Blog éclectique & sans sujet précis - Mot-clé - catastrophe<p>Si ça me passe par la tête, si ça n’intéresse que moi, alors c’est peut-être ici. Ou pas.</p>2024-02-13T09:44:49+01:00L'éditeur est le propriétaire du domaineurn:md5:bf83720a7189bba489682d945b972671Dotclear« Géohistoire » de Christian Grataloupurn:md5:478cf37f9b6a32f203931aaeb6a7c9a92023-12-29T18:48:00+00:002023-12-29T18:48:00+00:00ChristopheHistoireAfriqueAmériqueAntiquitéauto-organisationcartescatastropheChinecivilisationclimatcolonisationcomplexitédémographiedéveloppementeffondrementEmpireEmpire romainesclavageEuropeguerregéographiegéologiegéopolitiquehistoireimpérialismeIndeMoyen Âgeorganisationperspectivepolitiquepouvoir d’acheterpétroleRenaissanceRussiesociétés primitivestempséconomieémerveillementénergieévolution<p>Les achats d’impulsion sont parfois les meilleurs. <em>Géohistoire</em> veut nous faire sentir <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/geohistoire">tout l’impact de la géographie sur la manière dont tourne le monde</a>. Christian Grataloup nous expose la trame sous-jacente à l’histoire de bien des Empires, plus liée aux vents de mousson ou aux flux de capitaux à l’échelle continentale qu’aux généraux et mouvements politiques. La domination européenne est en bonne partie une conséquence de sa géographie. Notes de lectures.</p>
<h2>Il était une fois l’humanité…</h2>
<p>Et ça commence très tôt, par <em>Homo erectus</em> et sa lente diffusion à travers le monde, du moins les parties habitables accessibles à pied sec. Dès cette époque, notre espèce montre une rare adaptation à tant de milieux différents, des savanes africaines aux forêts humides aux steppes neigeuses de l’ère glaciaire. Des bras de mer sont franchis. Nos atouts : le feu, la construction de maisons, l’aiguille à coudre.</p>
<p><a href="https://arenes.fr/livre/geohistoire-2/" title="Géohistoire (Christian Grataloup, Arènes, 2023)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/.Geohistoire-Christian_Grataloup-Arenes_2023_m.jpg" alt="Géohistoire (Christian Grataloup, Arènes, 2023)" class="media-right" /></a></p>
<p><em>Homo sapiens</em> va encore plus loin, et même l’Amérique est envahie. À la fin de la glaciation ne restent inoccupées que des îles du Pacifique ou l’Islande, conquises vers l’An Mil au plus tard, et des zones polaires comme l’Antarctique.</p>
<h2>Axe & périphéries</h2>
<p>L’essentiel de l’histoire, de la démographie, des échanges de l’humanité, et depuis l’Antiquité, sont regroupées autour d’un « Axe » de l’Eufrasie (terme qui inclue bien l’Afrique dans le monde). Au départ, l’Axe va grossièrement de Gibraltar à la Chine du Nord via les côtes méditerranéennes, la Perse et l’Inde. Avec le temps, l’Axe s’épaissit, en premier lieu en incorporant toute l’Europe jusque la Scandinavie et Îles britanniques.</p>
<p>Sur cet axe s’échangent des biens ou des monnaies, et aussi des métaux précieux, une spécificité de l’Axe. Les latitudes étant voisines, les méthodes de culture ou domestication diffusent. Les idées circulent aussi, à commencer par les religions (monothéismes, bouddhisme…). Mais aussi des agents pathogènes : la Peste Noire est l’exemple le plus flagrant. Au fil du temps, toute la population de l’Axe acquiert une immunité à des germes, souvent transmise par des animaux d’élevage, et que d’autres peuples isolés ne connaissent donc pas, bientôt pour leur plus grand malheur.</p>
<p>Les Empires sur l’Axe se créent et se renouvellent en réaction à des menaces externes : Rome face aux barbares, la Chine ou les Empires indiens face aux envahisseurs des steppes. On note que les capitales (Pékin, Delhi, Trèves…) ont tendance à être proches des frontières menacées.</p>
<p>Des régions restent à la marge. L’Afrique d’abord, peu intégrée, peu peuplée, en contact toutefois avec l’Axe via quelques routes au travers du Sahel, et surtout toute la côte est. L’Insulinde est une zone fragmentée mais bien connectée à dominante commerciale. Sont à peu près isolés l’Australie et tout le monde polynésien, de Taïwan à l’île de Pâques, malgré les talents de navigation de ses habitants. Surtout, le continent américain entier est isolé depuis des dizaines de millénaires. Géographiquement beaucoup plus segmenté que l’Axe, il est aussi sans grand mammifère domesticable (et mangeable), ce qui aura son importance pour le développement des sociétés.</p>
<h2>Économies-monde polycentriques</h2>
<p>Les Empires sont des blocs en partie nés des impératifs de la culture (notamment la riziculture) et des attaques des nomades. D’autres parties de l’Axe évoluent en « économies-mondes », faute d’ennemi contre lequel s’unir. Il s’agit de l’Insulinde et, plus encore, de l’Europe. Celle-ci, bien que déchirée entre d’innombrables entités une fois disparu l’Empire romain, conserve son unité. Les frontières de l’Europe médiévale, et leur évolution, se repèrent très vite par la carte des mariages royaux. L’Europe, tout au bout de l’Eurasie, ne craint pas vraiment un envahisseur à grande échelle. Les Mongols s’approchent mais sont trop loin de leurs bases.</p>
<p>Étonnamment, une excroissance de l’Europe exposée, elle, aux attaques des steppes, reproduit le schéma de la conquête impériale à l’ancienne : la Russie. Une double origine et un dilemme national dont les conséquences perdurent.</p>
<h2>Les vents, les épices et l’or</h2>
<p>Pendant des millénaires, l’essentiel des échanges entre grandes masses humaines se fait via l’Océan Indien, de l’Afrique à la Chine. Les latitudes propices à la mousson permettent d’aller d’est en ouest et de ouest en est, sans trop de danger. La Route de la Soie n’est qu’un chemin secondaire, terrestre, plus dangereux, et lent, même si la Chine tente systématiquement d’en sécuriser les tronçons proches quand elle n’est pas sur la défensive.</p>
<p>Les périphéries fournissent ce dont les autres ont besoin : esclaves africains notamment, et depuis des siècles ; des fourrures ; des métaux précieux. La Chine et l’Inde exportent des biens manufacturées, textiles en premier lieu (cotonnades indiennes, soie…), mais aussi thé ou porcelaine. L’Insulinde exporte ses fameuses épices, dont le sucre. De tout cela les Européens sont friands. Mais ils ne peuvent rien produire eux-mêmes, et surtout pas la canne à sucre qui craint l’hiver. Et l’Europe n’a pas grand-chose à exporter, à part un peu de verre.</p>
<p>Pendant deux millénaires, l’or et l’argent européens servent à acheter des biens manufacturés ou des épices asiatiques (à destination des plus riches, bien sûr), et ces métaux précieux restent en Asie. Puis les techniques de navigation atteignent un niveau permettant d’aller plus loin, et le monde commence à changer.</p>
<p>D’un côté, la Chine impériale n’a pas <em>besoin</em> d’aller chercher des ressources ailleurs. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zheng_He">Flotte des Trésors de Zheng He</a> va peut-être loin, mais reste une exception trop coûteuse pour être renouvelée aux yeux de l’autorité centrale.</p>
<p>De l’autre, l’Europe a épuisé ses mines et manque de monnaie précieuse pour ses échanges. La multiplicité des acteurs, le rôle majeur des marchands, permettent les expériences. Le premier pas est la conquête de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Macaron%C3%A9sie">Macaronésie</a> par les Espagnols et les Portugais, un marche-pied dans l’Atlantique. On y inaugure le modèle de la plantation de canne à sucre avec esclaves africains. Les Portugais sont les premiers à dominer les vents et à acquérir les techniques pour arriver d’abord en Afrique noire, et acheter l’or du Mali sans intermédiaire. De comptoir en comptoir, les Portugais parviennent dans l’Océan Indien, profitent eux aussi des moussons, et mettent la main sur le très lucratif commerce des épices avec l’Asie.</p>
<p>Jusque là, pas de changement fondamental : l’Europe ouvre une voie d’accès périphérique (toujours lente et dangereuse) à l’Asie, mais l’on reste dans les échanges au sein de l’Axe. Le Portugal (1 million d’habitants) n’est démographiquement pas capable de tenir plus que des comptoirs, et craint plus ses rivaux européens envieux que les peuples « découverts ».</p>
<p>Christophe Colomb va tout changer. La connexion entre Ancien et Nouveau Monde était inévitable, et des contacts avaient déjà eu lieu (Vikings au nord et Polynésiens au sud). Une fois compris le régime des vents dans l’Atlantique et la nécessité de s’écarter de l’Afrique pour en profiter au mieux, il était fatal que les Européens accostent dans les Caraïbes ou au Brésil. Les Chinois ou les Japonais auraient pu le faire un jour ou l’autre, mais les Espagnols ont été les premiers à établir des colonies en Amérique, suivis par tous leurs voisins.</p>
<p>Ce qui intéresse les Européens, ce sont les contrées avec un climat sans hiver, en premier lieu pour la canne à sucre. Pour éviter la fuite des esclaves noirs, les îles sont privilégiées (et Louis XV sacrifiera pour elles bien les arpents de neige canadiens.) Les Anglais et les Français vont aussi au nord, à la recherche d’une voie directe vers l’Asie. Le prosélytisme, la curiosité scientifique ou le goût de l’exploration sont d’autres moteurs, mais annexes aux besoins commerciaux.</p>
<p>La conquête de l’Amérique du Centre et du Sud est rapide et facile. Les maigres effectifs hispaniques, avec à peine quelques chevaux et armes à feu, sont massivement aidés (involontairement, du moins au début) par les agents pathogènes inconnus des Amérindiens, et contre lesquels les habitants de l’Axe sont à peu près immunisés. L’effondrement de la population américaine (environ 90 % !) entraîne des troubles sociaux qui achèvent les sociétés. Tant de territoires sont libérés de l’agriculture (en Amazonie notamment) que le reboisement se traduit par une chute du CO₂ atmosphérique, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Little_Ice_Age#Destruction_of_native_populations_and_biomass_of_the_Americas">possible cause du Petit Âge glaciaire</a>. La main d’œuvre locale disparue, et faute de pouvoir motiver sa propre population à aller trimer dans les plantations, l’Europe se rabat sur la traite négrière à grande échelle, amplifiant la saignée du continent africain.</p>
<p>Grataloup se risque parfois à des uchronies. Parmi elles : des virus mortels auraient-ils pu traverser l’Atlantique dans l’autre sens ? Adaptés à une longue cohabitation avec beaucoup plus d’animaux d’élevage, les Eufrasiens avaient les probabilités pour eux… mais il n’aurait pas été impossible que nos ancêtres subissent une saignée symétrique à celle des Amérindiens.</p>
<h2>La domination européenne</h2>
<p>L’or et l’argent américain résolvent la crise monétaire européenne, on frôle même la surproduction. Parallèlement et grâce à ces ressources, le goût du sucre, du thé, du café, du tabac, du chocolat, se répand dans toute la société européenne, les besoins augmentent, justifiant la création des diverses Compagnies des Indes orientales. D’abord entreprises capitalistiques commerciales concurrentes destinées aux expéditions commerciales risquées, celles-ci finissent absorbées par leurs États respectifs, après avoir installé des ribambelles de comptoirs, devenus colonies ou protectorats. L’Europe exporte ses rivalités internes sur toute la planète. Colonies et protectorats changent de main, les guerres de la fin du règne de Louis XIV ont un impact sur tout le commerce mondial, et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Sept_Ans">Guerre de Sept Ans</a> est quasiment une guerre mondiale.</p>
<p>Enfin, l’accès des Européens à des territoires sans hiver leur permet de tenter de produire eux-mêmes ce qu’ils achetaient avant. Après les cultures de la canne à sucre, du café et du chocolat se déploie celle du coton en Amérique du Nord (toujours grâce à la traite), ce qui permet de ne plus acheter d’indiennes (le tissu indien). Le thé reste longtemps une denrée qu’il faut acheter cher à la Chine. Pour rééquilibrer les échanges, les Britanniques (d’abord, puis avec les Français) du XIX<sup>è</sup> siècle se font narcotrafiquants : ils imposent aux Chinois l’opium des Indes britanniques (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerres_de_l%27opium">Guerres de l’opium</a>).</p>
<h2>Révolutions</h2>
<p>Grataloup va jusqu’à suggérer que les nouvelles habitudes occidentales basées sur les productions tropicales ont alimenté la Révolution industrielle, qui a d’abord démarré par une meilleure alimentation : thé et chocolats sucrés représentent en effet quelques calories en plus. L’hévéa aussi en est un élément important.</p>
<p>La transition démographique commence en France, en partie grâce aux améliorations des routes au XVIII<sup>è</sup> siècle, éliminant les famines. Cumulant supériorité maritime, puis technologique et industrielle, et enfin démographique (¼ de la population mondiale en 1900), l’Europe impose son modèle d’États aux frontières délimitées, ce qui n’est pas une évidence partout. Surtout, les différents pôles européens créent chacun un Empire, d’un type nouveau puisqu’il associe une métropole dans le nord très éloignée de colonies, généralement tropicales. Certaines de ces colonies deviennent des États de culture européenne indépendants (États-Unis en premier lieu puis Australie, Afrique du Sud…).</p>
<p>La seconde vague de colonisation européenne au XIXè siècle tient plus de l’affrontement impérial qu’autre chose. Les nouvelles colonies, notamment africaines, ne rapportent pas autant qu’elles coûtent.</p>
<p>La domination européenne ne dure pas deux siècles. Le polycentrisme, qui a stimulé les découvertes et conquêtes, provoque le suicide de l’Europe dès 1914. Plus tard, le Tiers Monde reste centré sur ces régions tropicales tant convoitées par d’autres. La transition démographique rebat les cartes. Une autre géographie se met à influer sur les rapports de force dans le monde : celle du Carbonifère, dont nous brûlons les forêts fossilisées.</p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-G%C3%A9ohistoire-%C2%BB-de-Christian-Grataloup#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/877« La Seconde Guerre Mondiale vue d'ailleurs » (Claude Quétel & co)urn:md5:5983bb4c0c678e0517867a40bedb620a2023-11-05T20:04:00+01:002023-12-30T11:27:59+01:00ChristopheHistoireAllemagneapocalypsecatastropheChinechristianismecommunismedilemmedémocratieEuropeGuerre Froideguerre saintegéographiegéopolitiquehistoireHistoire de Francelivres lusnationalismeperspectiveRussieSeconde Guerre MondialetempsÉtats-Unis<p>Il est toujours bon de faire un pas de côté quand on s’intéresse aux grands événements internationaux. Fatalement, nous portons tous un biais lié à l’histoire de notre pays et notre éducation. La Seconde Guerre Mondiale ne s’est pas limitée à l’Occupation, à la Shoah, au 6 juin et à Hiroshima. L’optique de chaque peuple est différente. Et parfois changeante.</p>
<p><a href="https://www.buchetchastel.fr/catalogue/la-seconde-guerre-mondiale-vue-dailleurs/"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.La_Seconde_Guerre_Mondiale_vue_d_ailleurs-Claude_Quetel_m.jpg" alt="La Seconde Guerre Mondiale vue d’ailleurs (Claude Quétel &amp; co)" class="media-right" /></a> Pour qui s’intéresse un peu au conflit (et ça pourrait être un lycéen), ce livre ouvre vraiment des perspectives. Même si on a fait l’effort de s’informer hors du monde franco-hollywoodien, on a peu l’occasion de savoir ce que pensaient Marocains ou Suédois des hostilités. Chaque chapitre traite d’un pays, par un auteur différent. Je me demande dans quelle mesure il est fiable de résumer si vite cinq ans (souvent plus) de la vie d’un pays dans ce genre de période, mais c’est bien plus que ce qu’on peut lire dans la plupart des livres et magazines d’histoire.</p>
<p><em>Comme d’habitude, j’essaie de résumer, mais l’italique est avis personnel.</em></p>
<h2>Maroc</h2>
<p>En 1939, le sultanat est un protectorat français (et espagnol dans le nord), et toute révolte contre l’ordre établi pouvait être durement réprimée (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Rif">le Rif en sait quelque chose</a></em>). Le royaume reste pourtant fidèle à la France, fournissant nombre de soldats de valeur à la IIIᵉ République comme à la France Libre. Peut-être par intérêt bien compris : les Français partis, le pays risque de se faire dévorer par l’Espagne ou l’Allemagne… <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Nogu%C3%A8s">Noguès</a>, résident français d’Afrique du Nord, préfère rester fidèle à Vichy, mais le Maroc devient un refuge pour nombre de Juifs, et accueille favorablement les Anglo-Saxons qui débarquent en 1942.</p>
<p>Cette fidélité est mal récompensée : les demandes d’accès à l’indépendance totale après la guerre sont impitoyablement rejetées et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Protectorat_fran%C3%A7ais_au_Maroc#Manifeste_de_l'ind%C3%A9pendance_(1944)">il faudra l’attendre jusque 1956</a>.</p>
<h2> Égypte</h2>
<p>Le royaume est indépendant depuis 1922 mais le protectorat britannique n’est pas tout à fait terminé. Le Canal de Suez est une artère vitale de l’Empire britannique sur la route de l’Inde, il ne doit pas tomber. L’élite égyptienne, cosmopolite et occidentalisée, est partagée entre Axe (y compris apparemment le roi Farouk) et pro-britanniques : mais ces derniers sont-ils encore en mesure de protéger l’Égypte ? Officiellement l’Égypte reste neutre, mais bienveillante envers les Britanniques, et les Allemands sont internés. Puis les villes se prennent assez de bombes allemandes pour provoquer des paniques. Les militaires égyptiens n’ont qu’un rôle de supplétifs dans les opérations : les Britanniques se méfient d’eux, et ne leur ont vendu aucun équipement moderne.</p>
<p>Une fois Rommel écarté, la paix revient, et le roi Farouk prépare l’indépendance totale. L’Égypte fait partie de ces nations qui n’ont déclaré la guerre à l’Allemagne en 1945 que pour compter parmi les fondateurs des Nations-Unies.</p>
<h2> Suède</h2>
<p>Neutre pendant toute la guerre, la Suède n’a peut-être pas soldé son passé de collaboration avec l’Allemagne nazie. Certes, en 1940-45, cerné de toute part par l’Axe, traumatisé par les privations pendant la guerre précédente malgré sa neutralité, le pays n’a pas trop le choix. Les nazis continuent à profiter pendant toute la guerre du fer ou des roulements à bille suédois (ces derniers sont d’ailleurs vendus aux deux camps).</p>
<h2> Suisse</h2>
<p>Neutre et cernée elle aussi, la Suisse a toujours clamé que son indépendance a été préservée grâce à son armée toujours prête. Pour Irène Herrmann, c’est une légende : les qualités militaires de la Suisse sont des conséquences de sa pauvreté originelle, et les Nazis n’auraient fait qu’une bouchée d’elle.</p>
<p>Mais les Allemands n’y pensent pas sérieusement, puisque l’économie suisse fonctionne essentiellement pour l’Allemagne, et les banques sont accommodantes dans leurs prêts. Les représailles anglo-saxonnes sont puissantes (gel des avoirs aux États-Unis…), mais par la suite les nécessités de la reconstruction et de la Guerre Froide font oublier cette page peu glorieuse.</p>
<h2>Irlande</h2>
<p>Pays pauvre tout juste sorti de sa guerre d’indépendance et d’une guerre civile, encore aux prises avec l’IRA, l’Irlande fait le choix d’une neutralité totale. Malgré la pression des Anglais, et encore plus des Américains, le pays refuse toute collaboration… officielle. La population (comme le président Valera) reste de fait favorable aux Alliés, et les Allemands n’arrivent jamais à exploiter la rancœur envers les Britanniques. Des dizaines de milliers de volontaires rejoignent même les forces britanniques. Économiquement, le pays souffre beaucoup.</p>
<h2>Canada & Québec</h2>
<p>Indépendant mais toujours fidèle à la couronne britannique, le Canada la suit dans la guerre. Caroline D’Amours nous sort beaucoup de chiffres pour montrer que le Québec, connu pour avoir été très réticent envers la conscription, a fait sa part. Une bonne partie de la retenue québécoise tient au fossé linguistique que doivent franchir les francophones. Pendant la guerre, le Québec, comme une bonne part du Canada, devient une gigantesque usine de chars et munitions pour l’Empire britannique.</p>
<h2>Australie</h2>
<p>Pays-continent, à l’identité toute fraîche trempée dans le sang pendant la Première Guerre Mondiale, et indéfendable, l’Australie se sait liée au Royaume-Uni pour sa défense, et lui est donc fidèle. Si l’engagement militaire reste faible au début, la menace japonaise devient palpable dès la chute du « verrou de Singapour ». On sait à présent que les Japonais ont vite renoncé à envahir l’Australie, ayant déjà assez de ressources (et de problèmes) après la prise de contrôle de l’Indonésie et de la Nouvelle-Guinée.</p>
<p>Se tournant bien sûr vers les Américains, le pays devient une gigantesque base arrière de la Guerre du Pacifique, non sans quelques soucis de cohabitations : chez sept millions d’Australiens conservateurs débarquent pas moins d’un million de jeunes soldats américains « <em>overpayed, oversexed and overhere</em> » (à la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Brisbane">bataille de Brisbane</a>, il n’y avait pas de Japonais.)</p>
<p>L’Australie fait partie des rares pays sortis renforcés du conflit.
L’impact sur le pays est profond : modernisation, renforcement des liens avec les États-Unis, ouverture à l’immigration non-anglo-saxonne, puis non-européenne, pour renforcer la population.</p>
<h2>États-Unis</h2>
<p>Le chapitre expose surtout l’évolution de l’isolationnisme américain. Si les Américains n’ont effectivement aucune envie d’envoyer les <em>boys</em> à nouveau se faire tuer en Europe, les Nazis n’y acquièrent jamais aucune sympathie, et Roosevelt n’a pas trop de mal à faire des États-Unis l’arsenal (et le banquier !) de la Grande-Bretagne. En partie parce que la prospérité de l’Amérique se base encore sur la sécurité des mers assurée par la marine britannique, et la chute de ce dernier est donc inenvisageable ; mais aussi et surtout à cause des liens culturels ; enfin à cause des souffrances des Britanniques (les Chinois bénéficient de la même sympathie). Et l’industrie de l’armement se met à recréer beaucoup d’emplois.</p>
<p>Sans aller jusqu’à la guerre, les Américains avancent leurs pions : les débarquements au Groenland et en Islande visent à sécuriser les routes atlantiques, pleines de sous-marins allemands pas encore ennemis. Washington utilise aussi largement les menaces de blocus, et la tension monte ainsi avec le Japon à cause de son invasion de la Chine, puis de ses visées vers les possessions européennes en Asie, devenues sans défense en 1940. Le Japon fait l’erreur monumentale d’attaquer les États-Unis aux Philippines (Pearl Harbor n’étant qu’un raid pour couler la flotte). Churchill craint un temps que cela ne distrait les ressources américaines vers le Pacifique mais Hitler prend la décision assez étonnante de déclarer lui-même la guerre aux États-Unis. Ceux-ci, s’étant fait forcé la main, peuvent jeter tout leur poids dans la guerre.</p>
<h2>URSS</h2>
<p>Les régimes autoritaires adorent détourner l’Histoire, et les régimes totalitaires la réécrivent. Si le rôle majeur de l’Union Soviétique dans la destruction du nazisme a longtemps été rabaissé en Occident pour cause de Guerre Froide, et réévalué depuis, les évolutions n’ont jamais cessé dans le monde (ex-)soviétique.</p>
<p>Évidemment, pendant la guerre, il est dangereux pour quiconque de faire mention du faustien Pacte germano-soviétique ou de la purge des généraux avant-guerre. Cela reste valable après la guerre. Mais il y a une progression entre l’époque stalinienne, tenant à marquer le génie de Staline, à ne pas honorer les anciens soldats, et à nier l’intérêt des livraisons occidentales (par exemple la moitié des camions de l’Armée Rouge, entre autres…), et la détente sous Khroutchev (qui, lui, avait fait la guerre aux premières loges, comme son successeur Brejnev) : le jour de la Victoire redevient férié, et les anciens combattants sont mis en valeur.</p>
<p>Sous Poutine, la Grande guerre patriotique devient un des piliers du rassemblement de ce qui reste de la Russie en ruine autour de son nouveau chef, thème utilisé jusqu’à l’absurde en 2022 quand il déclare vouloir dénazifier une Ukraine dirigée par un Juif. Il n’est pas impossible que l’occultation, voire la négation du sort particulier réservé aux Juifs par les Allemands joue un rôle : pour les Soviétiques, c’est le peuple entier qui a (énormément) souffert, il est hors de question qu’il y ait quelque particularisme.</p>
<h3>Les Juifs en Russie</h3>
<p>Un chapitre s’étend sur le sort des Juifs côté soviétique. Les Allemands à l’est ne s’embarrassent d’aucune précaution pour masquer leurs charniers, et les liquidations massives commencent dès le début de la conquête de l’URSS, avant le choix définitif de la Solution finale. Vue l’ampleur de la tâche, les populations locales sont enrôlées, au moins pour la logistique et combler les fosses. Les Allemands sont bien accueillis, et les pogroms spontanés, dans nombre d’endroits victimes récentes du stalinisme (Ukraine affamée, États baltes annexés…), renommé « judéo-bolchevisme ».</p>
<p>Staline est donc parfaitement au courant de l’ampleur de l’extermination, mais ne la met pas spécialement en avant : les Juifs sont noyés parmi beaucoup d’autres victimes, et il n’est pas question de faire des Juifs des martyrs plus que les autres, surtout quand des Soviétiques sont complices. D’un autre côté, les massacres servent à mobiliser la communauté juive à l’étranger (États-Unis en tête) au profit de l’URSS. Un premier comité juif créé en 1942 est envoyé au goulag car trop international, et le Kremlin en recrée un autre. Promoteur de la culture juive, il récolte de l’argent à l’étranger.</p>
<p>La libération progressive du territoire révèle les charniers et rend la Shoah palpable, mais fait aussi ressortir les compromissions… et l’antisémitisme, y compris au sommet. L’URSS, devenue un Empire dont la victoire s’est basée sur le nationalisme, n’a plus besoin de Juifs. Dès la fin de la guerre, Staline étouffe tout, la parution du <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Livre_noir">Livre noir</a></em> (une compilation de témoignages) est annulée, les membres du comité sont exécutés en 1952. Il n’y aura pas de monuments commémoratifs sur les charniers. Lors de la perestroïka, les Russes ont d’autres sujets de réflexion et d’autres chats à fouetter. Puis Poutine réinstrumentalise la Grande Guerre Patriotique, qui n’a pas besoin de victimes juives. Les anciennes républiques soviétiques rebâtissent souvent leur identité en réaction au communisme sans place particulière pour leurs Juifs.</p>
<h2> Mers el-Kébir</h2>
<p>L’attaque de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_de_Mers_el-K%C3%A9bir">Mers el-Kébir</a> (en Algérie française) a fait couler beaucoup d’encre depuis juillet 1940 : Churchill ordonne alors à sa flotte de couler la partie de la flotte française qui y est stationnée, de peur qu’elle ne passe aux mains des Allemands. Avant l’armistice, Darlan avait promis aux Anglais que la flotte passerait dans leur camp, ou au pire se saborderait. Mais il se fait acheter par Vichy. Certes, la flotte n’est effectivement pas livrée aux Allemands et se saborde en 1942. Mais qui en a la garantie en juillet 1940 ?</p>
<p>Bernard Costaglia apporte quelques nouveaux éléments aux débats : Churchill ne suit pas juste ce qui est devenu la version officielle (trahis par Darlan, épouvantés par l’idée d’une flotte française alliée aux nazis, les Anglais choisissent à regret la plus sûre solution). Entrent en compte le besoin d’infliger un revers, même indirect, à l’Axe ; de marquer la résolution britannique à un moment où le pouvoir de Churchill n’est lui-même pas si assuré ; le fait qu’il faut un an pour former l’équipage si les Allemands mettent la main sur les navires (à l’appui, un document de Churchill de… la guerre précédente) ; le message ainsi envoyé aux Américains (message reçu) qu’il est critique qu’ils livrent des navires ; peut-être le besoin de punir les Français ; voire de les vexer pour qu’ils réinvestissent dans leur armée, même vichyssoise. Mais encore : l’occasion est unique pour frapper. Les navires sont en position de faiblesse à ce moment, alors qu’à long terme, si l’Angleterre veut poursuivre le blocus du continent, une bataille est inévitable. L’encre n’a pas fini de couler.</p>
<h2>Italie</h2>
<p>L’Italie n’a pas gagné une grande bataille de toute la Seconde Guerre Mondiale. Le chapitre redore le blason des troupes italiennes, qui ne se rendent pas sans combattre, et qui sauvent parfois les fesses de Rommel en Afrique. Lequel Rommel leur impute en retour certains de ses échecs.</p>
<p>Mais le problème fondamental de l’Italie est au sommet : Mussolini, velléitaire, voit beaucoup trop grand, veut recréer un Empire, et agit sans coordination avec son allié (qui ne fait pas grand cas de lui), allié vite devenu protecteur suite à toutes ces mauvaises décisions. En effet : déclarer la guerre aux Alliés en 1940, c’est couper Somalie et Éthiopie de la métropole (et la reconquête alliée commencera par là en 1941). L’attaque sur la Grèce vire à la catastrophe, Hitler doit intervenir. (<em>C’est un succès, mais Barbarossa est retardé : Mussolini a peut-être sauvé Moscou.</em>) Rebelote en Égypte.</p>
<h2>Pologne</h2>
<p>S’il y a un État au centre des « terres de sang » de cette période, et victime des deux totalitarismes, c’est bien la Pologne. Attaqué par le Reich et l’URSS en même temps, à nouveau dépecé, le pays voit ses élites liquidées, sans parler des Juifs. La Résistance culturelle tente de préserver l’éducation, mais politiquement les succès sont très limités. Le gouvernement en exil est impuissant.</p>
<p>L’insurrection désespérée du ghetto de Varsovie en 1943 est un acte de désespoir, et l’insurrection de Varsovie en 1944 mène à la destruction de la ville et de la Résistance par les Allemands, au plus grand profit des Soviétiques qui ne lèvent pas le petit doigt. Les Alliés ne peuvent rien faire quand Staline installe son propre gouvernement polonais, vassalise peu à peu le pays, et décale ses frontières arbitrairement.</p>
<h2>Vatican</h2>
<p>Le comportement du pape Pie XII (élu en 1939) face au nazisme continue de faire débat. Pie XI dénonce l’attitude du régime nazi en 1937, mais son successeur fait partie de ceux qui espère préserver la paix et il ne s’exprime pas ouvertement. La principale raison de la prudence de Pie XII est sans doute la crainte de représailles sur les millions de catholiques allemands (raison pour laquelle il essaie plus tard de modérer les Alliés qui rasent l’Allemagne jusqu’à obtenir une reddition sans condition). Il est clair que ce choix l’a tourmenté.</p>
<p>La guerre ne modifie pas la tradition de neutralité de l’Église, qui se veut universelle, médiatrice, et pourvoyeuse de secours. Les chrétiens sont dans chaque camp, et sont censés obéir à leur gouvernement local. Le Saint-Siège s’est toujours accommodé des régimes autoritaires s’ils respectaient les catholiques, et toujours mal vu les régimes libéraux, bien qu’encourageant la démocratie en 1945. Évidemment, il abhorre le communisme et l’URSS depuis longtemps. Mais Pie XII ne croit pas que Hitler soit un rempart contre Staline, et refuse d’approuver la croisade nazie contre le bolchevisme. Et tant mieux si ces deux maux s’annihilent mutuellement.</p>
<p>Cette guerre est différente des précédentes par son idéologie et son ampleur, et des pressions pour prendre partie pour les Alliés se font jour dans l’Église même, par exemple chez les jésuites. Bien informé sur les massacres de Juifs, Pie XII n’en parle timidement que dans deux discours en 1942 et 1943, sans consigne ferme aux fidèles. Il laisse la responsabilité d’agir aux épiscopats locaux. Face aux persécutions contre les Juifs dans des pays très catholiques comme la France de Vichy ou la Hongrie, l’Église est juste résignée et fait peu. L’antisémitisme traditionnel a évidemment joué plus ou moins consciemment, avant comme pendant la guerre.</p>
<h2>Pacifique & Japon</h2>
<p>1941 marque la bascule de la guerre européenne vers une guerre mondiale. Frank Michelin remarque que l’indépendance de l’Indochine française, et de nombre d’États de la région, fait suite à l’invasion japonaise. C’est en Asie du Sud-Est que les conséquences politiques de la guerre sont les plus radicales.</p>
<p>Chaque pays voit cette face du conflit selon prisme. Pour les Japonais il y a la guerre de quinze ans (d’abord contre la Chine dès 1931), dont la seconde partie est la guerre d’Asie-Pacifique. La « grande guerre européenne » est plutôt un conflit séparé qui ne les a pas concernés.</p>
<p>L’expansion japonaise aux dépens de la Chine débute avec l’annexion de la Corée puis Taïwan en 1894. À partir de l’invasion de la Mandchourie, la guerre est permanente. Les Japonais occupent la plupart des zones peuplées mais le gouvernement chinois (provisoirement allié aux communistes) ne s’avoue jamais vaincu, et la Chine est gigantesque. Rediriger l’expansion vers la Sibérie n’est plus une option après la raclée de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Khalkhin_Gol">Nomohan</a> en 1939 face aux Soviétiques.</p>
<p>Pour étouffer la Chine, le Japon lance un blocus et fait pression pour occuper l’Indochine de Vichy, sans défense et forcée d’obéir. Ce mouvement vers le sud menace directement Singapour et l’Inde, perles de l’Empire britannique.
Les États-Unis menacent de sanctions (pétrole…) potentiellement mortelles. L’Indonésie (elle aussi sans défense depuis l’invasion des Pays-Bas) devient donc une cible majeure, qui implique de renforcer le contrôle de l’Indochine, voire d’affronter les Britanniques (protecteurs de l’Indonésie mais sur la défensive face aux Allemands), voire les États-Unis (propriétaires des Philippines et alliés inconditionnels des précédents).</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px.png" title="Expansion du Japon 1937-42"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px_m.png" alt="Expansion du Japon 1937-42" class="media-right" /></a>Le processus de décision japonais est peu clair et résulte de nombreuses luttes d’influence entre armée et marine, voire de faits accomplis de généraux locaux. Finalement, l’option choisie continue la fuite en avant : attaque de Singapour, des Philippines, et raid sur Pearl Harbor, en espérant sécuriser assez de ressources et de territoires avant la contre-attaque anglo-saxonne.</p>
<p>Les Japonais vont effectivement conquérir en six mois un espace immense, des frontières indiennes aux Aléoutiennes.
S’ils sont des occupants brutaux, ils détruisent l’ordre occidental, pour le plus grand profit des indépendantistes locaux. Les Européennes ne réussiront pas à reprendre le contrôle après-guerre. En Chine, les communistes profitent de l’épuisement des troupes nationalistes pour prendre le pouvoir.</p>
<h2>Chine</h2>
<p>Le point de vue chinois est bien sûr focalisé sur la guerre de quinze ans contre le Japon, fondateur devenu un mythe fondateur de la Chine actuelle.</p>
<p>En 1900, le pays est en déliquescence depuis des décennies face aux Occidentaux. Puis le Japon annexe Taïwan et la Corée, et enfin le sud de la Mandchourie après avoir évincé les Russes en 1905 (première grande défaite d’une puissance blanche).
La République chinoise s’enfonce dans une guerre civile avec les communistes. L’invasion complète de la Mandchourie survient en 1931, sur une initiative des nationalistes japonais de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arm%C3%A9e_japonaise_du_Guandong">armée du Kwantung</a>. Les Japonais rêvent d’une alliance contre les Soviétiques mais Staline soutient plutôt l’union sacrée qui apparaît en Chine. En 1937, une nouvelle attaque japonaise va jusque Shangaï et Nankin.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub_s.png" alt="Carte de l’occupation japonaise en Chine, 1940" class="media-right" /></a></p>
<p>Les crimes de guerre systématiques (le massacre de Nankin étant l’éternel symbole) n’ont pas raison de la résistance chinoise. Le nombre pur, et le soutien anglo-saxon ou soviétique, ne compensent toutefois pas le dénuement de l’armée chinoise. Sa façade maritime occupée, la Chine ne peut recevoir de soutien que par l’Indochine et la Birmanie, nouvelles cibles du Japon (voir ci-dessus). La guerre monte en intensité. L’URSS n’aide plus la Chine dès 1941 (elle signe un traité de non-agression avec le Japon pour couvrir ses arrières face aux nazis) mais l’aide américaine s’intensifie (« Tigres volants », pont aérien depuis la Birmanie).</p>
<p>Communistes et nationalistes mènent séparément la guerre contre le Japon. À la capitulation japonaise et au départ précipité des occupants, la guerre civile reprend jusque 1949. Toutes ces guerres coûtent environ vingt millions de morts, très majoritairement des civils.</p>
<p>La Chine ne recommence à exploiter la corde nationaliste, mémorielle et anti-japonaise qu’à la fin des années 80, à l’effondrement du bloc soviétique. Le manque de remords officiels du Japon envenime les choses. Xi Jinping appuie à fond sur le nationalisme, l’exploitation de la Seconde Guerre Mondiale, où le rôle de la Chine a été sous-évalué (première victime en taille et durée et enlisement du Japon), et la victimisation (un siècle d’humiliation). Le pouvoir déforme le rôle du Parti communiste (secondaire pendant contre le Japon) et les souffrances des autres pays. D’autres sons de cloche émergent cependant. Mais même entre les autres pays de la zone, une mémoire transnationale du conflit a du mal à émerger.</p>
<h2>Allemagne & dénazification</h2>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5.png" title="Division de l'Allemagne vaincue, 1945"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5_s.png" alt="Division de l'Allemagne vaincue, 1945" class="media-center" /></a></p>
<p><em>Der Fragebogen</em> est le succès de librairie allemand de 1951, sur le questionnaire que tous les ouest-allemands ont dû remplir sur leur activité sous le nazisme : un monument de déni (par un auteur d’extrême-droite (<em>comme par hasard !</em>))), réduisant le soutien nazi à celui de la classe dirigeante, et mélangeant camps d’internement américain et de concentration. Sans aller jusque là, l’Allemand de base trouve vite que la dénazification s’attaque aux petits et laisse filer les gros, et la perçoit comme une justice des vainqueurs.</p>
<p>Dans l’après-guerre, la dénazification ne peut être qu’imparfaite. Les dirigeants, les politiques, les membres de la Gestapo, les SS partent immédiatement au trou, mais trop de gens ont participé à l’administration du IIIè Reich, sa justice et sa politique criminelle pour les arrêter tous. À peu près tout le monde, de gré ou de force, a fini dans une organisation nazie. Le but principal des Alliés est que le retour de la démocratie ne soit pas sapé par des nazis restés à des postes-clés politiques ou économiques. L’interdiction des organisations, l’annulation de nombreuses lois, sont la partie facile. L’expérience américaine de « défascisation » en Italie depuis 1943, ou celle de l’épuration en France, sert. Les gouverneurs des quatre zones d’occupation sont chargés de l’exécution de mesures prises en commun, mais chacun fait un peu à sa sauce.</p>
<h3>À l’ouest</h3>
<p>Arrive donc le fameux questionnaire pour juger du niveau d’implication de chacun (chez les Américains, car les Britanniques ont plus ciblé) : coupable principal, compromis/bénéficiaire, moins compromis, simple suiveur, exonéré ? La masse à traiter implique que les Allemands se jugent au final souvent entre eux, avec compréhension. Le contexte de Guerre Froide naissante, comme le chaos économique, font passer l’épuration politique second plan. Des nazis encartés écopent de peines légères car économiquement nécessaires, au lieu d’être condamnés à finir leur vie comme manœuvre. Les plus jeunes et les suiveurs les moins riches, ou les prisonniers de guerre, sont rapidement amnistiés d’office. Le système est aussi perverti par les <em>Persilscheine</em>, attestations de bon comportement, souvent réciproques entre connaissances. Tout le monde a sa justification pour avoir plus ou moins suivi (mais pas plus !) le Führer.</p>
<p>Les Églises freinent aussi des quatre fers : une épuration trop massive gênerait la rechristianisation de l’Allemagne. Les partis politiques voient aussi un vivier d’électeurs dans tous ces dénazifiés plus ou moins repentis, qui se considèrent plutôt comme des escroqués et donc des victimes. En 1950/51, la nouvelle République Fédérale rouvre les portes des administrations à presque tout le monde. L’Allemagne fédérale voit sa dénazification comme un échec relatif, mais au moins sa culture politique a-t-elle été rebâtie.</p>
<h3>À l’est</h3>
<p>Les communistes ont la main beaucoup plus lourde et déportent jusqu’en URSS. C’est aussi le moyen de mettre le pays politique au pas. Mais là aussi l’épuration s’arrête vite par besoin de main d’œuvre.</p>
<h2>Du souvenir de cette guerre</h2>
<p><em>C’est un fil rouge : le souvenir de la guerre dépend des pays, y compris relativement aux autres conflits.</em></p>
<p><em>Si pour les Américains la Seconde Guerre Mondiale est d’abord celle du Pacifique et de la reconquête de l’Europe de l’Ouest, les Russes ou les Chinois ont des perspectives très différentes,marquées par la ligne variable du Parti. Les Suédois et les Suisse préfèrent regarder ailleurs. Les Australiens restent plus marqués par la Première Guerre Mondiale, où ils eurent beaucoup plus de victimes et participèrent à des batailles majeures.</em></p>
<p><em>À l’inverse, l’Allemagne a été totalement traumatisée par l’anéantissement qu’elle a subi, et la mémoire allemande me semble plus tournée vers le long cauchemar du front russe et les derniers mois de guerre que par la Première Guerre Mondiale, la Normandie ou les victoires des débuts.</em></p>
<p><em>Manquent forcément quelques pages : il y aurait beaucoup à écrire sur l’ex-Yougoslavie (avec ses conséquences jusque dans les années 90), les États baltes, la Finlande, l’Afrique (exploitée par les Alliés), la Syrie, l’Irak ou l’Iran…</em></p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Seconde-Guerre-Mondiale-vue-d-ailleurs-Claude-Qu%C3%A9tel-co#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/873« Cette planète n’est pas très sûre » d’Alexis Jenni : pop science par un Goncourturn:md5:9e191eca8e7b4b36b59bf5d054ff4a5c2023-09-02T12:33:00+02:002023-09-02T11:34:33+02:00ChristopheScience et conscienceabominationapocalypseastronomieautodestructioncataclysmecatastrophecivilisationclimatcolonisationcomplexitécosmologiedinosaureseffet de serreeffondremententropieexaptationgigantismegéographiegéologielivres luspanspermieperspectivepessimismesciencetempsvolcansécologieéonsévolution<p>Les 5 Grandes Extinctions racontées par un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexis_Jenni">détenteur du Goncourt</a>. Ce n'est pas de la littérature mais de la bonne vulgarisation. Alexis Jenni est d’abord prof de Sciences Nat’ (comme on disait autrefois), c’est cela qui transparaît, avec l’amour de la Science et de ses turpitudes.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/sciences/Alexis_Jenni-Cette_planete_n_est_pas_tres_sure.jpg" title="Cette planète n’est pas très sûre (Alexis Jenni, humenSciences)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/sciences/.Alexis_Jenni-Cette_planete_n_est_pas_tres_sure_s.jpg" alt="Cette planète n’est pas très sûre (Alexis Jenni, humenSciences)" class="media-right" /></a>
Dans l’histoire de la vie sur Terre, les extinctions principales n’étaient pas cing (<em>Big Five</em>) mais au moins six, plus celle en cours, quoique peut-être plutôt dix-huit, question de choix de seuil puisque la disparition et l’apparition des espèces est un phénomène continu, la moyenne est d’un million d’année d’existence pour les mammifères, et les pics sont des anomalies dans ce bouillonnement permanent, et cette phrase est trop longue comme certaines de celles de l’auteur.</p>
<p>Le propos est grand public, ouvertement « pop science ». Les termes techniques ne manquent pourtant pas. J’aurais aimé une petite frise chronologique des époques : si j’ai une vision claire de l’ordonnancement des Permien, Trias, Jurassique et Crétacé, c’est moins clair pour l’Ordovicien ou le Silurien. Merci Wikipédia pour les précisions.</p>
<p>Entre deux leçons de science, on croise Stephen Jay Gould, Lamarck et Darwin : à côté de géologie, il s’agit aussi d’évolution, et ces débats sont rarement scientifiques, et en disent beaucoup sur la société de l’époque. Le rôle du hasard sans but dans l’évolution est insupportable pour tant de monde, qui ressassent les mêmes arguments démontés depuis un siècle et demi. Gould dirait que la complexité des espèces n’est qu’une illusion : le monde reste massivement dominé par les bactéries et autres animaux minuscules.</p>
<h2>Limite K-T</h2>
<p>On commence par la plus connue et médiatique des extinctions, celle d’il y a 66 millions d’années, où les dinosaures ont disparu, ainsi que les ammonites et nombre d’animaux et plantes. C’est l’occasion d’un petit cours de géologie de base sur les couches de sédiments : leur nature dépend en bonne partie des animaux morts qu’ils contiennent, et la fameuse couche K-T (Crétacé-Tertiaire)<sup id="fnref:ts1693647273.1"><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Cette-plan%C3%A8te-n-est-pas-tr%C3%A8s-s%C3%BBre-%C2%BB-d-Alexis-Jenni-%3A-pop-science-par-un-Goncourt#fn:ts1693647273.1" class="footnote-ref" role="doc-noteref">1</a></sup> est justement vide de vie. Suit un exposé sur les différentes théories plus ou moins farfelues, les problèmes de datation, et la solution trouvée par Alvarez père & fils, décrite non comme un moment eurêka mais comme un bel exemple d’interdisciplinarité et de sérendipité. Alvarez fils, géologue, cherchait un moyen pour calculer la <em>durée</em> de cette couche K-T, et Alvarez père, astronome, eut une idée d’astronome : mesurer la quantité des métaux typiques des météorites, qui tombent des cieux avec une régularité de métronome. La quantité trouvée, astronomique (littéralement), mena immédiatement à l’hypothèse du caillou assassin.</p>
<p>C’est l’occasion d’un petit cours sur comment fonctionne vraiment la science, loin de l’image éthérée de la tour d’ivoire et des froids raisonnements. Les pinaillages incessants, la mauvaise foi des partisans des théories battues en brèche, les différentes quasi culturelles entre différentes branches des sciences, les conséquences des batailles passées (le catastrophisme a été difficilement délogé au XIXᵉ, on n’allait pas le faire revenir !), même les éventuels noms d’oiseaux échangés… garantissent au final la solidité de la théorie finale <sup id="fnref:ts1693647273.2"><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Cette-plan%C3%A8te-n-est-pas-tr%C3%A8s-s%C3%BBre-%C2%BB-d-Alexis-Jenni-%3A-pop-science-par-un-Goncourt#fn:ts1693647273.2" class="footnote-ref" role="doc-noteref">2</a></sup>, ou l’améliorent. La théorie volcanique reste l’alternative la plus plausible à la météorite, mais elle ne résista pas aux dernières découvertes archéologiques, notamment à Chicxulub. S’il y eut des éruptions monstrueuses en Inde vers cette époque, il est significatif qu’elles aient eu lieu aux antipodes du point d’impact, une éventuelle activité ayant été empirée par l’onde de choc. Au passage, petite explication d’un hiver nucléaire.</p>
<p><a href="https://pxhere.com/en/photographer/3176923" title="Diplodocus sous une pluie d’astéroïdes (ChristianMR, CC0)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/sciences/.Diplodocus_comete-ChristianMR_via_pxhere.com-CC0_m.jpg" alt="Diplodocus sous une pluie d’astéroïdes (ChristianMR, CC0)" class="media-right" /></a>
Alexis Jenni se plaint que les gens ne soient pas comme lui fascinés par la couche K-T quand elle est si proche (il y a un <em>spot</em> au pays basque), ou même d’habiter à Chixculub. Je partage cet effarement, ça me remuerait d’être proche d’un témoignage d’un tel événement.</p>
<h2>Du Permien au Trias</h2>
<p>Ensuite on enchaîne sur la pire extinction : le Permien, 252 millions d’années en arrière, bien avant les dinosaures. Une période étouffante, avec très peu d’oxygène, avec un méga continent unique, des eaux trop basses… et donc peu de traces. La couche de transition est encore plus pauvre en carbone 12 (végétal, vivant) que la couche K-T. Des restes de champignons : beaucoup de bois mort. Les indices s’accumulent : la période déjà chaude (36 degrés de plus que la nôtre !) a été suivie d’une véritable cuisson.</p>
<p>Et cette fois le coupable semble bien volcanique, et sibérien, avec plein d’effets en cascade. (J’avais déjà <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien">parlé de l’extinction du Permien</a>.) Notre civilisation ne part pas d’aussi chaud, mais on y va tout droit.</p>
<p>À cause du début du fractionnement de la Pangée et du volcanisme, une extinction moins grave (« juste » les ¾ des espèces) a lieu entre Trias et Jurassique, ouvrant le premier âge d'or des dinosaures.</p>
<h2>Du Dévonien au Carbonifère</h2>
<p><a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:D_Terrelli.png" title="Dunkleosteus (fin du Dévonien), par Entelognathus via Wikipedia (CC by SA 4.0)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/animaux/Devonien/.Dunkleosteus-par_Entelognathus_via_Wikipedia-CCBYSA4.0_m.png" alt="Dunkleosteus (fin du Dévonien), par Entelognathus via Wikipedia (CC by SA 4.0)" /></a></p>
<p>On revient encore 100 millions d’années en arrière. La fin du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9vonien">Dévonien</a> voit deux ou trois pics d’extinctions sur une Terre pourtant luxuriante « dominée » par les poissons. Parmi eux, les premiers tétrapodes, qui, dans leurs mangroves encombrées, commencent à se demander si ça ne serait pas mieux sur terre. Cette fois, la cause de l’extinction serait la vie elle-même : le succès des forêts aurait entraîné une masse de sédiments vers les mers peu profondes de l’époque, devenues alors invivable pour nombre d’espèces. (La belle autorégulation de la planète est donc une légende, même à l’échelle de quelques millions d’années.) Cerises sur le gâteau : une glaciation pour faire chuter le niveau des mers (dit Wikipédia) ; puis un coup d’effet de serre pour détruire la couche d’ozone.</p>
<h2>De l’Ordovicien au Silurien</h2>
<p>On est presque un demi-milliard d’années dans le passé : pendant que des bestioles tenant du scorpion géant croisent dans les océans grouillant de vie invertébrée, les plantes et mousses commencent à conquérir la Terre, consomment le CO₂… et déclenchent une grande glaciation : exit 85% des espèces.</p>
<h2>La Grande Oxydation</h2>
<p>Cette glaciation, ce n’était certes pas la première de l’histoire de la Terre. Quand les bactéries se mirent à la photosynthèse, elles polluèrent massivement l’atmosphère avec leur déchet : l’oxygène, autrefois absent et mortel pour la vie. L'oxygène rouilla tout le fer de la planète, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thane_atmosph%C3%A9rique#Processus_d'absorption">puis le méthane</a>, très puissant gaz à effet de serre. Le soleil étant, il y a 2,4 milliards d’années, moins chaud, c’était parti pour <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Glaciation_huronienne">300 millions d’années de Terre-boule de glace</a>. Le cycle du carbone est fragile et oui, la vie s’est lentement adaptée après l’hécatombe, mais le sort de ces bactéries anaérobies qui ont pollué leur planète à un niveau mortel (pour elles) et détraqué le climat devrait nous faire réfléchir. Il a fallu attendre que les volcans aient craché assez de CO₂ pour la débâcle.</p>
