistoireHistoire de FranceMoyen ÂgeperspectiveRenaissance<p>Un site sublime pour ceux qui aiment l’histoire et les cartes.</p> <p>J’adore les cartes, j’aime beaucoup l’histoire, et je cherche constamment à découvrir l’histoire de régions entières du monde. Les zones et périodes de transition me fascinent le plus. Tout le monde a entendu parler de l’Empire Romain, des États barbares après les Grandes Invasions, ou des cités-États italiennes. Mais comment se sont passées les transitions entre ces diverses « ères de stabilité » ? Si on sait que les terres de l’actuelle Turquie ont été romaines, puis byzantines, quand sont-elles devenues turques ? La Pologne n’a jamais été romaine, mais quand est-elle apparue ? Etc.</p>
<p>Les divers atlas de l’histoire du monde répondent partiellement à ces questions, mais je leur reproche souvent de se concentrer sur l’histoire de quelques États (la France, ses voisins), rarement de manière continue et depuis l’Antiquité sur les zones plus éloignées. Pas facile de savoir ce qu’est devenu l’Empire byzantin entre la séparation de l’Occident peu avant les Grandes Invasions (époque où les frontières deviennent tellement chaotiques que ceux qui s’y intéressent se limitent souvent à la Gaule), et sa fin sous les assauts turcs un millénaire après !</p>
<p>Avec <a href="http://www.euratlas.net/sommaire.htm">Euratlas</a>, Christos Nüssli a abattu un travail titanesque pour l’histoire européenne et méditerranéenne : il présente pour chaque année « ronde » (100, 200... 1400, 1500...) une carte complète et très détaillée des frontières politiques de cette époque.</p>
<p>Le choix de l’année ronde est discutable, mais il fallait bien choisir, et, après tout, cela éclaire l’histoire d’une autre perspective que celle rythmée par les apogées de certains empires éphémères. Leurs frontières ont certes souvent laissé des traces durables dans l’histoire, surtout dans les deux derniers siècles, et il est dommage de ne pas tenir compte de l’apogée napoléonienne, de l’Europe redécoupée de 1920, des délires frontaliers hitlériens de 1942, ou du Rideau de Fer. Mais le travail est titanesque, ces cartes récentes sont disponibles ailleurs, et un homme est seul derrière ce site magnifique.</p>
<p>Le fait que l’intégralité de l’Europe et de la Méditerranée soient couvertes (il manque ce qui est au nord d’Helsinki), y compris ses zones les plus obscures pour nous Occidentaux (Pologne et Russie antiques, Caucase...) permet de bien situer chaque État dans le contexte de l’époque et de voir le moment où de grandes entités apparaissent.</p>
<p>Le site fournit l’essentiel pour l’amateur occasionnel, mais le CD-ROM est disponible. L’interface est en Java et fonctionne sur Windows, Linux, Mac (bêta-testé pour vous). La licence est très libérale sur les copies qui peuvent être distribués. Les enseignants d’histoire devraient aimer. Cerise sur le gâteau, l’auteur et le site sont francophones.</p>
<h3>0-400</h3>
<p>Les premières cartes (an 0 à 400) sont monotones : l’hégémonie de l’Empire Romain est totale, et c’est tout juste si sur les frontières nord apparaissent de petites zones colorées annonciatrices de gros problèmes futurs — alors que les invasions ont déjà commencé dès le IVè siècle.</p>
<h3>500-1000</h3>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/histoire/images/an500_mini.gif" alt="L’Europe en l’an 500" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /> La carte de l’an 500 offre une transition des plus brutales : partition de l’Empire, disparition totale de celui d’Occident (476), remplacé par une mosaïque d’États barbares (wisigoths, francs), figés en plein dans la phase finale de leur consolidation (Clovis n’a conquis que la moitié de la Gaule lors de la « photo »).</p>
<p>La période qui suit (jusque l’an 1000 environ) est la plus intéressante puisqu’on assiste à la formation dans la douleur des noyaux des entités européennes actuelles à partir des royaumes barbares.</p>
<p>Certains d’entre eux sont absorbés dans les Empires franc (burgondes) ou byzantin (reconquêtes justiniennes de l’actuelle Tunisie ou de l’Italie). D’autres perdurent (empire franc, royaume wisigoth).</p>
