Blog éclectique & sans sujet précis - Mot-clé - déshumanisation<p>Si ça me passe par la tête, si ça n’intéresse que moi, alors c’est peut-être ici. Ou pas.</p>2024-02-13T09:44:49+01:00L'éditeur est le propriétaire du domaineurn:md5:bf83720a7189bba489682d945b972671Dotclear« Le monde d'hier » de Stefan Zweigurn:md5:f41a7b4cef6d81753e0a4bee446e679c2021-07-31T15:16:00+02:002023-03-13T10:52:49+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagneapocalypseautodestructionAutrichecataclysmecatastrophechaoscivilisationculturediscriminationdécadencedémocratiedéshumanisationguerregéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmulticulturalismemémoirenationalismeperspectivePremière Guerre MondialeracismeSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p><em>Und ich mußte immer an das Wort denken, das mir vor Jahren ein exilierter Russe gesagt: »Früher hatte der Mensch nur einen Körper und eine Seele. Heute braucht er noch einen Paß dazu, sonst wird er nicht wie ein Mensch behandelt.«</em></p>
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Et je me souviens toujours de ce mot, que m'avait dit un exilé russe, des années auparavant : « Autrefois l'homme n'avait qu'un corps et une âme. Maintenant il lui faut encore un passeport, sinon il n'est pas traité comme un homme. »</p>
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<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Stefan_Zweig" hreflang="fr" title="Stefan Zweig : page Wikipédia">Stefan Zweig</a></em>, Die Welt von Gestern. Erinnerungen eines Europäers</p></blockquote>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-vers_1912-via_Wikipedia.png" alt="Stefan Zweig vers 1912 (via_Wikipedia)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Stefan Zweig était de ces Européens d'avant l'heure, cosmopolites d'avant la Première Guerre Mondiale, voyageurs sans passeport, passeurs de la culture entre les pays et à travers les langues, et qui, hommes déjà mûrs, ont vu s'effondrer leur monde dans la haine, les mouvements de masse, les frontières, l'exil, la guerre. <em>Le monde d'hier</em> est le testament de Zweig, rédigé juste avant son suicide en 1942.</p> <p>Certes son « monde d'avant » était privilégié : la jeunesse dorée d'une capitale impériale, polyglotte, avide de littérature, de théâtre, de musique, d'art. S'il décrit la Vienne d'avant 1900 comme conservatrice et trop respectueuse de l'âge, il appréciait l'ambiance de son époque : la stabilité, le progrès en marche, l'amélioration progressive de la condition de tous, l'avenir sûr et radieux. Les grandes guerres du XIXè siècle étaient déjà loin, les sociétés évoluaient, dans un Empire presque millénaire.</p>
<p>Cette vitalité et cette confiance furent un piège (à ajouter au dossier de <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark">Sleepwalkers</a></em>) :</p>
<blockquote><p><em>Jeder Staat hatte plötzlich das Gefühl, stark zu sein und vergaß, daß der andere genauso empfand, jeder wollte noch mehr und jeder etwas von dem andern. Und das Schlimmste war, daß gerade jenes Gefühl uns betrog, das wir am meisten liebten: unser gemeinsamer Optimismus.</em></p>
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Chaque État avait soudain le sentiment d'être fort, et oubliait que les autres se sentaient de même ; chacun en voulait encore plus, et chacun quelque chose de l'autre. Et le plus grave est que c'est justement ce sentiment que nous aimions le plus qui nous abusait : notre optimisme à tous.</p></blockquote>
<p>Effaré, Zweig voit tous ses amis happés par l'hystérie collective nationaliste.
Incapable de voyager loin, militairement « planqué », il collabore en Suisse à un collectif d'écrivains européens contre la guerre, conscients de parler dans le vide.</p>
<p>Il assiste aux derniers instants de l'Autriche impériale, en croisant l'Empereur Charles de Habsbourg en exil à la frontière suisse.
De Salzbourg, il assiste au chaos économique, au bouillonnement culturel et au complet renversement des valeurs de la nouvelle Autriche — le seul pays que l'on ait jamais forcé à être indépendant.</p>
<p>Les Années Folles se passent mieux (c'est au tour des Allemands de souffrir économiquement). Son succès littéraire déjà naissant avant guerre se renforce.</p>
<p>S'impose progressivement Hitler, que personne en Autriche ne voit venir. En Allemagne, son ami l'homme politique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walther_Rathenau" hreflang="fr" title="Walter Rathenau sur Wikipédia">Rathenau</a> est assassiné. Les chemises brunes sèment le chaos. L'ordre moral et légal, les bases de la société, que même la Première Guerre Mondiale avait à peu près préservées : tout cela s'envole. Sous l'unité de façade du pays face à la menace, Zweig sait que beaucoup, par peur ou prudence, sont déjà préparés à l'Anschluß.</p>
<p>Zweig est un des premiers à fuir, bien avant le rattachement au IIIè Reich. Pour en ajouter aux pertes matérielles (livres, collections) ou immatérielles (amis, famille), il est déchu de sa nationalité en 1938 : il se retrouve apatride. Ce qui semblait un rêve pour un citoyen du monde se transforme vite en cauchemar administratif.