<p>Il y eut des rechutes de glaciation, notamment quand le supercontinent Rodinia se fragmenta, favorisant l’érosion et donc la chute du CO₂, provoquant le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cryog%C3%A9nien">Cryogénien</a>, juste avant la diversification et les bestioles bizarroïdes de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89diacarien">Édiacarien</a>.</p>
<h2>Conclusion</h2>
<blockquote>
<p>On meurt beaucoup sur cette Terre, parfois seul et parfois brutalement tous ensemble.</p>
</blockquote>
<p>La Terre a été alternativement une boule de glace et un four, et le soleil n'est pas le responsable principal. Un continent unique entraîne un désert en son centre, réduit l’érosion, réduit les mers peu profondes, le CO₂ s’accumule, la planète cuit. Quand un continent se scinde, l’érosion reprend, le CO₂ chute et l’effet de serre baisse, la glaciation menace. Le CO₂ dépend aussi des volcans et de l’extension du vivant. La vie s’amuse à balancer ses déchets dans l’atmosphère ou à jouer sur l’érosion. L’occasionnel géocroiseur ne fait que complexifier une situation assez instable.</p>
<p>Mais la vie est souple, grouille, s’étend partout… si on la laisse tranquille. La planète nous survivra, aucun doute là-dessus, quitte à panser ses plaies quelques millions d’années. Notre civilisation obsédée par le court terme ne verra peut-être pas le siècle suivant. Ne pas oublier non plus que les espèces qui pullulent (nous humains représentons 13% de la biomasse mondiale, nos animaux 85%…) finissent par devenir des ressources pour d’autres jusqu’à régulation (Je me dis que le Covid n’est que le premier de virus conquérants.)</p>
<p>Quant à une nouvelle extinction majeure, elle est bien en marche, et s’accélère : 80% d’insectes en moins (en poids) en 40 ans, les oiseaux suivent. Jenni panique. Anthropocène ou Nécrocène ?</p>
<div class="footnotes" role="doc-endnotes">
<hr />
<ol>
<li id="fn:ts1693647273.1" role="doc-endnote">
<p>Apparemment, on dit plutôt <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Extinction_Cr%C3%A9tac%C3%A9-Pal%C3%A9og%C3%A8ne">K-Pg (Crétacé-Paléogène)</a> de nos jours. <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Cette-plan%C3%A8te-n-est-pas-tr%C3%A8s-s%C3%BBre-%C2%BB-d-Alexis-Jenni-%3A-pop-science-par-un-Goncourt#fnref:ts1693647273.1" class="footnote-backref" role="doc-backlink">↩︎</a></p>
</li>
<li id="fn:ts1693647273.2" role="doc-endnote">
<p>Je lisais justement un <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/histoire-sciences/pasteur-une-carriere-jalonnee-de-polemiques-24434.php">article de <em>Pour la Science</em></a> sur Pasteur, pas toujours exemplaire dans les débats scientifiques. <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Cette-plan%C3%A8te-n-est-pas-tr%C3%A8s-s%C3%BBre-%C2%BB-d-Alexis-Jenni-%3A-pop-science-par-un-Goncourt#fnref:ts1693647273.2" class="footnote-backref" role="doc-backlink">↩︎</a></p>
</li>
</ol>
</div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Cette-plan%C3%A8te-n-est-pas-tr%C3%A8s-s%C3%BBre-%C2%BB-d-Alexis-Jenni-%3A-pop-science-par-un-Goncourt#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/872« Le troupeau aveugle » (The Sheep Look Up) de John Brunnerurn:md5:26cf4438a44904f45a3795ca81cf064c2023-08-11T21:16:00+02:002023-08-23T17:28:15+02:00ChristopheFragile planèteabominationabsurditéAmériqueapocalypseautodestructionbon senscataclysmecatastrophecivilisationclimatcourt termedysfonctionnementdécadencedémocratieeaueffet de serreeffondrementfoutage de gueulelivres lusmétéooh le beau cas !panurgismeperspectivepessimismepétrolescience-fictionterrorismeécologieÉtats-Unis<p><em>Le troupeau aveugle</em> est un classique de la SF écolo-catastrophique des années 70. Il est faux qu'il soit daté, son actualité est même glaçante.</p>
<p>John Brunner ne brille pas par son optimisme. Dans sa fameuse tétralogie sur l'avenir proche et ses dangers, <em>Le troupeau aveugle</em> (1972) est peut-être le plus noir et désespéré. <img alt="John Brunner : Le troupeau aveugle (édition Livre de poche)" src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/SF/.John_Brunner-Le_troupeau_aveugle-Liredepoche_s.jpg" style="float: right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>Les premières pages peuvent rassurer : cette civilisation étouffant sous la pollution, ces pluies si acides, ces avalanches provoquées par des avions supersoniques, ces plages innommables, on y a échappé (du moins à cette échelle, dans la plus grande partie de l'Occident, merci aux lois anti-pollution apparues justement peu après la publication). Quant au CO₂, Brunner n'était pas au courant du problème.</p>
<p>Mais la suite fait tout de même grincer les dents. Les masques que tous portent, on a connu récemment, pour d'autres raisons. La malbouffe <em>est</em> un problème, ainsi que les résidus de pesticides dans l'alimentation, et l'impact de la pollution sur la fécondité, ou le <em>greenwashing</em>, ou la pollution aux plastiques. Juste pas la même échelle que dans le livre, ou plus insidieusement. Denver qui brûle fait écho à cette <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/2023_Hawaii_wildfires">ville brûlée à <em>Hawaï</em> ces derniers jours</a>, même si la cause immédiate diffère. La pollution des nappes phréatiques, c'est toujours d'actualité.</p>
<p>La myopie complète des gouvernants et d'une bonne partie de la population : on atteint le niveau de <em>Don't Look Up</em> (et je me demande si le titre du livre de Brunner a pu inspirer celui du film). Les écolos (initialement) non violents réprimés violemment, tandis que les pollueurs sont laissés tranquilles, on connaît. On a juste encore échappé au virage écoterroriste, mais pour combien de temps ? Non, ça ne finit pas bien. Bref : excellent, déconseillé aux éco-anxieux.</p>
<p>Références : <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/The_Sheep_Look_Up">Page wikipédia anglophone</a></p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Le-troupeau-aveugle-%C2%BB-%28The-Sheep-Look-Up%29-de-John-Brunner#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/871« Le chemin des Dames » de Pierre Miquelurn:md5:ce7667faa96e1fc0cc9edbc9ae4ebfc92023-06-30T19:00:00+02:002023-08-23T17:28:57+02:00ChristopheHistoireabominationabsurditéabusrditéautodestructioncatastrophedommagedysfonctionnementgénéalogieHistoire de Francelivres lusmortorganisationPremière Guerre Mondialeténacité <p>Ypres, Les Dardanelles, Verdun, la Somme, le Chemin des Dames… Il y eut tant de boucheries en 14-18 qu'on les confond. Ce livre de 1997 s'étend sur tout le déroulé de la dernière grande offensive française, en 1917, au nom devenu tristement célèbre. Résumé.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Pierre_Miquel-Le_Chemin_des_Dames-Perrin.png" title="Pierre Miquel : Le Chemin des Dames, Perrin 1997"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Pierre_Miquel-Le_Chemin_des_Dames-Perrin.png" alt="Pierre Miquel : Le Chemin des Dames, Perrin 1997" style="float: right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>
La légende dit que les « dames » de ce chemin entre Reims, Soissons et Laon, étaient les filles de Louis XV, allant rendre visite à une ancienne maîtresse de leur père. En 1917, la ligne de front s'y était établie, sur une crête entre les vallées de l'Aisne au sud, et l'Ailette au nord. Le 16 avril 1917, le général Nivelle y lance une offensive massive, brusque, préparée depuis des mois et destinée à rompre le front jusque Laon. Au bout de quelques heures, il est clair que c'est un échec. Ce demi-succès (en étant gentil) ne vaut pas les 300 000 morts et blessés dans les deux camps.</p>
<p>Il serait facile d'accuser les généraux de l'époque de pure incompétence. Joffre avait été remplacé par Nivelle, artilleur ayant appliqué là-bas de nouvelles techniques qui font de lui le vrai vainqueur de Verdun. Quand il présente son plan d'offensive majeure, des résistances se font bien jour. On ne veut pas d'une nouvelle attaque qui s'enlise des mois pour rien comme sur la Somme. Pétain préférerait faire le gros dos en attendant les Américains et des chars en quantité. Chez les Britanniques, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Douglas_Haig">Haig</a> renâcle, se fait tirer l'oreille pour lancer une attaque simultanée, mais Lloyd George approuve l'idée. Pierre Miquel passe beaucoup de temps sur le côté politique français. En arrière-plan : dans quelle mesure le Parlement doit-il s'occuper des opérations ? Faut-il risquer tout de suite une nouvelle attaque ou attendre, au risque que les Allemands se renforcent ? Faut-il envoyer des renforts aux Italiens ? Peut-on encore se fier au nouveau gouvernement russe après la Révolution de Février ? Que penser des ouvertures de paix du nouvel Empereur d'Autriche, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Ier_(empereur_d%27Autriche)">Charles</a> ?</p>
<p>Nivelle a le malheur d'être trop persuasif. Il mise sur la préparation d'artillerie massive, et la rapidité d'exécution. Il a tout planifié : préparation massive, déplacement précis et rapide de l'artillerie derrière l'infanterie pour s'attaquer tout de suite à l'artillerie ennemie, aux secondes lignes, et éviter l'arrivée de renforts, l'arrivée d'armées entières. Pour être prêt, la date d'attaque a été repoussée plusieurs fois. Sur le papier, c'était parfait.</p>
<p>Et comme tout plan parfait, la confrontation avec la réalité est cruelle. Les avions français, surclassés par les Allemands, ne peuvent aider à régler l'artillerie autant que prévu. Des munitions manquent. Les tanks sont moins nombreux que voulu, et moins fiables que prévu. Le temps n'est pas de la partie : il neige, alors que les unités d'élites coloniales engagées ne sont pas supposées combattre en conditions hivernales. Les Allemands ont profité du réseau de cavernes sous la crête pour en faire des abris, créer un réseau souterrain invisible de l'ennemi, monter des tourelles bétonnées que les canons français ne peuvent détruire. Malgré la préparation d'artillerie, les Français se retrouvent face à de nombreux nids de mitrailleuses, apparus parfois dans leur dos. Pire : les Allemands ont deviné ce qui allait se passer, ils ont amené de nombreuses réserves.</p>
<p>Nivelle n'a pas tenu compte des signaux qui auraient permis de prévoir tout cela (de petites attaques avaient échoué, des plans avaient été perdus). Il était cependant délicat de tout annuler au dernier moment, quand des centaines de milliers d'hommes ont été déplacés, sont prêts, et attendent sous la pluie.</p>
<p>L'offensive n'atteint pas ses objectifs du premier jour, loin de là, ni le lendemain. Malgré la promesse initiale d'arrêter très vite les frais si le succès n'était pas au rendez-vous, d'autres offensives suivent pendant un certain temps. Le gain final n'est pas totalement négligeable : des observatoires d'artillerie, une partie du Chemin des Dames enlevé, de lourdes pertes infligées aux Allemands, un nombre énorme de prisonniers… mais à un coût hallucinant.</p>
<p>Avant la bataille, le moral des troupes est élevé. Mais le Chemin des Dames marque le début des mutineries, du refus de bien des Poilus de partir à l'attaque sans aucune chance de vaincre. Le gouvernement se persuade que les pacifistes de l'arrière contaminent les soldats, alors qu'il s'agit plutôt de l'inverse. Il faut lâcher du lest sur les permissions.</p>
<p>Nivelle est écarté. On pense à le juger, mais il faudrait aussi juger ceux qui l'ont nommé, lui ont demandé d'être offensif. Pétain prend sa place et se contente d'offensives très limitées sur quelques kilomètres, avec des moyens maximaux (la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_la_Malmaison">Malmaison</a>, fin octobre 1917), sans trop de pertes mais sans grande conséquence stratégique.</p>
<p>En relisant mon arbre généalogique, j'ai réalisé que deux de mes arrière-grands-pères ont été blessés au Chemin des Dames, les deux en octobre 1917, dont l'un à la Malmaison. Il faut jeter un œil aux livrets militaires de ses ancêtres.</p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-chemin-des-Dames-de-Pierre-Miquel#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/870« L’effroyable tragédie » de Marie-Pierre Rey : la fin de la Grande Armée pendant la campagne de Russieurn:md5:12ebc1605b7ca5abfdd4a22380e535e12023-06-10T19:45:00+02:002023-08-23T17:29:39+02:00ChristopheHistoireabsurditéautodestructioncatastrophedysfonctionnementeffondrementEmpireEuropegigantismeguerre saintehistoireHistoire de Franceimpérialismelogistiquemortoh le beau cas !organisationracléeRussie <p>L’armée de Napoléon a disparu en Russie. Tout était écrit, et pourtant… Cet excellent livre de 2012 décrit bien le calvaire de l'Armée française et les choix catastrophiques de Napoléon. Résumé.</p>
<h2>L’invasion</h2>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Marie-Pierre_Rey-L_effroyable_tragedie.jpg" alt="Marie Pierre Rey : L'effroyable tragédie" style="float: right;" /> En 1812, Napoléon se fâche définitivement avec le tsar Alexandre, dont il espérait tant l'alliance pour étouffer l'Angleterre. Avec un demi-million d'hommes, il envahit la Russie pour lui imposer ses conditions . On connaît la suite, pas les détails. Souvent on a lu Tosltoï (cf mon billet sur <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-guerre-et-la-paix-de-L%C3%A9on-Tolsto%C3%AF">la Guerre et la Paix</a></em>), qui n'était pas historien, et louait la sagesse du général russe Koutouzov, qui a juste suivi les Français en retraite, et laisser l'hiver et la faim les décimer.</p>
<p>Mais Koutouzov n'était pas l'initiateur de la stratégie russe. Ses collègues lui reprochent même de ne pas avoir été assez agressif sur la fin (car la Grande Armée en déroute avait parfois encore de beaux restes) et d'avoir raté la capture de Napoléon. Le choix du retrait devant l'invasion et de la terre brûlée se décide avant le conflit (« Notre climat, notre hiver feront la guerre pour nous » écrit Alexandre), sans forcément que tous les détails aient été fixés. Un siècle avant, l'hiver avait déjà battu les Suédois.</p>
<p>Juin 1812 : la gigantesque Grande Armée, avec ses effectifs pléthoriques, ses soldats peu habitués au climat russe, ses innombrables chevaux, sa lourde artillerie, ses convois de chariots de bagages parfois inutiles, s'enfonce au printemps dans un pays gigantesque, misérable, rural, souvent sans routes, d'où le pouvoir russe a enlevé ou brûlé tout ce qui pouvait l'alimenter. L'armée russe se dérobe, refuse à l'Empereur la bataille décisive qu'il cherche. Napoléon découvre réellement ce qu'est la « profondeur stratégique ».</p>
<p>Fouché l'avait prévenu pourtant, pointant le cauchemar logistique et la leçon infligée aux Suédois. Mais Napoléon veut une guerre courte, il ne veut pas s'éloigner trop longtemps de Paris, de sa femme, et de l'Espagne en guerre. Son armée colossale comprend des contingents de tous ses alliés et vassaux, son réseau d'espionnage et ses cartes sont prêts, des stocks ont été faits en Pologne et en Prusse orientale.</p>
<p>Ça ne suffira pas. Il y a tant de chevaux que le fourrage (et les fers à chevaux !) manquent vite, et les pauvres bêtes meurent comme des mouches dès le début, bien avant l'hiver. Les chevaux russes, en face, sont acclimatés et aussi nombreux.</p>
<p>La conquête de Vilnius est une promenade. Les Lituaniens accueillent la Grande Armée et ses alliés polonais avec joie. Napoléon ne mise pourtant pas à fond sur le patriotisme polono-lituanien, de peur de froisser l'allié (de façade) autrichien. Il ne jouera pas non plus la carte de la libération des serfs russes, une perspective qui terrifie la noblesse russe. Pendant ce temps, Alexandre fait la paix avec les Suédois et les Turcs, encourage la ferveur patriotique et religieuse de son peuple, mise sur la peur du Français. Les Polonais seront déçus et les moujiks ne se révolteront jamais. L'armée russe est malade de la corruption, manque souvent de fusils et d'uniformes, mais elle recrute en masse. Paradoxalement, la noblesse russe continue de parler français.</p>
<h2>Moscou</h2>
<p>La Grande Armée progresse moins vite que prévu. Les villes conquises sont vides (Vitebsk) ou détruites par les combats (Smolensk), sans réapprovisionnement possible. Entre les pertes des quelques batailles, les malades, la chaleur, quelques désertions, les garnisons laissées en arrière, les effectifs, homme et chevaux, ont déjà fondu de moitié à mi-chemin de Moscou !</p>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Campagne_de_Russie#/media/Fichier:Minard.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.Pertes_de_la_Grande_Armée_en_Russe_1812-1813-Charles_Minard-1869-via_Wikimedia_m.png" alt="Graphe par Charles Minard (1869) montrant les effectifs de la Grande Armée à l’aller et au retour de Moscou (via Wikimedia)" style="margin: 0 auto; display: table;" /></a></p>
<p>Dès juillet, Napoléon hésite à s'arrêter, du moins pour l'année, puis décide de rester fidèle à sa stratégie de foncer sans donner de répit à l'ennemi. Les généraux russes s'écharpent sur la stratégie. Finalement ils refusent toute grande bataille jusque Borodino, sur la Moskova, car il faut tout de même tenter de sauver Moscou. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_la_Moskova">Ce sera une boucherie sans nom</a> (73 000 morts ou blessés, dont beaucoup d'officiers).</p>
<p>Moscou sera abandonnée, ce qui consterne toute la Russie, puis incendiée par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/F%C3%A9dor_Rostopchine">Rostopchine</a> (officiellement : par les Français). La Grande Armée se retrouve à jouer les pillards dans une ville dévastée dont presque tous les habitants ont fui, et aux faubourgs pleins de partisans et de cosaques. Elle y perd sa réputation à cause du pillages et des exactions. La discipline disparaît.</p>
<h2>La déroute</h2>
<p>Le tsar refuse de négocier. L'armée de Koutouzov se renforce et commence à prendre l'initiative. Les communications françaises avec Paris deviennent compliquées. Napoléon hésite à continuer sur Saint-Pétersbourg. Au bout d'un mois, aux premières neiges, il décide du repli vers Smolensk. Le départ est précipité, des stocks abandonnés. L'armée n'a toujours pas de vêtements d'hiver. Elle est encombrée de chariots pleins du butin des pillages et de nombreux civils (dont de nombreux Français habitant à Moscou, ayant peur des représailles). La moitié des hommes est encore bonne condition, une autre moitié a déjà beaucoup souffert. Les régiments étrangers ne sont plus fiables. Le retour doit se faire par des zones sous contrôle, donc déjà dévastées. Les Russes commencent à attaquer à nouveau mais ne gagnent pas forcément. Le harcèlement au quotidien est plus efficace.</p>
<p>La faim frappe les Français dès le départ de Moscou. Il n'y a plus beaucoup de chevaux, et l'anthropophagie apparaît. Des 104 000 hommes ayant quitté Moscou, seuls 42 000 arrivent à Smolensk, et les stocks qui les attendent sont bien maigres, et mal distribués. Les revers militaires s'accumulent, l'armée russe menace de piéger les Français. En fait, Koutouzov préfère en rester au harcèlement : le gros de sa propre armée a du mal à suivre le rythme des fuyards, en partie car il faut éviter les zones deux fois dévastées, et le climat est cruel pour les Russes aussi.</p>
<p>Les prisonniers des Russes se compteront en centaines de milliers. Une bonne part mourra de manière plus ou moins cruelle, par les partisans, l'armée russe, les mauvais traitements, les marches, la faim. Certains pourront rentrer en France à la Restauration, certains iront même cultiver un bout de terre russe. En face, les Français ne feront pas grand-cas des cent mille prisonniers du début de la campagne. Ceux-ci n'étaient guère protégés : il y avait encore moins d'approvisionnements pour eux, et qui ne pouvait marcher était liquidé.</p>
<h2>La Bérézina</h2>
<p>Ce qui est resté comme l'expression d'une défaite retentissante est en fait une retraite réussie dans des conditions dantesques. Napoléon réussit à tromper les Russes sur son chemin exact, et les restes de la Grande Armée réussissent à passer par un gué sur deux ponts construits en un temps record. La Garde s'en sort encore, mais les Russes arrivent, et le sort est cruel pour les derniers, traînards et beaucoup de civils, tentant de traverser sous les feux d'artillerie.</p>
<p>Début décembre, le froid descend à -37°C. Les pertes sont terribles, y compris chez les Russes. Napoléon quitte son armée presque comme un voleur. Murat le remplace à la tête d'une bande où plus aucune discipline ne règne. L'arrivée à Vilnius devait être une délivrance, mais le typhus y règne, les Polonais prennent peur devant l'état de cette armée… et retournent parfois leur veste, car les Russes arrivent. Les Français fuient, laissant derrière eux des monceaux de cadavres qui ne seront parfois enterrés qu'au printemps. Le tsar arrive et préfère la magnanimité à la punition impitoyable de tous les collaborateurs.</p>
<p>Murat arrive vers Königsberg, en Prusse, censée être alliée, devenue hostile. Il faut continuer.</p>
<p>Dès janvier, le tsar entre aussi en Prusse. Commence la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Campagne_d%27Allemagne_(1813)">campagne d'Allemagne</a>, qui finira par la boucherie de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Leipzig_(1813)">Leipzig</a>, pour déboucher sur l'invasion de la France et la chute de l'Empire en 1814. Le tsar, à Paris, sera à la tête du nouveau système d'alliances des Empires qui redessineront la carte de l'Europe.</p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-effroyable-trag%C3%A9die-de-Marie-Pierre-Rey#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/869« Le monde d'hier » de Stefan Zweigurn:md5:f41a7b4cef6d81753e0a4bee446e679c2021-07-31T15:16:00+02:002023-03-13T10:52:49+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagneapocalypseautodestructionAutrichecataclysmecatastrophechaoscivilisationculturediscriminationdécadencedémocratiedéshumanisationguerregéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmulticulturalismemémoirenationalismeperspectivePremière Guerre MondialeracismeSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p><em>Und ich mußte immer an das Wort denken, das mir vor Jahren ein exilierter Russe gesagt: »Früher hatte der Mensch nur einen Körper und eine Seele. Heute braucht er noch einen Paß dazu, sonst wird er nicht wie ein Mensch behandelt.«</em></p>
<p>
Et je me souviens toujours de ce mot, que m'avait dit un exilé russe, des années auparavant : « Autrefois l'homme n'avait qu'un corps et une âme. Maintenant il lui faut encore un passeport, sinon il n'est pas traité comme un homme. »</p>
<p>
<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Stefan_Zweig" hreflang="fr" title="Stefan Zweig : page Wikipédia">Stefan Zweig</a></em>, Die Welt von Gestern. Erinnerungen eines Europäers</p></blockquote>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-vers_1912-via_Wikipedia.png" alt="Stefan Zweig vers 1912 (via_Wikipedia)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Stefan Zweig était de ces Européens d'avant l'heure, cosmopolites d'avant la Première Guerre Mondiale, voyageurs sans passeport, passeurs de la culture entre les pays et à travers les langues, et qui, hommes déjà mûrs, ont vu s'effondrer leur monde dans la haine, les mouvements de masse, les frontières, l'exil, la guerre. <em>Le monde d'hier</em> est le testament de Zweig, rédigé juste avant son suicide en 1942.</p> <p>Certes son « monde d'avant » était privilégié : la jeunesse dorée d'une capitale impériale, polyglotte, avide de littérature, de théâtre, de musique, d'art. S'il décrit la Vienne d'avant 1900 comme conservatrice et trop respectueuse de l'âge, il appréciait l'ambiance de son époque : la stabilité, le progrès en marche, l'amélioration progressive de la condition de tous, l'avenir sûr et radieux. Les grandes guerres du XIXè siècle étaient déjà loin, les sociétés évoluaient, dans un Empire presque millénaire.</p>
<p>Cette vitalité et cette confiance furent un piège (à ajouter au dossier de <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark">Sleepwalkers</a></em>) :</p>
<blockquote><p><em>Jeder Staat hatte plötzlich das Gefühl, stark zu sein und vergaß, daß der andere genauso empfand, jeder wollte noch mehr und jeder etwas von dem andern. Und das Schlimmste war, daß gerade jenes Gefühl uns betrog, das wir am meisten liebten: unser gemeinsamer Optimismus.</em></p>
<p>
Chaque État avait soudain le sentiment d'être fort, et oubliait que les autres se sentaient de même ; chacun en voulait encore plus, et chacun quelque chose de l'autre. Et le plus grave est que c'est justement ce sentiment que nous aimions le plus qui nous abusait : notre optimisme à tous.</p></blockquote>
<p>Effaré, Zweig voit tous ses amis happés par l'hystérie collective nationaliste.
Incapable de voyager loin, militairement « planqué », il collabore en Suisse à un collectif d'écrivains européens contre la guerre, conscients de parler dans le vide.</p>
<p>Il assiste aux derniers instants de l'Autriche impériale, en croisant l'Empereur Charles de Habsbourg en exil à la frontière suisse.
De Salzbourg, il assiste au chaos économique, au bouillonnement culturel et au complet renversement des valeurs de la nouvelle Autriche — le seul pays que l'on ait jamais forcé à être indépendant.</p>
<p>Les Années Folles se passent mieux (c'est au tour des Allemands de souffrir économiquement). Son succès littéraire déjà naissant avant guerre se renforce.</p>
<p>S'impose progressivement Hitler, que personne en Autriche ne voit venir. En Allemagne, son ami l'homme politique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walther_Rathenau" hreflang="fr" title="Walter Rathenau sur Wikipédia">Rathenau</a> est assassiné. Les chemises brunes sèment le chaos. L'ordre moral et légal, les bases de la société, que même la Première Guerre Mondiale avait à peu près préservées : tout cela s'envole. Sous l'unité de façade du pays face à la menace, Zweig sait que beaucoup, par peur ou prudence, sont déjà préparés à l'Anschluß.</p>
<p>Zweig est un des premiers à fuir, bien avant le rattachement au IIIè Reich. Pour en ajouter aux pertes matérielles (livres, collections) ou immatérielles (amis, famille), il est déchu de sa nationalité en 1938 : il se retrouve apatride. Ce qui semblait un rêve pour un citoyen du monde se transforme vite en cauchemar administratif.
En Autriche, sa vieille mère mourante n'a même plus le droit de se reposer sur un banc lors de ses promenades : interdit aux Juifs.</p>
<p>En Angleterre, impossible de convaincre ses interlocuteurs que la perte de l'Autriche entraînera la chute de toute l'Europe. Zweig assiste à l'euphorie à l'annonce des accords de Munich, et à la consternation rapide quand la population réalise que tout a été abandonné à Hitler. L'ambiance se plombe, la guerre s'annonce, certaine.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26.jpg" title="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26_m.jpg" alt="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p>Le livre est un document. Quelques petits travers énervent, comme le <em>name dropping</em> permanent : Sigmund Freud, Richard Strauss, Romain Rolland, Bernard Shaw, H. G. Wells, Walter Rathenau, Charles Ier… Certaines visions semblent un peu idylliques (le Paris d'avant-guerre !), en tout cas réservées aux gens des classes aisées ; mais c'est le propre de la nostalgie. Ce livre décrit certes un monde perdu et son auteur, mais sa famille est quasiment oubliée, et il est surprenant que les prénoms de ses deux femmes ne soient même pas cités.</p>
<p>Zweig n'a pas vu la guerre se retourner, ni la reconstruction de l'Europe. Il en aurait sans doute été un des rebâtisseurs. Notre époque, qui remet des frontières partout, fait la chasse aux migrants, et à nouveau en prise à la stupidité de masse, ne lui aurait pas plu. Et il n'aurait pu s'empêcher de retisser des parallèles avec la chute de l'Europe un siècle plus tôt.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/860« La chute du Japon » de William Craigurn:md5:1477cf6bde729463b434ee59a1c292032020-09-27T21:21:00+02:002020-09-27T21:21:00+02:00ChristopheHistoireabominationAmériqueapocalypseautodestructionbombe atomiquebon senscataclysmecatastrophechaosChinecivilisationdécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegigantismeGuerre FroidegéopolitiquehainehistoirehiérarchieimpérialismeLibérationmortnationalismeoh le beau cas !ouverture d’espritperspectiveracléescienceSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unis<p>Loin de l'histoire militaire pleine de bruits, il y a la petite grande histoire, celle qui se déroule dans des réunions feutrées, ou dans des consciences déchirées entre devoirs, intérêts, peurs et réalisme. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> C'est plutôt celle-là que William Craig choisit de décrire. En 1967, ce livre rapportait les souvenirs des survivants des dirigeants de l'Empire japonais pendant les jours les plus terribles de son histoire. Si quelques pages décrivent les événements militaires de la toute fin de la guerre ou s'étendent sur la mission qui a failli ne pas lâcher la deuxième bombe atomique sur Nagasaki, l'essentiel tourne autour des discussions, tergiversations et affrontements des divers dirigeants japonais.</p> <p>Les ministres, amiraux, officiers... sont évidemment nombreux, et l'Occidental moyen qui les découvre tous ensemble aura du mal à suivre. Heureusement, les photos aident un peu à mémoriser.</p>
<p>Le jeu se déroule essentiellement entre quelques membres du gouvernement, le conseil des anciens Premiers Ministres, et le Conseil suprême, donc beaucoup de militaires et quelques politiques : très peu de personnes au final. Leur poids est écrasant. On est à l'été 1945, Okinawa est tombé, les grandes villes sont rasées sous les bombes incendiaires, et même les plus fanatiques ne croient plus à la victoire. La seule discussion porte sur les termes d'un arrêt des hostilités. Notamment : le maintien de l'Empereur, la non-occupation du Japon, le refus de faire juger des criminels de guerre par l'extérieur.</p>
<p>Dans ce cadre, le dernier ultimatum allié, la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Potsdam_Declaration" hreflang="en">déclaration de Potsdam</a>, demandant une reddition sans conditions sous peine d'anéantissement, est inacceptable. L'espoir des jusqu'au-boutistes : une résistance opiniâtre et des pertes terribles amenant les Américains à plus de concessions. Les Japonais avaient d'ailleurs prévu correctement le plan d'invasion américain par le sud de l'archipel. (<em>On sait que les prévisions de pertes américaines pour l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Downfall" hreflang="fr">invasion de l'archipel</a> se chiffraient en millions. Cela n'effrayait apparemment pas les planificateurs du Pentagone.</em>). Un passage surréaliste : un maréchal revenant d'Hiroshima annonce que la bombe A n'est pas aussi destructrice, des abris souterrains pourraient résister.</p>
<p>Mais d'autres facteurs pèsent : d'abord, les bombes atomiques.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia.png" title="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia_m.png" alt="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Craig consacre beaucoup de pages à décrire le lancement du projet, l'entraînement des pilotes pour cette délicate mission, le choix des cibles... Étonnamment, il passe vite sur Hiroshima (6 août), dont l'attaque se déroule comme à l'exercice, pour se concentrer sur Nagasaki (9 août). Contrairement aux bombes A précédentes à l'uranium, il s'agit là d'une bombe au plutonium, donc non encore testée. La mission fut un cauchemar : problème de carburant dès le départ ; difficulté de rendez-vous avec les avions d'observation ; conditions mauvaises au-dessus de la cible, Kokura ; changement d'objectif ; carburant trop limité pour un deuxième passage et mauvaises conditions, toujours. Il fallait que le bombe tombe juste pour avoir un impact majeur. Mais il y eut une trouée, et Nagasaki disparut. Le bombardier se posa de justesse à Okinawa. La description du sort des habitants de Nagasaki dans les jours suivants est dantesque. Certains victimes étaient des soldats alliés prisonniers. D'autres bombes atomiques étaient en cours d'assemblage.</p>
<p>Depuis plusieurs mois, des vagues de B-29, basés près du Japon, tapissent de bombes les villes japonaises. Même sans bombe atomique, l'industrie japonaise est déjà en train de disparaître. La société, dans des villes rasées où tout manque, se délite.</p>
<p>Les tentatives d'ouverture de divers diplomates dans plusieurs chancelleries pour entamer des négociations de paix échouent pathétiquement. Il est effarant de voir à quel point les deux belligérants possèdent peu de moyens pour communiquer l'un avec l'autre, et combien sont rares les gens bilingues. La déclaration de Potsdam, discutée en interne, reste d'abord sans réponse — ce qui est interprété comme un rejet par les Américains.</p>
<p>Le coup de bambou est sans doute soviétique : les Japonais comptaient sur la neutralité de Staline, voire son intermédiation. Mais celui-ci tient la promesse faite à Roosevelt : l'URSS envahit la Mandchourie au moment où tombe la bombe de Nagasaki, et en un temps record.</p>
<p>Le 10 août, après d'âpres discussions dans un abri antiaérien sous le palais impérial, aucun consensus entre les dirigeants n'est obtenu. Le vieux Premier ministre <a href="ttps://fr.wikipedia.org/wiki/Kantar%C5%8D_Suzuki">Suzuki</a> pousse, contre toute tradition, l'Empereur à intervenir. Hirohito tranche et décide d'accepter la déclaration de Postsdam. Les irréductibles ne peuvent s'y opposer, mais sauvent la face, puisqu'il faut obéir à l'Empereur.</p>
<p>Les Alliés sont contactés via la Suisse et la Suède. L'acceptation par le Japon ajoute la réserve que les prérogatives du souverain régnant seront préservées. Truman et ses conseillers discutent de cette entorse à la « capitulation sans conditions » exigées. Le pragmatisme l'emporte : l'Empereur sera un moyen de faire pression sur les derniers extrémistes dispersés dans les possessions japonaises ; il faut tenter de libérer les prisonniers de guerre le plus vite possible ; plus la guerre durerait, plus l'influence soviétique grandirait. Il faut aussi consulter les Alliés. Les Soviétiques tentent en vain un bluff pour avoir une part du commandement du Japon occupé.</p>
<p>La réponse américaine annonce que toute l'administration japonaise sera subordonnée au commandant suprême allié pour mettre en œuvre les conditions de la capitulation, que le peuple japonais choisira lui-même la forme de son futur gouvernement, et que le Japon sera occupé jusque là. Ce la ne calme pas les partisans de la guerre à outrance, surtout que les Russes et les Chinois veulent explicitement la tête de l'Empereur. Faut-il accepter cette note ? Là encore, il faut que Hirohito tranche à nouveau, le 14 août, pour que l'acceptation soit envoyée aux Américains.</p>
<p>Pendant ces quelques jours, la situation reste floue. Nagasaki brûle toujours. Les extrémistes continuent de lancer aux troupes des appels à la résistance à la radio. Les Japonais annoncent la fin de leurs offensives. Les Américains suspendent leurs bombardements dès le 10 août, se contentant de lâcher des tracts. Le temps passant, quelques bombardiers repartent à l'attaque juste avant le cessez-le-feu définitif.</p>
<p>Au-dessus des responsables japonais planent depuis des décennies les menaces de coup d'État militaire et d'assassinat par des officiers fanatiques. (Ce fut le cas, entre autres, lors de l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Invasion_japonaise_de_la_Mandchourie" hreflang="fr">invasion de la Mandchourie en 1931</a>). À ce moment encore, certains généraux sont ouvertement poussés au putsch par leurs officiers. Ce n'est pas une révolte contre l'Empereur, celui-ci est juste est mal conseillé. Les extrémistes voient notamment le général <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Korechika_Anami" hreflang="fr">Anami</a>, hostile à une capitulation sans conditions, mener un coup d'État. Mais Anamu se plie à la décision finale d'Hirohito, refuse de se révolter, et se suicide comme tant d'autres. Plusieurs autres renoncent, parce qu'ils savent que le coup d'État est voué à l'échec. Le cas de l'ancien Premier Ministre <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hiranuma_Kiichir%C5%8D" hreflang="en">Hiranuma</a> surprend : partisan de la paix, il change d'avis quand il voit que la personne de l'Empereur n'est pas garantie.</p>
<p>Les derniers extrémistes ne se suicident pas tous. Un dernier groupe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_Ky%C5%ABj%C5%8D">va jusqu'au bout</a> et, le 14 août, attaque le Palais impérial. Le disque où Hirohito a enregistré son adresse au peuple n'est pas retrouvé. Le Premier ministre Suzuki manque d'être assassiné. L'essentiel de l'armée ne suit pas. Le putsch échoue, les derniers insurgés se suicident. Le discours d'Hirohito est diffusé le 15 août. Certains Japonais ont du mal à comprendre le message, puis à y croire.</p>
<p>La capitulation se diffuse difficilement. Les combats continuent quelques jours aux Philippines. Quand elle parvient, les réactions sont parfois violentes. Des prisonniers de guerre sont exécutés. Des kamikazes décollent, dont plus personne n'entend parler. Par la suite, il faut encore calmer quelques excités.</p>
<p>Suivent les détails techniques, parfois triviaux, comme l'échange de fréquences radio pour communiquer. Les Japonais envoient les ordres d'arrêt des hostilités à toutes leur troupes, demandent des sauf-conduits pour les officiers et membres de la famille impérial envoyés les confirmer. MacArthur demande l'envoi à Manille d'officiers pour planifier l'occupation. Au moins le transfert d'autorité devait-il se faire dans l'ordre : la mission japonaise s'envole dans le secret et la peur des kamikazes, et arrive le 20 août. L'ambiance, d'abord lourde, se détend un peu. La délégation japonaise apprend le plan américain, qui prévoit des débarquements dès les jours suivants (!). Elle réclame du temps pour mettre au pas les derniers fanatiques, nombreux dans les bases aériennes... et obtient le retrait d'un tableau prévoyant un nombre de femmes de chambres au service d'officiers supérieur ! Au retour, l'avion de la délégation doit amerrir !</p>
<p>Entre les chapitres s'intercalent des passages sur les opérations en vue de la libération des prisonniers. Craignant à juste titre des représailles sur les prisonniers de la part de Japonais désespérés, certains commandos américains, parachutistes et OSS, se positionnent en urgence, prêts à bondir vers les camps de prisonniers à l'annonce de l'arrêt des hostilités. Des difficultés avec les militants communistes sont prévues, et il y a des accrochages : la guerre civile va reprendre en Chine. À ces endroits, les premiers contacts entre Américains et Japonais après l'annonce de la capitulation sont très tendus, mais globalement la libération des prisonniers se déroule sans trop de problèmes.</p>
<p>Très tendu aussi le premier débarquement de soldats américains au Japon, le 28 août, sur une base aérienne auparavant dédiée aux envols des kamikazes. Les Américains arrivent plus tôt que prévu, même retardés de deux jours par la météo. Si l'ambiance reste fraîche, tout se déroule cependant avec un minimum de bonne volonté réciproque, et la première base américaine commence à voir déferler des milliers de soldats vainqueurs, dont MacArthur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia.jpg" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia_s.jpg" alt="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" /></a>La brève cérémonie signature officielle de la capitulation, en présence de tous les représentants galonnés des nations vainqueurs, n'a lieu sur le <em><a href="https://en.wikipedia.org/wiki/USS_Missouri_(BB-63)" hreflang="en">Missouri</a></em> que le 2 septembre. Le choix du bateau tient dans la rivalité MacArthur/Nimitz, ou plutôt Army/Navy : MacArthur étant signataire, le lieu doit être un navire, et est disponible celui du nom de l'État de Truman. Les Américains débarquent alors à Tokyo, et les emprisonnements de responsables suspects de crimes commencent. Au fur et à mesure que les nouveaux maîtres s'installent, les principaux problèmes sont plutôt des chocs culturels, ou des problèmes de disciplines récurrents dans une armée d'occupation, que les deux camps veulent éviter au maximum.</p>
<p>Le livre raconte aussi l'histoire de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Marcus_McDilda" hreflang="en">Marcus McDilda</a>, pilote de chasse prisonnier : aux Japonais qui croient qu'il savait des choses sur la bombe atomique, il donne une théorie et des chiffres fantaisistes — qui ont peut-être fait peur en haut lieu. Et celle du major <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Mayhew_Wainwright_IV" hreflang="fr">Wainwright</a>, ancien second de MacArthur, prisonnier depuis la prise de Manille en 1942, et retrouvé à temps pour être présent, squelettique, à la signature de la capitulation. Ou du drame de l'Indianapolis, coulé après avoir livré la bombe A, dont l'équipage naufragé est décimé par les requins <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><em>Une question que je me pose : Craig s'est basé sur les souvenirs des dignitaires japonais survivants et des témoins, mais pas de l'Empereur. Celui-ci apparaît de manière très furtive. Son rôle dans le fonctionnement de l'Empire japonais est totalement minimisé. Cela colle avec la théorie plus ou moins officielle, après guerre, d'un Empereur traditionnellement sans rôle politique, impuissant face à la caste militaire toute-puissante, théorie <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hirohito#Question_de_la_responsabilit%C3%A9_personnelle_de_l'empereur">remise en cause depuis</a>. On l'a vu, les généraux en faisaient à leur tête ; mais Hirohito se serait laissé pour le moins laissé convaincre, et aurait approuvé la politique d'agression japonaise. Vue la manière extrêmement cérémoniale dont Hirohito communiquait avec ses ministres, on se demande même quelle pouvait être sa vision du monde.</em></p>
<p>Titre original : <em>The Fall of Japan</em></p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Le récit d'un survivant est une des pires scènes des </em>Dents de la me'r' de Spielberg.''</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/858« Comment l'Empire romain s'est effondré » de Kyle Harper : climat, maladie et chute de Romeurn:md5:4f899faacaf05ab1676fc0a7561ba6062020-02-08T19:36:00+01:002020-12-06T22:46:13+01:00ChristopheHistoireadministrationAntiquitéapocalypseargentauto-organisationByzancecataclysmecatastrophechaoschristianismecivilisationclimatcommunicationdommagedysfonctionnementdécadencedémographiedéterminismeeauEmpire romainFrancsGrandes InvasionsgéographiegéologiegéopolitiquehistoireimpérialismeIndemortMoyen ÂgemulticulturalismeMérovingiensnatureorganisationperspectivepessimismereligionsociétés primitivestempsuchronievolcansécologieéconomie<p>Les causes et le processus de la chute de Rome font débat depuis des siècles, et les théories ne manquent pas. Le livre de Kyle Harper s'étend de l'apogée de l'Empire (milieu du IIè siècle sous <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Marc_Aur%C3%A8le" hreflang="fr" title="Marc Aurèle">Marc Aurèle</a>) à l'effondrement des Byzantins devant l'Islam conquérant. Kyle Harper, se fondant sur les recherches pluridisciplinaires de ces dernières années, insiste sur deux facteurs qui n'expliquent peut-être pas tout, mais beaucoup de choses : le climat, et les maladies. Finalement, on s'étonne que cet Empire ait tenu aussi longtemps.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Kyle_Harper_Comment_l_Empire_romain_s_est_effondre.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Kyle_Harper_Comment_l_Empire_romain_s_est_effondre_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>(<em>Comme d'habitude, les commentaires personnels sont en italique</em> ; le reste est prise de notes de ce dont je veux me souvenir.)</p>
<p>Kyle Harper est professeur à l'université d'Oklahoma. Le titre original <em><a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691166834/the-fate-of-rome" hreflang="en">The Fate of Rome</a></em> contredit un peu le propos, qui est, justement, que l'Empire romain a remarquablement tenu pendant le demi-millénaire couvert par le livre, malgré une suite de catastrophes sanitaires et la dégradation du climat,. La chute de Rome n'a rien eu d'un phénomène régulier. Après les pertes effroyables de la Peste antonine sous Marc Aurèle, la démographie et le commerce se rétablirent. Après la Peste de Cyprien, l'Empire fut envahi et sombra dans le chaos pendant une génération (crise du IIIè siècle), mais les Empereurs-soldats danubiens reprirent les choses en main, et tout semblait aller pour le mieux quand déferlèrent les Huns. Une fois l'Empire d'Occident dépecé, celui d'Orient partit à la reconquête, mais son élan fut brisé par l'apparition de la Peste, dont il ne se releva pas, facilitant la conquête arabe. Le reste ne fut qu'une agonie s'étalant sur des siècles, avec quelques hauts et beaucoup de bas (voir tous les détails dans d'anciens billets sur l'Empire byzantin : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/25/11-byzance-i-formation-invasions">formation</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/26/19-byzance-ii-de-l-apogee-justinienne-a-la-castastrophe">apogée justinienne & catastrophe</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/27/21-byzance-iii-nouveau-redressement-et-agonie">nouveau redressement & agonie</a>).</p> <p>L'Empire qu'Auguste avait fondé devait compter de l'ordre de 70-75 millions d'habitants sous Marc Aurèle. Évidemment, tout ce qui ressort de la démographie de cette époque ne peut être qu'évalué indirectement : les sources précises ne sont généralement que locale, et si Rome comptait 1 million d'âmes et n'était pas la seule métropole, l'essentiel de la population restait paysanne. La paix, une certaine stabilité grâce à l'assimilation des élites locales, des routes commerciales sûres, le fameux génie civil romain, évitaient les famines généralisée. L'approvisionnement restait bon : Rome ne s'écroula pas sous la surpopulation. Par contre, l'hygiène était ignorée, et les habitants des villes devaient être victimes en permanence de maladies contagieuses, notamment oro-fécales, du paludisme... Le poids du bouillon de culture permanent se lit dans les squelettes, plus petits qu'avant et après l'Empire. En conséquence, mortalité infantile élevée et espérance de vie faibles ne pouvaient être compensés que par une natalité élevée.</p>
<p>Quoiqu'il en soit, cette population crût globalement pendant les deux premiers siècles après l’avènement d'Auguste, profitant d'un optimum climatique et de conditions plus favorables qu'actuellement. En conséquence, l'armée ne manquait pas de recrues, et les impôts permettaient de la payer : les frontières étaient tenues.</p>
<p>Des villes surpeuplées, un bouillon de culture permanent, des communications pas très rapides mais internationales, des armées en déplacement : c'est un environnement idéal pour une maladie infectieuse. En 165, au sortir d'une guerre victorieuse contre la Perse, apparut la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_antonine" hreflang="fr">Peste antonine</a>, qui ravagea l'Empire depuis le Moyen Orient jusqu'à la Gaule. En suivant le témoignage de Galien, entre autres, Harper finit par l'associer à la variole, apparemment inconnue des médecins romains. (Une leçon au passage : si la vaccination a éradiqué la variole il y a peu, des réservoirs animaux de virus voisins existent toujours…) Pour Harper, les virus antiques n'étaient pas que ceux que l'humanité connaissait depuis le Néolithique ou avant, et notre époque n'a pas l'exclusivité des maladies émergentes : la nature n'arrête pas de nous jouer des tours.</p>
<p>Les pertes, peut-être 20 % de la population, effacèrent les gains démographiques depuis Auguste, mais la civilisation tint bon, les structures étatiques et commerciales subsistèrent, les frontière tinrent. Une conséquence fut le regain de religiosité, au profit du culte d'Apollon le guérisseur : même habitués aux épidémies, les Romains restèrent frappés par celle-ci.</p>
<p>L'Empire continua tant bien que mal, intégrant de plus en plus les élites des populations périphériques à son fonctionnement. Caracalla fit de tous les hommes libres de l'Empire des citoyens. Malgré les virus, la population effaça peu à peu les pertes. Mais, variabilité solaire aidant, l'optimum climatique méditerranéen, son humidité atypique, ses événements El Niño rares, était passés, le climat était plus sec. Il semble que les crues du Nil aient été moins hautes.</p>
<p>La « Peste de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cyprien_de_Carthage" hreflang="fr">Cyprien</a> » frappa de 249 à 262, juste après la célébration du millénaire de Rome. Il est difficile de savoir quelle était précisément l'agent. Harper penche pour un filovirus, du genre d'Ebola. Les conséquences furent funestes pour l'Empire : l'effondrement démographique et commercial, puis bancaire et fiscal rendit l'armée impuissante face à des attaques simultanées sur toutes les frontières. Les Perses occupèrent la Syrie, les Goths passèrent le Danube et descendirent en Grèce, Francs et Alamans se répandirent en Gaule, même l'Italie fut touchée. Des provinces firent sécession (Palmyre avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Septimia_Bathzabbai_Z%C3%A9nobie" hreflang="fr">Zénobie</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Empire_des_Gaules" hreflang="fr">Empire des Gaules</a>), et les Empereurs connaissaient tous une mort violente : la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_du_troisi%C3%A8me_si%C3%A8cle" hreflang="fr">crise du IIIè siècle</a> dura 20 ans.</p>
<p>L'Empereur Aurélien redressa la situation et réunifia l'Empire. Comme bien d'autres après lui (jusqu'à Justinien) il provenait des zones frontières très militarisée du Danube. Les modifications structurelles furent nombreuses : élites sénatoriales écartées du pouvoir militaire, prédominance du rôle de l'armée (avec le besoin impérieux de la solder), villes de l'intérieur à nouveau fortifiées et plus petites qu'auparavant, recrutement militaire plus difficile, peuples barbares fédérés pour garder les frontières à la place de soldats trop rares, dont une partie accédera aux plus hautes places dans l'Empire.</p>
<p>Les religions antiques, faillies, ne se relevèrent pas de l'épidémie, elles furent supplantées par de nouvelles. Aurélien adorait le Sol Invictus, et les Chrétiens sortirent de la marginalité — à la grande horreur de ceux qui les accusaient d'être responsables des catastrophes en refusant de sacrifier aux dieux ; d'ailleurs, en prônant la compassion, et donc les soins aux malades, la maladie les frappaient moins violemment...</p>
<p>L'Empire survécut donc une fois encore, et l'Antiquité tardive commença. Le climat du IVè siècle entrait dans un cycle assez favorable mais inconstant, et la récupération dépendit beaucoup des provinces. La population continuait de subir les épidémies habituelles autant, sinon plus, que dans les siècles précédents. Par exemple, le climat instable et les disettes entraînaient un exode vers les villes, bouillon de culture fatal à bien des nouveaux arrivants.
