Blog éclectique & sans sujet précis - Mot-clé - Seconde Guerre Mondiale<p>Si ça me passe par la tête, si ça n’intéresse que moi, alors c’est peut-être ici. Ou pas.</p>2024-02-13T09:44:49+01:00L'éditeur est le propriétaire du domaineurn:md5:bf83720a7189bba489682d945b972671Dotclear« La Seconde Guerre Mondiale vue d'ailleurs » (Claude Quétel & co)urn:md5:5983bb4c0c678e0517867a40bedb620a2023-11-05T20:04:00+01:002023-12-30T11:27:59+01:00ChristopheHistoireAllemagneapocalypsecatastropheChinechristianismecommunismedilemmedémocratieEuropeGuerre Froideguerre saintegéographiegéopolitiquehistoireHistoire de Francelivres lusnationalismeperspectiveRussieSeconde Guerre MondialetempsÉtats-Unis<p>Il est toujours bon de faire un pas de côté quand on s’intéresse aux grands événements internationaux. Fatalement, nous portons tous un biais lié à l’histoire de notre pays et notre éducation. La Seconde Guerre Mondiale ne s’est pas limitée à l’Occupation, à la Shoah, au 6 juin et à Hiroshima. L’optique de chaque peuple est différente. Et parfois changeante.</p>
<p><a href="https://www.buchetchastel.fr/catalogue/la-seconde-guerre-mondiale-vue-dailleurs/"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.La_Seconde_Guerre_Mondiale_vue_d_ailleurs-Claude_Quetel_m.jpg" alt="La Seconde Guerre Mondiale vue d’ailleurs (Claude Quétel &amp; co)" class="media-right" /></a> Pour qui s’intéresse un peu au conflit (et ça pourrait être un lycéen), ce livre ouvre vraiment des perspectives. Même si on a fait l’effort de s’informer hors du monde franco-hollywoodien, on a peu l’occasion de savoir ce que pensaient Marocains ou Suédois des hostilités. Chaque chapitre traite d’un pays, par un auteur différent. Je me demande dans quelle mesure il est fiable de résumer si vite cinq ans (souvent plus) de la vie d’un pays dans ce genre de période, mais c’est bien plus que ce qu’on peut lire dans la plupart des livres et magazines d’histoire.</p>
<p><em>Comme d’habitude, j’essaie de résumer, mais l’italique est avis personnel.</em></p>
<h2>Maroc</h2>
<p>En 1939, le sultanat est un protectorat français (et espagnol dans le nord), et toute révolte contre l’ordre établi pouvait être durement réprimée (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Rif">le Rif en sait quelque chose</a></em>). Le royaume reste pourtant fidèle à la France, fournissant nombre de soldats de valeur à la IIIᵉ République comme à la France Libre. Peut-être par intérêt bien compris : les Français partis, le pays risque de se faire dévorer par l’Espagne ou l’Allemagne… <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Nogu%C3%A8s">Noguès</a>, résident français d’Afrique du Nord, préfère rester fidèle à Vichy, mais le Maroc devient un refuge pour nombre de Juifs, et accueille favorablement les Anglo-Saxons qui débarquent en 1942.</p>
<p>Cette fidélité est mal récompensée : les demandes d’accès à l’indépendance totale après la guerre sont impitoyablement rejetées et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Protectorat_fran%C3%A7ais_au_Maroc#Manifeste_de_l'ind%C3%A9pendance_(1944)">il faudra l’attendre jusque 1956</a>.</p>
<h2> Égypte</h2>
<p>Le royaume est indépendant depuis 1922 mais le protectorat britannique n’est pas tout à fait terminé. Le Canal de Suez est une artère vitale de l’Empire britannique sur la route de l’Inde, il ne doit pas tomber. L’élite égyptienne, cosmopolite et occidentalisée, est partagée entre Axe (y compris apparemment le roi Farouk) et pro-britanniques : mais ces derniers sont-ils encore en mesure de protéger l’Égypte ? Officiellement l’Égypte reste neutre, mais bienveillante envers les Britanniques, et les Allemands sont internés. Puis les villes se prennent assez de bombes allemandes pour provoquer des paniques. Les militaires égyptiens n’ont qu’un rôle de supplétifs dans les opérations : les Britanniques se méfient d’eux, et ne leur ont vendu aucun équipement moderne.</p>
<p>Une fois Rommel écarté, la paix revient, et le roi Farouk prépare l’indépendance totale. L’Égypte fait partie de ces nations qui n’ont déclaré la guerre à l’Allemagne en 1945 que pour compter parmi les fondateurs des Nations-Unies.</p>
<h2> Suède</h2>
<p>Neutre pendant toute la guerre, la Suède n’a peut-être pas soldé son passé de collaboration avec l’Allemagne nazie. Certes, en 1940-45, cerné de toute part par l’Axe, traumatisé par les privations pendant la guerre précédente malgré sa neutralité, le pays n’a pas trop le choix. Les nazis continuent à profiter pendant toute la guerre du fer ou des roulements à bille suédois (ces derniers sont d’ailleurs vendus aux deux camps).</p>
<h2> Suisse</h2>
<p>Neutre et cernée elle aussi, la Suisse a toujours clamé que son indépendance a été préservée grâce à son armée toujours prête. Pour Irène Herrmann, c’est une légende : les qualités militaires de la Suisse sont des conséquences de sa pauvreté originelle, et les Nazis n’auraient fait qu’une bouchée d’elle.</p>
<p>Mais les Allemands n’y pensent pas sérieusement, puisque l’économie suisse fonctionne essentiellement pour l’Allemagne, et les banques sont accommodantes dans leurs prêts. Les représailles anglo-saxonnes sont puissantes (gel des avoirs aux États-Unis…), mais par la suite les nécessités de la reconstruction et de la Guerre Froide font oublier cette page peu glorieuse.</p>
<h2>Irlande</h2>
<p>Pays pauvre tout juste sorti de sa guerre d’indépendance et d’une guerre civile, encore aux prises avec l’IRA, l’Irlande fait le choix d’une neutralité totale. Malgré la pression des Anglais, et encore plus des Américains, le pays refuse toute collaboration… officielle. La population (comme le président Valera) reste de fait favorable aux Alliés, et les Allemands n’arrivent jamais à exploiter la rancœur envers les Britanniques. Des dizaines de milliers de volontaires rejoignent même les forces britanniques. Économiquement, le pays souffre beaucoup.</p>
<h2>Canada & Québec</h2>
<p>Indépendant mais toujours fidèle à la couronne britannique, le Canada la suit dans la guerre. Caroline D’Amours nous sort beaucoup de chiffres pour montrer que le Québec, connu pour avoir été très réticent envers la conscription, a fait sa part. Une bonne partie de la retenue québécoise tient au fossé linguistique que doivent franchir les francophones. Pendant la guerre, le Québec, comme une bonne part du Canada, devient une gigantesque usine de chars et munitions pour l’Empire britannique.</p>
<h2>Australie</h2>
<p>Pays-continent, à l’identité toute fraîche trempée dans le sang pendant la Première Guerre Mondiale, et indéfendable, l’Australie se sait liée au Royaume-Uni pour sa défense, et lui est donc fidèle. Si l’engagement militaire reste faible au début, la menace japonaise devient palpable dès la chute du « verrou de Singapour ». On sait à présent que les Japonais ont vite renoncé à envahir l’Australie, ayant déjà assez de ressources (et de problèmes) après la prise de contrôle de l’Indonésie et de la Nouvelle-Guinée.</p>
<p>Se tournant bien sûr vers les Américains, le pays devient une gigantesque base arrière de la Guerre du Pacifique, non sans quelques soucis de cohabitations : chez sept millions d’Australiens conservateurs débarquent pas moins d’un million de jeunes soldats américains « <em>overpayed, oversexed and overhere</em> » (à la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Brisbane">bataille de Brisbane</a>, il n’y avait pas de Japonais.)</p>
<p>L’Australie fait partie des rares pays sortis renforcés du conflit.
L’impact sur le pays est profond : modernisation, renforcement des liens avec les États-Unis, ouverture à l’immigration non-anglo-saxonne, puis non-européenne, pour renforcer la population.</p>
<h2>États-Unis</h2>
<p>Le chapitre expose surtout l’évolution de l’isolationnisme américain. Si les Américains n’ont effectivement aucune envie d’envoyer les <em>boys</em> à nouveau se faire tuer en Europe, les Nazis n’y acquièrent jamais aucune sympathie, et Roosevelt n’a pas trop de mal à faire des États-Unis l’arsenal (et le banquier !) de la Grande-Bretagne. En partie parce que la prospérité de l’Amérique se base encore sur la sécurité des mers assurée par la marine britannique, et la chute de ce dernier est donc inenvisageable ; mais aussi et surtout à cause des liens culturels ; enfin à cause des souffrances des Britanniques (les Chinois bénéficient de la même sympathie). Et l’industrie de l’armement se met à recréer beaucoup d’emplois.</p>
<p>Sans aller jusqu’à la guerre, les Américains avancent leurs pions : les débarquements au Groenland et en Islande visent à sécuriser les routes atlantiques, pleines de sous-marins allemands pas encore ennemis. Washington utilise aussi largement les menaces de blocus, et la tension monte ainsi avec le Japon à cause de son invasion de la Chine, puis de ses visées vers les possessions européennes en Asie, devenues sans défense en 1940. Le Japon fait l’erreur monumentale d’attaquer les États-Unis aux Philippines (Pearl Harbor n’étant qu’un raid pour couler la flotte). Churchill craint un temps que cela ne distrait les ressources américaines vers le Pacifique mais Hitler prend la décision assez étonnante de déclarer lui-même la guerre aux États-Unis. Ceux-ci, s’étant fait forcé la main, peuvent jeter tout leur poids dans la guerre.</p>
<h2>URSS</h2>
<p>Les régimes autoritaires adorent détourner l’Histoire, et les régimes totalitaires la réécrivent. Si le rôle majeur de l’Union Soviétique dans la destruction du nazisme a longtemps été rabaissé en Occident pour cause de Guerre Froide, et réévalué depuis, les évolutions n’ont jamais cessé dans le monde (ex-)soviétique.</p>
<p>Évidemment, pendant la guerre, il est dangereux pour quiconque de faire mention du faustien Pacte germano-soviétique ou de la purge des généraux avant-guerre. Cela reste valable après la guerre. Mais il y a une progression entre l’époque stalinienne, tenant à marquer le génie de Staline, à ne pas honorer les anciens soldats, et à nier l’intérêt des livraisons occidentales (par exemple la moitié des camions de l’Armée Rouge, entre autres…), et la détente sous Khroutchev (qui, lui, avait fait la guerre aux premières loges, comme son successeur Brejnev) : le jour de la Victoire redevient férié, et les anciens combattants sont mis en valeur.</p>
<p>Sous Poutine, la Grande guerre patriotique devient un des piliers du rassemblement de ce qui reste de la Russie en ruine autour de son nouveau chef, thème utilisé jusqu’à l’absurde en 2022 quand il déclare vouloir dénazifier une Ukraine dirigée par un Juif. Il n’est pas impossible que l’occultation, voire la négation du sort particulier réservé aux Juifs par les Allemands joue un rôle : pour les Soviétiques, c’est le peuple entier qui a (énormément) souffert, il est hors de question qu’il y ait quelque particularisme.</p>
<h3>Les Juifs en Russie</h3>
<p>Un chapitre s’étend sur le sort des Juifs côté soviétique. Les Allemands à l’est ne s’embarrassent d’aucune précaution pour masquer leurs charniers, et les liquidations massives commencent dès le début de la conquête de l’URSS, avant le choix définitif de la Solution finale. Vue l’ampleur de la tâche, les populations locales sont enrôlées, au moins pour la logistique et combler les fosses. Les Allemands sont bien accueillis, et les pogroms spontanés, dans nombre d’endroits victimes récentes du stalinisme (Ukraine affamée, États baltes annexés…), renommé « judéo-bolchevisme ».</p>
<p>Staline est donc parfaitement au courant de l’ampleur de l’extermination, mais ne la met pas spécialement en avant : les Juifs sont noyés parmi beaucoup d’autres victimes, et il n’est pas question de faire des Juifs des martyrs plus que les autres, surtout quand des Soviétiques sont complices. D’un autre côté, les massacres servent à mobiliser la communauté juive à l’étranger (États-Unis en tête) au profit de l’URSS. Un premier comité juif créé en 1942 est envoyé au goulag car trop international, et le Kremlin en recrée un autre. Promoteur de la culture juive, il récolte de l’argent à l’étranger.</p>
<p>La libération progressive du territoire révèle les charniers et rend la Shoah palpable, mais fait aussi ressortir les compromissions… et l’antisémitisme, y compris au sommet. L’URSS, devenue un Empire dont la victoire s’est basée sur le nationalisme, n’a plus besoin de Juifs. Dès la fin de la guerre, Staline étouffe tout, la parution du <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Livre_noir">Livre noir</a></em> (une compilation de témoignages) est annulée, les membres du comité sont exécutés en 1952. Il n’y aura pas de monuments commémoratifs sur les charniers. Lors de la perestroïka, les Russes ont d’autres sujets de réflexion et d’autres chats à fouetter. Puis Poutine réinstrumentalise la Grande Guerre Patriotique, qui n’a pas besoin de victimes juives. Les anciennes républiques soviétiques rebâtissent souvent leur identité en réaction au communisme sans place particulière pour leurs Juifs.</p>
<h2> Mers el-Kébir</h2>
<p>L’attaque de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_de_Mers_el-K%C3%A9bir">Mers el-Kébir</a> (en Algérie française) a fait couler beaucoup d’encre depuis juillet 1940 : Churchill ordonne alors à sa flotte de couler la partie de la flotte française qui y est stationnée, de peur qu’elle ne passe aux mains des Allemands. Avant l’armistice, Darlan avait promis aux Anglais que la flotte passerait dans leur camp, ou au pire se saborderait. Mais il se fait acheter par Vichy. Certes, la flotte n’est effectivement pas livrée aux Allemands et se saborde en 1942. Mais qui en a la garantie en juillet 1940 ?</p>
<p>Bernard Costaglia apporte quelques nouveaux éléments aux débats : Churchill ne suit pas juste ce qui est devenu la version officielle (trahis par Darlan, épouvantés par l’idée d’une flotte française alliée aux nazis, les Anglais choisissent à regret la plus sûre solution). Entrent en compte le besoin d’infliger un revers, même indirect, à l’Axe ; de marquer la résolution britannique à un moment où le pouvoir de Churchill n’est lui-même pas si assuré ; le fait qu’il faut un an pour former l’équipage si les Allemands mettent la main sur les navires (à l’appui, un document de Churchill de… la guerre précédente) ; le message ainsi envoyé aux Américains (message reçu) qu’il est critique qu’ils livrent des navires ; peut-être le besoin de punir les Français ; voire de les vexer pour qu’ils réinvestissent dans leur armée, même vichyssoise. Mais encore : l’occasion est unique pour frapper. Les navires sont en position de faiblesse à ce moment, alors qu’à long terme, si l’Angleterre veut poursuivre le blocus du continent, une bataille est inévitable. L’encre n’a pas fini de couler.</p>
<h2>Italie</h2>
<p>L’Italie n’a pas gagné une grande bataille de toute la Seconde Guerre Mondiale. Le chapitre redore le blason des troupes italiennes, qui ne se rendent pas sans combattre, et qui sauvent parfois les fesses de Rommel en Afrique. Lequel Rommel leur impute en retour certains de ses échecs.</p>
<p>Mais le problème fondamental de l’Italie est au sommet : Mussolini, velléitaire, voit beaucoup trop grand, veut recréer un Empire, et agit sans coordination avec son allié (qui ne fait pas grand cas de lui), allié vite devenu protecteur suite à toutes ces mauvaises décisions. En effet : déclarer la guerre aux Alliés en 1940, c’est couper Somalie et Éthiopie de la métropole (et la reconquête alliée commencera par là en 1941). L’attaque sur la Grèce vire à la catastrophe, Hitler doit intervenir. (<em>C’est un succès, mais Barbarossa est retardé : Mussolini a peut-être sauvé Moscou.</em>) Rebelote en Égypte.</p>
<h2>Pologne</h2>
<p>S’il y a un État au centre des « terres de sang » de cette période, et victime des deux totalitarismes, c’est bien la Pologne. Attaqué par le Reich et l’URSS en même temps, à nouveau dépecé, le pays voit ses élites liquidées, sans parler des Juifs. La Résistance culturelle tente de préserver l’éducation, mais politiquement les succès sont très limités. Le gouvernement en exil est impuissant.</p>
<p>L’insurrection désespérée du ghetto de Varsovie en 1943 est un acte de désespoir, et l’insurrection de Varsovie en 1944 mène à la destruction de la ville et de la Résistance par les Allemands, au plus grand profit des Soviétiques qui ne lèvent pas le petit doigt. Les Alliés ne peuvent rien faire quand Staline installe son propre gouvernement polonais, vassalise peu à peu le pays, et décale ses frontières arbitrairement.</p>
<h2>Vatican</h2>
<p>Le comportement du pape Pie XII (élu en 1939) face au nazisme continue de faire débat. Pie XI dénonce l’attitude du régime nazi en 1937, mais son successeur fait partie de ceux qui espère préserver la paix et il ne s’exprime pas ouvertement. La principale raison de la prudence de Pie XII est sans doute la crainte de représailles sur les millions de catholiques allemands (raison pour laquelle il essaie plus tard de modérer les Alliés qui rasent l’Allemagne jusqu’à obtenir une reddition sans condition). Il est clair que ce choix l’a tourmenté.</p>
<p>La guerre ne modifie pas la tradition de neutralité de l’Église, qui se veut universelle, médiatrice, et pourvoyeuse de secours. Les chrétiens sont dans chaque camp, et sont censés obéir à leur gouvernement local. Le Saint-Siège s’est toujours accommodé des régimes autoritaires s’ils respectaient les catholiques, et toujours mal vu les régimes libéraux, bien qu’encourageant la démocratie en 1945. Évidemment, il abhorre le communisme et l’URSS depuis longtemps. Mais Pie XII ne croit pas que Hitler soit un rempart contre Staline, et refuse d’approuver la croisade nazie contre le bolchevisme. Et tant mieux si ces deux maux s’annihilent mutuellement.</p>
<p>Cette guerre est différente des précédentes par son idéologie et son ampleur, et des pressions pour prendre partie pour les Alliés se font jour dans l’Église même, par exemple chez les jésuites. Bien informé sur les massacres de Juifs, Pie XII n’en parle timidement que dans deux discours en 1942 et 1943, sans consigne ferme aux fidèles. Il laisse la responsabilité d’agir aux épiscopats locaux. Face aux persécutions contre les Juifs dans des pays très catholiques comme la France de Vichy ou la Hongrie, l’Église est juste résignée et fait peu. L’antisémitisme traditionnel a évidemment joué plus ou moins consciemment, avant comme pendant la guerre.</p>
<h2>Pacifique & Japon</h2>
<p>1941 marque la bascule de la guerre européenne vers une guerre mondiale. Frank Michelin remarque que l’indépendance de l’Indochine française, et de nombre d’États de la région, fait suite à l’invasion japonaise. C’est en Asie du Sud-Est que les conséquences politiques de la guerre sont les plus radicales.</p>
<p>Chaque pays voit cette face du conflit selon prisme. Pour les Japonais il y a la guerre de quinze ans (d’abord contre la Chine dès 1931), dont la seconde partie est la guerre d’Asie-Pacifique. La « grande guerre européenne » est plutôt un conflit séparé qui ne les a pas concernés.</p>
<p>L’expansion japonaise aux dépens de la Chine débute avec l’annexion de la Corée puis Taïwan en 1894. À partir de l’invasion de la Mandchourie, la guerre est permanente. Les Japonais occupent la plupart des zones peuplées mais le gouvernement chinois (provisoirement allié aux communistes) ne s’avoue jamais vaincu, et la Chine est gigantesque. Rediriger l’expansion vers la Sibérie n’est plus une option après la raclée de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Khalkhin_Gol">Nomohan</a> en 1939 face aux Soviétiques.</p>
<p>Pour étouffer la Chine, le Japon lance un blocus et fait pression pour occuper l’Indochine de Vichy, sans défense et forcée d’obéir. Ce mouvement vers le sud menace directement Singapour et l’Inde, perles de l’Empire britannique.
Les États-Unis menacent de sanctions (pétrole…) potentiellement mortelles. L’Indonésie (elle aussi sans défense depuis l’invasion des Pays-Bas) devient donc une cible majeure, qui implique de renforcer le contrôle de l’Indochine, voire d’affronter les Britanniques (protecteurs de l’Indonésie mais sur la défensive face aux Allemands), voire les États-Unis (propriétaires des Philippines et alliés inconditionnels des précédents).</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px.png" title="Expansion du Japon 1937-42"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px_m.png" alt="Expansion du Japon 1937-42" class="media-right" /></a>Le processus de décision japonais est peu clair et résulte de nombreuses luttes d’influence entre armée et marine, voire de faits accomplis de généraux locaux. Finalement, l’option choisie continue la fuite en avant : attaque de Singapour, des Philippines, et raid sur Pearl Harbor, en espérant sécuriser assez de ressources et de territoires avant la contre-attaque anglo-saxonne.</p>
<p>Les Japonais vont effectivement conquérir en six mois un espace immense, des frontières indiennes aux Aléoutiennes.
S’ils sont des occupants brutaux, ils détruisent l’ordre occidental, pour le plus grand profit des indépendantistes locaux. Les Européennes ne réussiront pas à reprendre le contrôle après-guerre. En Chine, les communistes profitent de l’épuisement des troupes nationalistes pour prendre le pouvoir.</p>
<h2>Chine</h2>
<p>Le point de vue chinois est bien sûr focalisé sur la guerre de quinze ans contre le Japon, fondateur devenu un mythe fondateur de la Chine actuelle.</p>
<p>En 1900, le pays est en déliquescence depuis des décennies face aux Occidentaux. Puis le Japon annexe Taïwan et la Corée, et enfin le sud de la Mandchourie après avoir évincé les Russes en 1905 (première grande défaite d’une puissance blanche).
La République chinoise s’enfonce dans une guerre civile avec les communistes. L’invasion complète de la Mandchourie survient en 1931, sur une initiative des nationalistes japonais de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arm%C3%A9e_japonaise_du_Guandong">armée du Kwantung</a>. Les Japonais rêvent d’une alliance contre les Soviétiques mais Staline soutient plutôt l’union sacrée qui apparaît en Chine. En 1937, une nouvelle attaque japonaise va jusque Shangaï et Nankin.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub_s.png" alt="Carte de l’occupation japonaise en Chine, 1940" class="media-right" /></a></p>
<p>Les crimes de guerre systématiques (le massacre de Nankin étant l’éternel symbole) n’ont pas raison de la résistance chinoise. Le nombre pur, et le soutien anglo-saxon ou soviétique, ne compensent toutefois pas le dénuement de l’armée chinoise. Sa façade maritime occupée, la Chine ne peut recevoir de soutien que par l’Indochine et la Birmanie, nouvelles cibles du Japon (voir ci-dessus). La guerre monte en intensité. L’URSS n’aide plus la Chine dès 1941 (elle signe un traité de non-agression avec le Japon pour couvrir ses arrières face aux nazis) mais l’aide américaine s’intensifie (« Tigres volants », pont aérien depuis la Birmanie).</p>
<p>Communistes et nationalistes mènent séparément la guerre contre le Japon. À la capitulation japonaise et au départ précipité des occupants, la guerre civile reprend jusque 1949. Toutes ces guerres coûtent environ vingt millions de morts, très majoritairement des civils.</p>
<p>La Chine ne recommence à exploiter la corde nationaliste, mémorielle et anti-japonaise qu’à la fin des années 80, à l’effondrement du bloc soviétique. Le manque de remords officiels du Japon envenime les choses. Xi Jinping appuie à fond sur le nationalisme, l’exploitation de la Seconde Guerre Mondiale, où le rôle de la Chine a été sous-évalué (première victime en taille et durée et enlisement du Japon), et la victimisation (un siècle d’humiliation). Le pouvoir déforme le rôle du Parti communiste (secondaire pendant contre le Japon) et les souffrances des autres pays. D’autres sons de cloche émergent cependant. Mais même entre les autres pays de la zone, une mémoire transnationale du conflit a du mal à émerger.</p>
<h2>Allemagne & dénazification</h2>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5.png" title="Division de l'Allemagne vaincue, 1945"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5_s.png" alt="Division de l'Allemagne vaincue, 1945" class="media-center" /></a></p>
<p><em>Der Fragebogen</em> est le succès de librairie allemand de 1951, sur le questionnaire que tous les ouest-allemands ont dû remplir sur leur activité sous le nazisme : un monument de déni (par un auteur d’extrême-droite (<em>comme par hasard !</em>))), réduisant le soutien nazi à celui de la classe dirigeante, et mélangeant camps d’internement américain et de concentration. Sans aller jusque là, l’Allemand de base trouve vite que la dénazification s’attaque aux petits et laisse filer les gros, et la perçoit comme une justice des vainqueurs.</p>
<p>Dans l’après-guerre, la dénazification ne peut être qu’imparfaite. Les dirigeants, les politiques, les membres de la Gestapo, les SS partent immédiatement au trou, mais trop de gens ont participé à l’administration du IIIè Reich, sa justice et sa politique criminelle pour les arrêter tous. À peu près tout le monde, de gré ou de force, a fini dans une organisation nazie. Le but principal des Alliés est que le retour de la démocratie ne soit pas sapé par des nazis restés à des postes-clés politiques ou économiques. L’interdiction des organisations, l’annulation de nombreuses lois, sont la partie facile. L’expérience américaine de « défascisation » en Italie depuis 1943, ou celle de l’épuration en France, sert. Les gouverneurs des quatre zones d’occupation sont chargés de l’exécution de mesures prises en commun, mais chacun fait un peu à sa sauce.</p>
<h3>À l’ouest</h3>
<p>Arrive donc le fameux questionnaire pour juger du niveau d’implication de chacun (chez les Américains, car les Britanniques ont plus ciblé) : coupable principal, compromis/bénéficiaire, moins compromis, simple suiveur, exonéré ? La masse à traiter implique que les Allemands se jugent au final souvent entre eux, avec compréhension. Le contexte de Guerre Froide naissante, comme le chaos économique, font passer l’épuration politique second plan. Des nazis encartés écopent de peines légères car économiquement nécessaires, au lieu d’être condamnés à finir leur vie comme manœuvre. Les plus jeunes et les suiveurs les moins riches, ou les prisonniers de guerre, sont rapidement amnistiés d’office. Le système est aussi perverti par les <em>Persilscheine</em>, attestations de bon comportement, souvent réciproques entre connaissances. Tout le monde a sa justification pour avoir plus ou moins suivi (mais pas plus !) le Führer.</p>
<p>Les Églises freinent aussi des quatre fers : une épuration trop massive gênerait la rechristianisation de l’Allemagne. Les partis politiques voient aussi un vivier d’électeurs dans tous ces dénazifiés plus ou moins repentis, qui se considèrent plutôt comme des escroqués et donc des victimes. En 1950/51, la nouvelle République Fédérale rouvre les portes des administrations à presque tout le monde. L’Allemagne fédérale voit sa dénazification comme un échec relatif, mais au moins sa culture politique a-t-elle été rebâtie.</p>
<h3>À l’est</h3>
<p>Les communistes ont la main beaucoup plus lourde et déportent jusqu’en URSS. C’est aussi le moyen de mettre le pays politique au pas. Mais là aussi l’épuration s’arrête vite par besoin de main d’œuvre.</p>
<h2>Du souvenir de cette guerre</h2>
<p><em>C’est un fil rouge : le souvenir de la guerre dépend des pays, y compris relativement aux autres conflits.</em></p>
<p><em>Si pour les Américains la Seconde Guerre Mondiale est d’abord celle du Pacifique et de la reconquête de l’Europe de l’Ouest, les Russes ou les Chinois ont des perspectives très différentes,marquées par la ligne variable du Parti. Les Suédois et les Suisse préfèrent regarder ailleurs. Les Australiens restent plus marqués par la Première Guerre Mondiale, où ils eurent beaucoup plus de victimes et participèrent à des batailles majeures.</em></p>
<p><em>À l’inverse, l’Allemagne a été totalement traumatisée par l’anéantissement qu’elle a subi, et la mémoire allemande me semble plus tournée vers le long cauchemar du front russe et les derniers mois de guerre que par la Première Guerre Mondiale, la Normandie ou les victoires des débuts.</em></p>
<p><em>Manquent forcément quelques pages : il y aurait beaucoup à écrire sur l’ex-Yougoslavie (avec ses conséquences jusque dans les années 90), les États baltes, la Finlande, l’Afrique (exploitée par les Alliés), la Syrie, l’Irak ou l’Iran…</em></p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Seconde-Guerre-Mondiale-vue-d-ailleurs-Claude-Qu%C3%A9tel-co#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/873„Die Teilung Deutschlands” (La scission de l’Allemagne) de Matthias Uhlurn:md5:69839c6b33fd0764fa2daa9acd17a2682022-11-29T19:48:00+01:002022-12-16T18:22:09+01:00ChristopheHistoireabominationadministrationAllemagneapocalypsecartescataclysmechaoscommunismedémocratieEmpire soviétiqueEuropeguerreGuerre Froidegéographiegéopolitiquehistoireimpérialismelivres luslogistiquemémoireperspectivepolitiqueracléeSeconde Guerre MondialetotalitarismeéconomieÉtats-Unis<p>Au début, je me demandais pourquoi les frontières entre Berlin Ouest et Est étaient si tordues. Ça a fini par l’achat de ce <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/East_Side_Gallery" hreflang="de"></a>petit livre.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Die_Teilung_Deutschlands-Matthias_Uhl-be.bra_verlag.jpg" title="Die Teilung Deutschland"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Die_Teilung_Deutschlands-Matthias_Uhl-be.bra_verlag_s.jpg" alt="Die Teilung Deutschland" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p> <p>J’ai d’abord connu Berlin coupé en deux, lors d’un voyage scolaire<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Voir le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mur_de_Berlin">Mur</a>, taggé de haut en bas, a été un de mes souvenirs frappants d’ado (deux ans avant la joyeuse stupéfaction à sa disparition).</p>
<p><a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Datei:Occupied_Berlin.svg" title="Berlin occupé divisé en 3 zones (image Wikipedia, Stephan-Xp,CC-BY-SA 3.0"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Occupied_Berlin_depuis_Wikipedia-Stefan-Xp-CC-BY-SA-3.0.png" alt="Berlin occupé divisé en 3 zones" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Berlin occupé divisé en 3 zones" /></a></p>
<p>En y retournant récemment, je n’ai plus vu du Mur qu’un morceau devenu une expo artistique, l<em>'<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/East_Side_Gallery" hreflang="de">East Side Gallery</a></em>, dans un <a href="https://www.openstreetmap.org/relation/6807791">coin paumé très à l’est</a>. Qu’est-ce que ce bout de Berlin-Ouest faisait de l’autre côté de la Spree ? Qui a fait des frontières aussi farfelues en 1945 quand les vainqueurs se sont partagé la ville ?
Et parce que cette question me trottait dans la tête, je n’ai pas pu ne pas acheter <em>Die Teilung Deutschlands</em> dans la librairie du château de Charlottenburg.</p>
<p>Il condense en quelques pages une très dense et difficile période, entre la capitulation (mai 1945) et la proclamation des deux Républiques allemandes (1949). Étonnamment, l’Allemagne est restée quatre ans écartelée entre quatre zones d’occupation, avec sa monnaie d’avant-guerre, et son administration (sous tutelles).</p>
<h3>Occupation</h3>
<p><a href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/8/80/Map-Germany-1947.svg/330px-Map-Germany-1947.svg.png" title="Division de l’Allemagne vaincue, 1945"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5.png" alt="Division de l’Allemagne vaincue, 1945" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Division de l’Allemagne vaincue, 1945" /></a>Après la capitulation sans condition, tout le pays était occupé, et les Alliés pouvaient dicter leur loi. Les zones furent établis selon des critères logistiques, et non selon le front à la fin de la guerre (les Américains laissant notamment la Saxe aux Soviétiques). La Russie et la Pologne annexèrent la Prusse orientale, la Silésie, la Poméranie… pourtant allemandes depuis des siècles.</p>
<h3>L’heure zéro</h3>
<p>La situation matérielle en 1945 était évidemment dantesque. Avec un quart des logements en moins suite aux combats et bombardements, des millions de morts et prisonniers, des millions de réfugiés expulsés des zones annexées ou des zones germanophones de toute l’Europe de l’Est, la surface de logement par habitant était la moitié de celle de l’avant-guerre. Ce n’était pas le pire.</p>
<p>Les moyens de communications étaient anéantis, la main d’œuvre masculine prisonnière ou tuée, l’économie en ruine. Seule chose en abondance : les gravas de ce qui avait été des villes. Les prix alimentaires explosaient, et les familles des villes se dispersaient dans les campagnes à la recherche de la moindre nourriture.</p>
<p>Au titre des réparations, les Alliés se servirent sur la bête, et les Soviétiques sans retenue — ce qui se conçoit vu les destructions opérées chez eux par les Allemands. Des démontages d’usines tournèrent au fiasco, faute de capacité d’accueil réelles dans une URSS elle-même dévastée. La chasse aux ingénieurs et techniciens qualifiés avait démarré avant la fin des combats. Alors que les Américains leur offraient une alléchante émigration, les Soviétiques les renvoyaient chez eux une fois leurs compétences plus ou moins transmises.</p>
<h3>Réorganisation politique</h3>
<p>Il fallut refaire tourner les administrations locales et les systèmes judiciaires, sociaux, éducatifs, médicaux.
Très vite apparurent des Länders de taille régionale au sein de chaque zone, mais sans rien au-dessus que l’administration militaire d’occupation.</p>
<p>La Guerre froide n’était pas déclarée, mais l’administration militaire commune a très vite dysfonctionné, Soviétiques et Occidentaux ne s’entendant évidemment pas. De manière moins attendue, la coordination entre les trois zones occidentales n’était pas complètement acquise, chacun faisant un peu à sa sauce chez lui, par exemple en matière de dénazification. Les Français ont parfois dû se faire tirer l’oreille pour suivre le mouvement (les aides du plan Marshall étant un moyen de persuasion efficace). La fragmentation administrative par zone menaçait.</p>
<p>À l’est, les communistes se préoccupèrent d’entrée de placer leurs hommes aux postes clés, même si des « bourgeois » purent être mis en avant à nombre d’endroits. La dénazification, assez brutale, permit de réduire au silence nombre de fortes têtes. Progressivement les partis non communistes furent fusionnés de force avec le parti communiste et les élections devinrent une farce totale. Les brutalités et pillages des soldats russes en terre conquise <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup> énerva jusqu’aux plus hautes autorités d’occupation, conscientes de l’impact désastreux sur la population, avant que l’Armée Rouge finisse parquée dans des casernes.</p>
<p>À l’ouest, la dénazification était bien sûr à l’œuvre aussi, mais il s’agissait aussi de rééduquer les Allemands et d’en faire progressivement des démocrates.</p>
<p>Nulle part la dénazification ne fut chose facile si l’on ne voulait pas totalement désorganiser les services.
Les exilés politiques, revenus après toutes ces années, n’étaient pas forcément bien vus par leurs collègues.
Il fallut bien laisser en place de nombreux anciens membres du parti nazi.
Cela n’empêcha pas les nouvelles administrations de suivre la politique décidée par les occupants.</p>
<h3>La population</h3>
<p>Le sort des femmes fut bien différent entre les deux zones. Il n’y a pas besoin de rappeler leur sort dans les zones envahies par l’Armée Rouge à la fin de la guerre. Les exactions sexuelles furent bien plus rares à l’ouest, même si la zone française a fait tache. Par contre, une prostitution plus ou moins ouverte se répandit dans toutes les couches de la population en raison des difficultés d’approvisionnement, pour le plus grand plaisir des occupants. La criminalité explosa, puis retomba avec l’amélioration de l’approvisionnement.</p>
<p>Les prisonniers furent relâchés relativement vite par les Anglo-Saxons pressés de rendre de la main d’œuvre à l’économie. Les Français avaient de nombreuses zones à leur faire déminer et prirent plus de temps. Les Soviétiques, rancuniers, mirent plus de dix ans à renvoyer tous les survivants <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup>. L’effarant taux de décès des prisonniers à l’est (33 % contre 1 % à l’ouest) provenait autant des privations, générales à l’est, que de la dureté du régime stalinien. Nombre de prisonniers furent condamnés sous divers prétextes.</p>
<p>Avant le retour des hommes, les femmes (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Femmes_des_ruines" hreflang="de">Trümmerfrauen</a></em>) durent se sentir un peu seules pour déblayer ce qui restait des villes, un travail titanesque. Les maris revenus, bien des couples éclatèrent, l’homme étant souvent traumatisé et la femme ayant pris en main le foyer pendant ce temps, sans parler des enfants trop vite grandis. Peu à peu, à l’ouest, les femmes retournèrent à leurs fourneaux, pendant que l’est communiste restait plus égalitaire<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</p>
<h3>Le plan Marshall</h3>
<p>La reconstruction de l’Europe patinait. Or, les Américains voulaient éviter une redite du chaos économique
de l’Allemagne d’après la Première Guerre Mondiale, dont l'état impactait d'ailleurs toute l’économie européenne.</p>
<p>Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_Marshall" hreflang="fr">plan Marshall</a> de 1948, à destination de <em>toute</em> l’Europe, fut une gigantesque carotte américaine
— mais aussi un piège pour les communistes. Profiter du plan impliquait un droit de regard américain sur l’utilisation des fonds et ressources,
et poussait à l’intégration économique entre les États européens, de l’ouest comme de l’est. Staline ne pouvait supporter rien de cela.</p>
<p>Le refus des communistes de profiter du plan leur aliéna de nombreuses voix à l’ouest, et plomba les relations entre l’URSS et les États à qui elle avait imposé de refuser le plan.</p>
<h3>DM</h3>
<p>Le redémarrage économique fut lent. Le miracle (ouest-)allemand démarra en 1948 quand les Américains, en secret et suivis par leurs alliés, économiquement dépendants, préparèrent le remplacement du vieux Reichsmark par une nouvelle monnaie promise à un grand avenir, le Deutsche Mark.</p>
<p>Ne furent convertis à parité que quelques dizaines de RM par tête, et les flux réguliers (pensions, salaires, loyers…). Tout le reste, dettes, économies, valeurs, hypothèques… fut converti à des taux de 10 à 15 RM pour un DM. « La plus grande expropriation de l’histoire allemande » effaçait 80 % du patrimoine financier, purgeait l’Allemagne de dettes qu’elle aurait été incapable de rembourser, signa la fin du marché noir, et relança spectaculairement l’économie après quelques mois difficiles.</p>
<p>Les Soviétiques, au courant de l’opération par leurs espions, interdirent chez eux la nouvelle monnaie et durent faire une réforme similaire.</p>
<h3>Le blocus</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Berlin_1948-C-54_landing_at_templehof-Henry_Ries_USAF-Domaine_public.jpg" title="C -54 arrivant à Berlin-Ouest, 1948 - Henry Ries/US Air Force, via Wikipédia, domaine public"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Berlin_1948-C-54_landing_at_templehof-Henry_Ries_USAF-Domaine_public_m.jpg" alt="C -54 arrivant à Berlin Ouest, 1948 - Henry Ries/US Air Force, via Wikipédia, domaine public" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>
C’est à la même période que se déroula le bras de fer du blocus de Berlin-Ouest. Staline coupa tous les accès terrestres à l’enclave occidentale dans la zone soviétique.</p>
<p>Pendant presque un an, tout le ravitaillement de 2 millions d’habitants passa par un pont aérien allié, qui coûta la vie à de dizaines de pilotes. L’aéroport du Tegel fut bâti en 3 mois. La population subit évidemment de nouvelles restrictions, alors que la ville restait une gigantesque ruine. Économiquement insensé, politiquement indispensable, médiatiquement génial, le pont aérien marqua la détermination américaine sans aller jusqu’à l’affrontement armé, et obligea Staline à reculer. Lui non plus n’était pas prêt à un affrontement armé. Et les Occidentaux le savaient : les dizaines d’officiers soviétiques passés à l’ouest permttaient un aperçu de l’état des troupes communistes. Par ses propres espions, Staline savait les Occidentaux déterminés à un affrontement, passa outre à son habitude, puis jeta l’éponge.</p>
<h3>Les 2 Allemagnes</h3>
<p>Le blocus de Berlin fut totalement contre-productif pour les communistes à l’ouest, puisqu’il souda les Allemands de l’Ouest derrière les Alliés occidentaux et accéléra les discussions sur la mise en place d’un État ouest-allemand.</p>
<p>Sous la pression américaine, et devant l’état de partition de fait, les élus des Länder des zones occidentales créèrent un conseil de représentants des différents partis pour élaborer une nouvelle Loi Fondamentale. Les quelques élus communistes, sans surprise, votèrent contre le texte final. L’Allemagne n’était pas encore pleinement souveraine : les puissances occupantes se réservaient encore relations et commerce extérieurs. Bonn, petite ville loin de la frontière est, fut choisie comme capitale (provisoire). Les parlements régionaux approuvèrent la Loi Fondamentale — sauf la Bavière, qui accepta tout de même d’intégrer la nouvelle République Fédérale d’Allemagne. Née en 1949, celle-ci s’agrandit en 1956 de la Sarre, alors officiellement indépendante mais protectorat français de fait.</p>
<p>Staline ne créa un État est-allemand qu’après avoir perdu tout espoir d’étendre son influence à tout le pays, et laissé les Occidentaux assumer la division officielle. Un conseil populaire, officiellement pan-allemand, décida plus tard de créer la future République Démocratique. Évidemment, tous les scrutins et organisations étaient biaisés, quitte à recompter avec une mauvaise foi consommée, pour garantir les mains libres au Parti Socialiste Unifié, dirigé de fait par les communistes.</p>
<p>Le Mur de Berlin ne fut construit qu'en 1961 pour mettre un terme à l'émigration massive vers la RFA, mais c'est une autre histoire.</p>
<p>Voir la <a href="https://www.bebraverlag.de/verzeichnis/titel/die-teilung-deutschlands.html" hreflang="de">page du livre chez l’éditeur</a>.</p>
<h3>PS</h3>
<p>Et pour en revenir à la trajectoire farfelue du mur : les zones d’occupation ont été définies à partir des limites administratives existantes.
Les occupants n’ont pas prévu au départ que les zones pourraient être séparées, et sont allés au plus simple.
Dans cette <a href="https://www.landkartenarchiv.de/historischestadtplaene600b.php?q=landkartenarchiv_gesamtadressenwerk_der_nsdap_berlin_1938" hreflang="de">carte des groupes du parti nazi à Berlin en 1938</a>, l’<em>ortsgruppe</em> 108 va bien jusqu’au bord de la Spree. Était-ce basé sur une vraie limite administrative ? Je n’ai pas trouvé. En tout cas, une partie de Berlin-Ouest donnant sur le fleuve obligeait les communistes à planter un mur sur la rive en face, pourtant toute à eux, pour interdire les passages à la nage. Plusieurs personnes se noyèrent là sans que les policiers des deux côtés ne puissent ou ne veulent faire quelque chose. Effarant.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Calculez mon âge…</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Déjà…</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Dont des <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov">Alsaciens malgré-nous</a></em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Les avancées vers l’égalité homme-femme ont été un des rares succès des communistes est-allemands.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EDie-Teilung-Deutschlands-%28La-scission-de-l-Allemagne%29-de-Mathias-Uhl#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/866« Le monde d'hier » de Stefan Zweigurn:md5:f41a7b4cef6d81753e0a4bee446e679c2021-07-31T15:16:00+02:002023-03-13T10:52:49+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagneapocalypseautodestructionAutrichecataclysmecatastrophechaoscivilisationculturediscriminationdécadencedémocratiedéshumanisationguerregéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmulticulturalismemémoirenationalismeperspectivePremière Guerre MondialeracismeSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p><em>Und ich mußte immer an das Wort denken, das mir vor Jahren ein exilierter Russe gesagt: »Früher hatte der Mensch nur einen Körper und eine Seele. Heute braucht er noch einen Paß dazu, sonst wird er nicht wie ein Mensch behandelt.«</em></p>
<p>
Et je me souviens toujours de ce mot, que m'avait dit un exilé russe, des années auparavant : « Autrefois l'homme n'avait qu'un corps et une âme. Maintenant il lui faut encore un passeport, sinon il n'est pas traité comme un homme. »</p>
<p>
<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Stefan_Zweig" hreflang="fr" title="Stefan Zweig : page Wikipédia">Stefan Zweig</a></em>, Die Welt von Gestern. Erinnerungen eines Europäers</p></blockquote>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-vers_1912-via_Wikipedia.png" alt="Stefan Zweig vers 1912 (via_Wikipedia)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Stefan Zweig était de ces Européens d'avant l'heure, cosmopolites d'avant la Première Guerre Mondiale, voyageurs sans passeport, passeurs de la culture entre les pays et à travers les langues, et qui, hommes déjà mûrs, ont vu s'effondrer leur monde dans la haine, les mouvements de masse, les frontières, l'exil, la guerre. <em>Le monde d'hier</em> est le testament de Zweig, rédigé juste avant son suicide en 1942.</p> <p>Certes son « monde d'avant » était privilégié : la jeunesse dorée d'une capitale impériale, polyglotte, avide de littérature, de théâtre, de musique, d'art. S'il décrit la Vienne d'avant 1900 comme conservatrice et trop respectueuse de l'âge, il appréciait l'ambiance de son époque : la stabilité, le progrès en marche, l'amélioration progressive de la condition de tous, l'avenir sûr et radieux. Les grandes guerres du XIXè siècle étaient déjà loin, les sociétés évoluaient, dans un Empire presque millénaire.</p>
<p>Cette vitalité et cette confiance furent un piège (à ajouter au dossier de <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark">Sleepwalkers</a></em>) :</p>
<blockquote><p><em>Jeder Staat hatte plötzlich das Gefühl, stark zu sein und vergaß, daß der andere genauso empfand, jeder wollte noch mehr und jeder etwas von dem andern. Und das Schlimmste war, daß gerade jenes Gefühl uns betrog, das wir am meisten liebten: unser gemeinsamer Optimismus.</em></p>
<p>
Chaque État avait soudain le sentiment d'être fort, et oubliait que les autres se sentaient de même ; chacun en voulait encore plus, et chacun quelque chose de l'autre. Et le plus grave est que c'est justement ce sentiment que nous aimions le plus qui nous abusait : notre optimisme à tous.</p></blockquote>
<p>Effaré, Zweig voit tous ses amis happés par l'hystérie collective nationaliste.
Incapable de voyager loin, militairement « planqué », il collabore en Suisse à un collectif d'écrivains européens contre la guerre, conscients de parler dans le vide.</p>
<p>Il assiste aux derniers instants de l'Autriche impériale, en croisant l'Empereur Charles de Habsbourg en exil à la frontière suisse.
De Salzbourg, il assiste au chaos économique, au bouillonnement culturel et au complet renversement des valeurs de la nouvelle Autriche — le seul pays que l'on ait jamais forcé à être indépendant.</p>
<p>Les Années Folles se passent mieux (c'est au tour des Allemands de souffrir économiquement). Son succès littéraire déjà naissant avant guerre se renforce.</p>
<p>S'impose progressivement Hitler, que personne en Autriche ne voit venir. En Allemagne, son ami l'homme politique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walther_Rathenau" hreflang="fr" title="Walter Rathenau sur Wikipédia">Rathenau</a> est assassiné. Les chemises brunes sèment le chaos. L'ordre moral et légal, les bases de la société, que même la Première Guerre Mondiale avait à peu près préservées : tout cela s'envole. Sous l'unité de façade du pays face à la menace, Zweig sait que beaucoup, par peur ou prudence, sont déjà préparés à l'Anschluß.</p>
<p>Zweig est un des premiers à fuir, bien avant le rattachement au IIIè Reich. Pour en ajouter aux pertes matérielles (livres, collections) ou immatérielles (amis, famille), il est déchu de sa nationalité en 1938 : il se retrouve apatride. Ce qui semblait un rêve pour un citoyen du monde se transforme vite en cauchemar administratif.