En Autriche, sa vieille mère mourante n'a même plus le droit de se reposer sur un banc lors de ses promenades : interdit aux Juifs.</p>
<p>En Angleterre, impossible de convaincre ses interlocuteurs que la perte de l'Autriche entraînera la chute de toute l'Europe. Zweig assiste à l'euphorie à l'annonce des accords de Munich, et à la consternation rapide quand la population réalise que tout a été abandonné à Hitler. L'ambiance se plombe, la guerre s'annonce, certaine.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26.jpg" title="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26_m.jpg" alt="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p>Le livre est un document. Quelques petits travers énervent, comme le <em>name dropping</em> permanent : Sigmund Freud, Richard Strauss, Romain Rolland, Bernard Shaw, H. G. Wells, Walter Rathenau, Charles Ier… Certaines visions semblent un peu idylliques (le Paris d'avant-guerre !), en tout cas réservées aux gens des classes aisées ; mais c'est le propre de la nostalgie. Ce livre décrit certes un monde perdu et son auteur, mais sa famille est quasiment oubliée, et il est surprenant que les prénoms de ses deux femmes ne soient même pas cités.</p>
<p>Zweig n'a pas vu la guerre se retourner, ni la reconstruction de l'Europe. Il en aurait sans doute été un des rebâtisseurs. Notre époque, qui remet des frontières partout, fait la chasse aux migrants, et à nouveau en prise à la stupidité de masse, ne lui aurait pas plu. Et il n'aurait pu s'empêcher de retisser des parallèles avec la chute de l'Europe un siècle plus tôt.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/860« La chute du Japon » de William Craigurn:md5:1477cf6bde729463b434ee59a1c292032020-09-27T21:21:00+02:002020-09-27T21:21:00+02:00ChristopheHistoireabominationAmériqueapocalypseautodestructionbombe atomiquebon senscataclysmecatastrophechaosChinecivilisationdécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegigantismeGuerre FroidegéopolitiquehainehistoirehiérarchieimpérialismeLibérationmortnationalismeoh le beau cas !ouverture d’espritperspectiveracléescienceSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unis<p>Loin de l'histoire militaire pleine de bruits, il y a la petite grande histoire, celle qui se déroule dans des réunions feutrées, ou dans des consciences déchirées entre devoirs, intérêts, peurs et réalisme. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> C'est plutôt celle-là que William Craig choisit de décrire. En 1967, ce livre rapportait les souvenirs des survivants des dirigeants de l'Empire japonais pendant les jours les plus terribles de son histoire. Si quelques pages décrivent les événements militaires de la toute fin de la guerre ou s'étendent sur la mission qui a failli ne pas lâcher la deuxième bombe atomique sur Nagasaki, l'essentiel tourne autour des discussions, tergiversations et affrontements des divers dirigeants japonais.</p> <p>Les ministres, amiraux, officiers... sont évidemment nombreux, et l'Occidental moyen qui les découvre tous ensemble aura du mal à suivre. Heureusement, les photos aident un peu à mémoriser.</p>
<p>Le jeu se déroule essentiellement entre quelques membres du gouvernement, le conseil des anciens Premiers Ministres, et le Conseil suprême, donc beaucoup de militaires et quelques politiques : très peu de personnes au final. Leur poids est écrasant. On est à l'été 1945, Okinawa est tombé, les grandes villes sont rasées sous les bombes incendiaires, et même les plus fanatiques ne croient plus à la victoire. La seule discussion porte sur les termes d'un arrêt des hostilités. Notamment : le maintien de l'Empereur, la non-occupation du Japon, le refus de faire juger des criminels de guerre par l'extérieur.</p>
<p>Dans ce cadre, le dernier ultimatum allié, la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Potsdam_Declaration" hreflang="en">déclaration de Potsdam</a>, demandant une reddition sans conditions sous peine d'anéantissement, est inacceptable. L'espoir des jusqu'au-boutistes : une résistance opiniâtre et des pertes terribles amenant les Américains à plus de concessions. Les Japonais avaient d'ailleurs prévu correctement le plan d'invasion américain par le sud de l'archipel. (<em>On sait que les prévisions de pertes américaines pour l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Downfall" hreflang="fr">invasion de l'archipel</a> se chiffraient en millions. Cela n'effrayait apparemment pas les planificateurs du Pentagone.</em>). Un passage surréaliste : un maréchal revenant d'Hiroshima annonce que la bombe A n'est pas aussi destructrice, des abris souterrains pourraient résister.</p>
<p>Mais d'autres facteurs pèsent : d'abord, les bombes atomiques.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia.png" title="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia_m.png" alt="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Craig consacre beaucoup de pages à décrire le lancement du projet, l'entraînement des pilotes pour cette délicate mission, le choix des cibles... Étonnamment, il passe vite sur Hiroshima (6 août), dont l'attaque se déroule comme à l'exercice, pour se concentrer sur Nagasaki (9 août). Contrairement aux bombes A précédentes à l'uranium, il s'agit là d'une bombe au plutonium, donc non encore testée. La mission fut un cauchemar : problème de carburant dès le départ ; difficulté de rendez-vous avec les avions d'observation ; conditions mauvaises au-dessus de la cible, Kokura ; changement d'objectif ; carburant trop limité pour un deuxième passage et mauvaises conditions, toujours. Il fallait que le bombe tombe juste pour avoir un impact majeur. Mais il y eut une trouée, et Nagasaki disparut. Le bombardier se posa de justesse à Okinawa. La description du sort des habitants de Nagasaki dans les jours suivants est dantesque. Certains victimes étaient des soldats alliés prisonniers. D'autres bombes atomiques étaient en cours d'assemblage.</p>