Mais on ne relève pas de pandémie.</p>
<p>Pendant les années 300, la civilisation romaine subit d'innombrables transformations, de la christianisation à la centralisation, et à l'amorce de la séparation en deux ensembles distincts. Rome n'était plus depuis longtemps la résidence du pouvoir, l'Empereur étant souvent aux frontières, comme à Trèves. En conséquence, Constantinople était situé parfaitement entre les deux principales menaces, sur le Danube et sur l'Euphrate.</p>
<p>Selon le scénario d'Harper, les évolutions climatiques continuèrent de créer de nouvelles menaces pour Rome. La première, l'assèchement des steppes asiatiques, provoqua la migration des Huns (véritables réfugiés climatiques !) et par ricochet le déplacement des Ostrogoths, puis Wisigoths, peuple fédéré qui demanda l'asile à Constantinople. Accueillir en-deça du Danube un peuple qui guerroierait pour lui semblait d'abord une aubaine pour l'Empire, mais l'incompétence romaine mena à leur révolte, une guerre ouverte, et la pire défaite romaine depuis Hannibal à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_d%27Andrinople_(378)" hreflang="fr">Andrinople en 378</a>. Leur soumission par Théodose ne fut que partielle.</p>
<p>Ce ne fut que le premier coup de boutoir. L'armée de l'Antiquité tardive n'était plus celle des siècles précédents, faute de volontaires, pas seulement pour des raisons démographiques. Elle comptait pourtant un demi-million d'hommes qui auraient dû tenir le choc — si Orient et Occident était arrivés à s'entendre. Les Wisigoths déjà installés se rebellèrent ; d'autres arrivèrent de l'extérieur, notamment lors de la fameuse traversée du Rhin en 406. Il ne s'agissait pas de raids mais de migration de peuples sous la pression des Huns. Quand en 410 les Goths d'Alaric firent le siège de Rome pour rançonner l'Empire, puis pillèrent la ville, un symbole tomba. Incapable de conserver sa coordination avec l'invasion ou la sécession de ses provinces, l'Empire d'Occident ne put reprendre la main ni se défendre dans les années suivantes contre les attaques des Huns d'Attila. L'Empire d'Orient dut y faire face également dans les Balkans. Ironiquement, les maladies locales qui avaient tué tant de Romains brisèrent parfois l'élan d'envahisseurs peu protégés contre le paludisme ou les bouillons de culture des villes.</p>
<p>L'Empire d'Occident n'était plus (officiellement en 476), chose facile à tracer dans les constructions de <em>villae</em>, la disparition des flux commerciaux ou l'effondrement de la population des villes. En ville, la saisonnalité des décès change : autrefois, nombre d'adultes, immigrés de fraîche date, tombaient en masse l'été, victimes des virus locaux ; ceux-ci semble disparaître. Économiquement, une entité surnage : l'Église.</p>
<p>L'Empire d'Orient, lui, était sorti à peu près intact de l'épreuve, encore politiquement stable, riche de son commerce, de ses métropoles Constantinople, Alexandrie, Antioche... À partir de 527, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Justinien" hreflang="fr">Justinien</a>, Empereur énergique, entama de grandes réformes, bâtit beaucoup, fit la paix avec la Perse, lança ses troupes à la reconquête de l'Afrique puis de l'Espagne, de l'Italie. Tout semblait alors lui sourire, quand la nature frappa.</p>
<p>Alors qu'après 450 avait commencé un « petit âge glaciaire de l'Antiquité tardive » (jusque 700), en 535 commença une série d'éruptions volcaniques (en 2005, j'avais rapporté ici un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/11/03/23-le-krakatoa-et-l-histoire-du-monde" hreflang="fr">documentaire accusant le Krakatoa des malheurs des Byzantins</a>). Partout 536 fut l'« année sans été », et les décennies 530 et 540 furent les années les plus froides depuis des siècles.</p>
<p>Pendant le IIIè siècle le commerce avait allègrement repris, ainsi que le crédit bancaire, permettant des échanges lointains, jusqu'en Inde et en Orient : j'ai appris que la Route de la Soie (et du poivre) passait aussi par la Mer Rouge et l'Océan Indien. Constantinople en profitait encore sous Justinien. Le cataclysme suivant provint probablement de là : en 541, Péluse, en Égypte, est la première ville touchée par la peste.</p>
<p>L'ADN a montré que la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Peste_de_Justinien" hreflang="fr">Peste justinienne</a> de 541-543 a été provoquée par le bacille <em>Yersinia pestis</em>. Il allait saper la démographie de l'Europe pour deux siècles, avant de revenir frapper à la fin du Moyen Âge (Peste noire du XIVè siècle), et régulièrement jusqu'au XIXè siècle. La bactérie parasite des puces, elles-mêmes parasites de rongeurs, et en premier lieu les rats noirs. L'Empire romain était pour eux un pays de cocagne : des villes et des réserves de grains partout pour soutenir une natalité galopante, de nombreuses voies de communications sur terre et mer pour se répandre partout. Certes, le virus et les puces ne s'attaquent que faute de mieux aux humains (et à d'autres espèces qui ont pu servir de vecteur) ; mais une fois les rats eux-mêmes décimés, la promiscuité de l'époque favorisait la transmission des puces et des virus. Pourtant, le rat noir était bien connu des Romains. Mais le climat du VIè siècle plus froid a pu favoriser la végétation, l'explosion des populations de rongeur, favoriser la diffusion du virus.</p>
<p>Si la peste avait déjà frappé localement dans la passé dans des variantes moins virulentes, la peste de Justinien valait bien la Peste noire. De plus la population romaine était affaiblie par les problèmes climatiques et son lot de virus habituel. Résultat : un taux de mortalité de 80 % et la disparition de peut-être 50 % de la population. La peste dépeupla Constantinople et Alexandrie, frappa jusqu'en Bretagne et en Bavière, épargna sans doute plus les zones désertiques (Maures, Arabie...) et les nomades. Faute de bras, on ne récolte plus, la famine s'installe. Suite à la dépopulation, le cours du blé s'effondre et le système bancaire aussi, puis les finances de l'Empire.</p>
<p>Justinien se maintint mais l'élan était brisé. La Peste revint régulièrement dans les décennies suivantes dans toute la Méditerranée, jusqu'après la conquête arabe, à chaque fois violemment, profitant des flux commerciaux. Partout l'archéologie indique une population en décroissance et une économie anémiée sur le long terme. Une bonne crue du Nil provoqua des inondations dans le delta, faute de bras en amont pour gérer l'irrigation. Justinien ne put qu'à grand peine contenir les Avars (eux-mêmes réfugiés climatiques selon le documentaire susnommé ?). Tout autour de la Méditerranée l'économie des divers États périclitait et la population des villes descendit à des niveaux ridicules. En Italie, le royaume ostrogoth reprenait la route de la prospérité, mais l'attaque des Byzantins et la peste entraînèrent l'effondrement des restes de la civilisation romaine. Les nouveaux États qui se formeraient, comme l'Empire franc, seraient plus continentaux.</p>
<p>Les années suivantes, l'Empire romain d'Orient épuisé, toujours à la recherche d'argent et de soldats, dut poursuivre sa guerre inexpiable contre les Perses, et perdit du terrain dans les Balkans et en Italie.</p>
<p>Le coup de bambou final fut religieux. Comme pour les crises précédentes, la crise climatique, la peste, l'effondrement de la civilisation, provoquèrent une poussée de croyances apocalyptiques. Le pape Grégoire le Grand pensait la fin du monde proche. Les Chrétiens n'étaient pas les seuls touchés, au contraire, et le thème est majeur dans l'Islam, apparu au VIIè siècle. Les Arabes profitèrent de la guerre qui épuisait les Perses et les Byzantins pour s'attaquer aux deux, et en peu d'années les Romains perdirent Égypte et Orient, ne sauvant leur capitale que de justesse.</p>
<p>Kyle Harper arrête là son histoire. L'Empire romain d'Orient, réduit à un bout de Grèce, romain uniquement que de nom à présent, ne disparut formellement qu'en 1453. Il eut entretemps quelques belles années (par exemple <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/10/27/21-byzance-iii-nouveau-redressement-et-agonie">vers l'an 1000</a>). Peut-être aurait-il pu survivre jusqu'à nous sous une forme ou une autre.</p>
<p>Sur le fond, rigoureusement, je ne suis pas qualifié pour juger de la pertinence. Il y a eu de nombreuses théories sur la fin de l'Empire romain, celle-ci a le mérite de s'appuyer sur les dernières recherches scientifiques en démographie antique, climatologie, biologie... Je trouve parfaitement plausible qu'une civilisation urbaine, ignorante des règles de base de l'hygiène, paie un tribu effroyable aux maladies. Basée sur l'agriculture, elle était forcément soumise aux caprices du ciel, lequel s'est détérioré pendant cette période. Et de tout temps, faute de rentrées fiscales, les limites de l'organisation d'un État apparaissent de manière fragrante, et il peut difficilement contenir le chaos social ou les agressions extérieures. L'impact du climat a joué un rôle dans la Révolution française, peut-être en Syrie récemment.</p>
<p>Il n'y a pas de déterminisme là-dedans. L'Empire a réagi différemment à trois épidémies massives en quatre siècles, et Harper montre bien ce qui a résisté et les évolutions sociales en conséquence. Au bout d'un certain temps, épidémies, climat, menaces extérieures et problèmes intérieurs se conjuguent, « les étoiles s'alignent », les problèmes s'accumulent jusqu'à la rupture — mais changer un des facteurs aurait pu modifier la donne.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-Comment-l-Empire-romain-s-est-effondr%C3%A9-%C2%BB-de-Kyle-Harper-%3A-climat%2C-maladie-et-chute-de-Rome#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/856«Red Inferno: 1945» de Robert Conroyurn:md5:6718b6cc69c4749960820df689367c222019-08-16T18:36:00+02:002023-08-26T18:54:21+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesapocalypsebombe atomiquecataclysmecatastrophechaoscivilisationcommunismecoup basEmpire soviétiqueespionnageEuropegigantismeguerreGuerre FroidegéopolitiquehaineimpérialismeLibérationracléeRussieSeconde Guerre MondialetotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Red_Inferno_1945.jpg" title="Red Inferno: 1945, de Robert Conroy"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Red_Inferno_1945.jpg" alt="Red Inferno: 1945, de Robert Conroy" class="media-left" /></a> Une uchronie qui aurait pu être excellente : et si, en mai 1945, Truman avait voulu marquer son territoire face à Staline, et que celui-ci avait surréagi ? L’Armée Rouge déferle alors sur l'ouest de l’Allemagne direction Anvers, et la Troisième Guerre Mondiale prend une toute autre tournure. <em>Red Inferno: 1945</em> se lit sans déplaisir mais il aurait mérité bien des pages supplémentaires.</p> <p>Le point de divergence est crédible. Dans la réalité, les Soviétiques se sont arrêtés à Berlin. Il y avait bien assez à digérer en Europe de l’Est pour une Armée Rouge épuisée. Mais les Américains n’ont même pas essayé de faire la course à la capitale allemande. (Si les Nazis avaient été rationnels, ils auraient mis les pouces après la perte de la Ruhr.)</p>
<p>Staline, grand paranoïaque, aurait pu vouloir prévenir une trahison des Anglo-Saxons, et attaquer. Une raison supplémentaire était la bombe atomique dont il connaissait l’existence : il fallait frapper <em>avant</em> qu’elle soit fonctionnelle.</p>
<p>Quelques unités américaines, mêlées à des civils allemands ou autres, se retrouvent donc assiégées à Potsdam, près de Berlin, pendant que le gros des armées alliées recule en bon ordre, posément, jusqu’au Rhin. Dans cette enclave, la romance entre un sergent et une Allemande est le fil rouge du livre.</p>
<p>Aux États-Unis, autre romance entre deux fonctionnaires, un universitaire antithèse d’Indiana Jones, qui va se retrouver vite près des hautes sphères, et une Russe blanche. Le côté fleur bleu est trop vite mené, et le suspens lié au risque d'espionnage vite éventé.</p>
<p>Si les histoires de nombreux autres personnages alimentent l’intrigue, ce sont presque tous des militaires, du simple tankiste ou pilote à Ike ou Staline. Ne sont que très furtivement évoqués le cauchemar vécu par les civils ou le sort des millions de prisonniers et déportés de tous bords, perdus dans une Allemagne encore plus chaotique que celle que nous avons connue, ou encore les interrogations des civils, comme les dilemmes des communistes parmi les Alliés... La mécanique militaire et les scènes de combat semblent cohérentes à mes yeux de béotien nourri à <em>Guerres & Histoire</em>, même si on doit pouvoir pinailler sur tel ou tel détail<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Les discussions entre haut gradés sont un peu trop didactiques, mais il en faut bien. Les Soviétiques sont caricaturaux (il n’y en a pas un pour racheter l’autre, de Staline aux tankistes), même si l’ambiance à cette époque <em>était</em> caricaturale. Les personnages n’ont guère le temps d’évoluer.</p>
<p>Sur un thème pareil (une Guerre Mondiale, plusieurs continents), il aurait fallu de nombreuses autres pages sur la masse de conséquences périphériques que la nouvelle situation entraîne. Notamment : l’armée allemande existait encore en 1945, et la manière dont elle aurait pu jouer un rôle n’est traitée que trop vite, du côté américain. Bref, les Allemands sont sous-utilisés et l’on ne rencontre que les plus « respectables », pas les SS (il auraient pu faire chanter les Alliés, par exemple, avec d’effroyables conséquences). Les Japonais n’ont droit qu’à quelques lignes. Les communistes en France, Angleterre, Italie... et les remous sociaux associés ne sont que trop vite traités (à mon avis, en France, on aurait dérivé vers la guerre civile), mais la logistique américaine en aurait massivement souffert. Les pays périphériques sont oubliés. Quant aux membres du projet Manhattan, quel aurait été l’impact de cette guerre sur leur motivation ? Qu’auraient pensé les espions soviétiques les plus idéalistes ?</p>
<p>On voit venir le dénouement à des kilomètres, tellement évident que Staline a effectivement dû le deviner dans la réalité. Les conséquences (titanesques, qui auraient été très ouvertes) sont trop vite évacuées.</p>
<p>Bref, j’ai eu l’impression de lire une version <em>vintage</em> de <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Temp%C3%AAte_rouge">Red Storm Rising</a></em> de Tom Clancy, qui décrivait une attaque soviétique en 1986, de manière trop militaire aussi, et où tout s’enchaînait de façon <em>trop</em> logique. Les guerres actuelles sont certes aussi implacables que des rouleaux compresseurs, mais elles ne se déroulent jamais comme prévu sur les plans.</p>
<p>Cela dit, c’est une uchronie agréable, bien construite, sans temps mort.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Toutes les critiques en lignes relèvent l’attaque de l’URSS en 1940 et non 1941, une erreur de base. Mais après tout le point de divergence réel aurait pu être antérieur à1945...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%ABRed-Inferno%3A-1945%C2%BB-de-Robert-Conroy#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/854Francis Carsacurn:md5:a1a4641b796f8db94b9580b910c9c2502018-09-14T18:30:00+02:002021-08-12T10:10:17+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesanthropomorphismeapocalypsecataclysmecatastrophecivilisationcolonisationcommunicationconquête spatialedéshumanisationextraterrestresimpérialismelivres lusmulticulturalismenationalismeracismesciencescience-fictionsociétés primitivesspace opera<p>Il y a 13 ans, dans un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/./lectures/liste_livres_lus.html">autre recoin de ce coin de web</a>, j'écrivais à propos de <em>Ce monde est nôtre</em> :</p>
<blockquote><p>C’est un vieux classique par un vieux routard de la SF française des années 60, et la suite de <em>Ceux de nulle part</em>, que j’ai apprécié en tant qu’ado. Ici revient l’intrigue assez classique d’un explorateur d’une civilisation intergalactique plongé dans une guerre sur une planète médiévale. Pas trop mal mené, mais les thèmes et surtout le style ont mal encaissé les années.</p></blockquote>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_1.jpg" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_1_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" /></a> Adolescent, j'aimais bien les trois Carsac que j'avais lu, notamment dans un recueil du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Club_du_livre_d%27anticipation">Club du Livre d'Anticipation</a> de mon père, entre les <em>Robots</em> d'Asimov et <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/13/291-l-empire-de-l-atome-et-le-sorcier-de-linn-d-ae-van-vogt">l'Empire de l'Atome</a></em> de Van Vogt. L'été dernier, j'ai trouvé chez beau-papa l'intégrale parue il y a 20 ans chez <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lefrancq_(maison_d%27%C3%A9dition)">Lefrancq</a> et je lui ai empruntée.</p>
<p>Sur la forme : cette intégrale contient moultes coquilles, quelques bout de phrases déplacés, des sauts de paragraphe manquants et même une mention erronée de <em>Terre en fuite</em> sur le tome 1 (à la place de <em>Ce monde est nôtre</em>). Je sais certes que l'on peut relire mille fois un texte et qu'il restera toujours des coquilles, mais bon. De plus, les commentaires du fils de l'auteur, pas inintéressants dans le tome 1 pour éclairer un peu l'œuvre, manquent totalement du tome 2.</p> <ul>
<li>Pour la biographie de Carsac, plus connu en fait sous son nom de François Bordes, paléontologue reconnu : <a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">voir Wikipédia</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pour une liste détaillée des œuvres avec les couvertures originales au mythique Rayon fantastique : <em>cf</em> le blog <em><a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">En terre étrangère</a></em>.</li>
</ul>
<p>Les différents romans sont parus dans les années 1950 et 60, et en portent la marque, différemment. Je fais parfois mon blasé parce que j'ai lu beaucoup depuis de choses publiées entre temps, mais, globalement, on reste sur le dessus du panier de la SF française de l'époque. Et bonne nouvelle : chaque roman est meilleur et plus complexe que le précédent. Les trois dont je me souvenais depuis le siècle dernier (<em>Les robinsons du Cosmos</em>, <em>Ceux de nulle part</em>, <em>Ce monde est nôtre</em>) le méritaient.</p>
<p>Par ordre plus ou moins chronologique :</p>
<h3>Sur un monde stérile</h3>
<p>Un groupe de jeunes amis embarquent dans l'astronef fabriqué en secret dans son garage par l'un d'eux, débarquent sur Mars sans préparation, sinon des armes, beaucoup d'armes, et rencontrent trois peuplades martiennes qui se livrent une guerre éternelle. Comme il est très clair d'entrée qui sont les beaux et gentils et qui sont les affreux et méchants, ils prennent parti, sinon le commandement, et participent au génocide final des mauvais.</p>
<p>C'est typiquement l'œuvre de jeunesse (écrite vers la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ce qui doit expliquer des choses) sortie des fonds de tiroir bien plus tard, sans intérêt autre que comme témoignage d'une époque. Le scénario ne manque pas de rythme mais l'histoire est prévisible, le manichéisme brutal, le savant un peu trop génial, et la psychologie des personnages basique. L'enchaînement des opérations militaires lasse. Carsac lui-même n'aimait pas ce roman de débutant qui n'a pas été publié de son vivant.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile.jpg" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile_m.jpg" alt="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" /></a></p>
<h3>Les robinsons du Cosmos</h3>
<p>Par contre, cette histoire a marqué mon adolescence, en partie par les dessins de Moebius dans l'édition du Club. Il paraît qu'elle eut un grand succès en Union Soviétique à l'époque.</p>
<p>L'idée n'est pas bête, de déporter un village entier sur une autre planète, par un tour de passe-passe soudain dans l'espace-temps. (Cela rappelle un peu un vieil Hamilton, <em><a href="https://www.noosfere.org/icarus/livres/niourf.asp?numlivre=2146560676">la Ville sous Globe</a></em>, mais l'histoire est plus intéressante, les personnages moins caricaturaux et les filles sont armées.) Comme dans toute bonne SF post-apocalyptique, les ennemis les plus dangereux ne sont pas les hydres volantes ou les indigènes, mais d'autres humains, et cela d'entrée.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" /></a> Ce problème réglé, nos déportés explorent et s'installent, rencontrant une peuplade de centaures, et on tombe plus ou moins dans le roman d'exploration-colonisation à la gloire des ingénieurs et techniciens.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" /></a>J'ai été un peu agacé par ce côté « dictature éclairée des scientifiques », très fréquent chez Carsac, ainsi que par le sort très expéditif réservé aux « méchants » (mais je n'ai pas combattu pendant la Seconde Guerre Mondiale comme l'auteur, moi). Comme je cherche toujours la petite bête, je suis un peu resté sur ma faim sur le côté pratique (à partir d'un gros village et d'une usine, comment reconstruit-on une civilisation ? à quoi doit-on renoncer ?). Le narrateur est un dirigeant, un scientifique-qui-sait, la piétaille reste dans l'ombre.</p>
<p>Malgré ces peccadilles, une bonne lecture.</p>
<h3>Ceux de nulle part</h3>
<p>Voici un autre très bon souvenir de lecture de jeunesse que j'ai relu avec plaisir. Écrit en pleine mode des soucoupes volantes, <em>Ceux de nulle part</em> relate l'enlèvement, un peu par hasard, du docteur Clair par des extraterrestres (les Hiss, quasi-humains à peau verte, pour ne pas faire original), et la découverte de leur civilisation et de celle des planètes amies.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" alt="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" /></a>Civilisation où le bon docteur prendra une place importante, puisqu'il est de la première espèce à sang rouge découverte par ses kidnappeurs ; particularité qui le rend insensible au rayonnement des maléfiques misliks.</p>
<p>Les misliks sont constitués de métal pur, éteignent les étoiles, et sont une des meilleures inventions de Carsac : l'Ennemi, le Mal absolu, qui éteint la lumière et la vie, qui nous est totalement étranger, avec qui on ne pourra jamais trouver d'arrangement. (Dans la fameuse <a href="https://spacearchaeology.org/?p=79" hreflang="en">classification des aliens d'Orson Scott Card</a>, ils seraient les « varelses » ou même les « djurs », quand les hiss et leurs nombreuses espèces amies sont des « ramens », voire plus proches encore).</p>
<p>Civilisation intergalactique pacifique, chocs culturels, traditions différentes, mélange même des espèces, puisque Clair rencontre une charmante quasi-humaine d'Andromède (sans surprise, le charme exotique opère), sans supériorité humaine : était-ce si fréquent dans la SF française des <em>fifties</em> ?</p>
<h3>Ce monde est nôtre</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" alt="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" /></a><em>Ceux de nulle part</em> pourrait être vu comme une longue introduction à l'univers de <em>Ce monde est nôtre</em>, dont la thématique commence à être nettement plus complexe.</p>
<p>Quelques siècles après l'arrivée de Clair chez les Hiss, un de ses descendants, Akki, a pour tâche d'inspecter les planètes encore barbares. L'une d'elle, au stade médiéval, est peuplée de deux civilisations humaines ennemies, plus une troisième proche des Hiss. Or la loi de fer de la grande civilisation galactique et paternaliste est impitoyable : il ne doit y avoir qu'une humanité par planète — l'expérience montre que, sinon, cela finit toujours par dégénérer. Quels peuples vont devoir être déportés sur une autre planète ? Pour tous, cette terre est celle de leurs ancêtres, ils sont chez eux.</p>
<p>Très loin de la neutralité, Akki va se faire entraîner dans la politique interne d'un camp — évidemment il y a une jeune et belle duchesse en danger — puis la guerre entre les deux factions humaines, pour commencer. Enfin arrivera le choix de ceux qui resteront et ceux qui partiront.</p>
<p>C'est bien mené, on est loin du scénario linéaire, les personnages se cassent le crâne à savoir quelle est la chose juste à faire, et il n'y a pas de solution miracle. Le chapitre final est de trop, et je suis un peu dubitatif sur cette grande et sage civilisation galactique qui s'autorise à génocider les peuples les plus agressifs.</p>
<p>On a vu des relents de guerre d'Algérie dans cette histoire pourtant écrite avant, mais le fils de Francis Carsac explique qu'il s'agit plutôt d'un parallèle avec la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers" hreflang="fr">Guerre des Boers</a>. Hélas, on peut tracer un parallèle avec un très grand nombre de zones de conflits passés et présents, probablement futurs.</p>
<p>Bref, une bonne lecture aussi sur un thème éternel.</p>
<h3>Terre en fuite</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72.jpg" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72_s.jpg" alt="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" /></a>Roman un peu bâtard, un peu énervant par le côté « je suis un super-scientifique et je deviens le dictateur qui sauve l'humanité » (ah, si c'était même possible !). Un homme d'un futur lointain s'incarne dans un ingénieur de notre époque, et raconte son épopée, rien moins que la migration de la Terre et de Vénus, transformés en vaisseaux spatiaux, autour d'une autre étoile.</p>
<p>Les histoires s'enchaînent comme des épisodes différents sans grand fil conducteur, les problèmes techniques sont vite évacués, les opposants sont d'infâmes fanatiques sans subtilité, le reste de la population est docile, et comme souvent j'ai l'impression qu'elle n'existe pas vraiment. Je l'avais lu il y a bien longtemps, je comprends pourquoi il m'a laissé un souvenir flou.</p>
<h3>Pour patrie, l'espace</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" alt="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" /></a>Bien plus complexe est l'histoire de ce militaire d'élite d'un Empire terrien en pleine guerre civile, recueilli par une civilisation d'astronefs-villes nomades, à tendance anarchistes, où on lui fait bien comprendre qu'il est un plouc. Mais on a besoin de ses qualités militaires et techniques.</p>
<p>Le choc culturel est violent, les relations avec la gente féminine pleines de méfiance. Racisme, égoïsme, tout y passe. Peut-être peut-on reprocher un manque de subtilité, mais ce militaire n'est <em>pas</em> subtil.</p>
<p>Ce n'est pas déplaisant. Il y a une <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/07/27103626.html">chronique enthousiaste sur SF Emoi</a>.</p>
<h3>La vermine du lion</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_2.gif" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_2_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" /></a>Cette dernière histoire est la plus longue, dense et complexe écrite par Carsac (surtout avec les deux prologues, ajoutés par la suite si j'ai bien compris). Fondamentalement en fait, c'est un mélange de western (Carsac était fan) et de roman d'aventure coloniale, transposé dans le futur, sur une autre planète ; où l'on rejoue une fois de plus le thème de la très méchante méga-entreprise sans âme qui veut exploiter une planète en pressurant ses employés, en soudoyant les colonialistes au gouvernement, et en liquidant les autochtones s'ils gênent, quitte à encourager leurs dissensions internes et manipuler leurs fanatiques religieux. Cela pourrait se passer au XIXè siècle comme de nos jours, et devait résonner d'autant plus fort à l'époque de la décolonisation. En fait, la science-fiction n'apporte pas grand-chose à cette histoire.</p>
<p>Notre héros est la caricature du surhomme à la Carsac, physiquement et mentalement, devenu un cow-boy redresseur de tort, défenseur de ses amis les « sauvages » sans trop d'égard pour la loi et les grands principes vus les enjeux. Il est flanqué d'un lion intelligent, fort pratique pour se défendre ou livrer une justice expéditive, mais un peu sous-exploité. L'histoire est parasitée par plusieurs dames qui ne peuvent rester insensibles à son charme, aux motivations parfois floues. Hélas, là encore, Carsac ne semble savoir résoudre les problèmes de cœur de ses personnages que par l'élimination physique de certains protagonistes. Pour ce dernier roman, il ne se croit pas obligé au <em>happy end</em>.</p>
<p>Je fais la fine bouche, mais je suis d'accord avec la chronique ébahie de <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/10/27121855.html">SF Emoi</a>.</p>
<h3>Nouvelles</h3>
<p>Le tome 2 de l'intégrale se finit par quelques nouvelles, un peu inégales, en taille comme en valeur ou en originalité, mais pas désagréables. Beaucoup tournent autour du voyage dans le temps jusque l'époque paléolithique (la spécialité de François Bordes) et du choc entre hommes civilisés et « sauvages ».</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Francis-Carsac#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/851John Wyndham : triffides, krakens, lichen, chrysalides, coucous et graines du tempsurn:md5:01abce100db92465d0a99eab904d39d62018-01-19T19:02:00+01:002020-02-08T17:56:11+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationapocalypseautodestructionbombe atomiquecataclysmecatastrophechaoscivilisationcommunismecoup basexaptationextraterrestresgéopolitiquelivres luspessimismeracléescience-fictionthéologie<p>Je viens de relire des classiques de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Wyndham">John Wyndham</a>, ce maître de la science-fiction britanniques des années 50. Ça n’a pas forcément vieilli.</p>
<p>Un point rare dans les livres de cette époque : les personnages féminins de Wyndham sont très loin des potiches, princesses à sauver ou méchantes sorcières. Elles sont aussi motrices de l'action que les mâles, sinon plus assurées qu’eux. C’est un signe de l’évolution sociale depuis les années 50, à la mentalité étonnamment éloignée de la nôtre (<em>cf</em> <em>The Trouble With Lichen</em>, notamment).</p>
<p>Ce n’est pas le seul point lié à la société : la difficulté d’une réponse collective à un danger extérieur, nos effets de troupeau, les foules stupides (y compris en haut de la société) reviennent systématiquement. Les réactions de l’URSS (à l’époque stalinienne) aux différentes menaces rencontrées relèvent du comique.</p> <h3>Triffides</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Triffide.gif" title="Triffide par John Wyndham - Fair use via Wikipédia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Triffide.gif" alt="Triffide par John Wyndham - Fair use via Wikipédia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Triffide par John Wyndham - Fair use via Wikipédia" /></a></p>
<p>Le plus connu, <em>The Day of the Triffids</em> (VF : <em>Le jour des Triffides</em>) ne déparerait pas dans les histoires de zombies et vampires. Et comme dans beaucoup de ces histoires apocalyptiques, ce sont les autres survivants, et non les zombies/triffides/monstres divers, qui sont les véritables dangers (on est quand même loin du sadisme de <em>The Walking Dead</em>).</p>
<p>À la suite d'un phénomène astronomique, presque toute l’humanité est devenue aveugle et la civilisation s’effondre. Parallèlement, des plantes autoportantes à dards, très agressives, se répandent — l’aspect comique disparaît très vite. À Londres, les quelques non-aveugles restants se battent pour les réserves des magasins, fuient les villes ravagées par les épidémies et qui vont brûler. Comment s’organiser ? Peut-on/doit-on tenter de sauver tous ces aveugles ?</p>
<h3>The Kraken Wakes</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/The_Kraken_Wakes.jpg" title="The Kraken Wakes"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/.The_Kraken_Wakes_s.jpg" alt="The Kraken Wakes" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="The Kraken Wakes" /></a></p>
<p>Au début il s’agit d’une « classique » invasion extraterrestre, même si la provenance de l’ennemi est floue. Des OVNIs disparaissent en mer, puis des bateaux sont coulés en masse, puis les plages sont attaquées. On ne verra jamais les envahisseurs. Les humains sont surtout incapables de reconnaître à temps le danger et d’y apporter une réponse efficace. Là encore la fin du monde menace.</p>
<p>Le couple de narrateurs est journaliste : très pratique pour suivre les informations et les errements politico-sociaux. Mais ils se laissent un peu porter par les événements, en spectateurs.</p>
<h3>The Chrysalids</h3>
<p>Grand saut dans le futur : <em>The Chrysalids</em> relève de la SF post-apocalyptique version atomique, dans un Labrador devenu le dernier refuge de la civilisation, ravalée tout de même au niveau social et technologique de la Renaissance. Cette petite communauté hyper-religieuse brûle la moindre plante mutante, et il arrive malheur aux nouveaux-nés anormaux. Les zones ravagées par la radioactivité reculent peu à peu, mais à leur frontière vivotent de nombreux humains « anormaux » et agressifs. Mais certains ne présentent aucune malformation apparente et apparaissent dans les familles les plus établies du Labrador. Seront-ils démasqués ?</p>
<p>Le thème du mutant-surhomme-mais-maudit n’avait déjà pas une grande originalité (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%80_la_poursuite_des_Slans">À la poursuite des Slans</a></em> de Van Vogt date de 1940 et n’est sûrement pas le premier sur le sujet) et le coupler à la grande peur de l’Apocalypse atomique correspondait à l’ambiance de la Guerre Froide.</p>
<p>Là encore le héros réagit plus qu’il ne mène les événements, et les personnages moteurs sont plutôt féminins. Le plus intéressant réside encore dans la sociologie de cette communauté isolée, arc-boutée sur l’orthodoxie, dont les membres les plus laxistes et irresponsables sont involontairement facteurs de progrès. Le <em>deus ex machina</em> final est un peu facile.</p>
<h3>The Seeds Of Time</h3>
<p>C’est un recueil de nouvelles. J'en ai oublié donc la plupart. Un peu atypiques par rapport à ce qui se lisait dans les années 50, et avec ces femmes qui ne se laissent pas marcher sur les pieds (parfois le contraire...).</p>
<h3>The Trouble with Lichen</h3>
<p>Difficile de parler de <em>The Trouble with Lichen</em> sans révéler son thème principal, longtemps inconnu du lecteur. De tous les livres de cette petite liste, c’est aussi le plus marqué par son époque : si l’héroïne, biochimiste, est la maîtresse de son destin dans tous les sens du terme, elle subit bien des pressions pour revenir au cliché de la femme au foyer ayant abandonné ses études, préoccupée par les enfants et sa beauté qui sera trop vite fanée. On ne réécrirait rien de pareil à notre époque. Quoique.</p>
<p>En arrière-plan : comment faire accepter à une société des changements scientifiques majeurs, qu'elle a de bonne chance de rejeter d'emblée ? Un goût de transhumanisme avant la lettre...</p>
<h3>The Midwich Cuckoos</h3>
<p>Des films ont été tirés de cette histoire d’invasion, tout à fait dans l’air de son temps, elle. Une nuit, un village entier est coupé du monde et toutes les femmes tombent enceintes. Et les enfants font peur... Un classique.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/John-Wyndham-%3A-triffides%2C-krakens%2C-lichen%2C-chrysalides%2C-coucous-et-graines-du-temps#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/843« Ravage » de Barjavelurn:md5:145f601f59d23413fcf25318a57c57a52017-01-22T22:19:00+01:002017-03-04T22:00:32+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationanalogieapocalypseauto-organisationautodestructioncataclysmecatastrophechaoscivilisationcouragedéshumanisationexaptationlivres luslyrismenaturenostalgieperspectivepessimismesciencescience-fictionSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeutopieécologieénergieévolution <p>Dans la SF française, qui ne s’appelait pas encore comme cela en 1942, c’est un classique et la première œuvre d’un de nos plus grands auteurs. Mais noyés dans les odeurs de cendres surnagent quelques relents un peu nauséabonds. C’est une des difficultés des anciens livres : discerner ce qui vient de l’air de son temps, ce qui est deuxième degré, et ce qui est vrai choix de l’auteur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Barjavel_Ravage.jpg" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Barjavel_Ravage_m.jpg" alt="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin" /></a> Dans le Paris de 2052, tel qu’imaginé juste avant-guerre, l’électricité disparaît inexplicablement. Pendant que la civilisation s’écroule puis que le monde flambe, le jeune François sauve sa jeune, innocente, belle et naïve Blanche, puis monte une expédition pour rejoindre la région rurale isolée où ils ont grandi.</p>
<p>Comme dans toute anticipation dont la date est dépassée ou proche, certaines pages font sourire. La nourriture ne provient que de la synthèse chimique, personne ne sait plus à quoi ressemble un poulet, mais les ouvriers meurent toujours à 50 ans à cause de la dureté de l’usine. Le « plastec » omniprésent n’est pas si loin de la réalité actuelle, et les trains à haute vitesse sillonnent l’Eurasie, mais les avions ne semblent pas voler plus loin qu’en 1939. Le téléphone est en 3D mais il faut toujours se déplacer dans la pièce où il sonne. Les mœurs nous sembleront surannées : Blanche suit une école pour futures « mères d’élite » et elle obéit sans mot dire à son homme. Il est facile de se moquer après coup, je pense que mes éventuelles prédictions pour 2117 feraient rire mes descendants (voire moi-même ?).</p>
<p>La partie la plus intéressante reste la description de la société qui s’effondre, du chaos et des méthodes de survie. On a sans doute fait mieux dans le domaine depuis 1942, mais le passage des individus policés aux bandes barbares reste convaincant : un sage a bien dit que la différence entre la civilisation et la barbarie n’était que de quelques repas, et je le crois volontiers.</p>
<p>Par certains côtés <em>Ravage</em> m’a rappelé <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Malevil">Malevil</a></em> de Robert Merle : destruction totale, barbarie des survivants, héros reconstituant une bande.</p>
<p>Tout cela a d’ailleurs un avant-goût assez inquiétant : combien de temps durerait notre civilisation si l’électricité, pour une raison ou une autre, disparaissait pour longtemps à une échelle continentale ? Sommes-nous certains d’être à l’abri du danger ? Saurions-nous rester assez disciplinés et éviter le chaos ? Barjavel a peut-être été inspiré en partie par l’Exode, tout proche.</p>
<p>Le personnage de François fait froid dans le dos par son adaptation froide à la barbarie de la situation. C’est l’« homme providentiel » par excellence, le guide-né sans lequel les autres ne sont que moutons stupides, et contesté par personne. C’est par lui que l’on retrouve peut-être le pétainisme à la mode en 1942. Barjavel a certes travaillé pour Denoël qui était collaborationniste et publié chez lui, mais il y travaillait avant guerre ; et si <em>Ravage</em> cadrait dans la philosophie de Vichy, le reste de l’œuvre de Barjavel n’a rien à voir. On peut ne voir dans <em>Ravage</em> que méfiance envers un progrès incontrôlé et regret de la France rurale, comme encore parfois aujourd’hui ; ce qui ne veut pas dire que l’on souhaite la destruction de la société moderne. Doit-on voir dans le chapitre final une apologie du bonheur par l’obscurantisme, ou un avertissement ? C’est sur cette grosse ambiguïté que se finit le livre. Même si le futur de cette société, entrevu dans le <em>Voyageur imprudent</em> paru peu après, ne fait pas rêver.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Ravage-de-Barjavel#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/836« Guerres & Histoire » n° 32 d’août 2016 : Verdun, un borgne chez les aveuglesurn:md5:7865ce2d76b0cdcaa45092967553e9722016-09-11T16:13:00+02:002020-02-08T18:05:06+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsebon senscatastrophecommunismeesclavageEuropeguerreGuerre FroidehainehistoireHistoire de Franceimpérialismeincohérencelégendes urbainesparadoxeperspectivePremière Guerre MondialepsychologieracléeSeconde Guerre MondialetotalitarismeuchronieÉtats-Unis<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerresEtHistoire_32.jpg" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) "> <img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerresEtHistoire_32_s.jpg" alt="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " /> </a> Petit résumé rapide de ce dont je veux me rappeler du dernier <em>G&H</em>, à part la partie sur l’armée d’Alexandre reportée au prochain billet.</p> <h3>Verdun</h3>
<p>Le plus grand massacre de la Première Guerre Mondiale était stratégiquement dénué de sens !</p>
<p>Pour <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_von_Falkenhayn">Falkenhayn</a>, l’organisateur allemand, le but n’était pas simplement de « saigner à blanc l’armée française » (le degré zéro de la stratégie). Le général sait que malgré de gros succès défensifs, l’Allemagne ne tiendra pas face à la multiplication des fronts (Italie, Balkans, Arabie...) et au blocus naval. Faute de volonté du politique de négocier la paix, Falkenhayn vise à <strong>séparer ses ennemis</strong> et croit s’attaquer au plus faible : la France (« meilleure épée » de l’Angleterre et, croit-on, épuisée).</p>
<p>Verdun (la ville du Traité) est un <strong>objectif limité mais symbolique</strong>. À cause du terrain, les contre-offensives seraient si coûteuses que la France finirait par accepter une paix séparée. L’armée russe recevrait alors tout le poids de l’armée du Reich, et l’Angleterre finirait seule.</p>
<p>Est-ce la faute à Falkenhayn, ce plan n’a pas été appliqué à la lettre par les généraux : l’attaque limitée mais puissante a été étendue dans le but de prendre Verdun, en espérant plus. Les troupes allemandes se sont donc beaucoup plus exposées au feu ennemi alors que le but n'était que d’attirer les Français et les pilonner, au moindre coût. <strong>Le but tactique (Verdun) a remplacé le but stratégique (user les Français)</strong>. (<em>Oublier la stratégie au bénéfice des victoires tactiques, il semblerait que ce soit une constante allemande pendant les deux Guerres Mondiales...</em>)</p>
<p>Ces damnés Français tiennent, grâce à la rotation des effectifs, et l’armée allemande s’épuise elle aussi, sans résultat probant. Falkenhayn est écarté par Hindenburg et Ludendorff qui vont établir une quasi-dictature sur le Reich. Ils suivent la même philosophie (une grande victoire tactique suffira, comme aux siècles précédents), sans plus de succès puisqu’ils ne sauront pas exploiter les avancées de 1918.</p>
<p>Ironiquement les Français tombent dans le même travers (Chemin des Dames). Ils gagnent quand même (arrivée des troupes américaines, matériel supérieur, succès dans les fronts arabes ou balkaniques, épuisement des puissances centrales...). Mais pour Benoist Bihan, ils prolongent l’erreur en 1940 : croyant là encore à une guerre d’usure, la France s’enferme derrière la ligne Maginot et laisse à Hitler le temps de manger les petites puissances et l’initiative.</p>
<h3>Moshe Dayan au Vietnam</h3>
<p>Le général israélien <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Moshe_Dayan">Moshe Dayan</a>, un peu désœuvré en 1966, a joué quelques semaines au reporter, et écrit une série d’articles sur les opérations américaines au Vietnam. Il a les coudées franches et est impressionné par l’hallucinante débauche de moyens, mais beaucoup moins par la stratégie. <strong>La machine américaine ne semble pas savoir où elle va, dans quel but, à part vouloir impressionner le monde entier</strong>.</p>
<p>Le peu que les Américains font pour gagner les cœurs des habitants est totalement insuffisant. Les soldats vont chercher dans la jungle un ennemi très mobile et insaisissable. Le renseignement, essentiellement technique, ne peut localiser précisément le Viet-Công, qui frappe toujours juste à côté, ou juste après : les Américains « utilisent des marteaux-pilons pour forer des trous dans le vide ». « <strong>Les Américains gagnent tout — sauf la guerre</strong>. »</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Les <strong>équipages des bombardiers américains</strong> ont encaissé le pire taux de pertes de toutes les troupes alliées. 1943 fut la pire année, faute d’escortes. Avec l’expérience, les équipages avaient de plus en plus de chances de revenir vivants.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’interview du mois est celle de <strong>Yon Deguen</strong>, un de ces miraculés de la Seconde Guerre Mondiale : Juif soviétique ukrainien, il s’engage dès l’attaque allemande de 1941, à 16 ans. Dans l’ambiance chaotique de ces premiers mois, il se retrouve très vite commandant de section car il sait lire les cartes ! (<em>les armées russe puis soviétique ont toujours eu un énorme problème d’encadrement</em>). Il se retrouve à franchir le Dniepr à la nage bien que blessé ! Baladé dans diverses unités, il survit aussi bien aux combats qu’au NKVD qui fusille pour un oui ou pour un non. Sur la manière dont l’URSS à tenu : « Nous avons inondé les Allemands avec nos cadavres. »</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>reportage photo sur la guerre de Corée</strong> (1951), où la machine de guerre américaine s’est grippée dans les collines et face aux vagues chinoises, est quelque part surréaliste : pas de combat, et elles rappellent la Seconde Guerre Mondiale (mais en couleur) et le Vietnam (sans la jungle ni les hélicos).</li>
</ul>
<h3>Réponses du journal à des questions de lecteurs</h3>
<ul>
<li><strong>La traite des Noirs a-t-elle facilité le colonialisme européen</strong> ? Selon G&H, c’est probable : 40 millions de personnes enlevées par les divers esclavagistes africains, arabes, européens représentaient une ponction notable, mais pas le seul facteur (l’Asie aussi a été colonisée malgré une population supérieure).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Si l’Italie avait respecté ses engagements en 1914</strong> et combattu aux côtés de l’Allemagne et de l‘Autriche, cela n’aurait sans doute pas changé grand-chose : la France était protégée par des Alpes infranchissables, un blocus naval allié aurait mené à une rapide paralysie, et au final le pays aurait été une charge pour l'Allemagne.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le terme « <strong>génocide vendéen</strong> » est abusif : malgré d’innombrables massacres typiques d’une guerre civile, et que l’on retrouve dans d'autres guerres antérieures, il n’y avait pas de plan d’extermination.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-32-ao%C3%BBt-2016#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/829« Frontières d’acier — Histoire de la fortification permanente en Lorraine et en Alsace 1871-1945 » de Michaël Séramoururn:md5:8cb2d8cdff4423a66516e76daccabb332015-10-04T22:07:00+02:002018-08-22T15:14:21+02:00ChristopheHistoireAllemagneAlsacebombe atomiquecatastrophechâteauxcomplexitécoup bascouragedommagedéshumanisationgigantismeGuerre FroidehainehistoireHistoire de FrancelibertéLibérationlivres luslégendes urbainesmortmèmemémoireparadoxeperfectionnismePremière Guerre MondialeracléerecyclageréseauSeconde Guerre Mondialesécuritétempstourismetravail <p>Je ne pensais pas un jour acheter un livre de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_%28militaire%29">poliorcétique</a>, mais je résiste parfois difficilement aux impulsions chez mon <a href="http://www.illauxtresors.com/">libraire favori</a>.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Frontieres_d_acier.jpg" title="Frontieres_d_acier.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Frontieres_d_acier_s.jpg" alt="Frontieres_d_acier.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>Le sujet est simple et compliqué à la fois : les fortifications à la frontière franco-allemandes de 1870 jusqu’à après la Seconde Guerre Mondiale. La ligne Maginot vient à l’esprit, mais aussi les forts de Verdun ou en face ceux de Metz... construits alors qu’elle était allemande. Certaines installations ont donc servi deux camps : les Allemands se sont aussi cassé les dents sur certaines parties de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_Maginot">ligne Maginot</a> en juin 1940, qu’ils ont utilisée pour ralentir notablement les Américains à l’automne 1944 !</p>
<p>Les premiers chapitres traitent de l’évolution de ces forts. Les villes fortifiées à la Vauban étant dépassées, les fortifications éclatées assez éloignées des centres urbains deviennent à la mode, comme autour de Metz ou tout autour de Strasbourg. En France, cet ensemble est désigné sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_S%C3%A9r%C3%A9_de_Rivi%C3%A8res">Séré de Rivières</a>. L’artillerie progressant à pas de géants après 1870 et la Première Guerre Mondiale, l’obsolescence est rapide : si les premiers ensembles ont de beaux frontons en pierre, par la suite les forts s’éloignent, se couvrent de béton, les communications s’enterrent, les tourelles se fondent dans le paysage, se terrent derrière de profondes meurtrières, voire s’éclipsent :
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg" title="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.320px-Fort-15-28-19_s.jpg" alt="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg">Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson sur Wikipédia Commons</a>
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif" title="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Manoeuvre_tourelle_s.jpg" alt="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif">Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons</a></p>
<p>Les désastres du début de la Première Guerre Mondiale semblent montrer l’inutilité de ces fortifications. L’auteur s’insurge : les Allemands sont passés par la Belgique justement à cause des forts entre Verdun et Belfort, et Verdun notamment a fixé de gros effectifs allemands pendant la bataille de la Marne. Le haut commandement français dégarnit pourtant ces bastions « inutiles » en hommes et en canons dont le manque se fait cruellement sentir ailleurs... ce qui facilite l’offensive allemande de 1916 sur Verdun. Les fortifications tiennent pourtant durablement quand elles sont bien équipées, et le coût pour l’assaillant en obus est délirant par rapport aux pertes (humaines) infligées au défenseur. La guerre de mouvements reprend en 1918, mais les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Forts_de_Metz">forts allemands de Metz</a> n’ont guère l’occasion de montrer leur efficacité avant l’armistice.</p>
<p>La France de l’entre-deux guerres, démographiquement exsangue, voit dans la ligne Maginot une protection efficace. Plus encore que pour les fortifications de 1914, tout est enterré ; les forts sont reliés par des tunnels et se soutiennent entre eux. Cette ligne, surtout, rompt avec le principe des grandes places, et court sur tout la frontière... sauf devant la Belgique <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. La France vise le long terme : abritée derrière la ligne, il faut continuer le réarmement et laisser agir le blocus envers l’Allemagne, et n’attaquer que plus tard. Les généraux allemands aussi s’attendent à une guerre longue : le <em>blitzkrieg</em>, « <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-Histoire-sp%C3%A9cial-d-avril-2010-France-1940-autopsie-d-une-d%C3%A9faite">acte de désespoir du niveau opérationnel pour sortir d’une situation désespérée au niveau stratégique</a> », fruit du bluff de l’audace de bons généraux, monté en épingle par la propagande, se casse les dents sur la ligne Maginot quand la Wehrmacht l’attaque de front. Globalement, les forts ont tenu malgré un déluge de feu — certains sacrifiés pour préserver le symbole d’un mur infranchissable alors que les Allemands l’avaient déjà contourné. À l’armistice, trahison : les équipages invaincus partent en captivité, exigence allemande contre la menace d’occuper Lyon.</p>
<p>Là encore, la ligne Maginot a rempli sa mission, puisque l’agresseur a dû la contourner — conformément aux plans français. Au sud, la partie alpine de la ligne (non traitée ici) a bloqué toute progression italienne.</p>
<p>Quand Patton arrive sur la Moselle en 1944, il n’imagine pas que les fortifications de Metz (certains morceaux datent d’avant 1870 !) et d’autres parties de la ligne Maginot tenues par les Allemands vont lui poser un gros problème. Il faut plusieurs semaines, de nombreux morts et le recul du front en d’autres endroits <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Metz">pour que Metz tombe</a>. Pendant ce temps, la Wehrmacht se replie en bon ordre. Là encore, les fortifications jouent leur rôle.</p>
<p>L’armée française conserve ce qui reste de ligne Maginot encore quelques années après la Seconde Guerre Mondiale, jusqu’à ce que la bombe atomique la rende inutile. Puis s’ensuit le démantèlement d’une grande partie des installations (vente aux enchères, ensevelissement, retour à la nature des abords...). Aujourd’hui, grâce aux associations locales, de bonnes parties peuvent encore se visiter. On en croise encore bien des fragments dans la campagne alsacienne quand on sait où chercher, et j’ai bien l’intention de visiter assez vite la <a href="http://www.fort-mutzig.eu/pages/_menu/menu_f.html">forteresse allemande de Mutzig</a>, celle de Metz, ou le <a href="http://www.lignemaginot.com/ligne/schoen.htm">fort de Schoenenbourg</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Les Belges ayant déclaré leur neutralité en 1936, un peu tard pour prolonger la ligne.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/797“The sleepwalkers — How Europe went to war in 1914” (« Les somnambules — Eté 1914 : Comment l’Europe a marché vers la guerre ») de Christopher Clarkurn:md5:2521e44836d265fb4a56207b0ef066e22015-04-19T22:25:00+02:002021-07-31T14:38:14+02:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypseautodestructioncataclysmecatastrophecolonisationdommagedéterminismeEuropeguerregéopolitiquehainehistoireHistoire de FranceimpérialismeincohérencenationalismeperspectivepessimismepolitiquePremière Guerre Mondialeprise de têteprovocationpsychologieRealpolitikRussieuchronie <blockquote><p>The outbreak of the war was a tragedy, not a crime. <br /> <em>Le déclenchement de la guerre fut une tragédie, pas un crime.<br /><br />Christophe Clark, </em>The Sleepwalkers<em>, Conclusion, p. 561</em></p></blockquote>
<p>L’Europe s’est suicidée sans que personne veuille vraiment la guerre : c’est la tragédie de la Première Guerre Mondiale, et une leçon pour le futur. Certaines causes résonnent encore au XXIè siècle.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM1/the_sleepwalkers.jpg" alt="the_sleepwalkers.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>La séquence d’introduction porte déjà la violence des conséquences lointaines (oui, le titre français est trompeur : Christopher Clark commence bien plus tôt que l’été 1914). En Serbie en 1903, des officiers ultranationalistes assassinent sauvagement le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Ier_de_Serbie">roi Alexandre</a> et sa femme. D’après la description de Clark, ce souverain n’était pas très sympathique, mais les tueurs ne le sont pas plus. Cette clique militaire régicide, notamment un certain colonel <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dragutin_Dimitrijevi%C4%87">Apis</a>, va acquérir une grande influence en Serbie dans les années suivantes, et, de manière à peu près autonome, semer le trouble dans la Bosnie-Herzégovine voisine (partiellement serbe mais annexée par l’Autriche), puis organiser l’assassinat de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois-Ferdinand_d%27Autriche">François-Ferdinand</a>, l’allumette qui embrasera le continent.</p>
<p>Toute cette partie sur la politique serbe, le nationalisme intense, le déni par exemple de l’existence même de Slaves non serbes en Bosnie et Croatie, les exactions pendant la conquête serbe de la Macédoine en 1912-13… rappellent furieusement ce qui s’est passé dans les années 1990 en Yougoslavie ; jusqu’au rôle de la Russie, ange gardien autoproclamé des Slaves des Balkans ; jusqu’au conflit est-ukrainien actuel (un russophone est-il forcément russe ?).</p>
<h3>Les acteurs</h3>
<p>Clark fait le tour de toutes les grandes puissances du moment, leurs gouvernants, leur organisation, leurs faiblesses, leurs relations mutuelles…</p>
<p>Tout le monde voyait la Russie, en croissance très rapide, comme la nouvelle superpuissance, malgré la défaite de 1905 face au Japon, malgré son gouvernement pas très stable et marqué par l’absolutisme — ce qui ne voulait pas dire que le Tsar donnait toujours le ton.</p>
<p>À l’inverse, l’Autriche-Hongrie semblait en décrépitude, paralysée par un gouvernement double et les revendications ethniques, malgré une économie florissante. Que serait-elle devenue si François-Ferdinand avait vécu, lui qui ne voulait pas de guerre et ambitionnait de créer un État fédéral ?</p>
<p>Le fantasque Kaiser ne dominait pas une Allemagne envieuse des empires coloniaux de ses voisins.</p>
<p>La France ne s’impliquait pas dans les Balkans, sinon par ses banques et ses exportations d’armes. Face à des Ministres des Affaires étrangères instables, les diplomates étaient devenus autonomes ; mais en 1914 Poincaré, Président, donnait le ton et prônait la fermeté face à l’Allemagne. Clark n’est pas tendre avec lui.</p>
<p>L’Angleterre (comme souvent…) ne tenait pas à s’engager irrévocablement, comme la France auprès de la Russie. Au Foreign Office, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Edward_Grey,_1st_Viscount_Grey_of_Fallodon" hreflang="en">Edward Grey</a> n’en faisait qu’à sa tête et lia son pays à la France.</p>
<p>L’Italie, théoriquement alliée aux puissances centrales, se rapprochait de plus en plus de l’Entente.</p>
<p>Les états des Balkans combattaient depuis 1912, contre l’Empire ottoman et entre eux.</p>
<h3>Les alertes et la déstabilisation</h3>
<p>La Grande Guerre n’a pas éclaté dans un ciel serein. Sans remonter jusqu’au conflit franco-allemand de 1870, les années d’avant-guerre virent plusieurs affrontements dont certains auraient pu dégénérer, et dont le souvenir influença les décideurs de 1914.</p>
<p>Allemagne et France s’accrochèrent notamment au Maroc (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coup_d%27Agadir">crise d’Agadir en 1911</a>), mais cela ne dégénéra qu’en marchandage (Maroc contre Cameroun). L’Allemagne remettait en cause la domination britannique sur les mers, mais ne l’inquiéta en fait jamais sérieusement. En Asie, les impérialismes russe et britanniques se heurtèrent plus d’une fois (Inde, Afghanistan, Iran…), sans conséquence majeure. En Afrique, les Anglais s’étaient heurtés aux Français (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_de_Fachoda">Fachoda en 1898</a>), et, juste après, lors de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers">guerre des Boers</a>, émergea fugitivement l’idée d’une alliance franco-germano-russe contre l’Empire britannique.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/627px-Balkan_1912.svg.png" title="627px-Balkan_1912.svg.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.627px-Balkan_1912.svg_m.png" alt="627px-Balkan_1912.svg.png" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /></a>La vraie déstabilisation commença en 1912 avec l’agression italienne contre l’Empire ottoman, qui perdit Lybie et Dodécanèse. Les jeunes et ambitieux États européens fraîchement émancipés de la tutelle turque (Serbie, Bulgarie, Grèce) se ruèrent sur l’Empire malade. Le partage tourna mal : la Bulgarie finit en guerre contre ses anciens alliés, et la Serbie menaça déjà de déclencher une guerre européenne en voulant croquer l’Albanie (et l’on parlait déjà de purification ethnique au Kosovo). Autriche et Italie considérèrent cela comme une ingérence dans leur sphère ; l’Autriche mobilisa partiellement ; la Russie aussi. On fut à deux doigts de la guerre ; puis les Serbes, sous la pression internationale, renoncèrent. Ces fausses alertes éloignèrent le spectre d’un conflit continental, et en 1914 les décideurs y crurent hélas moins.</p>
<h3>Des blocs non figés</h3>