En Autriche, sa vieille mère mourante n'a même plus le droit de se reposer sur un banc lors de ses promenades : interdit aux Juifs.</p>
<p>En Angleterre, impossible de convaincre ses interlocuteurs que la perte de l'Autriche entraînera la chute de toute l'Europe. Zweig assiste à l'euphorie à l'annonce des accords de Munich, et à la consternation rapide quand la population réalise que tout a été abandonné à Hitler. L'ambiance se plombe, la guerre s'annonce, certaine.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26.jpg" title="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26_m.jpg" alt="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p>Le livre est un document. Quelques petits travers énervent, comme le <em>name dropping</em> permanent : Sigmund Freud, Richard Strauss, Romain Rolland, Bernard Shaw, H. G. Wells, Walter Rathenau, Charles Ier… Certaines visions semblent un peu idylliques (le Paris d'avant-guerre !), en tout cas réservées aux gens des classes aisées ; mais c'est le propre de la nostalgie. Ce livre décrit certes un monde perdu et son auteur, mais sa famille est quasiment oubliée, et il est surprenant que les prénoms de ses deux femmes ne soient même pas cités.</p>
<p>Zweig n'a pas vu la guerre se retourner, ni la reconstruction de l'Europe. Il en aurait sans doute été un des rebâtisseurs. Notre époque, qui remet des frontières partout, fait la chasse aux migrants, et à nouveau en prise à la stupidité de masse, ne lui aurait pas plu. Et il n'aurait pu s'empêcher de retisser des parallèles avec la chute de l'Europe un siècle plus tôt.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/860« La chute du Japon » de William Craigurn:md5:1477cf6bde729463b434ee59a1c292032020-09-27T21:21:00+02:002020-09-27T21:21:00+02:00ChristopheHistoireabominationAmériqueapocalypseautodestructionbombe atomiquebon senscataclysmecatastrophechaosChinecivilisationdécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegigantismeGuerre FroidegéopolitiquehainehistoirehiérarchieimpérialismeLibérationmortnationalismeoh le beau cas !ouverture d’espritperspectiveracléescienceSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unis<p>Loin de l'histoire militaire pleine de bruits, il y a la petite grande histoire, celle qui se déroule dans des réunions feutrées, ou dans des consciences déchirées entre devoirs, intérêts, peurs et réalisme. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> C'est plutôt celle-là que William Craig choisit de décrire. En 1967, ce livre rapportait les souvenirs des survivants des dirigeants de l'Empire japonais pendant les jours les plus terribles de son histoire. Si quelques pages décrivent les événements militaires de la toute fin de la guerre ou s'étendent sur la mission qui a failli ne pas lâcher la deuxième bombe atomique sur Nagasaki, l'essentiel tourne autour des discussions, tergiversations et affrontements des divers dirigeants japonais.</p> <p>Les ministres, amiraux, officiers... sont évidemment nombreux, et l'Occidental moyen qui les découvre tous ensemble aura du mal à suivre. Heureusement, les photos aident un peu à mémoriser.</p>
<p>Le jeu se déroule essentiellement entre quelques membres du gouvernement, le conseil des anciens Premiers Ministres, et le Conseil suprême, donc beaucoup de militaires et quelques politiques : très peu de personnes au final. Leur poids est écrasant. On est à l'été 1945, Okinawa est tombé, les grandes villes sont rasées sous les bombes incendiaires, et même les plus fanatiques ne croient plus à la victoire. La seule discussion porte sur les termes d'un arrêt des hostilités. Notamment : le maintien de l'Empereur, la non-occupation du Japon, le refus de faire juger des criminels de guerre par l'extérieur.</p>
<p>Dans ce cadre, le dernier ultimatum allié, la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Potsdam_Declaration" hreflang="en">déclaration de Potsdam</a>, demandant une reddition sans conditions sous peine d'anéantissement, est inacceptable. L'espoir des jusqu'au-boutistes : une résistance opiniâtre et des pertes terribles amenant les Américains à plus de concessions. Les Japonais avaient d'ailleurs prévu correctement le plan d'invasion américain par le sud de l'archipel. (<em>On sait que les prévisions de pertes américaines pour l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Downfall" hreflang="fr">invasion de l'archipel</a> se chiffraient en millions. Cela n'effrayait apparemment pas les planificateurs du Pentagone.</em>). Un passage surréaliste : un maréchal revenant d'Hiroshima annonce que la bombe A n'est pas aussi destructrice, des abris souterrains pourraient résister.</p>
<p>Mais d'autres facteurs pèsent : d'abord, les bombes atomiques.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia.png" title="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia_m.png" alt="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Craig consacre beaucoup de pages à décrire le lancement du projet, l'entraînement des pilotes pour cette délicate mission, le choix des cibles... Étonnamment, il passe vite sur Hiroshima (6 août), dont l'attaque se déroule comme à l'exercice, pour se concentrer sur Nagasaki (9 août). Contrairement aux bombes A précédentes à l'uranium, il s'agit là d'une bombe au plutonium, donc non encore testée. La mission fut un cauchemar : problème de carburant dès le départ ; difficulté de rendez-vous avec les avions d'observation ; conditions mauvaises au-dessus de la cible, Kokura ; changement d'objectif ; carburant trop limité pour un deuxième passage et mauvaises conditions, toujours. Il fallait que le bombe tombe juste pour avoir un impact majeur. Mais il y eut une trouée, et Nagasaki disparut. Le bombardier se posa de justesse à Okinawa. La description du sort des habitants de Nagasaki dans les jours suivants est dantesque. Certains victimes étaient des soldats alliés prisonniers. D'autres bombes atomiques étaient en cours d'assemblage.</p>
<p>Depuis plusieurs mois, des vagues de B-29, basés près du Japon, tapissent de bombes les villes japonaises. Même sans bombe atomique, l'industrie japonaise est déjà en train de disparaître. La société, dans des villes rasées où tout manque, se délite.</p>
<p>Les tentatives d'ouverture de divers diplomates dans plusieurs chancelleries pour entamer des négociations de paix échouent pathétiquement. Il est effarant de voir à quel point les deux belligérants possèdent peu de moyens pour communiquer l'un avec l'autre, et combien sont rares les gens bilingues. La déclaration de Potsdam, discutée en interne, reste d'abord sans réponse — ce qui est interprété comme un rejet par les Américains.</p>
<p>Le coup de bambou est sans doute soviétique : les Japonais comptaient sur la neutralité de Staline, voire son intermédiation. Mais celui-ci tient la promesse faite à Roosevelt : l'URSS envahit la Mandchourie au moment où tombe la bombe de Nagasaki, et en un temps record.</p>
<p>Le 10 août, après d'âpres discussions dans un abri antiaérien sous le palais impérial, aucun consensus entre les dirigeants n'est obtenu. Le vieux Premier ministre <a href="ttps://fr.wikipedia.org/wiki/Kantar%C5%8D_Suzuki">Suzuki</a> pousse, contre toute tradition, l'Empereur à intervenir. Hirohito tranche et décide d'accepter la déclaration de Postsdam. Les irréductibles ne peuvent s'y opposer, mais sauvent la face, puisqu'il faut obéir à l'Empereur.</p>
<p>Les Alliés sont contactés via la Suisse et la Suède. L'acceptation par le Japon ajoute la réserve que les prérogatives du souverain régnant seront préservées. Truman et ses conseillers discutent de cette entorse à la « capitulation sans conditions » exigées. Le pragmatisme l'emporte : l'Empereur sera un moyen de faire pression sur les derniers extrémistes dispersés dans les possessions japonaises ; il faut tenter de libérer les prisonniers de guerre le plus vite possible ; plus la guerre durerait, plus l'influence soviétique grandirait. Il faut aussi consulter les Alliés. Les Soviétiques tentent en vain un bluff pour avoir une part du commandement du Japon occupé.</p>
<p>La réponse américaine annonce que toute l'administration japonaise sera subordonnée au commandant suprême allié pour mettre en œuvre les conditions de la capitulation, que le peuple japonais choisira lui-même la forme de son futur gouvernement, et que le Japon sera occupé jusque là. Ce la ne calme pas les partisans de la guerre à outrance, surtout que les Russes et les Chinois veulent explicitement la tête de l'Empereur. Faut-il accepter cette note ? Là encore, il faut que Hirohito tranche à nouveau, le 14 août, pour que l'acceptation soit envoyée aux Américains.</p>
<p>Pendant ces quelques jours, la situation reste floue. Nagasaki brûle toujours. Les extrémistes continuent de lancer aux troupes des appels à la résistance à la radio. Les Japonais annoncent la fin de leurs offensives. Les Américains suspendent leurs bombardements dès le 10 août, se contentant de lâcher des tracts. Le temps passant, quelques bombardiers repartent à l'attaque juste avant le cessez-le-feu définitif.</p>
<p>Au-dessus des responsables japonais planent depuis des décennies les menaces de coup d'État militaire et d'assassinat par des officiers fanatiques. (Ce fut le cas, entre autres, lors de l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Invasion_japonaise_de_la_Mandchourie" hreflang="fr">invasion de la Mandchourie en 1931</a>). À ce moment encore, certains généraux sont ouvertement poussés au putsch par leurs officiers. Ce n'est pas une révolte contre l'Empereur, celui-ci est juste est mal conseillé. Les extrémistes voient notamment le général <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Korechika_Anami" hreflang="fr">Anami</a>, hostile à une capitulation sans conditions, mener un coup d'État. Mais Anamu se plie à la décision finale d'Hirohito, refuse de se révolter, et se suicide comme tant d'autres. Plusieurs autres renoncent, parce qu'ils savent que le coup d'État est voué à l'échec. Le cas de l'ancien Premier Ministre <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hiranuma_Kiichir%C5%8D" hreflang="en">Hiranuma</a> surprend : partisan de la paix, il change d'avis quand il voit que la personne de l'Empereur n'est pas garantie.</p>
<p>Les derniers extrémistes ne se suicident pas tous. Un dernier groupe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_Ky%C5%ABj%C5%8D">va jusqu'au bout</a> et, le 14 août, attaque le Palais impérial. Le disque où Hirohito a enregistré son adresse au peuple n'est pas retrouvé. Le Premier ministre Suzuki manque d'être assassiné. L'essentiel de l'armée ne suit pas. Le putsch échoue, les derniers insurgés se suicident. Le discours d'Hirohito est diffusé le 15 août. Certains Japonais ont du mal à comprendre le message, puis à y croire.</p>
<p>La capitulation se diffuse difficilement. Les combats continuent quelques jours aux Philippines. Quand elle parvient, les réactions sont parfois violentes. Des prisonniers de guerre sont exécutés. Des kamikazes décollent, dont plus personne n'entend parler. Par la suite, il faut encore calmer quelques excités.</p>
<p>Suivent les détails techniques, parfois triviaux, comme l'échange de fréquences radio pour communiquer. Les Japonais envoient les ordres d'arrêt des hostilités à toutes leur troupes, demandent des sauf-conduits pour les officiers et membres de la famille impérial envoyés les confirmer. MacArthur demande l'envoi à Manille d'officiers pour planifier l'occupation. Au moins le transfert d'autorité devait-il se faire dans l'ordre : la mission japonaise s'envole dans le secret et la peur des kamikazes, et arrive le 20 août. L'ambiance, d'abord lourde, se détend un peu. La délégation japonaise apprend le plan américain, qui prévoit des débarquements dès les jours suivants (!). Elle réclame du temps pour mettre au pas les derniers fanatiques, nombreux dans les bases aériennes... et obtient le retrait d'un tableau prévoyant un nombre de femmes de chambres au service d'officiers supérieur ! Au retour, l'avion de la délégation doit amerrir !</p>
<p>Entre les chapitres s'intercalent des passages sur les opérations en vue de la libération des prisonniers. Craignant à juste titre des représailles sur les prisonniers de la part de Japonais désespérés, certains commandos américains, parachutistes et OSS, se positionnent en urgence, prêts à bondir vers les camps de prisonniers à l'annonce de l'arrêt des hostilités. Des difficultés avec les militants communistes sont prévues, et il y a des accrochages : la guerre civile va reprendre en Chine. À ces endroits, les premiers contacts entre Américains et Japonais après l'annonce de la capitulation sont très tendus, mais globalement la libération des prisonniers se déroule sans trop de problèmes.</p>
<p>Très tendu aussi le premier débarquement de soldats américains au Japon, le 28 août, sur une base aérienne auparavant dédiée aux envols des kamikazes. Les Américains arrivent plus tôt que prévu, même retardés de deux jours par la météo. Si l'ambiance reste fraîche, tout se déroule cependant avec un minimum de bonne volonté réciproque, et la première base américaine commence à voir déferler des milliers de soldats vainqueurs, dont MacArthur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia.jpg" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia_s.jpg" alt="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" /></a>La brève cérémonie signature officielle de la capitulation, en présence de tous les représentants galonnés des nations vainqueurs, n'a lieu sur le <em><a href="https://en.wikipedia.org/wiki/USS_Missouri_(BB-63)" hreflang="en">Missouri</a></em> que le 2 septembre. Le choix du bateau tient dans la rivalité MacArthur/Nimitz, ou plutôt Army/Navy : MacArthur étant signataire, le lieu doit être un navire, et est disponible celui du nom de l'État de Truman. Les Américains débarquent alors à Tokyo, et les emprisonnements de responsables suspects de crimes commencent. Au fur et à mesure que les nouveaux maîtres s'installent, les principaux problèmes sont plutôt des chocs culturels, ou des problèmes de disciplines récurrents dans une armée d'occupation, que les deux camps veulent éviter au maximum.</p>
<p>Le livre raconte aussi l'histoire de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Marcus_McDilda" hreflang="en">Marcus McDilda</a>, pilote de chasse prisonnier : aux Japonais qui croient qu'il savait des choses sur la bombe atomique, il donne une théorie et des chiffres fantaisistes — qui ont peut-être fait peur en haut lieu. Et celle du major <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Mayhew_Wainwright_IV" hreflang="fr">Wainwright</a>, ancien second de MacArthur, prisonnier depuis la prise de Manille en 1942, et retrouvé à temps pour être présent, squelettique, à la signature de la capitulation. Ou du drame de l'Indianapolis, coulé après avoir livré la bombe A, dont l'équipage naufragé est décimé par les requins <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><em>Une question que je me pose : Craig s'est basé sur les souvenirs des dignitaires japonais survivants et des témoins, mais pas de l'Empereur. Celui-ci apparaît de manière très furtive. Son rôle dans le fonctionnement de l'Empire japonais est totalement minimisé. Cela colle avec la théorie plus ou moins officielle, après guerre, d'un Empereur traditionnellement sans rôle politique, impuissant face à la caste militaire toute-puissante, théorie <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hirohito#Question_de_la_responsabilit%C3%A9_personnelle_de_l'empereur">remise en cause depuis</a>. On l'a vu, les généraux en faisaient à leur tête ; mais Hirohito se serait laissé pour le moins laissé convaincre, et aurait approuvé la politique d'agression japonaise. Vue la manière extrêmement cérémoniale dont Hirohito communiquait avec ses ministres, on se demande même quelle pouvait être sa vision du monde.</em></p>
<p>Titre original : <em>The Fall of Japan</em></p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Le récit d'un survivant est une des pires scènes des </em>Dents de la me'r' de Spielberg.''</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/858«Red Inferno: 1945» de Robert Conroyurn:md5:6718b6cc69c4749960820df689367c222019-08-16T18:36:00+02:002023-08-26T18:54:21+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesapocalypsebombe atomiquecataclysmecatastrophechaoscivilisationcommunismecoup basEmpire soviétiqueespionnageEuropegigantismeguerreGuerre FroidegéopolitiquehaineimpérialismeLibérationracléeRussieSeconde Guerre MondialetotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Red_Inferno_1945.jpg" title="Red Inferno: 1945, de Robert Conroy"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Red_Inferno_1945.jpg" alt="Red Inferno: 1945, de Robert Conroy" class="media-left" /></a> Une uchronie qui aurait pu être excellente : et si, en mai 1945, Truman avait voulu marquer son territoire face à Staline, et que celui-ci avait surréagi ? L’Armée Rouge déferle alors sur l'ouest de l’Allemagne direction Anvers, et la Troisième Guerre Mondiale prend une toute autre tournure. <em>Red Inferno: 1945</em> se lit sans déplaisir mais il aurait mérité bien des pages supplémentaires.</p> <p>Le point de divergence est crédible. Dans la réalité, les Soviétiques se sont arrêtés à Berlin. Il y avait bien assez à digérer en Europe de l’Est pour une Armée Rouge épuisée. Mais les Américains n’ont même pas essayé de faire la course à la capitale allemande. (Si les Nazis avaient été rationnels, ils auraient mis les pouces après la perte de la Ruhr.)</p>
<p>Staline, grand paranoïaque, aurait pu vouloir prévenir une trahison des Anglo-Saxons, et attaquer. Une raison supplémentaire était la bombe atomique dont il connaissait l’existence : il fallait frapper <em>avant</em> qu’elle soit fonctionnelle.</p>
<p>Quelques unités américaines, mêlées à des civils allemands ou autres, se retrouvent donc assiégées à Potsdam, près de Berlin, pendant que le gros des armées alliées recule en bon ordre, posément, jusqu’au Rhin. Dans cette enclave, la romance entre un sergent et une Allemande est le fil rouge du livre.</p>
<p>Aux États-Unis, autre romance entre deux fonctionnaires, un universitaire antithèse d’Indiana Jones, qui va se retrouver vite près des hautes sphères, et une Russe blanche. Le côté fleur bleu est trop vite mené, et le suspens lié au risque d'espionnage vite éventé.</p>
<p>Si les histoires de nombreux autres personnages alimentent l’intrigue, ce sont presque tous des militaires, du simple tankiste ou pilote à Ike ou Staline. Ne sont que très furtivement évoqués le cauchemar vécu par les civils ou le sort des millions de prisonniers et déportés de tous bords, perdus dans une Allemagne encore plus chaotique que celle que nous avons connue, ou encore les interrogations des civils, comme les dilemmes des communistes parmi les Alliés... La mécanique militaire et les scènes de combat semblent cohérentes à mes yeux de béotien nourri à <em>Guerres & Histoire</em>, même si on doit pouvoir pinailler sur tel ou tel détail<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Les discussions entre haut gradés sont un peu trop didactiques, mais il en faut bien. Les Soviétiques sont caricaturaux (il n’y en a pas un pour racheter l’autre, de Staline aux tankistes), même si l’ambiance à cette époque <em>était</em> caricaturale. Les personnages n’ont guère le temps d’évoluer.</p>
<p>Sur un thème pareil (une Guerre Mondiale, plusieurs continents), il aurait fallu de nombreuses autres pages sur la masse de conséquences périphériques que la nouvelle situation entraîne. Notamment : l’armée allemande existait encore en 1945, et la manière dont elle aurait pu jouer un rôle n’est traitée que trop vite, du côté américain. Bref, les Allemands sont sous-utilisés et l’on ne rencontre que les plus « respectables », pas les SS (il auraient pu faire chanter les Alliés, par exemple, avec d’effroyables conséquences). Les Japonais n’ont droit qu’à quelques lignes. Les communistes en France, Angleterre, Italie... et les remous sociaux associés ne sont que trop vite traités (à mon avis, en France, on aurait dérivé vers la guerre civile), mais la logistique américaine en aurait massivement souffert. Les pays périphériques sont oubliés. Quant aux membres du projet Manhattan, quel aurait été l’impact de cette guerre sur leur motivation ? Qu’auraient pensé les espions soviétiques les plus idéalistes ?</p>
<p>On voit venir le dénouement à des kilomètres, tellement évident que Staline a effectivement dû le deviner dans la réalité. Les conséquences (titanesques, qui auraient été très ouvertes) sont trop vite évacuées.</p>
<p>Bref, j’ai eu l’impression de lire une version <em>vintage</em> de <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Temp%C3%AAte_rouge">Red Storm Rising</a></em> de Tom Clancy, qui décrivait une attaque soviétique en 1986, de manière trop militaire aussi, et où tout s’enchaînait de façon <em>trop</em> logique. Les guerres actuelles sont certes aussi implacables que des rouleaux compresseurs, mais elles ne se déroulent jamais comme prévu sur les plans.</p>
<p>Cela dit, c’est une uchronie agréable, bien construite, sans temps mort.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Toutes les critiques en lignes relèvent l’attaque de l’URSS en 1940 et non 1941, une erreur de base. Mais après tout le point de divergence réel aurait pu être antérieur à1945...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/854„Unter Trümmern“ de Jürgen Heimbachurn:md5:4398784936b629e8bc092eadc52694c42019-08-04T19:09:00+02:002023-08-26T18:51:44+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesAllemagneapocalypsechaosmicroéconomiemortSeconde Guerre Mondialeéconomie <p>C'est un <em>krimi</em>, lu en VO, et à ma connaissance non traduit. Non germanophones, passez votre chemin<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EUnter-Tr%C3%BCmmern%E2%80%9C-de-J%C3%BCrgen-Heimbach#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Ou restez, vous ne lirez ceci nulle part ailleurs. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Unter_Trummern-Jurgen_Heimbach.jpg" title="„Unter Trümmern“ de Jürgen Heimbach"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Unter_Trummern-Jurgen_Heimbach.jpg" alt="„Unter Trümmern“ de Jürgen Heimbach" class="media-left" /></a></p>
<p>Les polars se ressemblent souvent, j’en lis peu. L’intérêt de celui-ci : le lieu et l’époque. L’Allemagne était sans doute un des pires endroits en 1946 : ruinée, détruite, occupée, affamée, parcourue de bandes de <em>displaced persons</em>, et sans nouvelles de millions de prisonniers. À Mayence, sous occupation française, les gens meurent littéralement de froid. La viande, l'alcool ou le vrai café sont rarissimes et précieux. Le trafic et les petites combines sont généralisés, question de survie.</p>
<p>Né à Mayence, vétéran de la guerre d’Espagne et de la Résistance (française, oui), le commissaire Koch arrive dans les rangs d’une police saignée par la guerre et la dénazification, et minée par la corruption due à la pénurie généralisée.</p>
<p>Premier cas : un gardien a été tuée par un raid sur un entrepôt. On suspecte un bourgeois local, quasi-chef de bande, au centre de trafics en tout genre, mais intouchable par ses nombreuses relations, y compris chez les officiers français.</p>
<p>Second cas : un jeune homme assassiné, sans doute pour quelque morceaux de viande. Lui aussi trafiquait-il ?</p>
<p>Ce ne seront pas les derniers cadavres. Koch devra faire le lien avec une femme du quartier, sans nouvelle d'un mari prisonnier en Sibérie, dont le fils, amputé, agonise, et pour qui elle trahira toutes les règles. Le point de vue de cette <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Femmes_des_ruines">Trümmerfrau</a></em> alterne tout le livre avec celui de Koch.</p>
<p>Koch devra aussi démêler tout ça avec un adjoint doué mais débutant, un collègue vieux briscard et un voisin alcoolique aux activités louches ; parfois sans voiture, toujours sans le soutien de son chef.</p>
<p>Les relations troubles, les nazis encore présents, les éternels problèmes d'approvisionnement, le pessimisme de ceux qui ne croient pas à une vie meilleure dans le futur s'égrènent tout le livre, parfois contrebalancés par quelques lueurs d'optimisme : un printemps qui arrive ou une université qui rouvre.</p>
<p>Page des romans de l'auteur :
<a href="https://www.juergen-heimbach.de/romane/#cc-m-header-5681548211" hreflang="de">https://www.juergen-heimbach.de/romane/#cc-m-header-5681548211</a> (ô joie, il y a deux suites !)</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EUnter-Tr%C3%BCmmern%E2%80%9C-de-J%C3%BCrgen-Heimbach#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] Et là disparaît 90 % de mon misérable lectorat.</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9EUnter-Tr%C3%BCmmern%E2%80%9C-de-J%C3%BCrgen-Heimbach#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/853« La campagne du Rhin : Les Alliés entrent en Allemagne (janvier-mai 1945) » de Daniel Feldmann & Cédric Masurn:md5:c68ad5398703e89ace8912eae64179472019-02-03T18:50:00+01:002020-02-08T17:50:24+01:00ChristopheHistoireAllemagneAlsaceAmériqueapocalypseautodestructioncataclysmechaoscomplexitédéshumanisationEuropegigantismeguerre saintegéographiegéopolitiquehainehistoireHistoire de FrancehiérarchieimpérialismejusticenationalismeorganisationracléeSeconde Guerre MondialetempsténacitéÉtats-Unis<p>(<em>Encore une chronique de mes lectures, pour changer...</em>)</p>
<p><a href="https://www.economica.fr/livre-la-campagne-du-rhin-janvier-mai-1945-feldmann-daniel-mas-cedric,fr,4,9782717868807.cfm"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.feldmann-mas-campagne-du-rhin_m.jpg" alt="feldmann-mas-campagne-du-rhin.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> Il n’y avait apparemment pas de livre dédié aux opérations des Occidentaux début 1945. Le sujet intéresse moins que le rouleau compresseur russe à l’Est, la prise de Berlin, ou la décision d’Eisenhower de ne <em> pas</em> aller à Berlin. Ce livre, assez austère mais relativement facile à lire pour l’amateur éclairé, comble le vide. La vision est plus celle des états-majors, globale et technicienne, que celle anecdotique du soldat de terrain.</p>
<p>Il s’agira essentiellement ici des armées anglo-américaines, et de la canadienne.</p> <p>Quelques chapitres parle de la petite armée française, pas vraiment en bien. C’est un mélange instable de Français libres, d’unités de l’armée de Vichy de France ou d’Afrique du Nord ayant rejoint les Alliés parfois assez tard, de troupes nord-africaines aguerries, et d’anciens FFI courageux mais sans formation militaire. Le manque de matériel est complet et la dépendance envers les Américains totale. Son chef, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/De Lattre" hreflang="fr">https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_Lattre_de_Tassigny</a> aura besoin d’eux pour réduire la poche de Colmar et ne semble pas vouloir ce qu’il veut en Forêt Noire et à Stuttgart. Leclerc et la 2è DB préféreront être sous les ordres d’un général américain.</p>
<p>Quant aux Russes, ils sont de l’autre côté, rouleau compresseur en train de broyer la Wehrmacht et de conquérir l’Europe de l’Est. Rappelons que pendant que les Occidentaux débarquaient en Normandie, il entamaient la reconquête de la Pologne (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Bagration" hreflang="fr">opération Bagration</a>). Fin 1944, ils ont déjà entamé la conquête de terres allemandes.</p>
<h3>Les généraux</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dwight_D._Eisenhower" hreflang="fr">Eisenhower</a> le diplomate, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Montgomery" hreflang="fr">Montgomery</a> l’égocentrique... : tous sont alors connus, environnés de journalistes, et très conscients à l’époque d’écrire l’Histoire. Les rivalités plus ou moins sportives entre généraux s’ajoutent à la rivalité anglo-américaine : les calculs politiques en vue de l’après-guerre s’additionnent au besoin de gloriole et de prestige. Les auteurs sont assez critiques, et tout le monde au sommet en prend pour son grade.</p>
<p>Les moyens et les choix d’offensive sont en permanence arbitrés entre le front nord (anglo-canadien) et centre et sud (américain), et des unités américaines passent alternativement d’une armée à l’autre selon les besoins. S’ajoute le style : Montgomery aime préparer ses offensives et réclame toujours plus de forces ; les Américains ont plus de moyens, plus de chance aussi dans leurs adversaires (les dernières unités allemandes sont très inégales), et foncent volontiers.</p>
<h3>Situation fin 1944 & plan de bataille</h3>
<p>Fin 1944, après une difficile percée en Normandie, un débarquement en Provence, les armées alliées ont reconquis rapidement presque toute la France et la Belgique. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes" hreflang="fr">bataille des Ardennes</a> en décembre 1944 est la dernière grande offensive de la Wehrmacht à l’Ouest, péniblement repoussée. Si celle-ci n’a ensuite plus les moyens de rééditer une telle opération, cela ne veut pas dire que la suite sera un chemin pavé de rose.</p>
<p>Le front début janvier 1945 suit à peu près les frontières allemandes de 1939. Au nord, les Allemands tiennent encore de gros morceaux des Pays-Bas, dont l’embouchure du Rhin. Au sud, la bataille continue en Alsace : Colmar et Rouffach sont encore occupés, et Wissembourg le redevient (l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a> ramène la Wehrmacht jusque Haguenau).</p>
<p>La supériorité matérielle alliée est totale : chars, canons, avions, hommes, et aussi pétrole, à l’est comme à l’ouest. Dans les airs, la Luftwaffe use ses dernières réserves. La coordination interarmes alliée est rodée.</p>
<p>On a gardé l’image d’une armée alliée aux moyens inépuisables, mais ce moment est une crise. D’abord la logistique est cauchemardesque, mais cela s’arrangera quand le port d’Anvers sera à nouveau opérationnel. L’armée britannique est expérimentée mais l’Angleterre est épuisée et les effectifs manquent, il faut même dissoudre des divisions. Même l’armée américaine a des problèmes de remplacement : les pertes en France ont été plus importantes que prévues, et les troupes disponibles sont déjà toutes en ligne. Mais comme 13 % seulement des 2,7 millions d’hommes sont des troupes offensives, une réorganisation et l’embauche de civils pour certaines tâches permettra de parer au problème.</p>
<p>La météo est exécrable, avec un hiver rigoureux. Les périodes de redoux ne sont pas plus faciles, car la boue gêne les offensives d’ampleur et détruit les routes, parfois étroites. Pendant tout le livre revient le problème de faire passer des divisions entières par des chemins vite embourbés et saturés.</p>
<p>Le chemin pour la conquête de l’Allemagne n’est pas évident : des massifs montagneux comme l’Eifel sont difficiles à conquérir (les Américains s’y useront inutilement) ; des barrages permettent d’inonder des zones entières (autour de la Roer) ; la ligne Siegfried protège bien certains endroits ; la supériorité numérique n’est pas assez écrasante pour une attaque partout à la fois ; enfin les chemins faciles n’offrent pas de possibilité d’exploitation évidente vers des objectifs importants. Les raisons des choix stratégiques sont les parties les plus intéressantes du livre.</p>
<p>Assez vite se dégage l’idée qu’il vaut mieux conquérir toute la rive gauche du Rhin, et y détruire les dernières forces allemandes, avant de tenter de franchir le fleuve. La cible principale sera ensuite la Ruhr, poumon industriel de l’Allemagne.</p>
<p>Les auteurs s’attardent à décrire ce à quoi s’attendent les Allemands. Ils n’ont plus guère de réserves, mais n’abandonnent pas le terrain pour autant. Mais le renseignement est défaillant et la coordination des unités n’est plus ce qu’elle a été. Les ordres débiles d’Hitler de ne jamais reculer, fidèlement retransmis, parfois obéis, et la faible qualité des dernières recrues (trop jeunes, trop vieilles, inaptes...), en plus du manque de matériel et de carburant, obèrent toute initiative stratégique. Si beaucoup de divisions n’existent plus que sur le papier, quelques unités restent solides, le régime nazi tient le pays et punit de mort toute idée de reddition : la débandade générale n’interviendra qu’après le passage du Rhin.</p>
<h3>L’Alsace</h3>
<p>La poche de Colmar et plus globalement l’Alsace n’ont pas une grande importance stratégique, mais elles fixent beaucoup d’unités alliées. Au milieu d’un froid glacial, Français et Américains doivent d’abord repousser une attaque allemande (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a>) qui menace Strasbourg. Eisenhower prévoit même au début de l’abandonner avec tout le Bas-Rhin, à la fureur des Français. Il cède à la pression politique et fournit les troupes. Puis il faut reprendre Rouffach et Colmar, difficilement. L’armée allemande se retire par Brisach en bon ordre. Le front alsacien ne bougera plus avant le printemps.</p>
<h3>La Rhénanie</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public.png" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public_m.png" alt="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " /> </a></p>
<p>C’est le 8 février, par Nimègue et l’extrême nord, qui a l’avantage d’être plat et dépourvu de cours d’eau, que démarre l’invasion de la Rhénanie par les Anglo-Canadiens (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Veritable" hreflang="fr">opération Veritable</a>). Malgré une longue préparation, ils tombent sur des troupes allemandes de qualité et bien commandées, et l’avancée est très difficile.</p>
<p>Les Américains entrent un peu plus tard en lice au sud, depuis l’extrême sud de la Hollande. Ils auront auparavant eu du mal à sécuriser les barrages de la Roer, et seront ralentis par les inondations provoquées par les Allemands. La suite sera pour eux plus facile que pour les Anglais, et un rouleau compresseur impeccablement huilé se déploie sans anicroche jusqu’au Rhin et Düsseldorf.</p>
<p>Ces opérations détruisent en un mois les dernières capacités allemandes à l’ouest. Ce sont des unités très diminuées qui retraitent derrière le Rhin.</p>
<p>Les auteurs étudient la décision de ne pas profiter du succès pour franchir le Rhin tout de suite : sécuriser la tête de pont et mener l’exploitation aurait nécessité trop de troupes, sans compter la difficulté de batailles dans la zone urbaine de la Ruhr.</p>
<h3>Remagen</h3>
<p>Début mars, Patton profite de l’effondrement allemand pour sortir enfin du massif de l’Eifel, encore un peu plus au sud (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Lumberjack" hreflang="fr">opération Lumberjack</a>), et border le Rhin jusqu’à la Moselle, Bonn et Coblence. La progression est si facile et rapide qu’un pont, par chance et incompétence allemande, tombe aux mains des Américains à Remagen. Ce n’est pas le meilleur endroit pour créer une tête de pont, mais Eisenhower donne l’autorisation de consolider la tête de pont. Le point de franchissement du Rhin n’a donc pas été planifié, les Alliés s’attendaient à ce que tous les ponts aient été détruits !</p>
<p>Les Allemands ont beau faire, ils ne repoussent pas la tête de pont américaine. L’impact n’est pas tant stratégique que psychologique : la Wehrmacht ne peut même plus espérer souffler un temps derrière le Rhin.</p>
<h3>Sarre & Palatinat</h3>
<p>Les Allemands sont encore au sud de la Rhénanie, à la frontière française, car évacuer ce saillant impliquerait de perdre le charbon de la Sarre. Les armées de Patton et Patch s’enfoncent facilement au nord de la Lorraine et du Bas-Rhin, si vite qu’elles se croisent involontairement (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Undertone" hreflang="fr">opération Undertone</a>).</p>
<h3>Le franchissement du Rhin</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Crossing_of_the_Rhine.jpg" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Crossing_of_the_Rhine_m.jpg" alt="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" /></a></p>
<p>La suite est une longue agonie pour les Allemands. La logistique de l’opération britannique au-dessus du Rhin, nommée <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Travers%C3%A9e_du_Rhin" hreflang="fr">Plunder</a>, avec divisions aéroportées, est massive, même surdimensionnée. Les auteurs expliquent que les Anglo-Américains n’ont jamais eu de progression aisée, que Montgomery veut tirer la couverture médiatique à lui, et effacer son premier échec sur le Rhin à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Market_Garden#Arnhem_2" hreflang="fr">Arnhem</a> en 1944.</p>
<p>En face, la plaine est défavorable à la défense. Si les effectifs allemands font encore illusion, il n’y a plus guère d’officiers expérimentés ni d’armes ni de munitions. Les Anglais doivent combattre mais leur organisation est impeccable et leur progression est rapide.</p>
<p>Les Américains de leur côté ne prennent aucun repos et, en plus de Remagen, franchissent le Rhin plus au sud également, et eux sans préparation, par un « coup de main » ! Patton veut là avoir un prétexte pour éviter de prêter des divisions à l’opération de Montgomery, et faire pièce au succès de ce dernier ; mais il a aussi raison de vouloir profiter d’une défense devenue presque inexistante. Mais par endroit les Allemands s’accrochent encore et les envahisseurs doivent être prudents.</p>
<p>Au final, la Ruhr finit encerclée par les deux armées le 3 avril. Le Reich n’a plus d’industrie.</p>
<h3>Après la Ruhr</h3>
<p>Les Alliés n’ont jamais cherché à battre les Soviétiques dans la course à Berlin. Pourtant, la Ruhr prise, c’était le dernier objectif possible, politique cette fois. Cette décision, prise très tardivement par Eisenhower, a fait couler beaucoup d’encre. Un éventuel « réduit alpin » (condamné d’avance, mais avec les nazis on ne sait jamais) n’aurait pas mobilisé beaucoup de troupes. Les coûts et l’impact sur l’après-guerre étaient des décisions politiques, pas militaires.</p>
<p>Après bien des explications vient la théorie des auteurs : Eisenhower a décidé pour une fois d’affirmer son autorité, a favorisé l’armée de son ami et compatriote Bradley, et ne voulait pas que Montgomery entre à Berlin (les troupes britanniques étaient les mieux placées pour cela). Roosevelt mourant, c’est une période de flottement, et Churchill ne peut changer faire changer d’avis Marshall, seul supérieur d’Eisenhower.</p>
<p>Les Anglo-Canadiens se sont donc contentés de foncer sur la Baltique pour barrer l’accès au Danemark aux Soviétiques. Les Américains ont poussé jusqu’à Leipzig. Au passage ils découvrent les camps de concentration, ce qui ôtera ensuite à certains leurs scrupules à bombarder des villes (Erfurt).</p>
<p>La résistance allemande subsiste ponctuellement, désorganisée, mais l’organisation étatique nazie ne s’effondre jamais. Il faudra attendre la mort d’Hitler pour que Dönitz signe la capitulation. Les détails précis de l’agonie de l’Allemagne ne sont pas le sujet ici -- là-dessus j’avais déjà chroniqué l’excellent <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw">The End</a></em> de Kershaw.</p>
<h3>Conclusion</h3>
<p>Dans cette histoire m’ont frappé les dissensions entre généraux des trois nationalités, leurs mesquineries dignes de cours d’école. Celles-ci n’ont cependant pas eu d’effet sur les opérations. Bref, les Allemands n’avaient aucune chance contre le rouleau compresseur anglo-américain, très bien huilé techniquement, que la logistique n’a plus bridé en 1945.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-campagne-du-Rhin-Les-Alli%C3%A9s-entrent-en-Allemagne#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/852« Ravage » de Barjavelurn:md5:145f601f59d23413fcf25318a57c57a52017-01-22T22:19:00+01:002017-03-04T22:00:32+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationanalogieapocalypseauto-organisationautodestructioncataclysmecatastrophechaoscivilisationcouragedéshumanisationexaptationlivres luslyrismenaturenostalgieperspectivepessimismesciencescience-fictionSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeutopieécologieénergieévolution <p>Dans la SF française, qui ne s’appelait pas encore comme cela en 1942, c’est un classique et la première œuvre d’un de nos plus grands auteurs. Mais noyés dans les odeurs de cendres surnagent quelques relents un peu nauséabonds. C’est une des difficultés des anciens livres : discerner ce qui vient de l’air de son temps, ce qui est deuxième degré, et ce qui est vrai choix de l’auteur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Barjavel_Ravage.jpg" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Barjavel_Ravage_m.jpg" alt="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin" /></a> Dans le Paris de 2052, tel qu’imaginé juste avant-guerre, l’électricité disparaît inexplicablement. Pendant que la civilisation s’écroule puis que le monde flambe, le jeune François sauve sa jeune, innocente, belle et naïve Blanche, puis monte une expédition pour rejoindre la région rurale isolée où ils ont grandi.</p>
<p>Comme dans toute anticipation dont la date est dépassée ou proche, certaines pages font sourire. La nourriture ne provient que de la synthèse chimique, personne ne sait plus à quoi ressemble un poulet, mais les ouvriers meurent toujours à 50 ans à cause de la dureté de l’usine. Le « plastec » omniprésent n’est pas si loin de la réalité actuelle, et les trains à haute vitesse sillonnent l’Eurasie, mais les avions ne semblent pas voler plus loin qu’en 1939. Le téléphone est en 3D mais il faut toujours se déplacer dans la pièce où il sonne. Les mœurs nous sembleront surannées : Blanche suit une école pour futures « mères d’élite » et elle obéit sans mot dire à son homme. Il est facile de se moquer après coup, je pense que mes éventuelles prédictions pour 2117 feraient rire mes descendants (voire moi-même ?).</p>
<p>La partie la plus intéressante reste la description de la société qui s’effondre, du chaos et des méthodes de survie. On a sans doute fait mieux dans le domaine depuis 1942, mais le passage des individus policés aux bandes barbares reste convaincant : un sage a bien dit que la différence entre la civilisation et la barbarie n’était que de quelques repas, et je le crois volontiers.</p>
<p>Par certains côtés <em>Ravage</em> m’a rappelé <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Malevil">Malevil</a></em> de Robert Merle : destruction totale, barbarie des survivants, héros reconstituant une bande.</p>
<p>Tout cela a d’ailleurs un avant-goût assez inquiétant : combien de temps durerait notre civilisation si l’électricité, pour une raison ou une autre, disparaissait pour longtemps à une échelle continentale ? Sommes-nous certains d’être à l’abri du danger ? Saurions-nous rester assez disciplinés et éviter le chaos ? Barjavel a peut-être été inspiré en partie par l’Exode, tout proche.</p>
<p>Le personnage de François fait froid dans le dos par son adaptation froide à la barbarie de la situation. C’est l’« homme providentiel » par excellence, le guide-né sans lequel les autres ne sont que moutons stupides, et contesté par personne. C’est par lui que l’on retrouve peut-être le pétainisme à la mode en 1942. Barjavel a certes travaillé pour Denoël qui était collaborationniste et publié chez lui, mais il y travaillait avant guerre ; et si <em>Ravage</em> cadrait dans la philosophie de Vichy, le reste de l’œuvre de Barjavel n’a rien à voir. On peut ne voir dans <em>Ravage</em> que méfiance envers un progrès incontrôlé et regret de la France rurale, comme encore parfois aujourd’hui ; ce qui ne veut pas dire que l’on souhaite la destruction de la société moderne. Doit-on voir dans le chapitre final une apologie du bonheur par l’obscurantisme, ou un avertissement ? C’est sur cette grosse ambiguïté que se finit le livre. Même si le futur de cette société, entrevu dans le <em>Voyageur imprudent</em> paru peu après, ne fait pas rêver.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Ravage-de-Barjavel#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/836« La Forteresse perdue » (de Nathalie Henneberg)urn:md5:4af00f3d6615e89c031f7fac516482422016-09-17T12:00:00+02:002019-02-02T11:26:45+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationapocalypseconquête de l’inutileconquête spatialecoup basdommageextraterrestresgaspillageguerrelivres luslyrismemémoireperspectiveprise de têtepsychologiescience-fictionSeconde Guerre Mondialespace operasurréalismeunivers <p>Ma période <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Nathalie-Henneberg">Nathalie Henneberg</a> n’est pas terminée, il me reste quelques livres issus des étagères remplies par mon père dans les années soixante.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/N_Henneberg_La_forteresse_perdue.jpg" title="La forteresse perdue, Nathalie Henneberg, Le Rayon fantastique, 1962"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.N_Henneberg_La_forteresse_perdue_s.jpg" alt="La forteresse perdue, Nathalie Henneberg, Le Rayon fantastique, 1962" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="La forteresse perdue, Nathalie Henneberg, Le Rayon fantastique, 1962" /></a>La Terre de 2300, en pleines convulsions, envoie sa Légion Spatiale de « volontaires pour mourir ». Un navire échoue sur une planète maudite et stérile où de sombres forces maléfiques immatérielles manipule la faune et la population locales, pousse des humains à la trahison, pour se saisir de ces astronautes perdus — avec la Terre en ligne de mire.</p>
<p><em>La Forteresse perdue</em> ne restera pas pour moi son meilleur ouvrage. Trop de thèmes déjà lus dans la <em>Rosée du soleil</em> ou le <em>Mur de la lumière</em> reviennent. Le couple des Amants-Parfaits-qui-se-sont-toujours-connus perturbé par un génie-tourmenté-presque tout-puissant, évidemment amoureux de la belle-pas-indifférente-car-ils-se-sont-connus-dans-un-autre-temps-mais-qui-le-repousse a déjà été utilisé dans le <em>Mur de la lumière</em>. La force occulte et la trahison dudit savant annoncent le prince Valeran de la <em>Plaie</em>. Autre rengaine : les mutants, positifs ou négatifs, qui modifient l’univers autour d’eux sans le vouloir ni même le savoir. Au moins n’a-t-on pas cette fois de mère folle prête à vendre sa fille, l’héroïne est orpheline.</p>
<p>Le style d’Henneberg reste matière de goût, un rien confus et flamboyant, instable mélange de lyrisme slave et de rationalité française. Et on ne goûte pas forcément l’utilisation systématique de ces personnages-archétypes.</p>
<p>Un intérêt quand même : le parallèle avec la vie de l’autrice et certains faits oubliés de l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale. Impossible de ne pas retrouver Nathalie Henneberg et son mari, sous-officier de la Légion Étrangère d’origine allemande, basé en Syrie avant-guerre, dans le couple d’Alix & Arnold de Held (<em>Held</em> = héros en allemand). Les résurgences entre époques abondent chez Nathalie Henneberg.</p>
<p>Le couple était également aux premières loges pendant la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Campagne_de_Syrie_(1941)">campagne de Syrie de juin 1941</a>, quand Britanniques et Français libres envahirent le territoire tenu par Vichy pour couper les voies de communication de l’Axe : des Français, dont des légionnaires, étaient dans les deux camps, et il y eut des morts. Dans quels camps de 1941 se transposent les légionnaires et les androïdes du livre ? La transposition est vaine mais la Légion de 2300 se bat inutilement pour l’honneur plus que pour d’autre cause, comme celle de 1941 par bien des côtés.</p>
<p>Bref, la <em>Forteresse perdue</em> est un ouvrage peut-être un peu superflu pour qui n’est pas un inconditionnel d’Henneberg, mais il m’a donné envie de lire les autres autour de cette histoire syrienne vécue réellement de près (notamment <em><a href="http://sombres-rets.fr/hecate-nathalie-henneberg" hreflang="fr" title="Hécate, éditions Sombres Rets">Hécate</a></em>).</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-forteresse-perdue-de-Nathalie-Henneberg#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/828« Guerres & Histoire » n° 32 d’août 2016 : Verdun, un borgne chez les aveuglesurn:md5:7865ce2d76b0cdcaa45092967553e9722016-09-11T16:13:00+02:002020-02-08T18:05:06+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsebon senscatastrophecommunismeesclavageEuropeguerreGuerre FroidehainehistoireHistoire de Franceimpérialismeincohérencelégendes urbainesparadoxeperspectivePremière Guerre MondialepsychologieracléeSeconde Guerre MondialetotalitarismeuchronieÉtats-Unis<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerresEtHistoire_32.jpg" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) "> <img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerresEtHistoire_32_s.jpg" alt="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " /> </a> Petit résumé rapide de ce dont je veux me rappeler du dernier <em>G&H</em>, à part la partie sur l’armée d’Alexandre reportée au prochain billet.</p> <h3>Verdun</h3>
<p>Le plus grand massacre de la Première Guerre Mondiale était stratégiquement dénué de sens !</p>
<p>Pour <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_von_Falkenhayn">Falkenhayn</a>, l’organisateur allemand, le but n’était pas simplement de « saigner à blanc l’armée française » (le degré zéro de la stratégie). Le général sait que malgré de gros succès défensifs, l’Allemagne ne tiendra pas face à la multiplication des fronts (Italie, Balkans, Arabie...) et au blocus naval. Faute de volonté du politique de négocier la paix, Falkenhayn vise à <strong>séparer ses ennemis</strong> et croit s’attaquer au plus faible : la France (« meilleure épée » de l’Angleterre et, croit-on, épuisée).</p>
<p>Verdun (la ville du Traité) est un <strong>objectif limité mais symbolique</strong>. À cause du terrain, les contre-offensives seraient si coûteuses que la France finirait par accepter une paix séparée. L’armée russe recevrait alors tout le poids de l’armée du Reich, et l’Angleterre finirait seule.</p>
<p>Est-ce la faute à Falkenhayn, ce plan n’a pas été appliqué à la lettre par les généraux : l’attaque limitée mais puissante a été étendue dans le but de prendre Verdun, en espérant plus. Les troupes allemandes se sont donc beaucoup plus exposées au feu ennemi alors que le but n'était que d’attirer les Français et les pilonner, au moindre coût. <strong>Le but tactique (Verdun) a remplacé le but stratégique (user les Français)</strong>. (<em>Oublier la stratégie au bénéfice des victoires tactiques, il semblerait que ce soit une constante allemande pendant les deux Guerres Mondiales...</em>)</p>
<p>Ces damnés Français tiennent, grâce à la rotation des effectifs, et l’armée allemande s’épuise elle aussi, sans résultat probant. Falkenhayn est écarté par Hindenburg et Ludendorff qui vont établir une quasi-dictature sur le Reich. Ils suivent la même philosophie (une grande victoire tactique suffira, comme aux siècles précédents), sans plus de succès puisqu’ils ne sauront pas exploiter les avancées de 1918.</p>
<p>Ironiquement les Français tombent dans le même travers (Chemin des Dames). Ils gagnent quand même (arrivée des troupes américaines, matériel supérieur, succès dans les fronts arabes ou balkaniques, épuisement des puissances centrales...). Mais pour Benoist Bihan, ils prolongent l’erreur en 1940 : croyant là encore à une guerre d’usure, la France s’enferme derrière la ligne Maginot et laisse à Hitler le temps de manger les petites puissances et l’initiative.</p>
<h3>Moshe Dayan au Vietnam</h3>
<p>Le général israélien <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Moshe_Dayan">Moshe Dayan</a>, un peu désœuvré en 1966, a joué quelques semaines au reporter, et écrit une série d’articles sur les opérations américaines au Vietnam. Il a les coudées franches et est impressionné par l’hallucinante débauche de moyens, mais beaucoup moins par la stratégie. <strong>La machine américaine ne semble pas savoir où elle va, dans quel but, à part vouloir impressionner le monde entier</strong>.</p>
<p>Le peu que les Américains font pour gagner les cœurs des habitants est totalement insuffisant. Les soldats vont chercher dans la jungle un ennemi très mobile et insaisissable. Le renseignement, essentiellement technique, ne peut localiser précisément le Viet-Công, qui frappe toujours juste à côté, ou juste après : les Américains « utilisent des marteaux-pilons pour forer des trous dans le vide ». « <strong>Les Américains gagnent tout — sauf la guerre</strong>. »</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Les <strong>équipages des bombardiers américains</strong> ont encaissé le pire taux de pertes de toutes les troupes alliées. 1943 fut la pire année, faute d’escortes. Avec l’expérience, les équipages avaient de plus en plus de chances de revenir vivants.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’interview du mois est celle de <strong>Yon Deguen</strong>, un de ces miraculés de la Seconde Guerre Mondiale : Juif soviétique ukrainien, il s’engage dès l’attaque allemande de 1941, à 16 ans. Dans l’ambiance chaotique de ces premiers mois, il se retrouve très vite commandant de section car il sait lire les cartes ! (<em>les armées russe puis soviétique ont toujours eu un énorme problème d’encadrement</em>). Il se retrouve à franchir le Dniepr à la nage bien que blessé ! Baladé dans diverses unités, il survit aussi bien aux combats qu’au NKVD qui fusille pour un oui ou pour un non. Sur la manière dont l’URSS à tenu : « Nous avons inondé les Allemands avec nos cadavres. »</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>reportage photo sur la guerre de Corée</strong> (1951), où la machine de guerre américaine s’est grippée dans les collines et face aux vagues chinoises, est quelque part surréaliste : pas de combat, et elles rappellent la Seconde Guerre Mondiale (mais en couleur) et le Vietnam (sans la jungle ni les hélicos).</li>
</ul>
<h3>Réponses du journal à des questions de lecteurs</h3>