<p>Depuis plusieurs mois, des vagues de B-29, basés près du Japon, tapissent de bombes les villes japonaises. Même sans bombe atomique, l'industrie japonaise est déjà en train de disparaître. La société, dans des villes rasées où tout manque, se délite.</p>
<p>Les tentatives d'ouverture de divers diplomates dans plusieurs chancelleries pour entamer des négociations de paix échouent pathétiquement. Il est effarant de voir à quel point les deux belligérants possèdent peu de moyens pour communiquer l'un avec l'autre, et combien sont rares les gens bilingues. La déclaration de Potsdam, discutée en interne, reste d'abord sans réponse — ce qui est interprété comme un rejet par les Américains.</p>
<p>Le coup de bambou est sans doute soviétique : les Japonais comptaient sur la neutralité de Staline, voire son intermédiation. Mais celui-ci tient la promesse faite à Roosevelt : l'URSS envahit la Mandchourie au moment où tombe la bombe de Nagasaki, et en un temps record.</p>
<p>Le 10 août, après d'âpres discussions dans un abri antiaérien sous le palais impérial, aucun consensus entre les dirigeants n'est obtenu. Le vieux Premier ministre <a href="ttps://fr.wikipedia.org/wiki/Kantar%C5%8D_Suzuki">Suzuki</a> pousse, contre toute tradition, l'Empereur à intervenir. Hirohito tranche et décide d'accepter la déclaration de Postsdam. Les irréductibles ne peuvent s'y opposer, mais sauvent la face, puisqu'il faut obéir à l'Empereur.</p>
<p>Les Alliés sont contactés via la Suisse et la Suède. L'acceptation par le Japon ajoute la réserve que les prérogatives du souverain régnant seront préservées. Truman et ses conseillers discutent de cette entorse à la « capitulation sans conditions » exigées. Le pragmatisme l'emporte : l'Empereur sera un moyen de faire pression sur les derniers extrémistes dispersés dans les possessions japonaises ; il faut tenter de libérer les prisonniers de guerre le plus vite possible ; plus la guerre durerait, plus l'influence soviétique grandirait. Il faut aussi consulter les Alliés. Les Soviétiques tentent en vain un bluff pour avoir une part du commandement du Japon occupé.</p>
<p>La réponse américaine annonce que toute l'administration japonaise sera subordonnée au commandant suprême allié pour mettre en œuvre les conditions de la capitulation, que le peuple japonais choisira lui-même la forme de son futur gouvernement, et que le Japon sera occupé jusque là. Ce la ne calme pas les partisans de la guerre à outrance, surtout que les Russes et les Chinois veulent explicitement la tête de l'Empereur. Faut-il accepter cette note ? Là encore, il faut que Hirohito tranche à nouveau, le 14 août, pour que l'acceptation soit envoyée aux Américains.</p>
<p>Pendant ces quelques jours, la situation reste floue. Nagasaki brûle toujours. Les extrémistes continuent de lancer aux troupes des appels à la résistance à la radio. Les Japonais annoncent la fin de leurs offensives. Les Américains suspendent leurs bombardements dès le 10 août, se contentant de lâcher des tracts. Le temps passant, quelques bombardiers repartent à l'attaque juste avant le cessez-le-feu définitif.</p>
<p>Au-dessus des responsables japonais planent depuis des décennies les menaces de coup d'État militaire et d'assassinat par des officiers fanatiques. (Ce fut le cas, entre autres, lors de l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Invasion_japonaise_de_la_Mandchourie" hreflang="fr">invasion de la Mandchourie en 1931</a>). À ce moment encore, certains généraux sont ouvertement poussés au putsch par leurs officiers. Ce n'est pas une révolte contre l'Empereur, celui-ci est juste est mal conseillé. Les extrémistes voient notamment le général <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Korechika_Anami" hreflang="fr">Anami</a>, hostile à une capitulation sans conditions, mener un coup d'État. Mais Anamu se plie à la décision finale d'Hirohito, refuse de se révolter, et se suicide comme tant d'autres. Plusieurs autres renoncent, parce qu'ils savent que le coup d'État est voué à l'échec. Le cas de l'ancien Premier Ministre <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hiranuma_Kiichir%C5%8D" hreflang="en">Hiranuma</a> surprend : partisan de la paix, il change d'avis quand il voit que la personne de l'Empereur n'est pas garantie.</p>
<p>Les derniers extrémistes ne se suicident pas tous. Un dernier groupe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_Ky%C5%ABj%C5%8D">va jusqu'au bout</a> et, le 14 août, attaque le Palais impérial. Le disque où Hirohito a enregistré son adresse au peuple n'est pas retrouvé. Le Premier ministre Suzuki manque d'être assassiné. L'essentiel de l'armée ne suit pas. Le putsch échoue, les derniers insurgés se suicident. Le discours d'Hirohito est diffusé le 15 août. Certains Japonais ont du mal à comprendre le message, puis à y croire.</p>