<p>Tout n’était pas figé, et la guerre n’était pas inéluctable. Certes certains l’attendaient, par exemple certains Allemands effrayés de la très rapide (mais fragile) évolution industrielle et militaire russe, ou certains généraux autrichiens belliqueux. Mais il existait à l’inverse une multitude de facteurs de pacification : Guillaume II, tout fantasque qu’il ait été, reculait devant cette perspective ; ses relations avec Nicolas II étaient cordiales ; la rivalité navale entre Royaume-Uni et Allemagne avait déjà été gagnée par le premier ; François-Ferdinand ne voulait pas de guerre… Les guerres d’agression entre puissances européennes étaient impensables<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, même l’attaque autrichienne sur la Serbie nécessitait une justification. (<strong>Ajout de 2021</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig">voir ce qu’en dit Stefan Zweig dans <em>Le monde d’hier</em></a>.)</p>
<p>Enfin, les alliances étaient elles-mêmes mouvantes : la petite Serbie avait été protégée par l’Autriche avant de se retourner contre elle ; les alliés balkaniques de 1912-13 s’étaient entre-déchirés immédiatement après leur victoire ; la Russie et l’Angleterre avaient de nombreux points de friction coloniaux ; l’alliance de la France démocratique et de la Russie autocratique n’allait pas de soi ; la Russie s’était focalisée sur les Balkans en partie parce que sa cible prioritaire (Constantinople et les détroits) restait pour le moment inaccessible ; la Turquie avait un général allemand pour moderniser son armée, mais aussi un amiral anglais pour sa flotte ; etc.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png" title="800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg_m.png" alt="800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>
Cette instabilité des blocs provoqua d’ailleurs l’enchaînement inéluctable ! La France craignait que la Russie, puissance montante, n’ait plus besoin de son alliance, absolument vitale pour elle contre l’Allemagne : Poincaré l’assurait donc de son soutien indéfectible, y compris dans les Balkans, pourtant inutiles aux Français. Symétriquement, l’Allemagne ne faisait pas confiance à seul grand allié, l’Autriche, et la soutint donc inconditionnellement, là aussi dans les Balkans. La Russie se devait de soutenir son allié serbe, autrefois soumis à l’Autriche. L’Angleterre avait garanti la protection des côtes du nord de la France, dont toute la flotte croisait en Méditerranée : l’Angleterre se voyait donc entraînée par son alliée contre l’Allemagne.</p>
<h3>Tous ensembles vers l’abîme</h3>
<p>La Main Noire serbe, aidée par des services serbes, sans accord réel du plus haut niveau, place ses tueurs : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gavrilo_Princip">Prinzip</a> assassine l’archiduc François-Ferdinand. L’Autriche-Hongrie prend son temps pour l’enquête, finit par envoyer un ultimatum à la peu coopérative Serbie — ultimatum que Clark trouve presque acceptable, comparé à celui adressé par l’OTAN à la Serbie en 1999 ! La tradition occidentale veut que la Serbie ait quasiment accepté ces conditions coupant toute justification à l’attaque autrichienne ; en fait Clark qualifie la réponse serbe de « chef-d’œuvre d’équivoque diplomatique » (<em>a masterpiece of diplomatic equivocation</em>). L’Autriche menace d’attaquer, la Russie mobilise (complètement), donc l’Allemagne prend peur et mobilise, provoquant la mobilisation française. La rapidité de mobilisation et d’attaque pouvant décider du sort de la guerre, les hostilités commencent ; puis l’entrée du Reich en Belgique provoque l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne.</p>
<p>Cet enchaînement, tout le monde l’avait vu venir, mais personne ne le voulait et chacun croyait faire toutes les concessions possibles pour éviter la guerre. Dans les deux camps, chacun pensait que ceux d’en face la voulait, et y recourrait sans une volonté de fer en face — toute conciliation ou désaveu d’un allié serait donc un dangereux signe de faiblesse, de plus inutile puisque l’ennemi <em>voulait</em> la guerre. La fermeté protégeait donc la paix. Sans cela, difficile d’expliquer que Poincaré en Russie lie sciemment la France aux événements d’une zone aussi instable que les Balkans. Et chaque progrès d’une alliance effrayait l’autre, la poussant à se préparer au pire (un grand classique).</p>
<h3>Facteurs psychologiques</h3>
<p>Ils jouèrent massivement dans l’enchaînement de la crise. Les Serbes en voulurent trop dès 1912, et surestimèrent le poids du soutien russe. Les Autrichiens, exaspérés par les Serbes depuis des années, furent légers en les attaquant sans penser aux terribles conséquences. En cette période sans instance supranationale reconnue, tout abandon de souveraineté était inconcevable — les Serbes ne pouvaient <em>pas</em> accepter l’ultimatum. Les Russes ne comprirent pas que les Autrichiens ne pouvaient <em>pas</em> laisser passer impuni le meurtre du prince héritier. Les Autrichiens auraient pu attaquer dès après le meurtre, ce qui aurait été bien mieux accepté, mais le processus de décision de la double monarchie se traînait (les Hongrois notamment craignaient une invasion des Carpathes par la Roumanie). Les Russes auraient pu attendre pour mobiliser, laissant aux Serbes une chance d’accepter l’ultimatum, ou se contenter d’une mobilisation partielle contre l’Autriche pour ne pas effrayer l’Allemagne, mais leur logistique ne le prévoyait pas. Les Allemands auraient pu se contenter de n’envahir qu’une petite partie de la Belgique (<em>tout le monde</em> s’y attendait) : cela aurait donné une chance aux pacifistes dans le gouvernement anglais. Mais les militaires allemands (contrairement aux civils) sous-estimaient la Grande-Bretagne.</p>
<p>Clark ajoute une note : la « masculinité » du mâle européen semblait menacée à cette période précise par les évolutions de la société et, par réaction, le besoin de s’affirmer dur et endurant prenait le pas sur les vieilles valeurs aristocratiques, plus accommodantes.</p>
<p>Une chose finalement est sûre : attribuer à l’Allemagne la responsabilité totale de la guerre dans le Traité de Versailles, en plus d’une faute politique à l’époque, était purement et simplement une erreur factuelle. Si les Alliés s’imaginaient dès le début que l’intransigeance autrichienne venait de Berlin, la paranoïa régnait partout.</p>
<h3>Digestion</h3>
<p>C’est un pavé (pas loin de 600 pages en anglais sans les notes) et, forcément, les affrontements diplomatico-commerciaux subtils et pleins de sous-entendus ne sont pas la meilleure matière pour des rebondissements trépidants mêlés de réparties cinglantes, surtout quand on connaît déjà la fin. J’ai été un peu frustré par la relation du déclenchement des hostilités : Clark s’arrête aux mobilisations et ne relate pas l’assassinat de Jaurès, par exemple (est-il tellement important d’ailleurs, vu par un Anglo-Saxon ?) ni les réflexions des Français dans les derniers jours.</p>
<p>Si le passionné d’histoire trouvera son compte dans les causes plus ou moins immédiates de la mort de millions de soldats et l’effondrement de quatre empires, le dilettante risque de trouver la chose indigeste. <em>The Sleepwalkers</em> est pourtant déjà devenu une référence sur le sujet. Et comme je le disais au début, le XXIè siècle semble en rejouer des pans entiers.</p>
<p>Quant à l’amateur d’uchronies, il croulera sous les points de divergence potentiels…</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Contre les Turcs et autres non-Européens, on s’en donnait par contre à cœur joie.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/786« Guerres & Histoire » n°20 d’août 2014 : qui a eu la peau de la Wehrmacht ? et le C-130 Herculesurn:md5:597db747fca5971493946d301b7d598f2014-09-03T22:55:00+02:002014-09-08T21:23:29+02:00ChristopheHistoireAllemagneautodestructioncatastrophecommunismeEmpire soviétiqueEuropeguerrehistoireLibérationlogistiquenationalismeorganisationRussieSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unisévolution <p>« Alliés ou Armée rouge : qui eu la peau de la Wehrmacht ? » : voilà un titre bien vendeur, comme si la défaite du Reich n’était dû qu’à l’un ou l’autre (et sans qu’aient pesé les combats en Italie ou dans les airs au-dessus de l’Allemagne). Le texte est plus sérieux (et ne répond pas à la question d’ailleurs). Un autre article s’étend sur l’increvable avion de transport (et plus) C-130 Hercules.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_20.jpg" title="GuerreEtHistoire_20.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerreEtHistoire_20_m.jpg" alt="GuerreEtHistoire_20.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<h3>Overlord et Bagration : la tenaille</h3>
<p>La France a été libérée par les Anglo-Saxons à la suite du Débarquement de Normandie, et des combats se sont déroulés chez nous, il est donc normal que nous nous souvenions mieux de ces événements que de « Bagration », offensive soviétique lancée à peu près au même moment. La synchronisation des deux attaques date de la conférence de Téhéran de 1943, moment où Churchill doit abandonner sa stratégie « périphérique » (Italie, Balkans...) face aux Américains qui veulent foncer sur la Ruhr.</p>
<p>Le résumé d’Overlord n’apprend rien de neuf, et résume que la préparation de cette opération effroyablement complexe a été exemplaire, y compris les volets sur l’intoxication de l'ennemi (Fortitude...), et l’exécution en général saine.</p>
<p>À l’est, Staline et <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">Joukov</a> veulent profiter à fond de l’effet Overlord, et montent une opération bien plus ambitieuse que les précédentes. Ou plus exactement, suivant l’art soviétique de la guerre, une cascade d’opérations, de la Finlande à la Roumanie. Bagration, sur l’axe central en Biélorussie, n’est que la plus notable. Staline veut récupérer le maximum de territoires : sa paranoïa lui fait craindre un renversement d’alliances, notamment si Hitler est renversé. Le but ultime (atteint) est le passage de la Vistule, avec la moitié ouest de la Pologne et l’Allemagne en perspective.</p>
<p>Bagration et consorts alternent les attaques sur différents fronts, attirant les blindés allemands là pour attaquer ailleurs. Les Soviétiques, saignés pendant la guerre, compensent des effectifs plus réduits par une expérience croissante et surtout une écrasante supériorité en matériel (en partie américain). Les Allemands doivent lancer leurs réserves en France et ne peuvent résister.</p>
<p>L’effondrement du groupe d’armées Centre (Biélorussie) signe la pire catastrophe de l’histoire de la Wehrmacht, marquée par des paniques rarement vues jusque là. Hitler, fidèle à lui-même, retarde au maximum des retraites qui auraient permis de raccourcir le front. Le rouleau compresseur est lancé, il progresse sur des centaines de kilomètres, dépasse les frontières soviétiques de 1941, entre dans les Balkans, pour ne s’arrêter qu’à Varsovie. Les Allemands perdent un million d’hommes à l’est entre juin et fin août 1944. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walter_Model">Model</a>, brillant tacticien envoyé par Hitler de la Biélorussie à la Normandie, ne peut que limiter les dégâts, mais porte des coups rudes aux unités trop avancées (Arnhem, Varsovie...).</p>
<p>Les Alliés exploitent à fond leurs deux percées : à la fin de l’été 1944, Hitler a perdu la France, la Belgique, la moitié de la Pologne et de la Grèce, quasiment tous les États baltes ; la Finlande, la Roumanie et la Bulgarie ont changé de camp ; les Soviétiques sont même entrés en Prusse orientale.</p>
<p>Mais après soixante-dix jours, quasiment simultanément en septembre 1944, Russes et Américains arrivent au bout de leur logistique après avoir libéré des pays aux ports et réseaux routiers et ferroviaires ruinés, et vont donner aux Allemands le temps de se ressaisir pour leurs dernières offensives.</p>
<p>Un article termine sur le complot du 20 juillet contre Hitler : son échec, au moment où la situation militaire est catastrophique sur deux fronts, soude le pays autour du Führer, renforce la répression, et élimine la résistance. La peur de la défaite, des Russes, d’une révolution communiste permettent au nazisme de tenir l’Allemagne plus que jamais. La seule issue est l’anéantissement.</p>
<p>Au passage, je signale <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/2014/07/jean-lopez-operation-bagration-la.html">cette page</a> sur le livre <em>Bagration</em> de Jean Lopez (auteur principal des articles résumés ici, et directeur de <em>Guerre & Histoire</em>), où <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/p/lauteur-du-blog-stephane-mantoux.html">Stéphane Mantoux</a> trouve de nombreux trous dans la bibliographie et fait de nombreuses remarques sur tel ou tels point. Manifestement il y a un contentieux entre lui et Jean Lopez, je ne peux juger, je note que le livre est au moins une bonne compilation, et lisible, des recherches issues d’autres langues.</p>
<h3>C-130</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/.RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek_m.jpg" alt="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons - https://commons.wikimedia.org/wiki/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg#mediaviewer/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg" /></a></p>
<p>C’est un nom mille fois entendu ou lu : le C-130 Hercules est la bête de somme multifonction de nombre d'armées. L’<a href="http://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-pnote-754-4">ouranocratie</a> américaine repose au moins autant sur cet avion de transport pas très <em>sexy</em> que sur les avions de chasse.</p>
<p>Soixante ans après sa conception, on le produit encore, évidemment remis au goût du jour et décliné en d’innombrables versions. Les avions conçu pendant la guerre avaient montré leurs limite pendant le pont aérien sur Berlin notamment, et l’Air Force avait commandé un avion conçu d’emblée comme militaire (et non une déclinaison militaire d’un avion civil), capable de remplir de nombreuses missions différentes.</p>
<p>Lockheed créa alors un avion « bien conçu, mais pas révolutionnaire ». Bref, une merveille d’ingénierie bien pensée. Par exemple, la fameuse rampe arrière permet de débarquer du matériel (parfois sans atterrir !) ou de larguer des parachutistes. Les ailes sont hautes et les trains d’atterrissage rangés dans des nacelles pour dégager la cabine. Il se contente de peu pour décoller et atterrir : c'est le plus gros appareil à avoir apponté et redécollé d’un porte-avion ! Et l’autonomie est respectable.</p>
<p>Transport de troupes, de matériel, parachutages, ravitaillement en vol, bombardier d’eau civil, lance-drone, batterie d’artillerie volante... : il fait tout. Et partout : c’est un énorme succès commercial (y compris en Iran, en Inde ou en France, qui l’utilise pour l’intervention au Mali).</p>
<p>Bref, un coucou qui volera encore un siècle après sa conception !</p>
<h3>Divers</h3>
<p>Sinon dans ce numéro :</p>
<ul>
<li>Un ancien pilote vietnamien raconte comment il a descendu un Phantom américain en 1972... et comment il a retrouvé l’un des pilotes et est devenu son ami. Quelque part, c’est totalement surréaliste.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pendant l’évolution de l'espèce humaine, la face se serait aplatie pour mieux encaisser les coups de poings, au moment où la main devenait un poing bien percutant. Le mythe du bon sauvage en prend encore un coup. Nous descendons donc de ceux qui encaissaient — et donnaient — le mieux les coups. (<strong>Mise à jour</strong> : <a href="http://www.dinosauria.org/blog/2014/06/26/le-cassage-de-gueule-est-il-aux-origines-de-lhumanite/">une grosse objectction ici</a>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Des photos des guerres balkaniques en 1912-1913 : un avant-goût de la Grande Guerre, y compris tranchées sur front bloqué, mitrailleuses et artillerie, qui aurait dû mettre la puce à l’oreille des grandes puissances sur ce qui les attendait.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les généraux sudistes n’étaient pas forcément meilleurs que ceux du Nord. Cependant, la culture aristocratique au Sud favorisait le métier des armes, et une bonne partie des officiers était donc sudiste, du moins au début.</li>
</ul>
<ul>
<li>La plupart des Français évacués à Dunkerque en 1940 étaient revenus en France avant même l’armistice : ils n’étaient donc pas « disponibles » pour de Gaulle.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-n-20-la-peau-de-la-Wehrmacht-C130-Hercules#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/776« Tambov » (livre collectif) : les Malgré-nous alsaciens & mosellans prisonniers des Russesurn:md5:51f62e95a930a56a31069825f917239c2013-11-02T11:52:00+01:002016-07-08T11:47:59+02:00ChristopheHistoireAlsacecatastrophechaoscommunismecynismedommagedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnageguerrehistoireHistoire de FranceLibérationlivres lusmémoireparanoïaracléeRussieRésistanceSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Tambov.jpg" alt="Tambov.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" />
Tambov ne dira rien à la plupart des Français, mais il réveillera quelques souvenirs de famille douloureux à nombre d’Alsaciens et Mosellans (voire Luxembourgeois). C’était pourtant « simplement » un camp de prisonniers au milieu de la Russie d’Europe, où, à partir de 1942, les Soviétiques ont regroupé les prisonniers « allemands » originaires de l’Alsace et de la Moselle annexées par le Reich, et incorporés de force dans la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. De ce camp, certains sont repartis dans des unités françaises, mais la plupart sont restés jusqu’à la fin de la guerre, ou y périrent.</p>
<p>Tambov n’était pas un camp de concentration, encore moins d’extermination comme en existait dans le camp d’en face : pourtant nombre de prisonniers y moururent ou survécurent dans des conditions misérables. Encore ces derniers figurent-ils parmi les plus chanceux : des 120 ou 130 000 Malgré-nous, incorporés de force dans la Wehrmacht, un tiers n’est pas revenu du front. Sur le front, les déserteurs risquaient l’exécution sommaire aussi bien par leurs camarades allemands que par des Soviétiques rarement au courant de leur situation, ou peu enclins à faire des prisonniers. Ils leur fallait aussi survivre au transfert vers le camp, dépouillés de tout ce qu’ils avaient pu posséder, et sans guère de possibilité de communiquer avec leur famille.</p>
<p>Le camp lui-même était au-delà de l’insalubre : baraques semi-enterrées sans chauffage, mal aérées, où l’on pataugeait parfois dans l’eau. 15 500 Français seraient passés à Tambov, et on ne saura jamais combien y sont morts, sans doute entre 3000 et 5000. Certains anciens accusent le système soviétique ; d’autres excusent les Russes, eux-mêmes réduits à la disette. Le <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/coulage">coulage</a> au fil des intermédiaires explique sans doute beaucoup de choses, ainsi que l’impossibilité de l’administration à remonter des mauvaises nouvelles dans le cadre du système stalinien <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>. Pour couronner le tout, comme il n’y avait pas d’officiers parmi les Alsaciens (les nazis se méfiaient !), il se mit en place dans le camp une hiérarchie bancale. Des décennies après, les conséquences tragiques de certains copinages ne sont pas pardonnées.</p>
<p>La libération des prisonniers a été instrumentalisée par les Soviétiques. Un premier groupe (les « Quinze Cents ») quitta la Russie par l’Iran dès juillet 1944, et l’URSS communiqua largement là-dessus, mais il ne fut pas suivi immédiatement d’autres. Les premiers libérés, une fois hors de portée du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/NKVD">NKVD</a>, vidèrent parfois leur sac à propos des conditions de détention. Cela ne plut pas au Kremlin. Ajoutons des tractations pour récupérer en échange des Soviétiques passés dans le camp allemand pour diverses raisons, et le fait que les ministres français de l’immédiat après-guerre étaient parfois communistes : si l’essentiel des détenus rentrèrent dès l’automne 1945, le dernier Malgré-nous ne revint à Strasbourg qu’en 1955, après avoir été condamné pour espionnage ! Les Soviétiques avaient aussi tenté de convertir certains prisonniers en agents, apparemment en vain.</p>
<p>Ces libérations au compte-goutte, l’isolement du camp, les lacunes dans les listes soviétiques, les destructions d’archives, le chaos apocalyptique et les pertes énormes de la fin de la guerre en Allemagne... laissèrent un illusoire espoir à beaucoup de familles pendant des années. L’activité fut intense lors du retour des prisonniers pour obtenir des précisions sur le sort de ceux qui n’étaient pas revenus.</p>
<p>Les archives se sont ouvertes massivement dès 1991. Les Soviétiques, en bons bureaucrates, avaient tout gardé, et la chute de l’URSS fut trop brutale pour qu’une destruction méthodique d’archives ait été entreprise par les dirigeants déchus. Le travail de dépouillement, délicat et fastidieux, continue encore de nos jours, alors que les survivants disparaissent.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>En cas de refus ou de fuite, la famille des déserteurs partait en camp de concentration. On devient beaucoup moins rebelle et héroïque dans ces conditions.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>C’est le syndrome « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tout_va_tr%C3%A8s_bien_madame_la_marquise_%28chanson%29">tout va très bien, Madame la Marquise</a> », ou encore « surtout pas de vague », typique de nombre de bureaucraties.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/755« Guerres & Histoire » n°15 d’octobre 2013 : l’assassinat de la Luftwaffe, les châteaux forts japonais, Andrinople, la guerre du Kippoururn:md5:40afaf14fbe55fb16c3b8e60eed27eea2013-10-25T16:56:00+02:002016-07-07T13:24:48+02:00ChristopheHistoireAfriqueAllemagneAntiquitébon senscatastrophechâteauxcoup bascynismedommagedéshumanisationEmpire romainespionnageEuropegigantismeGrandes InvasionsguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationlivres luslogistiquemercenairemobilitéMoyen ÂgeorganisationperspectivePremière Guerre MondialeprovocationpétroleracléesaturationSeconde Guerre MondialespéculationsécuritétotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis <p>Avec « l’assassinat de la Luftwaffe » en gros titre, <em>G&H</em> fait dans le racolage digne de ces revues militaires qui bavent devant le matériel, surtout celui avec croix gammée. Si je ne connaissais pas le sérieux de la revue et son manque d’admiration pour la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, je me serais méfié.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_13.jpg" alt="GuerreEtHistoire_13.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>En fait, point d’hagiographie des ailes allemandes, mais la description de l’opération soigneusement planifiée visant à briser la chasse allemande début 1944, en utilisant les bombardements sur l’Allemagne comme appât, et dans le but de conquérir la maîtrise du ciel avant le Débarquement.</p>
<p>À part ça, excellent numéro, avec les analyses de fond habituelles. Je suis à chaque fois fasciné par les tendances de fond ou les modèles mentaux des différents adversaires qui expliquent bien des événements. Et en même temps, bien d’autres choses ont tenu à si peu...</p>
<p><em>Comme d’habitude, les remarques personnelles sont en italique.</em></p>
<h3>Le prisonnier miraculé</h3>
<p>Le soldat soviétique Sacha Volkov raconte sa terrible odyssée dans l’interview qui ouvre le numéro. Prisonnier à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Koursk">Koursk</a> en 1943, il subit les terribles marches vers les camps de prisonniers, eux-mêmes souvent des mouroirs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, pour finir à Buchenwald. Il a survécu, mais il insiste sur sa chance.</p>
<h3>La guerre des Boers</h3>
<p>Entre 1899 et 1902, les Anglais en ont bavé pour mettre au pas et annexer deux États sud-africains fondés par d’anciens immigrants néerlandais (et français, des huguenots chassés par Louis XIV !). Ces teigneux fermiers, bien équipés en matériel allemand, n’ont été mis au pas que grâce au blocus naval, à la terreur, à la déportation des familles dans des camps de concentration au taux de mortalité effroyable. Un avant-goût des horreurs du XX <sup>è</sup> siècle...</p>
<h3>Opération Pointblank</h3>
<p>En 1943, les Alliés décident de se débarrasser de la Luftwaffe, condition <em>sine qua non</em> pour tenter un débarquement l’année suivante. L’année 1943 montre aussi que les bombardements massifs ne suffiront pas à faire plier le Reich, une illusion longtemps entretenue avant guerre (<em>en 1940, le Blitz avait pourtant montré que bombarder les villes ne cassait pas le moral des agressés, au contraire</em>). Pire, ils ont un coût humain effroyable pour l’attaquant : les forteresses volantes (B 17) ont beau être hérissées de mitrailleuses et voler en formation, mais sans escorte, elles se font souvent hacher menu (parfois plus de 30% de pertes).</p>
<p>La solution : escorter ces bombardiers par une chasse capable de les accompagner jusqu’à Berlin. Étonnamment, ce n’était pas prévu jusqu’ici : les réservoirs d’essence largables, pas si faciles à mettre au point sans altérer les capacités de l’avion, ne seront prêts que fin 1943, et l’avion idéal (P-51 Mustang) en 1944.</p>
<p>Cette escorte ne sert en fait pas à protéger les bombardiers. Début 1944 sa mission devient la destruction de la chasse allemande : les bombardiers ne sont plus qu’un appât. Les missions s’enchaînent, toujours plus massives (culminant en une bataille aérienne entre 2000 appareils le 24 février 1944 !). Les Allemands sont obligés d‘affecter des ressources énormes à la défense aérienne de leurs villes, et en quelques semaines de pilonnage intensif, la chasse allemande est laminée.</p>
<p>Göring n’avait pas prévu ces escortes lointaines et les chasseurs lourds allemands ne sont pas prêts face à la chasse allié. Ils deviennent la cible principale alors qu’eux-mêmes visent d’abord les bombardiers. Puis le cercle infernal s’enchaîne pour la Luftwaffe : pénurie de chasseurs, peu favorisés jusque là par la Luftwaffe au profit des bombardiers ; appareils pas assez vite construits par des usines elles-même cibles majeures, certes pas aussi gravement touchées que le pensent les Alliés, mais dispersées par crainte des bombardements ; pénurie de pilotes, de plus en plus vite et mal formés <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> ; siphonnage de tous les appareils disponibles pour la défense aérienne ; réquisition par la DCA de nombreux gros canons et de précieuses munitions qui manqueront sur le front...</p>
<p>L’opération Pointblank se révèle un succès total : en quelques semaines la Luftwaffe a perdu ses meilleurs pilotes de chasse et des milliers d’appareils, et peine à remplacer les avions quand les usines américaines tournent à plein. Les bombardiers se concentrent alors sur les voies de communications vers la zone du Débarquement, et le pétrole. La chasse allemande, dispersée sur trois fronts, laisse la totale maîtrise du ciel aux Alliés jusqu’à la fin de la guerre, ce qui facilitera grandement leur victoire.</p>
<p>Pointblank ne sera jamais rééditée. L’US Air Force acquiert son indépendance, et se concentre sur le bombardement, notamment atomique, revenant ainsi aux erreurs des débuts de la guerre. Le Vietnam et l’amélioration des défenses sol-air (guerre du Kippour) montrent que la supériorité aérienne n’est jamais un acquis. Surtout, les États-Unis considèrent le ciel comme leur chasse gardée et la base de leur puissance : on peut les considérer comme une <em>ouranocratie</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</p>
<h3>Guerre du Kippour</h3>
<p>Les espions annonçaient une attaque imminente, l’ennemi cachait à peine ses préparatifs, et ils avaient une connexion discrète sur ses communications : pourquoi la guerre du Kippour de 1973 fut-elle une telle surprise pour les Israéliens ? L’article rejette l’essentiel de la faute sur un péché d’orgueil (sous-estimer les Arabes après les victoires précédentes, et considérer que les Égyptiens n’attaqueraient pas tant qu'ils ne disposeraient pas de certains moyens de bombardements), et le refus du chef des renseignements extérieurs de ne pas activer ses « moyens spéciaux » (cette bretelle sur les communications égyptiennes) de peur de les griller. Israël croit à un exercice jusqu’au dernier moment, et passe à deux doigts de la catastrophe.</p>
<p>(<em>Cette peur de trahir ses sources au point qu’on ne les utilise même plus est courante chez tous ceux qui sont sur la défensive et ont peu d’atouts, comme les Anglais avec Enigma pendant la Seconde Guerre Mondiale.</em>)</p>
<h3>Andrinople</h3>
<p>Cette bataille marque peut-être la fin de l’Antiquité : les Goths écrasent l’armée romaine tout prêt de Constantinople. Pourtant les Goths étaient déjà des alliés (fédérés), venaient en réfugiés pacifiques, et on leur avait promis des terres en Thrace. La cupidité d’un gouverneur et l’incompétence de l’administration les poussent à la révolte <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.</p>
<p>Sous-estimation de l’adversaire (en partie déjà formé à la romaine !), incapacité de l’Empire à lever de grandes armées, stratégie inadaptée, indiscipline de troupes, et rôle décisif de la cavalerie lourde goth : c’est un désastre et l’empereur Valens y laisse la vie. Les conséquence directes sont finalement faibles (les Goths n’arrivent pas exploiter leur victoire, et le nouvel empereur d’Orient, Théodose, leur donne ce qui avait été promis au départ), mais symboliquement tout a changé : ni le prestige ni l’armée de Rome ne s’en remettront jamais, les Goths iront finalement piller les Balkans, Rome... et la cavalerie lourde dominera à présent les champs de bataille, comme tout au long du Moyen-Âge.</p>
<h3>Les châteaux forts japonais</h3>
<p>Même cause, mêmes effets : le Japon du XVè siècle se fragmente en seigneuries en guerre permanente, et comme en Europe un demi-millénaire plus tôt apparaissent des châteaux forts, à la fois résidence d’une lignée, centre de pouvoir et point de résistance majeur. Pourtant, le Japon connaît déjà l’artillerie, qui est à l’origine de la disparition des châteaux forts en Europe au même moment !</p>
<p>Le château fort japonais diffère cependant par sa structure. En raison des tremblements de terre, il se rapproche déjà plus de la cité fortifiée aux très épaisses murailles, quasiment des bastions, que des hauts châteaux élancés. L’artillerie ou la sape se révèlent donc beaucoup moins efficace. La conquête de ces châteaux pleins de pièges coûte très cher aux assaillants. (<em>Vauban aurait été ravi.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Le <strong>colonel Brémond</strong> devrait être aussi connu que Lawrence d’Arabie. Il commandait les quelques troupes françaises qui ont rendu de fiers services à la rébellion arabe de 1916. Mais la métropole lui accorda peu de moyens, et son talent littéraire était plus faible. (<em>J’adore les faces cachées des légendes.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Projet Habbakuk</strong> : en 1942, un projet de porte-avion géant insubmersible, à base de glace mélangée à de la pâte à papiers, enthousiasme Lord Mountbatten et Churchill. Le projet capote, à cause des difficultés techniques, et surtout parce qu’en 1943 les Alliés reprennent déjà le contrôle de l’Atlantique. <br />(<em>Encore un de ces projets fous pour les amateurs d’uchronie. D’un autre côté, si certains projets ont échoué, c’est effectivement qu’ils étaient vraiment infaisables ou avec un rapport bénéfice/coût trop faible. Un des avantages des Alliés sur les nazis était de savoir arbitrer en faveur du fiable/pas cher/facile à maintenir face au monstrueux/prestigieux/coûteux.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler</em></strong> : les chroniqueurs m’ont donné l’envie de me ruer sur cette biographie du maréchal soviétique (<strong>2014</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">chroniquée ici</a>) . Il n’avait reçu aucune instruction mais s’est révélé plus doué que les généraux allemands pour la guerre moderne ; il a survécu à toutes les guerres de la Russie et de l’URSS, et même au stalinisme. <br />(<em>Seul bémol : l’auteur comme le rédacteur de la critique font tous les deux partie du comité éditorial de la revue. Même si c’est ouvert, ça fait quand même un peu mauvais mélange des genres.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>J’aime bien la chronique dialoguée de Charles Turquin, à la fin : Waterloo et Bir Hakeim sont des victoires anglaise et française, mais... d’où venaient en fait les troupes ? <br />(<em>Rien de neuf sous le soleil. Aux Champs catalauniques, les Germains étaient majoritaires dans les troupes d’Attila comme dans celles d’Aetius.</em>)</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Un des numéros précédents avait décrit les lacunes fondamentales de l’armée allemande, notamment la recherche systématique des batailles décisives, un concept anachronique au XXè siècle. Les gaffes stratégiques majeures des nazis (guerre sur deux fronts, fascination pour le gros matos invulnérable mais trop coûteux à produire...) n’a été qu’une seconde couche.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Le traitement des prisonniers de guerre soviétiques relevait de l’extermination : 3,3 millions de morts, notamment de faim, et surtout en 1941-42 avant que les nazis se disent qu’il faudrait plutôt les faire travailler.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Pendant ce temps les Américains développent des moyens de formation considérables, retirent leurs pilotes expérimentés du front et les utilisent comme formateurs.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Terme forgé sur le modèle de la thalassocratie athénienne. C’est logique puisque les transports sont forcément aériens à l’échelle d’une superpuissance planétaire. Google ne connaît bizarrement qu’une occurrence du mot — comme quoi il n’indexe pas tout. Et je me demande si un jour il y aura une spatiocratie ou une cosmocratie ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Je sens comme une résonance avec notre époque...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/754« World War Z », de Max Brooks (le bon livre, pas le navet au cinéma)urn:md5:864d70343e0a2e56a292e9b1e4ac83722013-08-31T19:57:00+02:002016-07-07T12:40:00+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationapocalypsecataclysmecatastrophechaosChinecouragedommagedéshumanisationgaspillageguerreintelligencelivres luslégendes urbainesoptimismeprise de têteracléesolidaritéspéculationsurréalismesécuritéténacitéÉtats-Unis <p>Les histoires de zombie sont à la mode, on frise même la saturation. Le film récemment sorti s’inspire de ce très prenant livre, mais hormis le thème (les zombies attaquent et la société ne s’effondre pas totalement) et quelques bonnes idées il n’y aucun rapport. Non, je n’ai pas vu le film mais j’ai lu <a href="http://www.nioutaik.fr/index.php/2013/07/19/651-world-war-z-la-critique-pourrie">cette très longue critique de Nioutaik</a>, écrite au napalm, et je me sens autorisé à faire le parallèle.</p>
<p>Contrairement au film qui narre les aventures d’un représentant en produits capillaires <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, le livre est qu’une suite d’anecdotes et témoignages de survivants de tous les horizons, sans lien direct. Le panel est très large : politiques, militaires de tous bords, anciens petits et gros trafiquants, mères de famille, enfants, etc.</p>
<p>Bizarrement, dans un film de zombies, il ne faut pas s’attacher aux personnages : on sait qu’ils vont tous y passer. Mais pas ici, puisque les narrateurs sont des survivants d’après-guerre (il est clair d’entrée que l’invasion zombie a été repoussée et que le monde est en ruines). On peut alors s’intéresser à eux : ce sont leurs tripes qui parlent.</p>
<p>Le livre n’est pas trop américano-centré, ça change. Si les USA ne sauvent pas le monde, ils tiennent quand même beaucoup mieux le choc que les Russes ou les Chinois. Chaque pays s’en sort différemment (ou pas) : Islande, Cuba, Corée du Nord...</p>
<p>Comme dans tout film d’horreur, on sent le plaisir de l’auteur qui se paye la tête de ses lecteurs, passifs bourgeois aveugles à leur hallucinant niveau de confort — qu’ils vont perdre. Les pages sur les militaires américains obligés de lâcher leurs F22 et leurs rayons de la mort pour se limiter au fusil et la pelle valent le détour. Les habitants des autres pays n’en sortent pas tous grandis non plus. Certains passages semblent surréalistes, comme des guerre civiles, voire atomiques, en pleine invasion mondiale. D’autres histoires redonnent la pêche, certaines désespèrent.</p>
<p><em>World War Z</em> est bien plus optimiste que la (très bonne) BD <em>Walking dead</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, même si on y retrouve un thème commun : en cas d’effondrement de la civilisation, le principal danger ce ne sont pas les zombies, mais parfois les autres survivants. Ici la civilisation ne disparaît pas, on est même relativement proche du « même quand la situation est désespérée, avec de l’intelligence et de la gniaque on s’en sortira » (oui, il y a un passage sur la propagande de guerre), même si les gâchis est monstrueux.</p>
<p>Évidemment, dans le monde réel, personne ne croit aux zombies, le concept n’a aucune plausibilité et il est étonnant qu’il ait tant de succès. <em>World War Z</em> est donc un excellent exemple de « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Suspension_consentie_de_l%27incr%C3%A9dulit%C3%A9">suspension d’incrédulité</a> », puisqu’il est intelligemment construit, décrit des comportements humains souvent très rationnels, et n’en appelle pas qu’à nos peurs enfouies dans un but distrayant — du moins au premier abord.</p>
<p>Dans notre civilisation plus fragile que jamais, se poser la question de nos comportements collectifs et individuels en cas de très gros pépin ne peut être que salutaire. C’est peut-être le premier livre sur les zombies qui soit un tant soit peu optimistes sur <em>nous</em>, au moins sur le long terme. (D’un autre côté on ne fait ni bon film ni bon livre avec des pompiers qui éteignent les feux à temps.) Fautes d’ennemis vraiment identifiables (communistes, Japs, nazis...), avons-nous à présent besoin de nous inventer une menace encore plus incroyable que des extraterrestres ? Depuis Wells, l’envahisseur venu des étoiles est usé jusqu’à la corde, et n’offre pas le même niveau de mal pur qu’un zombie issu de nos propres rangs. Les zombies sont presque indestructibles et immortels (ah, ces zombies paumés qui se réveillent au dégel ou attaquent les scaphandriers dans les grands fonds !), n’ont aucune hiérarchie, ne se rendront <em>jamais</em> et il faudra les abattre jusqu’au <em>dernier</em>.</p>
<p>Étonnamment, il y a un point commun avec une vieillerie comme les <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/06/09/345-les-croises-du-cosmos-de-poul-anderson">Croisés du comos</a></em> de Poul Anderson, où c’est le plus stupidement agressif qui l’emporte sur le civilisé pacifique et embourgeoisé.</p>
<p>Les témoignages des victimes des zombies ou des soldats de la reconquête rappellent furieusement certaines des plus glauques heures de la Seconde Guerre Mondiale. Avons-nous besoin de fiction pour nous rappeler ce genre d’horreur ? Est-ce plus « réaliste » parce que situé dans notre monde actuel ? <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Bref : excellent bouquin, plus profond qu’il ne paraît au premier abord, et difficile à lâcher. Je ne regrette pas l’impulsion d’achat. Je l’ai lu en français, et les annotations sur quelques références culturelles américaines ne sont pas de trop. Évidemment ce n’est pas pour enfants.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Comme l’explique Nioutaik dans sa critique, il est clair que Brad Pitt ne sert qu’à convaincre ces dames à suivre leur mec dans une salle noire voir un film d’horreur.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Jamais vu la série télé.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Je suis en train de lire </em>Bloodlands<em>, livre d’histoire récente à dix mille morts par page, et il me faut bien reconnaître un certain sentiment d’irréalité...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/749« La mort du Melkine » d’Olivier Paqueturn:md5:d3922700503d70a877df2480858c2beb2013-08-04T12:57:00+02:002023-12-27T11:58:44+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesautodestructioncatastrophecivilisationcommunicationdéshumanisationenseignementimpérialismelivres lusmémoirescience-fictionspace operatotalitarismeutopieéducation <p>Ce roman de SF récemment paru m’est arrivé dans les mains un peu par hasard (merci Pédro). En tant que tome central d’une trilogie, il reste à peu près compréhensible indépendamment.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lamortdumelkine.jpg" alt="lamortdumelkine.jpg" class="media-right" /></p>
<p>Sur tous les mondes où il passe, un astronef-université, le <em>Melkine</em>, sauve une poignée d’élèves des pièges du conditionnement culturel. Cette dernière technique impose aux habitants de chaque planète des us et coutumes artificiels, bien qu’inspirés en général de civilisations terrestres passées. Bref, le <em>Melkine</em> tente d’ouvrir les esprits et de faire sauter les œillères imposées par ce conditionnement, tout cela très (trop ?) progressivement. Parallèlement, le transport et la communications instantanés apparaissent. En quelques années, les anciens élèves du <em>Melkine</em> dispersés constatent le début de l’effritement du conditionnement, certes souhaité, mais avec des conséquences indésirables. Il est clair qu’Olivier Paquet s’amuse dans la description de plusieurs civilisations basées sur l’Autriche impériale ou l’empire aztèque qui découvrent d’autres influences (un lien avec notre mondialisation culturelle ?).</p>
<p>À l’échelle de l’univers, les détenteurs des moyens de communications massifs, les Fréquences, s’affrontent pour l’hégémonie et la main-mise sur tout l’univers connu. <em>La mort du Melkine</em> s’achève sur le très attendu face-à-face entre les deux dernières Fréquences : la Technoprophète, grande méchante de service, à l’idéologie brutale et hélas peu décrite dans ce tome, et Ismaël, ancien élève du <em>Melkine</em>, surdoué et banni dans le premier tome.</p>
<p>Si j’en crois les critiques sur le web, le premier tome péchait par des personnages adolescents un peu sommaires. Quinze ans après, dans la <em>Mort du Melkine</em>, l’excès serait presque inverse, les rapports torturés entre les anciens, sinon leurs histoires de cœur, dominant presque trop les événements scientifico-politiques. Certes je n’ai pas lu le premier livre, et le troisième pourrait me donner une autre perspective.</p>
<p>Le personnage le plus intéressant reste bien sûr Ismaël, devenu superpuissance galactique, dont les scrupules tombent avec la montée en puissance. Son empire est parti d’une civilisation imitant l’ancienne secte des Assassins, mais ceux-ci semblent bien pacifiques voire douillets (« mon Dieu, j’ai abattu un astronef qui fonçait sur nous, n’a pas respecté les avertissements et était tellement mal entretenu qu’il a explosé au premier coup de semonce ! »). Est-ce une conséquence du manichéisme trop marqué entre les deux Fréquences ultimes ? (oui, en face la Technoprophète va jusqu’à torturer ses robots et buter les ingénieurs inefficaces.)</p>
<p>Quant au <em>Melkine</em>, symbole universel, c’est en fait le grand absent de l’essentiel de l’histoire, bien que présent dans tous les esprits.</p>
<p>Point faibles : l’action languit, surtout dans la première moitié, il faut un peu s’accrocher ; la méchante Technoprophète est sous-utilisée (quitte à avoir une psychopathe, autant l’utiliser) ; les angoisses existentielles de personnages en fait secondaires prennent trop le pas sur le reste. Je me demande s’il n’a pas simplement manqué deux cent pages à l’auteur pour développer toutes les facettes de son univers (l’inverse du problème de Robin Hobb). Et puis il y a ces petits trucs qui m’énervent et cassent ma suspension d’incrédulité : autant de prénoms français dans un monde futuriste, est-ce réaliste ? Les chefs des Fréquences semblent omnipotents, et pas du tout soumis à l’avalanche de tentatives de pression et d’arbitrages typique de tout chef d’État, absolu ou démocratique. Des opérations de conquête de planète semblent se planifier en quelques pages avec une poignée d’astronefs (il y a peu de repères temporels). De manière générale, il semble y avoir très peu de monde dans l’univers sinon les personnages et une masse de péquenots statiques. Certaines innovations technologiques semblent déjà dépassées pour nous (Google <del>Earth</del> Giverne sur écran tactile géant, ouaouh !).</p>
<p>Malgré tout il y plein de bonnes idées dans ce tome, et pour lire parfois la prose de l’auteur sur <a href="http://sf.emse.fr/Lists.html#SFFRANCO">SFFranco</a> je n’en attendais pas moins.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-mort-du-Melkine-d-Olivier-Paquet#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/748« The End » de Ian Kershaw : l’agonie de l’Allemagneurn:md5:8edf1de24e73d2fd8a75ab588386538b2013-07-24T21:59:00+02:002019-02-03T17:39:19+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsecataclysmecatastrophecommunismecoup bascynismedommagedécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegaspillagegigantismeguerrehainehistoireincohérenceLibérationlivres lusmortnationalismeoh le beau cas !panurgismeparadoxepeine de mortpessimismeracismeracléesabotageSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p>Au début j’avais titré « l’agonie du IIIè Reich ». Mais cela aurait été faux : c’est bien l’Allemagne toute entière qui a payé pour quelques mois de résistance inutile et sanglante, au mépris de toute logique militaire.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/the_end_kershaw.jpg" alt="the_end_kershaw.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’autodestruction</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ian_Kershaw">Ian Kershaw</a> s’étonnait qu’il n’y ait pas de livre sur ces derniers mois de la guerre vus du côté allemand ; il l’a donc écrit, et il analyse les raisons de cette incompréhensible obstination allemande à laisser anéantir son pays par le double rouleau compresseur allié — pour <em>rien</em>.</p>
<p>Pourtant, dès l’été 1944, en tout cas au plus tard début janvier 1945 (après l’échec allemand dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes">les Ardennes</a> et alors que les Soviétiques dévastent la Prusse Orientale) il aurait dû être clair que tout était perdu et qu’il valait mieux négocier une reddition. La stratégie de la lutte « fanatique » pied à pied ne pouvait mener à rien. La population était à bout de souffle, les réserves en hommes raclées jusqu’à l’absurde, l’économie étouffée (malgré les talents d’organisateurs de Speer), la Luftwaffe anéantie, les voies de communications en ruine, les villes rasées.</p>
<p>Les chiffres donnent le vertige : sur 18,2 millions de soldats allemands mobilisés en 1939-45, 5,3 millions sont morts, dont 2,6 millions après juillet 1944 — autant en dix mois que dans les quatre premières années de la guerre. Et parmi eux 1,5 million sur le front est : ils ne se sont donc pas défendu que contre les « bolcheviques ».</p>
<h3>Mécanisme pour un suicide collectif</h3>
<p>Dans les dernières semaines, 10 000 soldats tombaient chaque jour. Seuls les plus fanatiques croyaient encore aux « armes miracles » promises par Hitler, ou à l’éclatement de la coalition alliée. Alors pourquoi lutter ?</p>
<p>La réponse est complexe. Les dirigeants nazis étaient parfaitement au courant que les Alliés ne leur feraient aucun cadeau. Pour Hitler, les Allemands s’étaient montré faibles, ils devaient disparaître avec lui. Il est allé au bout de sa démentielle logique suicidaire, mais il a
bien été le seul avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Goebbels">Goebbels</a>. Mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Himmler">Himmler</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bormann">Bormann</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%B6ring">Göring</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Speer_%28p%C3%A8re%29">Speer</a>, les généraux, l’essentiel des <em>Gauleiters</em> (chefs de partis régionaux)... avaient bien l’intention de sauver leur peau, et ceux qui se sont plus tard suicidés allaient être fait prisonniers. Certains se voyaient un rôle dans l’Allemagne d’après-guerre (Speer), voire tentèrent très timidement de négocier dans le dos d’Hitler. La population, qui avait soutenu le nazisme durant une douzaine d’années, ne faisait plus confiance ni au Parti ni au Führer. Pourtant, pour bien moins, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_allemande_de_1918-1919">elle s’était soulevée en 1918</a>, et cela valait aussi pour les soldats.</p>
<p>Pourtant, il a fallu attendre encore une semaine après la mort d’Hitler pour que son successeur l’amiral <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_D%C3%B6nitz">Dönitz</a> jette l’éponge et signe la reddition sans condition face à toutes les armées alliées.</p>
<p>Dönitz, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guderian">Guderian</a>... : nombreux de généraux se peignirent dans leurs mémoires comme de simples exécutants apolitiques. Il est vrai qu’Hitler n’écoutait pas leurs conseils et refusait le moindre repli. Beaucoup rêvaient de sauver les meubles par une paix séparée avec les Occidentaux, mais ils exécutèrent ces ordres absurdes et menèrent le combat de leur mieux, sur les deux fronts et jusqu’à la fin. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Claus_von_Stauffenberg">Von Stauffenberg</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/[Dönitz">Rommel</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow">von Tresckow</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ludwig_Beck">Beck</a> avaient pourtant montré que des officiers, eux-mêmes très nationalistes, étaient capables d’agir — hélas ils étaient l’exception.</p>
<p>L’attentat raté de juillet 1944 est une des clés. D’abord il a remonté la cote d’Hitler auprès des Allemands, vacillante depuis l’enlisement en Russie, bien que le Führer soit resté plus populaire que le Parti nazi. Puis il a conforté le dictateur dans son idée que la Wehrmacht était remplie de traîtres, responsables de tous les échecs. Ensuite, il entraîne la mise en place d’un régime de terreur, réprimant toute déviance, tout défaitisme, toute méfiance envers le Führer, tout doute envers la victoire future.</p>
<p>Le souvenir de l’insurrection de 1918 hantait Hitler. Il avait décidé qu’il n’y aurait pas de réédition de ce « coup de poignard dans le dos ». Ce régime de terreur ira donc <em>crescendo</em>, s’accentuant avec chaque revers : peine de mort pour les déserteurs, les couards, les défaitistes, pour tous ceux osant évoquer une possible négociation avec au moins les puissances occidentales, ou tentant d’éviter d’inutiles combats dans leur ville ; cours martiales volantes exécutant elles-mêmes les condamnations ; massacres de civils affichant des drapeaux blancs... Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Werwolf_%28Freisch%C3%A4rlerbewegung%29" hreflang="de">Werwolf</a> devait mener une guérilla dans les zones occupées, et punir les « collabos » (au final sans grand succès, mais il y eut tout de même quelques milliers de morts selon Kershaw).</p>
<p>Parallèlement la pression sur la population s’accentua : Goebbels parvint à dégager des centaines de milliers d’hommes à envoyer au front <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, quitte à désorganiser l’économie et les productions d’armement, au grand dam de Speer. Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Volkssturm" hreflang="de">Volkssturm</a> enrôla des millions de vieux ou très jeunes Allemands dans une armée hétéroclite, mal habillée, très mal armée, sans efficacité militaire et au taux de perte terrible. Dans les zones proches du front, vieux, jeunes et femmes furent contraints de creuser des fossés qui n’ont pas stoppé l’Armée Rouge plus de quelques heures.</p>
<p>La bureaucratie civile laissa place à celle du Parti, omniprésente, sur fond d’affrontement larvé entre Speer et Goebbels, entre ceux qui pensaient à l’avenir et les partisans de la terre brûlée. Le Parti et les SS se mirent à dominer aussi sur le plan militaire (on confia une armée à Himmler, avec des résultats désastreux). On exigeait un sacrifice aveugle des soldats. Il y eut même des kamikazes nazis.</p>
<p>Ainsi la population se retrouva en tenaille entre un Parti punissant cruellement toute déviance ; des conditions de vie de plus en plus difficiles ; des exigences de service militaire ou paramilitaire démentielles ; la menace des bombardements alliés réduisant méthodiquement les villes en miettes ; à l’est la menace des Soviétiques. Les Allemands avaient perdu toute confiance en Hitler mais, épuisés, terrorisés, ils devinrent au mieux attentistes et fatalistes, priant pour que la fin arrive vite (<em>Besser ein Ende mit Schrecken als ein Schrecken ohne Ende</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>) et les plus chanceux dans les zones préservées ne portent pas grande aide aux réfugiés de l’est.</p>
<p>Les soldats ne valaient souvent pas mieux. Également épuisés, tiraillés entre le danger des combats, la perspective des camps en Sibérie ou la liquidation pour couardise, inquiets pour leurs familles dans les villes bombardées ou les zones envahies par l’URSS, ils continuaient le combat — sans illusion pour la majorité. Sur le front de l’est, la conscience de défendre concrètement leur pays et leur famille d’un envahisseur barbare maintenait plus la combativité qu’à l’ouest. La terreur nazie, la menace sur les familles (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sippenhaft">Sippenhaft</a></em>) mais aussi la cohésion avec les camarades limitaient les désertions, pourtant de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de l’avancée alliée.</p>
<p>Les comportements varièrent suivant les fronts. À l’ouest, on craignait les bombardements anglo-américains sur les villes, mais les troupes d’occupation, relativement disciplinées, n’inspiraient pas la peur. Nombre de villes voulurent se rendre pour éviter la destruction : leur sort se joua dans le rapport de force entre notables voulant épargner vies et biens, et nazis jusqu’au-boutistes prêts à sacrifier une bourgade pour stopper les Américains une heure. (Au passage, une pique sur le comportement des Français : leurs troupes n’ont pas été exemplaires et ont commis leur lot de pillages et viols. Kershaw note qu’il y a une amplification possible du phénomène dans la mémoire et les sources : les soldats étaient souvent issus des colonies.)</p>
<p>C’était bien pire à l’est. Les soldats mesuraient parfaitement la barbarie du comportement allemand en Europe de l’Est, et se doutaient, puis surent, que les Russes allaient leur faire payer. La propagande soviétique attisait la haine. Les soldats allemands prisonniers savaient que, même avec de la chance, ils passeraient des années en Sibérie (et une bonne partie n’est pas revenue). Quant aux civils, ils fuyaient en masse pour éviter viols (généralisés), pillage, voire destruction de villes entières. La peur des « Asiatiques », amplifiée par la propagande de Goebbels, mena à des scènes de suicides collectifs dignes des Japonais à Okinawa. Pour les habitants de Prusse ou de Poméranie le salut n’existait que dans la fuite, au milieu d’un hiver terrible — les plus fragiles mourront souvent. <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Les chefs du Parti donnèrent cependant rarement l’exemple du sacrifice qu’ils prônaient. Les premiers à punir toute reculade, ils étaient aussi les premiers à fuir dès que possible, sans oublier leurs biens. À côté de Göring et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hans_Frank">Hans Franck</a>, la palme revient peut-être à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Koch">Erich Koch</a>, à la tête la Prusse Orientale assiégée par les Russes : il refusa la moindre évacuation de civils, mais prit au tout dernier moment la fuite en bateau, en n’oubliant pas sa Mercedes.</p>
<p>Kershaw conclut que l’effarante résistance allemande tenait aussi bien à la structure du pouvoir nazi et à la terreur qu’aux rigidités de la mentalité des soldats allemands, sinon de tout l’appareil institutionnel. Si population et soldats étaient terrorisés et préoccupés par leur survie immédiate, les généraux risquaient bien moins (surtout d’être démis <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>). Si on peut comprendre que les circonstances ou le chaos rendaient un coup d’état impossible, pourquoi n’ont-ils pas au moins « levé le pied » ? Si les Russes et le communisme semblaient un danger tellement effroyable, pourquoi ne pas avoir ouvert le front à l’ouest pour sauver les meubles ? Le serment de fidélité au Führer, l’honneur militaire, toute une tradition militariste allemande d’ordre et d’obéissance inconditionnelle, leur interdisait de tenter quoi que ce soit contre la hiérarchie en place. Après tout, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6">même Canaris avait renoncé à s’attaquer à Hitler</a>. Ce n’est qu’à la mort d’Hitler que Dönitz (paradoxalement choisi par Hitler pour sa fidélité au national-socialisme) s’est senti autorisé à tenter une négociation puis à signer.</p>
<p>Pendant ce temps, l’administration continuait tant bien que mal de fonctionner, elle ne s’effondra pas brutalement. Les fonctionnaires considéraient que cela était leur « devoir », même dans des conditions difficiles, prolongeant ainsi la guerre et les destructions de plusieurs semaines.</p>
<h3>Et si...</h3>
<p>À la lumière de ce mécanisme Kershaw spécule : si Hitler était mort en juillet 1944, les conjurés auraient-ils pu réellement prendre le pouvoir ? Et s’ils avaient accepté la reddition sans condition, les SS auraient-ils suivi, dès 1944, surtout à l’est ? Une nouvelle légende du « coup de poignard dans le dos » serait née.</p>
<p>Pour Kershaw, l’exigence alliée d’une reddition sans condition n’a pas joué fondamentalement dans la prolongation de la guerre. Elle a souvent été présentée comme contre-productive car ne laissant aucune alternative aux Allemands que la lutte jusqu’au bout. Elle n’a cependant pas empêché la tentative de putsch de juillet 1944. C’est Hitler, relayé par son Parti, qui bloquait toute tentative de reddition, pas les généraux, même si ceux-ci obéissaient. En Italie, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Kesselring">Kesselring</a> n’a accepté la reddition de ses troupes qu’<em>après</em> le suicide du Führer. Et si la perspective de livrer des millions de soldats à l’Armée Rouge effrayait tout le monde, même Dönitz s’y est résolu quand Eisenhower a clairement dit qu’il n’y aurait pas d’alternative.</p>
<h3>Les victimes et les lâches</h3>
<p>Ian Kershaw parle aussi de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Dresde">Dresde</a>, qui se croyait protégée par sa valeur architecturale, mais était aussi une cible car nœud de communications et centre industriel. Il y eut pourtant pire, en nombre de victimes (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Operation_Gomorrha" hreflang="de">Hambourg</a>) ou en proportion (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Pforzheim#1918_bis_1945" hreflang="de">Pforzheim</a>).</p>
<p>En parallèle, Kershaw rapporte aussi le calvaire des prisonniers des camps de concentration, décimés dans des marches forcées en plein hiver, où beaucoup, sinon la plupart, trouvèrent la mort, et cela sans plus guère la moindre justification rationnelle pendant les derniers mois (ni otages ni force de travail). Apparemment ils n’obtinrent pas d’aide de la population, toujours abrutie de propagande.</p>
<h3>Après la guerre</h3>
<p>L’ampleur des pertes humaines et des destructions, le calvaire des réfugiés de l’est et la haine du Parti dans les derniers mois poussèrent plus tard les Allemands à se voir aussi comme des victimes du nazisme. Ce n’est pas complètement faux, pourtant ils l’avaient soutenu pendant des années malgré tous ses crimes. Certes une manière de se dédouaner lors de la dénazification, mais une réaction normale : le traumatisme a éclipsé dans l’inconscient tout ce qui l’a précédé. Le travail de mémoire a pris des années.</p>
<h3>Remarques personnelles</h3>
<p>On peut écrire des uchronies sur une fin de guerre différente. L’Allemagne actuelle est née de ce traumatisme : serait-elle devenue si démocratique et pacifique sans le cataclysme de 1945 ?</p>