<ul>
<li><strong>La traite des Noirs a-t-elle facilité le colonialisme européen</strong> ? Selon G&H, c’est probable : 40 millions de personnes enlevées par les divers esclavagistes africains, arabes, européens représentaient une ponction notable, mais pas le seul facteur (l’Asie aussi a été colonisée malgré une population supérieure).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Si l’Italie avait respecté ses engagements en 1914</strong> et combattu aux côtés de l’Allemagne et de l‘Autriche, cela n’aurait sans doute pas changé grand-chose : la France était protégée par des Alpes infranchissables, un blocus naval allié aurait mené à une rapide paralysie, et au final le pays aurait été une charge pour l'Allemagne.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le terme « <strong>génocide vendéen</strong> » est abusif : malgré d’innombrables massacres typiques d’une guerre civile, et que l’on retrouve dans d'autres guerres antérieures, il n’y avait pas de plan d’extermination.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-32-ao%C3%BBt-2016#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/829« Frontières d’acier — Histoire de la fortification permanente en Lorraine et en Alsace 1871-1945 » de Michaël Séramoururn:md5:8cb2d8cdff4423a66516e76daccabb332015-10-04T22:07:00+02:002018-08-22T15:14:21+02:00ChristopheHistoireAllemagneAlsacebombe atomiquecatastrophechâteauxcomplexitécoup bascouragedommagedéshumanisationgigantismeGuerre FroidehainehistoireHistoire de FrancelibertéLibérationlivres luslégendes urbainesmortmèmemémoireparadoxeperfectionnismePremière Guerre MondialeracléerecyclageréseauSeconde Guerre Mondialesécuritétempstourismetravail <p>Je ne pensais pas un jour acheter un livre de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_%28militaire%29">poliorcétique</a>, mais je résiste parfois difficilement aux impulsions chez mon <a href="http://www.illauxtresors.com/">libraire favori</a>.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Frontieres_d_acier.jpg" title="Frontieres_d_acier.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Frontieres_d_acier_s.jpg" alt="Frontieres_d_acier.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>Le sujet est simple et compliqué à la fois : les fortifications à la frontière franco-allemandes de 1870 jusqu’à après la Seconde Guerre Mondiale. La ligne Maginot vient à l’esprit, mais aussi les forts de Verdun ou en face ceux de Metz... construits alors qu’elle était allemande. Certaines installations ont donc servi deux camps : les Allemands se sont aussi cassé les dents sur certaines parties de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_Maginot">ligne Maginot</a> en juin 1940, qu’ils ont utilisée pour ralentir notablement les Américains à l’automne 1944 !</p>
<p>Les premiers chapitres traitent de l’évolution de ces forts. Les villes fortifiées à la Vauban étant dépassées, les fortifications éclatées assez éloignées des centres urbains deviennent à la mode, comme autour de Metz ou tout autour de Strasbourg. En France, cet ensemble est désigné sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_S%C3%A9r%C3%A9_de_Rivi%C3%A8res">Séré de Rivières</a>. L’artillerie progressant à pas de géants après 1870 et la Première Guerre Mondiale, l’obsolescence est rapide : si les premiers ensembles ont de beaux frontons en pierre, par la suite les forts s’éloignent, se couvrent de béton, les communications s’enterrent, les tourelles se fondent dans le paysage, se terrent derrière de profondes meurtrières, voire s’éclipsent :
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg" title="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.320px-Fort-15-28-19_s.jpg" alt="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg">Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson sur Wikipédia Commons</a>
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif" title="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Manoeuvre_tourelle_s.jpg" alt="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif">Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons</a></p>
<p>Les désastres du début de la Première Guerre Mondiale semblent montrer l’inutilité de ces fortifications. L’auteur s’insurge : les Allemands sont passés par la Belgique justement à cause des forts entre Verdun et Belfort, et Verdun notamment a fixé de gros effectifs allemands pendant la bataille de la Marne. Le haut commandement français dégarnit pourtant ces bastions « inutiles » en hommes et en canons dont le manque se fait cruellement sentir ailleurs... ce qui facilite l’offensive allemande de 1916 sur Verdun. Les fortifications tiennent pourtant durablement quand elles sont bien équipées, et le coût pour l’assaillant en obus est délirant par rapport aux pertes (humaines) infligées au défenseur. La guerre de mouvements reprend en 1918, mais les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Forts_de_Metz">forts allemands de Metz</a> n’ont guère l’occasion de montrer leur efficacité avant l’armistice.</p>
<p>La France de l’entre-deux guerres, démographiquement exsangue, voit dans la ligne Maginot une protection efficace. Plus encore que pour les fortifications de 1914, tout est enterré ; les forts sont reliés par des tunnels et se soutiennent entre eux. Cette ligne, surtout, rompt avec le principe des grandes places, et court sur tout la frontière... sauf devant la Belgique <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. La France vise le long terme : abritée derrière la ligne, il faut continuer le réarmement et laisser agir le blocus envers l’Allemagne, et n’attaquer que plus tard. Les généraux allemands aussi s’attendent à une guerre longue : le <em>blitzkrieg</em>, « <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-Histoire-sp%C3%A9cial-d-avril-2010-France-1940-autopsie-d-une-d%C3%A9faite">acte de désespoir du niveau opérationnel pour sortir d’une situation désespérée au niveau stratégique</a> », fruit du bluff de l’audace de bons généraux, monté en épingle par la propagande, se casse les dents sur la ligne Maginot quand la Wehrmacht l’attaque de front. Globalement, les forts ont tenu malgré un déluge de feu — certains sacrifiés pour préserver le symbole d’un mur infranchissable alors que les Allemands l’avaient déjà contourné. À l’armistice, trahison : les équipages invaincus partent en captivité, exigence allemande contre la menace d’occuper Lyon.</p>
<p>Là encore, la ligne Maginot a rempli sa mission, puisque l’agresseur a dû la contourner — conformément aux plans français. Au sud, la partie alpine de la ligne (non traitée ici) a bloqué toute progression italienne.</p>
<p>Quand Patton arrive sur la Moselle en 1944, il n’imagine pas que les fortifications de Metz (certains morceaux datent d’avant 1870 !) et d’autres parties de la ligne Maginot tenues par les Allemands vont lui poser un gros problème. Il faut plusieurs semaines, de nombreux morts et le recul du front en d’autres endroits <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Metz">pour que Metz tombe</a>. Pendant ce temps, la Wehrmacht se replie en bon ordre. Là encore, les fortifications jouent leur rôle.</p>
<p>L’armée française conserve ce qui reste de ligne Maginot encore quelques années après la Seconde Guerre Mondiale, jusqu’à ce que la bombe atomique la rende inutile. Puis s’ensuit le démantèlement d’une grande partie des installations (vente aux enchères, ensevelissement, retour à la nature des abords...). Aujourd’hui, grâce aux associations locales, de bonnes parties peuvent encore se visiter. On en croise encore bien des fragments dans la campagne alsacienne quand on sait où chercher, et j’ai bien l’intention de visiter assez vite la <a href="http://www.fort-mutzig.eu/pages/_menu/menu_f.html">forteresse allemande de Mutzig</a>, celle de Metz, ou le <a href="http://www.lignemaginot.com/ligne/schoen.htm">fort de Schoenenbourg</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Les Belges ayant déclaré leur neutralité en 1936, un peu tard pour prolonger la ligne.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/797« Guerres & Histoire » n°20 d’août 2014 : qui a eu la peau de la Wehrmacht ? et le C-130 Herculesurn:md5:597db747fca5971493946d301b7d598f2014-09-03T22:55:00+02:002014-09-08T21:23:29+02:00ChristopheHistoireAllemagneautodestructioncatastrophecommunismeEmpire soviétiqueEuropeguerrehistoireLibérationlogistiquenationalismeorganisationRussieSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unisévolution <p>« Alliés ou Armée rouge : qui eu la peau de la Wehrmacht ? » : voilà un titre bien vendeur, comme si la défaite du Reich n’était dû qu’à l’un ou l’autre (et sans qu’aient pesé les combats en Italie ou dans les airs au-dessus de l’Allemagne). Le texte est plus sérieux (et ne répond pas à la question d’ailleurs). Un autre article s’étend sur l’increvable avion de transport (et plus) C-130 Hercules.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_20.jpg" title="GuerreEtHistoire_20.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerreEtHistoire_20_m.jpg" alt="GuerreEtHistoire_20.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<h3>Overlord et Bagration : la tenaille</h3>
<p>La France a été libérée par les Anglo-Saxons à la suite du Débarquement de Normandie, et des combats se sont déroulés chez nous, il est donc normal que nous nous souvenions mieux de ces événements que de « Bagration », offensive soviétique lancée à peu près au même moment. La synchronisation des deux attaques date de la conférence de Téhéran de 1943, moment où Churchill doit abandonner sa stratégie « périphérique » (Italie, Balkans...) face aux Américains qui veulent foncer sur la Ruhr.</p>
<p>Le résumé d’Overlord n’apprend rien de neuf, et résume que la préparation de cette opération effroyablement complexe a été exemplaire, y compris les volets sur l’intoxication de l'ennemi (Fortitude...), et l’exécution en général saine.</p>
<p>À l’est, Staline et <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">Joukov</a> veulent profiter à fond de l’effet Overlord, et montent une opération bien plus ambitieuse que les précédentes. Ou plus exactement, suivant l’art soviétique de la guerre, une cascade d’opérations, de la Finlande à la Roumanie. Bagration, sur l’axe central en Biélorussie, n’est que la plus notable. Staline veut récupérer le maximum de territoires : sa paranoïa lui fait craindre un renversement d’alliances, notamment si Hitler est renversé. Le but ultime (atteint) est le passage de la Vistule, avec la moitié ouest de la Pologne et l’Allemagne en perspective.</p>
<p>Bagration et consorts alternent les attaques sur différents fronts, attirant les blindés allemands là pour attaquer ailleurs. Les Soviétiques, saignés pendant la guerre, compensent des effectifs plus réduits par une expérience croissante et surtout une écrasante supériorité en matériel (en partie américain). Les Allemands doivent lancer leurs réserves en France et ne peuvent résister.</p>
<p>L’effondrement du groupe d’armées Centre (Biélorussie) signe la pire catastrophe de l’histoire de la Wehrmacht, marquée par des paniques rarement vues jusque là. Hitler, fidèle à lui-même, retarde au maximum des retraites qui auraient permis de raccourcir le front. Le rouleau compresseur est lancé, il progresse sur des centaines de kilomètres, dépasse les frontières soviétiques de 1941, entre dans les Balkans, pour ne s’arrêter qu’à Varsovie. Les Allemands perdent un million d’hommes à l’est entre juin et fin août 1944. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walter_Model">Model</a>, brillant tacticien envoyé par Hitler de la Biélorussie à la Normandie, ne peut que limiter les dégâts, mais porte des coups rudes aux unités trop avancées (Arnhem, Varsovie...).</p>
<p>Les Alliés exploitent à fond leurs deux percées : à la fin de l’été 1944, Hitler a perdu la France, la Belgique, la moitié de la Pologne et de la Grèce, quasiment tous les États baltes ; la Finlande, la Roumanie et la Bulgarie ont changé de camp ; les Soviétiques sont même entrés en Prusse orientale.</p>
<p>Mais après soixante-dix jours, quasiment simultanément en septembre 1944, Russes et Américains arrivent au bout de leur logistique après avoir libéré des pays aux ports et réseaux routiers et ferroviaires ruinés, et vont donner aux Allemands le temps de se ressaisir pour leurs dernières offensives.</p>
<p>Un article termine sur le complot du 20 juillet contre Hitler : son échec, au moment où la situation militaire est catastrophique sur deux fronts, soude le pays autour du Führer, renforce la répression, et élimine la résistance. La peur de la défaite, des Russes, d’une révolution communiste permettent au nazisme de tenir l’Allemagne plus que jamais. La seule issue est l’anéantissement.</p>
<p>Au passage, je signale <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/2014/07/jean-lopez-operation-bagration-la.html">cette page</a> sur le livre <em>Bagration</em> de Jean Lopez (auteur principal des articles résumés ici, et directeur de <em>Guerre & Histoire</em>), où <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/p/lauteur-du-blog-stephane-mantoux.html">Stéphane Mantoux</a> trouve de nombreux trous dans la bibliographie et fait de nombreuses remarques sur tel ou tels point. Manifestement il y a un contentieux entre lui et Jean Lopez, je ne peux juger, je note que le livre est au moins une bonne compilation, et lisible, des recherches issues d’autres langues.</p>
<h3>C-130</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/.RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek_m.jpg" alt="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons - https://commons.wikimedia.org/wiki/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg#mediaviewer/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg" /></a></p>
<p>C’est un nom mille fois entendu ou lu : le C-130 Hercules est la bête de somme multifonction de nombre d'armées. L’<a href="http://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-pnote-754-4">ouranocratie</a> américaine repose au moins autant sur cet avion de transport pas très <em>sexy</em> que sur les avions de chasse.</p>
<p>Soixante ans après sa conception, on le produit encore, évidemment remis au goût du jour et décliné en d’innombrables versions. Les avions conçu pendant la guerre avaient montré leurs limite pendant le pont aérien sur Berlin notamment, et l’Air Force avait commandé un avion conçu d’emblée comme militaire (et non une déclinaison militaire d’un avion civil), capable de remplir de nombreuses missions différentes.</p>
<p>Lockheed créa alors un avion « bien conçu, mais pas révolutionnaire ». Bref, une merveille d’ingénierie bien pensée. Par exemple, la fameuse rampe arrière permet de débarquer du matériel (parfois sans atterrir !) ou de larguer des parachutistes. Les ailes sont hautes et les trains d’atterrissage rangés dans des nacelles pour dégager la cabine. Il se contente de peu pour décoller et atterrir : c'est le plus gros appareil à avoir apponté et redécollé d’un porte-avion ! Et l’autonomie est respectable.</p>
<p>Transport de troupes, de matériel, parachutages, ravitaillement en vol, bombardier d’eau civil, lance-drone, batterie d’artillerie volante... : il fait tout. Et partout : c’est un énorme succès commercial (y compris en Iran, en Inde ou en France, qui l’utilise pour l’intervention au Mali).</p>
<p>Bref, un coucou qui volera encore un siècle après sa conception !</p>
<h3>Divers</h3>
<p>Sinon dans ce numéro :</p>
<ul>
<li>Un ancien pilote vietnamien raconte comment il a descendu un Phantom américain en 1972... et comment il a retrouvé l’un des pilotes et est devenu son ami. Quelque part, c’est totalement surréaliste.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pendant l’évolution de l'espèce humaine, la face se serait aplatie pour mieux encaisser les coups de poings, au moment où la main devenait un poing bien percutant. Le mythe du bon sauvage en prend encore un coup. Nous descendons donc de ceux qui encaissaient — et donnaient — le mieux les coups. (<strong>Mise à jour</strong> : <a href="http://www.dinosauria.org/blog/2014/06/26/le-cassage-de-gueule-est-il-aux-origines-de-lhumanite/">une grosse objectction ici</a>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Des photos des guerres balkaniques en 1912-1913 : un avant-goût de la Grande Guerre, y compris tranchées sur front bloqué, mitrailleuses et artillerie, qui aurait dû mettre la puce à l’oreille des grandes puissances sur ce qui les attendait.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les généraux sudistes n’étaient pas forcément meilleurs que ceux du Nord. Cependant, la culture aristocratique au Sud favorisait le métier des armes, et une bonne partie des officiers était donc sudiste, du moins au début.</li>
</ul>
<ul>
<li>La plupart des Français évacués à Dunkerque en 1940 étaient revenus en France avant même l’armistice : ils n’étaient donc pas « disponibles » pour de Gaulle.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-n-20-la-peau-de-la-Wehrmacht-C130-Hercules#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/776“Fatherland” de Robert Harrisurn:md5:643491779b1953c361e2a96b4c5c016b2014-05-05T22:34:00+02:002016-06-06T19:34:55+02:00ChristopheHistoireSeconde Guerre Mondialeuchronie <p>Cette uchronie date de 1992, donc du début de la mode sur le thème. C’est une des plus connues, et un coup de maître pour Robert Harris, dont c’est à la fois le premier roman et la première uchronie (et d’ailleurs la dernière).</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Fatherland_Robert_Harris.jpg" alt="Fatherland_Robert_Harris.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Le monde n’est pas original, c’est celui où Hitler a gagné la Seconde Guerre Mondiale, rayé les États slaves de la carte, et lancé la colonisation germanique jusqu’à l’Oural. <a href="http://alternatehistory.net/discussion/showthread.php?t=84633" hreflang="en">Le point de divergence n’est pas très clair</a>, il se pourrait qu’<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/05/423-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-5">Heydrich</a> ait survécu à l’attentat de 1942, et influé dans le « bon » sens.</p>
<p>Ce n’est pas le plus important car le cadre est le Grand Berlin (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Gro%C3%9Fe_Halle" hreflang="de">très grand Berlin</a>) de 1964, capitale d’un continent, juste avant l’anniversaire du Führer, toujours actif, et après l’amorce d’une <em>détente</em> avec l’ennemi de la Guerre Froide, les États-Unis de Joseph Kennedy (non, pas John, mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Patrick_Kennedy">son père</a>, nettement plus à droite).</p>
<p>March, détective doué de la Criminelle, ancien combattant tourmenté et dont la vie privée confine au désastre, hérite du cas d’un noyé anonyme. Il s’agit évidemment d’une personnalité du Parti nazi, au passif chargé. Évidemment, March remontera à une machination impliquant Heydrich (on ne ressuscite pas un Grand Méchant de ce calibre sans l’utiliser), beaucoup plus subtile dans son but que les complots habituels de domination mondiale. Vu l’envergure et la mentalité des personnages impliqués, ça va vite sentir le roussi pour le matricule de March. On est bien dans un polar, et les personnages habituels sont au rendez-vous : le tueur sadique (un SS, forcément), la belle journaliste, le traître...</p>
<p>L’uchronie ne se limite pas aux figures imposées comme les allusions au point de divergence, aux changements dans la cartographie de l’Europe et de Berlin, ou au jeu des citations déformées ou des personnages historiques à reconnaître au détour d’une page. Les meilleures uchronies montrent le changement sur les hommes, et il ressort bien la mentalité de cette race de prétendus surhommes au sein d’un régime totalitaire toujours soumis au « terrorisme » des partisans slaves : les femmes dans un rôle de mères poules, la bureaucratie omniprésente, les regards prudents systématiques autour de soi à cause d’une Gestapo omniprésente, la crainte de se voir reprocher quoi que ce soit <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fatherland-de-Robert-Harris#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>...</p>
<p>J’aurais une réserve sur la mentalité du héros, pas rebelle mais assez insoumis pour que le lecteur ne se dise pas « mon Dieu, je sympathise avec un Oberstumführer ! ». D’accord, le héros d’un polar classique est volontiers <em>borderline</em>, et, évidemment, un flic bêtement obéissant n’aurait pas donné lieu à une intrigue. J’avais chroniqué il y a sept ans (déjà !) l’excellent <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/01/20/304-in-the-presence-of-mine-enemies-de-harry-turtledove">In the Presence of Mine Enemies</a></em> de Harry Turtledove, et là aussi le héros n’était pas un nazi mais un Juif planqué et intégré dans un Reich vacillant. J’attends l’uchronie dont le héros serait un vrai produit du Reich, nazi bien obéissant, mais forcément haineux mais bien endoctriné après deux générations passées à la moulinette des Jeunesses hitlériennes.</p>
<p>Bref : chaudement conseillé, et pas que pour les amateurs de Seconde Guerre Mondiale.</p>
<p>PS : Merci à Pedro, mon <a href="https://fr-fr.facebook.com/pages/Librairie-Ill-Aux-Tresors/152442178123725">libraire favori</a> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fatherland-de-Robert-Harris#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, pour m’avoir rappelé l’existence de ce livre.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fatherland-de-Robert-Harris#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Une scène où March bluffe auprès d’un sous-fifre en lui faisant craindre de se voir mis en cause auprès d’autorités supérieures avait un parallèle saisissant avec une histoire de mon ancien coiffeur, qui avait tenu tête à des policiers dans l’Allemagne de l’Est communiste : s’ils lui confisquaient son appareil photo destiné à ramener des photos aux camarades de Strasbourg, ils auraient des nouvelles du Parti. Un État de droit non corrompu, policier ou pas, est celui où un fonctionnaire ne craint pas qu’on lui reproche de faire son boulot, même face à des gens avec des relations.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fatherland-de-Robert-Harris#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>À ma grande horreur, je ne trouve sur la toile que la page Facebook qui ait du contenu sur la librairie.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fatherland-de-Robert-Harris#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/770« Tambov » (livre collectif) : les Malgré-nous alsaciens & mosellans prisonniers des Russesurn:md5:51f62e95a930a56a31069825f917239c2013-11-02T11:52:00+01:002016-07-08T11:47:59+02:00ChristopheHistoireAlsacecatastrophechaoscommunismecynismedommagedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnageguerrehistoireHistoire de FranceLibérationlivres lusmémoireparanoïaracléeRussieRésistanceSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Tambov.jpg" alt="Tambov.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" />
Tambov ne dira rien à la plupart des Français, mais il réveillera quelques souvenirs de famille douloureux à nombre d’Alsaciens et Mosellans (voire Luxembourgeois). C’était pourtant « simplement » un camp de prisonniers au milieu de la Russie d’Europe, où, à partir de 1942, les Soviétiques ont regroupé les prisonniers « allemands » originaires de l’Alsace et de la Moselle annexées par le Reich, et incorporés de force dans la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. De ce camp, certains sont repartis dans des unités françaises, mais la plupart sont restés jusqu’à la fin de la guerre, ou y périrent.</p>
<p>Tambov n’était pas un camp de concentration, encore moins d’extermination comme en existait dans le camp d’en face : pourtant nombre de prisonniers y moururent ou survécurent dans des conditions misérables. Encore ces derniers figurent-ils parmi les plus chanceux : des 120 ou 130 000 Malgré-nous, incorporés de force dans la Wehrmacht, un tiers n’est pas revenu du front. Sur le front, les déserteurs risquaient l’exécution sommaire aussi bien par leurs camarades allemands que par des Soviétiques rarement au courant de leur situation, ou peu enclins à faire des prisonniers. Ils leur fallait aussi survivre au transfert vers le camp, dépouillés de tout ce qu’ils avaient pu posséder, et sans guère de possibilité de communiquer avec leur famille.</p>
<p>Le camp lui-même était au-delà de l’insalubre : baraques semi-enterrées sans chauffage, mal aérées, où l’on pataugeait parfois dans l’eau. 15 500 Français seraient passés à Tambov, et on ne saura jamais combien y sont morts, sans doute entre 3000 et 5000. Certains anciens accusent le système soviétique ; d’autres excusent les Russes, eux-mêmes réduits à la disette. Le <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/coulage">coulage</a> au fil des intermédiaires explique sans doute beaucoup de choses, ainsi que l’impossibilité de l’administration à remonter des mauvaises nouvelles dans le cadre du système stalinien <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>. Pour couronner le tout, comme il n’y avait pas d’officiers parmi les Alsaciens (les nazis se méfiaient !), il se mit en place dans le camp une hiérarchie bancale. Des décennies après, les conséquences tragiques de certains copinages ne sont pas pardonnées.</p>
<p>La libération des prisonniers a été instrumentalisée par les Soviétiques. Un premier groupe (les « Quinze Cents ») quitta la Russie par l’Iran dès juillet 1944, et l’URSS communiqua largement là-dessus, mais il ne fut pas suivi immédiatement d’autres. Les premiers libérés, une fois hors de portée du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/NKVD">NKVD</a>, vidèrent parfois leur sac à propos des conditions de détention. Cela ne plut pas au Kremlin. Ajoutons des tractations pour récupérer en échange des Soviétiques passés dans le camp allemand pour diverses raisons, et le fait que les ministres français de l’immédiat après-guerre étaient parfois communistes : si l’essentiel des détenus rentrèrent dès l’automne 1945, le dernier Malgré-nous ne revint à Strasbourg qu’en 1955, après avoir été condamné pour espionnage ! Les Soviétiques avaient aussi tenté de convertir certains prisonniers en agents, apparemment en vain.</p>
<p>Ces libérations au compte-goutte, l’isolement du camp, les lacunes dans les listes soviétiques, les destructions d’archives, le chaos apocalyptique et les pertes énormes de la fin de la guerre en Allemagne... laissèrent un illusoire espoir à beaucoup de familles pendant des années. L’activité fut intense lors du retour des prisonniers pour obtenir des précisions sur le sort de ceux qui n’étaient pas revenus.</p>
<p>Les archives se sont ouvertes massivement dès 1991. Les Soviétiques, en bons bureaucrates, avaient tout gardé, et la chute de l’URSS fut trop brutale pour qu’une destruction méthodique d’archives ait été entreprise par les dirigeants déchus. Le travail de dépouillement, délicat et fastidieux, continue encore de nos jours, alors que les survivants disparaissent.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>En cas de refus ou de fuite, la famille des déserteurs partait en camp de concentration. On devient beaucoup moins rebelle et héroïque dans ces conditions.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>C’est le syndrome « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tout_va_tr%C3%A8s_bien_madame_la_marquise_%28chanson%29">tout va très bien, Madame la Marquise</a> », ou encore « surtout pas de vague », typique de nombre de bureaucraties.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/755« Guerres & Histoire » n°15 d’octobre 2013 : l’assassinat de la Luftwaffe, les châteaux forts japonais, Andrinople, la guerre du Kippoururn:md5:40afaf14fbe55fb16c3b8e60eed27eea2013-10-25T16:56:00+02:002016-07-07T13:24:48+02:00ChristopheHistoireAfriqueAllemagneAntiquitébon senscatastrophechâteauxcoup bascynismedommagedéshumanisationEmpire romainespionnageEuropegigantismeGrandes InvasionsguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationlivres luslogistiquemercenairemobilitéMoyen ÂgeorganisationperspectivePremière Guerre MondialeprovocationpétroleracléesaturationSeconde Guerre MondialespéculationsécuritétotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis <p>Avec « l’assassinat de la Luftwaffe » en gros titre, <em>G&H</em> fait dans le racolage digne de ces revues militaires qui bavent devant le matériel, surtout celui avec croix gammée. Si je ne connaissais pas le sérieux de la revue et son manque d’admiration pour la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, je me serais méfié.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_13.jpg" alt="GuerreEtHistoire_13.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>En fait, point d’hagiographie des ailes allemandes, mais la description de l’opération soigneusement planifiée visant à briser la chasse allemande début 1944, en utilisant les bombardements sur l’Allemagne comme appât, et dans le but de conquérir la maîtrise du ciel avant le Débarquement.</p>
<p>À part ça, excellent numéro, avec les analyses de fond habituelles. Je suis à chaque fois fasciné par les tendances de fond ou les modèles mentaux des différents adversaires qui expliquent bien des événements. Et en même temps, bien d’autres choses ont tenu à si peu...</p>
<p><em>Comme d’habitude, les remarques personnelles sont en italique.</em></p>
<h3>Le prisonnier miraculé</h3>
<p>Le soldat soviétique Sacha Volkov raconte sa terrible odyssée dans l’interview qui ouvre le numéro. Prisonnier à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Koursk">Koursk</a> en 1943, il subit les terribles marches vers les camps de prisonniers, eux-mêmes souvent des mouroirs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, pour finir à Buchenwald. Il a survécu, mais il insiste sur sa chance.</p>
<h3>La guerre des Boers</h3>
<p>Entre 1899 et 1902, les Anglais en ont bavé pour mettre au pas et annexer deux États sud-africains fondés par d’anciens immigrants néerlandais (et français, des huguenots chassés par Louis XIV !). Ces teigneux fermiers, bien équipés en matériel allemand, n’ont été mis au pas que grâce au blocus naval, à la terreur, à la déportation des familles dans des camps de concentration au taux de mortalité effroyable. Un avant-goût des horreurs du XX <sup>è</sup> siècle...</p>
<h3>Opération Pointblank</h3>
<p>En 1943, les Alliés décident de se débarrasser de la Luftwaffe, condition <em>sine qua non</em> pour tenter un débarquement l’année suivante. L’année 1943 montre aussi que les bombardements massifs ne suffiront pas à faire plier le Reich, une illusion longtemps entretenue avant guerre (<em>en 1940, le Blitz avait pourtant montré que bombarder les villes ne cassait pas le moral des agressés, au contraire</em>). Pire, ils ont un coût humain effroyable pour l’attaquant : les forteresses volantes (B 17) ont beau être hérissées de mitrailleuses et voler en formation, mais sans escorte, elles se font souvent hacher menu (parfois plus de 30% de pertes).</p>
<p>La solution : escorter ces bombardiers par une chasse capable de les accompagner jusqu’à Berlin. Étonnamment, ce n’était pas prévu jusqu’ici : les réservoirs d’essence largables, pas si faciles à mettre au point sans altérer les capacités de l’avion, ne seront prêts que fin 1943, et l’avion idéal (P-51 Mustang) en 1944.</p>
<p>Cette escorte ne sert en fait pas à protéger les bombardiers. Début 1944 sa mission devient la destruction de la chasse allemande : les bombardiers ne sont plus qu’un appât. Les missions s’enchaînent, toujours plus massives (culminant en une bataille aérienne entre 2000 appareils le 24 février 1944 !). Les Allemands sont obligés d‘affecter des ressources énormes à la défense aérienne de leurs villes, et en quelques semaines de pilonnage intensif, la chasse allemande est laminée.</p>
<p>Göring n’avait pas prévu ces escortes lointaines et les chasseurs lourds allemands ne sont pas prêts face à la chasse allié. Ils deviennent la cible principale alors qu’eux-mêmes visent d’abord les bombardiers. Puis le cercle infernal s’enchaîne pour la Luftwaffe : pénurie de chasseurs, peu favorisés jusque là par la Luftwaffe au profit des bombardiers ; appareils pas assez vite construits par des usines elles-même cibles majeures, certes pas aussi gravement touchées que le pensent les Alliés, mais dispersées par crainte des bombardements ; pénurie de pilotes, de plus en plus vite et mal formés <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> ; siphonnage de tous les appareils disponibles pour la défense aérienne ; réquisition par la DCA de nombreux gros canons et de précieuses munitions qui manqueront sur le front...</p>
<p>L’opération Pointblank se révèle un succès total : en quelques semaines la Luftwaffe a perdu ses meilleurs pilotes de chasse et des milliers d’appareils, et peine à remplacer les avions quand les usines américaines tournent à plein. Les bombardiers se concentrent alors sur les voies de communications vers la zone du Débarquement, et le pétrole. La chasse allemande, dispersée sur trois fronts, laisse la totale maîtrise du ciel aux Alliés jusqu’à la fin de la guerre, ce qui facilitera grandement leur victoire.</p>
<p>Pointblank ne sera jamais rééditée. L’US Air Force acquiert son indépendance, et se concentre sur le bombardement, notamment atomique, revenant ainsi aux erreurs des débuts de la guerre. Le Vietnam et l’amélioration des défenses sol-air (guerre du Kippour) montrent que la supériorité aérienne n’est jamais un acquis. Surtout, les États-Unis considèrent le ciel comme leur chasse gardée et la base de leur puissance : on peut les considérer comme une <em>ouranocratie</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</p>
<h3>Guerre du Kippour</h3>
<p>Les espions annonçaient une attaque imminente, l’ennemi cachait à peine ses préparatifs, et ils avaient une connexion discrète sur ses communications : pourquoi la guerre du Kippour de 1973 fut-elle une telle surprise pour les Israéliens ? L’article rejette l’essentiel de la faute sur un péché d’orgueil (sous-estimer les Arabes après les victoires précédentes, et considérer que les Égyptiens n’attaqueraient pas tant qu'ils ne disposeraient pas de certains moyens de bombardements), et le refus du chef des renseignements extérieurs de ne pas activer ses « moyens spéciaux » (cette bretelle sur les communications égyptiennes) de peur de les griller. Israël croit à un exercice jusqu’au dernier moment, et passe à deux doigts de la catastrophe.</p>
<p>(<em>Cette peur de trahir ses sources au point qu’on ne les utilise même plus est courante chez tous ceux qui sont sur la défensive et ont peu d’atouts, comme les Anglais avec Enigma pendant la Seconde Guerre Mondiale.</em>)</p>
<h3>Andrinople</h3>
<p>Cette bataille marque peut-être la fin de l’Antiquité : les Goths écrasent l’armée romaine tout prêt de Constantinople. Pourtant les Goths étaient déjà des alliés (fédérés), venaient en réfugiés pacifiques, et on leur avait promis des terres en Thrace. La cupidité d’un gouverneur et l’incompétence de l’administration les poussent à la révolte <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.</p>
<p>Sous-estimation de l’adversaire (en partie déjà formé à la romaine !), incapacité de l’Empire à lever de grandes armées, stratégie inadaptée, indiscipline de troupes, et rôle décisif de la cavalerie lourde goth : c’est un désastre et l’empereur Valens y laisse la vie. Les conséquence directes sont finalement faibles (les Goths n’arrivent pas exploiter leur victoire, et le nouvel empereur d’Orient, Théodose, leur donne ce qui avait été promis au départ), mais symboliquement tout a changé : ni le prestige ni l’armée de Rome ne s’en remettront jamais, les Goths iront finalement piller les Balkans, Rome... et la cavalerie lourde dominera à présent les champs de bataille, comme tout au long du Moyen-Âge.</p>
<h3>Les châteaux forts japonais</h3>
<p>Même cause, mêmes effets : le Japon du XVè siècle se fragmente en seigneuries en guerre permanente, et comme en Europe un demi-millénaire plus tôt apparaissent des châteaux forts, à la fois résidence d’une lignée, centre de pouvoir et point de résistance majeur. Pourtant, le Japon connaît déjà l’artillerie, qui est à l’origine de la disparition des châteaux forts en Europe au même moment !</p>
<p>Le château fort japonais diffère cependant par sa structure. En raison des tremblements de terre, il se rapproche déjà plus de la cité fortifiée aux très épaisses murailles, quasiment des bastions, que des hauts châteaux élancés. L’artillerie ou la sape se révèlent donc beaucoup moins efficace. La conquête de ces châteaux pleins de pièges coûte très cher aux assaillants. (<em>Vauban aurait été ravi.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Le <strong>colonel Brémond</strong> devrait être aussi connu que Lawrence d’Arabie. Il commandait les quelques troupes françaises qui ont rendu de fiers services à la rébellion arabe de 1916. Mais la métropole lui accorda peu de moyens, et son talent littéraire était plus faible. (<em>J’adore les faces cachées des légendes.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Projet Habbakuk</strong> : en 1942, un projet de porte-avion géant insubmersible, à base de glace mélangée à de la pâte à papiers, enthousiasme Lord Mountbatten et Churchill. Le projet capote, à cause des difficultés techniques, et surtout parce qu’en 1943 les Alliés reprennent déjà le contrôle de l’Atlantique. <br />(<em>Encore un de ces projets fous pour les amateurs d’uchronie. D’un autre côté, si certains projets ont échoué, c’est effectivement qu’ils étaient vraiment infaisables ou avec un rapport bénéfice/coût trop faible. Un des avantages des Alliés sur les nazis était de savoir arbitrer en faveur du fiable/pas cher/facile à maintenir face au monstrueux/prestigieux/coûteux.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler</em></strong> : les chroniqueurs m’ont donné l’envie de me ruer sur cette biographie du maréchal soviétique (<strong>2014</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">chroniquée ici</a>) . Il n’avait reçu aucune instruction mais s’est révélé plus doué que les généraux allemands pour la guerre moderne ; il a survécu à toutes les guerres de la Russie et de l’URSS, et même au stalinisme. <br />(<em>Seul bémol : l’auteur comme le rédacteur de la critique font tous les deux partie du comité éditorial de la revue. Même si c’est ouvert, ça fait quand même un peu mauvais mélange des genres.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>J’aime bien la chronique dialoguée de Charles Turquin, à la fin : Waterloo et Bir Hakeim sont des victoires anglaise et française, mais... d’où venaient en fait les troupes ? <br />(<em>Rien de neuf sous le soleil. Aux Champs catalauniques, les Germains étaient majoritaires dans les troupes d’Attila comme dans celles d’Aetius.</em>)</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Un des numéros précédents avait décrit les lacunes fondamentales de l’armée allemande, notamment la recherche systématique des batailles décisives, un concept anachronique au XXè siècle. Les gaffes stratégiques majeures des nazis (guerre sur deux fronts, fascination pour le gros matos invulnérable mais trop coûteux à produire...) n’a été qu’une seconde couche.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Le traitement des prisonniers de guerre soviétiques relevait de l’extermination : 3,3 millions de morts, notamment de faim, et surtout en 1941-42 avant que les nazis se disent qu’il faudrait plutôt les faire travailler.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Pendant ce temps les Américains développent des moyens de formation considérables, retirent leurs pilotes expérimentés du front et les utilisent comme formateurs.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Terme forgé sur le modèle de la thalassocratie athénienne. C’est logique puisque les transports sont forcément aériens à l’échelle d’une superpuissance planétaire. Google ne connaît bizarrement qu’une occurrence du mot — comme quoi il n’indexe pas tout. Et je me demande si un jour il y aura une spatiocratie ou une cosmocratie ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Je sens comme une résonance avec notre époque...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/754« The End » de Ian Kershaw : l’agonie de l’Allemagneurn:md5:8edf1de24e73d2fd8a75ab588386538b2013-07-24T21:59:00+02:002019-02-03T17:39:19+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsecataclysmecatastrophecommunismecoup bascynismedommagedécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegaspillagegigantismeguerrehainehistoireincohérenceLibérationlivres lusmortnationalismeoh le beau cas !panurgismeparadoxepeine de mortpessimismeracismeracléesabotageSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p>Au début j’avais titré « l’agonie du IIIè Reich ». Mais cela aurait été faux : c’est bien l’Allemagne toute entière qui a payé pour quelques mois de résistance inutile et sanglante, au mépris de toute logique militaire.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/the_end_kershaw.jpg" alt="the_end_kershaw.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’autodestruction</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ian_Kershaw">Ian Kershaw</a> s’étonnait qu’il n’y ait pas de livre sur ces derniers mois de la guerre vus du côté allemand ; il l’a donc écrit, et il analyse les raisons de cette incompréhensible obstination allemande à laisser anéantir son pays par le double rouleau compresseur allié — pour <em>rien</em>.</p>
<p>Pourtant, dès l’été 1944, en tout cas au plus tard début janvier 1945 (après l’échec allemand dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes">les Ardennes</a> et alors que les Soviétiques dévastent la Prusse Orientale) il aurait dû être clair que tout était perdu et qu’il valait mieux négocier une reddition. La stratégie de la lutte « fanatique » pied à pied ne pouvait mener à rien. La population était à bout de souffle, les réserves en hommes raclées jusqu’à l’absurde, l’économie étouffée (malgré les talents d’organisateurs de Speer), la Luftwaffe anéantie, les voies de communications en ruine, les villes rasées.</p>
<p>Les chiffres donnent le vertige : sur 18,2 millions de soldats allemands mobilisés en 1939-45, 5,3 millions sont morts, dont 2,6 millions après juillet 1944 — autant en dix mois que dans les quatre premières années de la guerre. Et parmi eux 1,5 million sur le front est : ils ne se sont donc pas défendu que contre les « bolcheviques ».</p>
<h3>Mécanisme pour un suicide collectif</h3>
<p>Dans les dernières semaines, 10 000 soldats tombaient chaque jour. Seuls les plus fanatiques croyaient encore aux « armes miracles » promises par Hitler, ou à l’éclatement de la coalition alliée. Alors pourquoi lutter ?</p>
<p>La réponse est complexe. Les dirigeants nazis étaient parfaitement au courant que les Alliés ne leur feraient aucun cadeau. Pour Hitler, les Allemands s’étaient montré faibles, ils devaient disparaître avec lui. Il est allé au bout de sa démentielle logique suicidaire, mais il a
bien été le seul avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Goebbels">Goebbels</a>. Mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Himmler">Himmler</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bormann">Bormann</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%B6ring">Göring</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Speer_%28p%C3%A8re%29">Speer</a>, les généraux, l’essentiel des <em>Gauleiters</em> (chefs de partis régionaux)... avaient bien l’intention de sauver leur peau, et ceux qui se sont plus tard suicidés allaient être fait prisonniers. Certains se voyaient un rôle dans l’Allemagne d’après-guerre (Speer), voire tentèrent très timidement de négocier dans le dos d’Hitler. La population, qui avait soutenu le nazisme durant une douzaine d’années, ne faisait plus confiance ni au Parti ni au Führer. Pourtant, pour bien moins, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_allemande_de_1918-1919">elle s’était soulevée en 1918</a>, et cela valait aussi pour les soldats.</p>
<p>Pourtant, il a fallu attendre encore une semaine après la mort d’Hitler pour que son successeur l’amiral <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_D%C3%B6nitz">Dönitz</a> jette l’éponge et signe la reddition sans condition face à toutes les armées alliées.</p>
<p>Dönitz, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guderian">Guderian</a>... : nombreux de généraux se peignirent dans leurs mémoires comme de simples exécutants apolitiques. Il est vrai qu’Hitler n’écoutait pas leurs conseils et refusait le moindre repli. Beaucoup rêvaient de sauver les meubles par une paix séparée avec les Occidentaux, mais ils exécutèrent ces ordres absurdes et menèrent le combat de leur mieux, sur les deux fronts et jusqu’à la fin. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Claus_von_Stauffenberg">Von Stauffenberg</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/[Dönitz">Rommel</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow">von Tresckow</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ludwig_Beck">Beck</a> avaient pourtant montré que des officiers, eux-mêmes très nationalistes, étaient capables d’agir — hélas ils étaient l’exception.</p>
<p>L’attentat raté de juillet 1944 est une des clés. D’abord il a remonté la cote d’Hitler auprès des Allemands, vacillante depuis l’enlisement en Russie, bien que le Führer soit resté plus populaire que le Parti nazi. Puis il a conforté le dictateur dans son idée que la Wehrmacht était remplie de traîtres, responsables de tous les échecs. Ensuite, il entraîne la mise en place d’un régime de terreur, réprimant toute déviance, tout défaitisme, toute méfiance envers le Führer, tout doute envers la victoire future.</p>
<p>Le souvenir de l’insurrection de 1918 hantait Hitler. Il avait décidé qu’il n’y aurait pas de réédition de ce « coup de poignard dans le dos ». Ce régime de terreur ira donc <em>crescendo</em>, s’accentuant avec chaque revers : peine de mort pour les déserteurs, les couards, les défaitistes, pour tous ceux osant évoquer une possible négociation avec au moins les puissances occidentales, ou tentant d’éviter d’inutiles combats dans leur ville ; cours martiales volantes exécutant elles-mêmes les condamnations ; massacres de civils affichant des drapeaux blancs... Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Werwolf_%28Freisch%C3%A4rlerbewegung%29" hreflang="de">Werwolf</a> devait mener une guérilla dans les zones occupées, et punir les « collabos » (au final sans grand succès, mais il y eut tout de même quelques milliers de morts selon Kershaw).</p>
<p>Parallèlement la pression sur la population s’accentua : Goebbels parvint à dégager des centaines de milliers d’hommes à envoyer au front <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, quitte à désorganiser l’économie et les productions d’armement, au grand dam de Speer. Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Volkssturm" hreflang="de">Volkssturm</a> enrôla des millions de vieux ou très jeunes Allemands dans une armée hétéroclite, mal habillée, très mal armée, sans efficacité militaire et au taux de perte terrible. Dans les zones proches du front, vieux, jeunes et femmes furent contraints de creuser des fossés qui n’ont pas stoppé l’Armée Rouge plus de quelques heures.</p>
<p>La bureaucratie civile laissa place à celle du Parti, omniprésente, sur fond d’affrontement larvé entre Speer et Goebbels, entre ceux qui pensaient à l’avenir et les partisans de la terre brûlée. Le Parti et les SS se mirent à dominer aussi sur le plan militaire (on confia une armée à Himmler, avec des résultats désastreux). On exigeait un sacrifice aveugle des soldats. Il y eut même des kamikazes nazis.</p>
<p>Ainsi la population se retrouva en tenaille entre un Parti punissant cruellement toute déviance ; des conditions de vie de plus en plus difficiles ; des exigences de service militaire ou paramilitaire démentielles ; la menace des bombardements alliés réduisant méthodiquement les villes en miettes ; à l’est la menace des Soviétiques. Les Allemands avaient perdu toute confiance en Hitler mais, épuisés, terrorisés, ils devinrent au mieux attentistes et fatalistes, priant pour que la fin arrive vite (<em>Besser ein Ende mit Schrecken als ein Schrecken ohne Ende</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>) et les plus chanceux dans les zones préservées ne portent pas grande aide aux réfugiés de l’est.</p>
<p>Les soldats ne valaient souvent pas mieux. Également épuisés, tiraillés entre le danger des combats, la perspective des camps en Sibérie ou la liquidation pour couardise, inquiets pour leurs familles dans les villes bombardées ou les zones envahies par l’URSS, ils continuaient le combat — sans illusion pour la majorité. Sur le front de l’est, la conscience de défendre concrètement leur pays et leur famille d’un envahisseur barbare maintenait plus la combativité qu’à l’ouest. La terreur nazie, la menace sur les familles (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sippenhaft">Sippenhaft</a></em>) mais aussi la cohésion avec les camarades limitaient les désertions, pourtant de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de l’avancée alliée.</p>
<p>Les comportements varièrent suivant les fronts. À l’ouest, on craignait les bombardements anglo-américains sur les villes, mais les troupes d’occupation, relativement disciplinées, n’inspiraient pas la peur. Nombre de villes voulurent se rendre pour éviter la destruction : leur sort se joua dans le rapport de force entre notables voulant épargner vies et biens, et nazis jusqu’au-boutistes prêts à sacrifier une bourgade pour stopper les Américains une heure. (Au passage, une pique sur le comportement des Français : leurs troupes n’ont pas été exemplaires et ont commis leur lot de pillages et viols. Kershaw note qu’il y a une amplification possible du phénomène dans la mémoire et les sources : les soldats étaient souvent issus des colonies.)</p>
<p>C’était bien pire à l’est. Les soldats mesuraient parfaitement la barbarie du comportement allemand en Europe de l’Est, et se doutaient, puis surent, que les Russes allaient leur faire payer. La propagande soviétique attisait la haine. Les soldats allemands prisonniers savaient que, même avec de la chance, ils passeraient des années en Sibérie (et une bonne partie n’est pas revenue). Quant aux civils, ils fuyaient en masse pour éviter viols (généralisés), pillage, voire destruction de villes entières. La peur des « Asiatiques », amplifiée par la propagande de Goebbels, mena à des scènes de suicides collectifs dignes des Japonais à Okinawa. Pour les habitants de Prusse ou de Poméranie le salut n’existait que dans la fuite, au milieu d’un hiver terrible — les plus fragiles mourront souvent. <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Les chefs du Parti donnèrent cependant rarement l’exemple du sacrifice qu’ils prônaient. Les premiers à punir toute reculade, ils étaient aussi les premiers à fuir dès que possible, sans oublier leurs biens. À côté de Göring et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hans_Frank">Hans Franck</a>, la palme revient peut-être à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Koch">Erich Koch</a>, à la tête la Prusse Orientale assiégée par les Russes : il refusa la moindre évacuation de civils, mais prit au tout dernier moment la fuite en bateau, en n’oubliant pas sa Mercedes.</p>
<p>Kershaw conclut que l’effarante résistance allemande tenait aussi bien à la structure du pouvoir nazi et à la terreur qu’aux rigidités de la mentalité des soldats allemands, sinon de tout l’appareil institutionnel. Si population et soldats étaient terrorisés et préoccupés par leur survie immédiate, les généraux risquaient bien moins (surtout d’être démis <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>). Si on peut comprendre que les circonstances ou le chaos rendaient un coup d’état impossible, pourquoi n’ont-ils pas au moins « levé le pied » ? Si les Russes et le communisme semblaient un danger tellement effroyable, pourquoi ne pas avoir ouvert le front à l’ouest pour sauver les meubles ? Le serment de fidélité au Führer, l’honneur militaire, toute une tradition militariste allemande d’ordre et d’obéissance inconditionnelle, leur interdisait de tenter quoi que ce soit contre la hiérarchie en place. Après tout, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6">même Canaris avait renoncé à s’attaquer à Hitler</a>. Ce n’est qu’à la mort d’Hitler que Dönitz (paradoxalement choisi par Hitler pour sa fidélité au national-socialisme) s’est senti autorisé à tenter une négociation puis à signer.</p>
<p>Pendant ce temps, l’administration continuait tant bien que mal de fonctionner, elle ne s’effondra pas brutalement. Les fonctionnaires considéraient que cela était leur « devoir », même dans des conditions difficiles, prolongeant ainsi la guerre et les destructions de plusieurs semaines.</p>
<h3>Et si...</h3>
<p>À la lumière de ce mécanisme Kershaw spécule : si Hitler était mort en juillet 1944, les conjurés auraient-ils pu réellement prendre le pouvoir ? Et s’ils avaient accepté la reddition sans condition, les SS auraient-ils suivi, dès 1944, surtout à l’est ? Une nouvelle légende du « coup de poignard dans le dos » serait née.</p>
<p>Pour Kershaw, l’exigence alliée d’une reddition sans condition n’a pas joué fondamentalement dans la prolongation de la guerre. Elle a souvent été présentée comme contre-productive car ne laissant aucune alternative aux Allemands que la lutte jusqu’au bout. Elle n’a cependant pas empêché la tentative de putsch de juillet 1944. C’est Hitler, relayé par son Parti, qui bloquait toute tentative de reddition, pas les généraux, même si ceux-ci obéissaient. En Italie, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Kesselring">Kesselring</a> n’a accepté la reddition de ses troupes qu’<em>après</em> le suicide du Führer. Et si la perspective de livrer des millions de soldats à l’Armée Rouge effrayait tout le monde, même Dönitz s’y est résolu quand Eisenhower a clairement dit qu’il n’y aurait pas d’alternative.</p>