<p>La capitulation se diffuse difficilement. Les combats continuent quelques jours aux Philippines. Quand elle parvient, les réactions sont parfois violentes. Des prisonniers de guerre sont exécutés. Des kamikazes décollent, dont plus personne n'entend parler. Par la suite, il faut encore calmer quelques excités.</p>
<p>Suivent les détails techniques, parfois triviaux, comme l'échange de fréquences radio pour communiquer. Les Japonais envoient les ordres d'arrêt des hostilités à toutes leur troupes, demandent des sauf-conduits pour les officiers et membres de la famille impérial envoyés les confirmer. MacArthur demande l'envoi à Manille d'officiers pour planifier l'occupation. Au moins le transfert d'autorité devait-il se faire dans l'ordre : la mission japonaise s'envole dans le secret et la peur des kamikazes, et arrive le 20 août. L'ambiance, d'abord lourde, se détend un peu. La délégation japonaise apprend le plan américain, qui prévoit des débarquements dès les jours suivants (!). Elle réclame du temps pour mettre au pas les derniers fanatiques, nombreux dans les bases aériennes... et obtient le retrait d'un tableau prévoyant un nombre de femmes de chambres au service d'officiers supérieur ! Au retour, l'avion de la délégation doit amerrir !</p>
<p>Entre les chapitres s'intercalent des passages sur les opérations en vue de la libération des prisonniers. Craignant à juste titre des représailles sur les prisonniers de la part de Japonais désespérés, certains commandos américains, parachutistes et OSS, se positionnent en urgence, prêts à bondir vers les camps de prisonniers à l'annonce de l'arrêt des hostilités. Des difficultés avec les militants communistes sont prévues, et il y a des accrochages : la guerre civile va reprendre en Chine. À ces endroits, les premiers contacts entre Américains et Japonais après l'annonce de la capitulation sont très tendus, mais globalement la libération des prisonniers se déroule sans trop de problèmes.</p>
<p>Très tendu aussi le premier débarquement de soldats américains au Japon, le 28 août, sur une base aérienne auparavant dédiée aux envols des kamikazes. Les Américains arrivent plus tôt que prévu, même retardés de deux jours par la météo. Si l'ambiance reste fraîche, tout se déroule cependant avec un minimum de bonne volonté réciproque, et la première base américaine commence à voir déferler des milliers de soldats vainqueurs, dont MacArthur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia.jpg" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia_s.jpg" alt="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" /></a>La brève cérémonie signature officielle de la capitulation, en présence de tous les représentants galonnés des nations vainqueurs, n'a lieu sur le <em><a href="https://en.wikipedia.org/wiki/USS_Missouri_(BB-63)" hreflang="en">Missouri</a></em> que le 2 septembre. Le choix du bateau tient dans la rivalité MacArthur/Nimitz, ou plutôt Army/Navy : MacArthur étant signataire, le lieu doit être un navire, et est disponible celui du nom de l'État de Truman. Les Américains débarquent alors à Tokyo, et les emprisonnements de responsables suspects de crimes commencent. Au fur et à mesure que les nouveaux maîtres s'installent, les principaux problèmes sont plutôt des chocs culturels, ou des problèmes de disciplines récurrents dans une armée d'occupation, que les deux camps veulent éviter au maximum.</p>
<p>Le livre raconte aussi l'histoire de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Marcus_McDilda" hreflang="en">Marcus McDilda</a>, pilote de chasse prisonnier : aux Japonais qui croient qu'il savait des choses sur la bombe atomique, il donne une théorie et des chiffres fantaisistes — qui ont peut-être fait peur en haut lieu. Et celle du major <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Mayhew_Wainwright_IV" hreflang="fr">Wainwright</a>, ancien second de MacArthur, prisonnier depuis la prise de Manille en 1942, et retrouvé à temps pour être présent, squelettique, à la signature de la capitulation. Ou du drame de l'Indianapolis, coulé après avoir livré la bombe A, dont l'équipage naufragé est décimé par les requins <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><em>Une question que je me pose : Craig s'est basé sur les souvenirs des dignitaires japonais survivants et des témoins, mais pas de l'Empereur. Celui-ci apparaît de manière très furtive. Son rôle dans le fonctionnement de l'Empire japonais est totalement minimisé. Cela colle avec la théorie plus ou moins officielle, après guerre, d'un Empereur traditionnellement sans rôle politique, impuissant face à la caste militaire toute-puissante, théorie <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hirohito#Question_de_la_responsabilit%C3%A9_personnelle_de_l'empereur">remise en cause depuis</a>. On l'a vu, les généraux en faisaient à leur tête ; mais Hirohito se serait laissé pour le moins laissé convaincre, et aurait approuvé la politique d'agression japonaise. Vue la manière extrêmement cérémoniale dont Hirohito communiquait avec ses ministres, on se demande même quelle pouvait être sa vision du monde.</em></p>