<p>À la lecture des ordres hallucinants de cruauté et de mépris pour la population ou les soldats, on enrage que certains grands chefs s’en soient tirés : si Keitel a été pendu <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>, bien des généraux qui ont suivi Hitler jusqu’au bout n’ont même pas été condamné à perpétuité par la suite : Dönitz, <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Ferdinand_Sch%C3%B6rner" hreflang="de">Schörner</a>, Kesselring... alors qu’ils ont jusqu’au bout fait appliquer les ordres délirants et surtout la politique de terreur.</p>
<p>Quant à la forme du livre : rien à redire sur le texte, il est clair. La division en chapitre est chronologique, mais chacun traite successivement tous les thèmes. La masse de références à des travaux précédents est impressionnante. Hélas les notes sont en renvoi en fin de livre, et non en bas de page, ce qui est pénible. Or certaines sont très intéressantes et valent d’être lues.</p>
<p>Les termes sont tous traduits, il n’y a quasiment aucun texte en allemand, dommage pour les germanistes qui auraient préféré la version originale des citations.</p>
<p>La version française s’appelle logiquement <em>La Fin</em>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>J’ai connu un Allemand, lycéen à l’époque, qui a eu le choix entre s’engager volontairement dans la Wehrmacht, ou finir d’office dans les Waffen SS.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Plutôt une fin dans l’horreur qu’une horreur sans fin.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que le quart est du Reich devint polonais par la volonté de Staline : la frontière entre Germains et Slaves est donc revenue à la même position qu’en l’An Mil !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Pourtant Kershaw donne lui-même l’exemple d’un général dont la famille fut emprisonnée car il avait reculé sans autorisation. Et la famille de von Stauffenberg a fini en camp de concentration. Les étoiles ne protégeaient donc pas du pire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Pas fusillé comme tout militaire, mais bien </em>pendu<em>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/747“Life After People”urn:md5:eebdf1a12cb562d150c76a0daf652e712013-03-20T00:00:00+01:002016-06-02T10:36:59+02:00ChristopheTemps et transformationsAmériqueapocalypseautodestructioncataclysmecatastrophechaoscivilisationcomplexitédommagedécadenceentropieexaptationgéologiehistoirelyrismemortnatureperspectivepollutionrecyclagesciencesimulationspéculationtempsécologieémerveillementéonsévolution <p><em>Welcome to Earth, population zero.</em></p>
<p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/51xtluUbvcL._SL500_AA300_.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /> Cette série américaine de documentaires a manifestement été inspirée par <em>The World without us</em> (en français, <em>Homo disparitus</em>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/08/25/530-homo-disparitus-the-world-without-us-dalan-weisman">déjà chroniqué et apprécié ici en 2008</a>), d’ailleurs l’auteur du livre fait des apparitions.</p>
<p>Elle en reprend l’hypothèse de départ : toute présence humaine disparaît du jour au lendemain, comme par magie, et sans détruire le reste de la planète qui évolue alors sans nous. Que deviennent le monde et nos villes ?</p>
<p>Bon point, la série utilise comme le livre la mise en perspective historique : la déliquescence de Washington désertée est rapprochée de celle d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Angkor">Angkor</a>, abandonnée à la jungle il y a un demi-millénaire. Mine de rien, il existe de nos jours flopée de cités abandonnées, même récemment, même dans les pays riches.</p>
<p>Nombre d’épisodes rappellent la puissance des éléments : la pluie, la foudre, les inondations mais aussi la neige, les racines des arbres, les fientes des oiseaux, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pueraria_montana#Le_kudzu_en_tant_qu.27esp.C3.A8ce_exotique_envahissante">kudzu</a>, la rouille, les ultra-violets solaires... Notre société a incroyablement modifié le paysage, détourné des fleuves, prélevé et déplacé des masses d'eau gigantesques, asséché des marais, et installé des piscines dans des déserts. Los Angeles retournera au désert quand les pompes s’arrêteront, et les monuments de Washington finiront fossilisés sous le niveau de la mer.</p>
<p>Ce ne sont pas les constructions les plus apparemment solides qui survivront forcément : tout ce qui est en béton armé, bunkers du Mur de l’Atlantique y compris, sera vite rongé par la corrosion. Dans deux-trois siècles, il ne restera plus grand-chose de visible de nos villes ; et dans deux mille ans, peut-être Notre-Dame et sûrement les pyramides. Les derniers témoignages de l’humanité seront des coffres-forts enterrés plein d’or, des sondes dans l’espace, et un rover sur la Lune. La question n’est
pas de savoir si mais quand et comment un pont, un navire de guerre, une statue, la Joconde... disparaîtront.</p>
<p>Le monde que nous laisserons derrière nous ne sera pas le même que celui où nous sommes apparus. Après nous prospérerons peut-être des plantes invasives venues d’autres continents, tenues péniblement sous contrôle (comme le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pueraria_montana">kudzu</a> aux états-Unis), des chiens retournés à l’état sauvage, des chimpanzés lâchés dans des villes vides pleine d’opportunités pour les plus fûtés...</p>
<p>Quelques touches d’humour surnagent au sein d’un commentaire évidemment catastrophiste, par exemple le sort des <a href="http://www.kelchien.com/races/welsh-corgi.php">corgys</a> d’Élisabeth II, obligés de piller Buckingham Palace avant de s’échapper dans le vaste monde.</p>
<p>Des bémols ? Un ton très sensationnaliste, une certaine lassitude après le énième immeuble effondré à cause de l’assaut de l'eau et de la foudre et faute de maintenance ; beaucoup d’effets faciles ; des redites à cause des coupures pubs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Life-After-People#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, et une vision très centrée sur l’Amérique (on voit quand même la Tour Eiffel s’émietter). Ça n’en reste pas moins passionnant.</p>
<p>Attention, c’est uniquement en anglais, sans sous-titre ! Je n'ai cependant eu aucun problème pour comprendre, à part quelques Texans, et pourtant j’écoute peu d’anglais ces temps-ci. Gaffe au zonage si vous vous offrez le DVD.</p>
<p>Site de la série (deux saisons) : <a href="http://www.history.com/shows/life-after-people" hreflang="en">http://www.history.com/shows/life-after-people</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Life-After-People#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Mais comment font les Américains pour supporter de la pub toutes les cinq minutes ? Pour le moment ils n’en mettent pas sur les DVDs, Dieu merci.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Life-After-People#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/715« Guerre & Histoire » n°10 de décembre 2012 : Guerre de Cent Ans, Crimée, Pologne, Maison Blanche brûléeurn:md5:fae08c2dd2296d59b49fc4da560252912013-02-04T22:13:00+01:002016-03-21T12:59:32+01:00ChristopheHistoireAllemagneAntiquitécatastrophechâteauxEmpire romainGrandes InvasionsguerreGuerre de Cent AnsgéopolitiquehistoireHistoire de FranceMoyen ÂgemythemémoirenationalismeperspectivepolitiquePremière Guerre MondialesaturationSeconde Guerre Mondialeuchronieévolution <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/GuerreEtHistoire_10.jpg" alt="GuerreEtHistoire_10.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerre & Histoire n°10" /></p>
<p>J’aime bien ce magazine : à l’école ou dans les livres, on parle très peu de la science militaire alors que son rôle été capital. De plus, les auteurs ne se limitent pas à admirer les « gros tanks de la Wehrmacht qui auraient gagné la guerre si les Alliés avaient gentiment attendu 10 ans qu’ils les construisent en série », comme d’autres magazines, mais traitent aussi d’économie et de société : un précédent numéro parlait du rôle du pétrole dans la Seconde Guerre Mondiale<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Ici, ce sont les évolutions sociales pendant la Guerre de Cent Ans, avec les conséquences jusqu’à nos jours, qui font la couverture.</p>
<h3>Kippour, Crimée, Pologne, Maison Blanche cramée</h3>
<p>Rapidement, ce dont parle aussi ce numéro :</p>
<ul>
<li><strong>Un ancien jeune tankiste israélien</strong> raconte comment en 1973, surpris dans le Golan par l’attaque syrienne, son petit groupe de 13 chars a tenu tête, sans perte, à 450 tanks syriens, et en a détruit la moitié ! La formation, la motivation, et 6° de différence dans l’orientation du canon vers le bas, peuvent littéralement faire des miracles.</li>
</ul>
<ul>
<li>En France, la <strong>guerre de Crimée</strong> (1853-56) a été zappée de la mémoire collective, oblitérée par la défaite de 1870. Il ne reste que quelques noms de lieux, de stations, à Paris. Et pourtant, ce fut le premier conflit photographié. Les clichés présentés ici semblent surréalistes.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La cavalerie polonaise n’a jamais été assez stupide pour charger les panzers de la Wehrmacht en 1939 !</strong> Elle combattait normalement à pied, les chevaux n’étant que des moyens de transport adaptés à un pays aux mauvaises routes. Quelques rencontres imprévues ont été grossies par la propagande allemande, et le mythe perdure encore de nos jours.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La Guerre de 1812 entre États-Unis et Angleterre</strong> marqua sans doute le premier acte impérialiste américain, et ça a plus mal fini encore qu’en Irak. À cause notamment du blocus napoléonien et des mesures de rétorsion anglaises, et voulant « libérer » le Canada sous-peuplé, des « faucons » poussent le Président Madison à l’attaque au nord. Mais l’armée américaine n’est pas organisée, alors que les Canadiens, bien que majoritairement francophones, restent fidèles à la couronne britannique, ainsi que leurs alliés indiens ; enfin la Royal Navy domine les mers. Humiliation, la Maison Blanche flambe. En 1815, les deux camps signent le match nul, la chute de Napoléon éteignant la cause du conflit (et libérant nombre de ressources anglaises...).</li>
</ul>
<ul>
<li>En 451, la célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_champs_Catalauniques_%28451%29">bataille des Champs Catalauniques</a>, mythique sauvetage par le « dernier des Romains », <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aetius">Aetius</a>, des reste de l’Empire romain face aux hordes hunniques d’Attila, a plutôt ressemblé à une bataille entre d’une part des Germains soumis aux Huns (Ostrogoths surtout, Hérules, Gépides, Francs...) et d’autre part des Germains alliés aux Romains (Wisigoths, Alains, d’autres Francs...), sans beaucoup de légions romaines par contre, mais quelques mercenaires huns avec Aetius. Au final, Aetius laisse filer Attila pour éviter une hégémonie wisigothe en Gaule. Attila ira encore piller l’Italie et Aetius, trop puissant, sera liquidé par l’Empereur en personne.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Angleterre a connu au XVIIè siècle sa période républicaine, d’un puritanisme extrême assez difficile à comprendre de nos jours (est-ce qu’on pourrait rapprocher ce mélange de théocratie et de parlementarisme avec l’Iran d’aujourd’hui ?). Cromwell, homme fort du Parlement, a pu s’imposer et écraser l’armée royale grâce à sa <em>New Model Army</em>. Sans stratégie vraiment originale, elle se fondait d’abord sur le mérite et non le sang bleu, sur une base nationale et non régionale, et enfin une part de fanatisme puritain. Assez pour prendre le pouvoir, pas assez pour consolider un régime pérenne qui ne survivra pas à Cromwell.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong><em>Liberty ships</em></strong> : ces milliers de bateaux de transport identiques construits à la chaîne en quelques dizaines de jours parfois sont l’exemple parfait de la toute-puissance industrielle américaine au service des Alliés.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>Plan Schlieffen de 1914</strong> n'aurait pas été, comme on le pensait, vraiment conçu pour éviter la guerre sur deux fronts, mais était à l’origine le plan allemand contre... l’Angleterre (et non la Russie). Avec dans les deux cas la France comme adversaire secondaire à éliminer rapidement <em>via</em> la Belgique.</li>
</ul>
<h3>La Guerre de Cent Ans</h3>
<p>C’est une période charnière, chaotique, pleine de transformations douloureuses : une époque donc « intéressante » selon les critères de la vieille malédiction chinoise. Toutes les cicatrices ne sont pas refermées d’ailleurs, les vagues d’anglophobie et francophobie persistent encore parfois. (Rappelons qu’<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/03/18/318-les-guerres-oubliees-2">on peut considérer qu’il y a eu trois Guerres de Cent Ans</a>...)</p>
<h4>Chronologie</h4>
<p>Rappelons les grandes lignes de ce long massacre entre 1328 et 1453, en soulignant que les campagnes au Moyen Âge étaient brèves et entrecoupées de nombreuses trèves, d’où la durée.</p>
<ul>
<li><strong>Contexte</strong> : Les Capétiens, plus puissante monarchie d’Europe, devaient fatalement un jour rentrer en conflit ouvert avec les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plantagen%C3%AAt">Plantagenêt</a>, qui en plus de l’Angleterre possèdent de gros morceaux de la France (Normandie et Guyenne surtout). Il y avait déjà eu pas mal d’explications musclées avant que Philippe Auguste ne montre qui était le patron un siècle plus tôt. Finalement, des raisons économiques (Flandres) s’ajoutent, et ce sera une querelle dynastique qui déclenchera les festivités. Pour les détails, se référer à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/2005/11/21/34-les-rois-maudits-contexte-ii">mon billet sur le contexte des Rois maudits</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase I</strong> : Les Anglais ne cherchent qu’accessoirement la conquête, ils sont d’abord là pour piller. À Crécy les archers anglais écrasent l’armée de Philippe III. À Poitiers c’est carrément le fils de ce dernier, Jean II, qui se fait capturer, et comme rançon doit abandonner la moitié de son royaume à l’Anglais (mais il garde son trône). Autre catastrophe, la Peste Noire emporte un tiers de la population.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase II</strong> : Plus fûté que son chevalier de père, Charles V délègue au célèbre Du Guesclin les opérations militaires. Celui-ci préfère guérilla et harcèlement aux grandes chevauchées, et le résultat est là : les Anglais reperdent tout leurs gains. Fin du premier round et trève de quelques décennies.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase III</strong> : Le nouveau roi de France, Charles VI, devient progressivement fou. Les querelles pour sa tutelle mènent à une guerre civile entre ses oncles, cousins, et leurs descendants, divisés entre Armagnacs et Bourguignons. Le nouveau roi anglais Henri V en profite, s’allie aux Bourguignons, et prouve que les nobles français n’ont rien retenu de Crécy en les massacrant à Azincourt. La moitié de la France est occupée, et Henri V se fait reconnaître comme héritier de Charles VI, lequel déclare le Dauphin illégitime. Les deux rois meurent en même temps.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase IV</strong> : Le Dauphin et son « royaume du Bourges » résistent un temps à l’envahisseur, puis arrive le catalyseur : Jeanne d’Arc. Charles VII sacré à Reims, la réconciliations avec les Bourguignons signée, la reconquête commence, pendant que l’Angleterre connaît à son tour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Deux-Roses">guerre civile</a>. Les Anglais ne gardent que Calais. Fin du Moyen Âge.</li>
</ul>
<h4>Évolutions sociétales</h4>
<p>En un siècle, les armées féodales (temporaires, dominées par la chevalerie, peu soudées) sont devenues professionnelles (permanentes), puis modernes (disciplinées, avec beaucoup d’infanterie, de l’artillerie...).</p>
<p>Les Anglais innovent avec leurs fameux archers, issus des rangs des petits propriétaires. Malgré un entraînement étalé sur des années, ils étaient beaucoup moins chers que les lourds chevaliers français, forcément nobles, et beaucoup plus nombreux (l’Angleterre était bien moins peuplée que la France à l’époque).</p>
<p>L’entraînement d’autant d’archers et leur équipement nécessitaient une logistique, une planification, une proto-industrie et une quasi-conscription assez incroyables pour l’époque. Voilà pourquoi il y a tant de gens nommés Archer ou Stringer outre-Manche. Cette <em>gentry</em> a en conséquence gagné en poids fiscal puis politique : sont apparus alors les <em>Commons</em>, à côté des <em>Lords</em>, qui constituent encore aujourd’hui les deux chambres du Parlement britannique.</p>
<p>La France n’a pas compris ni cherché cette évolution. La levée en masse n’a jamais été à l’ordre du jour. La noblesse méprisait et la piétaille et ses ennemis, et était allergique au commandement unique : cela mena à Crécy, Poitiers puis finalement au massacre d’Azincourt.</p>
<p>L’armée permanente avait bien été inventée par Charles V, mais c’est l’élimination physique de nombreux nobles à Azincourt qui permet à Charles VII de moderniser le fonctionnement de l’ost royal, y compris son financement (la taille devient annuelle) et son recrutement (« gens d’arme » rattachés directement au roi, puis « francs archers » recrutés dans la population).</p>
<p>Enfin c’est l’artillerie qui fonde la puissance du roi de France : la noblesse n’a pas les moyens de se l’offrir, et ses châteaux ne résistent pas aux boulets. Bien qu’enrôlé, le peuple n’a toujours rien à dire. La suite, en caricaturant : absolutisme et Révolution violente.</p>
<p>Noter que cette émergence du peuple comme force militaire et politique était déjà ancienne et générale (milices italiennes qui fondent l’indépendance des cités ; communes des Flandres qui flanquent la pile à Philippe le Bel en personne ; cantons suisses...), et se poursuivra encore longtemps. Au passage, cela mènera à des batailles bien plus saignantes : fini l’esprit chevaleresque où on voulait d’abord des prisonniers à rançonner. (À rapprocher des Aztèques attaquant les Espagnols avec le même esprit...)</p>
<h4>Le nationalisme</h4>
<p>On savait déjà que le sentiment national français date de cette époque. Je me disais aussi que toute uchronie où les Anglais gagnaient impliquait une assimilation de l’Angleterre par la France : la noblesse anglaise étant parfois plus française qu’anglo-saxonne, ses conquêtes françaises auraient accentué le phénomène, et la différence démographique aurait fait le reste.</p>
<p>J’ai appris par contre que le sentiment national anglais a joué aussi, et contre eux : une victoire et la fusion des deux royaumes aurait mené à l’absorption par des Français honnis. J’aurais aimé plus de détails sur ce point...</p>
<h4>Évolutions technologiques</h4>
<p>L’armée anglaise est organisée autour de leur fameux arc, l’arme de destruction massive de l’époque, adapté à l’attaque par « saturation ». En face, les archers génois engagés par les Français misent sur la précision de leurs arbalètes, mais leur lenteur de réarmement les rend en fait plus adaptées aux sièges et aux batailles maritimes. L’arc perdra cependant de son importance suite à l’amélioration des cuirasses françaises à la toute fin de la guerre et plus tard à cause des armes à feu (plus chères mais plus faciles à maîtriser).</p>
<p>En face, les Français n’utilisent sérieusement l’artillerie qu’à la toute fin.</p>
<h4>La fin</h4>
<p>Quand Bordeaux tombe, Charles VII met fin à trois siècles d’affrontement entre Capétiens et Plantagenêt. Et c’est aussi par l’artillerie qu’au même moment les Turcs prennent Constantinople et achèvent l’Empire romain. Aux deux extrémités de l’Europe sonne ainsi la fin la fin du Moyen Âge.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Article d’ailleurs qui noie dans l’huile la crédibilité de toute uchronie où le Japon ou l’Allemagne gagne la guerre : dans une guerre archi-mécanisée, Américains et Russes avaient quasiment tout le pétrole, et ce que l’Axe a pu ou aurait pu atteindre était trop loin pour le ramener.</em> </p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/728“The Liveship Traders” (« Les Aventuriers de la mer ») de Robin Hobburn:md5:17faba5c7e53637891bf1633e040b6502013-01-14T22:19:00+01:002016-03-18T12:49:48+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesaddictionamourargentcatastrophecourageesclavagefantasygigantismelibertélivres lusmagiepsychologieténacitéémerveillement <p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/LiveshipTraders-ShipofMagic-UK.jpg" title="LiveshipTraders-ShipofMagic-UK.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.LiveshipTraders-ShipofMagic-UK_s.jpg" alt="LiveshipTraders-ShipofMagic-UK.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="LiveshipTraders-ShipofMagic-UK.jpg" /></a></p>
<p>Il y a un bout de temps déjà, j’avais lu et encensé ici l’<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/The-Farseer-Trilogy-de-Robin-Hobb">Assassin royal</a></em> (<em>The Farseer Trilogy</em>), mythique et délicieusement longue trilogie de <em>fantasy</em> <em>light</em> de Robin Hobb. La trilogie des <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Aventuriers_de_la_mer">Aventuriers de la Mer</a></em> (<em>Ship Of Magic</em>, <em>The Mad Ship</em>, <em>Ship Of Destiny</em>) n’est pas la suite, mais se situe quelques années plus tard dans un autre pays du même monde.</p>
<p>Bingtown, gros port des <em>Cursed shores</em> (rivages maudits), est devenu prospère grâce au commerce et (c’est lourdement asséné) la volonté, le courage et le travail des ancêtres des marchands (<em>Traders</em>), opulente oligarchie commerçante. Le <em>summum</em> pour une de ces familles : posséder un bateau vivant (<em>liveship</em>, « vivenef » en français). La provenance et la nature du bois magique dont sont construits ces navires est un des ressorts principaux de l’histoire. Liés à une famille, nourris des souvenirs des trois générations de capitaine morts sur leur pont avant leur éveil, ces bateaux ne peuvent être volés... théoriquement. De plus, certains deviennent fous.</p>
<p>L’histoire tourne autour des Vestritts, famille de marchands dont le capitaine-patriarche décède : le bateau, <em>Vivacia</em>, s’éveille alors. La famille se déchire aussitôt entre Althéa, fille cadette du défunt et très attachée (sentimentalement et télépathiquement) au navire, et son beau-frère Kyle, manipulateur brutal peu enclin à laisser leur mot à dire aux femmes. Cette tête de mule d’Althéa claque la porte, Kyle l’emporte, décide que son fils Wintrow doit quitter ses études dans son cher monastère, et transforme le bateau en transport d’esclaves : il n’y a économiquement pas le choix.</p>
<p>Car l’économie détermine les choix de bien des personnages : la montée de l’esclavage ; l’arrivée de nouveaux marchands étrangers dans la ville ; les dettes des Vestritts envers les constructeurs du <em>Vivacia</em> ; leur rôle dans le mariage de la petite dernière ; les liens avec la capitale impériale ; l’influence sur les équilibres politiques dans Bingtown ; les esclaves enfuis obligés de devenir pirates... Tout cela ne peut être éludé.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/LiveShip-ShipofDestiny-UK.jpg" title="LiveShip-ShipofDestiny-UK.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.LiveShip-ShipofDestiny-UK_s.jpg" alt="LiveShip-ShipofDestiny-UK.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="LiveShip-ShipofDestiny-UK.jpg" /></a></p>
<p>Pendant ce temps, un flibustier, le capitaine Kennit, rêve de devenir roi des Îles Pirates, inextricable archipel de hors-la-loi, anciens esclaves et flibustiers. Et justement il a besoin d’un <em>liveship</em>...</p>
<p>Si Althéa se rapproche du Fitz de l’<em>Assassin royal</em>, qui s’en prend plein la gueule à cause de ses erreurs autant que de ses ennemis, et grandit par ses renoncements et cicatrices ; si sa nièce Malta, petite peste inconsciente au départ, évolue de manière foudroyante bien que là aussi douloureuse ; si Wintrow vaut le détour par ses interrogations existentielles permanentes ; si la grand-mère Ronica joue le rôle du chêne indéracinable ; si le Satrape est délicieusement haïssable d’autosuffisance ; le plus fascinant reste cependant Kennit, capitaine ténébreux à la chance insolente, héros des esclaves libérés, idéalisé voire divinisé, au passé torturé et mystérieux, et surtout aux qualités de psychopathe délicieusement manipulateur.</p>
<p>Je n’ai pu m’empêcher de faire le parallèle en permanence avec l’<em>Assassin royal</em>. Les <em>Liveships</em> le dépassent en partie grâce à la narration plus complexe, les différents fils qui s’entrecroisent, le changement fréquent de point de vue — une manière pour Hobb d’en rajouter dans les quiproquos et les incompréhensions, elle adore ça.</p>
<p>La magie, introduite progressivement dans l’<em>Assassin</em>, joue ici un rôle d’emblée. Mais comme on est très loin du <em>Seigneur des Anneaux</em>, ça passe pour un cartésien comme moi. Ce monde est juste régi par quelques lois supplémentaires par rapport au nôtre.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/LiveShipTraders-MadShip-UK.jpg" title="LiveShipTraders-MadShip-UK.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.LiveShipTraders-MadShip-UK_s.jpg" alt="LiveShipTraders-MadShip-UK.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="LiveShipTraders-MadShip-UK.jpg" /></a> Des thèmes sont communs aux deux trilogies, parlerais-je même de tics ? : les héros qui s’en prennent plein la gueule, au moral comme au physique ; la trahison ; la loyauté à un chef, à sa famille, à un ami ; l’amour inconditionnel ; les difficultés des relations hommes-femmes (il n’y a pas que les hommes à être à la ramasse cette fois) ; le renoncement ; le choix entre obligations et être aimé ; le rôle d’un capitaine ou d’un roi à qui l’on obéit aveuglément ; le poids sur les épaules d’icelui ; les psychopathes manipulateurs ; ceux (parfois les mêmes) qui accusent tous les autres des problèmes qu’ils se sont attirés ; les envahisseurs barbares sans pitié ; la ruine née de la division ; la fin d’un monde policé dans le feu et le sang ; le rôle des souvenirs dans la construction de l’identité ; leur « stockage » magique...</p>
<p>Mais aussi : l’égalité hommes-femmes (au sens socio-économique) ; les ravages de l’esclavage ; son influence économique désastreuse ; la construction d’une nation ; la légitimité pour en faire partie ; la reconstruction d’un monde détruit une fois écartées, convaincues ou soumises les mauvaises volontés ; la vie des marins, leur hiérarchie, leur solidarité ; le viol ; les règles du bon commerce ; la cruauté de la piraterie ; la pesanteur et l’utilité des conventions sociales ; la mécanique des foules en assemblée ; l'émergence de dictateurs dans les périodes troublées ; la réussite par la volonté ; l’enfer pavé de bonnes intentions ; le sens de la vie et de la liberté quand on est un bateau... ou un Seigneur des Trois Royaumes ; et j’en passe...</p>
<p>Et surtout, au contraire de beaucoup de bouquins de <em>fantasy</em>, on est aux antipodes des clichés sur la lutte du Bien contre le Mal ou de la Quête du Prince déchu contre le Prince des Ténèbres pour sauver le monde et restaurer un ordre féodal ancien : à la fois plus humble et plus difficile, l’aventure des Vestritts vise à trouver sa place dans un monde qui change de lois, à préserver ce qui peut l’être, à poser de nouvelles règles, à trouver de nouveaux alliés et partenaires, sans oublier de négocier ses petits privilèges, alors même qu’on n’a guère de cartes en main. De la négociation commerciale, quoi.</p>
<p>Les liens avec la première trilogie sont ténus : quelques mentions de la guerre décrite dans l’<em>Assassin</em>, et un personnage secondaire commun complètement métamorphosé, que je n’ai identifié que grâce à Wikipédia une fois la trilogie achevée.</p>
<p>La fin ? Peut-être un peu trop prévisible, surtout du côté des romances, sans assez de morts pour que ce soit réaliste. Surtout, l’épilogue frustre par sa rapidité. On n’était pourtant plus à quelques centaines de pages de plus pour dénouer tous les fils ou ouvrir de nouvelles perspectives.</p>
<p>À lire la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Aventuriers_de_la_mer">page sur la version française</a>, je ne suis pas sûr d’approuver les adaptations de noms. Peut-être qu’en anglais tout sonne simplement mieux, ou de manière plus cohérente, ou que la <em>fantasy</em> en français m’évoque trop Harry Potter ou Pratchett, bien plus humoristiques. Bref, si vous pouvez, lisez en version originale. Il n’y a que trois tomes après tout : en français il y en a neuf, et j’ai peur que l’histoire ne soit pas assez dense pour donner un intérêt à chaque tome séparément.</p>
<p>Tout ça n’est évidemment pas pour les enfants...</p>
<p>Parmi les critiques sur le net, souvent élogieuses, se détache par exemple <a href="https://requireshate.wordpress.com/2011/05/02/liveship-traders-trilogy-robin-hobb/" hreflang="en">celle-ci</a> (<strong>Mise à jour de 2014</strong> : tombée hors ligne), délicieuse rien que par ses vacheries et sa mauvaise foi admirative.</p>
<p>La trilogie suivante (<em>The Tawny Man</em>) attend déjà dans mon panier d’un libraire en ligne. (<strong>Décembre 2014</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Tawny-Man-de-Robin-Hobb">le compte-rendu est là</a>.)</p>
<p>Ah oui : comme dans l’<em>Assassin royal</em>, il y a des dragons. Et ils sont à baffer.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Liveship-Traders-de-Robin-Hobb#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/725Questions à la con chez XKCD (7 à 12)urn:md5:a390493be7d456b7cfe26974e1b8eb972012-12-09T00:00:00+01:002016-03-18T12:42:03+01:00ChristopheScience et conscienceamourapocalypsebon senscartescataclysmecatastrophechiffresclimatconquête de l’inutileconquête spatialecosmologiedémographiegravitationgéographiehard sciencehumourlivres luslogistiquelyrismeoh le beau cas !ouverture d’espritpanurgismeperspectiveprise de têtesciencescience-fictionsimulationspéculationsurréalismetempsthéorieutopievaleuréducationémerveillementénergie <p>Suite des questions stupides-qui-font-réfléchir sur l’un des sites qui justifient l’existence même d’Internet (<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Questions-a-la-con-chez-XKCD">premier recueil de résumé-traductions ici</a>) :</p>
<ul>
<li><strong>Tout le monde dehors</strong> : <a href="https://what-if.xkcd.com/7/" hreflang="en">Avons-nous assez d’énergie pour faire quitter la planète à toute l’humanité ?</a>. Enfin une question « appliquée ». <br />L’énergie nécessaire strictement minimale est l’énergie cinétique atteinte par 7 milliards d’humains d’en moyenne 65 kg dépassant la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vitesse_de_lib%C3%A9ration">vitesse de libération</a> terrestre (11,2 km/s), soit 2,8.10<sup>18</sup> J, environ 5% de notre consommation d’énergie annuelle. Difficile mais jouable en théorie.<br />L’énergie réellement nécessaire dépend du moyen utilisé. Les fusées traditionnelles ne sont pas très efficaces, avec 20 à 50 tonnes de carburant pour 1 tonne de charge utile dans l’espace ! De quoi siphonner toutes les réserves mondiales de pétrole. L’ascenseur spatial serait une option (le matériau reste à inventer) ; ou encore l’utilisation de nos bombes atomiques comme carburant (projet <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Projet_Orion">Orion</a>).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Jump!</em></strong>: <a href="https://what-if.xkcd.com/8/" hreflang="en">si toute l’humanité se rassemblait dans le plus petit espace possible et sautait ensemble en même temps</a>, la Terre ne serait pas déplacée de la largeur d’un atome (elle est simplement trop grosse pour nous). Par contre, la concentration de sept milliards de personnes sur un territoire de la taille de Rhode Island (équivalent à un petit département français comme le Bas-Rhin) posera de cataclysmiques problèmes de logistiques lors de l’évacuation (on a supposé une arrivée instantanée et miraculeuse), menant au chaos et au décès de milliards de personnes. (Les expériences de pensée ont parfois d’inattendues conséquences.)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="https://what-if.xkcd.com/9/" hreflang="en">L’âme sœur</a></strong> : à supposer très romantiquement que nous n’ayons réellement qu’une seule âme sœur chacun, disséminée aléatoirement au sein de l’humanité, mais que l’on saurait reconnaître au premier regard, quelle serait la chance de la rencontrer et de déclencher le coup de foudre ?<br />Si on se limite à l’humanité <em>qui a vécu</em>, il y a 90% de chances que l’âme sœur soit déjà morte ; beaucoup plus si on inclut les générations à venir.<br />Si on considère que l’âme sœur fait forcément partie des vivants d’âge voisin, ça ne fait plus qu’un demi-milliard de rencontres à faire avant le coup de foudre. Combien d’étrangers croisez-vous par jour ? Même à raison de plusieurs douzaines, ça ne fait guère qu’une chance sur dix mille de rencontrer un jour l’Amour Vrai.<br />Industrialiser le problème d’une manière ou d’une autre (<em>SoulMateRoulette</em>) permettrait de rassembler tous les couples en quelques décennies... à condition que chacun s’y consacre à plein temps.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="https://what-if.xkcd.com/10/" hreflang="en">Si la Terre tournait de 90°</a></strong>, en mettant par exemple le Mexique au Pôle Sud, et en espérant que les règles de la météo ne soient pas complètement déréglée par des phénomènes aussi bizarres que ceux de la réalité (du genre de l’Amazonie ensemencée par un bout de désert tchadien), après une période d’adaptation la carte du monde deviendrait :<br /><img src="https://what-if.xkcd.com/imgs/a/10/cassini_cities.png" alt="Le monde basculé de 90°" style="display:block; margin:0 auto;" /><br />La France et l’Antarctique devenues tropicales, Madagascar à notre place, Chine et Inde congelées... Il n’y a guère que le Kamtchatka qui ne change pas.<br /> <em>PS : J’</em>adore<em> ce genre de renversement de carte, ça change complètement la perspective par rapport à nos habitudes.</em></li>
</ul>
<ul>
<li><strong><a href="https://what-if.xkcd.com/11/" hreflang="en">Se faire chier dans la bouche par un oiseau</a></strong> nécessite en moyenne 195 ans de sieste gueule ouverte ininterrompue. Bon exemple de moyenne stupide vue la répartition totalement non-uniforme des piafs en ce monde.<br />Cet exemple débile donne pourtant un bon exemple d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Analyse_dimensionnelle">analyse dimensionnelle</a> avec des ratios de nombre de fiente/oiseau et de cm² par bouche, le résultat du calcul s’exprimant en année.<br />Avec une analyse du même genre, Randall montre que la consommation d’une voiture, en miles par galon (ou en kilomètres par litre, c’est en fait l’inverse de la manière de raisonner des Européens) peut s’exprimer en mm<sup>2</sup>, le nombre étant la section du volume d’essence étiré dans un tube de la longueur du trajet.</li>
</ul>
<p><em>Suite : </em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/What-If-de-Randall-Munroe">What If?</a><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/What-If-de-Randall-Munroe">, le livre !</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Questions-a-la-con-chez-XKCD-7-a-10#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/714Verbiage de développeururn:md5:32b9eb8654fcb7eacb5a51ed80b249752012-01-29T19:39:00+01:002017-10-12T12:24:12+02:00ChristopheInformatique : l’art du développementabominationanalogieapocalypseautoréférencebon sensbugcataclysmecatastrophechaoscommunicationcomplexitécoup basculturecynismedommagedysfonctionnementdéterminismedéveloppementenseignementexaptationgaspillagehumourMurphymèmeoh le beau cas !optimisationparanoïaperfectionnismeprise de têtesabotagesurréalismeténacitééconomie de l’attentionévolution <p>Je suis tombé <a href="http://www.dodgycoder.net/2011/11/yoda-conditions-pokemon-exception.html" hreflang="en">là-dessus</a> il y a peu, je m’en vais traduire, trahir, compléter, mettre à ma sauce le meilleur de ce verbiage humoristique de développeur humoristique plein de sagesse, que pour être franc je n’ai pas vu beaucoup en francophonie :</p>
<ul>
<li><strong>Condition Yoda</strong> : condition de la forme <code>if (4 == mavariable)</code> au lieu de l’instinctif <code>if (mavariable == 4)</code>. Utile par exemple en C pour parer à certaines failles de sécurité, ou pour ma part (les quelques heures par décennie où je fais du C) à parer au fait que ce ☁#!☠☢☭⚡<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Verbiage-de-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> de langage utilise le tout simple symbole <code>=</code> pour l’affectation et surtout l’autorise en plein milieu d’une condition.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Gestion d’exception à la Pokémon</strong> : elle est du genre :</li>
</ul>
<blockquote><p><code>try<br />{<br /> // fait quelque chose<br />}<br />catch<br />{<br /> // attrape les tous <br />}</code></p></blockquote>
<p>alors qu’un principe de la gestion des erreurs est de ne pas chercher à gérer une exception dont on ne sait pas quoi faire. Si c’est pour loguer et sortir proprement du programme je comprends encore. Le pire consiste à tout mettre sous le tapis, comme l’ont fait certains Indiens vendus par un très grand éditeur là où j’ai presté il y a plus d’un lustre (c’est du PL/SQL) :</p>
<blockquote><p><code>BEGIN<br /> -- fait quelque chose impliquant des INSERT et UPDATE dans les tables<br />EXCEPTION<br /> WHEN OTHERS THEN <br />NULL ; -- ignore tout problème et méprise le concept de transaction<br />END ; </code></p></blockquote>
<ul>
<li><strong>Ne faites jamais confiance à un développeur en costard-cravate</strong> : disons qu’il a le droit de porter cravate le premier jour, le temps de savoir où il tombe, surtout s’il est dans le service, ou sur ordre. Certains diront qu’un vrai développeur n’ira jamais travailler dans une banque, mais il n’y a pas de place chez Google pour tout le monde, et certains préfèrent avoir un salaire pour payer leur famille que de ne vivre qu’en <em>start-ups</em>.</li>
</ul>
<p><img src="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/9/97/Assassin_bug_aug08_02.jpg/320px-Assassin_bug_aug08_02.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<ul>
<li><strong>Les rapports de bugs issus d’utilisateurs non informaticiens</strong> constituent une des plaies du métier. Tout le monde n’a pas compris (même quand on lui explique) que dire « ça ne marche pas » ne constitue en aucune manière une information susceptible de mener à la résolution d’un problème. C’est aussi valable pour une voiture : ce qui ne se constate pas de manière flagrante en quinze secondes d’essai n’est pas un problème facile à trouver. Et encore, tout le monde sait utiliser une voiture de la même manière. Un informaticien non spécialiste d’un domaine ne verra pas que ce taux d’exécution budgétaire de 32% en décembre est farfelu ; dites-lui que ce doit être plus de 90% et il sera déjà mieux armé pour trouver le problème.</li>
</ul>
<ul>
<li><em><strong>Smug report</strong></em> (« bug vantard » ?) : bug soumis par un utilisateur qui croit mieux connaître le système que son concepteur, avec des pistes sur la cause du problème, pistes d’autant plus fausses qu’elles sont affirmatives. J’ajouterai que certains utilisateurs sont champions pour faire un lien entre deux événements sans rapport, du genre d’un plantage d’imprimante qui aurait provoqué une erreur dans le logiciel de planification.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Drug report</em></strong> (« rapport de drogue ») : rapport de bug incompréhensible, apparemment rédigé sous acide.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Bug de Fermat</strong> : le rapport de bug contient un commentaire indiquant que la solution a été trouvée, en n’indiquant en rien quelle est sa nature. Très fréquent dans les forums internet.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Contre-bug</strong> : bug présent comme défense contre un bug que l’on vous présente. Utile dans les guéguerres entre équipes ou (pire) entre fournisseurs. <br />« Votre logiciel de compta rame, on pourra pas faire la paye !<br />- Ah désolé ma p’tite dame, c’est un bug connu de votre version de votre base Oracle, rappelez-nous quand vous aurez patché. »</li>
</ul>
<p><img src="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/a/a4/Red_bug.svg/200px-Red_bug.svg.png" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<ul>
<li><strong>Bug flottant</strong> : bug surnageant dans l’outil de suivi, jamais assigné, ou refilé de personne à personne. Il y a un contournement efficace, le correctif est flou, délicat, trop long, fastidieux, sans intérêt, ou touche à trop de domaines différents avec trop de risques d’explosion par la suite… Bref, ce bug a de bonnes chances d’être ignoré, puis explicitement filtré pour ne pas polluer les tableaux des responsables de projets, donc de rester des années dans le logiciel jusqu’à ce que tout le monde considère qu’il s’agit du fonctionnement normal.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Heisenbug</strong> (mon préféré) : bug qui change quand l’observe.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Schrödinbug</strong> : comme le <a href="http://www.astronoo.com/articles/chatDeSchrodinger.html">chat de Schrödinger</a>, le bug oscille entre l’existence et la non-existence (le résultat du programme est souvent correct) jusqu’à ce qu’un développeur inconscient soulève le capot et regarde. Le bug devient alors permanent.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Bug de Higgs</strong> : bug dont l’existence n’est suggérée que par quelques entrées dans les logs et de vagues mentions anecdotiques. Impossible à reproduire sur une machine de dév’ car en fait on ne sait pas trop ce qui se passe. Pour le débuguer il faudra investir dans des systèmes de surveillance très lourds.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Bug du Loch Ness</strong> : bug qui n'a été rapporté que par une seule personne.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Hindenbug</strong> : bug d’ampleur catastrophique, du genre qui fait crasher en flamme tout le projet.</li>
</ul>
<p><img src="http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/84/Hindenburg_burning.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<ul>
<li><strong>Bug OVNI</strong> : bug reporté encore et encore par des clients à qui l’ont a pourtant montré qu’il n’existe pas.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Mandelbug</strong> : bug tellement complexe que son occurrence ne semble pas déterministe, c’est-à-dire chaotique.</li>
</ul>
<p><img src="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/b3/Mandel_zoom_07_satellite.jpg/320px-Mandel_zoom_07_satellite.jpg" alt="" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<ul>
<li><strong>Bug d’apprenti sorcier</strong> : bug (en général dans un protocole de communication, une boucle…) menant à la génération de nouveaux messages, objets buggés, qui eux-mêmes en génèrent d’autres… menant ainsi soit à l’invasion de l’univers par les bugs, ou plus probablement, les ressources informatiques ou autres étant finies, à l’effondrement du système du bug.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Bug Excalibur</strong> : le bug que tout le monde a essayé de corriger, en vain jusqu’ici.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Bug vital</strong> : les utilisateurs considèrent que le bug fait partie du fonctionnement normal du logiciel, voire basent une partie de leur fonctionnement dessus. Ils refuseront que cela change même si on leur montre qu’ils font n’importe quoi ou que le bug est une faille de sécurité béante.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Fonctionnalité</strong> : <em>It’s not a bug, it’s feature</em>, selon Microsoft, ou plutôt (<a href="http://fr.wiktionary.org/wiki/it’s_not_a_bug,_it’s_a_feature">selon Apple dès 1979</a>) un « bug décrit par le marketing ».</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Refucktoring</strong> : retravailler un code peu maintenable mais fonctionnel pour le massacrer complètement et y introduire plein de bugs. En général le code n’en sortira pas plus maintenable, mais bien plus boursouflé et moins fonctionnel.</li>
</ul>
<p>À propos des différents types de code que l’on peut rencontrer (parce que le code informatique est à peine moins marqué que la littérature par les questions de style) :</p>
<ul>
<li><strong>Code spaghetti</strong> : tellement plein de <code>GOTO</code>s, d’exceptions, de <em>threads</em>… et autres branchements non structurés, que suivre le déroulement de ce code est aussi fastidieux que de démêler un spaghetti dans une assiette pleine.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code spaghetti avec des boulettes de viande</strong> : comme précédemment, avec des morceaux de tentative de structuration.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code baklava</strong> ou <strong>code lasagne</strong> : du code avec beaucoup (trop) de couches d’abstraction empilées. Je dirais que N développeurs produiront souvent N couches de code.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code ravioli</strong> : code objet consistant en un petit nombre d’objets faiblement liés (en soi, une bonne chose).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code andouillette</strong> : code qui pue et dont on ne veut pas connaître la composition.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Château de carte</strong> : touchez une chose, tout s’effondre.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Hydre</strong> : chaque correction de bug en engendre deux autres.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code balafré</strong> : plein de cicatrices à cause de toutes les rustines qu’on y a appliqué.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code mort</strong> : toujours là mais commenté, ou (pire) jamais appelé.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Assurance contre le licenciement</strong> : code tellement obscur et bardé d’historique que la personne chargée de la maintenance a l’assurance de ne jamais être virée. Les effets pervers sont : l’impossibilité de changer de boulot et donc de monter dans la hiérarchie pour la même raison ; et le risque que la mise à la retraite du logiciel implique le licenciement immédiat du mainteneur qui ne servait plus qu’à ça et n’a pas suivi la montée en compétence de ses collègues.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Ghetto</strong> : partie du logiciel où personne ne va, avec ses lois obscures, et qui doit faire des choses pas catholiques, mais qui ne gêne pas le reste.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Code copier-coller</strong> : code de débutant qui n’a pas compris le concept de fonction ou de procédure, bref de réutilisation.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Palimpseste</strong> : comme les parchemins du Moyen Âge, un code avec beaucoup d’historique révèle en creux bien des pans de son histoire, par exemple des tailles maximales de certaines informations ou certaines structures de données liées à des contraintes sur des applications depuis longtemps oubliées.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Développement défensif</strong> : manière de programmer consistant à considérer que <a href="https://www.coindeweb.net/murphy/">Murphy</a> s’attaquera activement au logiciel, ce qui mène à ne considérer aucune entrée comme sûre, à tout retester, etc. Pas forcément un mal dans certains milieux où la paranoïa est reine : médical, aéronautique...</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Protoduction</strong> : prototype que l’on teste directement en production. Pas forcément un mal, parfois le seul moyen de tester même, quand on en est conscient. Catastrophe annoncée si les <em>managers</em> ont imposé qu’une maquette soit promue en prod’ sans même que le développeur en soit informé (évidemment, la responsabilité de tout problème lui retombera dessus).</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Verbiage-de-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Vous saviez qu’il y avait tous ces symboles dans Unicode ? Je viens de découvrir (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Table_des_caractères_Unicode/U2600">merci Wikipédia</a>).</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Verbiage-de-d%C3%A9veloppeur#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/674« Pour la Science » de juillet 2011 : l’hydrogène comme énergie propre ; le démon de Maxwell existe ; nucléaire : le débat date du XIXè siècleurn:md5:dd021c3ac1cfef245124559ffb244bfc2011-07-21T14:06:00+02:002015-09-03T12:13:36+02:00ChristopheScience et consciencecatastrophechiffrescomplexitéconquête de l’inutiledilemmediscriminationhistoirelobbysmèmemémoireoptimisationoptimismeParisperspectivequêtesantéthéorieécologieéconomieéconomies d’énergieémerveillementénergie <p>Encore un bon cru que ce numéro. Comme d’habitude en vrac <em>avec mes commentaires personnels en italique</em>.</p>
<p><img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/full/_done_20110622_152533_PLS-2011-juillet_405-fu-pls_405_couv_175.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>Pub pour l’hydrogène</h3>
<p>Plusieurs articles font la promotion de l’hydrogène comme vecteur de l’énergie de demain. Ce n’est pas nouveau, mais on s’en rapproche.</p>
<p>Le problème principal est le stockage : on commence à le maîtriser correctement, ainsi que la restitution sous forme d’électricité avec de bons rendements. À l’heure de l’expansion nécessaire de sources d’énergie renouvelables mais à la production erratique (éolien, solaire), l’hydrogène serait <em>le</em> tampon idéal. Des exemples à petite échelle dans des îles existent. Et sans pollution puisque les « déchets » de la production par électrolyse et de la consommation dans une pile à combustible sont respectivement l’oxygène et l’eau.</p>
<p>Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire. Sur le long terme on peut tout espérer (<em>soyons optimistes</em>) mais pour le moment aucune technologie ne concilie coût faible, compacité et durabilité (<em>on est encore loin de l’autosuffisance d’une maison couverte de panneaux solaires et avec des piles à combustible dans la cave</em>) et bien sûr le chauffage est exclu de l’équation, il devra être fourni par une autre source.</p>
<p>Parmi les catalyseurs de l’électrolyse on évitera le platine (ruineux, et il n’y en aurait pas pour tout le monde). Il existe des membranes échangeuses de protons nées des nanotechnologies. Le plus intéressant reste la bonne vieille photosynthèse, au stade industriel grâce à des procédés s’inspirant du vivant (feuilles artificielles) et utilisant des métaux courants (nickel…).</p>
<p>Le stockage, impossible simplement sous pression pour une molécule aussi petite, pourrait se faire dans des récipients plastiques, ou dans des matériaux composites. Coût et poids seront encore longtemps rédhibitoires pour une voiture.</p>
<p>Bref, l’hydrogène est mûr pour 2050… si la recherche suit. (<em>Et elle ne suivra que si on y met les moyens.</em>)</p>
<h3>Le démon de Maxwell existe</h3>
<p>Pas de démonologie ici, juste une expérience de pensée de 140 ans d’âge enfin implémentée. Maxwell avait imaginé séparer les molécules chaudes et froides d’un gaz grâce à un « démon » qui ouvrirait ou fermerait une porte en fonction de la vitesse de la molécule. Une équipe américaine, dans sa quête sans fin du zéro absolu, a utilisé des lasers pour parvenir à ses fins et séparer atomes froids et chauds.</p>
<p>Et l’entropie dans tout ça ? Les lasers emportent pile poil avec eux l’information perdue par les gaz. Le second principe de la thermodynamique est sauf.</p>
<p>Au final, plein de découvertes en perspective, qui laisseront froid le commun des mortels (qui s’intéresse à la masse du neutrino ?). (<em>Mais qui évidemment seront indirectement à la base de notre confort en 2100…</em>)</p>
<h3>La controverse du gaz d’éclairage</h3>
<p>Le débat actuel sur le nucléaire, utile, effroyablement dangereux selon les uns, raisonnablement sûr selon les autres, a déjà été livré il y a presque deux siècles, à propos des usines à gaz et gazomètres. L’article de Jean-Baptiste Fressoz est passionnant.</p>
<p>En 1823, l’extension de l’éclairage au gaz (une véritable révolution !) nécessite la construction de grands réservoirs, dont un rue du Faubourg Poissonnière à Paris. Les riverains inquiets en appellent à l’équivalent du principe de précaution, l’Académie des Sciences est impliquée et conclut à un non-risque pratique d’explosion. Ajoutons que le débat est pollué par les querelles politiques de l’époque (la Restauration fut agitée).</p>
<p>Évidemment, pour contredire l’Académie, certains gazomètres explosèrent dans les décennies suivantes. Les académiciens avaient négligé de nombreux problèmes pratiques que le personnel de terrain connaissait pourtant ; certains scientifiques étaient intéressés financièrement par l'expansion des gazomètres ; certaines interactions physico-chimiques provoquèrent plus tard des catastrophes expliquées seulement cinquante ans plus tard ; enfin l’interaction avec d’autres technologies, fondamentalement imprévisible, mena aussi à des explosions (réseau d’eau (autre révolution !) qui fuit => éboulement => fuite du réseau de gaz proche => le gaz ne peut s’échapper car les routes sont en macadam (autre nouveauté !) => accumulation dans les égoûts et cave => explosion => 86 morts en 1883).</p>
<p>Les scientifiques ne furent pas les seuls à être aveugles. Le débat en France mena tout de même à un début de régulation de la sécurité du gaz. En Angleterre, pourtant plus consciente des problèmes, l’argument du coût balaya toute velléité de norme.</p>
<p>Ajoutons que, un siècle après leur démantèlement, les usines à gaz polluent toujours nos sols par les goudrons issus de la distillation...</p>
<p>Le parallèle avec le débat actuel nucléaire est frappant. « Le seul vainqueur de la controverse a été l’imprévisible. »</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Un peu au-dessus de l’équateur existe une <strong>bande de précipitations</strong> vitale pour l’agriculture de nombreux pays. Des chercheurs se sont donnés la lourde et pénible mission de parcourir de nombreuses îles paradisiaques du Pacifique, et d’y trouver les traces de l’évolution de cette bande au sein de sédiments au fond des lacs intérieurs. Verdict : la bande est très sensible à toute variation de la température, et va donc se décaler très vite de plusieurs degrés de latitude vers le nord, avec une redistribution des pluies et des impacts en cascade sur toute la planète.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>L’innovation technologique peut aider les pays pauvres</strong>, sans qu’il y ait besoin de prix Nobel, de percées technologiques délirantes, ou de méga-investissements : une simple mini-centrale hydroélectrique sur une chute d’eau de 400 W (<em>la puissance d’un gros PC de joueur</em>) peut suffire à changer le quotidien de plusieurs foyers (éclairage, télécommunications, une télé) ; des séchoirs à légume stimulent des pans entiers de l’économie burkinabée ; une bête capsule en polyéthylène réduit les risques de propagation du sida, etc. Les solutions les plus simples et les moins chères ont souvent l’impact le plus énorme. Il manque un répertoire mondial de toutes ces petites avancées pour en généraliser l’utilisation.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Les gélules-robots</strong> avec caméra, que l’on peut avaler et qui ressortent naturellement, rendent déjà des services. Un article traite de l’étape suivante : gélules à bras pour explorer, voire gélules avalées indépendamment, et s’auto-organisant pour opérer de l’intérieur !</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Les premiers accouplements</strong>, chez certains poissons d’il y a 375 millions d’années (déjà vivipares), seraient nés de la nécessité de protéger les petits des prédateurs : plus gros à la naissance, leurs chances de survie étaient meilleures. Certains attributs virils seraient des nageoires détournées et… la mâchoire à l’origine plutôt destinée à maintenir les femelles pendant l’acte pour pouvoir féconder les œufs le plus vite possible avant d’autres prétendants ! (<em>J’adore tous ces bricolages évolutifs : cette mâchoire de prise devenue arme ; les nageoires-pagaies évoluant en pattes ; les poumons-stabilisateurs devenus poumons...</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>L’<strong>article mathématique de Jean-Paul Delahaye relève du quasi-surréalisme</strong> : <a href="http://www.mathrix.org/zenil/" hreflang="en">Hector Zenil</a>, un de ses doctorants, a ordonné par ordre de complexité les nombres de 0 à 31 — en binaire. En parlant de complexité, on évoque le fait que 11010 est plus complexe que 11111, lui-même plus complexe que 1. La complexité selon Kolmogorov d’un nombre (qui est, en gros, proportionnelle à sa taille après passage à la moulinette d’un algorithme de compression comme <code>zip</code>) se calcule mal pour les tous petits chiffres. Il a donc fallu revenir à la définition et tester les 11 milliards de programmes possibles d’une machine de Turing à quatre états pour voir quelles chaînes de un à cinq bits sortaient le plus fréquemment. Bref, au final 0 et 1 sont les moins complexes des chaînes, 11100 est dernier (<em>ex-æquo</em> avec 00111 et d’autres). Si si, il y a des applications.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-juillet-2011#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/649« 1940 : Et si la France avait continué la guerre… »urn:md5:aed425ec34c8fff3b98038f2b817097a2011-06-01T08:08:00+02:002015-09-02T12:57:32+02:00ChristopheTemps et transformationsAllemagnebombe atomiquecatastrophecolonisationcouragedémocratieguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationracléeSeconde Guerre Mondialespéculationtempstotalitarismeuchronie<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lafrancecontinue-1.jpg" alt="lafrancecontinue-1.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Etait-il réaliste pour un gouvernement traumatisé d’abandonner la métropole, où la situation était désespérée, et de continuer la lutte depuis l’Algérie et l’Afrique, avec les appuis anglais et américain ? Le débat avait à l’époque fait rage entre les « défaitistes » (Pétain, Weygand…) pas mécontents de voir la République abattue, ou simplement inconscients de la différence de nature du IIIè Reich par rapport à l’Allemagne qu’ils avaient affrontée en 1914-18, et le groupe emmené par de Gaulle.</p> <p>J’ai chroniqué ici l’excellent livre sur la défaite de 1940, <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1">Comme des lions</a></em>, de Dominique Lormier, dont <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4">un passage traite d’un repli français dans l’Empire, sans capitulation</a>.</p>
<p>Récemment, un groupe mené entre autres par <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Sapir">Jacques Sapir</a> n’a pas résisté à la tentation de l’uchronie sur ce point. Le choix du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Point_de_divergence">point de divergence avec notre histoire</a> fut délicat : il fallait que le Président du Conseil <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Reynaud">Paul Reynaud</a> ne renonce pas au pouvoir en faveur de Pétain (alors que paradoxalement il tenait à continuer la guerre) ; c’est donc en avançant de quelques semaines le décès accidentel d’Hélène de Portes, sa maîtresse, défaitiste elle, que cette histoire se met à diverger. (<a href="http://www.delpla.org/article.php3?id_article=69">Certains ne sont pas d’accord sur le poids de l’influence d’Hélène</a>. Détail, on pourrait trouver d’autres divergences menant au même résultat.)</p>
<p>Le livre reprend l’essentiel, sous une forme aussi plus agréable à lire, du site web <a href="http://www.1940lafrancecontinue.org/">1940lafrancecontinue.org</a>. Il ne couvre que 1940, jour par jour voire d’heure en heure. Le site a quelques cartes et des mentions sur les années suivant 1940.</p>
<h3>Le Grand Déménagement</h3>