<h3>Les victimes et les lâches</h3>
<p>Ian Kershaw parle aussi de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Dresde">Dresde</a>, qui se croyait protégée par sa valeur architecturale, mais était aussi une cible car nœud de communications et centre industriel. Il y eut pourtant pire, en nombre de victimes (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Operation_Gomorrha" hreflang="de">Hambourg</a>) ou en proportion (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Pforzheim#1918_bis_1945" hreflang="de">Pforzheim</a>).</p>
<p>En parallèle, Kershaw rapporte aussi le calvaire des prisonniers des camps de concentration, décimés dans des marches forcées en plein hiver, où beaucoup, sinon la plupart, trouvèrent la mort, et cela sans plus guère la moindre justification rationnelle pendant les derniers mois (ni otages ni force de travail). Apparemment ils n’obtinrent pas d’aide de la population, toujours abrutie de propagande.</p>
<h3>Après la guerre</h3>
<p>L’ampleur des pertes humaines et des destructions, le calvaire des réfugiés de l’est et la haine du Parti dans les derniers mois poussèrent plus tard les Allemands à se voir aussi comme des victimes du nazisme. Ce n’est pas complètement faux, pourtant ils l’avaient soutenu pendant des années malgré tous ses crimes. Certes une manière de se dédouaner lors de la dénazification, mais une réaction normale : le traumatisme a éclipsé dans l’inconscient tout ce qui l’a précédé. Le travail de mémoire a pris des années.</p>
<h3>Remarques personnelles</h3>
<p>On peut écrire des uchronies sur une fin de guerre différente. L’Allemagne actuelle est née de ce traumatisme : serait-elle devenue si démocratique et pacifique sans le cataclysme de 1945 ?</p>
<p>À la lecture des ordres hallucinants de cruauté et de mépris pour la population ou les soldats, on enrage que certains grands chefs s’en soient tirés : si Keitel a été pendu <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>, bien des généraux qui ont suivi Hitler jusqu’au bout n’ont même pas été condamné à perpétuité par la suite : Dönitz, <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Ferdinand_Sch%C3%B6rner" hreflang="de">Schörner</a>, Kesselring... alors qu’ils ont jusqu’au bout fait appliquer les ordres délirants et surtout la politique de terreur.</p>
<p>Quant à la forme du livre : rien à redire sur le texte, il est clair. La division en chapitre est chronologique, mais chacun traite successivement tous les thèmes. La masse de références à des travaux précédents est impressionnante. Hélas les notes sont en renvoi en fin de livre, et non en bas de page, ce qui est pénible. Or certaines sont très intéressantes et valent d’être lues.</p>
<p>Les termes sont tous traduits, il n’y a quasiment aucun texte en allemand, dommage pour les germanistes qui auraient préféré la version originale des citations.</p>
<p>La version française s’appelle logiquement <em>La Fin</em>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>J’ai connu un Allemand, lycéen à l’époque, qui a eu le choix entre s’engager volontairement dans la Wehrmacht, ou finir d’office dans les Waffen SS.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Plutôt une fin dans l’horreur qu’une horreur sans fin.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que le quart est du Reich devint polonais par la volonté de Staline : la frontière entre Germains et Slaves est donc revenue à la même position qu’en l’An Mil !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Pourtant Kershaw donne lui-même l’exemple d’un général dont la famille fut emprisonnée car il avait reculé sans autorisation. Et la famille de von Stauffenberg a fini en camp de concentration. Les étoiles ne protégeaient donc pas du pire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Pas fusillé comme tout militaire, mais bien </em>pendu<em>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/747« 1941-1942 : Et si la France avait continué la guerre… »urn:md5:6044450b72d481d1becc7d092454558a2013-05-18T00:00:00+02:002016-07-05T12:35:57+02:00ChristopheTemps et transformationsAllemagneAmériqueapocalypsechaoscommunismecomplexitéconquête de l’inutilecouragedéterminismeEmpire soviétiqueEuropegéopolitiquehistoireHistoire de Franceimpérialismelivres lusmémoirenationalismeperspectiveracismeracléeRussieSeconde Guerre MondialesimulationspéculationtempstotalitarismeténacitéuchronieémerveillementÉtats-Unis <p>Ceci est la suite d'une uchronie que j'avais pas mal appréciée, <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre">la France continue la Guerre</a></em>, issue d'une <a href="http://www.1940lafrancecontinue.org/forum/">réflexion collective</a>.</p>
<p>Le point de divergence avec notre histoire portait sur le refus d'un armistice en juin 1940. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continué-la-guerre">Dans le premier tome était conté comment le Grand Déménagement emmène gouvernement et armée en Afrique du Nord</a>. La France entière est envahie, et la Royale et l'aviation continuent le combat vaille que vaille aux côtés des Britanniques. Ceux-ci connaissent une bataille d'Angleterre moins violente, et la Lybie italienne puis la Sardaigne tombent tout de suite aux mains des Alliés. Le théâtre des opérations se centre autour de la Méditerranée bien plus que dans la trame historique réelle. Le premier tome finissait fin 1940.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lafrancecontinue-2.jpg" alt="lafrancecontinue-2.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /><em>1941-1942</em> prend la suite immédiate, pendant presque un an et demi. Presque jour par jour s'écoulent les opérations en Sardaigne, Corse puis Grèce (similaires mais différentes de ce qui s'est réellement passé en 1941) ou dans l'Empire italien ; en Asie et à Pearl Harbor ; et enfin en Russie. Les grosses différences concernent l'Indochine (menacée par les Japonais, alors que Vichy avait coopéré avec eux) et Barbarossa.</p>
<p>Ce livre se lit avec Wikipédia à côté pour goûter toute les différences entre la trame réelle et celle-ci fantasmée, bien similaire mais souvent subtilement différente. Accessoirement on apprendra des choses (qui se souvient qu'en 1941 nous avons mené une guerre contre la Thaïlande, ou que les Britanniques ont envahi l’Irak et l’Iran par précaution ?). Petites friandises : les allusions à des personnages dont le destin a basculé ou des films qui se seront inspiré des événements (que devient <em>Un taxi pour Tobrouk</em> dans un monde où Rommel sévit dans une Grèce enneigée ?).</p>
<p>C'est dans la postface que réside l'intérêt majeur. Jacques Sapir et ses confrères décrivent les choix qu'ils ont fait, leurs réflexions, leurs simulations. Tout en reconnaissant une part d'arbitraire, et que la probabilité de tomber juste se réduit au fur et à mesure que s'éloigne le point de divergence avec le réel, ils défendent les positions adoptées.</p>
<p>Économiquement tout d’abord : la France, forte de ses réserves d’or, pouvait se réarmer auprès du gigantesque « arsenal des démocraties » américain. Peinant encore à sortir de la crise de 1929, celui-ci ne demandait que cela, et l'argent et les ingénieurs français auraient stimulé la montée en puissance des États-Unis encore plus que dans la réalité : les nombreuses commandes de 1939 ou 1940 auraient été poursuivies, les Britanniques, soulagés d’une partie de l’effort, auraient pu rétrocéder des avions, et d'autres notables investissements auraient pu être faits pour les Français.</p>
<p>Les points de discussion principaux portent évidemment sur l'attaque japonaise généralisée de décembre 1941 sur les possessions occidentales (et accessoirement Pearl Harbor). Il n’y a pas de raison que les relations entre Japon et États-Unis, exécrables à cause des exactions en Chine, soient meilleures. Quel que soit le prétexte (ici l’intimidation des Japonais envers une France qui n’abandonne pas l’Indochine), étaient inéluctable l’embargo américain, puis l’affrontement armé : attaque des possessions occidentales en Asie, et raid sur Pearl Harbor. La Guerre du Pacifique commence de manière similaire, mais on nous promet une fin bien différente.</p>
<p>En Europe, la stratégie des Alliés est contrainte : ils sont forcés de contre-attaquer, et ne peuvent le faire qu’en Méditerranée, qui devient le champ de bataille principal, et en espérant détacher l’Italie de l’Axe. Même s’ils n’ont pas les moyens de leur ambition, cela ne fait pas l’affaire d’Hitler qui, lui, ne pense qu’à l’attaque de l’URSS.</p>
<p>C’est dans le premier tome que Sapir & compagnie avaient justifié le maintien de Barbarossa : la psychologie d’Hitler doit rester la même. La conquête du <em>Lebensraum</em> aux dépens de ces sous-hommes de Slaves <em>est</em> le but fondamental de sa guerre. Les Anglais et Français laisseraient tomber quand il aurait à sa disposition toutes les ressources de l’URSS, et ce n’était pas ces Américains enjuivés et négrifiés qui allaient changer grand-chose...</p>
<p>Toujours est-il que même le Führer doit se rendre à l’évidence : les combats en Méditerranée mobilisent trop de moyens et l’attaque doit être reportée d’un an <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Une année qui, la postface le décrit fort bien, a réellement manqué justement à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">Joukov</a> pour réorganiser l’Armée Rouge et la préparer au combat. Une Allemagne plus fatiguée attaquant une URSS bien mieux préparée : on nous promet des conséquences « cataclysmiques » pour le Reich.</p>
<p>Pour la forme, on retrouvera les mêmes défauts que pour le premier tome : une action trop détaillée quant aux opérations militaires et aux événements politiques au jour le jour, qui ne laisse pas assez de place pour les réflexions de fond, la vie des civils, les évolutions technologiques, l’impact du maintien des Français sur les opérations. Il est vrai que le pavé est déjà assez lourd... Les cartes manquent, et celles présentes renseignent peu. On aimerait plus de moyens de détecter les variations avec la réalité que la lecture parallèle de livres ou de Wikipédia.</p>
<p>Les premières salves de Barbarossa démarrent dans les dernières pages, et j’attends le tome 3. Par rapport à la réalité, comment les lignes de front finales se positionneront-elles ? Les Russes à Strasbourg, et les Japonais soumis <em>avant</em> de recevoir des bombes atomiques sur la tête ? Comme les habitants de ce monde fantasmé, il faudra patienter encore quelques temps...</p>
<p>PS : Voir aussi la <a href="http://alias.codiferes.net/wordpress/index.php/et-si-la-france-avait-continue-la-guerre-tome-2-1941-1942/">critique d’Alias</a>, fan du projet.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Rappelons que cela n’est qu’une extension de la trame historique : les Italiens ont réellement attaqué la Grèce fin 1940, et se sont fait raccompagner à la frontière. Ce qui motiva une intervention allemande en 1941, incluant l’invasion de la Yougoslavie. Militairement un succès foudroyant, mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Barbarossa#Plans_.C3.A9labor.C3.A9s_d.C3.A8s_1940">tout cela retarda de quelques semaines l’attaque de l’URSS...</a>, semaines qui manquèrent peut-être pour prendre Moscou, atteint et raté trop tard dans l’hiver. La ténacité grecque a peut-être fait perdre la guerre à l’Allemagne.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/739« Guerre & Histoire » n°10 de décembre 2012 : Guerre de Cent Ans, Crimée, Pologne, Maison Blanche brûléeurn:md5:fae08c2dd2296d59b49fc4da560252912013-02-04T22:13:00+01:002016-03-21T12:59:32+01:00ChristopheHistoireAllemagneAntiquitécatastrophechâteauxEmpire romainGrandes InvasionsguerreGuerre de Cent AnsgéopolitiquehistoireHistoire de FranceMoyen ÂgemythemémoirenationalismeperspectivepolitiquePremière Guerre MondialesaturationSeconde Guerre Mondialeuchronieévolution <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/GuerreEtHistoire_10.jpg" alt="GuerreEtHistoire_10.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerre & Histoire n°10" /></p>
<p>J’aime bien ce magazine : à l’école ou dans les livres, on parle très peu de la science militaire alors que son rôle été capital. De plus, les auteurs ne se limitent pas à admirer les « gros tanks de la Wehrmacht qui auraient gagné la guerre si les Alliés avaient gentiment attendu 10 ans qu’ils les construisent en série », comme d’autres magazines, mais traitent aussi d’économie et de société : un précédent numéro parlait du rôle du pétrole dans la Seconde Guerre Mondiale<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Ici, ce sont les évolutions sociales pendant la Guerre de Cent Ans, avec les conséquences jusqu’à nos jours, qui font la couverture.</p>
<h3>Kippour, Crimée, Pologne, Maison Blanche cramée</h3>
<p>Rapidement, ce dont parle aussi ce numéro :</p>
<ul>
<li><strong>Un ancien jeune tankiste israélien</strong> raconte comment en 1973, surpris dans le Golan par l’attaque syrienne, son petit groupe de 13 chars a tenu tête, sans perte, à 450 tanks syriens, et en a détruit la moitié ! La formation, la motivation, et 6° de différence dans l’orientation du canon vers le bas, peuvent littéralement faire des miracles.</li>
</ul>
<ul>
<li>En France, la <strong>guerre de Crimée</strong> (1853-56) a été zappée de la mémoire collective, oblitérée par la défaite de 1870. Il ne reste que quelques noms de lieux, de stations, à Paris. Et pourtant, ce fut le premier conflit photographié. Les clichés présentés ici semblent surréalistes.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La cavalerie polonaise n’a jamais été assez stupide pour charger les panzers de la Wehrmacht en 1939 !</strong> Elle combattait normalement à pied, les chevaux n’étant que des moyens de transport adaptés à un pays aux mauvaises routes. Quelques rencontres imprévues ont été grossies par la propagande allemande, et le mythe perdure encore de nos jours.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La Guerre de 1812 entre États-Unis et Angleterre</strong> marqua sans doute le premier acte impérialiste américain, et ça a plus mal fini encore qu’en Irak. À cause notamment du blocus napoléonien et des mesures de rétorsion anglaises, et voulant « libérer » le Canada sous-peuplé, des « faucons » poussent le Président Madison à l’attaque au nord. Mais l’armée américaine n’est pas organisée, alors que les Canadiens, bien que majoritairement francophones, restent fidèles à la couronne britannique, ainsi que leurs alliés indiens ; enfin la Royal Navy domine les mers. Humiliation, la Maison Blanche flambe. En 1815, les deux camps signent le match nul, la chute de Napoléon éteignant la cause du conflit (et libérant nombre de ressources anglaises...).</li>
</ul>
<ul>
<li>En 451, la célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_champs_Catalauniques_%28451%29">bataille des Champs Catalauniques</a>, mythique sauvetage par le « dernier des Romains », <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aetius">Aetius</a>, des reste de l’Empire romain face aux hordes hunniques d’Attila, a plutôt ressemblé à une bataille entre d’une part des Germains soumis aux Huns (Ostrogoths surtout, Hérules, Gépides, Francs...) et d’autre part des Germains alliés aux Romains (Wisigoths, Alains, d’autres Francs...), sans beaucoup de légions romaines par contre, mais quelques mercenaires huns avec Aetius. Au final, Aetius laisse filer Attila pour éviter une hégémonie wisigothe en Gaule. Attila ira encore piller l’Italie et Aetius, trop puissant, sera liquidé par l’Empereur en personne.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Angleterre a connu au XVIIè siècle sa période républicaine, d’un puritanisme extrême assez difficile à comprendre de nos jours (est-ce qu’on pourrait rapprocher ce mélange de théocratie et de parlementarisme avec l’Iran d’aujourd’hui ?). Cromwell, homme fort du Parlement, a pu s’imposer et écraser l’armée royale grâce à sa <em>New Model Army</em>. Sans stratégie vraiment originale, elle se fondait d’abord sur le mérite et non le sang bleu, sur une base nationale et non régionale, et enfin une part de fanatisme puritain. Assez pour prendre le pouvoir, pas assez pour consolider un régime pérenne qui ne survivra pas à Cromwell.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong><em>Liberty ships</em></strong> : ces milliers de bateaux de transport identiques construits à la chaîne en quelques dizaines de jours parfois sont l’exemple parfait de la toute-puissance industrielle américaine au service des Alliés.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>Plan Schlieffen de 1914</strong> n'aurait pas été, comme on le pensait, vraiment conçu pour éviter la guerre sur deux fronts, mais était à l’origine le plan allemand contre... l’Angleterre (et non la Russie). Avec dans les deux cas la France comme adversaire secondaire à éliminer rapidement <em>via</em> la Belgique.</li>
</ul>
<h3>La Guerre de Cent Ans</h3>
<p>C’est une période charnière, chaotique, pleine de transformations douloureuses : une époque donc « intéressante » selon les critères de la vieille malédiction chinoise. Toutes les cicatrices ne sont pas refermées d’ailleurs, les vagues d’anglophobie et francophobie persistent encore parfois. (Rappelons qu’<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/03/18/318-les-guerres-oubliees-2">on peut considérer qu’il y a eu trois Guerres de Cent Ans</a>...)</p>
<h4>Chronologie</h4>
<p>Rappelons les grandes lignes de ce long massacre entre 1328 et 1453, en soulignant que les campagnes au Moyen Âge étaient brèves et entrecoupées de nombreuses trèves, d’où la durée.</p>
<ul>
<li><strong>Contexte</strong> : Les Capétiens, plus puissante monarchie d’Europe, devaient fatalement un jour rentrer en conflit ouvert avec les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plantagen%C3%AAt">Plantagenêt</a>, qui en plus de l’Angleterre possèdent de gros morceaux de la France (Normandie et Guyenne surtout). Il y avait déjà eu pas mal d’explications musclées avant que Philippe Auguste ne montre qui était le patron un siècle plus tôt. Finalement, des raisons économiques (Flandres) s’ajoutent, et ce sera une querelle dynastique qui déclenchera les festivités. Pour les détails, se référer à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/2005/11/21/34-les-rois-maudits-contexte-ii">mon billet sur le contexte des Rois maudits</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase I</strong> : Les Anglais ne cherchent qu’accessoirement la conquête, ils sont d’abord là pour piller. À Crécy les archers anglais écrasent l’armée de Philippe III. À Poitiers c’est carrément le fils de ce dernier, Jean II, qui se fait capturer, et comme rançon doit abandonner la moitié de son royaume à l’Anglais (mais il garde son trône). Autre catastrophe, la Peste Noire emporte un tiers de la population.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase II</strong> : Plus fûté que son chevalier de père, Charles V délègue au célèbre Du Guesclin les opérations militaires. Celui-ci préfère guérilla et harcèlement aux grandes chevauchées, et le résultat est là : les Anglais reperdent tout leurs gains. Fin du premier round et trève de quelques décennies.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase III</strong> : Le nouveau roi de France, Charles VI, devient progressivement fou. Les querelles pour sa tutelle mènent à une guerre civile entre ses oncles, cousins, et leurs descendants, divisés entre Armagnacs et Bourguignons. Le nouveau roi anglais Henri V en profite, s’allie aux Bourguignons, et prouve que les nobles français n’ont rien retenu de Crécy en les massacrant à Azincourt. La moitié de la France est occupée, et Henri V se fait reconnaître comme héritier de Charles VI, lequel déclare le Dauphin illégitime. Les deux rois meurent en même temps.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase IV</strong> : Le Dauphin et son « royaume du Bourges » résistent un temps à l’envahisseur, puis arrive le catalyseur : Jeanne d’Arc. Charles VII sacré à Reims, la réconciliations avec les Bourguignons signée, la reconquête commence, pendant que l’Angleterre connaît à son tour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Deux-Roses">guerre civile</a>. Les Anglais ne gardent que Calais. Fin du Moyen Âge.</li>
</ul>
<h4>Évolutions sociétales</h4>
<p>En un siècle, les armées féodales (temporaires, dominées par la chevalerie, peu soudées) sont devenues professionnelles (permanentes), puis modernes (disciplinées, avec beaucoup d’infanterie, de l’artillerie...).</p>
<p>Les Anglais innovent avec leurs fameux archers, issus des rangs des petits propriétaires. Malgré un entraînement étalé sur des années, ils étaient beaucoup moins chers que les lourds chevaliers français, forcément nobles, et beaucoup plus nombreux (l’Angleterre était bien moins peuplée que la France à l’époque).</p>
<p>L’entraînement d’autant d’archers et leur équipement nécessitaient une logistique, une planification, une proto-industrie et une quasi-conscription assez incroyables pour l’époque. Voilà pourquoi il y a tant de gens nommés Archer ou Stringer outre-Manche. Cette <em>gentry</em> a en conséquence gagné en poids fiscal puis politique : sont apparus alors les <em>Commons</em>, à côté des <em>Lords</em>, qui constituent encore aujourd’hui les deux chambres du Parlement britannique.</p>
<p>La France n’a pas compris ni cherché cette évolution. La levée en masse n’a jamais été à l’ordre du jour. La noblesse méprisait et la piétaille et ses ennemis, et était allergique au commandement unique : cela mena à Crécy, Poitiers puis finalement au massacre d’Azincourt.</p>
<p>L’armée permanente avait bien été inventée par Charles V, mais c’est l’élimination physique de nombreux nobles à Azincourt qui permet à Charles VII de moderniser le fonctionnement de l’ost royal, y compris son financement (la taille devient annuelle) et son recrutement (« gens d’arme » rattachés directement au roi, puis « francs archers » recrutés dans la population).</p>
<p>Enfin c’est l’artillerie qui fonde la puissance du roi de France : la noblesse n’a pas les moyens de se l’offrir, et ses châteaux ne résistent pas aux boulets. Bien qu’enrôlé, le peuple n’a toujours rien à dire. La suite, en caricaturant : absolutisme et Révolution violente.</p>
<p>Noter que cette émergence du peuple comme force militaire et politique était déjà ancienne et générale (milices italiennes qui fondent l’indépendance des cités ; communes des Flandres qui flanquent la pile à Philippe le Bel en personne ; cantons suisses...), et se poursuivra encore longtemps. Au passage, cela mènera à des batailles bien plus saignantes : fini l’esprit chevaleresque où on voulait d’abord des prisonniers à rançonner. (À rapprocher des Aztèques attaquant les Espagnols avec le même esprit...)</p>
<h4>Le nationalisme</h4>
<p>On savait déjà que le sentiment national français date de cette époque. Je me disais aussi que toute uchronie où les Anglais gagnaient impliquait une assimilation de l’Angleterre par la France : la noblesse anglaise étant parfois plus française qu’anglo-saxonne, ses conquêtes françaises auraient accentué le phénomène, et la différence démographique aurait fait le reste.</p>
<p>J’ai appris par contre que le sentiment national anglais a joué aussi, et contre eux : une victoire et la fusion des deux royaumes aurait mené à l’absorption par des Français honnis. J’aurais aimé plus de détails sur ce point...</p>
<h4>Évolutions technologiques</h4>
<p>L’armée anglaise est organisée autour de leur fameux arc, l’arme de destruction massive de l’époque, adapté à l’attaque par « saturation ». En face, les archers génois engagés par les Français misent sur la précision de leurs arbalètes, mais leur lenteur de réarmement les rend en fait plus adaptées aux sièges et aux batailles maritimes. L’arc perdra cependant de son importance suite à l’amélioration des cuirasses françaises à la toute fin de la guerre et plus tard à cause des armes à feu (plus chères mais plus faciles à maîtriser).</p>
<p>En face, les Français n’utilisent sérieusement l’artillerie qu’à la toute fin.</p>
<h4>La fin</h4>
<p>Quand Bordeaux tombe, Charles VII met fin à trois siècles d’affrontement entre Capétiens et Plantagenêt. Et c’est aussi par l’artillerie qu’au même moment les Turcs prennent Constantinople et achèvent l’Empire romain. Aux deux extrémités de l’Europe sonne ainsi la fin la fin du Moyen Âge.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Article d’ailleurs qui noie dans l’huile la crédibilité de toute uchronie où le Japon ou l’Allemagne gagne la guerre : dans une guerre archi-mécanisée, Américains et Russes avaient quasiment tout le pétrole, et ce que l’Axe a pu ou aurait pu atteindre était trop loin pour le ramener.</em> </p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/728“World War II Plans that never happened” (« Les plans secrets de la Seconde Guerre mondiale ») de Michael Kerriganurn:md5:38c8bc6a0463981d0e3a94742dcd89bb2012-10-15T00:00:00+02:002016-03-15T14:04:22+01:00ChristopheHistoireAllemagnebombe atomiqueEuropegigantismeguerregéographiegéopolitiquehistoireincohérencelivres lusoh le beau cas !politiquescienceSeconde Guerre MondialetotalitarismeuchronieÉtats-Unis <p>Je l’ai lu en anglais mais il y a une <a href="http://www.amazon.fr/plans-secrets-seconde-guerre-mondiale/dp/2735703622/ref=sr_1_1?ie=UTF8&qid=1348775339&sr=8-1">version française</a>.</p>
<p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/61mQbgqfzkL._SL500_AA300_.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /> Chez tout amateur d’uchronie, ce livre fera naître joie et frustration.</p>
<h3>Joie</h3>
<p>Kerrigan recense une flopée de plans qui auraient pu marcher (ou échouer), réalistes ou fous, planifiés pendant des mois ou juste griffonnés en vitesse, et chacun ferait un point de divergence parfait pour une uchronie.</p>
<p>Certaines opérations n’ont jamais eu lieu :</p>
<ul>
<li>l’invasion de la Scandinavie ou juste de la Norvège par l’un ou l’autre camp (les Allemands ont osé les premiers en 1940), ou celle de l’Irlande (inquiétante pour les Britanniques, mais trop loin pour les Allemands) ;</li>
<li>l’invasion de la Suisse par le Reich (opération <em><a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Operation_Tannenbaum" hreflang="de">Tannenbaum</a></em>), reportée on ne sait trop pourquoi : autres urgences, coopération entre les deux pays, promesse suisse de faire payer un ticket d’entrée disproportionné... ;</li>
<li>un classique : <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Seel%C3%B6we">Seelöwe</a></em>, l’invasion allemande de la Grande-Bretagne — très difficile faute de moyens de barges de débarquement et de maîtrise des mers, et impliquant donc une supériorité aérienne que la <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/La-bataille-d-Angleterre">Bataille d’Angleterre</a> ne donna pas ;</li>
<li>l’attaque anglaise ou américaine sur les Açores ou le Cap Vert — inutiles tant que le Portugal et l’Espagne ne soutenaient pas trop l’Allemagne ;</li>
<li>la prise de Gibraltar par les Allemands (se rappeler que <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3">Canaris a pas mal fait pour saborder le projet</a>) — opération reportée faute d’autorisation espagnole puis de troupes disponibles ;</li>
<li><em><a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Operation_Herkules" hreflang="en">Herkules</a></em>, c’est-à-dire la prise de la stratégique Malte par les Allemands — reportée car au début tout allait bien pour Rommel en Afrique, puis faute de moyens ;</li>
<li>les précurseurs d’<em>Overlord</em> (<em>Sledgehammer</em>, <em>Roundup</em>) : les Britanniques, plus réalistes, freinent l’envie des Américains d’en découdre en France dès 1942 et malgré les demandes pressantes de Staline d’un deuxième front ;</li>
<li>par les Japonais, l’invasion de l'Australie —trop loin, trop grande finalement — ou celle de Ceylan — trop loin— ou encore de Madagascar — Hitler était contre, c’était « sa » partie du monde ;</li>
<li>l’invasion de la Sardaigne par les Alliés, ou celle des îles anglo-normandes — îles abandonnées à leur sort, les Allemands ne pouvant faire grand-mal de là-bas ;</li>
<li>la plus délirante, l’opération <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Unthinkable">Unthinkable</a></em>, envisagée par Churchill avant même la capitulation allemande : l’attaque des forces russes sur le continent au cas où Staline se montrerait agressif — opération abandonnée car finalement inutile, souhaitée par personne, et si j’en crois Wikipédia il est probable que les Russes, éventuellement alliés aux Japonais, auraient gagné une guerre longue — mais personne ne savait alors que la bombe A allait tout changer ;</li>
<li>la plus gigantesque : l’opération <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Downfall">Downfall</a></em> (rassemblant <em>Coronet</em> et <em>Olympic</em>) visait en 1946 à débarquer au Japon, au sud puis vers Tokyo, avec des effectifs, des moyens et des pertes qui auraient ravalé Overlord au rang d’escarmouche — Hiroshima et Nagasaki ont tué dans l’œuf ce monstre logistique.</li>
</ul>
<p>Certaines armes n’ont jamais vu le feu :</p>
<ul>
<li>un projet américain de porte-avion mi-bois mi-glace : certes incoulable, mais avec trop de problèmes pratiques, et rattrapé par les évolutions des modèles classiques ;</li>
<li>les bombes anglaises destinées à diffuser l’anthrax, bien trop efficaces pour être utilisées (testé sur <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/en">Gruinard Island</a>) ;</li>
<li>les bombardiers allemands et japonais à très longue distance pour attaquer les États-Unis sur leur sol, voire Panama (trop loin, effet uniquement psychologue) ;</li>
<li>le super-tank allemand <em><a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Panzer_Maus" hreflang="de">Maus</a></em>, véritable bunker sur roues, avec ses 188 tonnes, et invincible (mais beaucoup trop lent et gourmand en pétrole pour être utile, et trop lourd pour passer le moindre pont) ;</li>
<li>la marine de guerre allemande complètement réarmée, prévue avant-guerre pour être prête en 1945, et donc abandonnée pour privilégier les sous-marins ;</li>
<li>un canon longue portée, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/V3_%28canon%29">V3</a>, destiné à bombarder Londres, mais à peine utilisé ;</li>
<li>un V2 intercontinental, projet utopique des derniers mois de la guerre.</li>
</ul>
<p>Dans la catégorie des plans « fous et foireux » :</p>
<ul>
<li>les projets de liquidation physique des différents leaders par le camp d’en face par bombardement, <em>sniper</em> ou espions (trop compliqués, trop irréalistes, ou contrecarrés trop tôt) ;</li>
<li>le projet de « réduit nazi » dans les Alpes, grande crainte des Alliés (justifiant en partie qu’ils aient délaissé la course à Berlin) — plan réel ou intoxication des derniers jours du Reich ?</li>
</ul>
<p>Fils rouges des différentes pages, les deux principaux décideurs de la guerre : Churchill et Hitler. Le premier était toujours partant pour un plan audacieux voire fou, favorisant les attaques indirectes aux frontales (il aurait préféré les Balkans plutôt que la Normandie). Le second changeait facilement d’avis et adorait les armes qui « en jetait » sans résultat stratégique réel.</p>
<h3>Frustration</h3>
<p>Les articles très résumés sur chaque opération militaire avortée n’en disent pas forcément beaucoup plus, souvent moins même, que des pages Wikipédia. À part quelques cartes, photos et documents n’offrent que peu d’intérêt Le style dérive souvent vers l’humour et le jeu de mot facile alors que le sujet porte rarement à la rigolade. Les commentaires sur le web sont assez assassins...</p>
<p>Bref, un bouquin intéressant pour la concentration de points de divergence uchroniques, plus que pour les informations sur chaque opération ou la profondeur de l’analyse.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%E2%80%9CWorld-War-II-Plans-that-never-happened%E2%80%9D-%28%C2%AB%C2%A0Les-plans-secrets-de-la-seconde-guerre-mondiale-%C2%BB%29-de-Michael-Kerrigan#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/719« Le Gauleiter Wagner, le bourreau de l’Alsace » de Jean-Laurent Vonauurn:md5:b35ff5a411081023de1b28e318390ba32012-07-15T18:28:00+02:002016-05-16T15:19:08+02:00ChristopheHistoireabominationAllemagneAlsacealsaciencataclysmecolonisationdéfense du françaisdéshumanisationesclavageguerrehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationnationalismeoh le beau cas !peine de mortRésistanceSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/41F7X8l9w%2BL._SL500_AA300_.jpg" alt="Image bouquin" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Image bouquin" /> Robert Wagner a dirigé l’Alsace pendant l’« annexion de fait » et, loin d’être un simple exécutant passif, a activement poussé la germanisation et la nazification. Il est allé au-delà des désirs d’Hitler dans l’incorporation de force de milliers d’Alsaciens — des milliers ne sont pas revenus du front russe.</p>
<h3>L’annexion de fait</h3>
<p>Wagner est un nazi de la première heure, accompagnant Hitler dès son putsch raté de 1923, y compris en prison. Intelligent, sans scrupule, sans éthique, Wagner incarne le parfait nazi.</p>
<p>En juin 1940, l’armée française est écrasée, et l’Alsace occupée. Mais l’Occupation n’y revêt pas le même sens que dans le reste de la France, et le Reich d’Hitler n’est pas celui d’avant 1914. Dès l’été, Wagner, Gauleiter (responsable du Parti et, de fait, de l’administration civile) de Bade, rattache l’Alsace à son Gau, puis commence le processus d’annexion et de germanisation complète de la région. Le gouvernement de Vichy proteste à peine. Il n’y aura jamais d’annexion officielle, mais ce sera tout comme. Wagner sera l’exécutant zélé de ce processus. Il promet de faire en cinq ans ce qu’Hitler jugeait faisable en dix — dont l’expulsion de 40% de la population <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p>Environ 135 000 personnes (réfugiées dans le centre de la France avant l’offensive) ne rentrent pas, et plus de 21 000 sont expulsées car françaises ou francophiles. Les noms de ville et de place changent très vite. Chaque ville se retrouve avec une <em>Adolf Hitler Straße</em>. Le français est interdit, les livres brûlés, les patronymes germanisés.</p>
<p>Les « nancéiens », des autonomistes avec un certain poids, sont placés à des postes de responsabilités. Les postes de douane sont déplacés vers l’ouest à la frontière de 1871. Les fonctionnaires doivent déclarer leur adhésion au national-socialisme ou perdre leur emploi. Le courrier est ouvert. Le parti étend son maillage étouffant sur tout le territoire <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</p>
<p>Économiquement, l’Alsace est spoliée. Le taux de change de 20 RM pour un 1 F est un scandale. De nombreux biens d’expulsés, émigrés et autres « ennemis du peuple » sont confisqués. Tous les postes clés passent aux mains d’Allemands de confiance, les banques et industries sont rattachées à des groupes allemands. Les salariés sont fichés. Les marchés agricoles, en raison des pénuries, sont très étroitement contrôlés. Au fur et à mesure que la guerre avance, les Alsaciens se retrouvent contraints de travailler uniquement pour l’industrie de guerre quand ils ne sont pas enrôlés. Beaucoup sont ruinés.</p>
<p>Pour Wagner, tout va bien. En 1942, 20% de la population alsacienne est encadrée par le parti nazi. En fait, pour les trois quarts il s’agit des Jeunesse Hitlériennes <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> et d’<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Deutsches_Frauenwerk" hreflang="de">organisations féminines</a>.</p>
<p>Le passage sur l’université de Strasbourg est abject : la vraie ayant été déplacée avant l’offensive à Clermont-Ferrand, et y étant restée, Wagner fait créer <em>ex nihilo</em> une nouvelle université, fer de lance contre l’Occident. Comme professeurs, on n’importe que des nazis convaincus<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup> triés sur le volet, et aucun Alsacien. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/August_Hirt">Dr Hirt</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup> fait des expériences et se constitue une collection de squelettes à partir de prisonniers des camps d’Auschwitz puis du Struthof.</p>
<p>Ajoutons un culte de la personnalité tout à fait dans la manière nazie. Certaines photos sont éloquentes.</p>
<h3>Les camps du Struthof et de Schirmeck</h3>
<p>Il existe un camp de concentration, parmi les pires, en Alsace, au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Camp_de_concentration_de_Natzwiller-Struthof">Struthof</a> (52 000 détenus d’un peu partout, 22 000 morts dont certains en chambre à gaz), mais il n’est pas vraiment sous la responsabilité de Wagner, ni destiné aux Alsaciens, sinon comme épouvantail. Pour eux, il y a le « camp de rééducation » de Schirmeck, pour tous les réfractaires, contestataires et suspects de francophilie, pour quelques jours ou à vie. Le camp est géré par la Gestapo et arrive au chiffre de deux mille internés. La ration alimentaire, insuffisante pour le travail demandé, et les brimades sadiques entraînent de fréquents décès.</p>
<h3>La résistance</h3>
<p>Dans un tel contexte, difficile de résister. Cependant il y a un « rapport d’Alsace » pour avertir Vichy et Londres de la situation : il montre au Gauleiter que son administration est noyautée. La Gestapo redouble d’efforts, la plupart des réseaux sont démantelés fin 1942.</p>
<p>Quand les tribunaux sont impliqués, il appliquent le droit allemand, et surtout la conception très particulière de la justice qu’ont les nazis. Wagner fait des exemples, les condamnations à mort pleuvent.</p>
<h3>L’incorporation de force</h3>
<p>L’incorporation de force est le plus grand crime reproché à Wagner. Il pousse auprès d’Hitler, contre l’avis de Keitel <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-6" id="rev-wiki-footnote-6">6</a>]</sup> à l’intégration rapide de classes d’âge entières. Il en verse même d’office dans les Waffen-SS <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-7" id="rev-wiki-footnote-7">7</a>]</sup>. Pour ce nazi convaincu, le sang versé et la communauté d’armes doivent accélérer l’intégration de l’Alsace au IIIè Reich. Il ne réussit qu’à braquer définitivement la population.</p>
<p>Au début on fait appel aux volontaires : l’échec est cuisant. L’incorportation devient donc obligatoire en août 1942. Les jeunes qui refusent de partir mettent leur famille en danger : des milliers de personnes sont ainsi « transplantées » dans le Reich <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-8" id="rev-wiki-footnote-8">8</a>]</sup>. Des milliers fuiront tout de même.</p>
<p>Les officiers alsaciens de l’armée française faits prisonniers en 1940 sont rapidement libérés s’ils se reconnaissent comme <em>Volksdeutsch</em> (ethniquement allemands). Mais par la suite, on impose leur passage dans les Waffen-SS.</p>
<h3>Le procès</h3>
<p>La deuxième moitié du livre est consacrée à son procès en 1946. Il donne au passage un bon aperçu de la manière dont fonctionne la justice lors de l’épuration, et ses limites. L’auteur est juriste, il se fait aussi plaisir.</p>
<p>Wagner a été livré aux Français par les Américains. Il est jugé avec cinq autres membres de l’administration et de la « justice » de la période d’annexion.</p>
<p>Bizarrement, sont d’abord reprochés à Wagner et consorts des crimes précis (la liquidation de quatre aviateurs britanniques prisonniers, la condamnation à mort de résistants et jeunes rebelles à l’incorporation...) et accessoirement l’incorporation de force. De manière générale, le procès ne semble pas très bien mené, et se révèle plutôt frustrant pour les Alsaciens.</p>
<p>La légalité de l’annexion revient périodiquement. Pas évoquée par la convention d’armistice de juin 1940, jamais entérinée par aucun traité, elle est légalement nulle. L’enrôlement des populations dans l’armée allemande viole donc toutes les conventions. Mais les nazis s’assoient sur le droit. Wagner a beau jeu de rappeler qu’en 1918, le retour de l’Alsace à la France a été précipité aussi, avant même le Traité de Versailles, et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alsace-Lorraine#L.27expulsion_des_Allemands">avec des expulsions d’Allemands à la clé</a>.</p>
<p>Wagner tente de se présenter comme un simple exécutant de la volonté du Führer. Les témoins ne cessent de montrer qu’au contraire il avait une grande marge de manœuvre, pouvait influencer même Hitler, voire passer outre à ses consignes, pouvait ordonner au système judiciaire des condamnations à mort , et avait la haute main sur les grâces et exécutions.</p>
<p>Tous les accusés sont condamnés à mort, sauf le procureur Luger, acquitté, lui qui avait pourtant requis plusieurs peines de mort devant le tribunal spécial alsacien... Fragile sur le plan strictement juridique, comme toute justice de vainqueur et pour crime contre l’humanité, cette condamnation est politiquement nécessaire pour les Alsaciens, qui ne voient pas d’autre issue possible après leur calvaire.</p>
<p>Sur la forme, le livre souffre de deux petits défauts : beaucoup trop de notes regroupées en fin de volume, quand elles auraient pu être en bas de page voire dans le texte même, et quelques passages et citations en allemand non traduites (moi je m’en fiche).</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Ce n’était qu’un début, les nazis avaient de grands projets de dépeçage de la France en cas de victoire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Je ne crois pas que des habitants des démocraties occidentales actuelles puissent même imaginer ce que doit être ce climat de suspicion complet qui règne d’ailleurs encore dans quelques pays.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que ce n’était </em>pas<em> volontaire comme pour les scouts...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Les autres avaient été virés du corps enseignant, de toute façon.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Cet infect personnage n’a même pas été jugé, il s’est suicidé en 1945, je ne crois pas que le livre le précise.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-6" id="wiki-footnote-6">6</a>] <em>Chef suprême de la Wehrmacht pendant la guerre. Pendu à Nuremberg. Pas fusillé, pendu.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-7" id="wiki-footnote-7">7</a>] <em>Et on n’avait pas forcément le choix entre SS et Wehrmacht « classique ». D’où la présence d’Alsaciens dans la division </em>Das Reich<em> coupable du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oradour-sur-Glane">massacre d’Oradour</a>, sujet encore sensible en Alsace soixante-dix ans après</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-8" id="wiki-footnote-8">8</a>] <em>Le livre ne le précise pas vraiment, mais une « transplantation » n’est pas un simple déménagement forcé, mais une <a href="http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2007-2-page-53.htm">quasi-déportation en camp de travail</a></em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/701« Pour la Science » d’août 2011 : inflation cosmique, octonions, Antiquité polychromeurn:md5:d84fa64351651f749e287767fda94ace2011-08-23T00:00:00+02:002015-09-14T12:58:22+02:00ChristopheScience et conscienceabominationAmériqueAntiquitéargentastronomiebombe atomiquecomplexitéconquête de l’inutilecosmologiegigantismeguerrehistoiremathématiquesprise de têtesantéscienceSeconde Guerre MondialetempsuniversÉtats-Unis<p>« Petit » numéro dans le sens où rien de très frappant ne m’a été révélé.</p> <p>En très rapide (<em>et comme d’habitude avec mes commentaires personnels subjectifs en italique</em>) :</p>
<p><img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/full/_done_20110719_182833_PLS-2011-aout_406-fu-pls_406_couv_175.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’Antiquité était colorée</h3>
<p>Les statues et monuments antiques, que l’inconscient collectif conserve blanches et immaculées, étaient bigarrées en diable. L’article traite notamment des statues grecques, des fresques et frusques assyriennes ou babyloniennes <em>(et, ajouterai-je, c’est même valable pour les <a href="http://www.liturgiecatholique.fr/Amiens-la-cathedrale-en-couleurs.html?artsuite=1">cathédrales</a>)</em>.</p>
<p>Les robes et costumes étaient également colorés. Il y eut même tout un commerce du bleu égyptien pendant des siècles autour de la Méditerranée.</p>
<h3>Le retour des farines animales</h3>
<p>Une tribune prône le retour de l’utilisation des farines animales, interdites depuis la crise de la vache folle. Mais à présent, l’ESB a disparu, et utiliser des farines dans des conditions plus prudentes qu’autrefois (jamais au sein de la même espèce, ni quand une encéphalopathie transmissible est envisageable, avec des contrôles stricts) serait économiquement pertinent : le soja (importé voire transgénique) coûte dix fois plus cher que le déchet de boucherie (mangeable par des humains !), rejeté actuellement plus pour des raisons commerciales que sanitaires.</p>
<h3>L’inflation se dégonfle ?</h3>
<p>En cosmologie, l’<strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Inflation_cosmique">inflation</a></strong> avait, il y a 30 ans, semblé résoudre pas mal de problèmes dans la théorie du Big Bang : en enflant de façon démentielle en très peu de temps au tout début de son existence, l’Univers devenait ainsi plat.</p>
<p>Un article s’interroge (l’auteur semble vraiment dubitatif) sur certaines interprétations naïves des début de la théorie qui lèvent à présent plus de problèmes qu’ils n’en résolvent, sur le pouvoir prédictif de la théorie, sur des théories qui pourraient tout aussi bien expliquer l’univers que l’inflation : inflation éternelle, univers cyclique…</p>
<p>Comme souvent en cosmologie théorique, impossible de trancher avec les éléments actuels : il faudra voir si l’inflation est confirmée par la découverte d’ondes gravitationnelles, prochainement (peut-être).</p>
<p><em>(Je ne prétends pas voir réellement compris les arguments pour et contre l’inflation ni même m’en souvenir dans deux semaines…</em>)</p>
<h3>Les omégas 3 c’est bon, mangez-en</h3>
<p>Les <strong>omégas 3 et 6</strong> sont des acides gras issus des plantes et primordiaux pour la santé. Ce qui est important aussi est l’équilibre entre eux, surtout si les apports en oméga 3 sont insuffisants. Les apports principaux chez l’homme ne sont pas végétaux mais animaux (laitages d’abord, puis produits carnés).</p>
<p>Pour augmenter les apports par la nourriture, il faudrait aussi que les animaux de boucherie mangent du lin, mais le lapin, ou les poules ayant mangé des escargots ayant eux-même mangé du pourpier, sont déjà de bonnes sources. L’effet est transgénérationnel : mesdames, mangez du poisson gras (saumon, maquereau, sardine…) pendant votre grossesse ! Les oméga 3 protègent en outre nos artères et contre la dépression. Si le commun des mortels satisfera ses besoins par une alimentation variée riche en huiles végétales (colza, noix…), certains cas graves nécessitent des capsules</p>
<h3>Dimension 8</h3>
<p>Les <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Octonion">octonions</a></strong> ont été inventés (découverts ?) au milieu du XIXè siècle, et peu étudiés depuis : ils sont la version en 8 dimensions des nombres complexes et des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Quaternion">quaternions</a>. Les nombres complexes sont utilisés massivement depuis la Renaissance, et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/William_Rowan_Hamilton">Hamilton</a> s’est consacré aux quaternions après avoir séché sur les triplets, où multiplication et division ne peuvent être définies de façon cohérente et utile (<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Pour-la-Science-de-septembre-2010">c’est pour cela que le Mandelbulb a été long à trouver</a></em>).</p>
<p>Au-delà de 4, ce n’est qu’en dimension 8 que l’on trouve à nouveau une algèbre utilisable. Graves, un ami d’Hamilton, inventa les octonions dans la foulée de la découverte des quaternions (dans l’optique de « pourquoi ne pas pousser le bouchon encore plus loin ; quitte à utiliser 3 imaginaires, pourquoi pas aller à 7 ? »), sans qu’Hamilton s’y intéresse vraiment. En effet, d’une part il était déjà accaparé par ses quaternions et leurs applications (description des rotations…) ; d’autre part la multiplication des octonions a le mauvais goût de ne pas être associative (en plus de ne pas être commutative comme déjà pour les quaternions) ; enfin Hamilton voyait sans doute mal l’utilité, même mathématique, des octonions.</p>
<p>Un siècle et demi plus tard, c’est la théorie des cordes qui ressort les octonions du placard poussiéreux des maths : on sait que cette théorie ne serait cohérente qu’en dimension 10 ; or c’est le nombre de dimensions d’un monde où les particules de matière et de force sont décrites par des octonions (dimension 8) parcourant des cordes (unidimensionnelles) dans le temps (unidimensionnel), cela en respectant la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Supersymétrie">supersymétrie</a>, théorie si belle qu’elle ne peut qu’être juste (<em>!</em>).</p>
<p>Ni la théorie des cordes ni la supersymétrie ne sont encore confirmées expérimentalement, mais les choses semblent bonnes dans le proche avenir… pour certains. Les octonions, pure curiosité mathématique, sont peut-être à la base de la compréhension du monde.</p>
<p><em>(Comme je dis toujours, les maths servent à fournir des outils à des physiciens cinquante ans plus tard, pour qu’ils découvrent des théories qui ne seront réellement utiles que cinquante ans plus tard.)</em></p>
<h3>L’argent de la bombe atomique</h3>
<p>Un article intéressant sur un aspect purement matériel du <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_Manhattan">Manhattan Project</a></em> : pour séparer les deux isotopes d’uranium (<em>le <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Little_Boy" hreflang="en">235 qui foudroya les Japonais</a> est naturellement noyé dans le <a href="http://cseserv.engr.scu.edu/StudentWebPages/IPesic/ResearchPaper.htm" hreflang="en">238 qui n’est bon qu’à faire des obus pour casser de l’Irakien ou du Serbe</a></em>) au sein de gigantesques <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Calutron" hreflang="en">calutrons</a>, il y avait besoin d’une quantité monstrueuse de cuivre, au point que cela aurait gêné la production de munitions, voire mis la puce à l’oreille à l’ennemi.</p>
<p>Le cuivre pouvait être remplacé par de l’argent : c’est carrément le Trésor américain qui fournit pas moins de 13300 tonnes du métal, déjà quasiment pur ! La surveillance et le soin de récupération de l’argent seront tels qu’il y eut même un excès quand le dernier lingot fut rendu… en 1970 ! Dès 1946 d’autres techniques de séparation isotopique furent employées mais certains calutrons restèrent longtemps en service.</p>
<p>Cet argent fut manipulé, transformé de manière complexe, et les appareils qui le contenait utilisés par des milliers de gens qui n’avaient aucune idée de ce à quoi ils contribuaient. <em>(Et que des ressources matérielles et humaines aussi démentielles aient pu être détournées aussi longtemps pour un projet dont le succès à court terme était plus qu’aléatoire, le tout malgré (grâce à ?) la guerre me fascinera toujours.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Les doigts se friperaient dans l’eau pour améliorer la préhension en milieu humide !</li>
</ul>
<ul>
<li>Les ultraviolets A sont moins dangereux que les B, mais ils représentent 95% des UV. Ils attaquent l’ADN de manière différente, un article donne tous les détails.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-aout-2011#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/658« 1940 : Et si la France avait continué la guerre… »urn:md5:aed425ec34c8fff3b98038f2b817097a2011-06-01T08:08:00+02:002015-09-02T12:57:32+02:00ChristopheTemps et transformationsAllemagnebombe atomiquecatastrophecolonisationcouragedémocratieguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationracléeSeconde Guerre Mondialespéculationtempstotalitarismeuchronie<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lafrancecontinue-1.jpg" alt="lafrancecontinue-1.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Etait-il réaliste pour un gouvernement traumatisé d’abandonner la métropole, où la situation était désespérée, et de continuer la lutte depuis l’Algérie et l’Afrique, avec les appuis anglais et américain ? Le débat avait à l’époque fait rage entre les « défaitistes » (Pétain, Weygand…) pas mécontents de voir la République abattue, ou simplement inconscients de la différence de nature du IIIè Reich par rapport à l’Allemagne qu’ils avaient affrontée en 1914-18, et le groupe emmené par de Gaulle.</p> <p>J’ai chroniqué ici l’excellent livre sur la défaite de 1940, <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1">Comme des lions</a></em>, de Dominique Lormier, dont <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4">un passage traite d’un repli français dans l’Empire, sans capitulation</a>.</p>
<p>Récemment, un groupe mené entre autres par <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Sapir">Jacques Sapir</a> n’a pas résisté à la tentation de l’uchronie sur ce point. Le choix du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Point_de_divergence">point de divergence avec notre histoire</a> fut délicat : il fallait que le Président du Conseil <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Reynaud">Paul Reynaud</a> ne renonce pas au pouvoir en faveur de Pétain (alors que paradoxalement il tenait à continuer la guerre) ; c’est donc en avançant de quelques semaines le décès accidentel d’Hélène de Portes, sa maîtresse, défaitiste elle, que cette histoire se met à diverger. (<a href="http://www.delpla.org/article.php3?id_article=69">Certains ne sont pas d’accord sur le poids de l’influence d’Hélène</a>. Détail, on pourrait trouver d’autres divergences menant au même résultat.)</p>