<p>Titre original : <em>The Fall of Japan</em></p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Le récit d'un survivant est une des pires scènes des </em>Dents de la me'r' de Spielberg.''</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/858« La sorcellerie en Alsace aux 16è et 17è siècles » de Rodolphe Reussurn:md5:d3f64b897ed1308aa11679268733709f2020-08-23T21:20:00+02:002021-01-11T12:48:41+01:00ChristopheHistoireabominationAlsaceautodestructionchristianismecynismeDieudéshumanisationguerre saintehainehistoireincohérencejusticelivres luslégendes urbainesmèmeoh le beau cas !ouverture d’espritpanurgismeparadoxeparanoïapeine de mortperspectivepessimismepsychologiereligionRenaissancethéologietotalitarisme<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/La%20Sorcellerie%20en%20Alsace%20aux%2016%C3%A8%20et%2017%C3%A8%20si%C3%A8cles%20-%20Rodolphe%20Reuss.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.La Sorcellerie en Alsace aux 16è et 17è siècles - Rodolphe Reuss_s.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> Petite analyse des procès en sorcellerie, en une époque que l'on croyait déjà civilisée. La grande époque des bûchers de sorcières, ce n'est pas l'obscur Moyen Âge, mais les siècles suivants. Et le nombre de femmes (surtout) torturées, étranglées, brûlées, pour une aussi petite région que l'Alsace, fait froid dans le dos.</p> <p>(<em>Comme d'habitude, le texte vise à résumer, et l'italique indique une remarque de ma part.</em>)</p>
<p>Il y a parfois de bonnes surprises dans les dépôts de livres en accès libre que l'on trouve à présent un peu partout. Il s'agit ici de la réédition de 1987 (il y en a <a href="https://editionsdegorce.ecwid.com/La-Sorcellerie-au-XVIe-et-au-XVIIe-si%C3%A8cle-particuli%C3%A8rement-en-Alsace-p88163721" hreflang="fr">une de 2017</a>) de l'ouvrage de 1871 d'un des anciens responsables de la Bibliothèque de Strasbourg. Rodolphe Reuss a passé en revue et résumé des dizaines de procès en sorcellerie sur deux siècles.</p>
<h3>Les sorcières</h3>
<p>Les « sorciers » et « sorcières » sont de toutes les couches sociales, mêmes les plus élevées, et de la campagne comme de la ville. Les femmes sont surreprésentées : elles sont censées être moins intelligentes, moins capables de se défendre, et donc plus faciles à séduire par Satan, qui d'ailleurs est un être au-delà du lubrique. Les enfants ne sont pas épargnés.</p>
<p>Satan est censé frapper à un moment de faiblesse, pour une raison ou une autre : il donne, protège, offre des pouvoirs. Il s'agit de devenir plus riche, se venger, tuer des animaux, ou beaucoup d'enfants — il fallait bien une explication aux nombreux décès en bas âge. Bizarrement, aucun de ces pouvoirs n'est dangereux à grande échelle, et il se retourne parfois contre la personne ou les biens de la sorcière. Les réunions avec Satan, les sabbats, les différentes formes de Satan, les noces diaboliques, du dernier degré de dépravation... tout cela figure dans les minutes des procès avec moults & glauques détails, menus des noces et composition des breuvages inclus.</p>
<h3>Les procès</h3>
<p>L'Église catholique n'est pas seule coupable de chasse aux sorcières ; l'Alsace était d'ailleurs en bonne partie protestante à cette période. D'ailleurs les inquisiteurs n'étaient plus aux commandes, et chaque ville avait son tribunal dédié aux maléfices, rempli de gens sans formation, que Reuss décrit comme incultes et bornés. Il n'y avait presque jamais d'avocat, cela ralentissait trop le procès, et il ne faisait de toute façon pas bon protéger un accusé de sorcellerie : c'était un bon moyen de se voir suspecté soi-même. Se défendre trop bien est également l'indice d'une possession satanique. Par contre, il est évident que Dieu protège les juges !</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Femme_accus%C3%A9e_de_sorcellerie-%C3%89mile_Deschamps-domaine_public-via_Wikimedia.jpg" title="Femme accusée de sorcellerie (Émile Deschamps, domaine public, via Wikimedia)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Femme_accusée_de_sorcellerie-Émile_Deschamps-domaine_public-via_Wikimedia_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Au début d'un procès, il y a bien sûr dénonciation, pour une broutille souvent (tout le monde se surveille, dans des petites villes), souvent par calomnie, ou dénonciation anonyme, mais parfois à cause de l'aveu d'un(e) accusé(e) de sorcellerie. Le juge agit à charge, appelle des témoins qui n'ont pas à prouver ce qu'ils avancent, cherche des traces du Malin, et, bien sûr, fait grand usage de la torture. Il y avait une grande variété de supplices, et plusieurs degrés, dont même le premier fait dresser les cheveux sur la tête. La recherche de signes « objectifs » de possession (marques diverses, dont celle d'une partie insensible du corps) relevait aussi de la torture. Évidemment, l'accusé(e) avouait au final tout et n'importe quoi, quand il ne décédait pas sur le chevalet. Les incohérences et contradictions dans les confessions n'étaient pas un problème.</p>
<p>Le ou la coupable quittant généralement ce monde, ses biens étaient confisqués, servant entre autres à payer le procès, les juges, rémunérer les accusateurs ! — la question des dénonciations calomnieuses est donc ouverte, et enfin remplir les caisses de la commune. Quand les juges étaient miséricordieux, que la sorcière se repentait, il y avait décapitation ou étranglement avant le bûcher. Si, quasiment par miracle, l'accusé était déclaré innocent (cela arrivait !), on l'exilait quand même.</p>