<p>Reynaud tient bon, soutient de Gaulle, écarte Pétain puis Weygand, enrôle Mandel, Zay, Blum... et lance le Grand Déménagement de l’armée française (enfin, ce qu’il en reste...) vers l’Algérie, alors française.</p>
<p>La plausibilité fait l’objet de l’introduction : oui, cela était jouable. Evidemment, en Afrique du Nord, il n’y a aucune industrie digne de ce nom, et la France devient dépendante de l’Angleterre et des États-Unis. Il lui reste des atouts : la flotte, les ressources de l’Empire, de grands stocks d’or.</p>
<h3>Ce qui change</h3>
<p>Alors, par rapport à notre réalité, quelle différence peut faire une France dont les reins sont brisés ?</p>
<ul>
<li>On pense d’abord à la flotte : sa neutralisation était le premier but d’Hitler en acceptant l’armistice, et mettre la main dessus (en tout cas éviter qu’elle ne passe aux Allemands) une obsession de Churchill. Si la France continue, pas de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Mers_el_Kebir">Mers el-Kébir</a>, la Méditerranée reste aux Alliés, et les convois dans l’Atlantique seront mieux escortés.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Empire reste intégralement aux Alliés. Alors qu’en réalité de Gaulle a mis des années à le récupérer bout par bout, que les Anglais ont dû envahir Madagascar puis les Américains l’Algérie, que l’Afrika Korps de Rommel a pu s’y baser, si la France continue il devient aussitôt une base de départ, par exemple contre la Lybie.</li>
</ul>
<ul>
<li>Au lieu de l’humiliante débandade et de la reddition en masse après que Pétain a dit de déposer les armes sans même avoir négocié l’armistice, l’armée française réussit à tenir avec une direction claire. Certes, il est impossible de conserver longtemps la France continentale : le sacrifice de nombreuses unités ne sert qu’à couvrir le Grand Déménagement. Nos uchronistes voient Marseille tomber en août. Mais cela fait pas mal de prisonniers en moins... et beaucoup de combats destructeurs en plus dans toute la France. Des scénarios impliquant un réduit breton (irréaliste) ou provençal (plus plausible) ont été jugés un peu trop optimistes. Que la France tienne encore deux mois contre la Wehrmacht est jugé par certains même conservateur : la logistique de la Wehrmacht était très étirée (d’où une pause forcée à mi-chemin), les Français ont très vite appris de leurs erreurs, etc.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les Français peuvent se rééquiper auprès des Américains grâce à leurs (énormes) réserves d’or.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dans la réalité, l’armée allemande avait quand même souffert (même et surtout après Dunkerque), et les avions perdus en France ont manqué pendant la Bataille d’Angleterre. Par contre la Luftwaffe avait récupéré ses pilotes prisonniers après l’armistice. Si la France continue, la Wehrmacht s’use à finir la conquête, ne récupère pas ses pilotes prisonniers : la Bataille d’Angleterre (pour commencer) est moins intense.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dès 1940 les Alliés peuvent penser à des contre-attaques. Et le livre ne s’en prive pas : l’Italie ayant courageusement déclaré la guerre à une France en pleine débâcle (et comme dans la réalité, impréparation et artillerie de montagne française aidant, l’armée italienne n’ira pas loin dans les Alpes), elle prend le premier choc, avec la conquête alliée immédiate de la Lybie, de la Sardaigne, de Rhodes (ces deux dernières jamais conquises dans la réalité). Les Alliés ont donc gagné deux ans en Afrique, évité l’Afrika Korps, attiré la Grèce dans leur camp (que Mussolini aurait attaqué sinon dès la fin 1940, sans succès), protégé Suez, et menacent immédiatement la Sicile.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pétain a dans la réalité réussi à obtenir une légitimité grâce aux pleins pouvoirs octroyés par les députés. Si la France continue, ceux-ci s’enfuient, et commencent à bâtir quelque chose qui s’orientera plutôt vers notre Vè. Et si les auteurs ont tenu à maintenir Laval, Doriot, Déat… au pouvoir (à Paris, pas Vichy), ce n’est qu’une bande d’arrivistes à la légitimité nulle.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Empire français (et le belge également par contrecoup) sortira socialement complètement transformé de la guerre, grâce aux centaines de milliers de personnes (soldats, techniciens, politiques…) déplacés en Algérie mais aussi aux lois donnant la citoyenneté aux « sujets »<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> s’enrôlant et à leur famille. D’intéressantes perspectives pour l’après-guerre…</li>
</ul>
<ul>
<li>De même, des milliers de Républicains espagnols sont enrôlés par l’armée française.</li>
</ul>
<h3>Ce qui ne change pas :</h3>
<p>Les auteurs n’ont pas osé trop s’éloigner de la trame temporelle réelle, de manière logique pour 1940, de manière plus discutable (et même frustrante, mais c’eut été un saut dans l’inconnu) pour la suite :</p>
<ul>
<li>Franco reste au pouvoir en Espagne avec son jeu d’esquive envers Hitler (j’avais parlé ici du <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/03/427-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-3">double jeu du fascinant amiral Canaris</a>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Le livre s’arrête à la Saint-Sylvestre 1940, donc bien avant l’attaque de l’URSS. Mais l’introduction précise bien que le maintien de la France dans la guerre ne change rien aux intentions d’Hitler. Sa nature (et celle de son régime dirait Hannah Arendt) impose de passer vite à autre chose quand les difficultés se font jour, et une France exsangue ne l’inquiétera pas beaucoup plus que la seule Angleterre dans notre réalité. Les nazis attaqueront donc les Soviétiques.</li>
</ul>
<ul>
<li>De même, dès les premières pages on sait que l’Occupation durera peu ou prou quatre ans. Au passage, quelques clins d’œils font référence à des événements bien postérieurs, légèrement « décalés ».</li>
</ul>
<p>Quelques reproches tout de même :</p>
<ul>
<li>Sur la forme, les récits au jour le jour recensant la moindre escarmouche au fond du désert lybien peuvent un peu lasser. Les opérations sont tellement détaillées que certaines parties se lisent en diagonale.</li>
</ul>
<ul>
<li>C’est le lot de la plupart des uchronies, mais il est frustrant de savoir que l’on passe à côté de nombre de références. Il faut quasiment avoir Wikipédia à portée de main pour se renseigner sur le champ sur chaque personnage qui apparaît : Guillaumet a un rôle dans l’évacuation (au lieu, dans la réalité, de se faire tuer dès 1940) ; Mendès France ne finit pas condamné comme déserteur ; Blum ne finit pas en prison sous Vichy ; Weygand se fait tuer au front ; le serment de Lybie remplace celui de Koufrah ; par contre l’ambassadeur japonais prend toujours des notes après le <a href="http://www.secondeguerre.net/articles/evenements/ou/40/ev_raidtarente.html">raid allié sur Tarente</a> qui inspira celui sur Pearl Harbor ; etc.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les avis des civils manquent cruellement. Le gouvernement a fui avec une partie de l’armée : qu’en pense le civil de base resté en France sous Occupation ? Que disent les habitants qui voient leur ville détruite juste pour des combats de retardement ?</li>
</ul>
<ul>
<li>Sur le fond, on pourrait reprocher au livre de trop se baser sur la ligne temporelle réelle sur le long terme (on sait que l’Occupation durera quatre ans, que l’URSS sera attaquée…) alors que les opérations imaginées pour 1940 n’ont plus rien à voir avec celles de la réalité. Le maintien de la France dans la guerre n’aurait-il qu’un si faible impact ? Il faudra attendre pour voir. En fait l’effet serait sans doute majeur sur l’après-guerre : sur l’Algérie (pleine de nouveaux citoyens arabes avec droit de vote) et l’Empire ; sur le maintien de la France comme puissance majeure sur le papier ; sur la manière dont l’Europe est libérée ; le rôle final de l’URSS… J’aurais rêvé d’un basculement majeur : par exemple, les Empires occidentaux ayant mieux encaissé, le Japon décide ne pas s’y frotter, renonce à Singapour, au Vietnam et à Pearl Harbor et (<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2009/01/05/Ce-que-savaient-les-Allies-de-Christian-Destremau-3-%3A-Pearl-Harbor">le choix fut paraît-il discuté à Tokyo</a>) préfère croquer l’URSS par l’Est : celle-ci s’effondre rapidement avec les conséquences que l’on imagine (aussi bien stratégiquement pour le plus grand bénéfice des nazis que par le maintien prolongé de la non-belligérance américaine) (<strong>Ajout de 2015</strong> : D’un autre côté, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Khalkhin_Gol">les Japonais s’étaient déjà cassé les dents contre les Soviétiques en Sibérie</a>).</li>
</ul>
<p><strong>PS de septembre 2011</strong> : <a href="http://alias.codiferes.net/wordpress/index.php/et-si-la-france-avait-continue-la-guerre/comment-page-1/?gseaftercommentingmodal#comment-5069">Alias a aussi aimé ce livre</a>.</p>
<p><strong>PS de 2013</strong> : Le second tome, <em>1941-1942</em> est paru ! (<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre">et je l’ai chroniqué ici</a>)</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Rappelons que la devise </em>Tous les hommes sont égaux<em>, dans la France de la IIIè et de la IVè république, ne valait ni pour les femmes ni pour les Arabes...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/647“The Years of Rice and Salt” (« Chronique des années noires ») de Kim Stanley Robinsonurn:md5:3672d4b8474854f1add0b1c23e0bc84e2011-02-01T22:47:00+01:002015-08-21T09:52:01+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesAmériquecatastropheChinecivilisationcolonisationdéterminismeguerregéopolitiquehistoireIndelivres lusmémoireperspectivespéculationtempstranscendanceuchronie<p>Ce pavé a été mon « uchronie de Noël », une tradition personnelle avec laquelle je renoue.</p> <p>L’idée est simple : au lieu de liquider un tiers de la population européenne, la Peste Noire de la fin du Moyen Âge ne laisse personne, et l’Europe devient un désert. Évidemment l’Histoire prend une toute autre tournure : le Nouveau Monde est envahi par les Chinois et les Arabes ; la France est recolonisée depuis l’Andalousie par les soufis et la Scandinavie par la Horde d’Or ; la science moderne apparaît à Samarcande ; les Indiens font la révolution industrielle et s’étendent aussi vite que les Européens au XIXè siècle ; la Guerre Mondiale est pire que celles que nous avons connues…</p>
<p>Le monde se divise (schématiquement) entre Islam, Indiens (d’Inde), Chinois, et accessoirement Indiens (ceux de ce qui n’est donc pas l’Amérique). Robinson retrace les transferts de connaissance entre ces civilisations sans les perturbations introduites par les Européens dans notre fil temporel (le choix de Samarcande, sur la Route de la Soie, n’est pas innocent, mais l’influence des Indiens du Nouveau Monde sur ceux de l’Ancien est plus surprenante), leurs remises en cause après des guerres perdues, l’évolution du rôle de la femme dans le temps, en Chine ou dans diverses contrées islamiques, l’évolution des sociétés vers certaines valeurs que l’on qualifierait d’occidentales, etc.</p>
<p>Comme dans la trilogie de SF martienne (<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson">déjà chroniquée ici</a>) Robinson veut que le lecteur s’attache aux personnages malgré une histoire étalée sur des siècles. En science-fiction il pouvait allonger leur vie grâce à la médecine, mais ici l’expédient est plus radical : ils se réincarnent. Après tout, le bouddhisme et l’Islam influencé par le bouddhisme le permettent. On suit donc K., B., I., P., S. au fil des siècles, de leurs changements de noms (ils ne conservent que l’initiale), de sexe, même, de leurs sauts d’une civilisation à l’autre, et de leurs réunions dans le bardo, entre deux réincarnations. Chacun est un archétype (K. le révolté, I. le scientifique…). Il n’y a pas vraiment d’intrigue, les personnages sont tous emportés par l’évolution du monde tout en faisant parti des minorités qui font l’histoire. Contrairement à la plupart des livres, on peut réellement craindre pour leur vie à chaque page.</p>
<p>J’ai trouvé des défauts au niveau de la plausibilité : la Peste Noire a tué absolument <em>tous</em> les Européens en épargnant les autres, mais un virus moins radical aurait aussi permis l’uchronie<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Years-of-Rice-and-Salt#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> ; la fondation de la science moderne par les trois principaux personnages à Samarcande est plus que rapide ; les blocs lors de la Longue Guerre sont beaucoup trop caricaturaux (nos guerres mondiales ont transcendé les cultures : on fait plus souvent la guerre à son voisin de même religion qu’à un peuple mal connu aux antipodes — le « choc des civilisations » n’est pas loin) ; la civilisation évolue au final un peu comme dans la nôtre avec domination occidentale<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Years-of-Rice-and-Salt#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup> et on peut se demander si ce n’est pas une (inévitable) marque du fait que l’auteur <em>est</em> occidental, malgré un évident effort de recherche. Et puis Robinson est un peu trop bavard, sans que l’ennui pointe.</p>
<p>Péchés véniels, le livre reste prenant, on le savourera un certain temps. Il y a un côté ludique à retrouver Amérique ou Australie sous leurs noms chinois.</p>
<p>Le titre français est une erreur (cf <a href="http://www.cafardcosmique.com/Chroniques-des-Annees-Noires-de">cette chronique sur le Cafard cosmique</a>). L’original est une référence chinoise.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Years-of-Rice-and-Salt#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Sur le même point de divergence, Silverberg s’était contenté dans la </em><a href="http://a-c-de-haenne.eklablog.com/la-porte-des-mondes-de-robert-silverberg-w-a2349372">Porte des mondes</a><em> de supposer que l’Europe était devenue turque — un petit livre sympa pour un préado soit dit en passant.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Years-of-Rice-and-Salt#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Quoique avec l'évolution actuelle de la Chine les deux mondes vont encore se rapprocher...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-Years-of-Rice-and-Salt#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/642Agonie d’un disque dur : debriefingurn:md5:ee1b44b2b6450fbc15f814f4d4a324902010-08-30T00:00:00+02:002015-08-20T09:35:08+02:00ChristopheInformatique pratiqueanticonsumérismecatastrophecouragedommagedysfonctionnementexpertiseinformatiqueLinuxlogiciel libremémoiresauvegardesténacitéUnixémerveillement <p><em>Ce qui suit a été rédigé à l’été 2010. Je le note surtout pour moi</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup><em> des fois que le problème ressurgisee. Ce qui est bien avec Unix, c’est que les méthodes et outils changent beaucoup moins souvent que sur Mac ou Windows.</em></p>
<p>Évidemment, j’avais tout sauf le temps de m’occuper de ça : le disque dur de mon petit serveur dans la cave a lâché.</p>
<p>J’avais déjà eu le symptôme autrefois sur une autre machine : échec d’identification en me connectant par <code><a href="http://formation-debian.via.ecp.fr/ssh.html">ssh</a></code> (j’ai oublié l’erreur exacte) : le disque dur ne répondant plus, le système perdait les pédales dès qu’il tentait d’accéder au moindre fichier. Mais par derrière il continuait vaillamment à tourner. (Je ne sais pas si un Windows aurait tenu aussi longtemps avec un disque mort, je n’ai jamais vu le cas. D’un autre côté, un système sans disque ne sert plus à grand chose.)</p>
<p>Au reboot, pas de système (erreur 25 de <code><a href="http://doc.ubuntu-fr.org/grub">grub</a></code>).</p>
<p>Je démonte le disque et le connecte à l’autre PC par un <a href="http://www.pearl.fr/composants/disques-durs/docking-station/adaptateur-ide-usb-2_0-pour-disques-durs-2_5-et-3_5_PE1443.html">connecteur IDE/USB bien pratique</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup> : sur les six partitions, une (celle de <em>boot</em>) est illisible (<em>bad superblock</em> et autres joyeusetés), la principale (les données) est à peu près accessible. Le disque fonctionne encore... sur trois pattes : il se réinitialise avec un bruit (genre « clonc ! » ) trop souvent pour que je puisse sauvegarder en bloc la grosse partition. Mais bon, je sauve quand même sans difficulté les quelques fichiers vraiment importants comme les derniers mails arrivés.</p>
<p>Quant à tenter de réparer la partition principale… Ce serait quand même bien vu tout le temps investi à configurer le système.</p>
<p>Le sauveur : <code><a href="http://doc.ubuntu-fr.org/ddrescue">ddrescue</a></code>, du projet GNU (me faire penser à leur filer une obole). Cette merveille est capable de réessayer autant de fois qu’il le faut dans les secteurs délicats pour tenter de sauver le maximum de données. Évidemment, il faut un minimum de coopération du disque en fin de vie...</p>
<p>Après trois jours (!) d’acharnement, <code>ddrescue</code> a réussi à me récupérer la quasi-intégralité de la partition système (la plus corrompue), copiée dans un simple fichier. Impossible évidemment de monter ce fichier comme une partition<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup>, vu qu’il est aussi corrompu que la partition d’origine, même s’il ne fait plus « clonc », lui. Allais-je le récupérer ?</p>
<p><code>file <em>nom_du_fichier_image</em></code> a pu me confirmer qu’il reconnaissait bien un système de fichiers ext3 dans le fichier. Donc la partition n’était pas réduite à du bruit blanc. Ensuite :</p>
<p><code>mkfs.ext3 -n <em>nom_du_fichier_image</em></code> permet un diagnostic et parfois de récupérer les adresses des adresses du <a href="http://www.cepcasa.info/blog/?p=158">superbloc</a> endommagé : chez moi ça a échoué.</p>
<p><code>e2fsck -p</code> est l’ordre de réparation standard. Il m’a répondu en gros qu’il refusait de prendre la responsabilité de réparer ce qu’il voyait comme horreurs dans ce système de fichier-là. Avec <code>-y</code> je lui dis de faire ce qu'il peut, je ne sais rien de plus que lui, et advienne que pourra (évidemment, en travaillant sur une copie de travail de la partition copiée<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>).</p>
<p>Au final, <code>e2fsck</code> m’a rendu une partition ext2 (oui, il me l’a dit après avoir liquidé le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ext3">journal</a>), qui était montable. Hélas, plus rien de reconnaissable dans la structure, TOUT était passé dans <code><a href="http://dictionnaire.phpmyvisites.net/definition-Lost+found--11141.htm">lost+found</a></code> avec des noms cryptiques. MAIS sous les apparences du chaos restait l’ordre, un peu comme après un déménagement tout est sens dessus-dessous, mais bien rangé dans des cartons quand même<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup> : dans un répertoire au doux nom de <code>#567599</code> je retrouvais des sous-répertoires log, backup… Je venais de retrouver <code>/var</code> !</p>
<p>Ce n’était pas le plus capital, j’ai surtout pu sauver de la même manière <code>/etc</code> (ce qui m’a évité de reconfigurer plein de choses à la main), <code>/home</code> (récupérant ainsi l’utile en plus de l’indispensable et plein de choses sans-doute-inutiles-mais-encore-à-trier-depuis-une-décennie).</p>
<p>Au final : aucune donnée de perdue. Merci <code>ddrescue</code>.</p>
<p><strong>PS</strong> : Dans le futur, voir si <code><a href="http://www.sysresccd.org/Page_Principale">SystemRescueCd</a></code> pourrait être utile…</p>
<p><strong>PS bis</strong> : Depuis, les parties importantes de cette machine sont mirroirées par <code><a href="http://rsnapshot.org/" hreflang="en">rsnaphot</a></code> (le <a href="http://www.debutersurmac.com/tutoriels/timemachine.html">Time Machine</a> du pauvre non limité au Mac) vers l’autre machine, j’y gagne la sauvegarde des versions antérieures.</p>
<p><strong>PS ter</strong> : La mise aux normes matérielles récentes de mon infrastructure est dans les tuyaux, mais avant que j’ai un gros serveur plein de machines virtuelles et 10 To en NAS en RAID5, il va passer du temps. Nous parlions ici d’une machine dont le processeur ne date pas de ce siècle.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Parce que vue l'affluence de ce blog...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Pub gratuite pour le vendeur de camelote parfois bien pratique.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Tiens, ça aussi je sais pas si Windows sait faire facilement.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Oui, il faut moults gigaoctets libres sur un autre disque.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Version idéalisée pour l’exemple. Tout le monde sait que les objets migrent de carton en carton au fil du temps, dans une forme macroscopique de l’effet tunnel quantique, et parfois passent dans un monde parallèle.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Agonie-d-un-disque-dur#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/629Balistique relativiste et diplomatie interstellairesurn:md5:840200b4528307a26b60c725ec1410c52010-06-10T00:00:00+02:002015-07-29T12:47:29+02:00ChristopheParadoxe de Fermi et Exobiologieabominationapocalypseastronomieautodestructionbombe atomiquecataclysmecatastrophecivilisationcommunicationconquête spatialecosmologiecoup bascynismedilemmedommagedéshumanisationemmerdeursextraterrestresgigantismegravitationguerregéologiegéopolitiquehard scienceimpérialismeintelligencepanspermieparanoïapeine de mortperspectivepessimismeprise de têtepsychologieracléesciencescience-fictionSetispace operaspéculationsécuritétempsterrorismeuniverséonsévolution<p>Issue d’<a href="http://science.slashdot.org/comments.pl?sid=1453440&cid=30199506" hreflang="en">un petit bout de discussion</a> qui a dérivé du sujet initial (l’envoi d’un inutile message interstellaire depuis un iPhone), voici une petite application de la théorie des jeux à ajouter au dossier du <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/06/08/54-le-paradoxe-de-fermi">paradoxe de Fermi</a>.</p> <h5>Prudence paranoïaque</h5>
<p>Une civilisation A se met à émettre dans l’espace, délibérément ou non. Une civilisation B plus avancée sur une autre planète capte cela et déduit l’existence de A. Elle ne sait rien de A. Elle peut se douter cependant qu’à la réception du message, c’est-à-dire quelques siècles plus tard, l’autre civilisation aura sans doute progressé. B peut faire rapidement l‘analyse suivante :</p>
<ul>
<li>soit elle reste coi et ne signale pas sa présence en retour, sachant que le contact aura forcément lieu plus tard d’une manière ou d’une autre si les voyages interstellaires sont possibles ;</li>
<li>soit elle décide de signaler sa présence, au risque de se retrouver face à une puissance agressive qui lui fera la peau ;</li>
<li>soit elle opte pour l’option la plus sûre, l’Arme Balistique Ultime (si elle en a les moyens) : <strong>un météore de bonne taille, accéléré à une vitesse proche de celle de la lumière</strong>, précipité sur la planète émettant le signal.</li>
</ul>
<p>Cette dernière arme a plusieurs avantages : aisément disponible (les planétoïdes sont pléthores), propre (pas de radiations qui empoissonnent tout à dix parsecs aux alentours), sans protection possible (un bouclier assez costaud n’existe pas), et surtout sans préavis car, par définition, un objet qui s’approche à la vitesse <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vitesse_de_la_lumière">c</a></em>-ε ne peut être détecté avant d’être reçu dans la tronche. Rappelons qu’à vitesse relativiste, l’énergie de l’impact sera bien supérieure au classique ½mv² ; un modeste astéroïde suffira pour transformer n’importe quelle planète rocheuse en ceinture de poussière d’astéroïdes.</p>
<p>La question de savoir comment accélérer un caillou à une telle vitesse est laissée en exercice, mais les militaires financeront sans problème la chose à la première occasion.</p>
<p>Reste un problème : l’attaquant ne recevant les émissions de la victime que des décennies, des siècles voire des millénaires après leur émission, elle ne peut deviner si, au moment de l’impact, l’agressé n’aura pas déjà colonisé quelques autres mondes et évolué assez vite, ce qui lui fournirait hypothétiquement la possibilité de rendre la monnaie de sa pièce à l’agresseur. Celui-ci se trouve donc forcé de détourner l’attention de son propre système en attaquant depuis un autre ou en faisant dévier le projectile pour masquer sa provenance. Cela suppose que l’agresseur est déjà un empire interstellaire (en fait évident pour quelqu’un capable de déplacer de telles masses à de telles vitesses), mais ajoute beaucoup aux délais puisque l’ordre doit être envoyé à une vitesse forcément limitée par <em>c</em>, ou le voyage bien allongé, d’où sursis supplémentaire pour l’agressé.</p>
<h5>Mauvais voisin</h5>
<p>Il existe un autre inconvénient à cette politique du « je me tais et je désintègre balistiquement tout ce qui apparaît autour » : d’autres civilisations évoluées pourraient découvrir ce qui se passe. Et, bien que pacifiques, décider que la communauté galactique peut se passer de membres paranoïaques agressifs et régler le problème de la même manière. Selon que la première civilisation à se répandre sera prudente-paranoïaque ou coopérative-justicière dépend le sort de toutes les autres civilisations.</p>
<p>En arrière-plan figurent les hypothèses que l’on peut faire sur la cohérence d’une civilisation multi-planétaire où les communications sont limitées par la distance (répétition, en pire, des problèmes au sein des Empires européens à l’heure de la conquête de l’Amérique), et les durées se comptant en décennies : le temps que l’astéroïde arrive sur sa cible, ou que celui de la Revanche parvienne, la situation politique et philosophique de l’agresseur peut avoir évolué. L’Allemagne actuelle mérite-t-elle d’être anéantie pour les abominations d’Hitler ?</p>
<p>Si cela se trouve, la galaxie est actuellement parcourue par des centaines d’astéroïdes tueurs envoyés par des civilisations peureuses jouant au <em>sniper</em> interstellaire. La Voie lactée semble vide car ceux qui ne se taisent pas rencontrent très vite un rocher relativiste. Pendant ce temps, une autre civilisation fait peut-être les choses en grand et allume des supernovas dans tous les recoins favorables à la vie, la stérilisant par millions de parsecs-cube à la fois.</p>
<p>À l’inverse, chaque civilisation peut faire ce raisonnement, constater que l’astéroïde tueur est (relativement) simple à mettre en œuvre mais que des représailles sont également faciles, et dans le doute s’abstenir. Collectivement, on arriverait à un « équilibre de la terreur » galactique équivalent à celui de la Guerre Froide. Le « donnant-donnant » deviendrait donc la règle, comme après tout c’est à peu près le cas dans le monde actuel… à quelques timbrés éventuels près qui pourraient faire du dégât mais seraient plus aisément « traitables » par la collectivité. (Ce dernier cas m’interroge : les distances galactiques et le coût des déplacements empêchant les vrais conflits d’intérêt, quelles seraient les motivations pour attaquer ses voisins ? Fondamentalisme religieux ? Régime délirant à la nord-coréenne ?)</p>
<h5>En conclusion</h5>
<p>Einstein disait qu’il ne connaissait pas les armes de la Troisième Guerre Mondiale mais celle de la Quatrième : les cailloux. Je ne sais pas s’il pensait à cette variante-là de la fronde.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Balistique-relativiste-et-diplomatie-interstellaires#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/616L’Histoire spécial d’avril 2010 : « France 1940, autopsie d’une défaite »urn:md5:4165a810cf26d4145523c37a7ed80db72010-05-02T00:00:00+02:002015-06-10T12:42:08+02:00ChristopheHistoireAllemagneapocalypseautodestructioncataclysmecatastrophedommagedysfonctionnementdécadenceguerregéopolitiquehistoireHistoire de Franceimpérialismelivres lusoh le beau cas !ParisperspectivepessimismeracléeRealpolitiksabotageSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p>« La guerre... Et très vite, la débâcle. Inattendue, radicale, monstrueuse, comme un torrent qui emporte tout. Depuis ce jour, je sais que tout peut disparaître en quelques heures, que rien n’est jamais impossible. »<br /> <br /><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Hélie_de_Saint_Marc">Hélie de Saint Marc</a>, <em>Notre histoire, 1922-1945</em>, 3 (avec <a href="http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/page/affichegh.php?idGH=721&idLang=fr">August von Kageneck</a>)</p></blockquote>
<p>Il y a une soixantaine d’années, la France se prenait la branlée la plus magistrale, cruelle, inattendue, sanglante et catastrophique de toute son histoire.</p> <p>Si cette période me fascine, c’est en partie par ses conséquences : l’Histoire de France se coupe en deux à ce moment, il y a un avant et un après ; les élites sont deux fois renouvelées, le pays dévasté et ruiné, l’honneur à peine sauf ; la Reconstruction donne naissance à un pays très différent, mais au sein d’une Guerre Froide où la France ne joue plus qu’un rôle secondaire et voit filer son Empire pan par pan.</p>
<p>Mais c’est surtout la soudaineté qui a traumatisé une génération entière : la première puissance mondiale de l’époque, sûre de sa force, de son Empire, ne fait pas que perdre une guerre, elle s’effondre <em>totalement</em>, et cela n’a pas traumatisé que le futur général cité ci-dessus.</p>
<p>Ce numéro spécial du magazine <em>l’Histoire</em> fait le point sur les recherches de ces dernières années. Des photos, un article de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Paxton">Paxton</a> pour nous remonter le moral, des encadrés sur des épisodes peu connus comme <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Narvik">Narvik</a> ou le <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Massilia_(paquebot)">Massilia</a></em>, bref que du bon.</p>
<p>Les opinions sont pléthores sur les causes de l’historique défaite. L’armistice n’était pas signé que Pétain accusait déjà l’esprit de jouissance. En gros, la vieille baderne du XIXè siècle mettait tout sur le dos de ces gauchistes du Front populaire, et de la IIIè République en général, et de la Révolution finalement. Conséquence : il fallait un redressement moral, descendre aux oubliettes la démocratie et silence dans les rangs. Cette théorie culpabilisante à l’extrême a hélas perduré longtemps après la Libération et la condamnation à mort de Pétain : les civils se souvenaient surtout du traumatisme de l’Exode, des stukas impunis dans le ciel, bref de l’effondrement final de juin à une époque où effectivement il n’y avait plus grand chose à sauver en France métropolitaine.</p>
<p>Un passionnant livre de Dominique Lormier, <em>Comme des lions</em> avait rendu son honneur à l’armée française (j’en avais parlé ici : épisodes <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1">1</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/19/441-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-2">2</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/20/442-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-3">3</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/21/448-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-4">4</a>).</p>
<p>Rappelons les lacunes parfois inexcusables de l’armée française de 1940 :</p>
<ul>
<li>un État-major d’une génération plus vieille que Rommel, Guderian ou de Gaulle, certes pas stupide au point de vouloir rejouer la guerre de 14 comme on l’a dit, mais qui n’avait pas vraiment compris la différence que le moteur faisait dans la guerre ;</li>
<li>la doctrine, fondée sur la défense, n’était pas si stupide dans le cadre d’une guerre défensive, voulue longue pour épuiser l’ennemi, sachant que la France manquait d’hommes expérimentés (armée de conscription, pertes de la guerre précédente, dénatalité…) et d’alliés ; mais de là à rester l’arme au pied à taper le carton alors que toute la Wehrmacht était bloquée en Pologne ou en Norvège… ;</li>
<li>une tactique et une formation, des cadres surtout, pitoyables : pendant que les Allemands cherchaient à combiner les différentes armes dans une même offensive, les saint-cyriens n’apprenaient même pas ce qu’était un avion ou un tank (interview accablante de Jean-Louis Crémieux-Brilhac) ;</li>
<li>une mécanisation peut-être insuffisante (une grosse partie de l’armée allemande fonctionne encore aussi avec des chevaux pourtant !), en tout cas très mal répartie et pas concentrée comme en face (pour les <em>panzers</em> comme en l’air) ;</li>
<li>l’utilisation beaucoup trop limitée de la radio ;</li>
<li>une DCA bien trop faible (voir <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/11/17/440-comme-des-lions-le-sacrifice-heroique-de-l-armee-francaise-mai-juin-1940-de-dominique-lormier-1#c1002">le point 3 de ce commentaire d’un spécialiste</a>) ;</li>
<li>une ligne Maginot surprotégée, qui a effectivement tenue là où elle était attaquée, mais avec le trou béant des Ardennes.</li>
</ul>
<p>La France partait également avec moins d’alliés qu’en 1914 : la défaite de 1940 a été aussi la conséquence des très mauvais calculs de Staline (pacte germano-soviétique) et du gouvernement belge (neutralité proclamée en 1936, trop tard pour prolonger la ligne Maginot). On pourrait remonter plus loin (<em>appeasement</em> anglais, lâchage à Munich de la Tchécoslovaquie, l’autre allié de revers…).</p>
<p>Les Allemands n’étaient pas non plus sans faiblesses :</p>
<ul>
<li>leur réarmement était plus ancien que celui des Français mais n’allait pas sans quelques problèmes et il mettait en danger l’économie du Reich ;</li>
<li>le blocus maritime allié n’était pas compensé par l’apport soviétique suite au Pacte, ni ne contrebalançait l’aide matérielle américaine aux Alliés (déjà) ;</li>
<li>la Wehrmacht a souffert de la campagne de Pologne qui n’a pas été une promenade si facile que cela (un article cite un quart des blindés hors service).</li>
</ul>
<p>Bref le facteur temps jouait contre le Reich. Tous les dirigeants le savaient, d’où l’audace militaire allemande, et l’apparent immobilisme allié.</p>
<p>Gamelin porte une lourde responsabilité dans le drame : s’il n’était pas incompétent, il a commis plusieurs grosses boulettes :</p>
<ul>
<li>ne pas s’en tenir à sa propre doctrine : au lieu de verrouiller le territoire, il envoie des troupes à l’offensive en direction des Pays-Bas… se privant des réserves qui auraient pu stopper le coup de faux parti des Ardennes ;</li>
<li>être ainsi tombé dans le piège de von Manstein ;</li>
<li>bien plus tôt, en 1936, avoir torpillé toute vélléité du gouvernement de rentrer en Rhénanie au moment où Hitler la remilitarisait, ce qui aurait pu changer bien des choses...</li>
</ul>
<p>En résumé, la victoire allemande n’était pas inéluctable, même si les Allemands avaient beaucoup d’atout et ont eu beaucoup de chance. Mettre la défaite sur le dos de la IIIè République (qui était déjà passée à deux doigts d’une première raclée en 1914, au moment du miracle de la Marne) ou de la société française entière est abusif.</p>
<p>Une révélation (pour moi) a été d’apprendre que le <em>Blitzkrieg</em> n’avait rien d’une théorie bien établie : l’économie allemande se préparait à une guerre longue ; von Manstein a eu du mal à faire accepter son audacieux plan ; Guderian et Rommel ont désobéi et foncé plus loin que prévu. La Wehrmacht n’avait précédemment affronté que des ennemis bien plus faibles, et la suite (Angleterre et surtout Russie) a montré la limite de cette stratégie généralisée. Le <em>Blietzkrieg</em>, stratégie au final très risquée, serait d’abord « un acte de désespoir du niveau opérationel pour sortir d’une situation désespérée au niveau stratégique ». Le Reich s’est au final usé en Russie et à l’ouest a été broyé par la lente et inexorable logistique américaine. (En Tunisie en 1943, le britannique Alexander désespérait de la valeur des Américains, encore novices.)</p>
<p>L’interview de Jean-Louis Crémieux-Brilhac sur la naissance de la France libre est instructive : de Gaulle a été accueilli à bras ouverts par Churchill qui espérait qu’il persuaderait le gouvernement Reynaud de continuer la lutte avec l’Empire ; les gens qui l’ont rejoint étaient souvent tout au début « des Bretons, quelques Juifs et des aristocrates ».</p>
<p>On trouvera aussi un article sur l’arrivée des Allemands dans Paris, ville ouverte, et l’atmosphère qui y règne ; sur la faillite des politiques britanniques, qui n’ont pas fait mieux jusqu’à ce que Churchill reprenne les choses en main.</p>
<p>Bref, un numéro passionnant.</p>
<blockquote><p>”<em>Young man, study history, study history. In history lies all the secrets of the state craft.</em>”<br /> <br />« Jeune homme, étudiez l’histoire, étudiez l’histoire. C’est dans l’histoire que résident tous les secrets de l’art de gouverner. »<br /> <br />Winston Churchill à James C. Humes, 29 mai 1953, <br />cité dans <em>Winston Churchill</em> (de J.C. Humes), Author’s Acknowledgment</p></blockquote>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-Histoire-sp%C3%A9cial-d-avril-2010-France-1940-autopsie-d-une-d%C3%A9faite#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/606Livres en stock et en coursurn:md5:05fc233a4f4e8642e7097ee76bfd6d812010-04-17T19:48:00+02:002015-06-08T14:26:01+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesanticonsumérismeapocalypseastronomiecataclysmecatastrophechiffrescommunicationcomplexitéconquête de l’inutilecosmologieentropiegalaxiesgravitationhard sciencelivres luslyrismemèmemémoiremétainformationouverture d’espritpanspermieperspectivepessimismeprise de têtepsychologieréalitéréseausciencescience-fictionsimulationspace operaspéculationtranscendanceuniversvirtueléonsévolution<p>Faute de temps pour lire et chroniquer ici et quand même pondre un billet, histoire que mon lectorat ne m’oublie pas, je vais causer de mes trois derniers achats.</p> <ul>
<li><em>Visual and Statistical Thinking: Displays of Evidence for Making Decisions</em> de Edward R. Tufte (<a href="http://www.soc.washington.edu/users/bpettit/soc506/tufte.pdf" hreflang="en">PDF</a>) : pas cher, et il me manque toujours un arrière-plan théorique sur la représentation de données que je fais souvent au boulot (non que Business Objects aille bien loin dans le domaine mais bon...). Il y a un bout sur les célèbres statistiques du choléra de Londres au XIXè qui ont permis de repérer le rôle des fontaines publiques, et sur les différentes manières de présenter les mêmes bilans.</li>
</ul>
<ul>
<li><em><a href="http://www.eyrolles.com/Sciences/Livre/voyages-dans-le-futur-9782746504257">Voyages dans le futur</a></em> de Nicolas Prantzos : aussi épais que le précédent était fin. Ça cause du paradoxe de Fermi et d’astroingénierie, le genre de chose archi-éthérée qu’il me faut pour sortir de mon quotidien terre-à-terre surmené. (<strong>Ajout postérieur</strong> : C’est lu, à chroniquer prochainement. (<strong>Ajout de 2015</strong> : À relire avant de faire la chronique :-) )</li>
</ul>
<ul>
<li><em><a href="http://www.debatpublic.net/2008/01/04/petit-cours-dautodefense-intellectuelle/">Petit cours d’autodéfense intellectuelle</a></em> de Normand Baillargeon : maintes fois conseilllé, ça peut pas faire de mal, et ça permettra peut-être d’éviter de tomber dans un ou deux pièges intellectuels ou publicitaires.</li>
</ul>
<p>Sur la table de nuit actuellement (ou plutôt à son pied vu le format) : <em><a href="http://www.decitre.fr/livres/Atlas-du-monde-prehistorique.aspx/9782035051677">Atlas de la préhistoire</a></em> de Douglas Palmer. Bien détaillé, y compris sur l’ère pré-dinosaures. Je conseille à ceux que les mots compliqués ne gênent pas.</p>
<p>Interrompu : <em><a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Accelerando_(novel)" hreflang="en">Accelerando</a></em> de <a href="http://www.accelerando.org/" hreflang="en">Charles Stross</a>. SF de haute voltige, j’adore, une idée par chapitre. Il m’est tombé des mains parce que dans mon état actuel de déficit de sommeil aussi affolant que celui budgétaire des Grecs, et de saturation cérébrale suite à la saturation permanente de ce qui me reste de capacités mentales pour de frustrantes banalités, je suis incapable de lire un texte exigeant en langue étrangère le soir. Or <em>Accelerando</em> est typiquement le livre à ne pas lâcher faute d’oublier des pans entiers de l’histoire d’une fois sur l’autre (surtout avec ma mémoire de poisson rouge actuelle). On verra pendant les vacances. <br />(<strong>Ajout d’octobre</strong> : <a href="http://wiesmann.codiferes.net/wordpress/?p=8335&lang=en" hreflang="en">Thias en parle sur son blog</a>.)</p>
<p>Avec du bol, j'aurais lu ça avant Noël 2011… (<strong>Ajout post-Noël</strong> : Deux sur cinq seulement…)</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Livres-en-stock-et-en-cours#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/605Plus d’histoire en terminaleurn:md5:fece58e2cad69f31836d0e4282b622aa2009-12-11T21:46:00+01:002009-12-11T21:47:02+01:00ChristopheRes publicaabominationAllemagneapocalypseautodestructionbon senscatastrophecitationcivilisationcommunicationconquête de l’inutilecoup basculturecynismedécadencedémocratiedéshumanisationenfantsenseignementexpertisefoutage de gueulegéographiegéopolitiquehistoireincohérenceintelligencelibertémèmemémoirenationalismeouverture d’espritpanurgismeperspectivepessimismepolitiqueprovocationSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeéconomie de l’attention <p>Dans le cadre de l’hallucinant débat sur la consternante proposition de supprimer l’histoire-géo en terminale :</p>
<blockquote><p><em>Those who cannot remember the past are condemned to repeat it.</em><br /> <br />Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter. <br /> <br /><a href="http://en.wikiquote.org/wiki/George_Santayana" hreflang="en">George Santayana</a>, <em><a href="http://www.gutenberg.org/files/15000/15000-h/vol1.html" hreflang="en">The Life of Reason</a></em>.</p></blockquote>
<p>J’avais trouvé cette citation très connue en en-tête de <em><a href="http://www.amazon.fr/Rise-Fall-Third-Reich-History/dp/0671728687/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=english-books&qid=1260563359&sr=1-2en">Rise and fall of the Third Reich</a></em> (<em>Le Troisième Reich : Des origines à la chute </em>) de William L. Shirer.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Plus-d-histoire-en-terminale#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/595NFS, chimie, iono, rideau...urn:md5:cde013ef589df737f5f4ac63e243f8942009-08-25T23:37:00+02:002009-08-25T23:37:00+02:00ChristopheMoi, ma vie, mon egoaddictioncatastrophedommagesantéémerveillement <p>Je viens de voir le dernier épisode d’<em>Urgences</em>.</p>
<p>Je suis déjà en manque.</p>
<p><em>Docteur House</em> comme substitut ça ira peut-être mais ce ne sera pas pareil.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/NFS-chimie-iono-rideau#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/587“Harry Potter & the Order of the Phoenix” ou : « Harry a 14 ans, et il s’en prend plein la tronche. »urn:md5:85d0b35d0282242cbb6a7d109d39faf92009-07-25T00:00:00+02:002011-09-11T13:39:56+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesaddictioncatastrophedilemmedommagelivres lusmortmytheparanoïapessimismepsychologieracléesaturationtempsténacitééducationémerveillement<blockquote><p>« Toute bonne littérature pour enfants et jeunes peut être appréciée par des adultes. »<br />« Il ne faut pas tuer l’enfant qui est en soi. »<br />« C’est bon pour mon anglais puisque je le lis en VO. »</p></blockquote>
<p>C’est ce que je me dis pour rationaliser. Ensuite, ça finit par :</p>
<blockquote><p>« Et puis merde, je culpabilise pas, je suis accro, c’est comme ça. Cette série est super. »</p></blockquote> <p>(<em>Ante scriptum</em> : Non, ceci ne parle pas du film qui sort en ce moment. Et je n’ai pas vu le film précédent lié au présent livre.)(<strong>Mise à jour</strong> : De manière générale et pour Harry Potter en particulier, les films sont très décevants par rapport aux livres.)</p>
<p>Au moment où ce billet fut créé, je venais de finir le tome 5 (<em>Harry Potter & the Order of the Phoenix</em>), et j’ai eu tant de mal à le lâcher (au point de prendre du temps sur celui passé devant mon ordi, un comble !) que j’ai continué sur ma lancée et déjà dévoré <del>le tiers</del> <del>la moitié</del> la totalité <del>du</del> des tomes suivants (<em>The Half-Blood Prince</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-1" id="rev-pnote-579-1">1</a>]</sup> et <em>The Deathly Hallows</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-2" id="rev-pnote-579-2">2</a>]</sup>).</p>
<p>Si le premier Harry Potter (<em>The Philosopher’s Stone</em>) m’avait bien plu, et rappelé les films, regardés distraitement et agréablement (ils sont bien faits et fidèles mais, fatalement, il y manque des pans entiers du monde de J.K. Rowling), au point que j’avais attaqué un peu plus tard le second (une agréable répétition justifiée par l’approfondissement du monde), tout cela relevait encore de la bonne littérature pour gamins.</p>
<p>Cependant, chaque tome se déroule pendant une année scolaire à Hogwart<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-3" id="rev-pnote-579-3">3</a>]</sup> et donc les sept volumes racontent toute l’adolescence du jeune orphelin, de 11 à 17 ans. Le troisième (<em>The Prisoner of Azkaban</em>), déjà plus épais, est rétrospectivement surtout intéressant par l’ouverture au monde, l’introduction de nombreux personnages importants (Sirius, les effroyables Démentors...), et une ambiguïté bienvenue dans la lutte « bons <em>vs</em> méchants ».</p>
<p>Au quatrième (<em>The Cup of Fire</em>), Harry et ses copains deviennent plus intéressants, leurs relations plus complexes (les histoires de cœur apparaissent, et à cet âge-là ça donne souvent n’importe quoi), le monde encore plus grand — et dangereux, et l’ambiance est <em>beaucoup</em> plus noire.</p>
<p>Les premiers pottermaniaques ont grandi avec leur héros, mais franchement, le gamin de 10-11 ans (voire moins…) du XXIè siècle qui découvre Harry<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-4" id="rev-pnote-579-4">4</a>]</sup> et qui s’enfile les tomes à la queue leu-leu devrait s’arrêter à <em>Cup of Fire</em> et attendre de grandir un peu avant d’attaquer la suite. Au pire, ça lui flanquerait les jetons, au mieux il passerait à côté de plein de choses. Quoique avec les gamins de maintenant...</p>
<p><em>The Order of the Phoenix</em> n’est qu’un long calvaire pour Harry Potter. Son monde déjà pas très douillet semble s’écrouler (et surtout le grand foyer que l’école est devenue pour lui<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-5" id="rev-pnote-579-5">5</a>]</sup>) et le malheureux en prend plein la gueule, y a pas d’autre mot. L’âge n’est pas facile et, forcément, un petit orphelin <del>sur</del>doué surmédiatisé télépathe langue-de-serpent rebelle désorienté arrogant et de plus irréfléchi et irresponsable comme on l’est souvent à 14 ans quelque soit son éducation<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-6" id="rev-pnote-579-6">6</a>]</sup> a du mal à tout encaisser. Après maintes catastrophes scolaires, magiques, sportives et sentimentales, Harry termine l’année dans une apothéose qui n’est un <em>happy end</em> que parce que la pire catastrophe a été évitée de justesse, et pas grâce à lui.</p>
<p>Je suis resté sur ma faim avec la conclusion : enjeu réel de l’histoire un peu dérisoire par rapport à ce que promet l’affrontement manichéen Dumbledore/Voldemort ; fin d’année scolaire trop vite évacuée ; pas de mention des résultats de la compétition de quidditch... Rowling en avait peut-être marre après 800 pages (c’est le plus lourd tome de la série). En tout cas, cette fin bancale donne envie d’enchaîner avec la suite : les trois derniers tomes sont une seule histoire de 2000 pages. (De manière générale, Rowling a du mal avec les conclusions de ses livres ; <em>The Deathly Hallows</em> est d’autant plus frustrant sur ce point que c’est la fin du cycle.)</p>
<p>J’ai eu du mal à lâcher le livre (et les suivants). Rowling sait captiver son auditoire. Le niveau de détail du monde magique y est pour beaucoup, comme dans l’œuvre de JRR Tolkien, Frank Herbert et autres bons écrivains de l’imaginaire. Mais on reste dans la littérature jeunesse, et certaines ficelles sont parfois un peu grosses : découpage artificiel de l’histoire pour suivre le déroulement de l’année scolaire, personnages souvent caricaturaux (quoique, pour certains, très ambigus<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-7" id="rev-pnote-579-7">7</a>]</sup>, et les histoires et failles des personnages se font de plus en plus jour à chaque tome), répartition systématique des personnalités (Hermione l’intello, Harry le leader, Ron le bon copain, Neville le gaffeur, les jumeaux blagueurs, Mc Conagal prof sévère-mais-juste, Dumbledore le sage (presque) invulnérable et infaillible...), morales un peu lourdement assénées par certains côtés, coups de bol à peine plausibles, personnages importants pas assez développés (Cho ici, Ginny dans les tomes suivants)...</p>
<p>Le petit magicien semble par bien des côtés n’être que le chien (souvent) obéissant de Dumbledore, ou le pion de Voldemort (et pas que de lui), sans autonomie réelle, et se laisse porter par les événements. Sa chance insolente, la protection de Dumbledore, la sous-traitance de fonctions cognitives à Hermione ne compensent que partiellement bien des défauts. Quand Harry prend une initiative, la catastrophe suit souvent : Harry (et Ron, parfois Hermione...) se conduisent trop souvent de manière impulsive ou irréfléchie — mais après tout sans cela il n’y aurait pas d’histoire, tout se terminerait bien et justement, Harry a 14 ans.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-1" id="pnote-579-1">1</a>] <em>Un peu décevant ; Harry passe plutôt à côté de l’intrigue réelle entre Malfoy, Snapes et Dumbledore.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-2" id="pnote-579-2">2</a>] <em>L’apothéose. Assez mou pendant un tiers, et ensuite tout s’imbrique. Épilogue bâclé.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-3" id="pnote-579-3">3</a>] <em>Poudlard en français paraît-il. Blasphème !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-4" id="pnote-579-4">4</a>] <em>Bon, même en français ça vaut le coup.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-5" id="pnote-579-5">5</a>] <em>Rappelons que sa famille adoptive est caricaturalement infecte.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-6" id="pnote-579-6">6</a>] <em>Je me demande comment un ado actuel prend le message bien explicite du bouquin : Sirius et Lupin, rappelés à certaines cruautés de leur adolescence, se jugent eux-même sévèrement. Le thème de l’évolution morale et du contrôle de soi est capital. Qui ne peut pas dire « qu’est-ce que j’étais con à cet âge-là ! » <a href="http://www.michel-bellin.fr/bellin/blog-officiel-michel-bellin/index.php/2008/01/22/299-on-nest-pas-serieux-quand-on-a-17-ans">Même Rimbaud le clame, et pour un âge plus tardif</a>.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#rev-pnote-579-7" id="pnote-579-7">7</a>] <em>Snape est délicieux. Et ça continue jusqu’à la fin de la série.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/579La taille de la Lune est-elle une coïncidence ?urn:md5:6969ab46dd6f57df9f4f306677e5ca632009-05-25T21:35:00+00:002011-06-03T17:41:32+00:00ChristopheParadoxe de Fermi et Exobiologieanthropieauto-organisationcatastropheclimatcomplexitécosmologieDieudéterminismeextraterrestresintelligenceJupiterLuneparadoxeprise de tête<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/astronomie/ÉclipseAnnulaire_NASA.jpg" alt="Éclipse annulaire, domaine public (merci à la NASA)" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Éclipse annulaire, domaine public (merci à la NASA) " /></p>
<p>Les éclipses de soleil totales sont un des plaisirs gratuits que la nature nous offre, beaucoup trop rarement hélas (et, <a href="https://www.coindeweb.net/murphy/">Murphy</a> oblige, forcément par temps nuageux). La Lune masque exactement le Soleil et seule reste visible une infime partie de la couronne, dont les protubérances.</p> <p>Ce spectacle défie pourtant les lois de la probabilité : le diamètre apparent de la Lune est <em>exactement</em> celui du soleil. Or, la Lune est à environ 384 000 km, le Soleil à 149,6 millions, et ce rapport de distances d’environ 400 est à peu près celui de leur taille (3 474 contre 1,39 millions de km). L’angle des plans des orbites de la Terre et de la Lune marquant 5°, et les distances évoluant puisque les orbites sont des ellipses, la Lune apparaît parfois plus petite et donne lieu à une moins spectaculaire éclipse annulaire. Il n’empêche.</p>
<p>La probabilité est-elle si étonnante que cela ? Est-ce un véritable miracle ou un simple coup de bol ?</p>
<h3>Durée du spectacle</h3>
<p>Une question préalable : la distance Terre-Lune évolue, quelle est la fourchette de temps pendant laquelle le spectacle peut être admiré ? Sommes-nous pile poil au moment où le spectacle est visible, ce qui rendrait la coïncidence encore plus dingue ?</p>
<p>Selon <a href="http://www.ac-nice.fr/clea/lunap/html/TerreLune/TerreLuneApprof.htm">un calcul théorique de Christian Buty</a> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence#pnote-437-1" id="rev-pnote-437-1">1</a>]</sup>, la Lune s’éloigne en gros de 3 cm par an, soit une évolution de la distance de 10% en un milliard d’années : on peut donc supposer que toutes les espèces vivantes depuis la sortie de l’océan ont eu le plaisir d’admirer des éclipses totales. Nous ne sommes pas à un moment particulièrement privilégié de l’histoire du vivant.</p>
<p>Les calculs plus précis sur le site de l’Observatoire de Lyon (<a href="http://www-obs.univ-lyon1.fr/labo/fc/cdroms/cdrom2007/cd_tls2007/08-Eclipses_distances/dist_eclipses.pdf">ici</a> ou <a href="http://www-obs.univ-lyon1.fr/labo/fc/cdroms/cdrom2007/cd_tls2007/08-Eclipses_distances/dist_eclipses.ppt">là</a>) confirment : même les éclipses totales (non annulaires) sont un épisode d’une durée de 1 à 1,5 milliard d’années. Ce n’est qu’une partie de l’histoire de la Terre, mais dans celle du vivant terrestre c’est énorme : nous aurions pu apparaître 100 millions d’années plus tôt ou plus tard, nous aurions quand même profité du grandiose spectacle.</p>
<p>Le diamètre apparent de la Lune varie (entre 29’32 et 33’29), ce qui donne une variabilité du même ordre que celle liée à l’évolution de l’orbite (même si les conditions pour qu’il y ait éclipse, nouvelle Lune notamment, restreignent peut-être la fourchette).</p>
<h3>Une Lune improbable</h3>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/astronomie/Solar_eclips_1999_5_300.jpg" alt="L’éclipse de 1999 - Photo de Luc Viatrou, via Wikimédia Commons" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="L’éclipse de 1999 - Photo de Luc Viatrou, via Wikimédia Commons" /></p>
<p>Le plus drôle est que la Lune est elle-même un astre improbable. Un satellite aussi gros et proche pour une planète aussi petite que la nôtre est un record dans le système solaire<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence#pnote-437-2" id="rev-pnote-437-2">2</a>]</sup>. Selon le scénario de création actuellement privilégié, la Lune est l’enfant des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Théia_(planète)">amours fusionnelles et très tumultueuses de l’embryon de la Terre et de Théia</a>.</p>
<p>L’avocat du diable peut faire remarquer que la formation d’une Théia sur le point de Lagrange (et donc le choc qui s’ensuit fatalement) pourrait être une constante, de même qu’une planète géante comme Jupiter comme bouclier anti-comète n’est pas forcément rare. Hélas, les détections de systèmes solaires de plus en plus nombreux indiqueraient qu’un beau système bien ordonné comme le nôtre serait plutôt une rareté ; une Terre grossie par Théia et stabilisée par la Lune devient encore plus improbable (<a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Rare_Earth_hypothesis" hreflang="en">hypothèse de la Terre rare</a>) ; alors que dire de la coïncidence donnant lieu aux éclipses solaires ?</p>
<h3>Principe anthropique</h3>
<p>Le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_anthropique">principe anthropique</a> permet de justifier que nous nous trouvions sur une planète pile poil dans les zones d’habitabilité de la Galaxie et du système solaire, avec de la tectonique des plaques pour renouveler l’atmosphère, un champ magnétique protecteur, un gros satellite stabilisateur du climat (peut-être des caractères tous conséquence de l’impact avec Théia qui a donné une Terre plus grosse), sinon, tout simplement, nous ne serions pas là pour en parler.</p>
<p>Par contre il est difficile de justifier une Lune avec exactement le bon diamètre pour une éclipse avec ce principe.</p>
<p>Peut-être en fait est-ce lié : le rôle de stabilisateur d’une Lune proche et massive est peut-être encore plus capital pour l’apparition de la vie évoluée que nous ne l’imaginons ; l’évolution animale a déjà été assez chaotique pour ne pas en rajouter avec un <a href="http://pages.infinit.net/noxoculi/lune-in.html">axe de rotation terrestre évoluant aléatoirement</a>.</p>
<p>Le raisonnement s’inverse alors : nous sommes là, <em>donc</em> nous avons une grosse Lune proche capable de masquer le Soleil, et vu le temps nécessaire à l’apparition de la vie intelligente, celle-ci a pu s’éloigner quelque peu ; l’éclipse solaire exacte ou légèrement annulaire est alors peut-être un simple coup de chance pas si improbable une fois donné le paramètre « il existe une vie assez intelligente pour admirer le spectacle. »</p>
<p>Mouais. J’aimerais une explication moins anthropocentrique. On verra si les premières formes de vie complexes que nous rencontrerons auront une grosse Lune aussi, et les éclipses de soleil corollaires.</p>
<h3>Œuf de Pâques</h3>
<p>Reste une hypothèse que j’aime bien, celle de l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Easter_egg">Œuf de Pâques</a>, expression directement issue de l’informatique. Un créateur a tendance à laisser une trace de son passage dans son œuvre, que ce soit un architecte (une stèle, une marque...) ou un informaticien (il y a de <a href="http://www.zonewindows.com/easter-eggs.php">très nombreux écrans ou animations cachées dans beaucoup de logiciels</a> même si la tradition semble un peu se perdre). Le concept est repris par exemple dans <em>Strate-à-gemmes</em> (<em>Strata</em>) de Terry Pratchett, où des artisans concepteurs de planètes se font enguirlander quand ils laissent une impossibilité géologique dans leurs créations : tout doit <em>sembler</em> naturel et ancien. L’apparition d’une planète <em>plate</em> totalement farfelue, autour de laquelle tourne un petit soleil, cernée d’une cascade géante où se déversent les océans, leur montre que leur univers lui-même <em>est</em> une vaste blague.</p>
<p>Notre Lune trop parfaite est-elle un tel œuf de Pâques ? Inutile d’aller chercher l’hypothèse d’un Dieu omnipotent omniscient infiniment bon ; un simple jardinier besogneux (format <a href="http://journalennoiretblanc.blogspot.com/2008/01/mythes-grecs-2-la-guerre-des-dieux-et.html">Atlas</a>) ou un ingénieur un peu joueur (tendance <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sim_City">God </a><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Spore_(jeu_vidéo)">games</a></em>) suffit pourvu que le contrôle de la conception de planètes lui soit possible. Les jolies éclipses de Soleil pourraient n’être qu’un cadeau ou une touche finale pour ses créatures. Quoique dans ce cas le travail est bâclé, un alignement parfait des plans des orbites de la Lune et du Soleil aurait pu nous faire profiter d’une éclipse solaire par mois.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence#rev-pnote-437-1" id="pnote-437-1">1</a>] <em>Grosso modo confirmé par les chiffres mesurés que j’ai trouvé sur des pages absolument pas certifiées du web, mais je ne connais pas de théorie du complot qui cherche à truquer ces chiffres.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence#rev-pnote-437-2" id="pnote-437-2">2</a>] <em>Quoique Pluton et Charon font pire, mais on ne parle plus de planète.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/437 « La Terre avant les dinosaures » de Sébastien Steyer et Alain Bénéteau (ou : de l’ascension des tétrapodes du Dévonien au Secondaire, des sarcoptérygiens aux sauropsides et mammaliens)urn:md5:f347c74a610f959b2eb28349e1ab34a32009-04-12T20:12:00+02:002011-06-03T11:12:39+02:00ChristopheTemps et transformationsapocalypsecataclysmecatastrophecomplexitédinosauresdéveloppementeauexaptationexpertisegigantismegénéalogiegéologiemythemèmeorganisationtempsténacitévolcansécologieéonsévolution<p>Commençons par le principal reproche à faire à ce livre par ailleurs très intéressant : le titre est une escroquerie. Celui qui, alléché par le <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien">docu-fiction de la BBC qui m’avait enthousiasmé</a> cherche à retrouver les araignées géantes et les évolutions climatiques en sera en parti pour ses frais. Il est clair d’entrée que l’auteur ne s'intéresse guère qu’à nos ancêtres, les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Tetrapoda">tétrapodes</a>.</p> <p>Nous sommes des tétrapodes, au même titre que les crapauds, les tortues, les poulets, les diplodocus, et les héritiers de quelques animaux à l’air ichtyen<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#pnote-549-1" id="rev-pnote-549-1">1</a>]</sup> et d’une invention géniale : les papattes !</p>