<p>Le livre reprend l’essentiel, sous une forme aussi plus agréable à lire, du site web <a href="http://www.1940lafrancecontinue.org/">1940lafrancecontinue.org</a>. Il ne couvre que 1940, jour par jour voire d’heure en heure. Le site a quelques cartes et des mentions sur les années suivant 1940.</p>
<h3>Le Grand Déménagement</h3>
<p>Reynaud tient bon, soutient de Gaulle, écarte Pétain puis Weygand, enrôle Mandel, Zay, Blum... et lance le Grand Déménagement de l’armée française (enfin, ce qu’il en reste...) vers l’Algérie, alors française.</p>
<p>La plausibilité fait l’objet de l’introduction : oui, cela était jouable. Evidemment, en Afrique du Nord, il n’y a aucune industrie digne de ce nom, et la France devient dépendante de l’Angleterre et des États-Unis. Il lui reste des atouts : la flotte, les ressources de l’Empire, de grands stocks d’or.</p>
<h3>Ce qui change</h3>
<p>Alors, par rapport à notre réalité, quelle différence peut faire une France dont les reins sont brisés ?</p>
<ul>
<li>On pense d’abord à la flotte : sa neutralisation était le premier but d’Hitler en acceptant l’armistice, et mettre la main dessus (en tout cas éviter qu’elle ne passe aux Allemands) une obsession de Churchill. Si la France continue, pas de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Mers_el_Kebir">Mers el-Kébir</a>, la Méditerranée reste aux Alliés, et les convois dans l’Atlantique seront mieux escortés.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Empire reste intégralement aux Alliés. Alors qu’en réalité de Gaulle a mis des années à le récupérer bout par bout, que les Anglais ont dû envahir Madagascar puis les Américains l’Algérie, que l’Afrika Korps de Rommel a pu s’y baser, si la France continue il devient aussitôt une base de départ, par exemple contre la Lybie.</li>
</ul>
<ul>
<li>Au lieu de l’humiliante débandade et de la reddition en masse après que Pétain a dit de déposer les armes sans même avoir négocié l’armistice, l’armée française réussit à tenir avec une direction claire. Certes, il est impossible de conserver longtemps la France continentale : le sacrifice de nombreuses unités ne sert qu’à couvrir le Grand Déménagement. Nos uchronistes voient Marseille tomber en août. Mais cela fait pas mal de prisonniers en moins... et beaucoup de combats destructeurs en plus dans toute la France. Des scénarios impliquant un réduit breton (irréaliste) ou provençal (plus plausible) ont été jugés un peu trop optimistes. Que la France tienne encore deux mois contre la Wehrmacht est jugé par certains même conservateur : la logistique de la Wehrmacht était très étirée (d’où une pause forcée à mi-chemin), les Français ont très vite appris de leurs erreurs, etc.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les Français peuvent se rééquiper auprès des Américains grâce à leurs (énormes) réserves d’or.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dans la réalité, l’armée allemande avait quand même souffert (même et surtout après Dunkerque), et les avions perdus en France ont manqué pendant la Bataille d’Angleterre. Par contre la Luftwaffe avait récupéré ses pilotes prisonniers après l’armistice. Si la France continue, la Wehrmacht s’use à finir la conquête, ne récupère pas ses pilotes prisonniers : la Bataille d’Angleterre (pour commencer) est moins intense.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dès 1940 les Alliés peuvent penser à des contre-attaques. Et le livre ne s’en prive pas : l’Italie ayant courageusement déclaré la guerre à une France en pleine débâcle (et comme dans la réalité, impréparation et artillerie de montagne française aidant, l’armée italienne n’ira pas loin dans les Alpes), elle prend le premier choc, avec la conquête alliée immédiate de la Lybie, de la Sardaigne, de Rhodes (ces deux dernières jamais conquises dans la réalité). Les Alliés ont donc gagné deux ans en Afrique, évité l’Afrika Korps, attiré la Grèce dans leur camp (que Mussolini aurait attaqué sinon dès la fin 1940, sans succès), protégé Suez, et menacent immédiatement la Sicile.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pétain a dans la réalité réussi à obtenir une légitimité grâce aux pleins pouvoirs octroyés par les députés. Si la France continue, ceux-ci s’enfuient, et commencent à bâtir quelque chose qui s’orientera plutôt vers notre Vè. Et si les auteurs ont tenu à maintenir Laval, Doriot, Déat… au pouvoir (à Paris, pas Vichy), ce n’est qu’une bande d’arrivistes à la légitimité nulle.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Empire français (et le belge également par contrecoup) sortira socialement complètement transformé de la guerre, grâce aux centaines de milliers de personnes (soldats, techniciens, politiques…) déplacés en Algérie mais aussi aux lois donnant la citoyenneté aux « sujets »<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> s’enrôlant et à leur famille. D’intéressantes perspectives pour l’après-guerre…</li>
</ul>
<ul>
<li>De même, des milliers de Républicains espagnols sont enrôlés par l’armée française.</li>
</ul>
<h3>Ce qui ne change pas :</h3>
<p>Les auteurs n’ont pas osé trop s’éloigner de la trame temporelle réelle, de manière logique pour 1940, de manière plus discutable (et même frustrante, mais c’eut été un saut dans l’inconnu) pour la suite :</p>
<ul>
<li>Franco reste au pouvoir en Espagne avec son jeu d’esquive envers Hitler (j’avais parlé ici du <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3">double jeu du fascinant amiral Canaris</a>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Le livre s’arrête à la Saint-Sylvestre 1940, donc bien avant l’attaque de l’URSS. Mais l’introduction précise bien que le maintien de la France dans la guerre ne change rien aux intentions d’Hitler. Sa nature (et celle de son régime dirait Hannah Arendt) impose de passer vite à autre chose quand les difficultés se font jour, et une France exsangue ne l’inquiétera pas beaucoup plus que la seule Angleterre dans notre réalité. Les nazis attaqueront donc les Soviétiques.</li>
</ul>
<ul>
<li>De même, dès les premières pages on sait que l’Occupation durera peu ou prou quatre ans. Au passage, quelques clins d’œils font référence à des événements bien postérieurs, légèrement « décalés ».</li>
</ul>
<p>Quelques reproches tout de même :</p>
<ul>
<li>Sur la forme, les récits au jour le jour recensant la moindre escarmouche au fond du désert lybien peuvent un peu lasser. Les opérations sont tellement détaillées que certaines parties se lisent en diagonale.</li>
</ul>
<ul>
<li>C’est le lot de la plupart des uchronies, mais il est frustrant de savoir que l’on passe à côté de nombre de références. Il faut quasiment avoir Wikipédia à portée de main pour se renseigner sur le champ sur chaque personnage qui apparaît : Guillaumet a un rôle dans l’évacuation (au lieu, dans la réalité, de se faire tuer dès 1940) ; Mendès France ne finit pas condamné comme déserteur ; Blum ne finit pas en prison sous Vichy ; Weygand se fait tuer au front ; le serment de Lybie remplace celui de Koufrah ; par contre l’ambassadeur japonais prend toujours des notes après le <a href="http://www.secondeguerre.net/articles/evenements/ou/40/ev_raidtarente.html">raid allié sur Tarente</a> qui inspira celui sur Pearl Harbor ; etc.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les avis des civils manquent cruellement. Le gouvernement a fui avec une partie de l’armée : qu’en pense le civil de base resté en France sous Occupation ? Que disent les habitants qui voient leur ville détruite juste pour des combats de retardement ?</li>
</ul>
<ul>
<li>Sur le fond, on pourrait reprocher au livre de trop se baser sur la ligne temporelle réelle sur le long terme (on sait que l’Occupation durera quatre ans, que l’URSS sera attaquée…) alors que les opérations imaginées pour 1940 n’ont plus rien à voir avec celles de la réalité. Le maintien de la France dans la guerre n’aurait-il qu’un si faible impact ? Il faudra attendre pour voir. En fait l’effet serait sans doute majeur sur l’après-guerre : sur l’Algérie (pleine de nouveaux citoyens arabes avec droit de vote) et l’Empire ; sur le maintien de la France comme puissance majeure sur le papier ; sur la manière dont l’Europe est libérée ; le rôle final de l’URSS… J’aurais rêvé d’un basculement majeur : par exemple, les Empires occidentaux ayant mieux encaissé, le Japon décide ne pas s’y frotter, renonce à Singapour, au Vietnam et à Pearl Harbor et (<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-3-%3A-Pearl-Harbor">le choix fut paraît-il discuté à Tokyo</a>) préfère croquer l’URSS par l’Est : celle-ci s’effondre rapidement avec les conséquences que l’on imagine (aussi bien stratégiquement pour le plus grand bénéfice des nazis que par le maintien prolongé de la non-belligérance américaine) (<strong>Ajout de 2015</strong> : D’un autre côté, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Khalkhin_Gol">les Japonais s’étaient déjà cassé les dents contre les Soviétiques en Sibérie</a>).</li>
</ul>
<p><strong>PS de septembre 2011</strong> : <a href="http://alias.codiferes.net/wordpress/index.php/et-si-la-france-avait-continue-la-guerre/comment-page-1/?gseaftercommentingmodal#comment-5069">Alias a aussi aimé ce livre</a>.</p>
<p><strong>PS de 2013</strong> : Le second tome, <em>1941-1942</em> est paru ! (<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre">et je l’ai chroniqué ici</a>)</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Rappelons que la devise </em>Tous les hommes sont égaux<em>, dans la France de la IIIè et de la IVè république, ne valait ni pour les femmes ni pour les Arabes...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/647L’Histoire spécial d’avril 2010 : « France 1940, autopsie d’une défaite »urn:md5:4165a810cf26d4145523c37a7ed80db72010-05-02T00:00:00+02:002015-06-10T12:42:08+02:00ChristopheHistoireAllemagneapocalypseautodestructioncataclysmecatastrophedommagedysfonctionnementdécadenceguerregéopolitiquehistoireHistoire de Franceimpérialismelivres lusoh le beau cas !ParisperspectivepessimismeracléeRealpolitiksabotageSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p>« La guerre... Et très vite, la débâcle. Inattendue, radicale, monstrueuse, comme un torrent qui emporte tout. Depuis ce jour, je sais que tout peut disparaître en quelques heures, que rien n’est jamais impossible. »<br /> <br /><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Hélie_de_Saint_Marc">Hélie de Saint Marc</a>, <em>Notre histoire, 1922-1945</em>, 3 (avec <a href="http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/page/affichegh.php?idGH=721&idLang=fr">August von Kageneck</a>)</p></blockquote>
<p>Il y a une soixantaine d’années, la France se prenait la branlée la plus magistrale, cruelle, inattendue, sanglante et catastrophique de toute son histoire.</p> <p>Si cette période me fascine, c’est en partie par ses conséquences : l’Histoire de France se coupe en deux à ce moment, il y a un avant et un après ; les élites sont deux fois renouvelées, le pays dévasté et ruiné, l’honneur à peine sauf ; la Reconstruction donne naissance à un pays très différent, mais au sein d’une Guerre Froide où la France ne joue plus qu’un rôle secondaire et voit filer son Empire pan par pan.</p>
<p>Mais c’est surtout la soudaineté qui a traumatisé une génération entière : la première puissance mondiale de l’époque, sûre de sa force, de son Empire, ne fait pas que perdre une guerre, elle s’effondre <em>totalement</em>, et cela n’a pas traumatisé que le futur général cité ci-dessus.</p>
<p>Ce numéro spécial du magazine <em>l’Histoire</em> fait le point sur les recherches de ces dernières années. Des photos, un article de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Paxton">Paxton</a> pour nous remonter le moral, des encadrés sur des épisodes peu connus comme <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Narvik">Narvik</a> ou le <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Massilia_(paquebot)">Massilia</a></em>, bref que du bon.</p>
<p>Les opinions sont pléthores sur les causes de l’historique défaite. L’armistice n’était pas signé que Pétain accusait déjà l’esprit de jouissance. En gros, la vieille baderne du XIXè siècle mettait tout sur le dos de ces gauchistes du Front populaire, et de la IIIè République en général, et de la Révolution finalement. Conséquence : il fallait un redressement moral, descendre aux oubliettes la démocratie et silence dans les rangs. Cette théorie culpabilisante à l’extrême a hélas perduré longtemps après la Libération et la condamnation à mort de Pétain : les civils se souvenaient surtout du traumatisme de l’Exode, des stukas impunis dans le ciel, bref de l’effondrement final de juin à une époque où effectivement il n’y avait plus grand chose à sauver en France métropolitaine.</p>
<p>Un passionnant livre de Dominique Lormier, <em>Comme des lions</em> avait rendu son honneur à l’armée française (j’en avais parlé ici : épisodes <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1">1</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/19/441-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-2">2</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3">3</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4">4</a>).</p>
<p>Rappelons les lacunes parfois inexcusables de l’armée française de 1940 :</p>
<ul>
<li>un État-major d’une génération plus vieille que Rommel, Guderian ou de Gaulle, certes pas stupide au point de vouloir rejouer la guerre de 14 comme on l’a dit, mais qui n’avait pas vraiment compris la différence que le moteur faisait dans la guerre ;</li>
<li>la doctrine, fondée sur la défense, n’était pas si stupide dans le cadre d’une guerre défensive, voulue longue pour épuiser l’ennemi, sachant que la France manquait d’hommes expérimentés (armée de conscription, pertes de la guerre précédente, dénatalité…) et d’alliés ; mais de là à rester l’arme au pied à taper le carton alors que toute la Wehrmacht était bloquée en Pologne ou en Norvège… ;</li>
<li>une tactique et une formation, des cadres surtout, pitoyables : pendant que les Allemands cherchaient à combiner les différentes armes dans une même offensive, les saint-cyriens n’apprenaient même pas ce qu’était un avion ou un tank (interview accablante de Jean-Louis Crémieux-Brilhac) ;</li>
<li>une mécanisation peut-être insuffisante (une grosse partie de l’armée allemande fonctionne encore aussi avec des chevaux pourtant !), en tout cas très mal répartie et pas concentrée comme en face (pour les <em>panzers</em> comme en l’air) ;</li>
<li>l’utilisation beaucoup trop limitée de la radio ;</li>
<li>une DCA bien trop faible (voir <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1#c1002">le point 3 de ce commentaire d’un spécialiste</a>) ;</li>
<li>une ligne Maginot surprotégée, qui a effectivement tenue là où elle était attaquée, mais avec le trou béant des Ardennes.</li>
</ul>
<p>La France partait également avec moins d’alliés qu’en 1914 : la défaite de 1940 a été aussi la conséquence des très mauvais calculs de Staline (pacte germano-soviétique) et du gouvernement belge (neutralité proclamée en 1936, trop tard pour prolonger la ligne Maginot). On pourrait remonter plus loin (<em>appeasement</em> anglais, lâchage à Munich de la Tchécoslovaquie, l’autre allié de revers…).</p>
<p>Les Allemands n’étaient pas non plus sans faiblesses :</p>
<ul>
<li>leur réarmement était plus ancien que celui des Français mais n’allait pas sans quelques problèmes et il mettait en danger l’économie du Reich ;</li>
<li>le blocus maritime allié n’était pas compensé par l’apport soviétique suite au Pacte, ni ne contrebalançait l’aide matérielle américaine aux Alliés (déjà) ;</li>
<li>la Wehrmacht a souffert de la campagne de Pologne qui n’a pas été une promenade si facile que cela (un article cite un quart des blindés hors service).</li>
</ul>
<p>Bref le facteur temps jouait contre le Reich. Tous les dirigeants le savaient, d’où l’audace militaire allemande, et l’apparent immobilisme allié.</p>
<p>Gamelin porte une lourde responsabilité dans le drame : s’il n’était pas incompétent, il a commis plusieurs grosses boulettes :</p>
<ul>
<li>ne pas s’en tenir à sa propre doctrine : au lieu de verrouiller le territoire, il envoie des troupes à l’offensive en direction des Pays-Bas… se privant des réserves qui auraient pu stopper le coup de faux parti des Ardennes ;</li>
<li>être ainsi tombé dans le piège de von Manstein ;</li>
<li>bien plus tôt, en 1936, avoir torpillé toute vélléité du gouvernement de rentrer en Rhénanie au moment où Hitler la remilitarisait, ce qui aurait pu changer bien des choses...</li>
</ul>
<p>En résumé, la victoire allemande n’était pas inéluctable, même si les Allemands avaient beaucoup d’atout et ont eu beaucoup de chance. Mettre la défaite sur le dos de la IIIè République (qui était déjà passée à deux doigts d’une première raclée en 1914, au moment du miracle de la Marne) ou de la société française entière est abusif.</p>
<p>Une révélation (pour moi) a été d’apprendre que le <em>Blitzkrieg</em> n’avait rien d’une théorie bien établie : l’économie allemande se préparait à une guerre longue ; von Manstein a eu du mal à faire accepter son audacieux plan ; Guderian et Rommel ont désobéi et foncé plus loin que prévu. La Wehrmacht n’avait précédemment affronté que des ennemis bien plus faibles, et la suite (Angleterre et surtout Russie) a montré la limite de cette stratégie généralisée. Le <em>Blietzkrieg</em>, stratégie au final très risquée, serait d’abord « un acte de désespoir du niveau opérationel pour sortir d’une situation désespérée au niveau stratégique ». Le Reich s’est au final usé en Russie et à l’ouest a été broyé par la lente et inexorable logistique américaine. (En Tunisie en 1943, le britannique Alexander désespérait de la valeur des Américains, encore novices.)</p>
<p>L’interview de Jean-Louis Crémieux-Brilhac sur la naissance de la France libre est instructive : de Gaulle a été accueilli à bras ouverts par Churchill qui espérait qu’il persuaderait le gouvernement Reynaud de continuer la lutte avec l’Empire ; les gens qui l’ont rejoint étaient souvent tout au début « des Bretons, quelques Juifs et des aristocrates ».</p>
<p>On trouvera aussi un article sur l’arrivée des Allemands dans Paris, ville ouverte, et l’atmosphère qui y règne ; sur la faillite des politiques britanniques, qui n’ont pas fait mieux jusqu’à ce que Churchill reprenne les choses en main.</p>
<p>Bref, un numéro passionnant.</p>
<blockquote><p>”<em>Young man, study history, study history. In history lies all the secrets of the state craft.</em>”<br /> <br />« Jeune homme, étudiez l’histoire, étudiez l’histoire. C’est dans l’histoire que résident tous les secrets de l’art de gouverner. »<br /> <br />Winston Churchill à James C. Humes, 29 mai 1953, <br />cité dans <em>Winston Churchill</em> (de J.C. Humes), Author’s Acknowledgment</p></blockquote>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-Histoire-sp%C3%A9cial-d-avril-2010-France-1940-autopsie-d-une-d%C3%A9faite#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/606Plus d’histoire en terminaleurn:md5:fece58e2cad69f31836d0e4282b622aa2009-12-11T21:46:00+01:002009-12-11T21:47:02+01:00ChristopheRes publicaabominationAllemagneapocalypseautodestructionbon senscatastrophecitationcivilisationcommunicationconquête de l’inutilecoup basculturecynismedécadencedémocratiedéshumanisationenfantsenseignementexpertisefoutage de gueulegéographiegéopolitiquehistoireincohérenceintelligencelibertémèmemémoirenationalismeouverture d’espritpanurgismeperspectivepessimismepolitiqueprovocationSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeéconomie de l’attention <p>Dans le cadre de l’hallucinant débat sur la consternante proposition de supprimer l’histoire-géo en terminale :</p>
<blockquote><p><em>Those who cannot remember the past are condemned to repeat it.</em><br /> <br />Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter. <br /> <br /><a href="http://en.wikiquote.org/wiki/George_Santayana" hreflang="en">George Santayana</a>, <em><a href="http://www.gutenberg.org/files/15000/15000-h/vol1.html" hreflang="en">The Life of Reason</a></em>.</p></blockquote>
<p>J’avais trouvé cette citation très connue en en-tête de <em><a href="http://www.amazon.fr/Rise-Fall-Third-Reich-History/dp/0671728687/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=english-books&qid=1260563359&sr=1-2en">Rise and fall of the Third Reich</a></em> (<em>Le Troisième Reich : Des origines à la chute </em>) de William L. Shirer.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Plus-d-histoire-en-terminale#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/595« Le fantôme de Staline » de Vladimir Fédorovskiurn:md5:b9af76e6a22197838d5c8519c19d10b42009-03-16T00:00:00+01:002023-12-27T12:01:32+01:00ChristopheHistoireabominationcommunismecynismedécadencedémocratiedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnagefichageguerreGuerre Froidegéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmanipulationmythenationalismeparadoxepolitiquepsychologieRealpolitikRussieSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Ce n’est pas un roman, « juste » un livre d’histoire sur la Russie et l’URSS, de Lénine à Vladimir Poutine. <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vladimir_Fédorovski">Vladimir Fédorovski</a> sait de quoi il parle, il était du sérail sous Brejnev et Gorbatchev.</p> <p>Les deux tiers du livre traitent de <a href="http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/leadership/disk/russie2_index.htm">Staline</a>, maître du pays de 1924 à 1953, du pouvoir totalitaire, de la terreur, héritée de Lénine et amplifiée, qu’il infligea à son peuple — deux fois (déjà avant la guerre, puis à nouveau celle-ci terminée : la sanglante Seconde Guerre Mondiale paraît paradoxalement une époque de liberté pour les Soviétiques !), et de la permanence de certaines tendances de l’histoire russe, notamment le besoin d’un pouvoir central fort.</p>
<p>Le parallèle entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ivan_le_Terrible">Ivan le Terrible</a> et Staline ne date pas d’hier : le Tsar Rouge lui-même voyait dans la lutte impitoyable d’Ivan IV contre les boyards le parallèle avec son propre besoin d’éliminer toute opposition — jusqu’à l’absurde, jusque dans sa propre famille ! La mécanique de terreur stalinienne, basée sur l’espionnage généralisé, la responsabilité collective, le changement permanent de la Ligne, est bien démontée.</p>
<p>Quasiment en aparté, Fédorovski parle de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Boris_Pasternak">Boris Pasternak</a>, Prix Nobel de littérature 1958 et connu en Occident notamment pour le <em>Docteur Jivago</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> — on saura tout sur les amours du poète, et notamment <em>qui</em> est Lara. Bizarrement, Pasternak a été plutôt protégé par Staline.</p>
<p>Même si Poutine partage la couverture avec son sinistre prédécesseur, il n’est question de lui qu’à la toute fin du livre, après que Fédorovski ait déroulé la manière dont le système totalitaire soviétique (sous une forme bien moins sanglante) s’est perpétué sous Khroutchev, Brejnev, Andropov, comment il a tenté de se réformer sans lâcher son emprise, comment il a échoué. Remarquable aussi la manière dont les services secrets (outil sous Staline, entité autonome sous Andropov, quasiment indépendante par la suite) se sont retrouvés les seuls en mesure de reprendre le contrôle d’une Russie en décomposition, que Gorbatchev et Eltsine ont laissé être dépecée par des groupes financiers et mafieux.</p>
<p>Vladimir Poutine — un inconnu au départ, choisi par un Eltsine finissant comme héritier pour garantir la survie de son clan — faisait partie de l’élite de la Russie soviétique, destinée forcément au KGB. Ses contacts lui ont permis de reprendre le contrôle de son pays, et de surfer entre les différents clans qui se le partagent. Comme Staline, il sait parler à la fameuse « âme » de la Russie, à son nationalisme, son besoin de grandeur, son impression d’être différente, ni européenne ni asiatique. Comme Staline, les dérives sont effrayantes.</p>
<p>Un grand résumé d’histoire russe du XXè siècle, très accessible.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Je n’ai pas (encore) lu le livre mais vous </em>devez<em> voir le film si ce n’est déjà fait. Une bonne impression du chaos de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_civile_russe">Guerre civile de 1918-21</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/541« Der Spiegel » du 19 janvier 2009 : Marienburg la martyre ; de Berlin à la Norvège ; argent pas cher ; tsunami vert au Brésil ; régulation de gènes ; A320 à la baille ; le temps de la radicalitéurn:md5:c872227ca4228d131518394969bf9d2f2009-02-14T18:53:00+01:002011-06-03T07:47:17+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagneAmériqueauto-organisationdysfonctionnementenfantsenseignementesclavageEuropeguerrehainelangueslivres lusmétainformationoptimismeperspectivepessimismepolitiqueRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarismevaleurécologieéconomieéconomies d’énergieéducationÉtats-Unisévolution<p>Entre moults articles sur la chancelière, les malheurs de la Deutsche Bank, et les faits divers, surnargent quelques articles qui m’ont marqué de cet hebdomadaire allemand.</p> <p>Je ne lis pas très souvent le <em>Spiegel</em> pour deux raisons : 1) mon manque de temps chronique et 2) cet hebdomadaire de référence allemand est paradoxalement difficile à trouver dans les maisons de la presse de la banlieue strasbourgeoise — au contraire hélas des équivalents de <em>Point de vue - Images du monde</em> que la ménagère alsacienne de plus de quatre-vingt ans semble apprécier. J’ai acheté ce numéro lors d’un passage à Offenburg (paradoxalement à peine plus loin en temps que Strasbourg, malgré le tram !)</p>
<p>Entre moults articles sur la chancelière, les malheurs de la Deutsche Bank, et les faits divers, surnargent quelques articles qui m’ont marqué :</p>
<h3>Le charnier de Marienburg</h3>
<p>Ce Marienburg n’existe plus depuis 1945. L’ancienne capitale des Chevaliers Teutoniques a été quasiment rasée lors de l’invasion de l’Armée Rouge, et est depuis polonaise. La plupart des habitants ont été évacués mais au final des milliers manquent à l’appel. En octobre dernier, des travaux ont mis une fosse commune contenant les restes d’environ 1800 civils, femmes et enfants inclus, dépouillés de leurs vêtements.</p>
<p>Victimes des combats sorties des maisons bombardées ? Victimes des épidémies et famines de la fin de la guerre, dans une Allemagne plongée dans le chaos et traitée sans ménagement par les Soviétiques ? Victimes de l’épuration ethnique, par l’Armée Rouge ou les Polonais ? L’article n’a pas la réponse.</p>
<p>Le terrible sort de l’Allemagne orientale est relativement peu connu chez nous, mais a traumatisé les Allemands. Ce que Rommel, <a href="http://resistanceallemande.online.fr/20-07-1944/20-07-1944.htm">von Stauffenberg</a>, <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow" hreflang="de">von Tresckow</a> et d’autres ont voulu épargner à leur peuple est arrivé : les derniers mois de la guerre ont été les plus meurtriers pour l’Allemagne, et seule une partie est imputable aux bombardements aériens (qui n’ont fait que s’intensifier sur la fin de la guerre, Dresde n’étant que l’exemple le plus connu) ; des millions de civils ont été déplacés ; le Reich a perdu des terres occupées depuis des siècles. La lecture des premiers chapitres de <em><a href="http://www.conflits-actuels.com/spip.php?article369">la Chute de Berlin</a></em> d’Anthony Beevor éclaire bien le comportement des Soviétiques, poussés par leur propagande à la vengeance. Les civils allemands ont lourdement payé les exactions des SS et de la Wehrmacht en Russie.</p>
<p>Voir les pages du Wikipédia allemand sur <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Malbork" hreflang="de">Marienburg</a>, et <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Massengrab_von_Marienburg" hreflang="de">sur le charnier</a>.</p>
<h3>L’anglais au primaire</h3>
<p>Une page s’étend sur l’effet de l’enseignement de l’anglais à la <em>Grundschule</em> : par manque de suivi, de formation, de contrôles, de séparation des filières... l’effet de l’enseignement précoce de l’anglais est indétectable quelques années plus tard par rapport à l’enseignement « classique » plus tardif.</p>
<p>(<strong>Ajout postérieur</strong> : ça colle avec l’expérience de ma mère, dont les élèves de 6è faisaient tous les même programme par la logique de l’Éducation Nationale, même s’ils avaient fait de l’anglais en primaire ; et après quelques mois il n’y avait plus de différence de niveau.)</p>
<p>(Pour ma part, je reste persuadé qu’un enseignement précoce doit plutôt viser une langue difficile : l’allemand, le chinois... et en tout cas être soutenu tout le long de la scolarité.)</p>
<h3>De Berlin à la Norvège</h3>
<p>Une page est dédiée à un recruteur norvégien qui vit un drame professionnel assez enviable : avec un taux de chômage de 2% en Norvège, impossible de recruter ! M. Engeset s’est alors établi à Berlin et envoie des Allemands travailler en Norvège. La tendance est en hausse. Tout le monde est content, mais Engeset prévient que l’émigration n’est pas la vraie solution pour laisser derrière soi ses problèmes : „<em>Es gibt keinen Zurück-auf-Start-Knopf.</em>“</p>
<h3>L’argent pas cher</h3>
<p>Trois pages s’intéressent à la crise bancaire, ornées d’une photo de Jean-Claude Trichet et Ben Bernanke, l’air très anxieux. En résumé, la crise est en bonne partie due à l’argent lâché par les banques centrales trop facilement contre des garanties trop légères. En 1929, c’était pareil, et la restriction brutale du crédit à l’époque avait aggravé le problème. Les banques centrales de 2008 n’ont pas voulu rééditer l’erreur et... ouvert encore plus les vannes. Mais « réduire à nouveau la masse d’argent en circulation est aussi facile que remettre du dentifrice dans son tube. »</p>
<p>Un des moyens de résoudre le problème, et réduire les dettes de l’État au passage, consisterait à faire tourner la planche à billets, bref à générer de l’inflation. Les excès d’une telle politique <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Deutsche_Inflation_1914_bis_1923" hreflang="de">ont traumatisé les Allemands en 1920-1923</a> (division de la valeur du mark par un billion). La Bundesbank a pendant des années suivi une politique inverse de monnaie forte, qui se retrouve dans celle de la Banque Centrale européenne actuelle. Mais la conjoncture actuelle, comme l’interdépendance croissante des économies et l’impact d’une monnaie trop forte sur les exportations, rend délicate une politique trop stricte.</p>
<p>Troisième politique possible : un retour au bon vieil étalon-or du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Accords_de_Bretton_Woods">système de Bretton-Woods de 1944</a>, organisé autour du dollar et de l’or. Le cours de l’or exploserait d’un facteur 40...</p>
<p>Conclusion fataliste : le capitalisme semble condamné à une ou deux crises majeures par siècle. Mais les autres systèmes sont-ils capables de mieux ?</p>
<h3>Le tsunami vert</h3>
<p>Quatre pages parlent des cultures d’éthanol dans le Nordeste brésilien et du véritable esclavage qui y sévit. Le pays veut devenir le plus grand fournisseur de carburant à base d’éthanol grâce à sa canne à sucre, et les paysans locaux en payent le prix — on parle de Zola au XXIè siècle.</p>
<p>Le seul reproche que je fais à l’article est de jeter le bébé avec l’eau du bain. Ce n’est pas parce que les grands propriétaires du Nordeste se comportent en féodaux que les agrocarburants sont intrinsèquement mauvais, et les réserves de principe écologiques (engrais, concurrence avec l’agriculture de subsistance...) ne disparaîtraient pas même si les ouvriers étaient payés comme des princes avec 60 jours de RTT. Les problèmes écologiques et sociaux sont complètement orthogonaux.</p>
<h3>Génétique</h3>
<p>Quelques pages sympathiques sur Darwin. Dont une révélation pour moi (qui ne suit pas si près que ça l’actualité de la génétique), on aurait enfin compris à quoi sert tout le bazar non codant de notre ADN : ce serait du code de régulation de l’activité des protéines. Nous avons moins de gènes que la souris, et pas beaucoup plus que l’anémone de mer, mais un nombre record de <a href="http://www.snfge.asso.fr/01-Bibliotheque/0A-Resumes-JFPD/2008/2959.htm">miARN</a> de contrôle. Un savant a repéré une poignée d’emplacements identiques du poulet au chimpanzé, mais différents chez nous...</p>
<h3>Un A320 dans l’Hudson</h3>
<p>Trois pages sur le petit miracle de l’Hudson : le commandant de bord Sullenberg était vraiment l’homme de la situation avec une expérience énorme, y compris sur planeur et en voltige aérienne. En perspective, la compétition croissante pour l’air entre oiseaux (parfois protégés et plus nombreux) et avions (de plus en plus silencieux...).</p>
<h3>Le temps de la radicalité</h3>
<p>En final, une interview de Thomas Friedman, du <em>New York Times</em>, partisan d’Obama, de réformes radicales vertes en résistant aux lobbys. Il pointe que « la crise climatique n’est pas un problème de régulation, mais d’innovation ». « Ce dont nous avons besoin, c’est d’ingénieurs. » Les Américains doivent être à la pointe de la révolution verte. Pourvu qu’il soit écouté...</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/02/14/%C2%AB%C2%A0Der-Spiegel-%C2%BB%C2%A0du-19-janvier-2009-%3A-Marienburg-la-martyre-%3B-de-Berlin-%C3%A0-la-Norv%C3%A8ge-%3B#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/534« Ce que savaient les Alliés » de Christian Destremau (1)urn:md5:fe15c8b0055ea222325553532b04c5322009-01-14T00:00:00+01:002011-06-02T18:27:42+02:00ChristopheHistoireAllemagneAmériquebombe atomiquecolonisationcommunismecynismeespionnageEuropeguerreGuerre Froidegéopolitiquehistoireimpérialismeinformatiquelivres lusmanipulationorganisationparadoxeparanoïaperspectivepolitiquepsychologieracléeRealpolitikSeconde Guerre MondialespéculationÉtats-Unis<p>Le titre est trompeur (le sous-titre « Ont-ils pris les bonnes décisions ? » aussi ) : ce très intéressant livre ne traite pas de l’ensemble des données de renseignement connues de Churchill, Roosevelt et Staline, mais seulement de ce que les Anglo-Saxons ont pu apprendre par la meilleure de leur source : l’espionnage des communications radio ennemies.</p>
<p>Ce n’en est pas non plus l’histoire, mais un résumé de ce que l’auteur a pu dénicher dans les diverses archives et par comparaison avec les archives diplomatiques (tout ne fut pas intercepté, et ces lacunes ont leur importance !).</p> <p>Il n’a été révélé que bien après la guerre que les Britanniques étaient, à partir de 1941, capables de décoder l’essentiel des messages cryptés allemands, même ceux codés avec la fameuse machine <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Enigma_(machine)">Enigma</a>. <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_Turing">Alan Turing</a> en tête, une équipe de Bletchley Park suait pour que Churchill en personne lise les messages d’Hitler à ses généraux avant même les destinataires (et au passage cette équipe inventait l’informatique).</p>
<p>De même, les Américains étaient capables de décoder à peu près tout ce que les Japonais envoyaient sur les ondes avant même leur entrée en guerre.</p>
<p>Par contre, quand les Allemands recouraient au courrier papier ou au téléphone, l’écoute était impossible.</p>
<p>L’utilisation des renseignements différaient assez nettement : les Anglais craignaient en permanence de trahir leur source, au point de ne <em>pas</em> utiliser les renseignements ! Si les Allemands s’étaient aperçu que leur code était éventé, ils en auraient changé, et rendu les Alliés aveugles.</p>
<p>À l’inverse, les Américains considéraient que les renseignements devaient être utilisés, et ne s’en sont pas privés. (<em>Commentaire personnel : les Anglais considéraient peut-être avoir beaucoup moins de marges de manœuvre que les Américains.</em>)</p>
<p>Une des révélations du livre pour moi porte justement sur l’utilisation de ces renseignements : le risque pour celui qui écoute est de trop <em>réagir</em> à ce qu’il entend, à trop tenter deviner les buts immédiats de l’ennemi, au risque de se faire intoxiquer et manipuler, ou de se noyer dans les jeux entre les différentes factions au sein des autorités adverses. Mieux vaut suivre une stratégie claire et n’en pas dévier (ce qui est plutôt la technique américaine) : c’est flagrant au moment des ultimes tentatives de négociations lors des agonies du IIIè Reich ou de l’Empire japonais.</p>
<p>Destremau insiste aussi beaucoup sur les multiples différences d’interprétations des divers hauts gradés et politiques au courant des décryptages. Entre Churchill, qui lisait les données « brutes » et certains adjoints, les analyses différaient parfois nettement. Entre alliés, voire entre services, l’échange d’informations n’était pas dénué d’arrière-pensées.</p>
<p>L’importance des messages <em>Ultra</em> dans le déroulement de la guerre a été capital, certains parlent d’années de guerre économisées. Il faut garder à l’esprit qu’à côté des échanges de haut niveau (ambassadeurs, généraux nazis...), les messages décodés livraient une foule d’informations tactiques très utiles pour la menée quotidienne des opérations (et parfois par la bande : les informations de Churchill sur les unités russes venaient des Allemands et se tarirent avec leur chute).</p>
<p>Christian Destremau découpe son livre en plusieurs chapitres dédiés à diverses phases de la guerre : Barbarossa, Pearl Harbor, le double jeu de Vichy, la Solution finale, l’assassinat éventuel d’Hitler, les bombardements sur l’Allemagne, l’agonie du Reich, la bombe atomique et la capitulation japonaise.</p>
<h3>Webographie succinte</h3>
<p>On pourra lire d’autres critiques sur le web :</p>
<p><a href="http://www.revue-lebanquet.com/docs/c_0001407.html?qid=sdx_q0">Sur le site de la revue </a><em><a href="http://www.revue-lebanquet.com/docs/c_0001407.html?qid=sdx_q0">Le Banquet</a></em></p>
<p><a href="http://www.histoforum.org/histobiblio/article.php3?id_article=549">Sur Histoforum</a></p>
<p>Et dans les prochains billets ici :</p>
<p>1-Résumé<br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-1-%3A-Barbarossa">2-Barbarossa</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-3-%3A-Pearl-Harbor">3-Pearl Harbor</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-4-%3A-Vichy">4-Vichy</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-5-%3A-La-solution-finale">5-La solution finale</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-6-%3A-Lassassinat-de-Hitler">6-L’assassinat de Hitler</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-6-%3A-Le-bombardement-de-lAllemagne">7-Le bombardement de l’Allemagne</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-8-%3A-Lagonie-du-Reich">8-L’agonie du Reich</a><br />
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-9-%3A-La-bombe-atomique">9-La bombe atomique</a></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/493« Delphes » de Philippe Navarrourn:md5:abea13d109499d5924670ee3d4c299da2008-12-02T00:00:00+01:002011-06-02T13:44:47+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiescommunicationconquête spatialedysfonctionnementEuropehard sciencehistoireintelligenceintelligence artificielleJupitermythereligionrobotsscience-fictionSeconde Guerre Mondialeémerveillement<p>De la bonne SF canadienne : un historien du futur se retrouve à écouter la BBC de 1940 en direct... mais ça ne colle pas !</p> <p>Ce livre canadien débute à la fois comme <em>2001, l’Odyssée de l’espace</em> et <em>Alien</em> : les personnages se réveillent d’hibernation dans leur astronef en plein espace, et au chapitre suivant ils sont sur la Lune. Si le parallèle avec <em>Alien</em> s’arrête là, il s’avère qu’une connaissance du « mythe halien » est quasiment un pré-requis à <em>Delphes</em> : l’ordinateur de bord s’appelle <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/HAL_9000">HAL</a> comme dans <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/2001_:_l'odyssée_de_l'espace">2001</a></em>, et il est aussi loquace et parfois inquiétant que son homonyme. Ce n’est pas une clé masquée, le parallèle est explicite.</p>
<p>Mille ans dans notre futur, l’humanité peut voyager à des centaines d’années-lumières, sans avoir vraiment essaimé au-delà du Système solaire. Elle cohabite avec les Intelligences artificielles. Toutefois, après la Seconde Venue du Christ et le Second Moyen Âge, l’Église possède toujours un poids énorme, la science est sous contrôle.</p>
<p>Paul Kass est historien, et sa spécialité est le XXè siècle. Peu de documents de cette époque lui sont parvenus, et le grand projet de sa vie, <em>Historia</em>, a consisté à aller chercher les émissions de la BBC d’époque là où elles sont, c’est-à-dire à mille années-lumières. Après quelques années, <em>Historia</em> se met soudain à dériver par rapport à l’histoire connue : l’Allemagne n’attaque pas en mai 1940 ! Paul part avec trois équipiers vérifier ses lointains interféromètres.</p>
<p>Les deux derniers tiers du livre se rapportent à ce huis-clos entre une poignée de personnages bloqués pendant des mois dans leur vaisseau spatial, face à un phénomène mal compris. Suspicion, chocs des caractères, vieilles rancœurs historiques, sectarisme religieux, méfiance envers les Intelligences, doutes sur ce qu’est réellement l’Histoire, officielle ou non, les manipulations... un joli cocktail !</p>
<p>Par rapport aux personnages, le lecteur a la supériorité de connaître le déroulement réel de l’Histoire du XXè siècle. D’où vient l’écart ? Dans le déroulement de l’histoire selon Kass, la Seconde Guerre Mondiale est un nœud vital : a-t-elle eu lieu ?</p>
<p>Comme dans tout bon livre, et surtout en <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Hard_science-fiction">hard science</a></em>, l’intérêt réside dans le monde autant sinon plus que dans l’intrigue. Le monde de <em>Delphes</em> est cohérent, même si par certains côtés il ressemble trop à ce qu’on pourrait imaginer ce que serait notre an 2100, alors que des siècles et des bouleversements énormes sont évoqués. Manifestement Navarro a un peu les mêmes lectures que moi, c’est flagrant quant aux « transbordeurs Aldrin »<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/30/Delphes-de-Philippe-Navarro#pnote-497-1" id="rev-pnote-497-1">1</a>]</sup>, ces stations non propulsées qui suivraient la gravitation entre la Terre et Mars, et dont je n’ai retrouvé l’idée nulle part ailleurs auparavant.</p>
<p>Les personnages sont bien étudiés, et psychologiquement cohérents : l’historien autiste, le scientifique génial camé, la navigatrice néo-européenne... Pas de pyrotechnie (ou si peu), juste de la réflexion et l’intelligence. Rien à voir avec le formatage hollywoodien qui m’énerve si souvent.</p>
<p>Des reproches pour le principe : d’abord la fin est assez confuse (car complexe ; même si l’habitué du genre devine d’entrée les causes possibles de la divergence historique, ce n’est pas aussi simple). Il y a quelques coquilles pénibles dans le livre (c’est un petit éditeur). Le vocabulaire se relâche un rien par moments, sans que je sache faire la part entre le décalage de mille ans de l’action ou celui d’un continent de l’auteur.</p>
<p>Entre autres critiques louangeuses, deux illustres compatriotes de Navarro ont dit :</p>
<blockquote><p>« Je dirais même que c'est le meilleur nouveau roman de science-fiction du siècle au Québec. » (<a href="http://culturedesfuturs.blogspot.com/">Jean-Louis Trudel</a>, sur SFFranco)</p></blockquote>
<p>et :</p>
<blockquote><p>«Je préviens toutefois, dans <a href="http://www.revue-solaris.com/numero/2006/159.htm">ma critique</a> et ici, qu'il s'agit d’un premier roman, avec des lacunes sur le plan littéraire qui m’ont fait grincer des dents à plusieurs endroits. Attention aux attentes trop élevées donc. Personnellement je l'ai classé dans la catégorie des curiosités fascinantes, plus que dans celle des œuvres littéraires abouties. » (<a href="http://sf.emse.fr/AUTHORS/JCHAMP/jc.html">Joël Champetier</a>, <em>ibid.</em>)</p></blockquote>
<p><a href="http://www.fractale-framboise.com/2006/12/lectures-de-novembre/">Sur ''Fractale Framboise'', Christian Sauvé est plus dubitatif</a> (le monsieur est exigeant).</p>
<p>En tout cas, un excellent livre de SF, lisible même par les non-fans du genre (prévoir de (re)voir <em>2001</em> auparavant pour ne pas manquer quelques répliques cultes), qui tient en haleine du début à la fin.</p>
<p><a href="http://patwhite.com/node/856">Ce sera peut-être une trilogie</a>, on verra bien...</p>
<p>(Acheter le livre depuis la France n’a pas été simple. Il semble qu’à présent <a href="http://www.editionssylvainharvey.com/catalogue.html">l’éditeur québécois permette l’achat en ligne</a> ; à l’époque j’ai dû passer par <a href="http://www.amazon.ca/s/ref=nb_ss_gw?url=search-alias%3Daps&field-keywords=delphes+philippe+navarro">Amazon.ca</a>. La <a href="http://www.librairieduquebec.fr/">Librairie du Québec</a> à Paris ne l’a pas dans sa base, mais peut-être suffit-il d’un coup de fil ? )</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/30/Delphes-de-Philippe-Navarro#rev-pnote-497-1" id="pnote-497-1">1</a>] <em><a href="http://www.sciam.com/article.cfm?id=a-bus-between-the-planets">Article en VO dans le </a></em><a href="http://www.sciam.com/article.cfm?id=a-bus-between-the-planets">Scientific American</a><em><a href="http://www.sciam.com/article.cfm?id=a-bus-between-the-planets" hreflang="en"> de mars 2000</a>, sinon c’est dans </em>Pour la Science<em> n°271 de mai 2000. Pour une fois que le CD-ROM des archives de la revue me sert...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/30/Delphes-de-Philippe-Navarro#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/497“The Plot Against America” (« Le complot contre l’Amérique ») de Philip Rothurn:md5:743b254023a90b67e72f8a58a6b83ef52008-01-01T17:33:00+00:002011-05-23T20:36:53+00:00ChristopheSur mes étagères alourdiesdémocratieespionnagehistoirelivres luspolitiqueSeconde Guerre MondialetotalitarismeuchronieÉtats-Unis<p>Il semble qu’à chaque Noël je me retrouve avec une uchronie en VO américaine sur ma table de chevet. Je ne le fais même pas exprès. Après <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/01/03/61-resurrection-day">Resurrection Day</a></em> de Brendan DuBois sur une Amérique sous une dictature après une Troisième Guerre Mondiale en 1962, après <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/01/01/h/blogeclectique/index.php?post/2007/01/20/304-in-the-presence-of-mine-enemies-de-harry-turtledove">In The Presence Of Mine Enemies</a></em> d’Harry Turtledove sur des Juifs cachés dans l’Allemagne nazie hégémonique des années 1980, cette année ce fut <em>The Plot Against America</em> de Philip Roth, basé sur une hypothétique élection de Lindbergh comme Président en 1940. Le livre a eu son succès et est traduit en français (<em>Le complot contre l’Amérique</em>).</p> <p>Rappelons que <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Charles_Lindbergh" hreflang="en">Charles A. Lindbergh</a> a été, en 1927, le premier aviateur à franchir l’Atlantique sans y laisser sa peau, et il continua à faire parler de lui par la suite : son fils perdit la vie dans un enlèvement crapuleux ; ses discours isolationistes et antisémites (“<em>America First</em>”), son admiration pour l’Allemagne hitlérienne eurent un certain écho mais ruinèrent sa réputation auprès de beaucoup de gens ; puis il participa à l’effort de guerre comme consultant technique et instructeur dans l’aviation.</p>
<p>Cependant, au sortir de la crise de 1929, le refus de nombre d’Américains d’entrer en guerre était réel (Roosevelt a eu fort à faire pour pouvoir soutenir les Anglais avant Pearl Harbor) et l’antisémitisme (même en version <em>light</em> par rapport à Hitler) était répandu aux États-Unis comme en Europe. Roth n’est pas le premier à imaginer que ces tendances isolationistes aient pris le dessus. Ajoutons une petite machination (<em>the plot</em>), et Lindbergh bat Roosevelt pour devenir Président en 1940.</p>
<p>Le point de vue du livre se situe à un niveau trop « ras des pâquerettes » pour plaire à l’amateur d’uchronie : Philip Roth lui-même, enfant de dix ans d’une modeste famille juive d’un quartier juif de Newark. Le parti pris se défend, de décrire l’évolution de la situation et de l’ambiance « de la base ». Il est dommage que des pages soient gaspillées aux angoisses existentielles d’un petit garçon ; on pourra les sauter allègrement. Plus intéressants sont les autres membres de la famille, notamment le père de Roth, un homme très droit, très instruit de la situation internationale, qui s’effondre petit à petit devant l’avancée progressive des amis de Lindbergh voire de l’Allemagne — y compris dans sa propre famille — mais se refuse à émigrer comme d’autres au Canada. Roth s’attache également beaucoup à la vie du quartier (très majoritairement juif, ce qui déplaît à la nouvelle administration qui cherche à en disperser la population), aux voisins, aux autres Américains (très loin de représenter des masses d’antisémites aigris). Se pose au passage la question du communautarisme : doit-on laisser vivre « entre eux » des membres d’une même communauté, ou les forcer à se mélanger à la population, sachant que l’isolation est le meilleur moyen d’entretenir les fantasmes et les haines, mais qu’un lieu propre, comme ce quartier juif de Newark, représente un havre de paix contre l’extérieur hostile ou, tout simplement, « chez soi ». Vaste sujet que l’intégration, et différent de toute manière d’une situation à l’autre.</p>
<p>On ne trouvera finalement pas beaucoup de modifications de la trame historique. Lindbergh élu, le sort du monde ne change finalement pas tant que ça, alors que le soutien américain en 1940-41 aux Britanniques puis aux Soviétiques, et la remise à niveau de la machine de guerre américaine, ont en réalité joué un rôle capital avant même l’entrée en guerre formelle des États-Unis en décembre 1941. On peut craindre le pire sur ce qui serait arrivé sans ce soutien américain pendant les deux années de l’apogée nazie. Comme uchronie, le livre possède là une faille réelle.</p>
<p>Cependant, pour la partie politique intérieure, du moins pour ce que je peux en juger, Roth reste relativement réaliste, et Lindbergh ne transforme pas les États-Unis en dictature nazie en six mois. La manière très plausible dont le régime de Lindbergh se met en place et se maintient, les arguments pour sa neutralité bienveillante envers le IIIè Reich, sont matière à réflexion. <a href="http://bulles.agora.eu.org/20060811_philip_roth.html">Comme le dit François Schreuer à propos du même livre</a>, « avant qu’il n’ait montré son vrai visage, le fascisme a toujours tendance — au nom peut-être du bons sens populaire qu’il prétend incarner — à bénéficier d’un crédit, même chez ses propres victimes. »</p>
<p>Quant à la fin, qui donne des rôles très importants à des personnages publics de l’époque, je ne sais pas trop quoi en penser, mais elle est du moins défendable. Il manque cependant un véritable épilogue.</p>
<p>Bref, un livre intéressant avec quelques défauts. Google trouvera sur le réseau une flopée d’autres critiques avec le titre, en français comme en anglais, en mot clé.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/01/01/460-the-plot-against-america-de-philip-roth#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/414« Comme des lions : le sacrifice héroïque de l’armée française - Mai-juin 1940 » de Dominique Lormier (4)urn:md5:b6dc894fe932328ff0291a07fe75a5292007-11-21T20:47:00+00:002011-05-11T20:17:31+00:00ChristopheHistoireguerrehistoireHistoire de FrancemémoireracléeSeconde Guerre Mondialeuchronie<p>Le commandement français a totalement failli, les politiques ont été nuls : la France était culturellement incapable de chercher la victoire.</p> <h3>Le commandement</h3>
<p>Il est connu et très vrai que le commandement français est tout à fait prêt à rejouer la guerre de 1914-18, à savoir une guerre très statique, essentiellement défensive, d’attrition. Cette erreur stratégique et le déroulement désastreux des opérations révèlent des problèmes structurels de la hiérarchie militaire.</p>
<ul>
<li><strong>Gamelin</strong>, le général en chef français, a monté trop vite en grade et connaît trop peu la troupe. Ses qualités diplomatiques le font apprécier des politiques, mais il ne sait pas trancher. Son quartier général est trop loin du front, à Vincennes : c’est plus pratique pour la liaison avec le gouvernement, mais une catastrophe du point de vue communications. Les autres généraux français sont également en arrière du front, alors que Guderian et Rommel s’approchent assez près pour entendre siffler les obus, et ont une vision bien plus concrète du front.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les Allemands ayant perdu la Première Guerre Mondiale, et s’étant vu imposer une armée symbolique, <strong>la hiérarchie de la Wehrmacht a été mécaniquement « purgée » de ses anciens cadres, et sérieusement rajeunie</strong>. L’arrivée d’Hitler au pouvoir a renforcé le phénomène. Pendant que de Gaulle piaffe d’impatience et n’est que colonel, les officiers de sa classe d’âge en Allemagne sont aux commandes (Guderian, von Manstein).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>L’unité de commandement alliée n’existe pas</strong>, les Anglais sont autonomes, et les Belges et Néerlandais neutres jusqu’au déclenchement des hostilités. L’autorité de Gamelin sur les différentes armes est relative. En face les Allemands ont un commandement unique, cohérent, et sont devenus champions des opérations combinées (notamment entre blindés et aviation).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Weygand</strong>, remplaçant de Gamelin, se satisfait de sauver l’honneur sur la Somme et l’Aisne, puis verse dans le défaitisme et cesse de commander à mi-juin ! Pour lui, cette guerre était presque un simple épisode supplémentaire après 1870 et 1914-18 ; il ne voyait pas la nouvelle logique totalitaire nazie !</li>