<p>L’Europe centre-ouest coagule en 800 avec l’Empire Carolingien puis on assiste à l’apparition de la France, l’Allemagne, la Pologne, la Hongrie, la Russie (Kiev)... La Grande-Bretagne restera longtemps une mosaïque de petits royaumes.</p>
<p>Une autre transition marquante est l’apparition de l’islam : la carte de l’an 700 montre l’amputation brutale de l’Empire byzantin par l’empire musulman apparu au VIIè siècle, déjà aux portes de l’Espagne (les Wisigoths succomberont peu après). Par la suite, cet empire musulman se scinde en plusieurs entités.</p>
<h3>1000-1400</h3>
<p>La période 1000-1400 est une autre période de chaos apparent mais en fait il s’agit de la consolidation dans la douleur des noyaux apparus dans le demi-millénaire précédent. Dans le même temps l’Occident se redresse démographiquement et économiquement et redevient un lieu à peu près civilisé par rapport à ses voisins.</p>
<p>Les cartes de 1000 et 1100 montrent l’apparente hégémonie du Saint-Empire, héritier de l’Empire carolingien, pendant que la France et l’Angleterre « décantent ». Les États est-européens apparaissent.</p>
<p>Ajoutons une mention pour l’Italie où apparaissent les cités-États sur les débris des possessions byzantines ou en s’émancipant de l’Empire germanique.</p>
<p>La seconde apogée de l’Empire byzantin semble dérisoire par rapport à l’Empire justinien, et est de plus masquée car elle a lieu vers 1025. La suite de son histoire n’est qu’une lente descente aux enfers (principalement pour des raisons de problèmes politiques internes). La carte de 1200 semble indiquer un empire encore unifié, mais, dès 1204, les Croisés prennent Constantinople, et l’Empire est écartelé entre possessions franques, vénitiennes, et États grecs héritiers de Byzance (Nicée, Épire...), qui n’apparaissent pas ici car la guerre civile finit avant la carte suivante de 1300. Entre cette date et 1400, les Turcs ottomans se sont emparé rapidement de tout l’empire et des environs. À la rigueur, la chute de Constantinople même (1453) est un détail, relativisé par ce parti-pris de « photos » à un siècle d’intervalles.</p>
<p>Cet effet d’optique joue aussi sur les États francs de Terre sainte : créés en 1099, ils apparaissent sur la carte de 1100, alors qu’ils ne sont plus sur celle de 1300 (chute de Saint-Jean d’Acre en 1291). La même remarque vaut pour la rivalité franco-anglaise : l’Empire Plantagenêt est éclatant en 1200 (alors qu’il est récent et que Philippe Auguste travaille déjà à sa ruine très prochaine), mais la Guerre de Cent Ans est totalement masquée (1400 était une période de trève après les succès de Du Guesclin et Charles V, et avant la guerre civile française et l’invasion anglaise). De même la Bourgogne (en pleine gloire à la fin de la Guerre de Cent Ans et abattue par Louis XI en 1477) semble une simple province sans histoire.</p>
<h3>1400 et après</h3>
<p>Après 1400 les cartes m’intéressent moins, d’une part parce que l’histoire est plus proche et plus connue, d’autre part parce que ce sont des États qui souvent sont arrivés jusqu’à nous sans modification majeure, du moins à l’ouest de l’Europe (France, Espagne, Allemagne non encore unifiée). Les frontières est-européennes sont encore mouvantes pendant longtemps, mais la formation des empires ottoman puis russe et autrichien concourt à les simplifier radicalement. Le paroxysme est atteint en 1800 où une poignée d’empires et grandes nations se partagent le continent (même l’Italie et l’Allemagne sont en voie d’unification plus ou moins forcée).</p>
<p>L’histoire s’accélère et l’épopée napoléonienne et les révolutions du XIXè sont masqués par le bond d’un siècle entre 1800 et 1900.</p>
<p>La complexité de l’histoire du XXè siècle est passée sous silence ; une nuée d’États semble surgir de la partition des Empires ottoman, autrichien, russe, mais le chaos frontalier entre 1917 et 1945, l’existence d’États comme la Yougoslavie ou la Tchécoslovaquie, la partition allemande, la « glaciation » communiste et son éclatement, et enfin la formation de l’UE n’apparaissent pas. Mais après tout, les cartes ne sont pas tout.</p>
<p><strong>Mise à jour de 2010</strong> : Le logiciel s’est encore amélioré depuis la rédaction de ce billet.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/09/15/10-euratlas#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/10