<h3>Exaptation</h3>
<p>Contrairement aux idées reçues, et à ce que je lisais dans les livres de ma jeunesse, les pattes ne sont pas apparues comme conséquence d’une sortie des eaux d’un poisson aux nageoires charnues (type <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Cœlacanthe">cœlacanthe</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#pnote-549-2" id="rev-pnote-549-2">2</a>]</sup>) mais bien dans l’eau avec une fonction marine dans des milieux côtiers (stabilisation, pagaie...), <em>puis</em> ont été détournées comme pattes par les tétrapodes.</p>
<p>De même, le poumon a peut-être d’abord servi de stabilisateur (sinon pourquoi des poissons en auraient-ils eu besoin ?) avant d’acquérir une fonction respiratoire. Les poissons à poumons existent encore (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dipnoi">dipneustes</a>), ou bien se débrouillent très bien pour bouger avec de simples nageoires (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Periophthalmus">poissons grenouilles</a>).</p>
<p>Ce bricolage évolutif, où un organe est détourné pour une autre fonction se nomme <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?tag/exaptation">exaptation</a>, et j’adore ce mot. Autres exemples : les plumes apparues chez certains dinosaures comme isolant thermique, puis utilisées pour faciliter le vol (lequel vol est possible sans plumes : <em>cf</em> les animaux planeurs, les chauves-souris ou les <a href="http://www.dinosoria.com/volant_general.htm">ptérosaures</a>) ; ou le sixième doigt du panda qui est un os du poignet déformé.</p>
<h3>La sortie des eaux</h3>
<p>Dans les livres de ma jeunesse (et même de celle de mes grands-parents...) le cheminement de « la sortie des eaux » était clair, je me souviens des images : dans un monde désertique livré à la sécheresse, un poisson « costaud des nageoires » et, coup de chance, doté d’un poumon, errait de flaque en flaque. Sélection naturelle aidant, les nageoires sont devenues des pattes et le règne des tétrapodes commençait. Certains ne restèrent que batraciens ; d’autres inventèrent l’œuf pour pondre loin de l’eau et devinrent reptiles, dont certains devinrent mammaliens puis mammifères, etc.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/animaux/Devonien/Ichthyostega_BW_d_apresAhlberg2005_ArthurWeasley_licenceGNU_320.jpg" alt="Ichthyostega_BW_d_apresAhlberg2005_ArthurWeasley_licenceGNU_320.jpg" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" title="Ichtyostega, un des premiers tétrapodes au Dévonien. Dessin d’Arthur Weasley d’après une reconstitution d’Alhberg. Licence documentation libre GNU ; trouvé sur Wikipédia." />Ce livre dynamite le vieux mythe (déjà moisi depuis longtemps chez les paléontologues je suppose). D’une part, « la » sortie des eaux est illusoire, puisque le phénomène a eu lieu de nombreuses fois : quand, au Dévonien, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ichthyostega">Ichtyosthega</a>, pourtant loin d’être le premier tétrapode, se déplaçait comme un phoque sur les berges des fleuves où il passait son temps, la végétation avait déjà atteint une forme aussi complète qu’à présent, et les arthropodes (scorpions, mille-pattes métriques, et des crustacés occupés à devenir des insectes, tous au format géant) se répandaient déjà.</p>
<p>À l’Ère suivante, au Carbonifère, toute cette diversité explose, et pas seulement celle des tétrapodes cantonnés aux environnements marins. Certains d’ailleurs retourneront complètement dans l’eau, éventuellement en y perdant leur pattes (et ce ne sont pas les ancêtres des serpents). De manière générale, ce livre rend plus clair que les taxons actuels que nous connaissons (reptiles, batraciens, mammifères, dinosaures dont les oiseaux) ne sont qu’une infime partie de ce que les tétrapodes ont pu créer. Des embranchements entiers ont disparu au fur et à mesure des crises écologiques ou plus simplement de la bataille pour la vie.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/animaux/Permien/Diplocaulus_BW_Arthur_Weasley_licenceGNU_320.jpg" alt="Diplocaulus_BW_Arthur_Weasley_licenceGNU_320.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Diplocaulus, un léponspondyle du Permien. Dessin d’Arthur Weasley. Licence documentation libre GNU, trouvé sur Wikipédia." />Le passage sur la lutte entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Temnospondyli">temnospondyles</a> et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Lepospondyli">lépospondyles</a> paraîtra un peu oiseuse au non-spécialiste, ainsi que la question de savoir comment se rattachent à l’arbre de la vie les « lissamphibiens » (grenouilles, salamandres, anoures, etc.). Ces derniers ont en fait tellement évolué depuis le Carbonifère que les spécialistes s’étripent encore sur leur arbre généalogique.</p>
<h3>Régulation</h3>
<p>Un long passage détaille les mécanismes de formation des doigts. Selon le bon (et faux) vieux proverbe « <a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/capsules/outil_bleu12.htm">l’ontogénie résume la philogénie</a> », on peut l’observer sur les fœtus de poulet ou de souris. Il s’agit bien d’une innovation complète propre aux tétrapodes et pas d’une exaptation. On sera surpris d’apprendre que le nombre de cinq doigts n’a pas vraiment de « justification » ; <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Acanthostega">Acanthosthega</a></em> en avait huit !</p>
<p>C’est l’occasion d’un petit cours sur les gènes de régulation de la croissance : autant que les gènes eux-mêmes, la manière dont ils s’expriment mène à des animaux très différents. Nos gènes de régulation sont fort voisins de ceux de la mouche !</p>
<h3>La crise</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien">La crise du Permien</a> fait l’objet d’un chapitre. L’auteur ne tranche pas entre les hypothèses, qui ne s’excluent d’ailleurs pas mutuellement : régression océanique, volcanisme massif, météorite tueuse... Le résultat, je le rappelle, fut une extinction massive d’espèces bien pire que la crise suivante (celle qui a été fatale aux médiatiques dinosaures).</p>
<p>Qui dit extinction massive dit niches écologiques à remplir, et radiation évolutive. L’auteur insiste bien sur le fait que les espèces qui profitent de la crise existaient en général <em>avant</em>, mais étaient concurrencées par les genres dominants : la plus grande partie de l’existence des mammifères (héritiers du dimétrodon) s’est déroulée à l’ombre des dinosaures.</p>
<h3>Bref</h3>
<p>À part la faute du titre trompeur, on obtient là un bel exemple de ce qu’est la paléontologie, et une belle leçon d’évolution. Il faut aimer (ou au moins accepter de) engranger quelques termes « techniques » : <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sarcopterygii">sarcoptérygiens</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#pnote-549-3" id="rev-pnote-549-3">3</a>]</sup>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Amniote">amniotes</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Synapside">synapsides</a>... (Ces trois termes, difficiles à recaser lors d’un dîner, nous désignent tous, ainsi que le chat du voisin ou un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dimetrodon">dimetrodon</a>.) Celui prêt à fournir l’effort se fera plaisir, et enrichira sa culture après avoir oublié beaucoup de termes ; celui doté de la ténacité intellectuelle d’un George Bush regardera les images et les légendes. Le livre ne conviendra <em>pas</em> à un enfant (à moins que vous ne pensiez qu’il ne soit la réincarnation du regretté <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Stephen_Jay_Gould">Stephen Jay Gould</a>.)</p>
<p>L’auteur se met lui-même en situation et décrit son travail de paléontologue : fouilles sous le soleil de plomb du désert nigérien, analyse de fossiles aux rayons X, simulation numérique de contraintes sur les os, etc.</p>
<p>Sur la forme, la réalisation est parfaite, notamment avec les rabats de couverture reprenant l’un l’arbre phylogénétique des bestioles décrites dans le livre (et l’on voit que les mammifères sont notés tout en bas au bout d’une sous-sous-sous-branche), et l’autre la liste des périodes géologiques impliquées (car si le commun des mortels sait que le Jurassique et le Crétacé sont l’âge des dinosaures, il a plus de mal à situer le Carbonifère et le Dévonien, et j’avais de gros doutes sur la situation du Frasnien et du Famennien).</p>
<p>Les illustrations de <a href="http://www.paleospot.com/">Alain Bénéteau</a> sont superbes et réalistes. J’aurais tendance à regretter qu’elles « lissent » un peu les différences de représentations qu’auraient pû donner plusieurs artistes, mais je pinaille. (<a href="http://www.paleospot.com/pdf/promo_dinos.pdf">Voir le PDF de présentation pour un échantillon.</a>)</p>
<p><strong><a href="http://www.paleospot.com/actualite.php?actu=19">NB pour les Parisiens : les auteurs dédicacent chez Gibert samedi prochain !</a></strong></p>
<p><img src="http://www.paleospot.com/image_une/Projet_paleospot_promo.jpg" alt="" style="display:block; margin:0 auto;" /></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#rev-pnote-549-1" id="pnote-549-1">1</a>] <em>Ça sonne mieux que « poissonneux ».</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#rev-pnote-549-2" id="pnote-549-2">2</a>] <em>Vous saviez qu’un cœlocanthe avait plus en commun avec vous qu’avec un requin ou une truite ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#rev-pnote-549-3" id="pnote-549-3">3</a>] <em>Aucun rapport avec Celui-qui-ne-peut-être-nommé-sans-finir-dans-les-fichiers-des-Renseignements-Généraux.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Terre-avant-les-dinosaures-de-S%C3%A9bastien-Steyer-et-Alain-B%C3%A9neteau#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/549Les invasions d’espècesurn:md5:8c65c7d9d98789c04dd26eb0df2f45042009-03-25T00:00:00+01:002011-06-03T08:18:52+02:00ChristopheFragile planèteauto-organisationbon senscatastrophecomplexitédommagejardinagepessimismepollutionréalitéécologieévolution<p><strong>Question</strong> : les invasions d’espèces exotiques (naturelles ou à cause de l’homme) sont-elles directement responsables de la disparition des espèces locales ?</p> <p>C’était un article du <em><a href="http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/e/espace-numerique-detail.php?num=376">Pour la science</a></em> <a href="http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/e/espace-numerique-detail.php?num=376">n° 376 du mois de février</a> (donc ce n’est plus en kiosque), pages 22 et suivantes.</p>
<p>Réponse mitigée :</p>
<h5>Les milieux isolés</h5>
<p>Sur les milieux fermés, notamment les îles, la réponse est oui. Les cas abondent, par exemple aux Aléoutiennes : là où on a introduit les renards, les oiseaux sont beaucoup plus rares, le guano disparaît presque, et la prairie devient une toundra.</p>
<p>Pour la perche du Nil introduite dans le lac Victoria, qui a remplacé plusieurs espèces locales, c’est moins clair, la pollution peut avoir joué.</p>
<h5>Les milieux ouverts</h5>
<p>Et justement, l’intervention de l’homme semble plutôt la cause de l’installation d’espèces « exotiques », ou plus exactement « généralistes », peu exigeantes, mobiles, aimant les déchets, les nitrates et les milieux ouverts comme les champs, à la place d’espèces locales spécialisées. Ces dernières commencent par être affaiblies par la pollution, la déforestation, l’agriculture intensive... <em>puis</em> arrivent les espèces exotiques ou généralistes — elles ne sont donc pas la cause.</p>
<p><strong>Exemples :</strong></p>
<ul>
<li>dans les grands lacs américains, la moule locale a été victime de l’asphyxie <em>puis</em> les moules zébrées européennes se sont répandues ;</li>
<li>les orties aiment l’azote : la pollution aux nitrates les avantage ;</li>
<li>l’ibis sacré est une des espèces invasives en France, mais la plupart des envahisseurs sont des généralistes locaux : pigeon ramier, merle, rouge-gorge !</li>
<li>ça ne date pas d’hier : coquelicot et bleuet sont des envahisseurs moyen-orientaux qui aiment les prairies... et ont suivi l’expansion de l’agriculture !</li>
</ul>
<p>Au final, on observe une sorte d’« homogénéisation biotique » avec expansion de quelques espèces et raréfaction de la plupart (perte de biodiversité à la clé). Des indicateurs ont été mis au point qu’il serait fastidieux d’énumérer ici. En gros, plus la proportion d’espèces généralistes est forte, plus on peut considérer que le milieu naturel est perturbé (par l’homme, directement ou pas).</p>
<h3>Moralité</h3>
<p>Les espèces étrangères sont des boucs émissaires. La distinction est plutôt à faire entre espèces spécialisées d’un milieu et espèces généralistes, locales ou non. La biodiversité va continuer à en prendre un sacré coup à cause de la pollution et des techniques agricoles... (Bien noter qu’on ne parle pas ici de la lointaine jungle africaine, mais aussi des campagnes occidentales.)</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/02/28/Les-invasions-d%E2%80%99esp%C3%A8ces#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/539Les marges des déserts, berceaux des civilisationsurn:md5:f3bcdc86b231032268e0de808418bd012009-01-01T12:14:00+01:002009-04-13T10:40:06+02:00ChristopheHistoireAfriqueAmériqueAntiquitéauto-organisationcatastrophecivilisationclimatcomplexitéeaueffet de serreEmpire romainEuropeexaptationGrandes InvasionshistoireMoyen Âgeoptimismeparadoxesciencesociétés primitivestempsthéorietravailténacitéécologieéconomieéonsévolution<p>Une révé­la­tion sur la simul­ta­néité de l’appa­ri­tion de l’agri­cul­ture et de la civi­li­sa­tion dans les dif­fé­ren­tes par­ties du monde.</p> <h3>Simul­ta­néité du génie humain</h3>
<p>La révé­la­tion m’est venue grâce à un arti­cle du der­nier <em>Pour la Science</em> (n°375 de jan­vier 2009) : <em>Les mar­ges de désert, ber­ceaux des civi­li­sa­tions</em> de Bern­hard Eitel.</p>
<p>Jusqu’ici je m’étais tou­jours demandé com­ment il se fai­sait que les dif­fé­ren­tes civi­li­sa­tions humai­nes aient évo­lué sépa­ré­ment jusqu’à des sta­des pas trop dif­fé­rents les unes des autres, alors que l’huma­nité (<em>Homo sapiens</em>) a pres­que 200 000 ans au comp­teur. Cer­tes, au début, elle fut long­temps con­cen­trée en Afri­que<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#pnote-504-1" id="rev-pnote-504-1">1</a>]</sup>. Mais l’agri­cul­ture, l’écri­ture sont appa­rues en fait très récem­ment (je trouve des dates dif­fé­ren­tes sur le web, mais on tourne autour de 10 000 av. J.-C.). Un peu avant (-16 000), les chas­seurs déco­raient Las­caux.</p>
<p>Et atten­tion, on ne parle pas d’une décou­verte qui a donné un tel avan­tage à ses décou­vreurs qu’ils se sont répan­dus par­tout sur la pla­nète : l’agri­cul­ture a été décou­verte plu­sieurs fois, et l’écri­ture aussi. Si en Europe tout cela est bien de l’impor­ta­tion (il a même fallu pas mal de siè­cle depuis l’Ana­to­lie jusqu’à l’Atlan­ti­que), les Amé­ri­ques ont évo­lué indé­pen­dam­ment. Et mayas, aztè­ques, incas… con­nais­saient agri­cul­ture et écri­ture. Même si leurs civi­li­sa­tions ont été balayées par les Euro­péens, ces peu­ples n’avaient au plus « que » quel­ques siè­cles de retard sur l’Eura­sie. C’est un petit écart sur de tel­les durées.</p>
<p>Sans avoir trop réflé­chi à la ques­tion, je ne voyais que trois pos­si­bi­li­tés :</p>
<ul>
<li>une com­mu­ni­ca­tion entre les dif­fé­rents grou­pes : très dou­teux à l’échelle de plu­sieurs con­ti­nents, du moins avant l’inven­tion de la « civi­li­sa­tion », et cette com­mu­ni­ca­tion se fai­sait plu­tôt par migra­tion lente comme le néo­li­thi­que en Europe ;</li>
<li>une sorte de « fata­lisme », un groupe humain suf­fi­sam­ment impor­tant décou­vrant fata­le­ment l’agri­cul­ture au bout de tant d’années maxi­mum, et la masse cri­ti­que a été atteinte à peu près simul­ta­né­ment à plu­sieurs endroits à la fois car il y avait de nom­breux endroits où cela était pos­si­ble, et les pre­miers ont « étouffé » les autres ;</li>
<li>une cause exté­rieure glo­bale qui menait à l’agri­cul­ture et/ou la séden­ta­ri­sa­tion (laquelle est appa­rue la pre­mière ?), puis en cas­cade à l’explo­sion démo­gra­phi­que, les socié­tés, les États, etc. Mais quelle serait cette cause ?!?</li>
</ul>
<h3>La cause cli­ma­ti­que à dou­ble détente</h3>
<p>Selon l’arti­cle, c’est lumi­neux. La rai­son est cli­ma­ti­que : d’une part le réchauf­fe­ment de la pla­nète mar­que le pas après la fin de la gla­cia­tion ; d’autre part et assez con­tre-intui­ti­ve­ment, ce réchauf­fe­ment aug­mente la plu­vio­mé­trie dans les déserts.</p>
<ul>
<li>Nos ancê­tres se répan­dent un peu par­tout pen­dant les diver­ses gla­cia­tions et pério­des inter­gla­ciai­res jus­que la fin de la der­nière vers -18 000.</li>
<li>Il y a 8000 ans le cli­mat est devenu très clé­ment pour les chas­seurs-cueilleurs, et les déserts ont qua­si­ment dis­paru : le Sahara notam­ment est deve­nue une savane pleine de gibiers, sans qu’y sévis­sent les mala­dies tro­pi­ca­les. Eitel sug­gère que l’accrois­se­ment démo­gra­phi­que con­sé­quent y est la cause de l’inven­tion de l’éle­vage.</li>
<li>Après cette période de réchauf­fe­ment un léger refroi­dis­se­ment pro­vo­que un nou­veau dés­sè­che­ment des déserts. Les popu­la­tions, pié­gées, se réfu­gient dans les oasis - par exem­ple la plus grosse d’entre elles, le Nil ! Popu­la­tion impor­tante et néces­sité de s’adap­ter mènent à l’agri­cul­ture, l’irri­ga­tion, des sur­plus, du com­merce, des guer­res, une orga­ni­sa­tion crois­sante, des royau­mes, bref la société. Eitel note que ces royau­mes appa­rais­sent d’abord dans les endroits les plus secs et dif­fi­ci­les au bord du Nil, au sud !<br />Le phé­no­mène se repro­duit à d’autres endroits, notam­ment le Crois­sant fer­tile (au bord d’un désert et près de grands fleu­ves). Eitel détaille l’exem­ple récem­ment décou­vert du sud du Pérou : le désert de l’Ata­cama devenu humide est colo­nisé (plus tard qu’en Afri­que), puis s’assè­che et la popu­la­tion se regroupe dans des oasis flu­via­les. La den­sité de popu­la­tion a le même effet qu’ailleurs : séden­ta­ri­sa­tion, éle­vage, céra­mi­que, société, etc. <br />Un regret : l’arti­cle ne détaille pas l’évo­lu­tion dans les autres grands cen­tres de civi­li­sa­tion qui nais­sent à la même épo­que : la Chine, l’Indus, le Niger (même si ces deux der­niers sont là aussi des fleu­ves au bord d’un désert).</li>
</ul>
<h3>Pers­pec­tive</h3>
<p>Bref : expan­sion démo­gra­phi­que due à un cli­mat clé­ment, re-déser­ti­fi­ca­tion, con­cen­tra­tion, et inven­tion donc pres­que simul­ta­née de la civi­li­sa­tion à divers endroits.</p>
<p>Nous dépen­dons du cli­mat, ce n’est pas nou­veau. En marge de l’arti­cle, une courbe mon­tre que, plus récem­ment, celui-ci a joué un rôle : des opti­mums cli­ma­ti­ques ont vu l’apo­théose romaine ou l’expan­sion du Moyen Âge (entre l’An Mil et la Peste Noire, la popu­la­tion fran­çaise a plus que dou­blé !), et un refroi­dis­se­ment a mar­qué l’effon­dre­ment de l’Empire romain.</p>
<p>La ques­tion se pose quant à savoir si nous serons capa­bles de <em>nous</em> adap­ter au chan­ge­ment cli­ma­ti­que accé­léré actuel. Savoir qu’une période chaude n’est pas for­cé­ment syno­nyme de déser­ti­fi­ca­tion géné­rale redonne de l’espoir, encore ne fau­drait-il pas déboi­ser ni faire mon­ter le ther­mo­mè­tre trop haut trop vite…</p>
<p>Une leçon de morale pour finir : la « civi­li­sa­tion » (agri­cul­ture, société…) n’a pas été inven­tée par les peu­ples situés aux endroits les plus favo­ra­bles, mais par ceux qui, accu­lés par leur nom­bre et la raré­fac­tion des res­sour­ces, ont dû évo­luer pour ne pas dis­pa­raî­tre. « Ce qui ne me tue pas me rend plus fort » et « c’est au pied du mur qu’on apprend à grim­per. »</p>
<p><strong>PS</strong> : Bonne année ! L’année 2009 pourra dif­fi­ci­le­ment déce­voir, ce sera son bon côté.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#rev-pnote-504-1" id="pnote-504-1">1</a>] <em>À moins que la théo­rie de l’évo­lu­tion simul­ta­née d’</em>Homo erec­tus<em> en </em>Homo sapiens<em> sur tous les con­ti­nents à la fois soit la bonne, mais j’ai cru com­pren­dre qu’elle était en perte de vitesse.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/12/29/Les-marges-des-deserts-berceaux-des-civilisations#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/504Le bug solaire qui nous pend au nezurn:md5:916b21120b5d6269d00e7efb791673e92008-11-28T00:00:00+01:002011-06-02T13:36:08+02:00ChristopheBug de l’An 2000 et d'autres tempsastronomiebugcatastropheconquête spatialedommagedysfonctionnementinformatiquepessimismeréseausaturationsciencesécurité<p>Le plus gros danger pour toute notre infrastructure électrique et électronique vient du ciel. Les dégâts sont déjà sérieux et bien pire pourrait nous tomber à brève échéance.</p> <p>(<em>Ceci est un résumé d’un article du dernier </em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008">Pour la Science</a><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008"> n°374 de décembre 2008, dont j’ai parlé il y a peu</a>. Achetez-le. </em>)</p>
<p>En 1859, la plus grosse tempête solaire connue a frappé la Terre. À l’époque, rien de plus complexe que le télégraphe n’existait mais celui-ci a été bloqué par les courants induits. Au même moment, les aurores boréales, dues à des ceintures de Van Allen totalement désagrégées, éclairaient les nuits de Panama ou Cuba.</p>
<p>À présent on sait que ce genre de tempête est provoquée par une énorme éjection de masse coronale (de la matière solaire) qui écrase totalement la magnétosphère terrestre. Le plasme en lui-même n’est pas le plus dangereux, les moments les plus intéressants se situent lors de la reconnexion des lignes de champs (courants induits).</p>
<p>Ce genre de catastrophe nous pend au nez à court ou moyen terme. Régulièrement nous arrivent dessus des tempêtes solaires de moindre importance qui ont déjà fait quelques dégâts.</p>
<h3>Réseau par terre</h3>
<p>Aux pires moments, les courants induits de l’ionosphère se propagent dans le sol : la terre n’est plus neutre ! Et ce, à l’échelle d’un pays ou d’un continent... Par exemple, <a href="http://www.agu.org/sci_soc/eiskappenman.html" hreflang="en">les réseaux électriques canadiens avaient déjà sauté en mars 1989 pour une cause similaire</a>. Pour une fois, ce serait les pays riches (plus près des pôles) qui seraient les plus menacés, un <em>remake</em> de 1859 plongeant dans le noir des continents entiers, et nécessitant des mois de réparation.</p>
<h3>Satellite grillé</h3>
<p>Il n’y aurait pas que les électriciens à devoir prendre des précautions. En vingt ans, nous sommes devenus monstrueusement plus dépendants des satellites (les premiers exposés, hors de l’atmosphère protectrice).</p>
<p>D’après l’article, il « suffirait » de mettre les satellites sous surveillance. Leur conception prévoit déjà des situations de ce genre et on assisterait « simplement » à un vieillissement accéléré. On a aussi déjà perdu des satellites orbitant très bas, qui se sont retrouvés tout d’un coup dans la haute atmosphère chauffée par les rayons X, gonflée de plusieurs dizaines de kilomètres, et s’y sont brûlé.</p>
<p>Les assureurs des satellites connaissent la situation et les dégâts dues aux tempêtes solaires courantes se chiffrent en dizaines de millions d’euros annuels. Une grande tempête pourrait se chiffrer en dizaines de milliards.</p>
<p>Une mention pour les astronautes : leur vie ne serait pas directement menacée, ils prendraient juste en quelques heures l’équivalent d’une vie d’irradiation naturelle au sol.</p>
<h3>Ordinateur planté</h3>
<p>Les ordinateurs, à la mémoire toujours plus dense deviennent de plus en plus sensible au moindre petit rayon cosmique qui passe. L’erreur causée par la tempête solaire est estimée à une pour 256 Mo, soit déjà 16 bits inversés pour un serveur bien doté.</p>
<p>(<em>Remarque personnelle : Je ne sais pas si les barrettes de mémoire actuelles sont capables de repérer au moins l’erreur induite pour tout arrêter, ou si des données seront impitoyablement corrompues, doublant, quadruplant ou divisant par huit des comptes bancaires. <br />Même dans le cas favorable d’un simple blocage, quel sera l’impact de millions de serveurs de tous types forcés de rebooter quasi-simultanément ? D’une part il est toujours risqué de rebooter une machine qui ne l’est jamais (les fichiers de configuration sont-ils tous à jour ?) ; d’autre part l’indisponibilité simultanée de larges pans d’Internet ou des réseaux d’entreprise risque de révéler quelques palanquées de bugs bien planqués. </em>)</p>
<p>Il faudra aussi se passer de GPS pendant quelques temps : si les satellites ont tenu, leurs signaux seront perturbés et parasités. Pas un problème pour le commun des mortel qui réapprendra éventuellement à lire une carte routière, mais une petite catastrophe pour certaines applications du genre des systèmes anti-collision des avions.</p>
<h3>Peau toastée</h3>
<p>L’article mentionne que la couche d’ozone n’apprécie pas le traitement et met quelques années à retrouver son état normal.</p>
<h3>Préavis</h3>
<p>La bonne nouvelle : les astronomes, en comptant le nombre de tâches solaires, pourront avertir qui de droit de l’imminence du danger ; et lorsque la tempête se déclenchera, avec l’éjection de quelques millions de tonnes de matière solaire dans l’espace, le préavis sera de plusieurs heures, sinon jours.</p>
<p>La mauvaise nouvelle : les organismes chargés de surveiller le soleil et de communiquer aux industriels la météo solaire sont dangereusement sous-équipés (les auteurs prêchent pour leur paroisse, mais les enjeux sont effectivement énormes.)</p>
<p>Les auteurs insistent aussi plusieurs fois sur la différence que fera toute réserve de capacité électrique ou de disponibilité de satellites : ce pourrait être la différence entre un mauvais moment et un véritable effondrement. Les coupures à l’échelle presque continentales que nous avons vues ces dernières années n’encouragent pas à l’optimisme...</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Le-bug-solaire-qui-nous-pend-au-nez#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/492« Pour la Science » de décembre 2008 : sauropodes qui fermentent, mer Aral qui remonte.urn:md5:2ac77f157b3697c8438b8f4268b716022008-11-26T00:00:00+01:002011-06-02T11:00:19+02:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéauto-organisationcatastropheclimatconquête de l’inutileconquête spatialedinosauresdéterminismeeauenfantsenseignementgaspillageGauloisgéologieMarsmathématiquesoptimismeperspectivesciencetourismeécologieéducationémerveillement<p>Plein de petites choses.</p> <p>Un bon numéro de ma revue non informatique préférée. Sélection-flash (<em>en italique mes commentaires purement personnels</em>) :</p>
<ul>
<li>Un article sur la <strong>réforme du lycée</strong> où la part des sciences risque de ne pas sortir grandie, pour employer un euphémisme.<br /><em>Je ne ferai aucun commentaire sur notre Éducation nationale car je ne veux pas m’énerver.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Un petit article sur la <strong>vision des bébés</strong> : c’est très flou les premiers mois.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Union Européenne étudie comment encadrer le <strong>tourisme médical</strong> (<em>pas forcément un mal en soi</em>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Le meilleur article : <em><strong>Les sauropodes, géants habiles</strong></em>. <br />Les sauropodes, ce sont ces diplodocus, brachiosaures, titanosaures et autres bestioles, herbivores gigantesques, les plus pesantes créatures terrestres connues.<br />Les dernières découvertes établissent que ces animaux étaient bien terrestres et pas amphibies, à sang chaud, et nettement plus actifs que les représentations anciennes de l’imaginaire collectif.<br />Les causes du gigantisme de la famille sont floues. Fondamentalement, les sauropodes étaient de gigantesques sacs à fermentation de conifères, et plus gros le tas à fermenter dans le ventre, plus grande la chaleur et meilleure est la fermentation, ce qui encourage le gigantisme de la panse. Le reste (protection contre les prédateurs, taille utile pour atteindre les arbres) était probablement du bonus. De plus, les jeunes croissaient à une vitesse impressionnantes, ce qui en dit long sur la solidité de leurs os.<br />Me fait toujours sourire la correspondance de ces énormes animaux avec les oiseaux actuels : en l’occurence, l’article mentionne des vertèbres creuses (pour alléger le cou) et les gastrolithes (cailloux dans le gésier pour aider à la digestion).<br />La position exacte du cou reste matière à discussion, ainsi que leurs capacités cérébrales (ils étaient sociaux donc pas forcément si crétins que la tradition le dit).</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article a sans doute donné à un scénariste d’Hollywood les idées pour un film-catastrophe : <strong>la tempête solaire du millénaire</strong> nous pend au nez. J’en reparlerai ici. (<strong>Mise à jour</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/11/23/Le-bug-solaire-qui-nous-pend-au-nez">C’est fait !</a>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article sur <strong>les dunes de Mars</strong> peut intéresser du monde. <br /><em>Le plus important pour moi réside dans les réflexions sur les théories sur la formation des dunes qui ont dû être revues après confrontation avec les photos satellite des déserts martiens : quelques mesures contre la désertification sur Terre viendront-elles indirectement des enseignements des dunes martiennes ?</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Si vous êtes <strong>migraineux</strong>, un article vous apprendra que :</li>
</ul>
<ol>
<li>vous avez quelques centaines de millions de compagnons de souffrance, et :</li>
<li>la cause est une tare dans vos gênes.</li>
</ol>
<ul>
<li>L’autre article passionnant du numéro porte sur la <strong>Mer d’Aral</strong>, cette mer asiatique dont le niveau baisse constamment depuis des décennies à cause des plantations de coton ouzbekhs et kazakhs, et actuellement réduite à une fraction de sa surface d’autrefois. L’article relate les tentatives, notamment kazakhs, de sauver des parties de la mer ou au moins des écosystèmes parallèles. Le problème est principalement économico-humain (l’irrigation gaspille l’équivalent du débit des fleuves qui s’y jettent encore) mais la tonalité est optimiste.<br /><em><a href="http://www.dinosoria.com/mer_aral.htm">Voir aussi cette page avec quelques photos impressionnantes</a>.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Ceux que l’<strong>ordinateur quantique</strong> intéresse apprendront que des progrès ont été réalisés grâce à des chaînes d’ions. Moi j’attends de voir.</li>
</ul>
<ul>
<li>Cinq pages intéressantes sur l’<strong>historique de la jachère</strong>.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’article mensuel de l’excellent Jean-Paul Delahaye sur la <strong>dissection articulée de polygones</strong> m’a personnellement laissé froid. À voir tout de même, <a href="http://www.cs.purdue.edu/homes/gnf/book2/Booknews2/lalanne.html" hreflang="en">l’impressionnante photo d’une application en menuiserie</a>. Une autre application possible serait l’auto-organisation des nanoparticules selon le milieu.</li>
</ul>
<ul>
<li>Maintenant je sais comment fonctionnent les <strong>chaufferettes chimiques</strong> à base d’acétate de sodium en surfusion. Ce n’est <em>pas</em> le clic du petit bout de métal qui déclenche la solidification !</li>
</ul>
<p>Pas la peine d’acheter le magazine rien que pour ce qui suit, ce sont des brèves :</p>
<ul>
<li>Un petit article sur <strong>les rayons X émis par le scotch</strong> qui se déroule !</li>
</ul>
<ul>
<li>L’hypertension est en partie liée au manque d’H2S dans le sang. Oui, c’est le gaz des boules puantes.</li>
</ul>
<ul>
<li>« La conjecture d’ergodicité quantique unique, qui prédit le comportement des systèmes chaotiques quantiques, est en partie résolue. »<br /> <em>J’en suis fort heureux.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Une nouvelle méthode de prévision des tremblements de terre à base de détection de certains gaz libérés par les failles sous-marine évitera peut-être aux stambouliotes<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#pnote-494-1" id="rev-pnote-494-1">1</a>]</sup> de finir en grand nombre sous leurs immeubles le jour du Big One. <br /><em>N’achetez pas dans l’immobilier local sans certitude absolue du respect des normes antisismiques de l’immeuble. Dans ce cas, la corruption tuera.</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Les Gaulois clouaient bien les têtes de leurs ennemis à leur maison.</li>
</ul>
<ul>
<li>Certains gènes s’expriment au hasard. <br /><em>Le déterminisme génétique pur et dur prend un nouveau coup.</em></li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#rev-pnote-494-1" id="pnote-494-1">1</a>] <em>Habitants d’Istanbul.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/23/Pour-la-Science-de-decembre-2008#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/494Le lac vidé comme un lavabourn:md5:27bdb904593ab98a93b2fb3bf32bb9112008-04-01T00:00:00+00:002010-05-13T07:33:51+00:00ChristopheTout petit mondecatastrophegravitationgéologiepétrolesurréalismeécologie<p>On dirait du Tex Avery mais ça s’est <em>vraiment</em> passé : un lac vidé comme un lavabo :<br /> <br /><a href="http://www.damninteresting.com/?p=6" hreflang="en">http://www.damninteresting.com/?p=6</a></p> <p>En résumé et en français : en 1980, au milieu d’un petit lac américain, normalement peu profond, une plate-forme de forage pétrolier se met à s’enfoncer. Les techniciens évacuent et voient leur plate-forme s’enfoncer et disparaître. Puis un vortex se forme, de plusieurs centaines de mètres de large. De plus en plus puissant, le tourbillon arrache des morceaux des côtes, et même aspire un canal voisin. En moins de quatre heures, le lac avait disparu !</p>
<p>Sous le lac courent des mines de sel. Les mineurs voient soudain déferler des tonnes d’eau et évacuent immédiatement. Par chance, il n’y a pas de victime.</p>
<p>Apparemment une erreur de calcul avait mené les pétroliers à forer dans le dôme de sel. L’irruption de l’eau du lac <em>dissout</em> littéralement celui-ci, de plus en plus vite.</p>
<p>Dans les jours qui suivirent, le canal (inversé) ramène de l’eau salée du Golfe du Mexique, via la chute d’eau la plus grande, ce qui crée un plan d’eau beaucoup plus profond qui remplace aussi la vieille mine dissoute.</p>
<p>Inutile de dire que l’assureur a senti passer la note, et que l’écologie comme l’économie de la région changèrent notablement par la suite.</p>
<p>Il y a plus de détails sur <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Lake_Peigneur" hreflang="en">l’article Wikipédia</a>, et on trouvera sur Youtube un reportage avec des films d’époque :</p>
<center>
<object width="425" height="355"><param name="ovie" value="http://www.youtube.com/v/dHol4ICeDoo&rel=1"></param><param name="wmode" value="transparent"></param><embed src="http://www.youtube.com/v/dHol4ICeDoo&rel=1" type="application/x-shockwave-flash" wmode="transparent" width="425" height="355"></embed></object>
</center>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/04/01/219-le-lac-vide-comme-un-lavabo#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/197La Murphyliste a 10 ansurn:md5:fc10009b2f0e4e85fcd4b6054501123d2007-09-22T17:45:00+00:002014-02-26T13:56:03+00:00ChristopheMurphycatastrophechaoscitationcynismedommageinformatiquemortMurphyoptimismepessimismeréalité<p>Depuis 10 ans la liste de diffusion des lois de Murphy répand la divine parole.</p> <p>C’était il y a 10 ans, pas forcément hier pour moi, mais pas si loin, et je m’encroûtais comme un rat mort au fin fond du bout d’Allemagne de l’Est où je jouais avec du polyéthylène et des péroxydes - oui, c’était une autre vie. Mais j’avais au moins du temps pour créer mon site, notamment la partie <a href="https://www.coindeweb.net/citations/">Citations</a> et celle sur <a href="https://www.coindeweb.net/murphy/">la loi de Murphy</a>. Ces pages sont toujours là, bien notées par Google (surtout Murphy), même si le contenu n’a pas autant évolué que je l’aurais voulu (et je ne parle pas du look). Une bonne partie date du XXè siècle mais a gardé toute sa saveur.</p>
<p>Les listes de diffusion, dans cette époque glorieuse d’expansion géométrique de la toile, fleurissaient. Je cédai à la mode et le 22 septembre 1997, je diffusai la première Murphyliste : trois Lois de Murphy par jour.</p>
<p>La Murphyliste existe toujours, et de quotidienne elle est devenue quasiment mensuelle, suivant en cela l’érosion inéluctable de mon temps libre suite à la multiplication de mes activités (certaines chronophage genre boulot, voiture, dodo, télé, bébé). Le formulaire d’abonnement est là : <a href="https://www.coindeweb.net/listes.html#aboMurphyliste">listes.html#aboMurphyliste</a>.</p>
<p>La première Murphyliste débutait ainsi :</p>
<blockquote><p>D'abord la <strong>version originale (selon Peter)</strong><br /> <br />« S’il existe deux ou plusieurs manières de faire quelque chose et que l’une de ces manières est susceptible de se solder par une catastrophe, on peut être certain que quelqu’un se débrouillera pour la choisir. »<br /> Edward A.Murphy Jr.<br /> <br />*<br /> <br /><strong>Commentaire de O’Toole</strong> :<br /> <br />« Murphy était un optimiste. »<br /> <br />* <br /> <br /><strong>Addition à la Loi de Murphy</strong> :<br /> <br />« Si tout va bien, c’est que quelque chose cloche. »<br /> <br />*<br /> <br /><strong>Don Météorologique de Miod</strong> :<br /> <br />« Par temps variable, il suffit de prendre un parapluie avec soi pour qu’il ne pleuve pas, et de l’oublier pour qu’il pleuve. »<br /> <br />*<br /> <br />Pour finir, je vous signale que la presente liste a failli être victime de :<br /> <br /><strong>Loi des mailing-listes</strong> :<br /> <br />« Le lendemain de la création d’une mailing-liste, et de l’envoi de dizaines de mails et posts publicitaires, le réseau qui héberge cette liste se plantera pour au moins trois jours. »</p></blockquote>
<p>Quelques heures plus tard, <a href="http://www.gentiane.org/">Miod</a> me rétorquait :</p>
<blockquote><p><strong>Deuxième loi des mailing-listes</strong> :<br /> <br />« On ne vous demande jamais votre avis avant de vous prévenir que vous venez d’être rajouté d'office sur une ML. »</p></blockquote>
<p>Et oui, à l’époque je faisais un peu dans le spam enthousiaste :-)</p>
<p>La gestion des adresses à la main étant assez pénible, je suis vite passé sur Sorengo, dont le web français se souvient encore avec émotion (le service semblait en mort clinique mais a bien servi pendant des années). La <a href="http://fr.groups.yahoo.com/group/murphypro/">Murphypro</a> a vite suivi, liste dédiée aux discussions sur les lois. Ne dépendant pas de mon emploi du temps, cette liste est bien plus active par moments - et mine de rien, certains membres y sévissent depuis un paquet d’années aussi.</p>
<p>Dix ans...</p>
<p>Pour finir, un florilège de mes lois de Murphy préférées entre <a href="https://www.coindeweb.net/murphy/">3000</a> autres, souvent des lois originales de francophones qui me les ont envoyées :</p>
<blockquote><p><strong>Loi aquamurphyque</strong> :<br /> <br /> « Quand tout baigne, y en a forcément un qui coule. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Théorème météorologique d’Anna</strong> :<br /> <br />« Il fait toujours beau pendant les révisions. <br />S’il fait mauvais temps pendant les révisions, il fera beau pendant les examens, puis le temps redeviendra maussade dès la dernière épreuve passée. <br />S’il pleut pendant les examens, c’est qu’il aura plu avant les examens et qu’il pleuvra après. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Axiome de Cole</strong> :<br /> <br />« La somme de l’intelligence répartie sur la planète est constante ; <br />la population augmente. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Théorie cinétique des Gaz politiques de Coste :</strong><br /> <br />« La théorie cinétique des gaz ne s’applique pas aux politiciens :<br />plus ils sont proches du zéro absolu<br />et plus ils s’agitent. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Théorème d’Existence de Régnier</strong> :<br /> <br /> « Si Murphy n’avait pas existé, ses lois nous pourriraient simplement la vie sous un autre nom. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Joie de Wecker</strong> : <br /> <br /> « Chaque matin est l’aube d’une nouvelle erreur. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Lois de la Tartine de <a href="http://perso.wanadoo.fr/kiosquec/">Manson</a></strong> :<br /> <br />« Une tartine beurrée tombe toujours du côté non beurré lorsque le sol est mouillé. <br />Une tartine de confiture tombe toujours sur un vêtement avant de toucher le sol. <br />Une tartine sans beurre ni confiture tombe toujours dans le bol de café. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Remarque de <a href="http://www.voyageurgalactique.com/mythe.html">Marvin</a></strong> : <br /> <br />« Marrant comme, juste au moment où on se dit que la vie peut pas être pire, elle le devient. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Euphémisme de <a href="http://spip.chacun-ses-gouts.levillage.org/article.php3?id_article=139">Baudouy</a></strong> :<br /> <br />« La Réalité n’est qu’un euphémisme pour “cauchemar”. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Second corollaire de Forsyth</strong> :<br /> <br />« Juste quand vous voyez le bout du tunnel, la voûte s’effondre. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi du Tunnel</strong> :<br /> <br />« La “lumière au bout du tunnel” est simplement le phare d’un train arrivant en sens inverse. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Anti-Méta-Règle de Clancy</strong> :<br /> <br />« Il n’y a aucune règle qui dise que le monde doit avoir un sens. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Premier Corollaire de la Loi de Gumperson</strong> :<br /> <br />« Il n’y a rien de sûr, sauf la mort et les impôts. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Effet Bonaldi</strong> :<br /> <br />« Toute démonstration d’un produit quelconque qui fonctionnait parfaitement aux répétitions foirera lamentablement lors de la démonstration publique. » <br /> <br /> <strong>Loi de Vacelet</strong> (Extension de l’Effet Bonaldi) :<br /> <br />« C’est quand vous réussissez une performance extraordinaire qu’il n’y a personne pour en témoigner. <br />Par contre si vous vous vautrez, c’est généralement devant tout le monde. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi de l’Informaticien de <a href="http://ordinairetrentaine.free.fr/">Delcourt</a></strong> :<br /> <br />« Un informaticien ne fera que des lois informatiques chiantes et imbitables pour un non-informaticien. » <br /> <br /><strong>Corollaire</strong> : « Il y a beaucoup d’informaticiens sur la Murphypro. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi de Finitude du Pognon</strong> : <br /> <br />« Quand on arrive à joindre les deux bouts, soudain quelqu’un les bouge. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi d’Ouverture d’Hohmann</strong> : <br /> <br />« N’oubliez pas que les ouvertures “faciles” sont inviolables. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi de la Tourista de <a href="http://ceciledequoide9.blogspot.com/">Lhuissier</a></strong> : <br /> <br />« Elle se déclarera de préférence pendant une excursion au milieu de nulle part plutôt que dans votre chambre d’hôtel. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Première Loi des Pâtes de Parent</strong> :<br /> <br />« La seule façon de faire brûler de l’eau est de vouloir faire des pâtes. »</p></blockquote>
<blockquote><p><strong>Loi des jolies Lettones de <a href="http://177897.aceboard.fr/177897-348-4018-0-NICOLAS-VEYRON.htm">Veyron</a></strong> :<br /> <br />« Si vous passez deux jours et trois nuits en Lettonie, vous ne pouvez manquer de remarquer que les jolies Lettones sont nombreuses. Au retour, alors que vous racontez votre séjour, un ami est là qui a un ami qui connaît bien la Lettonie. Il raconte que son ami a été impressionné par la quantité de jeunes et jolies filles qui se prostituent pour pallier aux difficultés économiques.<br />C'est là que vous vous rendez compte que vous êtes soit très con, soit très innocent. »</p></blockquote>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/22/418-la-murphyliste-a-10-ans#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/375L’extinction du Permien et autres mégacatastrophes anciennesurn:md5:ef8ebec5be0fec114666d75d826004392007-09-19T22:02:00+00:002014-02-26T13:55:46+00:00ChristopheFragile planètebombe atomiquecataclysmecatastrophedinosaureseffet de serreGaïagéologievolcansécologieéonsévolution<p>Bien avant les dinosaures, la Terre a connu de très grosses et bêbêtes, et des extinctions massives - qui font d'autant plus réfléchir sur l’avenir de notre planète.</p> <p>En général, quand la télé s’aventure dans la paléontologie, il n’y a que deux thèmes possible : les ancêtres de l’homme, ou les dinosaures. Nous ou les grosses bêbêtes bien méchantes. <br />Dans le premier cas, on couvre au plus les cinq derniers millions d’années de l’histoire de la planète ; dans le deuxième, les dates vont de -230 à -65 millions d’années dans le passé (de leur apparition à la fin du Trias à l’arrivée du gros caillou qui scella leur destin).</p>
<p>Les 3 milliards d’années avant les aventures des grands reptiles favoris des enfants sont en général passées sous silence ; comme si le diplodocus et le ptéranodon étaient apparus <em>ex nihilo</em> après la formation de la Terre.</p>
<h3><em>Sur la Terre des géants</em></h3>
<p>Exception à cette règle cet été, sur France 3 : passe <em>Sur la Terre des géants</em>, un docu-fiction de la BBC sur les bestioles d’<em>avant</em> les dinosaures. Le voyage commence au Cambrien (un demi-milliard d’années dans le passé !) et les premières formes de vie complexes, continue par la conquête de la terre ferme, les fougères géantes du Dévonien, les déserts infinis du Permien, et s’achève par le retour de la forêt luxuriante où s’ébattent les dinosaures. Les images de synthèse sont de toute beauté, et les araignées géantes du Carbonifère répugnantes à souhait.</p>
<p><a href="http://www.dinosoria.com/terre_des_geants.htm">On trouvera sur dinosauria.com un résumé avec quelques images</a>. Attention, <a href="http://dinonews.net/forum/bavardage.php?msg=85197">des commentateurs de dinonews.net</a> hurlent contre les approximations massives : ces périodes nous ont laissé peu de fossiles, et pas mal d’hypothèses sur le comportement ou l’allure des divers animaux sont assénées comme des vérités. Effectivement, j’ai passé tout le documentaire à me demander quelle était la part de la « devinette éduquée » et celle de la raisonnable certitude paléontologique. Un docu-fiction grand public oblige à quelques approximations certes, mais quelques précautions oratoires n’auraient pas été superfétatoires.</p>
<p>Bref, ils restent quelques morales à retenir malgré tout :</p>
<ul>
<li>Les <strong>monstres géants</strong> et agressifs sévissaient bien avant <em>tyrannosaurus rex</em> (qui en fait a été à la fois l’apothéose et un des derniers modèles du genre, puisqu’à l’âge des mammifères les animaux terrestres carnivores n’ont plus atteint ce calibre).</li>
</ul>
<ul>
<li>On parle parfois des <strong>scorpions</strong> comme futurs maîtres de la planète une fois que nous aurons tout fait sauter à la bombe atomique : en fait ils ont déjà constitué l’espèce dominante au Silurien (il y a un petit demi-milliard d’années seulement…) — facile, ils étaient les premiers animaux terrestres !</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>taux d’oxygène</strong> n’a cessé de varier au cours de l’histoire de la vie. Parti de zéro au moment où les premières algues inauguraient la photosynthèse, et rejettaient l’oxygène comme un déchet, le taux a atteint parfois des niveaux beaucoup plus élevés que l’actuel. Or beaucoup d’oxygène permet aux insectes d’être beaucoup plus gros. Et voilà pourquoi les libellules d’un mètre d’envergure n’existent plus. (Et les araignées et scorpions capables de boulotter des chats non plus, et c’est pas plus mal.)</li>
</ul>
<ul>
<li>Le moment le plus tragique, l’<strong>extinction du Permien</strong>, représente un gigantesque avertissement pour notre espèce.</li>
</ul>
<h3>L’extinction du Permien</h3>
<p>Le Permien a marqué l’avènement des reptiles géants (pas encore des dinosaures). Le plus connu est le <a href="http://www.dinosoria.com/dimetrodon.htm">dimétrodon</a>, celui avec une voile sur le dos. L’amplitude de l’extinction de la plupart des espèces à la fin du Permien (il y a presque exactement un quart de milliard d’années) renvoie la disparition des dinosaures au niveau de l’anecdote géologique, avec l’extinction de l’écrasante majorité des espèces, dont les mignons et connus <a href="http://www.fossiliraptor.be/les trilobites.htm">trilobites</a>.</p>
<p>S’il est à peu près certain que l’éradication des dinosaures a été causée par un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Cratère_de_Chicxulub">impact météoritique majeur</a>, l’autre grande théorie alternative, l’activité volcanique qui désorganise le climat, semble l’explication pour l’extinction du Permien. Je renvoie le lecteur à l’<a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Permian#Permian-Triassic_extinction_event" hreflang="en">article de Wikipédia</a> et surtout à <a href="http://jcboulay.free.fr/astro/sommaire/astronomie/univers/galaxie/etoile/systeme_solaire/terre1/extinction/page_extincperm.htm">celui sur le cheminement vers une théorie à base d’hydrates de méthane</a> pour les détails, mais le scénario résumé est le suivant :</p>
<ul>
<li>un des pires épisodes volcaniques de l’histoire de la planète crée les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Trapps_de_Sibérie">trapps de Sibérie</a>, et au passage injecte des masses gigantesques de dioxyde de carbone dans l’atmosphère ;</li>
<li>l’effet de serre jouant, la température monte de 5°C et bouleverse l’écosystème, menant à une première extinction ;</li>
<li>à cause du réchauffement, les <a href="http://www.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/s3/hydrates.methane.htm">hydrates de méthane</a> du fond des océans se mettent à libérer leur méthane — gaz, comme chacun sait, bien pire que le CO2 en terme d’effets de serre… ;</li>
<li>la température monte encore de 5°C et la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Pangée_(continent)">Pangée</a> (le supercontinent unique) se transforme en désert inhospitalier ;</li>
<li>selon ce que je lis ailleurs, alternativement ou parallèlement, du sulfure d’hydrogène libéré génère des pluies acides et troue la couche d’ozone ;</li>
<li>le tout en très peu de temps à l’échelle géologique (quelques dizaines de milliers d’années), et dans des circonstances géologiques défavorables (Pangée).</li>
</ul>
<p>Je n’ai pas pas la qualification pour juger de la pertinence de la théorie, mais j’ai déjà lu ailleurs le scénario-catastrophe des hydrates de méthane dérangés qui lancent l’emballement de l’effet de serre. C’était même l’argument d’un livre de SF chroniqué ici l’an dernier (<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/10/09/249-la-mere-des-tempetes-de-john-barnes">La mère des tempêtes</a></em> de John Barnes) : une bombe atomique au mauvais endroit, et tout ce méthane provoque une hausse des températures qui transforme le moindre petit innocent cyclone en cataclysme de dimension planétaire.</p>
<p>(Histoire de prolonger la parenthèse SF : le<del>s</del> lecteur<del>s</del> régulier<del>s</del> et attentif<del>s</del> se souviendr<del>ont</del>a des <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/29/214-des-dinosaures-intelligents">troödons évoqués ici l’an dernier</a>, une espèce intelligente issue des dinosaures qui aurait, selon certaines hypothèses d'une plausibilité nulle, fait sauter sa planète d’une manière ou d’une autre et provoqué la fin du Secondaire. La rapidité de la crise du Permien, la rareté des fossiles de cette époque... permettraient de ressortir l’hypothèse : et si une espèce intelligente issue des dimétrodons ou d’un autre reptile de cette époque avait détruit sa planète par effet de serre, comme nous nous apprêtons gaiement à le faire ? La rareté des traces de l’époque masquerait l’apparition de la civilisation en question. Personnellement, je reste tout de même d’avis que la planète est suffisamment instable pour « se flinguer » toute seule sans invoquer d’espèce intelligente aimant jouer aux apprentis sorciers avec l’environnement.)</p>
<h3>La boule de neige</h3>
<p>Rappelons aussi que l’inverse du désert de la fin de Permien existe dans l’histoire de la Terre : la <a href="http://www2.cnrs.fr/presse/communique/443.htm">glaciation presque complète et intégrale des pôles à l’équateur, sur terre et mer</a>, cela il y a trois quarts de milliard d’années, avant le Cambrien. La vie s’est probablement réfugié un temps au fond des océans. <a href="http://www.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/s3/boule.neige.html">Le scénario semble</a> encore <a href="http://www2.cnrs.fr/presse/communique/443.htm">assez débattu</a>, mais la chute des gaz à effet de serre et la glaciation seraient dus à l’activité d’érosion lors de l’éclatement du supercontinent <a href="http://www.washington.edu/burkemuseum/geo_history_wa/Dance of the Giant Continents.htm" hreflang="en">Rodinia</a> (celui d’avant la Pangée), et nos sauveurs seraient cette fois les volcans qui ont réinjecté pas mal de CO2 dans l’atmosphère.</p>
<p>Le climat pourri et changeant ou caniculaire, et les saisons qui n’en sont plus, ne datent donc pas d’hier...</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/363“Red Mars”, “Green Mars”, “Blue Mars” de Kim Stanley Robinsonurn:md5:0a40dae22e0533869c05c44ac1166a162007-06-01T07:47:00+00:002009-07-04T18:02:58+00:00ChristopheMarsauto-organisationcatastropheChinecivilisationcolonisationcommunismeconquête spatialecynismedilemmedémocratiedémographieeaueffet de serregigantismegéopolitiquehard scienceimpérialismeIndelibertélivres lusMarsmythenatureoptimismeouverture d’espritpessimismepolitiquepsychologieRésistancesciencescience-fictionsolidaritéspéculationtempsterrorismeténacitéutopieécologieéconomieémerveillementÉtats-Unisévolution<p>La Trilogie martienne est <ins>LA</ins> référence en matière de science-fiction réaliste sur la colonisation de Mars</p> <p>La trilogie <em>Red Mars</em>, <em>Green Mars</em>, <em>Blue Mars</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson#pnote-313-1" id="rev-pnote-313-1">1</a>]</sup> est <em>le</em> livre de SF sur la colonisation et la terraformation de Mars. <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Kim_Stanley_Robinson">Robinson</a> a effectué un travail de titan pour rendre plausible chaque étape du processus.</p>
<p>Les trois tomes se réfèrent aux trois étapes de la transformation de la planète en petit paradis :</p>
<ul>
<li>Encore vierge, Mars est rouge et hostile. Les humains y débarquent (les premiers, « les Cent », servent de fil conducteur aux livres) et s’installent petit à petit. Les effets de la terraformation ne sont pas encore visibles.</li>
</ul>
<ul>
<li>Grâce à la montée des températures et l’apparition d’une véritable atmosphère dense, le lichen et les plantes se répandent, Mars devient verte. La colonisation devient massive, en provenance d’une Terre épuisée.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <em>permafrost</em> martien fond, l’eau liquide ne s’évapore plus, des mers apparaissent, et l’atmosphère devient enfin respirable : Mars devient bleue.</li>
</ul>
<p>Transformer aussi profondément une planète exige des centaines d’années au strict minimum. Pour couvrir la période entière en gardant les mêmes personnages, Robinson leur a offert la quasi-immortalité grâce aux progrès de la médecine. On suit donc « les Cent » au travers des trois tomes, de leurs premiers pas sur le caillou mort aux bains de soleil au bord de la nouvelle mer boréale. Robinson se concentre sur une dizaine d’entre eux, et certains de leurs descendants. Il ne lésine pas sur les introspections psychologiques et les analyses des rapports entre personnages. Cela est plaisant quand les relations interpersonnelles sont le reflet des nombreux affrontements politiques ou philosophiques qui traversent cette histoire de la colonisation martienne ; mais à d’autres moments le propos en est désagréablement alourdi (ces pavés sont pourtant déjà assez lourds).</p>
<p>Le plus intéressant, surtout pour un ingénieur et scientifique comme moi, réside dans l’arsenal de techniques déployées pour transformer le désert martien en contrée bucolique. Le mécanisme de base est similaire à l’effet de serre qui nous préoccupe tant sur Terre : l’atmosphère martienne est saturée de CO2 mais son épaisseur est trop faible. Tous les moyens seront donc bons pour ajouter du CO2. Certaines autres techniques utilisées pour gagner quelques degrés sont de la science-fiction pure, notamment la création d’une lentille orbitale pour concentrer les rayons du soleil.</p>
<p>Autre réalisation titanesque, l’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ascenseur_spatial">ascenseur spatial</a>, l’invention qui ferait chuter le coût de la masse en orbite et rendrait enfin l’exploration spatiale bon marché. Quand ce câble qui monte littéralement jusqu’à l’espace est saboté et s’enroule autour de l’équateur martien, il provoque la plus impressionnante des « séquences catastrophes » de la trilogie.</p>
<p>La politique martienne démarre dès les premiers pas des Cent sur la planète. Très vite, les explorateurs sont divisés entre « Verts » (partisans de la terraformation) et « Rouges » (opposants, qui considèrent que Mars doit être préservée). Cette division perdurera chez les descendants et parmi les nombreux colons qui suivront. Politiquement et économiquement, Mars expérimente de nombreux systèmes : les villes naissantes gravitent dans le capitalisme caricatural des métanationales, tandis que les zones à peines habitées testent l’économie du don. De chacune des cités martiennes naîtra un modèle de civilisation différent ; diversité à laquelle les immigrés (y compris Arabes, Indiens, Chinois, Robinson n’est pas trop américano-centrique... ) ajouteront la leur, avec également leurs conflits.</p>
<p>La politique martienne ne se conçoit effectivement pas sans intervention terrestre. Quand ce ne sont pas les métanationales qui dictent leur loi, les nations les plus peuplées d’une Terre en plein chaos climatique exigent que leur population puisse se déverser dans la dérisoire soupape de sécurité martienne. Mais transférer une fraction significative de la population terrienne est illusoire, et le peu qui est possible saturerait déjà les capacités d’absorption de la jeune civilisation martienne, en la précipitant dans le chaos. En retour Mars, creuset politique et technologique, influence la Terre bien au-delà de sa petite population. Une fois la liberté acquise, qu’en faire ? L’isolationisme est tentant mais dangereux.</p>
<p>Bref, dans leur quête pour une planète habitable - et libre - les Martiens ne seront pas au bout de leur peine. Tout amateur de <em>hard science</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson#pnote-313-2" id="rev-pnote-313-2">2</a>]</sup> un peu intéressé par la politique-fiction sera comblé.</p>