</ul>
<h3>Les politiques</h3>
<p>Lormier ne ménage pas les politiques français, et reprend les analyses de de Gaulle de l’époque : « la France s’enfonce dans une doctrine défensive qui convient aux politiciens médiocres et pacifistes de l’époque, obnubilés par les restrictions budgétaires liées à une situation économique déplorable. »</p>
<p>Ils ne sont pourtant pas tous à mettre dans le même panier, et les raisons de leurs erreurs peuvent parfaitement être rationnelles. Par exemple, Blum se méfie par principe de l’<a href="http://www.charles-de-gaulle.org/article.php3?id_article=295">armée de métier prônée par de Gaulle</a>. <a href="http://www.1939-45.org/articles/frontpop.htm">Ce qui n’empêche pas le Front Populaire de lancer un réarmement massif</a>. Il aurait certes fallu investir plus dans l’aviation que dans la ligne Maginot…</p>
<p>Les idées de de Gaulle, notamment sur la force de frappe des chars, sont approuvées par nombre de personnalités. Mais la tendance massivement pacifiste jusque 1939 est difficile à vaincre.</p>
<p><a href="http://quarante.blog.fr/2007/05/12/i_faillite_francaise~2255638">Ce billet de blog.quarante.fr</a>, passionnant mais trop long à résumer, donne un autre éclairage : en gros, le passage à l’arme blindée offensive dans les mains d’une armée de métier ramassée mais puissante, aurait été susceptible de modifier totalement la politique étrangère de la France. Or, l’idée d’une guerre préventive, qui aurait pourtant pu être justifiable avant 1939, est inconcevable pour des gens qui croient à la <em>der des der</em>.</p>
<p>Les politiques n’ont pas tous démérité dans la débâcle. À Bordeaux, les discussions autour de l’armistice dans le gouvernement de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Reynaud">Paul Reynaud</a> ont été vives. Weygand, et Pétain, et Laval veulent l’armistice contre Reynaud, Herriot ou de Gaulle. Reynaud jette l’éponge et démissionne, et Pétain prend le pouvoir avec les conséquences que l’on sait.</p>
<h3>Les prisonniers</h3>
<p>1,5 millions de Français sont fait prisonniers - les deux tiers après le 18 juin, à cause de la progression foudroyante des Allemands à la fin de la campagne. Lormier accuse Pétain d’avoir ainsi livré un million d’« otages » à Hitler.</p>
<h3>Les erreurs stratégiques</h3>
<p>Lormier évoque l’erreur de Gamelin d’intervenir en Belgique : les meilleurs troupes françaises se retrouvent alors loin de leurs bases et sont piégées par le « coup de faux » des panzers. Mais est-il politiquement réaliste de laisser totalement tomber la Belgique ? Lormier évoque des considérations stratégiques défendables — qui constituent précisément le piège.</p>
<p>En fait, les Français auraient dû attaquer bien plus tôt, par exemple huit mois avant, alors que la Wehrmacht envahit la Pologne et que l’Ouest de l’Allemagne est très mal défendu. Ils n’en font rien, sinon une offensive en Sarre totalement inutile. Hitler a tout le temps de dépecer la Pologne, d’envahir Danemark et Norvège, et de masser ses troupes pour son offensive en Occident ! Huntzinger par exemple était persuadé qu’il n’y aurait pas de combats en 1940.</p>
<p>Gamelin commet sa pire erreur en dispersant ses divisions blindées au lieu de les concentrer sur un point du front pour le percer. Avant le début des combats, Gamelin et certains de ses principaux généraux <em>renforcent</em> encore la ligne Maginot, déjà infranchissable, par des soldats et des chars, alors que l’on sait que le gros de l’armée allemande est ailleurs.</p>
<p><strong>Culturellement, l’armée française n’était pas prête pour quelque offensive que ce soit.</strong></p>
<h3>Le rôle des civils</h3>
<p>Si l’armée française s’est globalement tenue jusqu’à ce que tout soit perdu, les civils en fuite, eux, gênent terriblement les mouvements de troupe alliés en encombrant les routes. Les Allemands en rajoutent, les Stukas bombardant délibérément les colonnes de réfugiés pour augmenter la panique.</p>
<p>Les autorités civiles portent le coup de grâce dans les derniers jours de la guerre, quand tout est perdu. Sous la pression des maires, toutes les grosses communes sont déclarées « ville ouverte » par le gouvernement, ce qui livre les ponts aux Allemands ! Les maires interdisent même aux derniers éléments français toute résistance. (Franchement, je ne leur jette pas la pierre...) À ce moment, Pétain lui-même a annoncé qu’il négocie un armistice, se battre n’a plus de sens.</p>
<p>Comme dit Lormier, « ce n’est pas le soldat français qui a démérité en 1940 ! »</p>
<h3>Continuer la lutte avec l’Empire ?</h3>
<p>L’armistice signé par Pétain sonne le glas des espoirs de ceux qui, de Gaulle en tête, veulent continuer à résister dans le sud, ou avec l’Empire colonial, et aux côtés des Anglais. Une <a href="http://jmguieu.free.fr/Enseignements/Textes unite europeenne/Union franco-britannique.htm">union des deux États</a> avait même été envisagée<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4#pnote-404-1" id="rev-pnote-404-1">1</a>]</sup> !</p>
<p>Lormier concède que, tôt ou tard, malgré des problèmes de ravitaillement et des obstacles ponctuels, les Allemands auraient fini par occuper toute la France, même sans armistice. L’armée français, amputée de ses meilleures troupes et de son matériel lourd, sans stocks ni industrie à l’arrière, malgré la flotte intacte et mille avions, et le soutien des Alliés, n’aurait pas pu tenir tête longtemps au Reich, ni même au seul Afrika Korps. Et toute la France aurait été occupée dès 1940, puis sans doute l’Afrique du Nord.</p>
<p><a href="http://hist-geo.ac-rouen.fr/doc/txt/discours_petain.htm">Pétain s’adresse aux Français à la radio le 17 juin</a>, puis de Gaulle le 18, mais à ce moment ils sont peu nombreux à rejoindre ce dernier. Lormier rapporte avec délectation des paroles d’Hitler ou Kesselring sur la dureté des combats contre les troupes françaises libres en 1942 ou après, à Bir Hakeim ou en Italie. Numériquement faibles, ces troupes ont largement « sauvé l’honneur ».</p>
<p>Lormier rapporte les propos de Guderian sur la faute d’avoir laissé à la France un Empire colonial intact, ce qui lui permet ensuite de tenir une place dans la lutte finale contre l’Allemagne (<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3">et je renvoie au passage de la biographie de Canaris ici chroniquée</a> pour juger du rôle des restes de la France en 1940 sur la politique méditerrannéene d’Hitler).</p>
<h3>Bref</h3>
<p>Un livre passionnant pour quiconque s’intéresse à la Seconde Guerre Mondiale.</p>
<h3><em>Bibliographie</em></h3>
<p><em>Comme des lions : le sacrifice héroïque de l’armée française - Mai-juin 1940</em> de Dominique Lormier,<br />Calmann-Lévy 2005</p>
<p>On pourra lire un autre commentaire du livre de Lormier chez Roland Hureaux : <a href="http://roland.hureaux.over-blog.com/article-1795926.html">http://roland.hureaux.over-blog.com/article-1795926.html</a></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4#rev-pnote-404-1" id="pnote-404-1">1</a>] <em>Plutôt utopique, évidemment, mais quel beau sujet d’uchronie...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/404« Comme des lions : le sacrifice héroïque de l’armée française - Mai-juin 1940 » de Dominique Lormier (3)urn:md5:558bdc83aa2242d00f1877fd25535bc32007-11-20T21:10:00+00:002011-05-11T20:00:42+00:00ChristopheHistoireguerrehistoireHistoire de FrancelogistiquemémoireorganisationParisracléeSeconde Guerre Mondiale<p>La fin, et une petite analyse sur le matériel.</p> <h3>Les barouds d’honneur</h3>
<p>Le front percé, l’armée française, décimée, ne peut plus tenir, alors que les Allemands ont encore de nombreuses réserves. Paris est déclaré « ville ouverte » et les envahisseurs ne rencontrent plus de résistance organisée.</p>
<p>Mais les îlots de résistance sont nombreux, même après que Pétain annonce demander un armistice le 17 juin et que beaucoup de soldats considèrent alors la guerre finie et perdue. Lormier s’étend longuement sur le cas des « <a href="http://www.anac-fr.com/2gm/2gm_99.htm">cadets de Saumur</a> », menés par quelques officiers au sens du devoir digne d’un <em>kamikaze</em> japonais<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3#pnote-403-1" id="rev-pnote-403-1">1</a>]</sup> dont beaucoup se font tuer pour ralentir la progression allemande ; cela coûte la vie également à nombre de civils.</p>
<p>Une partie de cette résistance se base sur la croyance que retarder la Wehrmacht permet à l’armée française de se replier en bon ordre sur la Loire ou ailleurs. Or, le 18 juin, cette armée n’existe plus en tant qu’organisation, et le gouvernement de Pétain a jeté l’éponge.</p>
<p>Les combats, désespérés, continuent encore le 22 juin quand l’armistice tombe.</p>
<h3>La ligne Maginot</h3>
<p>La ligne Maginot fait parfaitement ce pour quoi elle a été conçue : tenir. La grande majorité des ouvrages résistent jusqu’à l’armistice, voire après.</p>
<p>Les Allemands ne lancent l’attaque contre la ligne que vers le 14 juin, quand Paris est tombé et que la victoire semble déjà imminente. Mais en Sarre, les divisions du Reich se cassent les dents sur les fortifications.</p>
<p>Les derniers ouvrages se rendent le 7 juillet — deux semaines après l’armistice ! Les troupes refusent en effet de se considérer comme vaincues et donc de partir prisonnières en <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Stalag">stalag</a></em>. Ce qui remettrait en cause l’armistice pour les Allemands.</p>
<p>Une partie peu connue est la « course à la Suisse » : les troupes de von Runstedt veulent isoler les troupes françaises de l’Est, certains Français réussissent cependant à rejoindre le havre helvétique pour éviter l’emprisonnement.</p>
<h3>Les Alpes</h3>
<p>Mussolini veut participer à la curée et lance ses troupes sur les Alpes le 10 juin. Elles ne vont pas loin. Le fantastique rempart naturel des Alpes est complété par des fortifications qui font un massacre des pauvres Italiens mal équipés et mal nourris<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3#pnote-403-2" id="rev-pnote-403-2">2</a>]</sup>. Le reste se joue entre fantassins.</p>
<p>Il est peu connu que les Allemands sont arrivés jusqu’à Chambéry et Grenoble, et que les divisions blindées se sont fait parfois massacrer par l’artillerie de montagne, mais aussi par des troupes coloniales ou alpines.</p>
<h3>Le matériel</h3>
<h5>Les chars</h5>
<p>C’est bien connu, les Français n’avaient pas suivi les conseils de de Gaulle (entre autres) mais Guderian, si. Les chars allemands regroupés en <em>Panzerdivisionen</em> autonomes, avec DCA, infanterie motorisée, génie... peuvent écrabouiller les chars français dispersés pour beaucoup au milieu de l’infanterie, et beaucoup trop statiques.</p>
<p>Des détails font tragiquement la différence. Lormier rapporte notamment :</p>
<ul>
<li>La radio sert à coordonner les mouvements des chars... dans la Wehrmacht ! Ce qui donne des « tactiques de meute » meurtrières, même contre des chars plus puissants. Les Français sont condamnés pour beaucoup aux fanions. <br /> <br />Pour Lormier, « <strong>ce n’est pas le manque de chars qui handicape l’armée française en 1940, c’est l’absence de transmissions</strong>. » À Abbeville par exemple, le commandement ne se rend pas compte du succès et ne sait pas l’exploiter !</li>
</ul>
<ul>
<li>Le système français de ravitaillement en essence est archaïque, à base de camions spécialisés devant alimenter les chars très gourmands en carburant. Le système allemand se base sur des stocks de jerricans, que les camions déposent avant de repartir sur-le-champ, ce qui accélère les rotations. Et ces jerricans peuvent être emportés par les chars eux-mêmes pour des percées de cent kilomètres...</li>
</ul>
<ul>
<li>Les tankistes français doivent tous changer de place entre l’observation et le tir sur l’objectif ! La cadence de tir est donc au mieux médiocre...</li>
</ul>
<p>Les chars français, du moins les modernes, ne sont pourtant pas mauvais. Les B1 bis notamment font des ravages, surtout lors des opérations « coup de poing » qui tiennent compte de leur faible autonomie. Lormier rapporte plusieurs cas de chars couverts de <em>dizaines d’impacts</em> de canons allemands et roulant encore, ou de véritables boucheries de <em>panzers</em> légers opérées par quelques chars français.</p>
<p>Hélas, les B1 bis sont trop peu nombreux, la majorité des blindés français sont plus légers et possèdent des canons moins puissants. Si le blindage est globalement un atout des Français, les carences en mobilité sont fatales.</p>
<p>En résumé, les Allemands ont misé sur la mobilité et accessoirement le blindage dans le cadre du <em>Blitzkrieg</em>, alors que les Français, dans la perspective d’une nouvelle guerre de position, ont parié sur le blindage et complètement oublié la mobilité.</p>
<h5>La grande et la petite artillerie</h5>
<p>Lormier fait le même constat pour l’artillerie que pour les chars : puissante... mais peu mobile. Les Allemands, eux, n’utilisent plus les chevaux pour déplacer leurs canons ! De plus, ils savent mieux coordonner leur artillerie avec les mouvements des chars. Et cette artillerie est souvent fatale aux chars lourds français.</p>
<p>Les canons antichars français sont bons, mais rares.</p>
<p>Quant à l’armement personnel du soldat français, il est moins moderne que celui de l’allemand (le grand-père de Lormier avait un fusil datant de 1870 !), et moins standardisé au niveau des munitions.</p>
<h5>Les avions : « Le ciel n’était pas vide »</h5>
<p>La DCA française est indigente, c’est une des raisons de la supériorité écrasante de la Luftwaffe, et c’est cet appui aérien qui fait la différence dans bien des cas. Lormier cite le tragique exemple du <a href="http://www.ardennes1940aceuxquiontresiste.org/14mai.htm">pont de Gaulier</a> (167 avions abattus par la DCA allemande en un jour pour ce seul objectif !). Les combats aériens sont nombreux, chaque camp (Anglais, Allemands, Français) perd des centaines d’appareils.</p>
<p>La supériorité numérique allemande est de toute manière écrasante, et concentrée sur le front, alors que l’aviation française est répartie sur le territoire. Les chasseurs français dans le nord se battent donc à un contre dix. La plupart des bombardiers sont détruits. Mais quelques bombes tombent sur Berlin même.</p>
<p>« Le ciel n’était pas vide » clame Lormier, mais les combats aériens ont souvent lieu trop haut pour que les soldats français voient leur propre chasse alors que les Stukas les bombardent. (Et mon grand-père se souvient aussi surtout des Stukas pendant l’Exode...)</p>
<p>Là aussi, l’action des Français ne sert qu’à retardement : avec les 1400 avions perdus en France, la Luftwaffe aurait peut-être triomphé de la Royal Air Force peu après pendant la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d'Angleterre">Bataille d’Angleterre</a> (même si Hitler n’avait probablement pas l’intention de débarquer, des bombardements plus nombreux auraient-ils fini par amener les Britanniques à la paix ?)...</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4">À suivre...</a></em></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3#rev-pnote-403-1" id="pnote-403-1">1</a>] <em>Logique suicidaire sans utilité que je n’arriverai jamais à intégrer. C’est une autre époque, presque une autre civilisation.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3#rev-pnote-403-2" id="pnote-403-2">2</a>] <em>Rappelons qu’à part la guerre d’Éthiopie en 1935-36, l’Italie n’a jamais été fichue de gagner une bataille de toute la Seconde Guerre Mondiale.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/403« Comme des lions : le sacrifice héroïque de l’armée française - Mai-juin 1940 » de Dominique Lormier (2)urn:md5:c51ba73a2b1fe093d75741d4fbf6f3d72007-11-19T20:27:00+00:002011-05-11T19:36:12+00:00ChristopheHistoireguerrehistoireHistoire de FrancemémoireracléeSeconde Guerre Mondiale<p>Les erreurs françaises et les initiatives allemandes.</p> <h3>La supériorité numérique allemande</h3>
<p>Évoquons tout de suite une des principales causes de la défaite : l’Allemagne de 1940 a deux fois plus d’habitants que la France. La Belgique et l’armée terrestre anglaise ne peuvent compenser cet énorme écart. Le réarmement allemand, bien que parti de plus bas, est plus ancien que celui des Alliés. Il n’est pas besoin de chercher plus loin une des raisons de la supériorité allemande.</p>
<p>Et contrairement à 1914-18, il n’y a pas de deuxième front russe, et les Américains ne sont pas encore là.</p>
<h3>La percée allemande des Ardennes</h3>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/France_Mai_1940_USDOD_PublicDomain.jpg" alt="Bataille de France mai 1940 (image domaine public du Department Of Defense américain, via Wikipedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Le plan de von Manstein est simple : attirer l’élite de l’armée française au nord, en Belgique, comme si les Allemands voulaient répéter le plan Schlieffen de 1914, attaquer avec les panzerdivisions au travers des Ardennes, et foncer sur la Somme par un gigantesque « coup de faux ». L’avancée de l’infanterie pour « nettoyer » derrière les chars ne doit pas limiter l’avance de ceux-ci.</p>
<p>Le plan fonctionne au-delà de l’espérance du haut-commandement, qui tente même (vainement !) de retenir l’avancée rapide de ses blindés dont les lignes de ravitaillement s’allongent.</p>
<p>L’endroit où attaquent les Allemands, sur la Meuse vers <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Percée_de_Sedan">Sedan</a>, est le point faible du dispositif français, entre la ligne Maginot (trop fournie, elle !) et le gros des troupes envoyé au nord. Là se trouvent des troupes insuffisantes, essentiellement des unités de réserves... alors qu’il s’agit du pivot de l’offensive alliée en Belgique ! Les trois divisions cuirassées de réserve que Gamelin avait pourtant judicieusement placées à Amiens sont dispersées dès le début des combats... Pour couronner le tout, le général de cette zone, Huntzinger, a plus l’expérience des bureaux et des salons que du front.</p>
<p>Lormier reprend une analyse de Raymond Cartier : pour Gamelin, il y a deux batailles, celle en Belgique, et celle sur la ligne Maginot. Le centre lui semble une zone neutre peu importante.</p>
<p>Le fait que la Ligne Maginot n’a pas été prolongée devant ces Ardennes réputées infranchissables par des chars est connu. J’ai entendu ici ou là que les Français ne voulaient pas vexer les Belges, mais Lormier donne une autre explication : le manque d’argent ! Pourtant, même incomplète, la Ligne a quand même « bu » les crédits qui auraient pu aller ailleurs (chars, DCA, aviation...).</p>
<p>L’erreur française est en partie compréhensible : les Ardennes sont difficilement franchissables, et la vallée de la Meuse est encaissée. Encore eût-il fallu poser des mines antichars, défendre sérieusement le massif ardennais, et prendre aussi au sérieux les menaces qui s’annoncent sur le secteur (Lormier ne parle pas trop de la faillite du renseignement).</p>
<p>Sur la Meuse, le combat est inégal : sept divisions de panzers (2000 chars), trois d’infanterie motorisées, trente d’infanterie, contre... sept divisions d’infanterie de niveau médiocre, sans fortifications sérieuses, sans DCA, et peu de chars. La Luftwaffe se concentre également sur la Meuse, ce qui permet d’éviter une longue préparation d’artillerie, et traumatise littéralement les troupes françaises.</p>
<p>Lormier calcule que les fronts étaient beaucoup trop étendus pour les unités présentes (j’ai appris qu’une division n’est bonne à défendre correctement que cinq ou six kilomètres de front).</p>
<p>Cependant, les Allemands qui franchisent la Meuse en canot pneumatique, même couverts par leurs artillerie, laissent de lourdes pertes. Les Ardennes sont <em>réellement</em> très dangereuses à franchir.</p>
<h3>La Somme et l’Aisne</h3>
<p>Les Allemands atteignent la côte atlantique à Abbeville, et la contre-attaque de de Gaulle ne va pas bien loin. Les Anglais rembarquent à Dunkerque, et les Allemands sont maîtres du nord de la France. Ils se tournent vers le sud, mais franchir la Somme et l’Aisne vers Paris ne sera pas une partie de plaisir, même si les Allemands dominent par trois contre un.</p>
<p>Le front de la Somme résiste bien, avec des pertes terribles des deux côtés. Lormier cite un épisode où la division de Rommel vient difficilement à bout d’une division de Sénégalais, qui vont jusqu’à recourir à l’arme blanche dans des batailles de rues. Certains, prisonniers, seront sommairement exécutés, au mépris des « lois de la guerre », conséquence de la propagande raciste nazie.</p>
<p>Les Allemands ne passent la Somme et l’Aisne que grâce à leur supériorité matérielle, après huit jours de combats. Un passage délectable des carnets du général allemand <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Franz_Halder">Halder</a> : « Guderian piétine encore (...) il a plusieurs divisions françaises en face de lui. Parmi ces divisions, il y en a au moins trois que Guderian prétendait avoir détruites la veille... ».</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3">À suivre</a></em>...</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/19/441-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-2#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/402« Comme des lions : le sacrifice héroïque de l’armée française - Mai-juin 1940 » de Dominique Lormier (1)urn:md5:a20100bf9c44d6f6edfc096d0bfbb6d92007-11-17T11:14:00+00:002011-05-09T20:30:57+00:00ChristopheHistoireguerrehistoireHistoire de FrancemémoireracléeSeconde Guerre Mondiale<p>L’armée française de 1940 ne s’est pas rendue sans combattre, loin de là, contrairement aux opinions fort répandues depuis cette historique (et indéniable) branlée. Résumé d’un très bon livre.</p> <p>Dominique Lormier a entrepris de tordre le cou à une idée largement répandue depuis plus de 60 ans : l’armée française de 1940 se serait effondrée au premier choc, se serait rendue en masse sans combattre, et aurait offert à la Wehrmacht une véritable promenade militaire. Les blagues sur le sujet énervent vite le Français égaré sur les forums américains, bien que la vague soit retombée depuis 2003 et l’affaire de l’invasion de l’Irak (mais le sujet revient systématiquement dans chaque discussion sur Slashdot évoquant la France).</p>
<p>Personnellement, je n’avais jamais trop creusé le sujet. De mes grands-parents, aucun à l’époque n’avait été « invité » aux premières loges aux festivités. Tous n’ont vu la Wehrmacht que bien après la chute du front et la famille se souvient effectivement plutôt du traumatisme de l’Exode en juin, ou de l’Occupation.</p>
<p>Lormier a rassemblé une masse de documents et rétabli la vérité : mai-juin 1940 est indéniablement la pire défaite française depuis <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d'Azincourt">Azincourt</a> un demi-millénaire auparavant, voire de l’Histoire ; mais l’envahisseur ne s’est pas amusé, a accusé de sérieuses pertes, et la résistance n’a pas été que symbolique.</p>
<p>Lormier accumule les témoignages de passages très difficiles pour les Allemands, de murs de feu auxquels ils se sont heurtés, de divisions allemandes entières détournées pour réduire un bataillon français, d’honneurs militaires rendus par les vainqueurs à des vaincus héroïques mais à bout de munition, de percées françaises hélas jamais poussées bien loin par manque de moyens et de mobilité réduite...</p>
<p>Ce n’est pas un <em>scoop</em>, mais Lormier enfonce le clou : <strong>la défaite française n’est en aucun cas due au manque de courage ou de volonté des soldats</strong>. Si des débandades ou des paniques ont effectivement eu lieu ponctuellement, ou en juin après l’effondrement total du front, les unités ont résisté même dans les pires circonstances, pour peu que les officiers donnent un minimum l’exemple.</p>
<p>Il s’étend évidemment longuement sur les causes du désastre : une <strong>infériorité démographique</strong>, en <strong>matériel</strong> (numériquement, rarement en qualité), des <strong>méthodes inadaptées</strong>, et surtout, un <strong>haut commandement nullissime</strong>.</p>
<h3>Sur la forme</h3>
<p>Le lecteur se perd parfois un peu dans le récit (de première main) des différentes batailles. Il est difficile dans les mêmes pages de donner à la fois la vision du combattant de base et celle de l’État-major. Il y réussit tout de même puisque les défenses héroïques alternent avec les explications plus fondamentales.</p>
<p>Au fil des pages, quelques noms connus dans d’autres contextes apparaissent : Léon Zitrone, Georges Pompidou, François Mitterrand (blessé), Jacques Chaban-Delmas...</p>
<p>Un reproche : tout à sa défense de l’honneur des combattants français, Lormier n’évoque que très rarement les phases moins glorieuses, hormis celles du haut commandement.</p>
<h3>Résumé éclair des opérations</h3>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/France_Mai_1940_USDOD_PublicDomain.jpg" alt="Bataille de France mai 1940 (image domaine public du Department Of Defense américain, via Wikipedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Le 10 mai 1940, les Allemands attaquent la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg. Les armées françaises et anglaises entrent en Belgique à la rencontre de l’ennemi : « ils nous refont le coup de 1914 ! ».</p>
<p>Pas de bol, les divisions blindées de Rommel et von Kleist franchissent les Ardennes vers Sedan, au point faible du front, et prennent à revers le gros des troupes alliées en fonçant jusqu’à la Somme.</p>
<p>Du 25 au 3 juin, les Allemands « nettoient » le nord de la France (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Dunkerque">évacuation de Dunkerque</a> par les Britanniques et quelques Français).</p>
<p>Le 6 juin, les Allemands repartent vers le sud et franchissent la Somme et l’Aisne.</p>
<p>Le 10 juin, l’Italie attaque dans les Alpes, sans aucun succès.</p>
<p>Le 12 juin, Paris est occupé. À partir de ce moment, le front est disloqué, les Allemands progressent très vite.</p>
<p>Le 17 juin, Pétain, nouveau chef du gouvernement français, demande l’armistice.</p>
<p>Le 22 juin, l’armistice est signé, la défaite est consommée, les jours noirs de l’Occupation commencent.</p>
<h3>Les pertes</h3>
<p>Les Français ayant perdu, ils accusent évidemment la majorité des pertes - mais les Allemands représentent tout de même <strong>un tiers</strong> des tués, blessés, disparus. Et ces pertes ne sont pas négligeables :</p>
<ul>
<li>Allemagne : 49 000 morts et disparus, 111 000 blessés.</li>
<li>France : 92 000 morts, 250 000 blessés.</li>
</ul>
<p>Donc avec les blessés, plus de 500 000 victimes, dont un tiers d’Allemands. Les perdants ont donc vendu assez chèrement leur peau.</p>
<p>Je me suis amusé à comparer : par comparaison, <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/World_War_II_casualties#endnote_US" hreflang="en">les Américains ont eu moitié plus de tués que les Français</a> pour <em>tout</em> le front européen-atlantique, et <em>toute</em> la guerre (1941-1945 pour eux). On pourrait ajouter les 90 000 Français libres et résistants tués par la suite pour dépasser les pertes militaires américaines sur ce front.</p>
<p>Ou encore, les pertes de la bataille de France équivalent <em>grosso modo</em> à celles de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Normandie">la bataille de Normandie</a> en 1944 (durée et effectifs à peu près équivalents), épisode qui n’a pas laissé le souvenir d’une balade champêtre aux forces alliés.</p>
<p>Lormier compare, lui, les pertes françaises aux pertes des Soviétiques face, en gros, aux mêmes troupes allemandes : elles sont en gros triples. Et pourtant on ne rigole pas sur la débandade des Russes (parce qu’on sait que les purges staliniennes ont désorganisé l’Armée Rouge, et que les Russes ont payé la reconquête d’un prix terrible ).</p>
<p>De manière moins attendue, <strong>les Allemands ont également perdu un tiers des chars et un tiers des avions détruits</strong> pendant la campagne (alors même que la DCA française était rachitique (<strong>Correction postérieure</strong> : voir le commentaire d’Yves Michelet ci-dessous qui d’insurge contre ce terme)). Le mythe de la Luftwaffe seule dans le ciel et des divisions blindées fonçant sans résistance en prend donc aussi un coup.</p>
<p>De manière encore plus surprenante, <strong>la majorité des pertes allemandes date de la deuxième partie de la campagne</strong>, <em>après</em> Dunkerque ! Comme en 1914, la perte de tout le nord du pays n’a pas entamé la détermination des Français. Le passage de l’Aisne et de la Somme en particulier a été meurtrier.</p>
<h3>Des exemples de succès français pendant la campagne de 1940</h3>
<p>Lormier a rassemblé nombre de récits de bataille où la Wehrmacht est « tombée sur un os ».</p>
<ul>
<li><strong>Gembloux</strong>, en Belgique : <br />Deux divisions allemandes stoppées essentiellement par de l’infanterie. Le front ayant été percé ailleurs, les Français se sont retirés invaincus.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="http://www.lunion.presse.fr/index.php/cms/179/fiche/131/">La Horgne</a></strong>, vers Sedan : <br />Une brigade de spahis algériens et marocains se fait massacrer plutôt que de laisser passer une division de panzers.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="http://cheminsdememoire.gouv.fr/page/afficheLieu.php?idLang=fr&idLieu=4111">Stonne, le « Verdun de 1940 »</a></strong> :<br /> Pendant dix longs jours, Allemands et Français prendront et reprendront ce village.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Montcornet</strong> : <br />Le 17 mai, l’attaque de la 4è Division Cuirassée de Réserve, commandée par de Gaulle, est la seule contre-attaque française sérieuse sur les arrières des Allemands qui viennent de percer. Sans soutien aérien, sans infanterie de soutien, les chars française se replient, mais le ravitaillement de la 1ère division de panzers a failli être rompu. C’est le symptôme à la fois de la combativité française et de son inefficacité stratégique.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Abbeville</strong> : <br />À partir du 27 mai, Français et Britanniques cherchent à réduire la poche allemande autour de cette ville. Le front allemand s’effondre devant la 4è DCR de de Gaulle (encore lui), et pour une fois l’aviation alliée domine le ciel. L’artillerie lourde allemande, seule à pouvoir abattre les gros chars français B1 bis, est détruite par ceux-ci. De Gaulle ne peut exploiter son succès, faute de transmissions !</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Dunkerque">Dunkerque</a> </strong> : <br />Comme la <a href="http://www.histoire-empire.org/1812/berezina/berezina_02.htm">Bérézina</a>, l’évacuation de Dunkerque est marquée du sceau du désastre dans la mémoire collective, alors qu’il s’agit d’un « succès inespéré » dans la retraite : la résistance acharnée des troupes françaises a permis aux troupes anglaises, et à nombre d’autres Français piégés dans le nord de la France, d’embarquer vers l’Angleterre, en bien plus grand nombre que prévu initialement. Et c’est cette armée britannique sauvée qui inflige ses premiers revers aux nazis quelques mois après (notamment en Afrique du Nord), et permet à Churchill d’attendre l’entrée en guerre des Américains.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les « <strong>cadets de Saumur</strong> », moins d’un régiment, interdisent le passage de la Loire à deux divisions allemandes et demi pendant trois jours. Baroud d’honneur sans succès, Pétain demandait déjà l’armistice.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Dans les Alpes</strong>, les Français ont stoppé l’ennemi avec de faibles pertes, malgré la supériorité numérique des Italiens puis des Allemands attaquant sur deux fronts.</li>
</ul>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/19/441-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-2">À suivre</a></em>...</p>
<h3>Bibliographie</h3>
<p><em>Comme des lions : le sacrifice héorïque de l’armée française - Mai-juin 1940</em> de Dominique Lormier,<br />Calmann-Lévy 2005</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/399Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (8) : la finurn:md5:61db167121b7b6c71c44b33a7165e2fa2007-10-09T21:00:00+00:002011-05-08T08:02:19+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Canaris, finalement démasqué par les SS, ne voit pas la fin du IIIè Reich.</p> <h3>La chute</h3>
<p>Dès 1942, avant même la mort d’Heydrich, la Gestapo met sur écoute certains collaborateurs de Canaris. Les témoignages dangereux s’accumulent. La disparition d’Heydrich n’est qu’un répis, mais son successeur, Kaltenbrunner, ne lâche pas. Dohnanyi est arrêté à l’Abwehr même en avril 1943, d’autres suivent. Heureusement pour Canaris, la Gestapo est obligée de prendre des gants pour ne pas allumer une guerre entre SS et Wehrmacht. La justice militaire classique est impliquée, Canaris déploie toute sa duplicité et l’enquête tourne court — momentanément.</p>
<p>En 1943, après la chute de Mussolini, l’Allemagne envahit l’Italie qui a signé un armistice avec les Alliés, lesquels viennent d’envahir la Sicile. Le SD y trouve nombre de documents compromettants sur les bonnes relations entre l’Abwehr et les putschistes italiens. Or Canaris avait faussement rassuré Hitler sur la loyauté d’une Italie sans Mussolini. Himmler laisse pourtant traîner...</p>
<p>Puis un des cercles de la haute société berlinoise qui conspirent contre Hitler est infiltré par la Gestapo et tombe : il y a des gens de l’Abwehr. Des défections suivent dans les ambassades. Hitler perd confiance en Canaris. En février 1944, l’Abwehr est absorbé par les SS. Canaris est placé en résidence surveillée, et voit s’écrouler son œuvre.</p>
<p>La fusion des services est un désastre (le personnel ne veut pas des SS). Paradoxalement, Canaris n’est pas complètement écarté, juste « placardisé ».</p>
<p>C’est alors qu’a lieu l’attentat raté du 20 juillet 1944 contre Hitler. La Gestapo se déchaîne. Schellenberg vient en personne arrêter Canaris le 23 juillet.</p>
<p>Peu après est découvert le coffre où les subordonnés de Canaris stockent leurs papiers les plus compromettants. La Gestapo s’aperçoit que la conspiration est encore plus étendue qu’elle ne croyait. Des milliers de personnes sont emprisonnées. Canaris, Oster et d’autres ont droit à un traitement spécial encore plus dur que les autres prisonniers. En prison, Canaris le pessimiste garde bizarrement un moral de fer. Son art de l’embrouille et du camouflage verbal lui permet de se garder informé sur l’extérieur, et il réussit à noyer le poisson auprès des enquêteurs : il n’avoue rien.</p>
<p>En février 1945, Canaris et certains de ses complices finissent au camp de concentration de Flössenburg. En avril, Hitler ordonne la mise à mort des conjurés. Canaris est pendu au petit matin, le 9 avril 1945, au milieu d’une Allemagne ravagée qu’il n’a pas réussi à sauver de la ruine.</p>
<h3>Bibliographie</h3>
<p><em>Canaris</em> d’André Brissaud<br />Librairie Académique Perrin, 1970<br /></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/09/426-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-8#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/383Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (7) : la bombe atomique allemandeurn:md5:e7ce06c9656f12553509fb52e8ac1e052007-10-08T20:45:00+00:002011-05-07T19:46:45+00:00ChristopheHistoireapocalypsebombe atomiquecataclysmeespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondialeuchronie<p>L’Allemagne a-t-elle échoué dans la course à la bombe nucléaire en partie grâce à Canaris ?</p> <h3>Les recherches nucléaires allemandes</h3>
<p>Certains des chapitres les plus intéressants du livre portent sur les chercheurs allemands qui ont délibérément fait traîner les travaux sur la bombe atomique — du moins le clament ceux interrogés par Brissaud. <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Ernst_von_Weizsäcker" hreflang="de">Ernst von Weizsäcker</a>, des Affaires Étrangères, est un ami de Canaris, et son fils <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Carl_Friedrich_von_Weizsäcker" hreflang="de">Carl</a> est un assistant du physicien <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Werner_Heisenberg" hreflang="de">Werner Heisenberg</a>.</p>
<p>À lire les biographies succintes de Wikipédia, il n’est pas facile de savoir si Heisenberg, von Weiszäcker, Hahn et leurs collègues ont vraiment caché à leurs supérieurs la possibilité de construire une bombe atomique (c’est la thèse de Brissaud), ou s’ils ont fait fausse route dès le départ. Nombre d’entre eux n’étaient certes pas des nazis. En tout cas, en 1941, Heisenberg annonce à <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Albert_Speer" hreflang="de">Speer</a> que la chose sera difficile à réaliser. Sur ce rapport, Hitler décide de ne pas distraire de ressources des besoins militaires et le projet végète ensuite.</p>
<p>On n’en est pas là en 1938, quand les Allemands interrompent les exportations d’uranium tchécoslovaque. De cela naissent nombre de craintes chez les futurs Alliés. Einstein écrit en 1939 <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Lettre_d'Einstein_à_Roosevelt">sa fameuse lettre à Roosevelt</a>, qui déclenche le Projet Manhattan.</p>
<p>Canaris, par le baron von Weiszäcker, reste informé des non-progrès des chercheurs allemands, et ils les protège de la Gestapo et du SD de Heydrich.</p>
<p>L’Abwehr enquête également sur les recherches françaises sur le sujet, les plus avancées du monde en 1940. Canaris interrroge personnellement Frédéric Joliot-Curie après la défaite française. Il n’arrive pas à débaucher le Chinois Tchen San-chiang, futur père de la bombe chinoise et thésard de Joliot-Curie.</p>
<p>Pendant ce temps, les hommes de l’Abwehr entretiennent les rivalités et les problèmes de matériel des équipes de recherche allemandes, et font disparaître des rapports qui pourraient donner de dangereuses idées aux chefs nazis. Les plans nazis sont définitivement condamnés lorsque les Alliés et les résistants norvégiens détruisent les stocks d’eau lourde.</p>
<p>Malgré tout, selon von Weiszäcker, l’Allemagne était à huit mois de sa première bombe atomique au moment de sa chute... Cela fait froid dans le dos<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/08/425-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-7#pnote-382-1" id="rev-pnote-382-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/09/426-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-8">À suivre...</a></em></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/08/425-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-7#rev-pnote-382-1" id="pnote-382-1">1</a>] <em>Des uchronies plausibles peuvent donc être écrites, où Hitler aurait réussi à gagner un peu de temps d’une manière ou d’une autre. <a href="http://www.stern.de/wissenschaft/natur/:Hitlers-Bombe--Sprengstoff-Wissenschaft/537702.html" hreflang="de">Certains disent que les Allemands ont tout de même réussi à tester une bombe A</a> (douteux mais à creuser). Mais le Reich agonisant aurait de toute manière dû subir une bombe atomique américaine chaque mois dès août 1945... </em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/08/425-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-7#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/382Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (6) : un traître ?urn:md5:501ac56ae13d4ba3903c7f381711d02d2007-10-07T00:00:00+00:002011-05-07T15:58:49+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondiale<p>Canaris a tenté de s’opposer au régime nazi, mais pouvait-il faire plus sans devenir un traître à ses propres yeux ?</p> <h3>Un traître ?</h3>
<p>Comme tous les membres de la résistance allemande, Canaris cherche à protéger l’Allemagne des délires d’Hitler. Mais tous se posent la même question à un degré ou un autre : est-ce trahir l’Allemagne que s’attaquer à Hitler ? Est-ce trahir que contacter les Alliés pour leur fournir des informations qui coûteront des vies allemandes ? Est-ce trahir que de chercher à éliminer les mauvais maîtres de l’Allemagne pour obtenir les conditions de paix les moins mauvaises ? Il fallait choisir entre l’État nazi et la Patrie allemande. Canaris ne veut pas démissionner car il sait qu’après lui viendrait Heydrich.</p>
<p>J’ai évoqué l’an dernier <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe">Fritz Kolbe</a>, ce fonctionnaire qui décide que la trahison est la meilleure solution, et renseigne la CIA, allant jusqu’à désigner des cibles et proposer de servir de guide à une attaque alliée sur Berlin. De même, des amis et subordonnés de Canaris avertissent les Alliés des attaques qui vont avoir lieu. Les mêmes ou d’autres (<a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Hans_Oster" hreflang="de">Hans Oster</a> et <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Hans_von_Dohnanyi" hreflang="de">Hans von Dohnanyi</a> notamment) fomentent des attentats. Canaris a des antennes jusque dans les SS des Sonderkommandos, notamment <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Arthur_Nebe" hreflang="de">Arthur von Nebe</a>.</p>
<p>Canaris, patriote et sans doute aussi nationaliste que l’Allemand moyen de son époque, mais sans aucune affinité avec les nazis, et encore moins avec les SS, n’a pas à strictement parler (trop) trahi. Ses dossiers cherchent à dénoncer les excès criminels du régime. Toutes ses manœuvres vers l’extérieur visent (vainement, sauf en Espagne) à réduire l’extension de la guerre. Il sauve quelques têtes grâce aux moyens de l’Abwehr, une goutte d’eau face à l’océan des crimes nazis. Mais comme tant des généraux qu’il n’arrive pas à rallier, il répugne à aller jusqu’à tuer Hitler, même s’il couvre Oster et bien d’autres, et participerait bien à un coup d’État. La mise en place des camps de la mort le fait changer d’avis mais il ne participe aux tentatives.</p>
<p>Oster et quelques autres ont moins de scrupules à tenter d’assassiner Hitler ou de mettre en danger leurs compatriotes : mieux vaut une défaite rapide pour sauver les meubles que la catastrophe où les mène Hitler.</p>
<p>Canaris, ses amis et ses services trempent cependant successivement dans de nombreuses machinations contre le régime hitlérien :</p>
<ul>
<li>En 1938, Canaris fait partie d’une conspiration qui réprouve les excès nazis et craint le résultat de la guerre qui s’annonce. Le <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Ludwig_Beck_(Offizier)">général Beck</a>, totalement opposé à une agression de la Tchécoslovaquie, est pressenti pour prendre la tête d’un coup d’État. Les motivations ne sont pas forcément très démocratiques : le mépris d’Hitler pour les généraux et la crainte de la main-mise du Parti sur l’armée jouent beaucoup.<br /> <br />Cependant, les succès d’Hitler, qui n’a pas besoin de tirer une cartouche pour arriver à ses fins, le soutien évident des jeunes officiers au régime, l’indécision des généraux et le désintérêt de Londres, qui préfère négocier avec Hitler, font capoter l’affaire définitivement. Canaris perd alors ses illusions sur le contre-pouvoir que peut représenter l’armée, et le prestige accumulé par le Führer rend toute autre tentative illusoire.</li>
</ul>
<ul>
<li>En 1942, Donhanyi, Oster et d’autres contactent les Anglais via la Suède pour tâter le soutien anglais à la conspiration de Beck et autres : quelle aide obtiendraient-ils ? quelles conditions de paix les Alliés feraient-ils à l’Allemagne ? Les Britanniques, méfiants, adoptent le « <em>wait and see</em> » — les conspirateurs devront passer à l’action pour devenir crédibles.</li>
</ul>
<ul>
<li>En 1943, le <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow" hreflang="de">général von Tresckow</a> et quelques complices, dont von Donahnyi, placent une bombe dans l’avion du Führer. Elle n’explose pas.</li>
</ul>
<ul>
<li>En 1944, Beck est à nouveau partie prenante du <a href="http://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19440720">célèbre complot du 20 juillet 1944</a>. Canaris désapprouve l’opération sur le principe de l’assassinat comme sur le but. De plus il pense qu’il est déjà trop tard pour sauver l’Allemagne.<br /> <br />La bombe de von Stauffenberg ne fait que blesser Hitler. La répression est féroce et la plupart des conjurés sont rapidement exécutés ou se suicident (Beck, von Tresckow, Rommel, von Nebe...).</li>
</ul>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/08/425-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-7">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/381Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (5) : Heydrichurn:md5:116c37994fc1cd8e6be1975f971695b02007-10-05T19:22:00+00:002011-05-04T20:15:46+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Le sinistre Heydrich était au début l’ami puis l’ennemi mortel de Canaris.</p> <h3>L’affrontement avec Heydrich et son assassinat</h3>
<p>Heydrich est le fondateur et le maître du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sicherheitsdienst">Sicherheistdienst</a> (SD), service de renseignement du parti nazi et relevant directement des SS et d’Himmler. Heydrich accumule des dossiers sur tous, y compris sur les dignitaires nazis, pour pouvoir faire pression sur eux. Le SD passe très vite à l’espionnage pur et aux actions secrètes. Heydrich et le SD jouent un rôle capital lors de la <a href="http://www.yrub.com/histoire/nuitcouteaux.htm">« Nuit des longs couteaux »</a>, en 1934, où les SA sont éliminés.</p>
<p>Canaris tient tête à Heydrich, qu’il tient pour un « fanatique barbare ». À la nomination de Canaris, les deux adversaires s’accordent sur une paix armée délimitant quelles sont les tâches respectives de leurs deux services. Heydrich soupçonne beaucoup de choses sur les vraies opinions de Canaris, et cherche en permanence à accumuler les indices sur une éventuelle trahison. Son successeur, le brutal <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ernst_Kaltenbrunner">Kaltenbrunner</a>, atteindra ce but. Canaris n’en a pas moins des relations très cordiales avec <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Walter_Schellenberg" hreflang="de">Schellenberg</a>, l’adjoint d’Heydrich, qui fait tampon et presque chaperon entre les deux ennemis !</p>
<p>Les batailles de plate-bandes entre les nombreux services de renseignements allemands (armée, SS, Ministère de Affaires Étrangères...) s’étalent pendant presque toute la durée du IIIè Reich. Surtout, toutes les fuites auprès des Alliés que le SD repère convainquent Heydrich et ses services que des subordonnés de Canaris sont suspects, et ce dès 1940. Canaris réussit à chaque fois à noyer le poisson ou à inventer une histoire plausible pour le SD... ou certains de ses propres subordonnés trop zélés dans le contre-espionnage !</p>
<p>Les grands SS (Heydrich et Himmler les premiers) se tirent également mutuellement dans les pattes et ont leurs propres ambitions - par exemple comme sauveur du régime si les amis de Canaris passaient à l’action ! Ces comportements préservent l’Abwehr très longtemps. Schellenberg, interrogé par Brissaud, rapporte que Canaris détenait très probablement de quoi faire chanter Himmler et Heydrich.</p>
<p>En 1941, Heydrich, sans quitter ses fonctions au SD (devenu RSHA), est nommé à Prague pour reprendre en main le protectorat de Bohême-Moravie. Il applique avec « succès » sa politique de terreur. En mai 1942, un commando tchèque parachuté depuis Londres tente d’assassiner Heydrich : celui-ci décède de ses blessures quelques jours plus tard. La répression nazie est féroce (massacres de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Lidice">Lidice</a> notamment). Canaris est soulagé mais il n’obtient finalement qu’un répis, et Kaltenbrunner reprend l’enquête des SS contre l’Abwehr.</p>
<p>Pourquoi Heydrich a-t-il été le seul dignitaire nazi à être liquidé par Londres ? Selon Brissaud, le gouvernement tchèque en exil cherchait un coup d’éclat pour ranimer la résistance locale, trop molle, en comptant cyniquement sur la répression allemande - sans envisager qu’elle soit aussi terrible. Londres aurait insisté pour que l’assassinat ait lieu, peut-être pour protéger une « taupe » dont Heydrich se rapprochait : Heydrich est-il mort pour protéger Canaris ?</p>
<p>Brissaud évoque et rejette aussi les hypothèses sur un attentat commandité par divers ennemis allemands de Heydrich : Himmler, Bormann ou Canaris.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/05/423-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-5#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/380Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (4) : le début de la Seconde Guerre Mondialeurn:md5:abc3ba139ceac867861aeed10d9661df2007-10-04T20:14:00+00:002011-05-01T20:32:35+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondiale<p>Canaris lors des invasions de la Pologne et de l’URSS.</p> <h3>La Pologne, le pacte germano-soviétique, le déclenchement de la Seconde Guerre Mondiale</h3>
<p>Un épisode assez peu connu rapporté par Brissaud porte sur le déclenchement de la campagne de Pologne.</p>
<p>Hitler prend la décision d’invasion fin mai 1939, après que le gouvernement polonais a refusé ses exigences (annexion de Dantzig, corridor vers la Prusse orientale...). Hitler ne pense pas que la partie se joue aussi pacifiquement que pour le démembrement de la Tchécoslovaquie, mais veut éviter que France et Angleterre n’interviennent. Canaris et ses amis déploient tout leur talent auprès des lieutenants d’Hitler (Keitel en tête) pour leur démontrer que leurs alliés (notamment l’Italie) ne suivront pas si facilement, et que la guerre prendra vite mauvais tournure. Mais ils ne sont pas écoutés, et la conclusion du <a href="http://memorial-wlc.recette.lbn.fr/article.php?lang=fr&ModuleId=19">Pacte germano-soviétique</a> élimine le spectre d’une guerre sur deux fronts... Hitler a bien joué.</p>
<p>La « provocation » polonaise montée de toute pièces par les nazis est connue : de faux soldats polonais simulent une attaque contre un avant-poste allemand. Canaris comprend trop tard pourquoi on lui a demandé les cent cinquante uniformes nécessaires.</p>
<p>L’ordre d’attaque primitif date du 26 août. Hitler le lance alors même qu’Anglais et Français le menacent dans les formes d’une déclaration de guerre. Les armées se mettent en branle quand tombe le contre-ordre : le Duce a averti Hitler que l’Italie n’est pas prête et n’entrerait pas en guerre contre la France et l’Angleterre.</p>
<p>Les anti-nazis de l’Abwehr, Canaris le premier, exultent : en annulant l’attaque au dernier moment, Hitler vient de se déconsidérer ! Les militaires engagés, de Keitel aux simples soldats, sont effectivement furieux.<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/04/422-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-4#pnote-379-1" id="rev-pnote-379-1">1</a>]</sup></p>
<p>Le 31 août, Hitler attaque finalement la Pologne. La Seconde Guerre Mondiale commence le lendemain sous les yeux d’un Canaris effondré.</p>
<p>Hitler ne veut pas seulement rabaisser la Pologne, ni même la conquérir, mais la rayer complètement de la carte des nations. Cela commence par liquider son élite. Heydrich envoie ses <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Einsatzgruppen">Einsatzgruppen</a> dans le sillage de la Wehrmacht pour assassiner systématiquement aristocrates, intellectuels, Juifs... Le régime ne fait évidemment pas de publicité à ces crimes, mais Canaris en entend parler. Ses protestations auprès de Keitel, et sur la responsabilité qui rejaillit sur la Wehrmacht si elle laisse faire, sont vaines (« Ces mesures sont décidées par le Führer. »). Les généraux de la Wehrmacht maugréent, sans que cela émeuve Hitler.</p>
<p>D’autres passages expliquent comment les Alliés étaient prévenus par avance de <em>chaque</em> attaque allemande. En partie par leurs services, bien sûr, mais aussi par des fuites délibérées de gens de l’Abwehr — sans que Canaris ne se livre en personne à ce genre de haute trahison. Des Tchèques ont fui Prague pour Londres à temps ; Oster avertit son contact néerlandais de l’attaque sur la Scandinavie quelques jours auparavant ; le même transmet aux Alliés l’attaque contre la France, la Belgique et les Pays-Bas, etc.</p>
<p>Canaris compte souvent ainsi montrer à Hitler que l’attaque est attendue et donc vouée à l’échec. Ce sera effectivement systématiquement un échec — pour lui. Soit les pays agressés ne peuvent rien faire (il est trop tard), soit ils croient à une intoxication de l’Abwehr (grosse erreur de <a href="http://www.grande-guerre.org/Biographies/Gamelin.htm">Gamelin</a> !).</p>
<h3>L’attaque contre l’URSS</h3>
<p>Canaris sait que, comme Napoléon, Hitler commet une erreur monstrueuse en s’en prenant à la Russie sans en avoir fini préalablement avec l’Angleterre. Il est également au courant depuis août 1940 des projets d’invasion, en observant les mouvements de troupe.</p>
<p>Selon Brissaud, Hitler a beaucoup hésité. Il en serait arrivé à la conclusion que l’Angleterre tomberait quand elle n’aurait plus à espérer l’aide des Russes (les Américains sont trop loin). Et attaquer Gibraltar sans l’accord de Franco, c’est la guérilla assurée. Hitler au moins ne commettra pas cette erreur-là de Napoléon.</p>