<p>(<em>Cette hystérie collective se retrouve dans les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sorci%C3%A8res_de_Salem" hreflang="fr">sorcières de Salem</a>. Au moins les Américains ont-ils alors tiré une morale de l'histoire. Un exemple effroyable, alsacien, vers 1617-1630 est la <a href="https://journals.openedition.org/alsace/1036" hreflang="fr">série de procès à Molsheim</a>, où 76 « sorciers » ont été brûlés… dont 30 enfants !</em></p>
<p><em>Il ne faut pas se moquer de ces gens si superstitieux. À l'époque moderne, sans Satan, le phénomène du coupable par association sans défense possible frappe aussi : Terreur en France, terreur stalinienne... Certaines hystéries médiatiques ou sur les réseaux sociaux sont moins graves, mais de la même logique.)</em></p>
<p>Le nombre de victimes est effarant : on parle de bûchers chaque année, ou presque, pendant des décennies, avec parfois de véritables flambées . Sélestat : 91 sorcières brûlées de 1629 à 1642 ; Rouffach : 37 personnes en 8 ans à Rouffach avant 1596 ; et 5000 dans l'évêché de Strasbourg entre 1615 et 1635 ! Le XVIIè siècle fut pire que le XVIè à cause de la Guerre de Trente Ans. Il y eut encore quelques cas de procès dans les premières décennies du XIXè siècle ! Pour Reuss, les bûchers n'ont reculé que grâce aux philosophes des Lumières. Et le combat contre ignorance et superstition n'est pas fini, déplore Reuss en 1871.</p>
<h3>Pourquoi</h3>
<p>Rodolphe Reuss cherche des explications à un tel délire et à tant de victimes. L'acharnement des juges à poursuivre la torture jusqu'à des aveux complets, et la suggestion des réponses à l'accusé, la duplicité des interrogatoires, la perspective d'être damné si l'on n'avouait pas… n'expliquent pas tout.</p>
<p>Un point important : dans un monde ignorant et superstitieux, <em>tout le monde</em> croyait au Diable autant qu'à Dieu, et était réellement terrorisé par le concept, les juges — sincères — comme les accusés. Avec suffisamment de pression, ces derniers pouvaient mettre eux-mêmes sur le compte d'influences sataniques certaines de leurs mauvais pensées ou rêves. Certains étaient évidemment des malades mentaux à un degré ou un autre.</p>
<p>Une autre explication levée par l'auteur est la disponibilité de substances plus ou moins hallucinogènes. Vue la rudesse du temps, la consommation ne devait pas être anecdotique chez certains (Reuss la compare à l'ivrognerie de son temps et le besoin d'oubli de la réalité). Les consommateurs auraient projeté dans leurs délires confus leurs croyances et les on-dits, et sincèrement cru rencontrer le démon, avant ou après la suggestion des juges. Les aveux étaient donc parfois <em>sincères</em> ! Cela expliquerait aussi leur monotonie.</p>
<p>Enfin, certains procès auraient plutôt dû relever du droit commun : empoisonnement (mais toute science était à l'époque ramenée à la magie), simple charlatanisme, ou affaires de mœurs divers, dont l'accusé comme la société préfère se dédouaner sur Satan. Enfin, les accusations de sorcellerie permettent de s'attaquer aux hérétiques ou aux membres d'une religion concurrente (clergé compris).</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Rodolphe_Reuss-1880-435px-Wikimedia-domainepublic.jpg" title="Rodolphe Reuss 1880 (image Wikimédia, domaine public)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Rodolphe_Reuss-1880-435px-Wikimedia-domainepublic_s.jpg" alt="Rodolphe Reuss 1880 (image Wikimédia, domaine public)" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /></a> Rodolphe Reuss est manifestement consterné par la crédulité et les préjugés des gens de cette époque. Il parle du <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Malleus_Maleficarum" hreflang="fr">Marteau des Sorcières</a></em> comme d'un « monument prodigieux de la bêtise humaine ». Il sait bien que son lecteur du XIXè siècle ne croit plus à la sorcellerie, mais il sait que certains sont sceptiques sur l'ampleur ahurissante du phénomène. On sourit et on le sent gêné, quand certains passages des sévices subis sont trop obscènes pour être racontés « même en latin ».</p>
<p>On retrouve dans les pages quelques blessures personnelles de l'auteur. Plus d'une fois, il se plaint que certains documents ont été détruits par les « obus prussiens » en plein pendant la rédaction du livre : sa chère bibliothèque strasbourgeoise a été incendiée lors du très dur <a href="https://www.lalsace.fr/magazine-tourisme-et-patrimoine/2020/07/12/le-siege-de-strasbourg-en-1870-une-catastrophe-aussi-pour-le-genealogiste" hreflang="fr">siège de Strasbourg</a>. Il a ensuite dû quitter l'Alsace annexée. Il la verra à nouveau française — mais ses trois fils auront laissé la vie dans la Grande Guerre.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/%C2%AB-La-sorcellerie-en-Alsace-aux-16%C3%A8-et-17%C3%A8-si%C3%A8cles-%C2%BB-de-Rodolphe-Reuss#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/857« La campagne du Rhin : Les Alliés entrent en Allemagne (janvier-mai 1945) » de Daniel Feldmann & Cédric Masurn:md5:c68ad5398703e89ace8912eae64179472019-02-03T18:50:00+01:002020-02-08T17:50:24+01:00ChristopheHistoireAllemagneAlsaceAmériqueapocalypseautodestructioncataclysmechaoscomplexitédéshumanisationEuropegigantismeguerre saintegéographiegéopolitiquehainehistoireHistoire de FrancehiérarchieimpérialismejusticenationalismeorganisationracléeSeconde Guerre MondialetempsténacitéÉtats-Unis<p>(<em>Encore une chronique de mes lectures, pour changer...</em>)</p>