<p>Pinailleur comme je suis, j’aurais quand même quelques reproches à faire à la trilogie. Sur la forme, il y a quelques pages en trop sur les huit cents de chaque tome. Mais certains lecteurs apprécieront peut-être plus que moi les angoisses existentielles, voire amoureuses, des Cent, et voudront au contraire sauter les descriptions techniques.</p>
<p>Sur le fond, mon principal problème repose sur l’évolution de la Terre qui meurt. La trilogie a déjà dix à quinze ans (les parutions originelles datent de 1992 à 1996) et le futur a rattrapé partiellement la fiction. Dans cette fresque qui s’étale sur au moins deux siècles, la Chine et l’Inde semblent figées dans leur rôle prévisible dans les années 1990, futures superpuissances surpeuplées pas vraiment « mûres ». Or l’<a href="http://www.un.org/News/fr-press/docs/2004/POP910.doc.htm">ONU prévoie une stabilisation de la population mondiale avant 2100</a>, et le déclin démographique de la Chine est pour la prochaine génération : on peut être sûr que le futur ne sera <em>pas</em> comme prévu par Robinson. Surtout en 2300.</p>
<p>(Facile à dire, après coup. Faire de la prospective sans tomber dans le prolongement plus ou moins conscient des tendances actuelles est une mission impossible).</p>
<p>Les problèmes écologiques de la Terre semblent un peu artificiels. Robinson introduit de catastrophiques volcans antarctiques quand le réchauffement planétaire « normal » aurait suffi - mais en parlait-on autant en 1992 ?</p>
<p>Un trait américain de l’auteur surgit dans les révolutions martiennes (une dans le premier tome, une dans le second qui se prolonge dans le troisième) : les Martiens auront-ils vraiment envie de calquer leur histoire sur celle de la naissance des États-Unis ? Il est vrai que le rythme du récit y gagne.</p>
<p>En résumé : un gros pavé pour ceux qui aiment construire des mondes, et ne rechignent ni à la technique, ni à l’utopie. Un des monuments de la science-fiction récente dans ce qu’elle a de plus sérieux et fouillé. Quand je vois une carte de Mars, à présent, je rêve aux villes qui y seront peut-être un jour. Mon rêve est de me payer un voyage dans <em><a href="http://www.nirgal.net/valles.html">Valles Marineris</a></em> pour mon centenaire - sait-on jamais ?</p>
<hr />
<p>Autres sites sur cette trilogie :<br />
<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Trilogie_de_Mars">Article Wikipédia</a><br />
<a href="http://branchum.club.fr/mars.htm">http://branchum.club.fr/mars.htm</a><br />
<a href="http://membres.lycos.fr/starmars/ksr.html">http://membres.lycos.fr/starmars/ksr.html</a></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson#rev-pnote-313-1" id="pnote-313-1">1</a>] <em>En français : </em>Mars la rouge<em>, </em>Mars la verte<em>, </em>Mars la bleue<em>.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson#rev-pnote-313-2" id="pnote-313-2">2</a>] <em>Branche de la science-fiction la plus attachée à la plausibilité scientifique.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/06/01/349-red-mars-green-mars-blue-mars-de-kim-stanley-robinson#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/313La dernière pub Noosurn:md5:52e2f01f6353ff39068391412a4b2e0c2006-11-06T17:13:00+00:002010-11-07T21:37:25+00:00ChristopheGuerre au marketingabominationanticonsumérismebon senscatastrophechiffrescommunicationcoup bascynismedommageemmerdeursfoutage de gueulegaspillagehaineinformatiquemicroéconomiepérimésabotagevaleuréconomie de l’attention<p>Une pub très facilement trompeuse si on ne lit pas les illisibles petits caractères. Oui, encore une.</p> <p><strong>NB de 2009</strong> : Noos s’appelle à présent Numéricable, société connue pour avoir été <a href="http://www.pcinpact.com/actu/news/38727-dgccrf-plainte-numericable.htm">mise sous surveillance par la DGCCRF en 2007 à cause du nombre alarmant de plaintes de clients</a>.</p>
<p>J’ai longtemps haï <a href="http://www.noos.fr/">Noos</a> (anciennement Cybercâble) pour des raisons que les abonnés de l’époque (1998-2000) comprendront aisément, notamment un mépris du client assez prononcé<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-1" id="rev-pnote-236-1">1</a>]</sup>. <br />Concrètement, les problèmes généraux portaient sur la restriction brutale du débit, de 2 Mbit/s à 512 kbit/s<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-2" id="rev-pnote-236-2">2</a>]</sup>, une gestion anarchique de la facturation, des <em>proxys</em> transparents saturés, des serveurs de mail et de <em>newsgroups</em> maintenus avec les pieds (courriers délivrés au bout de deux jours ou plus, dans le meilleur des cas, newsgroups mal répliqués), une <em>hotline</em> totalement ignorante des problèmes, etc.<br />Les <a href="http://fr.groups.yahoo.com/group/cybercable/">archives de la liste cybercable</a> et le site associé <a href="http://www.luccas.org/">Luccas</a> gardent la mémoire de cette triste époque. En 2000 j’ai sauté sur les premières offres ADSL, même plus coûteuses, rien que pour me débarasser des ces tristes sires.</p>
<p>L’aspect positif s’est révélé dans mon passage à Linux et au développement de mes compétences en administration pour compenser les failles de ce fournisseur<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-3" id="rev-pnote-236-3">3</a>]</sup>. Le jour où le serveur SMTP a sauté (recevoir un <em>disk full</em> en envoi de mail, ça fait bizarre), j’ai décidé de toujours gérer moi-même mon adresse e-mail.</p>
<p>Noos existe toujours, ils se sont fait racheter, et à présent la concurrence avec l’ADSL est rude. Rappelons que pour 30 à 40 €/mois, Free, Orange et autres proposent une pléthore de chaînes dans un nombre impressionnant de langues, des communications téléphoniques gratuites avec les deux ou trois plus proches galaxies, et accessoirement Internet à une vitesse qui aurait valu encore récemment un PV sur les autoroutes de l’information<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-4" id="rev-pnote-236-4">4</a>]</sup>.</p>
<p>Noos propose du 20 €/mois pour la même chose, du moins semblent le dire les affiches que je vois dans tous les coins de ma bonne ville d’<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Austrasie">Austrasie</a>. <br />À première vue, on se dit « Ouaouh, quels prix concurrentiels ! ». <br />À deuxième vue, comme toute occase trop belle pour être vraie, <strong>il y a un piège</strong>.</p>
<p>Et il faut s’approcher près pour le voir, le piège.</p>
<p>En tout petit, il est précisé que le prix est valable pour trois mois... ensuite on arrive au tarif normal de <strong>40 €</strong><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-5" id="rev-pnote-236-5">5</a>]</sup>.<br />Oui, on parle d’une pub sur un prix réduit d’un <strong>facteur deux</strong> par rapport au final. J’ai vérifié : le petit texte correctif, dont on sent bien qu’il n’est là que pour éviter les procès, est totalement illisible depuis ma voiture quand je passe sous un des grands panneaux.</p>
<p>Le procédé est malheureusement courant : j’ai ici une brochure France Télécom dont chaque page ressemble à une constellation par le nombre de petites étoiles<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#pnote-236-6" id="rev-pnote-236-6">6</a>]</sup> de renvoi en bas de page ; bas de page écrits dans une casse si étroite et de manière si compacte que l’intention d’illisibilité est pour moi constituée.</p>
<p>Pour revenir à Noos : je leur donne le bénéfice du doute sur le plan technique (même si ma méfiance est toujours là, justifiée par ma lecture continue depuis des années de la liste des abonnés), et les tarifs semblent honnêtes (<em>triple play</em>, et il y a plus de 100 chaînes pour le tarif de base de 40 € ; on peut monter plus haut bien sûr). Évidemment, il faut rajouter les frais d’installation (plusieurs dizaines d’euros), le dépôt de garantie de l’appareil (75 €)...</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-1" id="pnote-236-1">1</a>] <em>Un vendeur d’eau est en situation de monopole, et négocie ses contrats avec des municipalités, pas avec les particuliers/clients finaux.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-2" id="pnote-236-2">2</a>] <em>Rappelez-vous, c’était en 1998 : l’ADSL n’existait pas ! Le seul haut-débit grand public passait par le câble, pour les quelques chanceux qui pouvaient y accéder. 512 kbit/s était déjà merveilleux, le problème portait sur le principe.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-3" id="pnote-236-3">3</a>] <em>C’était également l’époque où, célibataire de fait la semaine, j’avais du temps à y consacrer.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-4" id="pnote-236-4">4</a>] <em>Mais pourquoi je raconte ça, moi ? Tout le monde le sait sauf ceux qui n’ont aucune chance de venir ici.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-5" id="pnote-236-5">5</a>] <em>J’arrondis ; les marketeux croient encore que réduire de 10 centimes le prix rond change quelque chose au comportement du consommateur.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#rev-pnote-236-6" id="pnote-236-6">6</a>] <em>Licence poétique : ce sont des numéros : (1), (2)... (9)</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/06/265-la-derniere-pub-noos#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/236Interview de Bruce Schneierurn:md5:9ace4475364716b327c658461b986be72006-06-04T10:26:00+00:002022-03-26T18:25:19+00:00ChristopheRes publicacatastrophediscriminationdémocratiefichagelibertéparadoxeparanoïasauvegardessécuritéterrorismeéconomieÉtats-Unis<p>Résumé d’une interview du gourou de la sécurité Bruce Schneier : il nous rappelle des évidences que notre civilisation perd de vue.</p> <p><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bruce_Schneier">Bruce Schneier</a> est un spécialiste de la sécurité, informatique comme physique, dont j’ai déjà parlé ici. <a href="http://www.schneier.com/blog/" hreflang="en">Son blog</a> est très couru. Cet hiver, <a href="http://turnrow.ulm.edu/bruceschneierinterview.htm" hreflang="en">il a donné une interview</a>, qui résume une partie de son livre <strong><a href="http://www.schneier.com/book-beyondfear.html" hreflang="en">Beyond Fear</a></strong>, et dont je vais tenter un résumé ci-dessous.</p>
<p>On relèvera des points communs avec <a href="http://www.schneier.com/blog/archives/2005/09/security_lesson.html" hreflang="en">un billet de lui paru en septembre sur Katrina</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2005/09/11/4-schneier_katrina">dont j’avais parlé ici</a> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/04/155-interview-de-bruce-schneier#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, et beaucoup d’évidences qui méritent d’être rappelées.<br />Mes notes sont en <em>NDT (Note du Traducteur)</em>.</p>
<ul>
<li>La <strong>vie elle-même est un risque permanent</strong> ; et <strong>toute action est un compromis</strong> (<em>trade-off</em>) entre le besoin de réaliser quelque chose et le risque estimé. <br />L’analyse rationnelle est possible (cinq points : que protéger ? quels risques ? quelle est l’efficacité de la protection ? quels risques nouveaux pose cette protection ? quels compromis fait-on ? en vaut-ce finalement la peine ?), mais est souvent effectuée intuitivement.<br /> <br />Exemples :
<ul>
<li>Un lapin hors de son terrier risque l’attaque d’un renard ; mais s’il ne sort pas, il mourra de faim.</li>
<li>Plaquer tous les avions au sol définitivement serait un moyen efficace d’éviter un nouveau 11 septembre, mais paralyserait des pans entiers de l’économie (surtout aux États-Unis) ; mais l’interdiction prononcée le 11 septembre était, elle, parfaitement justifiable.</li>
<li>Renforcer les portes des cockpits d’avion permet d’obtenir une amélioration réelle de la sécurité pour un coût modique, sans conséquence sur le fonctionnement des compagnies aériennes - bien qu’elles aient combattu longtemps cette mesure.</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong>choix sont parfois aberrants</strong>, car <strong>le risque ne peut être réduit à zéro</strong>, mais aussi à cause de leur <strong>mauvaise estimation</strong> : les risques spectaculaires, ou venant de personnes précises, ou sur lesquels on n’a pas de moyen d’action, font plus peur que les petites catastrophes anonymes plus ou moins aléatoires qu’on <em>croit</em> pouvoir contrôler.<br />Nous avons également du mal à cerner les nouveaux risques d’une technologie toute récente, et les <strong>médias</strong> donnent une vision déformée de la réalité.<br /> <em>(NDT : Quand un A380 s’écrasera, on parlera plus des 800 tués que des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Accident_domestique">20 000 morts annuels en France dus aux accidents domestiques</a>, et on dépensera plus d’argent à réduire d’une décimale le risque de chute d’un A380 que le nombre de gamins tués chez eux)</em>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>coût des compromis en sécurité n’est pas que monétaire</strong>, il comprend aussi la perte de praticité (<em>convenience</em>), le temps perdu, les restrictions de libertés...<br /> <br />Exemples :
<ul>
<li>On ne met pas tous ses objets précieux au coffre, simplement pour pouvoir simplement les utiliser.</li>
<li>Les magasins de vêtements ne mettent pas de caméras dans les cabines d’essayage alors que beaucoup de vols y ont lieu, car leurs clients fuiraient.</li>
<li>Il est mal vu de fouiller sans raison les bagages de quelqu’un, mais on le tolère avant d’embarquer dans un avion. Et cela fait perdre du temps.</li>
<li>Une société ne tolérerait pas des écoutes téléphoniques généralisées <em>(NDT : J’aimerais en être sûr)</em>, on l’accepte ponctuellement.</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Ces <strong>estimations des coûts ne sont pas les mêmes suivant les gens</strong>. De plus, tout le monde réagit suivant ses contraintes et coûts personnels. Beaucoup de réactions semblent irrationnelles si on ne considère pas les motivations réelles des acteurs (l’« <strong>agenda</strong> », sans connotation péjorative). L’analyse de risque s’effectue de manière totalement égoïste.<br /> <br />Exemples :
<ul>
<li>Du point de la société dans son ensemble, il ne fait aucune différence que ce soit un avion ou un centre commercial qui soit détruit par un terroriste, ou que ce soit un appartement ou un autre qui soit cambriolé. Leurs propriétaires respectifs ne voient pas les choses ainsi, et dépenseront beaucoup d’argent à éviter une attaque ou un vol.</li>
<li>À l’inverse, le gérant de magasin négligera les vols en cabine d’essayage si ses ventes se maintiennent.</li>
<li>Un responsable d’école, ou politique, ne prendra aucun risque d’être accusé d’avoir exposé des gens à un danger, frappant mais objectivement négligeable, comme le <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/Beltway_sniper_attacks" hreflang="en">snipper de Washington</a>.</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong><em>racial profiling</em></strong> (<em>NDT : je ne sais comment traduire : « profilage racial » ?</em>) peut être efficace à condition que le profil de l’attaquant potentiel soit précis. <br />Mais :
<ul>
<li>Dans le terrorisme, les attaquants sont, contre toute attente, de profil très divers.</li>
<li>En se concentrant sur un profil, on ouvre ainsi la porte à des <strong>attaques par des gens qui ne collent pas à ce profil</strong>, et qui le savent (par exemple des attentats en Russie provoqués par des femmes, qui n’étaient jamais fouillées).</li>
<li>Ces profils changent fréquemment : radicaux américains sous Clinton, jeunes hommes arabes à présent.</li>
<li>On <strong>stigmatise des groupes entiers</strong> de population dont une infime minorité représente un danger, alors qu’ils sont justement ceux dont on veut éviter un comportement hostile.</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Il existe une <strong>forme de <em>profiling</em> qui fonctionne</strong> : celle basée sur le <strong>comportement</strong> des gens, l’intuition et l’expérience des gardes, et non sur la race, l’ethnie... Ceci à condition que l’agent de sécurité n’ait pas pour consigne de ne surveiller que les Arabes ou les Noirs.</li>
</ul>
<ul>
<li>Un problème très courant est la <strong>complicité des gardes</strong> avec les voleurs ou agresseurs, que ce soit du vol par les propres employés d’un magasin, ou des agents sous-payés corrompus et manipulés par des terroristes. <br />Même sans parler de complicité, ces agents peuvent être <strong>mal formés, incompétents, fatigués</strong>, ou en sous-effectif. N’importe quel membre du personnel peut être amené à donner des informations ou à faciliter la tâche à l’attaquant (<em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Social_engineering">social engineering</a></em>).<br />La moralité est de <strong>bien payer ses gardes</strong> : on attire des employés moins corruptibles, plus sérieux et plus professionnels.</li>
</ul>
<ul>
<li>Plutôt que de <strong>protéger à grands frais</strong> des cibles précises contre des scénarios d’attaque précis, l’argent serait mieux dépensé en <strong>mesures préventives</strong> : le <strong>renseignement</strong> tout d’abord, l’attaque des bases du réseau ennemi, l’assèchement de ses fonds, etc. <br />Parallèlement, la mise en place de <strong>services de sécurité et de réaction d’urgence bien équipés</strong> (appareils de détection, combinaison, entraînement...) permet de réagir à <em>toutes</em> les catastrophes.<br />Le 11 septembre est un bon exemple des difficultés de communication et d’organisation qui ont surgi dans une crise majeure. <em>(NDT : On peut rajouter l’ouragan Katrina pour lequel Al Qaeda n’est pour rien, mais qui a révélé de graves failles de planification, de coordination et d’organisation des secours).</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Cela tient compte du fait que <strong>le risque zéro n’existe pas</strong>, ne serait-ce que parce que le <strong>principe de la liberté des individus dans notre société va à l’encontre d’une répression totale</strong>, qui irait jusqu’à punir une intention non réalisée ou à arrêter tout le monde par précaution. Le prix de la liberté est le risque. Inévitablement arrive de temps à autre une catastrophe.</li>
</ul>
<ul>
<li>Un des problèmes du contre-terrorisme est de faire les rapprochements nécessaires (<em><strong>connect the dots</strong></em>), qui ne deviennent évident qu’après coup (exemple du 11 septembre). Ce n’est pas si facile, d’où de nouvelles possibilités d’échec.<br />Pour Schneier, cet échec du renseignement est la principale cause de la catastrophe du 11 septembre avec le chaos des secours. Les actions doivent prioritairement porter sur l’amélioration de ce renseignement. La concentration dans une agence unique telle que réalisée après 2001 n’est pas une bonne idée.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le danger est de ne se préparer <em>que</em> pour des dangers déjà affrontés, alors que les terroristes changent tout le temps et de tactique et de « profil » - surtout Al Qaeda. L’échec du 11 septembre tient à un manque d’imagination reconnu, mais les nouvelles mesures de prévention ne montrent aucune imagination non plus.<br />Une catastrophe viendra forcément d’un « <strong>échec de l’imagination</strong> », donc il faut se concentrer sur les terroristes eux-mêmes et les systèmes de réponse d’urgence.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les attaques sur les différents types de réseaux (électricité, Internet) ne représentent pas un danger énorme. D’une part ils sont déjà conçus pour résister à toute catastrophe majeure, notamment les catastrophes naturelles. D’autre part, le coût peut financier peut être lourd, et la gêne à la population peu tolérable, mais un arrêt de l’électricité ou des e-mails ne frappera pas les populations de <em>terreur</em> comme une agression physique brutale.<br /><em>(NDT : Par contre, des criminels peuvent se servir de failles pour menacer de paralyser un système et rançonner son exploitant. Le coût n’est là que financier.)</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>coût des mesures de sécurité actuel n’est pas immédiatement apparent aux contribuables</strong> (exemples de l’argent de la guerre d’Irak noyé dans les impôts ou de la réduction progressive des libertés civiles) ; ils ne font donc pas l’analyse des risques. Elle est faite <em>pour eux</em> par des agences selon <em>leurs</em> propres critères.</li>
</ul>
<ul>
<li>De manière générale, <strong>le commun des mortels a peu d’influence sur le choix de son niveau de sécurité et des compromis et coûts</strong> associés. Ces décisions sont celles qui arrangent le réalisateur, pas le client ou citoyen final. <br /> <br />Exemples :
<ul>
<li>Microsoft et le niveau de sécurité de Windows/Internet Explorer : la sécurité du système passait bien après le <em>marketing</em> et la pléthore de fonctionnalités.</li>
<li>Il n’existe pas de compagnie aérienne avec un embarquement plus rapide où la fouille n’existe pas.</li>
<li>La maîtrise du niveau de sécurité d’une base de données commerciale comportant des données personnelles est impossible pour le client qui y figure <em>(NDT : Surtout aux États-Unis, et la situation en Europe n’est que marginalement meilleure en pratique.)</em>.</li>
<li>Une compagnie de téléphone s’attaquera sérieusement aux communications gratuites, pas aux écoutes illégales qui ne lui coûtent rien.</li>
<li>Un <strong>gouvernement cherchera à se faire réélire donc privilégiera le médiatique à l’efficace</strong>, pour éviter d’être accusé de ne pas en avoir assez fait.</li>
<li><strong>Nombre de lobbies sont à l’œuvre pour limiter les mesures de sécurité à l’encontre de leurs intérêts</strong> (coûts prohibitifs ou gêne pour les clients) ; les mesures de sécurité excessives frapperont donc plus facilement ce qui touche le commun des mortels que ce qui peut coûter de l’argent.</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Ce qui plaide pour une <strong>meilleure surveillance du gouvernement</strong> ; les gens devraient voter, dans les urnes et par leur porte-monnaie, contre les mesures débiles. Les problèmes d’organisation et d’information pour surveiller un gouvernement déjà en place sont les mêmes que pour les autres sujets soumis à l’action gouvernementale (santé, budget...).<br /><em>(NDT : Selon moi c’est l’information qui pèche le plus. Entre le miroir déformant des médias et les difficultés d’appréhender la réalité d’un danger comme son coût, le citoyen moyen, même averti, est bien démuni.)</em></li>
</ul>
<ul>
<li>Le Président <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Eisenhower">Eisenhower</a> en 1961 avait mis en garde contre le <strong>complexe militaro-industriel</strong>, dont une tendance était d’<strong>exagérer les menaces extérieures pour garantir son chiffre d’affaire</strong>. Le même phénomène se passe avec les entreprises qui tirent un profit de la lutte contre le terrorisme (bases de données, fournisseurs de l’armée américaine en Irak...).<br />L’intérêt de ces groupes d’influence est que les gens aient peur ; il ne faut surtout pas qu’ils raisonnent rationnellement.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dépasser sa peur consiste à reconnaître et comprendre une menace, sans l’exagérer, pour faire les compromis de sécurité dans <em>notre</em> intérêt.</li>
</ul>
<p><em>NDT : Bon, et en pratique ?</em></p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/04/155-interview-de-bruce-schneier#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Non non, je ne me répète pas.</em></p></div>
Migration du site achevéeurn:md5:ebf7fc09955f49ac73a2a085323e5a9a2006-05-28T23:15:00+00:002010-10-29T18:04:07+00:00ChristopheBlogger, une aventureblogcatastrophedotcleardysfonctionnementfoutage de gueulehaineinformatiqueperfectionnismeprise de têtepériméréseausaturationsauvegardessécuritévirtuel<p>Courtois.cc a changé d’hébergeur. Adieu Online, bonjour Sivit !</p> <h4>Il était une fois un petit webmestre</h4>
<p>Online n’était pas un mauvais hébergeur quand je l’ai choisi il y a des années. Peu de problèmes jusque récemment, je le recommandais. Les faibles besoins du site, et la modicité de la somme en jeu (~30 €/an pour du mutualisé) par rapport au coût en temps d’une migration, ne m’ont pas poussé à aller voir ailleurs si l’herbe était plus verte.</p>
<p>Depuis le début de l’année ça déconnait pourtant plein pot : POP absent un week-end par mois ; manifestement il fallait attendre que le personnel revienne travailler le lundi pour que cela se règle (en tout cas, c’était l’impression retirée) ; DNS parfois flagada ; puis des lenteurs sur la base SQL et donc le présent blog. Rien de gravissime, le site n’est pas critique.</p>
<h4>Horreur sans nom</h4>
<p>Et puis l’intolérable : des <em>“user unknown”</em> crachés à la figure de gens coupables d’avoir osé m’envoyer un email à mon adresse en courtois.cc.</p>
<p>Un DNS en transe, ou un serveur de mail en catatonie, ce n’est pas la fin du monde : la justification d’un logiciel de transfert de mail est justement de s’assurer qu’un message parvient bien ; si le serveur du destinataire a des vapeurs on refait une tentative plus tard, pendant cinq jours en général, et si le problème s’avère passager, le mail finit par arriver à bon port<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-1" id="rev-pnote-142-1">1</a>]</sup>. <a href="http://permanent.nouvelobs.com/societe/20060517.FAP7050.html?0916">La Poste a bien délivré une lettre postée en 1910</a>, mieux vaut tard que jamais, je n’en ai pas souffert, et j’étais content.</p>
<p>Mais un <em>“user unknown”</em> ne permet pas ça. C’est l’équivalent du postier qui dit « désolé, connais pas à cette adresse. » Le serveur de l’expéditeur, naïf et docile, se dit que ce n’est pas la peine de retenter l’expédition (quoique certains softs seraient plus finauds ?), et c’est retour à l’envoyeur sans autre forme de procès. Il y a non <em>délai à la livraison</em> mais <em>perte</em> du mail.</p>
<p>Et moi qui avait décidé de faire héberger <a href="https://www.coindeweb.net/">courtois.cc</a> par un pro, alors qu’il ronronnait peinard sur un Pentium 75 dans mon salon autrefois, pour éviter des pannes dues à mes propres turpitudes ou au décès de ce fossile<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-2" id="rev-pnote-142-2">2</a>]</sup>... Certains sur <a href="http://groups.google.com/group/fr.reseaux.internet.hebergement?lnk=srg">fr.reseaux.internet.hebergement</a> semblent se demander si ce quasi-sabordage d’Online n’est pas lié à la mise en place d’un service concurrent d’hébergement <em>hard discount</em> du même groupe<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-3" id="rev-pnote-142-3">3</a>]</sup>.</p>
<p>(Pour la petite histoire, j’avais commencé à gérer moi-même mon mail (POP, SMTP) quand <a href="http://www.luccas.org/">Noos</a> décidait de répondre <em>“disk full”</em> à mes envois de mails, et de retarder de plusieurs heures ou jours la réception des arrivants.)</p>
<h4>Choix</h4>
<p>Bref, poussé par l’urgence, j’ai scanné la concurrence, lu les réputations diverses, foncé au moment où une nouvelle vague de rejets de mails a sévi.
Je ne pensais pas qu’il existât une telle pléthore de petits hébergeurs. J’ai choisi <a href="http://www.sivit.fr/">Sivit</a>, apparemment bonne réputation, prix correct, et dominante <em>geek</em> du personnel si j’en crois la manière dont les docs sont rédigées. On verra à l’usage, ça peut difficilement être plus mauvais qu’Online. Déjà le support est bon, j’avais fait une faute de frappe dans le nom du domaine à héberger<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-4" id="rev-pnote-142-4">4</a>]</sup> : corrigé avant 24h :-)</p>
<h4>Migration</h4>
<p>Paramétrage des comptes courriers et alias ; recopie du site sur le nouveau serveur ; mise à jour des scripts de récupération automatique du mail depuis le Pentium 200 du placard<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-5" id="rev-pnote-142-5">5</a>]</sup> ; changement des DNS sur l’<a href="http://www.enic.cc" hreflang="en">enic.cc</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#pnote-142-6" id="rev-pnote-142-6">6</a>]</sup> : au final, ça roule, et de manière plus rapide que prévu. En quelques minutes les premiers <em>spams</em> arrivaient sur le serveur IMAP de Sivit, et le reste a suivi dans les 24-48h.</p>
<p>Pour le blog, ce fut plus laborieux. Je n’ai pas vu d’option de migration de <a href="http://www.dotclear.net">Dotclear</a>. La technique la plus simple semble la réinstallation de zéro du blog, et le rechargement des tables depuis la sauvegarde de la base MySQL de l’ancien serveur.<br />Gros contretemps tout de même lors de la réinstallation des <em>plugins</em> de Dotclear : le <em>SAFE_MODE</em> me hurle dessus que les utilisateurs ne collent pas. Il faudra que je fouille. Réussi à faire fonctionner Spamplemousse, c’était le plus critique, et de loin. BBclone (stats) attendra.</p>
<p><strong>Mise à jour du 21 novembre 2006</strong>, confirmée <strong>janvier 2009</strong> : Toujours pas à me plaindre de Sivit, tout roule.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-1" id="pnote-142-1">1</a>] <em>Sans jeu de mot </em>volontaire<em>.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-2" id="pnote-142-2">2</a>] <em>Fossile déjà à l’époque, si.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-3" id="pnote-142-3">3</a>] <em>Proxad pour ne pas le nommer, le groupe de Free.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-4" id="pnote-142-4">4</a>] <em>Murphy adore ces situations où on agit dans l’urgence.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-5" id="pnote-142-5">5</a>] <em>Plus le temps passe, plus je m’interroge sur l’utilité réelle de cette phase, notamment en cas de panne de cette machine...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#rev-pnote-142-6" id="pnote-142-6">6</a>] <em>Dans ce cas de pavillon de complaisance aux Îles Coco, je n’avais pas le choix ; mais il faut </em>toujours<em> séparer le gestionnaire du nom de domaine de l’hébergeur du site. Pour un site en .com, .fr, .org..., acheter par exemple chez <a href="http://www.gandi.net/">Gandi</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/05/28/157-migration-du-site-acheve#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/142Ça mouline dure...urn:md5:63a926008beb997cda056fb593abbb422006-03-29T23:20:00+00:002010-10-28T18:03:23+00:00ChristopheBlogger, une aventureblogcatastrophedotcleardysfonctionnementfoutage de gueulehaineinformatiqueintelligencelanguesoptimismepollutionpériméréseauspamsécurité<p>Spam ou panne ?</p> <p>Le présent blog rame comme je l’ai rarement vu.</p>
<p>Est-ce lié au problème de Redbus de ce week-end ? Il semblerait que ce soit réglé, et Online n’a rien à voir avec ce fournisseur que je sache. Pas facile de savoir ce qui se passe chez Online par contre...</p>
<p>Autre hypothèse : une vague de spam dans les commentaires, distribuée depuis un bon paquet de pays exotiques, et non depuis une unique adresse IP comme souvent. L’astuce du <code>deny from x.y.z.w</code> dans le <code>.htaccess</code> ne fonctionne donc plus. En plus cela me pollue mes statistiques.</p>
<p>Heureusement il y a <del>Findu</del>Spamplemousse (mille fois béni soit son inventeur), qui me filtre une bonne partie de <del>cette mer</del>ce bruit envoyé par <del>des abrutis qu’on devrait mettre au pilor</del>de peu polis <del>fils de pu</del>et très cavaliers <del>deale</del>revendeurs de <del>cam</del>produits pas forcément très licites. (Quoique ces spams pointent souvent vers Osnews ou la BBC, j’ai du mal à capter leur intérêt ; d’habitude les spams dans les commentaires visent à créer des liens artificiels vers le site du spammeur pour tromper Google).</p>
<p>Dieu merci, ces <del>enfoir</del>gens « écrivent » en anglais avec des noms à consonance américaine, je peux donc rajouter tout le vocabulaire anglais courant dans Spamplemousse sans grand risque pour mes <del>nombreu</del>(arf !) commentateurs.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/03/29/128-ca-mouline-dure#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/120D’IPv4 à IPv6 (II)urn:md5:7b78d4b7c4641ba72429e8ecfc7f853a2006-01-13T00:00:00+00:002010-10-26T08:00:46+00:00ChristopheInformatique militante et technologiecatastropheinformatiqueLinuxlobbysMicrosoftperspectiveréseausaturationtempsévolution<p>Il y a plusieurs raisons qui freinent le passage à IP v6. Certaines humaines, d’autres moins avouables.</p> <p>Sur le sujet on peut parcourir la <a href="http://it.slashdot.org/article.pl?sid=05/11/10/1623259&threshold=4" hreflang="en">discussion (légèrement paranoïaque) qui a eu lieu sur Slashdot</a> suite à un <a href="http://www.computerworld.com.au/index.php/id;1030418056;fp;16;fpid;0" hreflang="en">article de Computerworld sur la résistance à la migration</a>, ou <a href="http://slashdot.org/article.pl?sid=05/12/12/2342218&threshold=4" hreflang="en">celle à propos d’une estimation d’un coût de 25 à 75 milliards de dollars rien qu'aux États-Unis, et de leur retard par rapport au Japon ou à l’Union Européenne</a> (cette estimation de coût a été vertement critiquée, notamment parce que de toute façon matériels et logiciels seront forcément remplacés, IP v6 ou pas).</p>
<p>On peut lire aussi cette <a href="http://www.vnunet.fr/actualite/reseau/technologie/20051222008">interview de Mohsen Suissi</a>.</p>
<ul>
<li>Concrètement et techniquement, le plus gros du travail consiste à :
<ul>
<li>changer les <strong>routeurs</strong> qui aiguillent le trafic vers les différentes branches du réseau ; bien des machines anciennes ne connaissent pas IP v6, et certaines ont du mal à assurer le trafic nécessaire avec de bonnes performances ;</li>
<li>adapter tous les logiciels qui manipulent des adresses IP (ce qui n’est pas forcément compliqué, mais même un logiciel peut avoir une très longue durée de vie au sein d’une entreprise).</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Mais la cause principale de l’inertie est le bon vieux « <strong>on ne change pas une équipe qui gagne</strong> ».<br />Dans un sens, cela se justifie : le système actuel marche globalement correctement, et les problèmes nés de la rareté des adresses se contournent... pour le moment. Les problèmes des ingénieurs ne sont pas encore apparents aux décideurs.</li>
</ul>
<ul>
<li>Il n’y a actuellement <strong>pas de <em>killer application</em></strong> que tout le monde veut et qui exige IP v6. Toutes ses améliorations annexes (cryptage...) sont possibles en bricolant IP v4 ; et les grandes améliorations (migration de réseau facile...) ne valent que si IP v6 est <em>déjà</em> répandu.</li>
</ul>
<ul>
<li>« <strong>On a encore le temps</strong> ». La plupart des gens sont bien entendus totalement inconscients du problème. Et M. Dupont, fraîchement connecté à Internet, aurait du mal à comprendre pourquoi il doit changer son routeur qui marche si bien.<br />De même, M. Durand, directeur informatique, aura <strong>du mal à justifier une dépense pour quelque chose que personne ne comprend</strong>, et qui est très au-delà du prochain budget. Cependant, nous nous prendrons <a href="http://www.potaroo.net/ispcol/2005-11/numerology.html" hreflang="en">ce mur de face un jour</a>, et cela de manière bien plus certaine que la pénurie de pétrole.<br />À l’autre bout de l’écosystème du réseau, les fournisseurs d’accès doivent vivre avec des marges de plus en plus fines.</li>
</ul>
<ul>
<li>De plus, la décision sur ce genre de choses est surtout dans la main de fabricants ou de décisionnaires d’Occident, notamment des États-Unis, endroits où <strong>la pénurie d’adresses ne frappe pas</strong>. <br />À l’inverse, le Japon participe à « lancer la machine ».</li>
</ul>
<ul>
<li>Le système économique actuel favorise largement ce qui marche « à peu près, maintenant » que les « solutions définitives, plus tard », à un point qu’<strong>on ne migre pas vers ces solutions définitives</strong>, même si le coût à long terme est plus élevé. En fait, c’est un peu le même phénomène que le bug de l’an 2000, mais sans date butoir ferme.</li>
</ul>
<ul>
<li>La solution est <strong>incrémentielle</strong> (pas de nouveauté fulgurante que tout le monde veut), et bien moins « médiatisable » que deux chiffres oubliés dans 2000. De plus, on pourra toujours « bidouiller » pour s’en sortir, et la pénurie ne provoquera pas la fin du monde. <br />Pour les <a href="http://www.lexpansion.com/compteur/compteur.asp?compteurId=689&redirURL=http://www.lexpansion.com/Resumes/2372.37.74416.html">compteurs de haricots</a>, <strong>il coûtera toujours trop cher de migrer quand on peut « faire avec »</strong>, même si chaque entreprise se voit plus tard rançonnée pour des adresses hors de prix.</li>
</ul>
<ul>
<li>Il manque un effet Panurge, comme pour l’an 2000. Longtemps, personne n'a développé pour IP v6 car personne ne le demandait, faute de savoir ce que c’était.</li>
</ul>
<ul>
<li>Dans un sens, certains fournisseurs ont tout <strong>intérêt à maintenir ce <em>statu quo</em></strong>, de manière plus ou moins délibérée ou consciente :
<ul>
<li>Pour les fabricants : plus de matériel IP v4 sera vendu, plus il y aura de matériel à re-vendre au moment de la transition ; de plus certains matériels n’existent qu’à cause de la pénurie d’adresses (boîtiers NAT).</li>
<li>De même, une nuée de consultants font leur beurre de cette complexité, de la pénurie, et des manques d’IP v4. Simplifier et améliorer le système n’est pas leur intérêt.</li>
<li>Il faudrait creuser les règles d’attribution des adresses, mais si c’est <a href="http://en.wikipedia.org/wiki/ICANN" hreflang="en">aussi glauque que celui des noms de domaines avec l’ICANN</a>, il ne serait pas étonnant que certains aient compris que « pénurie » égale « gros bénéfices pour ceux qui attribuent les adresses et les intermédiaires » ! Ce qui est rare est cher, et les adresses inutilisées pourront se revendre ! Il suffira de généraliser le NAT dans les systèmes <em>existants</em> pour revendre ou économiser des adresses. Ou comment on en revient à la pénurie artificielle de biens inépuisables immatériels pour justifier des rentes économiques. J’espère être mauvaise langue mais certains y ont forcément pensé...</li>
</ul></li>
</ul>
<ul>
<li>Techniquement, <strong>on est presque prêt</strong>. <a href="http://www.laboratoire-microsoft.org/t/1429/">Windows XP</a> ou <a href="http://www.google.fr/search?hl=fr&q=linux+ipv6">Linux</a> maîtrisent IP v6 depuis longtemps. Certains fournisseurs proposent IP v6. <br />Il reste pas mal de boulons à serrer au niveau des applications et des routeurs à remplacer, mais ils ne le seront pas tant que le mouvement de migration ne sera pas sérieusement amorcé.</li>
</ul>
<p><strong>Amorcer le mouvement</strong></p>
<ul>
<li><strong>C’est justement parce que tout va bien maintenant qu’il faudrait migrer assez vite</strong>.<br />Les deux réseaux peuvent certes coexister, mais si on attend le moment où la pénurie d’IP v4 apparaît, certains serveurs ne seront plus alors accessibles <em>que</em> sur IP v6, ou à travers des rustines techniquement assez glauques ; et les adresses IP v4 seront ruineuses. La transition risque alors d’être brutale et coûteuse pour tout le monde.<br />Prise maintenant, la transition sera de toute façon lente (applications à migrer, routeurs à changer progressivement...) mais tolérable et planifiée.</li>
</ul>
<ul>
<li>Comme point de départ pour une migration, voir par exemple <a href="http://www.point6.net/modules.php?name=Content&pa=showpage&pid=45">point6.net</a> (site financé par vos impôts).</li>
</ul>
<p>Personnellement, je pense que nous verrons IP v6. <a href="http://www.vnunet.fr/actualite/reseau/technologie/20051222008">Selon Mohsen Souissi le mouvement est déjà bien amorcé en Asie</a>. Cependant :</p>
<ul>
<li>Ce sera <strong>trop tard</strong> par rapport à ce qui aurait été possible. IP v6 sera peut-être généralisé en 2012 alors que cela pourrait commencer maintenant. Et beaucoup d'argent aura été dépensé en vain ou dans l'urgence.</li>
</ul>
<ul>
<li>Il faudra peut-être soit que <strong>des gouvernements amorcent la pompe</strong> (et l’effet Panurge) par leurs exigences, soit que des monstres incontournables comme <strong>Microsoft</strong> décident de la migration, <del>par exemple avec la sortie de Vista (et ils en seront pour une fois remerciés, quelles que soient leurs arrière-pensées et leurs ambitions de main-mise sur le marché domotique)</del> (<strong>Mise à jour du 19 décembre 2007, après Vista</strong> : C’est raté.).</li>
</ul>
<ul>
<li>Ou bien faudra-t-il attendre une mode ou une <strong>semi-panique similaire à l’an 2000</strong> ? <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/13/50-ipv4ipv6-ii#pnote-50-1" id="rev-pnote-50-1">1</a>]</sup></li>
</ul>
<ul>
<li>En Occident, d’IP v6 risque fort d’arriver de <strong>manière masquée</strong>, dans des réseaux privés, bien maîtrisés (<a href="http://www.point6.net/docs/Matinale_31032005_DGA.pdf">installations militaires</a>, téléphones mobiles, câblés, domotique, <a href="http://www.point6.net/docs/Matinale_31032005_Renault.pdf">automobile communicante</a>...). La <em>killer application</em> sera la pléthore d’adresses qui facilitent l’administration et la migration de réseau en réseau.<br /><br />Et un jour, tout cela « coagulera ».</li>
</ul>
<ul>
<li>Parallèlement, les endroits où les besoins sont les plus modestes (grosses entreprises bien fournies en adresse, particuliers se contentant d’une seule adresse par leur modem) pourront rester en IP v4 presque indéfiniment.</li>
</ul>
<p>Rendez-vous en 2010.</p>
<hr />
<p><strong>Mise à jour du 12 février 2006</strong> : <a href="http://it.slashdot.org/it/06/01/30/1612241.shtm" hreflang="en">L'état de préparation à IPv6 : commentaires sur Slashdot</a> à partir d'un <a href="http://www.intellectualicebergs.org/archives/intice_08_060129.mp3" hreflang="en">reportage audio sur Intellectual Icebergs</a>.<br />Voir aussi un article de Geoff Huston (janvier 2006) : <a href="http://www.circleid.com/posts/ipv6_extinction_evolution_or_revolution/" hreflang="en">IPv6: Extinction, Evolution or Revolution?</a>.<br /></p>
<p><strong>Ajout du 17 novembre 2006</strong> : <a href="http://books.slashdot.org/article.pl?sid=06/10/02/1338216" hreflang="en">Slashdot commente un livre sur IPv6, et s’ensuit une discussion sur sa mise en pratique</a>.</p>
<p><strong>Mise à jour de fin 2010</strong> : Free offre l’IPv6 à ses abonnés mais on ne peut dire que la publicité est massive. Dans mon domaine (bureautique d’entreprise) tout tourne encore avec de l’IPv4. Le stock restant d’adresses IP est estimé pouvoir tenir jusque mi-2011 - six mois.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/13/50-ipv4ipv6-ii#rev-pnote-50-1" id="pnote-50-1">1</a>] Oui, la semi-panique du bug de l'an 2000 est pour moi la raison principale de sa résolution généralisée.</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/13/50-ipv4ipv6-ii#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/50D’IPv4 à IPv6 (I)urn:md5:e9f33a7eaf418143b4999a7e7a1fb9662006-01-12T13:07:00+00:002014-02-26T10:30:11+00:00ChristopheInformatique militante et technologiecatastropheinformatiqueperspectiveréseausaturationtempsévolution<p>Tout le monde s’en fiche, certains sont activement contre. Pourtant, il faudra bien changer de fond en comble le protocole de base d’Internet.</p> <p>C’est un de ces changements très techniques dont presque tout le monde se contrefiche. Beaucoup de travail s’est cependant déroulé, mais au niveau du grand public ou des entreprises non spécialisées dans Internet, rien ne se voit.</p>
<p><strong>IP v4</strong></p>
<p>Pour schématiser, chaque ordinateur connecté sur Internet est identifié par une adresse numérique du genre 55.66.254.3 (4 fois 1 octet, soit 4 chiffres de 0 à 254). Une adresse « lisible » du genre <a href="http://www.coindeweb.net/">www.coindeweb.net</a> ne fait que pointer vers cette adresse numérique.</p>
<p>On a donc un maximum d’environ 4 milliards d’adresses IP différentes. Ce qui semblait amplement suffisant aux débuts d’Internet est devenu finalement très étroit pour deux raisons :</p>
<ul>
<li>Internet, de <strong>jouet</strong> pour militaires et universitaires d’Occident avec de gros serveurs, est devenu partie intégrante de la vie d’<strong>un milliard d’individus</strong> possédant parfois plusieurs machines connectables au net, et ce n’est que le début ;</li>
</ul>
<ul>
<li>les <strong>adresses ont été attribuées au départ de manière libérale</strong> : par exemple, des entreprises (Apple, IBM, Boeing, HP, Ford…) ou des universités américaines (<a href="http://web.mit.edu/" hreflang="en">MIT</a>), <a href="http://www.iana.org/assignments/ipv4-address-space" hreflang="en">se retrouvent à la tête de classes A entières</a>, c’est-à-dire toutes les adresses qui commencent par un même nombre. Il n’y a que 126 de ces classes qui représentent la moitié de l’espace IP. (<a href="http://www.commentcamarche.net/internet/ip.php3">Plus de détails ici</a>).</li>
</ul>
<p>En conséquence :</p>
<ul>
<li><strong>Le stock d’adresses est déjà limité</strong>. Notamment, chaque fournisseur d’accès en attribue UNE et une seule à un client grand public, même s’il a plusieurs machines. (Par modem, elle change même tout le temps car les fournisseurs ont moins d’adresses à attribuer que de clients ; par contre, en ADSL, l’adresse IP est souvent constante car le client est connecté très longtemps de toute manière). <br />Les entreprises sont mieux fournies mais doivent justifier (et payer) leur consommation d’adresses.</li>
</ul>
<ul>
<li>Votre cafetière ou votre frigo ne peut donc avoir son adresse à lui (ce qui a tué dans l’œuf bien des <em>business plans</em> de <em>start-ups</em>, parfois de manière méritée).</li>
</ul>
<ul>
<li>Quand on se retrouve avec plusieurs machines à la maison, elles doivent <strong>se partager l’unique adresse</strong> (on parle de <a href="http://www.commentcamarche.net/internet/nat.php3">translation d’adresse (NAT)</a> ) au travers d’une des machines ou d’un boîtier…</li>
</ul>
<ul>
<li>…ce qui pose des <strong>problèmes techniques</strong> quand deux machines ainsi « masquées » veulent communiquer (il faut passer par un tiers, notamment un serveur central). Le problème est courant dans le domaine de la communication instantanée ou de la téléphonie IP (MSN Messenger, Skype…).</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong>pays connectés le plus tard (Asie et tiers-monde notamment) ont du mal à obtenir des adresses</strong> (puisque l’Occident s’est servi dans les « gros » blocs en premier et n’utilise pas tout) ; et le découpage de l’espace restant en petit blocs (classes B, C) alourdit énormément la <strong>charge des <a href="http://www.commentcamarche.net/lan/routeurs.php3">routeurs</a></strong> chargés de transporter les paquets d’un bout à l’autre de l’Internet.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le stock d’adresses devrait être <strong>épuisé <a href="http://www.potaroo.net/ispcol/2005-11/numerology.html" hreflang="en">dans les 15 années qui viennent</a></strong>.<br /> (<strong>Mise à jour d’octobre 2010</strong> : En fait, <a href="http://www.01net.com/editorial/522776/il-reste-moins-de-5-pour-cent-dadresses-ipv4-disponibles/">les deniers blocs seront attribués mi-2011</a>, bien plus tôt que prévu !)</li>
</ul>
<p><strong>IP v6 : la solution</strong></p>
<p>Des ingénieurs dignes de ce nom étant incapables de laisser un tel problème ouvert, la solution a été conçue, et elle fonctionne depuis un bout de temps, pas seulement en laboratoire : c’est la version suivante d’IP, IP v6.</p>
<ul>
<li>Elle offre une adresse de <strong>128 bits</strong> au lieu des 32 précédemment ; ce spectre de 3.10^38 adresses ne suffit pas pour tous les atomes de la galaxie comme je l’ai lu un jour, mais un milliard de milliard d’adresses possibles pour chaque millimètre carré de la Terre permet de voir venir.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le fournisseur d’accès a lui-même un identifiant très long, mais une quasi-infinité d’adresses à sa disposition ; cela simplifie la tâche des routeurs (une entrée dans leur table par grand réseau au lieu de très nombreux petits blocs).</li>
</ul>
<ul>
<li>Chacun peut donc avoir une <strong>flopée d’adresses en prise directe sur Internet</strong>, à un coût (théorique) nul.</li>
</ul>
<ul>
<li>Il n’y a plus besoin de NAT et autres combines pour partager des adresses entre plusieurs machines (et nous auront tous besoin d’un <a href="http://www.commentcamarche.net/protect/firewall.php3">coupe-feu</a> chez nous).</li>
</ul>
<ul>
<li>Accessoirement, la sécurité est un peu améliorée (un <a href="http://www.commentcamarche.net/attaques/balayage-ports.php3">scan de réseau</a> prend soudain beaucoup, beaucoup, beaucoup plus de temps).</li>
</ul>
<ul>
<li>Nombre d’<strong>améliorations ont été apportées à un niveau parfois très technique</strong> comme une meilleure gestion de la fragmentation des paquets, une standardisation du <strong>cryptage</strong> (<a href="http://www.commentcamarche.net/initiation/vpn.php3">IPSEC</a>) et de l’authentification entre deux points, le multicast/anycast, l’<strong>autoconfiguration</strong>, la simplicité de <strong>migration</strong> d’un réseau à l’autre, ou la fiabilité. (Choses qu’on peut cependant souvent faire avec IPv4 de manière moins simple).</li>
</ul>
<ul>
<li>Les réseaux en <strong>IP v4 et IP v6 peuvent coexister sans problème</strong>, et il existe des passerelles de l’un à l’autre.</li>
</ul>
<ul>
<li>Comme déjà signalé, <strong><a href="http://slashdot.org/comments.pl?sid=167901&cid=13999659" hreflang="en">cela fonctionne</a></strong>. En France, le fournisseur d’accès <a href="http://www.nerim.net/">Nerim</a> propose par exemple une adresse IP v6 à ses clients en plus de l’adresse classique, et <del><a href="http://ipv6pourtous.free.fr/petition/">une pétition est en cours pour que Free fasse de même</a></del> (<strong>Mise à jour du 19/12/2007</strong>) Free vient de faire de même fin 2007, offrant des trillions d’adresses à chaque abonné.</li>
</ul>
<p>Mais alors, pourquoi n’a-t-on pas déjà un plan de migration généralisé à IP v6 ?</p>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/01/13/50-ipv4ipv6-ii">Suite : D’IPv4 à IPv6 (II) </a></em></p>
<hr />
<h3>Liens</h3>
<ul>
<li>Une <a href="http://www.vnunet.fr/actualite/reseau/technologie/20051222008">récente interview de Mohsen Souissi</a> sur le développement d’IPv6, qui détaille un peu plus ce qui est raconté ici, et évoque notamment les nouvelles applications possible.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/01/12/38-ipv4ipv6-i#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/382006 commence bienurn:md5:e517f7ac23cfa66f223dbc02ab6de0e12006-01-02T14:50:00+00:002010-07-04T09:53:34+00:00ChristopheMoi, ma vie, mon egoanticonsumérismeblogcatastropheDRMdémocratieenfantsgaspillagejardinagelivres lusmobilitéoptimismepessimismepérimétempstravailuchronievaleur<p>Démarrage d’année peinard</p> <p>Bonne année, bonne santé, à tous ceux qui liront ceci ! En particulier à ceux qui attendent un heureux événement <em>(bon courage pour les nuits blanches à venir, <a href="http://trentaineordinaire.free.fr/">Jid</a>)</em>.</p>
<p>Un petit billet égocentrique pour changer : <strong>l’année a bien commencé</strong> !</p>
<ul>
<li>Les <strong>goinfreries</strong> familiales sont restées dans le domaine du raisonnable, ce qui me permet d’éviter une diète de janvier trop stricte (et pourtant ma chère mère et ma tendre moitié ont une fois de plus bien fait les choses).</li>
</ul>
<ul>
<li>Le petit <strong>Rémi</strong>, adorable mais chronophage et nervodestructeur, est en pension chez ses grand-parents. Il me manque déjà, mais qu’est-ce que c’est calme ici, et que cela fait du bien d’enchaîner les grasses matinées !</li>
</ul>
<ul>
<li>Pas de longue lutte contre les éléments pour rentrer chez soi, comme à Noël dernier : les déneigeuses, cette année, étaient assez nombreuses sur les autoroutes. (Dommage que j’ai par inadvertance coupé le courant au frigo-congélo pendant ces vacances. Nettoyer un congélo remonté à +8°C est un plaisir après une journée au volant).</li>
</ul>
<ul>
<li>Un excellent <strong>concert du Nouvel An</strong> de l’orchestre symphonique de Vienne (si vous ne le suivez pas à la télé tous les 1ers janvier, vous manquez quelque chose (il faut aimer Strauss)).</li>
</ul>
<ul>
<li>Un <strong>boulot</strong> qui promet de se renouveler un peu cette année (qui vivra verra).</li>
</ul>
<ul>
<li>Beaucoup de <strong>chaînes de télé en plus</strong> grâce à la <a href="http://freebox.free.fr/">Freebox</a> - mais qu’en avons-nous à faire, avec un mètre de hauteur de DVDs à regarder et un magnétoscope numérique dont le disque dur sature un trimestre après son achat ? Contempler les chaînes chinoises ou arménienne ou les dix versions de France 3 a un intérêt limité.</li>
</ul>
<ul>
<li>Beaucoup de <strong>câbles visibles en moins</strong> grâce à ce temps disponible et aux conseils de <a href="http://www.madrau.com/" hreflang="en">Stéphane</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pas de temps perdu à administrer/réparer/migrer <strong>le PC de papa</strong> lors de sa visite annuelle - j’aurais dû le pousser plus tôt à acheter une machine neuve ; la « récup » de vieux clous devient non-rentable dans notre société de l’éphémère, du toujours plus vite et des familles éclatées.</li>
</ul>
<ul>
<li>La <strong>DADVSI</strong> a été descendue en flammes même si ce n’est sans doute qu’une victoire symbolique (voir <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/01/02/60-2006-commence-bien">précédent billet</a>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Ni tempête apocalyptique ni tsunami de 1er janvier (mais par contre les habitants du Darfour ou du Niger doivent continuer à crever de faim, <em>business as usual</em>).</li>
</ul>
<ul>
<li>Les jours augmentent à nouveau. Enfin.</li>
</ul>
<ul>
<li>J’ai lu un bon pavé, <strong><em>Resurrection Day</em></strong> de DuBois, en VO, qui m’a valu quelques extinctions des feux tardives. Je prévois un petit billet là-dessus. (<em>Mise à jour : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/01/03/61-resurrection-day">Il est ici</a></em>)</li>
</ul>
<p>Mais <strong>l’année ne sera pas toute rose</strong> :</p>
<ul>
<li>Les étagères des <strong>livres « à lire »</strong> ne désemplissent pas, au contraire ! Chaque voyage que je fais chez mes parents est l’occasion de donner à mon paternel quelques pavés à revendre sur <a href="http://www.priceminister.fr/">Priceminister</a>, mais aussi de récupérer quelques autres (<em>whatever the language</em>) qu’il <em>faut</em> que je lise.</li>
</ul>
<ul>
<li>La pile des <strong>magazines à lire</strong>, c’est pire. Je devrais compter en kilos, si j’avais le courage de compter.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong>billets inachevés</strong> pour ce blog s’empilent également. Fichue <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Procrastination">procrastination</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Y a pas de raison que mon temps disponible s’accroisse.</li>
</ul>
<ul>
<li>Je vais encore prendre <strong>un an de plus</strong>, et j’arrive à une période où je ne suis pas impatient de grandir ou de voir mon entourage vieillir.</li>
</ul>
<ul>
<li>Encore un an et demi de vacheries, piques, coups bas, paroles fielleuses, entre nos <del>représentants</del> élus avant la présidentielle. Aucun changement sérieux à attendre avant cela.</li>
</ul>
<ul>
<li>Poutine, Bush, Assad... sont toujours au pouvoir.</li>
</ul>
<ul>
<li>J’habite toujours à 500 km de la famille à qui confier le gamin de temps à autre ; nerveusement c’est pénible.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le jardin, en sommeil, va à nouveau réclamer une foule de soins dès le printemps : tondeuse, taille des troënes, tondeuse, taille des tuyas, taille des troënes, tondeuse, tondeuse...</li>
</ul>
<ul>
<li>Va falloir se recaler sur le rythme du boulot, et dès demain.</li>
</ul>Bruce Schneier, Katrina, et la réactivité aux catastrophesurn:md5:98a4cbfc9043bf3c60fbe9e2d4de4fdc2005-09-11T21:36:00+00:002010-04-18T16:57:14+00:00ChristopheTout petit mondeauto-organisationcatastrophedysfonctionnementhiérarchieparanoïapessimismesécuritéterrorismeécologie<p>Morale de la castastrophe de la Nouvelle-Orléans de la part d’un expert en sécurité.</p> <p>L'<a href="http://www.schneier.com/blog/archives/2005/09/security_lesson.html" hreflang="en">un des derniers blogs de Bruce Schneier</a> résume bien son mantra : la sécurité vient d'abord :</p>
<ol>
<li>du renseignement</li>
<li>de la capacité matérielle à répondre immédiatement à une catastrophe (naturelle ou pas).</li>
</ol>
<p>Bruce Schneier est un de mes blogs préférés. D’habitude il parle des cartes d’identité biométriques, de DRM, de la concentration des informations, du vol d’identité, des intrusions...</p>
<p>Il en <a href="http://www.schneier.com/blog/archives/2005/09/katrina_and_sec.html" hreflang="en">rajoute une couche dans son dernier blog</a> : à force de tenter de prévoir des « scénarios de films » médiatiques mais très spécifiques, on néglige le financement du renseignement et de la réponse immédiate dans l’urgence. Dans le cas de Katrina, le problème de la chaîne de commandement a été criant.</p>
<p>Son optique est pleine de bon sens et en totale contradiction avec le flicage paranoïaque généralisé à la Bush (en cours d’importation chez nous). Une société fondée sur la réactivité et la préparation de tous encaissera toujours beaucoup mieux qu'une autre fondée sur un pseudo-contrôle de tout (qui ne sert qu’à faire croire que l’on fait quelque chose, sans avoir en réalité les moyens de croiser tous ces contrôles, avec des impacts monstrueux sur les libertés individuelles, et surtout une flopée de « pertes collatérales », <em>ie</em> d’<a href="http://www.schneier.com/essay-052.html" hreflang="en">innocents pris pour des terroristes</a>), et qui sera dépassée par des terroristes toujours plus imaginatifs... ou une bonne vieille catastrophe naturelle ou industrielle.</p>
<p>Je me demande ce que donnerait une catastrophe majeure en France (genre 11 septembre à la Défense, tremblement de terre majeur à Nice ou inondation totale de Paris). Le problème de chaîne de commandement serait différent (État plus centralisé, pas de niveau fédéral pour interférer). Mais nous, simples citoyens, n’avons en général aucune préparation. J’ai suivi des cours de secourisme il y a des années avec des amis, mais de notre propre initiative. Si un avion s’abat dans mon quartier, je n’ai pas grande idée des choses à faire en premier sinon fuir avec ma famille.</p>
<p>Et encore est-ce un exemple où les secours extérieurs viendraient rapidement et massivement. En cas de catastrophe de plus grande ampleur, une population doit très vite s’auto-organiser, sinon on revient à l'âge de pierre (genre ce qui s'est passé au Superdome à la Nouvelle-Orléans). <br />Comment organiser l’espace (latrines, morgue...) ?<br />Qui décide et partage les tâches ? Le temps qu’un groupe de gens paniqués pris au hasard se choisisse une hiérarchie est un précieux temps gaspillé, si elle y parvient. Je n’ai pas connaissance d’un protocole du genre : « en cas de catastrophe sans contact avec les autorités officielles, tout officier de police/sécurité civile... prend le commandement, sinon tout ancien militaire, sinon tout prof, sinon tout chef d’entreprise, sinon la personne la plus grande ». <br />Doit-on fuir ou attendre les secours ? Et où aller s’il faut fuir ?<br />Comment partager la nourriture ?<br />Qui s’occupe des tâches ingrates (corvée de latrines, isoler les cadavres...) ?</p>
<p>Mais après tout, avec <a href="http://www.protection-civile.asso.fr/secourisme/bds.shtml">moins de 5% de la population formée au secourisme</a>, dans un pays <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/12/propositions/pion2013.asp">qui pense tout juste à rendre obligatoire les détecteurs de fumée</a> (et les extincteurs, comme au Royaume-Uni ??), ce serait beaucoup demander. Nous avons un bon SAMU et comptons beaucoup sur nos systèmes de secours mais en cas de pépin majeur, c’est à la population de savoir réagir aussi. <a href="http://www.lexpress.fr/info/societe/dossier/exclusion/dossier.asp?ida=434808">Les derniers tragiques événements à Paris le montrent</a>, et ce ne sont « que » de classiques incendies.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2005/09/11/4-schneier_katrina#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/4