<p>Hitler aurait été aussi moins confiant que ses propres généraux sur le temps nécessaire pour détruire l’Armée Rouge — sans imaginer bien sûr l’issue désastreuse.</p>
<p>Brissaud rapporte que les Anglais étaient au courant de <em>Barbarossa</em> avant bien des chefs nazis, et que Churchill avait averti Staline. Lequel n’en tint pas compte. Cela cadre avec ce que Canaris pense de Staline : l’attaque de juin 1941 est une surprise totale pour le dictateur communiste. Le petit amiral ne croit pas non plus à une victoire rapide des Allemands (et cette fois il a raison), et il prévoit correctement que les Japonais, surpris par l’attaque, ne s’y joindront pas, ce qui sauve probablement la Russie.</p>
<p>Pendant l’invasion, Canaris tente en vain de réveiller les généraux de la Wehrmacht, suite aux ordres sur le traitement des prisonniers de guerre russes. Il tente de démontrer que cela est contre-productif (mise à dos des populations, représailles sur les prisonniers allemands...). Mais les SS mènent le jeu, et dénoncer les abus est suspect...</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/05/423-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-5">À suivre...</a></em></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/04/422-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-4#rev-pnote-379-1" id="pnote-379-1">1</a>] <em>Une idée d’uchronie : le contre-ordre arrive trop tard à certaines unités, les Polonais attaquent, et le début de l’invasion allemande tourne au chaos. Je ne pense pas que cela ait changé grand-chose au résultat final de l’affrontement panzers </em>vs.<em> cavalerie polonaise.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/04/422-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-4#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/379Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (3) : l’Espagne et Gibraltarurn:md5:d5ecf17f1f5056854df26457b7563e012007-10-03T19:22:00+00:002011-05-01T13:25:18+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondiale<p>Canaris a souvent mené son propre jeu diplomatique. Le cas de l’Espagne est exemplaire.</p> <h4>La Guerre d’Espagne</h4>
<p>La guerre civile y éclate en 1936 lorsque l’armée s’insurge contre le gouvernement républicain, après bien des mois de tension et d’attentats, et devant la crainte d’un coup de force communiste téléguidé par Staline. Canaris soutient Franco par anticommunisme, sans approuver les méthodes brutales et l’épuration impitoyable que le Caudillo applique par la suite. Le grand succès de Canaris est de pousser un Hitler dubitatif à soutenir la cause des nationalistes espagnols.</p>
<p>La première étape consiste à fournir à Franco les avions nécessaires pour franchir le détroit de Gibraltar. Sans cela, le général et son armée sont bloqués au Maroc espagnol ! Mussolini envoie quelques avions, mais Hitler hésite. Goering est contre, par peur d’envenimer les relations avec les Anglais et les Français, plutôt pro-républicains. Canaris explique qu’il est hors de question d’avoir une Espagne communiste, que les troubles se propageraient en France, et que Franco est l’homme de la situation, brillant, pragmatique et courageux — Canaris ne précise pas que Franco n’adhère pas aux thèses racistes des fascistes et nazis et que, farouchement patriote, il répugne à voir d’autres pays se mêler des affaires espagnoles.</p>
<p>Hitler se range aux arguments de Canaris et accepte d’envoyer des avions en Espagne. Le petit amiral devient également l’intermédiaire privilégié entre le IIIè Reich et l’Espagne franquiste.</p>
<p>Franco fait finalement passer son armée en Espagne grâce aux avions italiens et allemands. Cependant, sa conquête du pays se heurte aux fournitures d’armes russes et françaises, et aux milliers de volontaires venus rejoindre le camp républicain. Canaris informe Franco de l’étendue de ces fournitures, et le pousse à demander l’aide de Berlin. Et à Berlin, il défend la politique de conquête progressive de Franco, contre les nazis qui veulent des coups d’éclat.</p>
<p>En novembre 1936, la <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Legion_Condor" hreflang="de">Légion Condor</a>, corps aérien allemand combattant pour les franquistes, est fondée. Elle participe à tous les combats importants, et se déshonore à <a href="http://es.wikipedia.org/wiki/Bombardeo_de_Guernica" hreflang="es">Guernica</a>. Les services allemands jouent également le rôle d’intermédiaires dans les achats d’armements des nationalistes.</p>
<p>En 1937, Hitler ne souhaite pas une victoire totale et rapide de Franco ; que la tension persiste dans la région lui convient, il a les mains plus libres ailleurs : Mussolini, empêtré en Espagne, ne s’oppose pas à l’Anschluß et ne peut que se rapprocher du Reich. Cependant, la guerre civile espagnole s’achève en 1939, un peu trop tôt au goût d’Hitler.</p>
<h4>Franco ne veut pas entrer en guerre</h4>
<p>Fin 1940, après la chute de la France, Hitler cherche à étouffer l’Angleterre qui résiste toujours. Il pense donc logiquement à couper une des voies de communications vitales de l’Empire britannique vers l’Égypte et l’Inde, en s’en prenant à Gibraltar. Cependant, cela impose la collaboration d’un Franco devenu très prudent, et qui doute de l’ampleur de l’aide allemande à l’Espagne.</p>
<p>Canaris joue un double-jeu permanent, fournissant à Franco des arguments pour contrer Hitler, lequel l’a pourtant envoyé convaincre son ami d’entrer en guerre aux côtés de l’Axe ! Or Canaris, comme Franco, se fait moins d’illusions qu’Hitler sur une reddition britannique. Il faut gagner du temps.</p>
<p>Franco fait remarquer qu’au bord de la famine après la guerre civile, l’Espagne ne peut participer à la guerre sans aide allemande réellement massive dans tous les domaines ; il dit ne pas pouvoir résister à des représailles britanniques (notamment sur les Canaries) ou un blocus ; il exige en contrepartie de son entrée en guerre bien plus que Gibraltar, à savoir tout le Maroc et Oran — sachant qu’en promettant cela Hitler se brouillerait avec Pétain et surtout risquerait de voir basculer l’Empire français, non occupé, dans le gaullisme, éventuellement flotte comprise (cette flotte qui se sabordera à Toulon en 1942 lors de l’occupation de la zone libre).</p>
<p>Franco va finalement jusqu’à refuser le passage à des troupes allemandes vers Gibraltar, assurant que l’Espagne se défendrait le cas échéant — par fierté nationale. Canaris enfonce le clou en rapportant à ses chefs la situation économique catastrophique de l’Espagne.</p>
<h4>Le rôle de Pétain</h4>
<p>Pétain joue un rôle non négligeable dans cette affaire. Brissaud le dépeint fin 1940 comme un attentiste, strict neutraliste, qui négocie aussi bien avec les Allemands que les Anglais, tentant d’obtenir une place honorable pour la France, dans le respect des clauses de l’armistice. Il est notamment hors de question d’abandonner des parties de l’Empire ou de laisser les Allemands attaquer Gibraltar via le Maroc.</p>
<p>Renseigné indirectement par Canaris, Pétain s’allie quasiment à Franco pour tenir tête à Hitler. Le chancelier allemand cherche à faire basculer Pétain dans le camp anti-anglais, il ne peut donc pas le brusquer. Cela peut sembler hallucinant quelques semaines à peine après l’écrasante défaite française.</p>
<p>L’entrevue de Montoire reste en France comme la marque infâmante du début de la collaboration, mais pour Brissaud c’est quasiment le moment où Hitler a perdu Gibraltar voire la guerre ! Pétain résiste aux avances d’Hitler de l’aider à hâter la chute de l’Angleterre. Hitler comprend que Pétain ne l’aidera pas activement contre l’Angleterre. Canaris exulte.</p>
<p>C’est ce moment que choisit Mussolini pour attaquer la Grèce - l’aventure tourne au désastre. Après bien de nouveaux atermoiements d’un Franco soutenu par Canaris, Hitler abandonne l’idée de prendre Gibraltar et se tourne donc vers les Balkans, puis la Russie.</p>
<h3>Le débarquement allié en Afrique du Nord</h3>
<p>Les Alliés lancent l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Torch">Opération Torch</a> fin 1942. L’Abwehr en a vent quelques jours par avance, grâce à, selon Brissaud, le sultan marocain <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Mohammed_V_du_Maroc">Mohammed V</a> ! En fait, les nationalistes marocains font monter les enchères entre les Alliés et leurs ennemis pour tenter d’arracher l’indépendance de leur pays. C’est de bonne guerre... (De même, selon Brissaud, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Habib_Bourguiba#Seconde_Guerre_mondiale">Habib Bourguiba</a> agit comme soutien tunisien des Allemands...)</p>
<p>Avertis, Keitel et Hitler n’avaient pas cru à l’opération... En représailles, l’Allemagne envahit la France libre. Comme Canaris l’a prévu, la flotte française ne se joint pas aux Allemands et se saborde à Toulon, alors qu’elle aurait pu faire la différence en Méditerranée. Hitler reparle d’envahir l’Espagne, il pense que les Alliés la menace. Canaris pousse les Espagnols à réaffirmer leur intention de défendre leur pays, et leur accord de rejoindre l’Axe sous des conditions assez hallucinantes. Hitler laisse définitivement tomber l’Espagne.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/04/422-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-4">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/384Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (2) : le nazismeurn:md5:1495889cd4642e1077e03ba8da9289d52007-10-02T07:24:00+00:002011-04-26T10:17:58+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Canaris au milieu des nazis.</p> <h3>Canaris et le nazisme</h3>
<p>Canaris hait la violence et la brutalité (bizarres qualités pour un militaire !). Sa vision des services secrets est celle d’une guerre entre <em>gentlemen</em>, donc avec certains principes. Si comme beaucoup d’Allemands il juge avec une certaine bienveillance l’arrivée d’Hitler au pouvoir, et espère qu’il éloignera le danger communiste et rendra sa place à l’Allemagne, il ne se prive pas de critiquer les erreurs et failles du régime.</p>
<p>Le « petit amiral » s’aperçoit peu à peu de la vraie nature du régime, de sa brutalité, de son manque total de respect des règles de base de la civilisation. Ses yeux s’ouvrent notamment après 1937 et les premiers plans sérieux d’expansion territoriale vers l’Autriche et la Tchécoslovaquie ; puis lors des évictions par Hitler des généraux von Fritsch (accusé d’homosexualité) et von Blomberg (remarié à une prostituée), d’une manière totalement abjecte. Par la suite, et notamment lors des différentes invasions allemandes, il utilisera son service pour amasser une énorme documentation sur les méfaits des nazis.</p>
<h4>L’affaire Toukhatchevsky</h4>
<p>L’affaire Toukhatchevsky fera plaisir aux adeptes de machinations particulièrement tordues : <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Toukhatchevski">ce maréchal soviétique</a>, puissance montante de l’Armée Rouge, a fait partie d’un échange avec l’armée allemande dans les années 20 (les Allemands et les Soviétiques, parias de l’Europe, s’étaient naturellement et secrètement rapprochés sur le plan militaire).</p>
<p>Staline se méfie de la popularité et de l’indocilité du général. Ce dernier prône également une guerre préventive contre le régime nazi, alors que Staline cherche à diriger l’Allemagne contre l’Occident, et négocie avec Hitler (qui aura ainsi les mains libres pour s’imposer en Autriche, en Tchécoslovaquie...).</p>
<p>En 1937, Heydrich demande le dossier de la Wehrmacht sur Toukhatchevsky à Canaris. Celui-refuse sans ordre signé du Führer. Heydrich envoit le SD cambrioler les archives de la Wehrmacht !</p>
<p>Le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/NKVD">NKVD</a> se renseigne auprès d’un de ses agents parisiens, Skobline, qui travaille en fait pour le SD allemand par haine des Rouges, et bondit sur l’occasion pour déstabiliser l’Armée Rouge. Heydrich monte alors un dossier bidon, à base de faux rapports de contre-espionnage allemand, qui accuse Toutchatchevsky et des généraux allemands de préparer des coups d’État dans leurs deux pays. Il « intoxique » ainsi le président tchèque Beneš, qui le transmet à Staline.</p>
<p>Staline n’est pas dupe mais c’est exactement ce qu’il recherche : Toukhatchevski et de très nombreux autres, convaincus de haute trahison, sont liquidés, ce qui marque les début des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Grandes_Purges">Grandes Purges staliniennes</a>. Skobline est parvenu à ses fins : l’Armée Rouge, privée de ses officiers compétents, montre sa faiblesse contre la Finlande en 1940, et se fait tailler en pièces en 1941 par les nazis.</p>
<p>Canaris n’a pas trempé dans cette machination qu’il n’aurait pas approuvée. Pourtant, il sait bien que Toukhatchevsky est <em>réellement</em> coupable ! Celui-ci livrait effectivement des secrets aux Français et les Britanniques pour les entraîner aux côtés de l’URSS contre l’Allemagne. Les puissances occidentales n’écoutèrent cependant pas Toukhatchevsky.</p>
<h4>Pendant la guerre</h4>
<p>Plus la guerre progresse, plus Canaris devient pessimiste. Avant même l’invasion de l’Autriche ou de la Tchécoslovaquie, il avertit en vain Hitler des dangers de représailles alliées. Par la suite, chaque conquête allemande, chaque exaction nazie, lui semble une nouvelle catastrophe dont ses compatriotes paieront un jour le prix. Même en 1940, à l’apogée du Reich, Canaris ne se laisse pas contaminer par l’optimisme ambiant et sait que la suprématie allemande peut être remise en question n’importe quand.</p>
<p>Dès le début de sa carrière à l’Abwehr, il est partie prenante des affrontements et des luttes d’influence entre le parti nazi, les SS, l’armée... Par une alliance avec les renseignements des Affaires Étrangères notamment, par son réseau d’amis étrangers, Canaris devient une des personnalités les mieux informées de la politique étrangère allemande. Il a de très nombreux contacts avec des gens pas tous hostiles à Hitler, mais que les méthodes des SA, SS... écœurent.</p>
<h4>Survivre parmi les loups</h4>
<p>Canaris n’a pas pu accéder à ce poste, ni s’y maintenir dans ces circonstances, sans posséder de solides qualités de beau parleur, d’embobineur, de sens de la répartie, avec ce qu’il faut d’hypocrisie pour ne pas dire à Hitler ce qu’il ne vaut mieux pas lui dire. Il sait laisser passer ses accès de colère, parfois le retourner, en tout cas le calmer. S’il ne peut faire fléchir la politique du Führer, il a toute son oreille…</p>
<p>À l’inverse, il prend prétexte de ses contacts fréquents avec Hitler pour appuyer ses dires auprès d’autres interlocuteurs, qui n’osent jamais vérifier les dires de Canaris.</p>
<p>L’Abwehr remplit brillamment sa tâche de service d’espionnage dans son cadre « normal », mais Canaris reçoit évidemment d’Hitler certains ordres qui lui répugnent. Sa tactique habituelle consiste en manœuvres dilatoires qui rendent finalement l’ordre caduc ou oublié.</p>
<p>Un de ces ordres « oubliés » tient à l’organisation de massacres de Polonais et de Juifs par des nationalistes ukrainiens téléguidés par l’Abwehr lors de la liquidation de la Pologne. D’autres portent sur l’assassinat de plusieurs responsables étrangers (par exemple les genéraux français <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Maxime_Weygand">Weygand</a> ou <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Giraud_(général)">Giraud</a>).</p>
<h4>Le conspirateur</h4>
<p>Canaris contacte discrètement une bonne partie des généraux de la Wehrmacht les moins attachés à Hitler pour les rallier à sa conspiration. La plupart cependant n’oseront pas aller plus loin que désapprouver les crimes des SS. On croise au détour des pages des noms connus comme <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Friedrich_Paulus">Paulus</a> (le futur perdant de Stalingrad) et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Gerd_von_Rundstedt">von Runstedt</a> (qui méprise Hitler et sera démis plusieurs fois pour lui tenir tête, mais obéira jusqu’au bout). Tout se passe comme si les généraux attendaient d’Hitler lui-même l’ordre de le renverser - le devoir d’obéissance avant tout.</p>
<h3>Hitler</h3>
<p>Les événements rapportés par Brissaud tournent évidemment très souvent autour d’Hitler, de ses choix, hésitations, et négociations, de son esprit de contradiction.</p>
<p>M’a frappé la facilité avec laquelle le chancelier allemand mentait à ses interlocuteurs et leur racontait ce qu’ils voulaient entendre. Des phrases totalement hallucinantes parsèment le livre, par exemple : « Je suis un artiste, pas un homme politique. (...) Une fois l’affaire polonaise réglée, je voudrais finir ma vie en artiste (...). Quand l’affaire polonaise sera liquidée, je me retirerai... » (à l’ambassadeur britannique <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Neville_Henderson" hreflang="en">Sir Neveille Henserson</a> en 1939). À <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Jodl">Jodl</a> le Führer explique que l’attaque de l’URSS est une guerre préventive, alors qu’il prévoit depuis toujours d’annexer le pays.</p>
<p>Canaris à un moment explique la différence entre Hitler et Churchill : le premier et ses généraux sont des continentaux, sans connaissance réelle des pays étrangers, bourrés de préjugés, en fait incapables de stratégie au-delà de l’Europe ; les Britanniques raisonnent en terme d’Empire planétaire, ils ne traiteront que si cet Empire est menacé - ce qu’Hitler n’arrivera pas à faire.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3">À suivre…</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/10/02/421-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-2#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/378Biographie de l’amiral Canaris, par André Brissaud (1)urn:md5:be7e030ca9e38156a130e1dd240235f62007-09-30T12:01:00+00:002011-04-26T10:10:00+00:00ChristopheHistoireespionnageguerrehistoireRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Histoire d’un personnage peu connu mais très important de la Seconde Guerre Mondiale, un antinazi qui n’en dirigeait pas moins le contre-espionnage allemand sous Hitler !</p> <p>Pendant ma période historique « préférée », la très chaotique Seconde Guerre Mondiale, les personnages les plus fascinants se trouvent souvent dans le camp allemand. À côté d’une belle brochette d’ordures, émergent quelques héros, déchirés entre leur attachement à leur pays et leur horreur du régime nazi. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe">J’avais parlé de Fritz Kolbe</a>, cet obscur petit fonctionnaire qui avait massivement renseigné les services secrets américains.</p>
<p><img src="http://www.kreuzer-dresden.de/dresdenbilder/dresdcanaris5.jpg" alt="Wilhelm Canaris, 1940" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Plus connue est la figure de l’amiral Canaris, qui ne dirigea pas moins que l’Abwehr, à savoir l’espionnage et le contre-espionnage de la Wehrmacht, pendant quasiment tout le règne d’Hitler !</p>
<p>Contrairement à ce que l’on pourrait penser, celui que l’on surnommait « le petit amiral » n’était pas nazi. Au contraire : une bonne partie de la résistance à Hitler au sein de la Wehrmacht gravita autour de lui. L’Abwehr, nid d’opposants au Führer, servit plus l’Allemagne que le nazisme. Partiellement démasqué en 1944, Canaris est pendu en avril 1945, sur un des derniers ordres directs d’Hitler.</p>
<p>Cette biographie est parue en 1970, j’ignore si la recherche historique a évolué depuis. André Brissaud a interrogé nombre de collaborateurs ou adversaires de l’amiral, seulement vingt-cinq ou trente ans après les faits. Le danger de souvenirs un peu embellis me semble réel, mais manifestement Canaris mérite l’admiration que l’historien lui porte.</p>
<h3>Jeunesse et Première Guerre Mondiale</h3>
<p>Issu de la bourgeoisie aisée, beau parleur et plein d’humour, doué d’une mémoire phénoménale, intelligent et doué en langues, Wilhelm Canaris choisit la carrière militaire, dans la marine, moins « féodale » - les Canaris sont patriotes et monarchistes mais pas militaristes.</p>
<p>Au début de la Première Guerre Mondiale, Canaris est enseigne de vaisseau sur le <em><a href="http://www.europractica-dresden.de/fr/kreuzerfr.html">Dresden</a></em>, qui joue à cache-cache avec la marine britannique sur les côtes sud-américaines, après le désastre de la bataille des Falklands. Déjà Canaris montre des qualités diplomatiques pour assurer l’approvisionnement de son bâtiment. Après la destruction du navire, l’équipage est interné. Canaris s’évade avec d’autres et réussit à revenir en Allemagne en 1916 - via l’Angleterre, en se faisant passer pour chilien !</p>
<p>Il plonge alors dans le monde du renseignement, et part en Espagne surveiller les mouvements des navires alliés dans les ports. Canaris se lie alors avec nombre de gens qui compteront lors de la Guerre d’Espagne, peut-être Franco lui-même.</p>
<p>En 1917, il réussit à revenir en Allemagne, et en 1918 il est affecté à un sous-marin. Il revient à Kiel juste à temps pour voir le IIè Reich s’effondrer.</p>
<h3>L’entre-deux-guerres</h3>
<p>Canaris n’est pas d’extrême-droite mais est totalement anti-communiste, et il participe à la lutte contre les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Luxembourgisme">spartakistes</a> berlinois, et même au <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Putsch_de_Kapp">putsch manqué de Wolfgang Kapp en 1920</a>.</p>
<p>Le calme revenu, il dirige plusieurs navires et monte en grade, voyage plusieurs années dans de nombreux pays pour le compte de la marine allemande, passe à l’État-major... En 1934, il semble devoir terminer paisiblement sa carrière comme commandant de forteresse, quand le Ministère de la Guerre lui demande de diriger son service de renseignements, l’Abwehr.</p>
<h3>Heydrich</h3>
<p>Bizarrement, Canaris s’est très tôt lié d’amitié avec celui qui deviendra un des plus sinistres personnages du Troisième Reich, successeur possible d’Hitler même, et l’adversaire impitoyable et mortel de Canaris.</p>
<p>Canaris rencontre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Reinhard_Heydrich">Reinhard Heydrich</a> alors que celui-ci est sous ses ordres en 1920. Le jeune homme se lie vite à la famille Canaris : fasciné par les aventures sud-américaines du futur amiral, il partage aussi un grand amour de la musique avec Mme Canaris.</p>
<p>Heydrich incarne l’aryen parfait tel que le rêve Hitler : grand, blond, très sportif (c’est un escrimeur de niveau international), musicien, mais aussi totalement dénué de scrupules, prétentieux, attaché au pouvoir pour le pouvoir. Cet homme à femme est exclu de la marine en 1931 pour une sombre histoire de jeune fille mise enceinte, et rejoint le chef des SS <a href="http://www.seconde-guerre.com/biographies/biographie-n-himmler.html">Himmler</a> dont il devient l’adjoint.</p>
<p>Ses qualités de technocrate lui permettent de monter très vite dans la hiérarchie SS et de suivre l’ascension de ceux-ci. Antithèse complète de son chef direct Himmler, il forme un couple infernal avec lui. Il songe certainement à ses chances de succéder au vieillissant Hitler - il en a la carrure. Il participe activement à la tristement célèbre <a href="http://www.ghwk.de/franz/textes.htm">conférence de Wannsee qui décide de la mise en place de la « solution finale »</a>.</p>
<p>Une rumeur (que l’on sait aujourd’hui fausse, mais Brissaud semble y croire) <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Reinhard_Heydrich#Heydrichs_angebliche_j.C3.BCdische_Abstammung" hreflang="de">attribue une grand-mère juive à Heydrich</a>. Les informations liées à l’état-civil exact du SS sont dans les dossiers que Canaris tient sur lui comme sur tous ses adversaires, et constituent un important atout défensif.</p>
<h3>Aux renseignements</h3>
<p>Les services de renseignements de l’armée allemande (<em>Abwehr</em>), bridés jusque là par le <a href="http://www.herodote.net/histoire/evenement.php?jour=19190628">Traité de Versailles</a>, sont en pleine restructuration lorsque Canaris en prend la tête.</p>
<p>La nomination de Canaris à la tête de l’Abwehr constitue une surprise pour lui. Cependant, plusieurs facteurs l’expliquent :</p>
<ul>
<li>ses qualités intellectuelles ;</li>
<li>ses capacités au maniement des hommes ;</li>
<li>sa bonne connaissance de nombreux pays et langues due à de nombreux voyages ;</li>
<li>ses résultats déjà obtenus pendant la Première Guerre Mondiale ;</li>
<li>ses agissements anti-communistes pendant l’immédiat après-guerre (en 1934 on est au début du règne de Hitler) ;</li>
<li>ses bonnes relations, tant avec son prédécesseur, Konrad Patzig, relevé pour cause de tiédeur envers le national-socialisme, qu’avec son ancien élève et nouvel adversaire, Reinhard Heydrich : il faut quelqu’un capable de travailler avec les SS, ce sera le facteur décisif.</li>
</ul>
<p>Canaris transforme très vite l’Abwehr en service de renseignements complet : contre-espionnage, espionnage, action et sabotage, à l’intérieur et et l’extérieur. La devise est : « le Service de Renseignements est l’apanage des gentilshommes » — Canaris ressemble plus à James Bond qu’il n’y paraît. Dans le recrutement, il insiste sur les langues, la loyauté, le droit, la morale. Il ne veut pas des gangsters que l’on croise dans certains services, ni de simples militaires qui ne connaissent que la hiérarchie ; il embauche même des civils. Par contre, Canaris refuse les femmes.</p>
<p>Des devises sont caractéristiques : « Mentir est notre métier. Mentir est un art. » « Un officier de l’Abwehr digne de ce nom doit être couché à dix heures du soir. Après, on ne dit que des conneries. »</p>
<p>Ses hommes, rarement des nazis convaincus (et souvent poussés vers la sortie dans le cas contraire), adhèrent immédiatement à l’homme et à sa philosophie. Brissaud a constaté, vingt-cinq ans après, que les anciens de l’Abwehr avaient conservé une mémoire admirative du petit amiral.</p>
<p>Évidemment, le contraste avec la direction nazie de l’Allemagne n’en est que plus violent.</p>
<p>Brissaud donne quelques exemples de succès allemands en matières d’espionnage, aux États-Unis ou en France, ou de contre-espionnage.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/02/421-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-2">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/30/420-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-1#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/377Tintin et l’Histoire (4)urn:md5:0f06fbf0b03744bd79432a22691e502f2007-08-31T22:04:00+00:002011-04-26T07:25:33+00:00ChristopheHistoirehistoireSeconde Guerre MondialeTintin<p>Des <em>Boules de cristal</em> à l’<em>Or noir</em>.</p> <h3>L’après-guerre</h3>
<ul>
<li>En 1943 et 1944 commence, toujours en strips quotidiens, une nouvelle double aventure de Tintin : <strong><em>les Sept Boules de Cristal</em></strong> et <strong><em>le Temple du Soleil</em></strong>. Là encore l’histoire est apolitique et intemporelle.<br /> <br />Cependant, à la libération de Bruxelles en septembre 1944 la parution du <em>Soir</em> et donc celle des <strong><em>Sept boules de cristal</em></strong> est interrompue. Comme beaucoup de journalistes en activité pendant l’Occupation, donc <em>a priori</em> suspects de collaboration, Hergé ne peut plus écrire dans les journaux, et en est réduit à retravailler ses anciens albums (les versions actuelles des premiers albums datent de cette époque). Casterman demande en effet qu’ils soient tous standardisés à 64 pages - conséquence peut-être des restrictions de papier.<br /> <br />Ce n’est qu’en 1946 que l’aventure reprend à peu près là où Hergé avait dû l’abandonner. Les conditions sont incomparablement meilleures : là où Hergé devait se contenter de strips en noir et blanc dans le quotidien (ce qui est malgré tout très formateur pour la narration), il a à présent à sa disposition deux pages couleur à l’italienne, dans son propre journal, le <em>Journal de Tintin</em> ! <br /> <br />Le <em>Temple du Soleil</em> se déroule encore une fois dans un pays exotique, mais les recherches d’Hergé et de ses collaborateurs (il ne travaille plus seul) poussent le soin du détail très loin. L’album est très réaliste. La seule fausse note est cette éclipse de soleil qui n’aurait jamais fait peur aux Incas. Rappelons qu’à cette époque, la seule documentation accessible sur les pays lointains réside à la bibliothèque ou au cinéma !</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Tintin au pays de l’Or noir</em></strong> est achevé en 1950. C’est l’album à l’histoire la plus tordue, avec <em>trois</em> versions.<br /> <br />Cette aventure, rappelons-le, avait commencé en septembre 1939, quand la Seconde Guerre Mondiale éclatait. Les premières pages de l’histoire ne parlent d’ailleurs que de menaces de guerre, bien que ce soit là à cause du pétrole. La puissance belliciste à la base des problèmes d’explosion des moteurs n’est jamais nommée, mais il est transparent pour les lecteurs de l’époque qu’il s’agit de l’Allemagne. <br /> <br />La parution dans le <em>Petit Vingtième</em> est ralentie par des ennuis de santé puis la mobilisation d’Hergé. Puis l’aventure est brutalement interrompue par l’occupation de la Belgique par les nazis. Vu le sujet anti-allemand de l’<em>Or noir</em>, Hergé préfère commencer une nouvelle aventure (<em>Le Crabe aux Pinces d’Or</em>) dans le <em>Soir</em>, sur un sujet nettement plus « neutre ».<br /> <br /><em>L’Or noir</em> est redessiné et repris de zéro après guerre et la conclusion dans le <em>Journal de Tintin</em> du <em>Temple du Soleil</em>. Dans cette version comme dans celle de 1940, Tintin débarque en Palestine, toujours sous mandat britannique, et se trouve piégé dans les conflits entre les Britanniques, activistes sionistes (l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Irgoun">Irgoun</a> faisait dans le terrorisme à l’époque), et les Arabes. Israël ne devient indépendant qu’en 1948, au moment où Hergé reprend l’histoire.<br /> <br />Cet écart de dix ans entre début et conclusion finale explique aussi une bizarrerie : l’intervention d’Haddock à la fin de l’histoire, totalement imprévue, inexplicable et explicitement inexpliquée. Haddock, en 1940, n’existait tout simplement pas ! Ni Tournesol ni Moulinsart évoqués dans les dernières pages, d’ailleurs. Par contre, les risques de guerre imminente évoqués au début de l’album deviennent assez irréels, et la chanson « Boum, quand vot’ moteur fait boum » copiée sur Trénet, devient alors démodée. <br /> <br />La troisième version de l’histoire date de 1971, aussi sur demande de l’éditeur anglais qui avait déjà demandé une modification de l’<em>Île noire</em>. La Palestine est remplacée par l’imaginaire Khemed ; Britanniques et Juifs disparaissent et la politique se réduit à l’affrontement entre les deux émirs pour le pouvoir au Khemed, sans que l’histoire en souffre. Plus intemporelle et nettement plus simple à comprendre que l’imbroglio palestinien d’avant 1948, cette version plait aussi davantage à Hergé.<br /> <br />En 1950 sont également fondés les Studios Hergé, où le créateur de Tintin rassemble tous ses collaborateurs et industrialise en quelque sorte sa création. Beaucoup de beau linge de la BD belge y est passé : E.P. Jacobs (<em>Blake et Mortimer</em>), Roger Leloup (<em>Yoko Tsuno</em>), Jacques Martin (<em>Alix</em>), Bob de Moor...</li>
</ul>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/09/04/400-tintin-et-l-histoire-5">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/08/31/399-tintin-et-l-histoire-4#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/360Tintin et l’Histoire (2)urn:md5:c0947a56271eae9abb85007a125895e22007-08-28T22:21:00+00:002011-04-25T21:28:00+00:00ChristopheHistoireespionnagehistoireSeconde Guerre MondialeTintin<p>Des <em>Cigares</em> au <em>Pays de l’or noir</em> : Tintin pendant l’avant-guerre.</p> <h3>Tintin et les bruits de bottes</h3>
<ul>
<li><strong><em>Les Cigares du Pharaon</em></strong>, en 1934, contient enfin une intrigue digne de ce nom, même si l’histoire est bourrée d’invraisemblances et de coïncidences abracadabrantesques. Déjà, gamin, j’avais été choqué par le cheick qui déclare à Tintin qu’il est un de ses admirateurs, et lui montre <em>Objectif Lune</em>, une histoire pourtant dans le <em>futur</em> de Tintin !... mais publié avant la dernière réédition des <em>Cigares</em>.<br />L’ambiance rappelle furieusement les années 30, fatalement. L’histoire de malédiction du pharaon Ki-Oskh est pour nous un cliché, mais Hergé ne fait qu’évoquer ce qui est dans l’air de son temps, une douzaine d’années seulement après la découverte du tombeau de Toutankhamon.<br />Hergé commence à étoffer son univers et apparaissent les premiers personnages récurrents : les Dupont et Dupond (archétypes des imbéciles qui suivent un ordre jusqu’à l’absurde), le marchand Oliveira da Figueira, et le « grand méchant » perpétuel, Rastapopoulos (inspiré d’Onassis ?).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Le Lotus bleu</em></strong>, vague suite du précédent, s’inspire complètement des événements de l’époque : Tintin parcoure la Chine de 1936, abrutie par l’opium imposé par les Occidentaux, lesquels font ce qu’ils veulent dans leurs concessions. Le pays se fait progressivement envahir par le Japon. Hergé prend enfin Tintin au sérieux, et cette fois il s’est soigneusement renseigné. Il a longuement rencontré un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Zhang_Chongren">étudiant en art chinois</a> de passage à Bruxelles, qui inspire directement le personnage de Tchang. Pour la petite histoire, cet étudiant fera par la suite une belle carrière artistique dans son pays.<br />C’est le premier album à peu près réaliste, bien construit, bien documenté, et où les préjugés du milieu bourgeois/catholique d’Hergé ne ressortent pas. L’ambiance anti-coloniale est aux antipodes de <em>Tintin au Congo</em>. C’est aussi pour cette raison que c’est aussi le premier qu’Hergé ne redessinera pas après la guerre (à part les toutes premières pages).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>L’Oreille cassée</em></strong> envoie Tintin en Amérique du Sud. Entre mille péripéties, on distingue un événement majeur des années 30, la sanglante <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Chaco">Guerre du Chaco</a> entre Paraguay et Bolivie, à peine transposée, et <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/03/21/319-les-guerres-oubliees-3">dont j’avais brièvement parlé ici</a>. Les deux belligérants sont soutenus chacun par une compagnie pétrolière différente et s’approvisionnent auprès du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Basil_Zaharoff">même marchand d’armes</a>. Dans la veine du <em>Lotus bleu</em>, la critique devient de plus en plus grinçante.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>L’Île noire</em></strong>, pour le lecteur de la fin du XXè siècle ou du XXIè, semble marquer un saut temporel pour Tintin : l’environnement passe directement des années 30 aux années 60 ! En fait, la version actuellement publiée a été redessinée très tard (1969), sur demande de l’éditeur anglais, alors que les deux albums précédents et les deux suivants n’ont pas été significativement retouchés. Le phénomène est frappant par exemple lors de l’intervention des pompiers anglais : la voiture à bras de 1938 est remplacée par un camion dernier cri de l’époque.<br />Cet album mélange donc des éléments d’intrigue de 1938 (le Dr Müller, c’est l’Allemagne nazie...) et des décors de 1969. Le docteur Müller perd du coup sa dimension originale de méchant nazi venu saboter les démocraties occidentales. Par contre, le gorille rappelle toujours celui de <em>King Kong</em> (sorti en 1933).</li>
</ul>
<ul>
<li>Retour aux années 30 avec le <strong><em>Sceptre d’Ottokar</em></strong>, publié juste avant la Seconde Guerre Mondiale. Les clés principales de l’album sont simples, encore faut-il les connaître : <br />La Syldavie est la Roumanie (TranSYLvanie et MolDAVIE). Son ennemie la Bordurie est un mélange de Bulgarie (ennemie récurrente de la Roumanie) et de Bessarabie (aujourd’hui Moldavie). La conspiration pour détrôner le roi Ottokar est en réalité celle de la Garde de Fer, organisation fasciste roumaine qui tentait d’accéder au pouvoir en Roumanie à cette époque. Les références aux interférences allemandes (nazies) en Roumanie pullulent. C’est en fait l’histoire d’un « Anschluß raté » — alors celui de l’Autriche par l’Allemagne avait réussi l’année précédente. Mais le parallèle existe aussi avec la Belgique d’Hergé, autre petit pays à l’indépendance toujours remise en question.<br />La Castafiore apparaît dans cet album pour la première fois.</li>
</ul>
<ul>
<li>La première version de <strong><em>Tintin au Pays de l’Or noir</em></strong> s’insère ici. Cependant, la publication est interrompue par la Seconde Guerre Mondiale, bien qu’Hergé, mobilisé, ait continué de fournir ses planches. <em>Le Petit Vingtième</em> disparaît de la Belgique occupée.</li>
</ul>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/08/29/398-tintin-et-l-histoire-3">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/08/28/397-tintin-et-l-histoire-2#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/356« Paris brûle-t-il ? » de Larry Collins et Dominique Lapierre (2)urn:md5:7692e61a41cc43ffcb4820d59e3067b82007-04-25T20:34:00+00:002011-03-28T20:59:30+00:00ChristopheHistoirecommunismehistoireHistoire de FranceLibérationParisRésistanceSeconde Guerre Mondiale<p>Suite et fin de la Libération de Paris.</p> <p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/04/24/315-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-1">(Voir ici pour la partie 1.)</a></em></p>
<h3>Insurrection</h3>
<p>Chaban-Delmas, après un périple assez hallucinant entre Paris occupé et Londres, et une traversée du front à bicyclette, transmet les ordres de de Gaulle : attendre. Cependant, les communistes ne l’entendent pas de cette oreille et préparent le soulèvement. Déjà des grèves touchent train et métro.</p>
<p>En réaction, une partie non communiste de la Résistance prend les devants : tout d’abord la police (oui, la police de Vichy, celle qui rafla aussi les Juifs pour le Vel d’Hiv’) se met en grève, puis... prend d’assaut le symbole de l’administration : la Préfecture.</p>
<p>Un peu partout, des petits groupes mal armés plus ou moins spontanés prennent les bâtiments importants d’assaut, des barricades apparaissent, les Allemands se font attaquer à chaque coin de rue : communistes comme gaullistes lancent l’insurrection.</p>
<p>Parmi la foule d’anecdotes, tragiques ou comiques, de ces journées, citons cette femme dont le mariage (par procuration !) est interrompu par l’arrestation du maire et son remplacement immédiat par un résistant ; ou encore Yvon Morandat, 26 ans, qui prend possession de Matignon en compagnie de sa secrétaire, armé en tout et pour tout d’un ordre de de Gaulle, et de pas mal de culot. Dans la Préfecture, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Frédéric_Joliot-Curie">Joliot-Curie</a> fabrique (invente ?) des cocktails Molotov dans des bouteilles de grands crus.</p>
<p>L’action est osée. Militairement, les Allemands sont plus nombreux, bien mieux armés, et possèdent des chars. Le pari ne tient que si les Alliés entrent très vite dans la ville.</p>
<p>En quelques jours, von Choltitz reçoit plusieurs fois l’ordre de faire sauter tous les bâtiments historiques et administratifs, soigneusement minés. Le tunnel de Saint Cloud n’est par exemple plus qu’un gigantesque entrepôt de torpilles et d’explosifs. Un officier de la Luftwaffe (dont la famille a péri dans le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Gomorrah">bombardement de Hambourg</a>) propose de raser une partie de la ville avec les bombardiers du Bourget.</p>
<p>Ces ordres de destruction, von Choltitz ne les donnera pas. Pas seulement par grandeur d’âme : il sait très bien que la bataille est perdue d’avance, et que la population se vengerait sur ses hommes. Les Alliés sont tout près, les chars promis sont loin, et les chances de tenir longtemps maigres. Et il n’est pas le seul Allemand à beaucoup apprécier la ville.</p>
<p>Cette inaction de von Choltitz confine peu à peu à la trahison ; les ordres sont pourtant clairs et assez vite il ne peut cacher que la situation en ville empire et que les accrochages meurtriers sont nombreux. Finalement, von Choltitz aussi espère une arrivée rapide des alliés, qui lui permettrait de céder après juste un « baroud d’honneur » (baroud qui fera tout de même quelques dizaines de morts de part et d’autre, jusqu’à ce que les soldats de Leclerc entrent dans son QG à l’hôtel Meurice et qu’il signe la capitulation).</p>
<p>Au début de l’insurrection, grâce à cette volonté de temporiser, von Choltitz accepte même une trêve avec les insurgés gaullistes. Elle n’est pas suivie, les communistes tenant à libérer la ville eux-mêmes.</p>
<h3>La course à Paris</h3>
<p>De Gaulle comme Eisenhower sont mis devant le fait accompli. Si certains cercles américains ne veulent pas modifier la stratégie précédente, les Français de tous bords (de Gaulle, résistants ayant traversé les lignes, envoyés du consul de Suède <a href="http://www.swedenabroad.com/Page____10330.aspx">Nordling</a> et de von Choltitz (!)...) font le siège du Commandemant Suprême allié.</p>
<p>La 2è Division Blindée de Leclerc relève théoriquement d’un commandement américain, mais de Gaulle considère qu’elle doit d’abord lui obéir, et menace Eisenhower de la retirer. L’Américain lui rappelle que sans le matériel américain, les munitions américaines, le carburant américain, l’armée française n’est rien. De Gaulle passera outre et enverra Leclerc sur Paris : les Français, voyant venir le coup, ont resquillé sur l’essence, et en ont même volé. Le Commandement Suprême s’inclinera et enverra la 4ème Division américaine en soutien des Français.</p>
<p>La course à Paris est épique. Le mot d’ordre est « foncer ! ». Les villages sur le chemin accueillent les chars avec des fleurs, mais les défenses allemandes sont encore là, et de nombreux soldats ne verront pas Paris.</p>
<p>Cette course à Paris a parfois des allures surréalistes. Les deux divisions alliées, et les chars allemands en renfort de Choltitz, ne sont pas les seuls à y prendre part : les journalistes (dont Hemingway, qui bien sûr libérera son cher bar du <em>Ritz</em>) veulent aussi couvrir les premiers l’événement (au point que la libération de la ville et le reportage seront diffusés <em>avant</em> l’entrée des chars !). Les escaliers de la Tour Eiffel voient s’affronter deux candidats pour la mise en place du premier drapeau français depuis 1940.</p>
<p>Le téléphone entre la capitale et la province n’est pas coupé : les Parisiens sont tenus au courant de l’avance alliée, et les Français libres originaires de Paris annoncent leur retour prochain à leur famille — mais certains se feront tuer en route.</p>
<h3>Libération</h3>
<p>Les images de l’époque que nous avons tous vues rendent faiblement compte de la joie des Parisiens à ce moment. Le terme « fraternisation » est faible, les soldats américains par exemple croulant sous les baisers et les propositions (peu d’entre eux ont passé la nuit suivante seul, et plusieurs y ont rencontré leur femme). Les Américains répandent leur chocolat, et les Parisiens débouchent avec le premier libérateur venu le champagne ou le vin précieusement conservé pour l’occasion, ou lui offrent le luxe suprême pour un troufion qui ne s’est pas déshabillé depuis la Normandie : un bain.</p>
<p>La progression des véhicules alliés est freinée par des hordes de Parisiens euphoriques, qui bravent parfois un danger encore bien présent. Dans une rue, les soldats américains croulent sous les baisers des jeunes filles, mais on se bat dans la suivante contre un point d’appui allemand.</p>
<p>Le summum de la témérité est atteint par le fameux défilé, décidé par de Gaulle, d’un million de Parisiens sur les Champs-Élysées, une manière pour le général d’asseoir son nouveau statut, mais aussi un risque extrême : les tireurs isolés étaient encore nombreux, mais surtout des bombardiers allemands ou un raid de panzers à travers la ville auraient pu faire un carnage et décapiter le nouveau gouvernement ; et sans une autre désobéissance du général <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Hans_Speidel" hreflang="de">Hans Speidel</a> à Reims, il y aurait pu y avoir une pluie de V1 et V2 sur la ville. <br />Juste après la libération d’ailleurs, un raid aérien allemand fit des centaines de morts : il n’y avait plus de DCA à Paris...</p>
<p>Environ 5000 Français (insurgés, civils...) et 3200 Allemands périrent dans les combats : Paris ne brûla pas, mais le bilan fut lourd.</p>
<p>Mais de Gaulle reste maître du terrain, malgré les communistes (la fusillade à Notre-Dame est peut-être une intimidation ; Rol Tanguy signe avec Leclerc la capitulation de von Choltitz, etc.) : liquidation des FFI ou intégration à l’armée régulière, dissolution des organismes de la Résistance et des milices... De Gaulle tient à ce que l’État qui recommence à fonctionner n’ait à affronter aucun organisme parallèle.</p>
<h3>C’était 20 ans après</h3>
<p>Soixante-trois années se sont écoulées depuis. Mais pour les auteurs du livre, il ne s’était alors écoulé que vingt ans, et nombre des protagonistes vivaient encore. Le principal intérêt du livre est justement la somme de tous ces témoignages entrecroisés de très nombreux témoins directs de tous les camps. Bien des pages sont émaillées de notes indiquant que tel ou tel soldat ou officier est redevenu un simple employé ou commerçant dans son pays. Von Choltitz lui-même, retraité, a été longuement interrogé par les deux auteurs.</p>
<p>Vingt ans après, de Gaulle, qui doutait de sa capacité à contenir les communistes était devenu le chef suprême du pays, sur le point d’ailleurs d’être sacré par le suffrage universel. En conséquence, quel biais involontaire avaient Collins et Lapierre ? Je n’ai pas trouvé sur le net de critique d’historien sur le livre qui en éclaire des zones à l’époque oubliées, mais il est clair que les communistes, bien qu’héroïques, n’avait pas toute leur sympathie.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/25/325-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-2#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/293« Paris brûle-t-il ? » de Larry Collins et Dominique Lapierre (1)urn:md5:c426e1417f674066523a98d4d66ec2122007-04-24T13:00:00+00:002011-03-28T20:54:53+00:00ChristopheHistoirecommunismehistoireLibérationParisRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>La Libération dans la plus grande ville de France masquait énormément d’arrières-pensées politiques chez les divers Alliés, et elle aurait pu tourner de manière beaucoup plus sanglante.</p> <p>J’ignorais qu’avant d’être un film, avec une ribambelle de stars et de futures stars<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/24/315-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-1#pnote-284-1" id="rev-pnote-284-1">1</a>]</sup>, ce titre a commencé sa carrière en tant que pavé littéraire franco-américain, fruit de longues recherches et de nombreux entretiens. Bizarrement, le Net est avare de commentaires sur le livre, éclipsé par son adaptation cinématographique. Il est également paru bien trop tôt (1964, vingt ans après les événements !) pour que les critiques décantent dans le web.</p>
<h3>Von Choltitz</h3>
<p>« Paris brûle-t-il ? » demande Hitler en apprenant la chute imminente de la ville devant l’avancée alliée. Ses ordres de miner tous les bâtiments importants, de ne pas hésiter à détruire par représailles des pâtés de maison entiers en cas d’insurrection... n’ont finalement pas été exécutés : le général von Choltitz, qu’Hitler avait pourtant personnellement choisi comme gouverneur militaire de Paris pour son respect des ordres, même terribles, a désobéi, et s’est rendu sans ordonner les destructions.</p>
<p><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Dietrich_von_Choltitz" hreflang="de">Von Choltitz</a>, évidemment un des personnages clés de cet épisode de la Seconde Guerre Mondiale, n’est pourtant pas un enfant de cœur : il est impliqué dans les bombardements de Rotterdam et la prise de Sébastopol. Il raconte cependant qu’un épisode l’a marqué : son court entretien avec Hitler peu avant sa prise de fonction à Paris. Un Hitler usé et vieilli qui a fait vaciller la confiance du général ; confiance déjà entamée par la progression des Alliés qui, enfin dégagés de Normandie, se ruent sur tout le nord de la France. <a href="http://www.herodote.net/dossiers/evenement.php5?jour=19440720">L’attentat raté du 20 juillet</a> n’a rien arrangé à la folie du Führer.</p>
<p>Indifférent au coût humain, Hitler veut faire de Paris un camp retranché et vendre chèrement la ville ; il la tient pour un verrou capital sur la route de l’Allemagne. Il promet à von Choltitz de lui fournir tous les moyens humains et matériels nécessaires. Si le général a effectivement vite à disposition de quoi faire sauter Paris, les chars promis n’arriveront qu’après ceux de Leclerc (rouler depuis le Danemark, de nuit pour éviter l’aviation alliée, n’est pas si simple).</p>
<p>Inversement, Eisenhower et son état-major considèrent la région parisienne comme une contrainte logistique énorme, avec une nombreuse population à nourrir, alors que l’avance alliée nécessite chaque jour plus de pétrole. Les moyens de transport étant limités (convois maritimes lents et ports souvent détruits), le généralissime allié a choisi de contourner l’Île-de-France dans un premier temps et de foncer d’abord vers la Belgique et l’Allemagne. On peut se demander si les deux semaines de carburant « perdus » en libérant Paris dès la mi-août n’ont pas manqué aux Alliés à l’hiver 1944, et permis aux Allemands de se replier plus facilement sur le Rhin, prolongeant la guerre de quelques mois.</p>
<h3>Varsovie</h3>
<p>Lorsque la libération de Paris se profile, un spectre hante les consciences, qui restera présent jusqu’au bout : celui de <a href="http://www.polishresistance-ak.org/4%20Article%20Fr.htm">l’insurrection et de la destruction de Varsovie</a>, quelques semaines à peine auparavant. Presque 200 000 personnes payèrent de leur vie le choix désastreux de la résistance polonaise de libérer la ville avant l’arrivée (apparemment imminente) de l’Armée Rouge. Staline laissa les Allemands mater la révolte et réduire la cité en cendres : les chefs des insurgés auraient pu faire concurrence au gouvernement provisoire polonais communiste à sa botte.</p>
<p>Lorsque les Russes daignèrent prendre Varsovie, les Allemands en avaient rasé 85% au total, entre la prise de la ville en 1939, l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ghetto_de_Varsovie#Insurrection">insurrection du ghetto juif</a> en 1943, les combats lors de l’insurrection de 1944, et les destructions délibérées ordonnées par Hitler.</p>
<p>Et justement, en août 1944, Paris est dans une situation politiquement et militairement très proche de celle de Varsovie.</p>
<h3>De Gaulle, les Américains ou les communistes ?</h3>
<p>La belle unité des Alliés pendant la libération de la France tient du mythe.</p>
<p>D’une part, de Gaulle ne s’entend pas avec les Américains. Sa légitimité comme chef de la France libre et du gouvernement provisoire destiné à administrer le pays libéré n’est pas reconnue par l’administration Roosevelt. De Gaulle doit son rôle de représentant de la France d’abord au soutien de Churchill, puis à l’unification sous son autorité des troupes de la France libre et des mouvements résistants intérieurs. <br />Cependant, il est parfois mis à l’écart (il a appris la date du Débarquement le jour même), et les Américains envisagent plutôt une administration directe de la France libérée, éventuellement en recyclant une partie des structures de Vichy. Entrer dans Paris et s’emparer des lieux symboliques du pouvoir devient vital pour de Gaulle, et il pousse Eisenhower (qui ne raisonne qu’en terme de logistique et de <em>boys</em> tués, et ne s’intéresse pas à la politique) à prendre Paris — au départ sans succès. Une insurrection parisienne qui risquerait de tourner au massacre est ce moyen de forcer la main aux Alliés.</p>
<p>Les communistes représentent le second danger pour le général, par leur poids comme par leur motivation. Après avoir chassé les Allemands, ils comptent bien accueillir les Alliés dans une ville libérée par ses propres moyens, et n’accepter de Gaulle que sous tutelle. Dans leur optique, rejouer la Commune marquerait la première étape vers la conquête du pouvoir en France. <br />Pour leur chef Rol Tanguy, un ancien d'Espagne dans la Résistance depuis le début, tant pis si le prix à payer se compte en dizaines de milliers de morts... <br />(Selon certains, De Gaulle surestimait les communistes et sous-estimait sa propre popularité. Facile à dire après coup...)</p>
<p>Entre le spectre de Varsovie, le danger de se faire doubler par les communistes, et celui d’être écarté par les Américains, de Gaulle décide que si insurrection il y a, ce ne sera qu’avec son autorisation. Un soulèvement symbolique juste avant l’entrée des blindés alliés aurait été idéal.</p>
<p>Dans les quelques jours avant et pendant l’insurrection, de Gaulle frôle la mort plusieurs fois : son avion est à la limite de la panne de carburant à son arrivée (presque clandestine) sur le sol français ; il n’hésite pas à se promener dans Paris alors que la capitale n’est pas encore « nettoyée » ; etc.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/04/25/325-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-2">À suivre...</a></em></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/24/315-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-1#rev-pnote-284-1" id="pnote-284-1">1</a>] <em>Je déteste dans un sens ces films où le jeu du « mais c’est qui ça ? » et du « tiens, il était jeune en 1966 ! » casse complètement l’ambiance du film pour le spectateur.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/24/315-paris-brule-t-il-de-larry-collins-et-dominique-lapierre-1#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/284Service après-venteurn:md5:571cd74a007eb8ab57be8df3293b36192007-04-14T21:00:00+00:002011-03-28T20:15:11+00:00ChristopheBlogger, une aventureAllemagneanticonsumérismeblogcommunicationcoup basdommageDRMdysfonctionnementERPespionnagefoutage de gueuleLéandriMicrosoftMP3OracleperspectiveréseauSAPsaturationSeconde Guerre MondialetravailWindowséconomie<p>Des billets de blog liés à l’actualité, c’est bien, mais il faut assurer le service après-vente et suivre les affaires évoquées.</p> <p>Mini-compilation :</p>