<p><a href="https://www.economica.fr/livre-la-campagne-du-rhin-janvier-mai-1945-feldmann-daniel-mas-cedric,fr,4,9782717868807.cfm"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.feldmann-mas-campagne-du-rhin_m.jpg" alt="feldmann-mas-campagne-du-rhin.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> Il n’y avait apparemment pas de livre dédié aux opérations des Occidentaux début 1945. Le sujet intéresse moins que le rouleau compresseur russe à l’Est, la prise de Berlin, ou la décision d’Eisenhower de ne <em> pas</em> aller à Berlin. Ce livre, assez austère mais relativement facile à lire pour l’amateur éclairé, comble le vide. La vision est plus celle des états-majors, globale et technicienne, que celle anecdotique du soldat de terrain.</p>
<p>Il s’agira essentiellement ici des armées anglo-américaines, et de la canadienne.</p> <p>Quelques chapitres parle de la petite armée française, pas vraiment en bien. C’est un mélange instable de Français libres, d’unités de l’armée de Vichy de France ou d’Afrique du Nord ayant rejoint les Alliés parfois assez tard, de troupes nord-africaines aguerries, et d’anciens FFI courageux mais sans formation militaire. Le manque de matériel est complet et la dépendance envers les Américains totale. Son chef, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/De Lattre" hreflang="fr">https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_Lattre_de_Tassigny</a> aura besoin d’eux pour réduire la poche de Colmar et ne semble pas vouloir ce qu’il veut en Forêt Noire et à Stuttgart. Leclerc et la 2è DB préféreront être sous les ordres d’un général américain.</p>
<p>Quant aux Russes, ils sont de l’autre côté, rouleau compresseur en train de broyer la Wehrmacht et de conquérir l’Europe de l’Est. Rappelons que pendant que les Occidentaux débarquaient en Normandie, il entamaient la reconquête de la Pologne (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Bagration" hreflang="fr">opération Bagration</a>). Fin 1944, ils ont déjà entamé la conquête de terres allemandes.</p>
<h3>Les généraux</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dwight_D._Eisenhower" hreflang="fr">Eisenhower</a> le diplomate, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Montgomery" hreflang="fr">Montgomery</a> l’égocentrique... : tous sont alors connus, environnés de journalistes, et très conscients à l’époque d’écrire l’Histoire. Les rivalités plus ou moins sportives entre généraux s’ajoutent à la rivalité anglo-américaine : les calculs politiques en vue de l’après-guerre s’additionnent au besoin de gloriole et de prestige. Les auteurs sont assez critiques, et tout le monde au sommet en prend pour son grade.</p>
<p>Les moyens et les choix d’offensive sont en permanence arbitrés entre le front nord (anglo-canadien) et centre et sud (américain), et des unités américaines passent alternativement d’une armée à l’autre selon les besoins. S’ajoute le style : Montgomery aime préparer ses offensives et réclame toujours plus de forces ; les Américains ont plus de moyens, plus de chance aussi dans leurs adversaires (les dernières unités allemandes sont très inégales), et foncent volontiers.</p>
<h3>Situation fin 1944 & plan de bataille</h3>
<p>Fin 1944, après une difficile percée en Normandie, un débarquement en Provence, les armées alliées ont reconquis rapidement presque toute la France et la Belgique. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes" hreflang="fr">bataille des Ardennes</a> en décembre 1944 est la dernière grande offensive de la Wehrmacht à l’Ouest, péniblement repoussée. Si celle-ci n’a ensuite plus les moyens de rééditer une telle opération, cela ne veut pas dire que la suite sera un chemin pavé de rose.</p>
<p>Le front début janvier 1945 suit à peu près les frontières allemandes de 1939. Au nord, les Allemands tiennent encore de gros morceaux des Pays-Bas, dont l’embouchure du Rhin. Au sud, la bataille continue en Alsace : Colmar et Rouffach sont encore occupés, et Wissembourg le redevient (l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a> ramène la Wehrmacht jusque Haguenau).</p>
<p>La supériorité matérielle alliée est totale : chars, canons, avions, hommes, et aussi pétrole, à l’est comme à l’ouest. Dans les airs, la Luftwaffe use ses dernières réserves. La coordination interarmes alliée est rodée.</p>
<p>On a gardé l’image d’une armée alliée aux moyens inépuisables, mais ce moment est une crise. D’abord la logistique est cauchemardesque, mais cela s’arrangera quand le port d’Anvers sera à nouveau opérationnel. L’armée britannique est expérimentée mais l’Angleterre est épuisée et les effectifs manquent, il faut même dissoudre des divisions. Même l’armée américaine a des problèmes de remplacement : les pertes en France ont été plus importantes que prévues, et les troupes disponibles sont déjà toutes en ligne. Mais comme 13 % seulement des 2,7 millions d’hommes sont des troupes offensives, une réorganisation et l’embauche de civils pour certaines tâches permettra de parer au problème.</p>