<ul>
<li><a href="http://www.petiteanglaise.com/" hreflang="en">Petite Anglaise</a> a <a href="http://maitre.eolas.free.fr/journal/index.php?2007/03/29/587-affaire-petite-anglaise-la-victoire-de-la-blogueuse">gagné son procès aux prud’hommes pour licenciement abusif</a>. J’avais participé au <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/07/21/188-google-bombing-pour-petite-anglaise">Google bombing en sa faveur</a>, mais mon billet est à présent redescendu bien bas dans les résultats de Google, éclipsé par tous les articles à ce sujet. Il est vrai aussi que <a href="http://searchenginewatch.com/showPage.html?page=2164611" hreflang="en">Google a récemment pris des mesures contre le bombing</a>.<br /> <a href="http://www.20minutes.fr/article/148757/20070329-Strasbourg-Victoire-pour-Petite-Anglaise.php">Un an de salaire, soit 44 000 euros de dédommagement</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/14/323-service-apres-vente#pnote-275-1" id="rev-pnote-275-1">1</a>]</sup>, c’est assez sympa ; à ce tarif je veux bien me faire virer tous les ans. Je me sens motivé pour prolonger <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/07/31/187-les-joies-de-la-ssii-1-angoisse-existentielle">ma série sur la vie en SSII</a> :-)</li>
</ul>
<ul>
<li>Après la FNAC et <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/02/28/313-mp3-sans-drm-achetables-en-ligne-enfin">ses (quelques) MP3 non protégés</a>, <a href="http://www.ratiatum.com/news4733_EMI_abandonne_les_DRM_sur_iTunes_quelles_consequences.html">iTunes se lance aussi dans le sans-DRM : EMI a cédé et vendra des morceaux non plombés</a>. L’avenir semble soudain moins sombre dans la guerre contre le verrouillage de la « propriété intellectuelle », même si on est sans doute plus proche du vent qui tourne, style Stalingrad, que de la victoire presque finale, genre chute du Mur de Berlin.</li>
</ul>
<ul>
<li>Même sur des sujets historiques, je me fais rattraper par l’actualité : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe">Fritz Kolbe, l’Allemand anti-nazi qui renseignait les Américains</a>, a droit à <a href="http://www.telleestmatele.com/article-6269574.html">une émission d’une heure mercredi 11 avril sur Arte</a>. (Et à cause de mon manque de temps, je publie ceci beaucoup trop tard...)</li>
</ul>
<ul>
<li>Vu le temps dont je dispose, non, je ne parlerai pas de la présidentielle. Allez, juste un lien sur un passionnant et affligeant billet de Maître Eolas : <a href="http://www.maitre-eolas.fr/2007/04/03/592-la-machine-a-fabriquer-des-delinquants">comment faire replonger des délinquants rangés des voitures</a> (<strong>2009</strong> : Lien mis à jour).</li>
</ul>
<ul>
<li>Je ne parlerai pas non plus du dernier monstre de Microsoft, sinon pour dire que je l’ai vu rapidement, et que, s’il est moins laid que XP, rien ne m’a frappé qui me donne envie de migrer la machine du boulot, ou d’abandonner mon Mac ou ma Ubuntu.<br />Au passage, le début du rejet des DRM décrit ci-dessus montre, une fois de plus, que Microsoft est incapable de sentir où va tourner le vent de l’histoire informatique : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/02/12/298-analyse-du-cout-de-la-protection-de-contenu-de-windows-vista-par-peter-gutmann">une des principales causes du retard de Vista vient de l’incrustation des DRM à un niveau très profond</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/09/16/2-hd-dvd-contre-blu-ray">Un an et demi après mon billet sur le sujet</a>, la bataille entre HD DVD et Blu-Ray fait rage, et pour ce que j’en vois, ça a quand même du mal à décoller dans notre coin de la planète. Je laisse filer, ma télé est encore cathodique et le disque dur du magnétoscope plein à ras bord de feuilletons, séries, documentaires, vieux films.</li>
</ul>
<ul>
<li>J’avais fait l’apologie de l’<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire">Encyclopédie du Dérisoire</a></em> de Bruno Léandri : il continue à sévir dans <em>Fluide Glacial</em>, et je <a href="http://www.fluideboutique.com/cgi-bin/fluide/resultatrech.asp?Option=R">conseille fortement les Hors-Série</a> <em>Votre Entreprise en 2007</em> et <em>Élections 2007</em> (tous publics).</li>
</ul>
<ul>
<li>Je ne devrais plus trop parler de SAP et d’Oracle Applications, je n’y touche plus. Quoique si ça se trouve il me reste des brouillons de billets sur une comparaison d’un point obscur entre ABAP et PL/SQL.</li>
</ul>
<ul>
<li>J’ai plein de billets de <a href="http://www.joelonsoftware.com/" hreflang="en">Spolsky</a> en attente de lecture, donc pas la peine de les lire vous non plus, je les paraphraserai ici dans les quelques années qui viennent.</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/14/323-service-apres-vente#rev-pnote-275-1" id="pnote-275-1">1</a>] <em>Nets d’impôts, sans doute, puisque ce sont des dommages et intérêts...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/04/14/323-service-apres-vente#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/275Les guerres oubliées (1)urn:md5:2075cc075fbbd38f6fa4b0fc675ca6d52007-03-15T22:14:00+00:002011-03-28T19:51:20+00:00ChristopheHistoireChinecolonisationguerrehistoireHistoire de FranceimpérialismeLéandriSeconde Guerre Mondialeuchronie<p>Il y a les conflits que l’on connaît, et les massacres lointains et oubliés.</p> <h3>Les « petites » guerres</h3>
<p>Bruno Léandri, dans sa somme encyclopédique éclectique <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire">L’Encyclopédie du Dérisoire</a></em>, relève une série de guerres d’amplitude très limitées, dont certaines entre États si éloignés que la déclaration de guerre reste purement formelle (Bolivie/Empire britannique en 1860).</p>
<p>La chose se déroule encore parfois de nos jours : dans les années quatre-vingt-dix, la Suisse, une des nations les plus pacifiques de la planète, envahit <em>par erreur</em> le petit Liechtenstein, quand des militaires en manœuvre s’égarent. <del>(Je ne trouve nulle part référence à cet incident, sinon dans le tome 3 de l’<em>Encyclopédie</em> de Léandri.)</del> (<strong>Mise à jour du 16 mars</strong> : <a href="http://www.reveil-des-marmottes.net/Site_Noute/Dossier_actus/1009_Liechtenstein_Suisse.htm">C’était en 1985 et les Suisses ont recommencé il y a quinze jours !</a> Que fait l’ONU ?)</p>
<p>Mais j’ai trouvé d’autres « vraies » guerres sur lesquels les manuels d’histoire français passent pudiquement ou très vite :</p>
<p>Parmi les conflits « préparatoires » de la Seconde Guerre Mondiale, une <strong>guerre non déclarée oppose en 1939 URSS et Japon</strong> au confins de la Mongolie (sous tutelle soviétique) et de la Mandchourie pro-japonaise. L’« <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Halhin_Gol">incident</a> » fait quand même 71 000 morts avant la signature d’un traité de non-agression, et décide peut-être du sort du monde : cette défaite pousse l’Empire du Soleil Levant à orienter son expansion vers les îles du Pacifique plutôt que vers la Sibérie. (Dans le cas contraire, l’URSS aurait-elle résisté sur deux fronts en 1941 ? Hitler aurait-il gagné la Seconde Guerre Mondiale ?) La victoire russe est l’œuvre d’un jeune général promis à une très brillante carrière, un certain <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Joukov">Joukov</a> (Moscou 1941, Stalingrad 1942/43...).</p>
<p>En 1838, la « <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_la_pâtisserie">Guerre des gâteaux</a></strong> » se déroule dans un Mexique alors assez désorganisé. La France de Louis-Philippe expédie la flotte pour obtenir le dédommagement d’un pâtissier dont la boutique a été pillée. Cent morts.</p>
<h3>Impérialisme européen</h3>
<p>La <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Crimée">Guerre de Crimée</a></strong> entre 1853 et 1856 n’est plus guère connue en France que par les monuments et stations de métro : zouave du pont de l’Alma, Malakoff, Sébastopol... ou le fameux « J’y suis, j’y reste » de Mac Mahon. Avant même la Guerre de Sécession, <a href="http://mapage.noos.fr/jflecaillon/Pages/modernite_de_la_guerre.htm">apparaissent des éléments des « guerres industrielles » du XXè siècle</a> : chemins de fer, photographes, organisations de soins aux blessés... Déjà la cause immédiate du conflit se situait en Palestine (Bethléem). Plus d’un demi-million de morts, essentiellement de maladie.</p>
<p>Napoléon III se lance également dans une longue (1861 à 1867) <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Expédition_du_Mexique">expédition au Mexique</a>, qui au final est un <a href="http://www.alsapresse.com/jdj/99/02/10/MA/3/article_13.html">échec retentissant</a>. Je n’ai pas trouvé de chiffres sur les victimes mexicaines, seulement une évocation de 6600 militaires français tués.</p>
<p>Les Chinois nous reprochent encore les <strong>Guerres de l’Opium</strong>, où leur pays perd son indépendance réelle pour un siècle. Dans la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Premi%C3%A8re_guerre_de_l%27opium">première guerre</a> (1839-1842), les Anglais imposent l’ouverture économique aux Chinois. En fait, l’opium indien vendu en Chine permet aux Anglais de compenser leurs énormes achats de thé. Un véritable narcotrafic en somme, dont l’interdiction par l’Empire du Milieu provoque une attaque anglaise.<br /><em>Résultat : Victoire britannique par KO .</em><br />La <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_guerre_de_l%27opium">Seconde Guerre de l’Opium</a> est provoquée par les Occidentaux (Grande-Bretagne, France, Russie...) à nouveau soucieux d’étendre leur commerce dans une Chine encore fermée.<br /><em>Résultat : Victoire occidentale par KO</em>, et mise sous tutelle occidentale de parties entières de l’économie chinoise jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale.</p>
<p>La <strong>décolonisation française</strong> s’est faite de la pire manière qui soit (massacres, humiliation du colonisateur, instabilité du décolonisé), on le savait, du moins pour l’Indochine ou l’Algérie. Mais les manuels scolaires s’appesantissent peu sur la <a href="http://www.herodote.net/histoire03290.htm">révolte de 1947 à Madagascar</a>, où les Français ont utilisé des méthodes dignes des nazis boutés à grand-peine du territoire national deux ans avant. On ne sait même pas l’ordre de grandeur du nombre de morts (10 000 ? 100 000 ?). <a href="http://www.afrik.com/article8639.html">Chirac s’est repenti</a>.</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/03/18/318-les-guerres-oubliees-2">À suivre dans la partie 2...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/03/15/296-les-guerres-oubliees-1#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/266« Kaputt » de Malaparteurn:md5:d08bd21cd360e4f4a0307855a98566442006-06-20T21:25:00+00:002010-10-31T11:17:10+00:00ChristopheSur mes étagères alourdieshistoirelivres luspessimismepolitiqueracismeRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Un livre « gai et cruel » sur la Seconde Guerre Mondiale, écrit à chaud du point de vue italien.</p> <p><em>(Ce billet est déjà paru il y a quelques temps sur la liste <a href="http://fr.groups.yahoo.com/group/Quoide9">Quoide9</a>.)</em></p>
<p><a href="http://ceciledequoide9.blogspot.com/">Cécile</a> m’avait conseillé ce livre il y a un bout de temps, et après son temps d’attente réglementaire sur mes étagères surchargées, j’ai découvert les péripéties autobiographiques de Malaparte, Italien envoyé au contact des Allemands pendant la Seconde Guerre Mondiale, rédigées par morceaux en différents pays, rassemblées presque par miracle par la suite.</p>
<p>Ce livre a un intérêt énorme : il est paru pendant la guerre (1943), donc « à chaud », sans que l’auteur connaisse « la fin », et alors que la « solution finale » d’Hitler sortait tout juste des cartons. Déjà pourtant ce ne sont que massacres, pogroms, boucheries. De plus, Malaparte, correspondant de guerre, était aux premières loges, dans le camp italo-allemand - même si on sent qu’intérieurement il bout. D’ailleurs, il a rejoint les troupes alliées dès le début de la libération de l’Italie. Enfin, il parle plus du front de l’Est que d’ailleurs, front qu’en France on connaît bien moins que le <em>D-Day</em>.</p>
<p>La moitié du récit se déroule dans les salons de Cracovie, Rome ou Stockholm, et entre gens de la « haute » : gouverneurs allemands, princes espagnol et suédois, princesse Hohenzollern, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Galeazzo_Ciano">gendre de Mussolini</a>, ambassadeur français, et ministre finlandais. On y croise <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Himmler">Himmler</a> à poil.</p>
<p>Entre vins fins et gibier, on discute des aventures scabreuses de la fille de Mussolini ; les Allemands se glorifient de leur culture, de la
manière dont ils relèvent la Pologne, et de la miséricorde avec laquelle ils traitent les Juifs ; on amoncelle les jugements définitifs et
péremptoires (cela devient très vite agaçant).</p>
<p>L’autre moitié, ce sont une ville roumaine sous les bombes et en plein pogrom ; des tranchées finlandaises lors du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Léningrad#Si.C3.A8ge_de_1941_.C3.A0_1944">siège de Léningrad</a> ; le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ghetto_de_Varsovie">ghetto de Varsovie</a> où les Juifs meurent comme des mouches, et où demander « pardon » aux gens bousculés un miracle ; un gamin russe qui répond à l’Allemand qui va l’exécuter que son œil de verre est le seul à avoir une lueur d’humanité ; la peur panique des tankistes allemands quand apparaissent des chiens russes (dressés à se glisser sous les tanks, une bombe sur le dos) ; des Juives roumaines forcées à se prostituer pour les troupes allemandes, et liquidées après un temps d’usage...</p>
<p>Un livre à vous casser le moral, « gai et cruel » dit l’auteur. Cruel parce qu’il raconte une suite d’horreurs, et gai parce que sinon on devient fou.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/20/172-kaputt-de-malaparte#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/155Des versions originales des citations (1) : Les sources fiables et facilesurn:md5:63b8914a3e66b05359e17fc8fe79bd602006-06-08T16:08:00+00:002010-10-29T20:00:24+00:00ChristopheCitationscitationcynismeguerrehumourlivres lusmicroéconomiequêteSeconde Guerre Mondialeéconomie<p>Trouver des citations en ligne est parfois très aisé.</p> <p>D’un côté, je suis un <a href="https://www.coindeweb.net/citations/">collectionneur de citations</a>. Ma petite compilation doit avoir son intérêt, vu le nombre de fois que je l’ai vue reprise<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#pnote-146-1" id="rev-pnote-146-1">1</a>]</sup> et pillée<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#pnote-146-2" id="rev-pnote-146-2">2</a>]</sup>.</p>
<p>De l’autre, j’ai un côté puriste/perfectionniste<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#pnote-146-3" id="rev-pnote-146-3">3</a>]</sup>, et je tiens notamment à connaître :</p>
<ul>
<li>la version la plus proche des paroles du Grand Homme cité ; donc la version originale, donc dans <strong>la langue originale</strong> ; trop de citations sont attribuées à tort, ou déformées, ou mal traduites ;</li>
<li>la <strong>source de la citation</strong> (livre, article...), comme garantie de cette fiabilité, ce qui implique d’aller la voir de mes yeux.</li>
</ul>
<p>Et ce n’est pas toujours du gâteau...</p>
<h3>Catalogues en ligne</h3>
<p>Il existe une foule de catalogues de citations en ligne : <a href="http://www.evene.fr/">Évène</a>, <a href="http://www.brainyquotes.com" hreflang="en">Brainyquotes</a>, <a href="http://www.quoteland.com/" hreflang="en">Quoteland</a>, etc. S’y ajoute une myriade de collections personnelles, certaines très bien classées. Mais peu de sites s’intéressent réellement à la certitude de la source, à ses références, encore moins à la version originale. Deux exceptions notables :</p>
<ul>
<li>Le site de mon maître dans le domaine, <strong><a href="http://pages.infinit.net/fortinph/museepensee/">Paul-Henri Fortin et son Petit Musée de la Pensée du Jour</a></strong> (hélas en sommeil depuis le siècle dernier) ;</li>
</ul>
<ul>
<li>Le site <strong><a href="http://www.wikiquote.org" hreflang="en">Wikiquote</a></strong>, qui vise à faire pour les citations ce que <a href="http://fr.wikipedia.org/">Wikipédia</a> a réalisé pour l’encyclopédie en ligne. Les citations sont triées par thèmes ; la référence est citée ; une liste des citations attribuées mais non vérifiées est fournie. La version anglophone est un plaisir, et un bon départ pour recherche l’origine de pensées d’Oscar Wilde ou Albert Einstein. Hélas la version française est hors ligne pour de sombres histoires de droits d’auteur non respectés, et doit être reprise de zéro.</li>
</ul>
<h3>Le facile : le domaine public numérisé d’auteurs connus</h3>
<p>Oscar Wilde a <del>lancé beaucoup de vannes</del> dit beaucoup de <del>bêtis</del> choses ; un grand nombre ont été reprises dans des compilations (dont ses <em>Aphorisms</em> si souvent cités mais jamais publiés, apparemment) ; bien d’autres lui ont été attribuées.<br />Mais Oscar Wilde conjugue plusieurs qualités : il est <strong>connu</strong> donc facile à trouver en ligne ; il est dans le <strong>domaine public</strong> ; ses œuvres sont répandues et <strong>numérisées</strong> ; ses aphorismes <strong>intéressent beaucoup de monde</strong> ; il n’a pas écrit tant que ça (et bien des citations viennent de <em><a href="http://www.dagonbytes.com/thelibrary/dorgray/preface.htm" hreflang="en">The Picture of Dorian Gray</a></em>). Si Google ne fournit pas tout seul la référence ultime, Wikiquote l’a en général, et je peux vérifier/corriger/copier-coller la phrase depuis la version numérisée.<br />Je pars du principe que les versions numérisées d’œuvres papier entières sont fiables : il faut bien faire confiance à quelqu’un, et je ne peux en général pas consulter les manuscrits originaux. J’ai ainsi pu retrouver la source originale de ce grand classique (redécouvert par chaque génération en vieillissant je pense) :</p>
<blockquote><p>“Nowadays people know the price of everything and the value of nothing.”<br /> <br />Oscar Wilde, <em><a href="http://www.online-literature.com/view.php/dorian_gray/4" hreflang="en">The Picture of Dorian Gray</a></em>, 4</p></blockquote>
<p>Toujours pour le domaine public, mais francophone, le contribuable français fournit <strong><a href="http://gallica.bnf.fr">Gallica</a></strong>, sur le site de la Bibliothèque Nationale. Nombre de documents numérisés du domaine public y figurent. Le moteur de recherche est un peu limité, mais il est parfait pour des sentences de Molière, Voltaire ou Victor Hugo. Je me casse par contre les dents sur certains livres anciens, certes numérisés en tant qu’images, mais non traités par <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/OCR">OCR</a>, et donc lisibles sur écran page à page, sans que la fonction « Rechercher » fonctionne. Dommage, j’aurais aimé valider l’attribution de cette autre maxime (le livre est sur Gallica) :</p>
<blockquote><p>« Mieux vaut être seul que mal accompagné. »<br /> <br />Pierre Gringore, <em>Notables enseignements, adages et proverbes</em>, 1527</p></blockquote>
<p>Le <strong><a href="http://www.gutenberg.org/" hreflang="en">Projet Gutenberg</a></strong> fournit également nombre d’<em>e-books</em> du domaine public, surtout mais pas exclusivement en anglais.</p>
<p>Le <em>summum</em> est atteint avec <strong>Winston Churchill</strong> : bien qu’il ait été extrêmement prolixe lui aussi<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#pnote-146-4" id="rev-pnote-146-4">4</a>]</sup>, <a href="http://www.winstonchurchill.org/" hreflang="en">ses meilleurs morceaux et meilleurs citations sont en ligne</a>, et les <strong>versions audio</strong> de certains discours ont été <strong><a href="http://www.bbc.co.uk/history/war/wwtwo/churchill_audio.shtml" hreflang="en">archivées par la BBC</a></strong> ! On peut difficilement faire plus fiable comme source :</p>
<blockquote><p>“We shall go on to the end, we shall fight in France, we shall fight on the seas and oceans., we shall fight with growing confidence and growing strength in the air, we shall defend our Island, whatever the cost may be, we shall fight on the beaches, we shall fight on the landing grounds, we shall fight in the fields and in the streets, we shall fight in the hills; we shall never surrender, and even if, which I do not for a moment believe, this Island or a large part of it were subjugated and starving, then our Empire beyond the seas, armed and guarded by the British Fleet, would carry on the struggle, until, in God’s good time, the New World, with all its power and might, steps forth to the rescue and the liberation of the old.” <br /> <br />Winston Churchill,<br />discours à la BBC, 4 juin 1940, après la défaite en France et l’évacuation de Dunkerque</p></blockquote>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/06/10/163-des-versions-originales-des-citations-2">À suivre...</a></em></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#rev-pnote-146-1" id="pnote-146-1">1</a>] <em>Je le sais, je suis la source ultime de certaines, que je tiens de première main de condisciples, collègues ou amis.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#rev-pnote-146-2" id="pnote-146-2">2</a>] <em>Pillée dans le sens où on ne m’a même pas dit « merci » ; à contraster avec l’extrême inverse des internautes qui me supplient de les autoriser à ajouter un lien de </em>leur<em> page vers la mienne.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#rev-pnote-146-3" id="pnote-146-3">3</a>] <em>Soigneusement maîtrisé pour tout ce qui n’a qu’un côté utilitaire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#rev-pnote-146-4" id="pnote-146-4">4</a>] <em>Dieu sait combien de discours, plusieurs livres, ses mémoires : le Prix Nobel de Littérature se mérite.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/08/161-des-versions-originales-des-citations-1-les-sources-fiables-et-faciles#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/146“Never, give in!”urn:md5:79cd30a428cc52d53e8beaf4218711fd2006-05-08T00:00:00+00:002021-04-15T20:45:32+00:00ChristopheCitationscitationcourageguerrelyrismeoptimismeracléeSeconde Guerre Mondialeténacité <blockquote><p>“Never, give in! Never give in. Never, never, never, never, never, never-in nothing great and small, large and petty. Never give in-except to convictions of honor and good sense. Never yield to force; never yield to the apparently overwhelming might of the enemy.”
<br /></p>
<p>
« Ne cédez jamais. Ne cédez jamais. Jamais, jamais, jamais, au grand jamais, ne cédez jamais en rien de grand et petit, important et dérisoire. Ne cédez jamais - si ce n’est face à l’honneur et au bon sens. Ne cédez jamais à la force ; ne cédez jamais à la puissance apparemment écrasante de l’ennemi. »
<br /></p>
<p>
Winston Churchill, <a href="http://www.winstonchurchill.org/i4a/pages/index.cfm?pageid=423" hreflang="en">29 octobre 1941, discours à Harrow School</a></p></blockquote>« Fritz Kolbe - Un espion au cœur du IIIè Reich » de Lucas Delattreurn:md5:1c9481daca044862057d25e6da6e376d2006-04-14T14:18:00+00:002021-04-01T17:07:00+00:00ChristopheSur mes étagères alourdiesespionnagehistoirelivres lusRésistanceSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Un livre très intéressant sur l’Allemand peu connu qui renseigna les Américains pendant les années depuis le cœur de la diplomatie allemande.</p> <p>Le nom de Fritz Kolbe (1900 - 1971) est à peu près inconnu du grand public, et pourtant cet Allemand a joué un rôle capital pendant la Seconde Guerre Mondiale, en tant qu’une des principales sources de renseignements américains, depuis le cœur du Ministère des Affaires Étrangères nazi.</p>
<p>Son rôle a longtemps été masqué, et ce n’est qu’assez récemment que son identité et son histoire sont largement connues - notamment grâce à ce livre. L’auteur a réussi à rassembler de nombreux documents, par exemple auprès du fils de Fritz, et a reconstitué l’aventure souterraine de ce traître par patriotisme, bien mal récompensé après guerre.</p>
<h3>Le livre</h3>
<p>Ce n’est pas de la grande littérature, mais les presque quatre cents pages se lisent bien, et reconstituent avec succès l’ambiance délétère de l’administration du IIIè Reich conquérant, puis vacillant, enfin agonisant, ainsi que les contraintes et dangers de cette époque et le cheminement mental de Fritz. Bien rendues également sont les contraintes techniques et matérielles de l’espionnage de l’époque - on est très loin de James Bond.</p>
<p>Il a été traduit notamment en anglais et en allemand. Sur la forme, je regrette que les notes (très nombreuses) soient rassemblées en fin de livre, ce qui oblige à un incessant va-et-vient entre la page en cours et une autre en fin de volume. Leur contenu est souvent très intéressant, et aurait mérité d’être intégré directement au corps du texte.</p>
<h3>Opposant</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Fritz_Kolbe-via_Wikipedia-domainepublic.jpg" title="Fritz Kolbe"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Fritz_Kolbe-via_Wikipedia-domainepublic.jpg" alt="Fritz Kolbe" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /></a> <strong>Fonctionnaire travailleur</strong> ayant déjà beaucoup voyagé, Fritz est un <strong>anti-nazi</strong> et un anti-communiste convaincu. Après 1933 et l’avènement d’Hitler, il résiste aux pressions pour entrer au Parti, ce qui donnerait pourtant un coup de pouce à sa carrière ; mais il apprend à taire sa haine des nazis. Jouer au benêt inoffensif devient sa principale tactique. Protégé par des personnes influentes qui apprécient ce travailleur infatigable, il devient malgré tout un rouage de l’<em>Auswärtiges Amt</em>, le centre de la diplomatie nazie, à Berlin. Il va même plusieurs fois au cœur du quartier général hitlérien.</p>
<p>Plus la guerre s’avance, plus il découvre les aspects les plus barbares du Troisième Reich : mépris des lois de la guerre, élimination physique des opposants, déportations... Comme tout Berlinois, il souffre des bombardements de plus en plus fréquents et violents. Même au poste subalterne qui est le sien, il est aux premières loges pour s’apercevoir que, dès 1942, le vent commence à tourner<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<h3>Trahison</h3>
<p>Le simple rédacteur de tracts défaitistes, qu’il est alors, prend alors la décision de contacter les Alliés pour trahir son pays : pour lui, <strong>une défaite rapide face aux Anglo-saxons</strong> vaut mieux qu’une victoire nazie, une longue guerre, la conquête de l’Allemagne par Staline ou une insurrection communiste.</p>
<p>Son moyen favori est le <strong>courrier diplomatique</strong> avec Berne. La <strong>Suisse</strong> est alors neutre, encerclée par l’Axe, obsédée par la crainte d’une invasion allemande, et une plaque tournante de l’espionnage. Le courrier entre Berlin et la légation allemande de Berne ne peut être confié à n’importe qui, et Fritz Kolbe sera souvent ce messager. On est en 1943, et la Wehrmacht perd alors progressivement pied en Russie.</p>
<p>En face, dans l’ambassade américaine en Suisse, se trouve <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Allen_Welsh_Dulles">Allen Dulles</a></strong> de l’OSS, futur directeur de la CIA. Très vite, il sait flairer le <strong>potentiel énorme</strong> de ce petit fonctionnaire exalté qui lui amène spontanément, par centaines, des copies de télégrammes diplomatiques allemands, et des indications sur des sites industriels stratégiques, et ce qui a été plus ou moins mal bombardé. Fritz refuse de travailler pour l’argent, c’est un idéaliste œuvrant pour l’après-guerre.</p>
<h3>La résistance allemande anti-nazie</h3>
<p>Capitales également se révèlent les indications de Fritz sur le <strong>moral</strong> vacillant des Allemands dans la capitale, sous les bombardements. Il parle également aux Américains de ce qu’il sait des mouvements de résistance internes (par exemple au sein de la Wehrmacht, notamment l’équipe qui tentera un coup d’État le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Complot_du_20_juillet_1944_contre_Hitler">20 juillet 1944</a>). Fritz n’est pas directement impliqué dans ces groupes, mais les connait. Il profite également de la complicité plus ou moins consciente de plusieurs personnes pour ses transmissions de copies de documents. L’espion amateur prend parfois des risques insensés.</p>
<p>Fritz voudrait passer à une action concrète, par exemple en fournissant une équipe de guides à un parachutage américain sur la ville. Les Américains découragent systématiquement toute action de sa part : « George Wood » ne doit pas risquer sa vie, il est leur meilleur - et seul - contact à Berlin.</p>
<p>Une autre raison du refus des Américains de l’encourager à agir physiquement provient de leur détermination à obtenir une <strong>reddition sans condition</strong> de l’Allemagne auprès de l’ensemble des forces alliées, de l’est et de l’ouest (sans doute pour éviter une nouvelle légende du « coup de poignard dans le dos » comme après 1918). Des putschistes, même prêts à un armistice pour « sauver les meubles » ne pourraient accepter cela. (Cette tactique est fortement critiquée par Allen Dulles, entre autres, qui considèrent que cela peut prolonger la guerre).</p>
<h3>Exploitation</h3>
<p>Il est frustrant que les informations de Kolbe soient longtemps <strong>sous-exploitées par les Alliés</strong>. <br />D’une part, les communications entre Kolbe et Dulles, puis entre une ambassade américaine isolée au sein de la mer brune et l’extérieur sont forcément difficiles, surtout à l’époque de la cryptographie balbutiante. Les « tuyaux » de Fritz sont donc souvent périmés.<br />D’autre part, les Alliés se méfient comme de la peste d’un <strong>piège possible</strong>, d’informations destinées à les allécher pour les intoxiquer plus tard<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>. Méfiance entre services et querelles de plate-bandes font le reste. <br />Ce n’est donc qu’assez tard que les informations de Kolbe remontent au plus haut niveau, même si elles servent très vite à recouper d’autres informations.</p>
<p>Kolbe fournit des informations sur de nombreux autres sujets, par exemple sur la <strong>cryptographie</strong> allemande, sur ce que savent les Allemands sur celle des Alliés, sur ce que pensent les nazis de l’emplacement supposé du futur Débarquement, sur les <strong>livraisons</strong> espagnoles clandestines de tungstène, sur les espions allemands dans les pays neutres (Irlande, Suède…) dans les ambassades alliées (source <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Elyesa_Bazna">Cicéron</a> à Ankara notamment), voire à Londres. Il révèle nombre de choses sur les <strong>relations entre l’Axe et les pays neutres</strong> courtisés par les deux camps (Suisse, Turquie…), ou sur ce qui se passe dans les <strong>pays satellites</strong> ou occupés.</p>
<p>Une des leçons principales de ces lectures est que, petit à petit, les <strong>régimes amis se détachent de l’Allemagne</strong>. Certains, comme la France vichyste, la Hongrie ou l’Italie, doivent être repris en main et occupés par les Allemands ; d’autres comme la Bulgarie finissent par tourner casaque ; les dictateurs au Portugal ou en Espagne se posent des questions sur leur avenir après la victoire alliée.</p>
<p>Washington et Dulles lui demandent par la suite de se concentrer en priorité sur ce qu’il peut savoir de l’<strong>Extrême-Orient</strong>, fournissant une aide précieuse aux généraux américains dans la Guerre du Pacifique, sur les plans militaire comme diplomatique - là aussi l’Axe se délite.</p>
<h3>Difficile après-guerre</h3>
<p>En 1945, Fritz parvient à se réfugier à Berne sous la protection d’Allen Dulles. Après la capitulation du Reich il continue à travailler pour les Américains comme « source de référence » et comme informateur au début de la dénazification.</p>
<p>L’après-guerre est une période moins dangereuse, mais pas très heureuse pour Fritz. Une tentative d’émigration aux États-Unis échoue, l’Allemand n’apprécie pas la vie américaine. La <strong>reconnaissance des Alliés est assez réduite</strong> : la politique est explicitement de ne pas récompenser les Allemands ayant coopéré avec l’Ouest ou l’Est, car trop d’entre eux l’ont fait sur le tard et par intérêt. Le nombre de « résistants » est effectivement monstrueux.</p>
<p>D’autre part sa réinsertion dans les rangs de la diplomatie allemande de la République fédérale fondée en 1949 est un échec, malgré de nombreux soutiens : trop de ses anciens collègues, même anti-nazis, lui reprochent sa trahison, qui a coûté leur vie à nombre d’Allemands. La dénazification marque aussi le pas avec la mise en place de la Guerre Froide, et les Affaires Étrangères de l’Allemagne de l’Ouest se repeuplent avec les anciens de la période hitlérienne.</p>
<p>Après un passage comme collaborateur du magazine <em>Deutsche Rundschau</em>, qui lui procure un grand soutien moral en justifiant son action de résistant <em>a posteriori</em>, Fritz termine sa carrière comme représentant européen d’un fabricant américain de tronçonneuses, et vit quelques temps en Suisse. Les articles sur son aventure commencent à paraître, mais il ne cherche évidemment pas à leur donner quelque publicité. L’Allemagne de l’Ouest préfère longtemps honorer ses résistants anti-hitlériens morts en héros comme les putschistes du 20 juillet.</p>
<h3>Références et Bibliographie :</h3>
<ul>
<li><em>Fritz Kolbe - Un espion au cœur du IIIè Reich</em> de Lucas Delattre, <br />Denoël 2003, 340 pages, ISBN : 2-207-25324-4. <br />Aussi disponible chez France Loisirs au moment où j’écris ceci.</li>
<li>Article du Wikipédia allemand sur Fritz Kolbe :<br /><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Fritz_Kolbe" hreflang="de">http://de.wikipedia.org/wiki/Fritz_Kolbe</a></li>
<li>Article du Wikipédia français (créé par votre serviteur à partir du présent résumé) :<br /><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Fritz_Kolbe">http://fr.wikipedia.org/wiki/Fritz_Kolbe</a></li>
<li>Hommage du Ministre fédéral des Affaires Étrangères Joschka Fischer (site du Ministère) :<br /><a href="http://www.auswaertiges-amt.de/www/fr/infoservice/presse/presse_archiv?archiv_id=6270">http://www.auswaertiges-amt.de/www/fr/infoservice/presse/presse_archiv?archiv_id=6270</a> (en français)</li>
<li>Critique du livre sur parutions.com :<br /><a href="http://www.parutions.com/pages/1-4-7-3774.html">http://www.parutions.com/pages/1-4-7-3774.html</a></li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Rappelons qu’en décembre 1941, avec l’échec devant Moscou et l’entrée en guerre des États-Unis, la situation du Reich devient plus précaire ; il faudra attendre la fin 1942 avec les batailles d’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Seconde_bataille_d'El_Alamein">El Alamein</a> puis <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Stalingrad">Stalingrad</a> pour que les Allemands commencent à reculer sur le terrain.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Les Alliés sont eux-même passés maîtres dans l’intoxication des Allemands, notamment lors du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Husky">débarquement de Sicile</a> ou plus tard en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Fortitude">Normandie</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/04/14/139-fritz-kolbe#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/119« L’Encyclopédie du Dérisoire » de Bruno Léandriurn:md5:1b9ec51195fa31399e3155980ac5930b2006-03-18T14:38:00+00:002014-02-26T10:37:44+00:00ChristopheSur mes étagères alourdiescartesdysfonctionnementgaspillagegigantismeguerregéographiegéopolitiquehistoireHistoire de Francehumourimpérialismeintelligencelivres lusLéandriMurphySeconde Guerre Mondialethéorieéconomieémerveillement<p>La plus éclectique et humoristique des encyclopédies de petits faits plus ou moins connus. Un délice.</p> <p><del>Quatre</del> (<strong>Mise à jour du 27 mai 2007</strong>) <em>CINQ !</em> tomes de pur plaisir, compilation des petits articles que le prolifique <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bruno_Léandri">Bruno Léandri</a> a publié dans <em>Fluide Glacial</em>. Léandri fait partie de la moitié que j’adore de ce magazine (je ne supporte pas l’autre moitié). Il est un de mes maîtres à penser et comme moi s’intéresse aux choses les plus absconses ou futiles, ou peut rester des heures à contempler une carte d’un pays qui n’existe pas ou tellement loin et isolé que c’est tout comme.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/lectures/images/encyclopedie_derisoire.jpg" alt="" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /> Le présent Blog Éclectique ne pouvait pas ne pas évoquer ce monument à la gloire de l’éclectisme et de la recherche du Savoir, dans les domaines les plus triviaux, parfois sérieux, et rédigé avec beaucoup d’humour. Je le relis en gros tous les deux ans.</p>
<p>Chaque article traite d’un sujet capital sous forme de mini-enquête (en général sérieuse) ou de compilation d’anecdotes sur un même sujet. En vrac et de manière arbitraire, citons :</p>
<ul>
<li>les <strong>rois</strong> fous (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_VI_de_France">Charles VI</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ivan_IV">Ivan le Terrible</a> et quelques autres moins connus comme le doux Christian VII de Danemark) ;</li>
<li>les rois de pacotille (roi de Patagonie, de Corse, empereur du Sahara ou des États—Unis…), plus ou moins givrés ;</li>
<li>la <strong>sociologie</strong> aux toilettes, ou celle dans les manifs, ou des mendiants du métro ;</li>
<li>l’<strong>évolution</strong> de la poussette à travers les décennies, ou du guichet à travers les mois ;</li>
<li>les micro-<strong>arnaques</strong>, les techniques des camelots, les farces et attrapes ;</li>
<li>les vraies escroqueries si bien faites qu’on en reste admiratif (arnaque à la paire…) ;</li>
<li>les contes et légendes du <strong>code pénal</strong> ;</li>
<li>les <strong>modes</strong>, aussi bien dans les cours de récré (hula hoop, fausses totoches, scoubidous, yoyo…) que dans le langage ;</li>
<li>les réflexes acquis stupides (compter en francs, les réflexes qui reviennent des années après…), les micro-pathologies énervantes, les micro-paranoias ;</li>
<li>les rumeurs et <strong>mythes modernes</strong> genre chaînes de la fortune et bac obtenu à la septième tentative (on dirait aujourd’hui «légendes urbaines») ;</li>
<li>les bases, échecs et dérives de la <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Poliorc%C3%A9tique">poliorcétique</a></strong> ;</li>
<li>l’histoire chaotique du <strong>char</strong> d’assaut, ou du cuirassé ;</li>
<li>les <strong>guerres</strong> idiotes ;</li>
<li>Sigmaringen, en Allemagne, où se réfugia le gouvernement de Vichy sous la protection nazie à la fin de la guerre, dans une ambiance <em>très</em> glauque ;</li>
<li>les passages bizarres (interdits au moins de 18 ans) dans l’œuvre de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Léautaud">Léautaud</a>, et le lien avec certains personnages de Sigmaringen ;</li>
<li>les <strong>passages censurés</strong> pour outrage aux bonnes mœurs de documents essentiels de l’Affaire Dreyfus ;</li>
<li>les <strong>lois tacites</strong>, non écrites mais à respecter impérativement en société, et leur (absence de) justification éventuelle, et les traditions stupides ;</li>
<li>les lois bafouées sans que personne ne dise rien, et autres <strong>choses pas logiques</strong> ;</li>
<li>les délires du droit d’auteur (et ce n’est que le début) ;</li>
<li>les paniques ;</li>
<li>les méthodes pour dormir ;</li>
<li>les gaffes à ne pas faire, et les gaffes historiques ;</li>
<li>les <strong>mots historiques</strong> (dont certains si beaux qu’on ne cherchera pas à vérifier) ;</li>
<li>les noms propres, les mots piège ;</li>
<li>le fonctionnement du <strong>service des colis perdus de la Poste</strong>, avec quelques anecdotes croustillantes (et une désillusion sur le relatif manque d’opiniâtreté des agents de ce service à résoudre un casse-tête pour faire arriver le courrier) ;</li>
<li>les <strong>objets piégés</strong> du quotidien (emballages indestructibles, casseroles avec effet théière garanti, ouvre-boîtes piégés…) ;</li>
<li>le bestiaire des <strong>drapeaux</strong> nationaux et ses excentriques ;</li>
<li>les <strong>aberrations frontalières</strong> : les enclaves espagnoles en France, les enclaves de départements français dans un autre, l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%8Ele_des_Faisans">île franco-espagnole de la Conférence</a>, l’hôtel construit sur la frontière franco-suisse, le village franco-allemand de <a href="http://pierre.bertrand.free.fr/outre-foret/scheibenhard.htm">Scheibenhard</a>… ;</li>
<li>les pays invraisemblables (souvent des îles sans assez de population pour même ouvrir une ambassade dans chaque pays du monde) ;</li>
<li>les tristes histoires des conquérants des deux pôles ou de montagnes morts en chemin ou au retour ;</li>
<li>l’application de la <a href="https://www.coindeweb.net/murphy/">Loi de Murphy</a> aux tentatives françaises de découverte de l’épave du Titanic ;</li>
<li>les <strong>endroits exceptionnels</strong> : le bled le plus chaud (34°C de moyenne à Dallol en Éthiopie), le plus froid (-36°C de moyenne à Oïmiaken en Sibérie), les endroits des records (147°C d’écarts entre les deux records, entre Antarctique et Lybie), le plus pluvieux, le plus sec, le plus au sud, le plus au nord (et ce n’est pas le Cap nord), les lieux cultes (plusieurs au Père Lachaise), les lieux paumés et les confettis de l’empire colonial français, les lieux oubliés… ;</li>
<li>les <strong>cas exceptionnels</strong> dans divers domaines (ornithorynque, Alsace, nombres, mots…) ;</li>
<li>les mystères qui n’en sont plus (notamment le Triangle des Bermudes) ;</li>
<li>les erreurs dans les films (cheveux longs sur des SS, canon napoléonien sans recul) ;</li>
<li>la <strong>face cachée</strong> des scientifiques et autres personnages connus (Newton était infect, Chasles un naïf, Tycho Brahé un tyran mégalo, Gutenberg un fou de procès, Walt Disney un facho fini ; Picasso manqua d’envoyer Apollinaire en taule, Karl Marx fit un enfant à sa bonne…), ou inconnus (Léopold Mozart, le frère maudit du Commandant Cousteau…), et leur fin parfois pathétique (Georges Méliès forain, le suicide d’Alan Turing, héros cryptologue de la Seconde Guerre Mondiale et un des fondateurs de l’informatique…) ;</li>
<li>les raccourcis saisissants de l’histoire (le chauffeur de Sir Arthur Conan Doyle, les liens entre Bakounine et Wagner…), et les changements qui n’ont tenu qu’à un fil (la ferme de Waterloo, la prise d’un exemplaire d’Enigma, la ligne Oder-Neisse…) ;</li>
<li>les <strong>impostures</strong> scientifiques (l’homme de Piltdown, le mensonge d’Yves de Kerguelen sur son île, le rayon N…) et les recherches à la con (mouvement perpétuel, nombres premiers) ;</li>
<li>les grands projets qui ont échoué lamentablement (l’aérotrain, la TVHD des années 80, le moteur rotatif…) ;</li>
<li>la peu regrettée <a href="http://www.la1.be/rtbf_2000/bin/view_something.cgi?type=sac&id=0179339_sac&menu=none&pub=RTBF.LAUNE%2FLAUNE.FR.la_taille.SP.IN">nombrilologie</a> ;</li>
<li>les tristes histoires de <strong>bateaux</strong> aux fins moins glorieuses et finalement plus tragiques que le <em>Titanic</em> (dont l’apocalyptique <em>Great Eastern</em> qui a tué des passagers quasiment à chaque voyage) ;</li>
<li>les <strong>allumés</strong> de l’art, les <em>serial killers</em> ;</li>
<li>les codes secrets ;</li>
<li>etc., etc., etc.</li>
</ul>
<p>J’y ai notamment trouvé les réponses aux questions existentielles suivantes (je mets les réponses en note) :</p>
<ul>
<li>Pourquoi ne doit-on pas parler de <em>corde</em> dans un théâtre ? <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-1" id="rev-pnote-112-1">1</a>]</sup></li>
<li>Pourquoi vaut-il mieux parfois reconnaître qu’on a volé un objet précieux alors qu’on l’a acheté de bonne foi des années auparavant ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-2" id="rev-pnote-112-2">2</a>]</sup></li>
<li>Pourquoi les tankistes japonais ont-ils souffert lors de l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Conqu%C3%AAte_de_la_Mandchourie_par_le_Japon">invasion de la Mandchourie en 1931</a> ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-3" id="rev-pnote-112-3">3</a>]</sup></li>
<li>Quel a été le maréchal le plus incompétent de l’Histoire de France ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-4" id="rev-pnote-112-4">4</a>]</sup><br /></li>
<li>Y a-t-il des morceaux du territoire français non cartographiés ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-5" id="rev-pnote-112-5">5</a>]</sup></li>
<li>Quelle est la bourgade la plus isolée au monde ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-6" id="rev-pnote-112-6">6</a>]</sup></li>
<li>Quel est l’hymne national le plus court du monde ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-7" id="rev-pnote-112-7">7</a>]</sup><br /></li>
<li>Quel est le lien entre Sartre et des homards ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-8" id="rev-pnote-112-8">8</a>]</sup></li>
<li>Le cloporte n’est pas un insecte ; mais alors, qu’est-ce ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-9" id="rev-pnote-112-9">9</a>]</sup></li>
<li>Quelle marque française très connue avait pour logo une croie gammée ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-10" id="rev-pnote-112-10">10</a>]</sup><br /></li>
<li>Quel pays européen peu connu pour son impérialisme a envahi par inadvertance son voisin dans les années 90 ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-11" id="rev-pnote-112-11">11</a>]</sup></li>
<li>À qui doit-on payer des droits pour publier une photo nocturne de la Tour Eiffel ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-12" id="rev-pnote-112-12">12</a>]</sup></li>
<li>Comment s’appellent les rois en exercice en France ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-13" id="rev-pnote-112-13">13</a>]</sup></li>
<li>Quel milliardaire américain a déraillé de son train miniature géant et failli tuer plusieurs membres de sa maisonnée ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-14" id="rev-pnote-112-14">14</a>]</sup>.<br /></li>
<li>Quel est l’endroit que visitait l’empereur Hiro Hito quand il s’exclama « Il semble que cet endroit ait été considérablement endommagé » ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-15" id="rev-pnote-112-15">15</a>]</sup></li>
<li>Pourquoi les œufs français sont-ils bruns alors qu’ailleurs ils sont blancs ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-16" id="rev-pnote-112-16">16</a>]</sup></li>
<li>Quelle est la dernière unité à cheval de l’armée française ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#pnote-112-17" id="rev-pnote-112-17">17</a>]</sup></li>
</ul>
<p>Olivier Abélard a également une <a href="http://oabelard.free.fr/index.php?rub=bou_der">critique de l’Encyclopédie du Dérisoire</a>.</p>
<p>(<strong>10 Août 2007</strong>) <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/08/10/385-encyclopedie-du-derisoire-tome-5">Le tome 5 est du même tonneau !</a></p>
<div class="footnotes"><h4 class="footnotes-title">Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-1" id="pnote-112-1">1</a>] <em>Les techniciens étaient souvent d’anciens marins pour qui le mot </em>corde<em> était réservé à celle pour pendre quelqu’un.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-2" id="pnote-112-2">2</a>] <em>Le vol est un délit prescrit après quelques années ; le recel dure tout le temps de la possession de l’objet</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-3" id="pnote-112-3">3</a>] <em>Par un curieux hasard, l’écartement des galets du char correspondait exactement à l’écart entre les sillons des champs locaux ; les cahots étaient insupportables.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-4" id="pnote-112-4">4</a>] <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Achille_Fran%C3%A7ois_Bazaine">Bazaine</a>. Ses seules victoires l’ont été en Algérie ; sa reddition à Metz pendant la guerre de 1870 lui vaudra une condamnation à mort, plus tard commuée.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-5" id="pnote-112-5">5</a>] <em>Oui, aux îles Crozet, territoire français paumé non loin de l’Antarctique et des Kerguelen, la carte comporte un blanc et un pudique “</em>Nuages<em>” en légendes.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-6" id="pnote-112-6">6</a>] <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Tristan_da_Cunha">Tristan da Cunha</a> au milieu de l’Atlantique. Le plus proche cinéma est en Afrique du Sud à 2500 km</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-7" id="pnote-112-7">7</a>] <em>Le japonais</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-8" id="pnote-112-8">8</a>] <em>L’écrivain a un temps goûté à la drogue par curiosité, a pris une dose un peu forte, et se croyait environné de crustacés.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-9" id="pnote-112-9">9</a>] <em>Un crustacé, le seul terrestre.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-10" id="pnote-112-10">10</a>] <em>Lesieur. Aucun rapport avec les nazis bien sûr, juste une même inspiration (la svastika hindoue).</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-11" id="pnote-112-11">11</a>] <em>La Suisse. Des manœuvres ont par erreur débordé sur le petit Liechtenstein.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-12" id="pnote-112-12">12</a>] <em>À l’éclairagiste.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-13" id="pnote-112-13">13</a>] <em>Tomasi Kulimoetoke II (roi d’Uvéa), Soane Patita Maituku (d’Alo), Visesio Moeliku (de Sigave). Ces territoires font partie des territoires bien français de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Wallis-et-Futuna">Wallis-et-Futuna</a> ; deux d’entre eux ont été <a href="http://www.lefigaro.fr/france/20060316.FIG000000004_les_deux_rois_de_futuna_recus_a_paris.html">récemment reçus à Paris</a> d’ailleurs.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-14" id="pnote-112-14">14</a>] <em>Walt Disney</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-15" id="pnote-112-15">15</a>] <em>Hiroshima juste après la guerre.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-16" id="pnote-112-16">16</a>] <em>Les Français veulent des œufs bruns, c’est comme ça.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#rev-pnote-112-17" id="pnote-112-17">17</a>] <em>La Garde républicaine.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/18/123-encyclopedie-du-derisoire#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/112« Le train était à l’heure » et 14 autres nouvelles, de Heinrich Böllurn:md5:aeb8378d3ba2d04deb41c5c13eca29a22006-01-24T23:04:00+00:002010-10-26T08:20:31+00:00ChristopheSur mes étagères alourdieshistoirelivres luspessimismeSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>La Seconde Guerre Mondiale vue depuis la base, côté allemand.</p> <p><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Heinrich_Böll">Heinrich Böll</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/24/83-le-train-etait-a-l-heure#pnote-84-1" id="rev-pnote-84-1">1</a>]</sup> est un des principaux écrivains allemands d’après-guerre (Prix Nobel notamment). <em>Le train était à l’heure</em> (<em>Der Zug war pünktlich</em>) est sa première nouvelle parue.</p>
<p>En 1943, un soldat allemand repart au front en train, avec la certitude qu’il mourra avant son arrivée, il ne sait comment. Il rencontre d’autres soldats (aux histoires assez tristes) et les suit dans une virée en Galicie ; puis croise une prostituée qui travaille pour la résistance polonaise. On s’en doute, cela finit mal ; la littérature allemande sur cette période est rarement optimiste. Mais c’est bien écrit, dans un style simple. L’intérêt principal réside dans cette page d’histoire peu connue en France (l’Europe de l'Est occupée), vue depuis la « base ».</p>
<p>Les autres nouvelles ont souvent la guerre aussi comme cadre, avec ce pessimisme systématique quant au sort des malheureux soldats ; ou bien elles se déroulent dans l’immédiat après-guerre, qui ne fut pas rose pour les plus humbles. Ce sont les thèmes principaux de l’œuvre de Böll.</p>
<p>Un peu à part, la nouvelle <em>Les brebis galeuses</em> (<em>Die schwarzen Schafe</em>) est assez réjouissante et optimiste : l’original-parasite-bon-à-rien d’une famille parle de l’héritage de son oncle et de la transmission de sa qualité de brebis galeuse.</p>
<p><strong>Références : </strong> Nouvelles parues entre 1947 et 1954. Mon édition est une version poche de celle de 1967. L’édition bilingue, chez Folio également, ne semble reprendre que la nouvelle-titre.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/24/83-le-train-etait-a-l-heure#rev-pnote-84-1" id="pnote-84-1">1</a>] <em>Voir aussi <a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Heinrich_Böll" hreflang="de">l’article Wikipedia allemand</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/24/83-le-train-etait-a-l-heure#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/84