<p>La météo est exécrable, avec un hiver rigoureux. Les périodes de redoux ne sont pas plus faciles, car la boue gêne les offensives d’ampleur et détruit les routes, parfois étroites. Pendant tout le livre revient le problème de faire passer des divisions entières par des chemins vite embourbés et saturés.</p>
<p>Le chemin pour la conquête de l’Allemagne n’est pas évident : des massifs montagneux comme l’Eifel sont difficiles à conquérir (les Américains s’y useront inutilement) ; des barrages permettent d’inonder des zones entières (autour de la Roer) ; la ligne Siegfried protège bien certains endroits ; la supériorité numérique n’est pas assez écrasante pour une attaque partout à la fois ; enfin les chemins faciles n’offrent pas de possibilité d’exploitation évidente vers des objectifs importants. Les raisons des choix stratégiques sont les parties les plus intéressantes du livre.</p>
<p>Assez vite se dégage l’idée qu’il vaut mieux conquérir toute la rive gauche du Rhin, et y détruire les dernières forces allemandes, avant de tenter de franchir le fleuve. La cible principale sera ensuite la Ruhr, poumon industriel de l’Allemagne.</p>
<p>Les auteurs s’attardent à décrire ce à quoi s’attendent les Allemands. Ils n’ont plus guère de réserves, mais n’abandonnent pas le terrain pour autant. Mais le renseignement est défaillant et la coordination des unités n’est plus ce qu’elle a été. Les ordres débiles d’Hitler de ne jamais reculer, fidèlement retransmis, parfois obéis, et la faible qualité des dernières recrues (trop jeunes, trop vieilles, inaptes...), en plus du manque de matériel et de carburant, obèrent toute initiative stratégique. Si beaucoup de divisions n’existent plus que sur le papier, quelques unités restent solides, le régime nazi tient le pays et punit de mort toute idée de reddition : la débandade générale n’interviendra qu’après le passage du Rhin.</p>
<h3>L’Alsace</h3>
<p>La poche de Colmar et plus globalement l’Alsace n’ont pas une grande importance stratégique, mais elles fixent beaucoup d’unités alliées. Au milieu d’un froid glacial, Français et Américains doivent d’abord repousser une attaque allemande (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a>) qui menace Strasbourg. Eisenhower prévoit même au début de l’abandonner avec tout le Bas-Rhin, à la fureur des Français. Il cède à la pression politique et fournit les troupes. Puis il faut reprendre Rouffach et Colmar, difficilement. L’armée allemande se retire par Brisach en bon ordre. Le front alsacien ne bougera plus avant le printemps.</p>
<h3>La Rhénanie</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public.png" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public_m.png" alt="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " /> </a></p>
<p>C’est le 8 février, par Nimègue et l’extrême nord, qui a l’avantage d’être plat et dépourvu de cours d’eau, que démarre l’invasion de la Rhénanie par les Anglo-Canadiens (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Veritable" hreflang="fr">opération Veritable</a>). Malgré une longue préparation, ils tombent sur des troupes allemandes de qualité et bien commandées, et l’avancée est très difficile.</p>
<p>Les Américains entrent un peu plus tard en lice au sud, depuis l’extrême sud de la Hollande. Ils auront auparavant eu du mal à sécuriser les barrages de la Roer, et seront ralentis par les inondations provoquées par les Allemands. La suite sera pour eux plus facile que pour les Anglais, et un rouleau compresseur impeccablement huilé se déploie sans anicroche jusqu’au Rhin et Düsseldorf.</p>
<p>Ces opérations détruisent en un mois les dernières capacités allemandes à l’ouest. Ce sont des unités très diminuées qui retraitent derrière le Rhin.</p>
<p>Les auteurs étudient la décision de ne pas profiter du succès pour franchir le Rhin tout de suite : sécuriser la tête de pont et mener l’exploitation aurait nécessité trop de troupes, sans compter la difficulté de batailles dans la zone urbaine de la Ruhr.</p>
<h3>Remagen</h3>
<p>Début mars, Patton profite de l’effondrement allemand pour sortir enfin du massif de l’Eifel, encore un peu plus au sud (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Lumberjack" hreflang="fr">opération Lumberjack</a>), et border le Rhin jusqu’à la Moselle, Bonn et Coblence. La progression est si facile et rapide qu’un pont, par chance et incompétence allemande, tombe aux mains des Américains à Remagen. Ce n’est pas le meilleur endroit pour créer une tête de pont, mais Eisenhower donne l’autorisation de consolider la tête de pont. Le point de franchissement du Rhin n’a donc pas été planifié, les Alliés s’attendaient à ce que tous les ponts aient été détruits !</p>
<p>Les Allemands ont beau faire, ils ne repoussent pas la tête de pont américaine. L’impact n’est pas tant stratégique que psychologique : la Wehrmacht ne peut même plus espérer souffler un temps derrière le Rhin.</p>
<h3>Sarre & Palatinat</h3>
<p>Les Allemands sont encore au sud de la Rhénanie, à la frontière française, car évacuer ce saillant impliquerait de perdre le charbon de la Sarre. Les armées de Patton et Patch s’enfoncent facilement au nord de la Lorraine et du Bas-Rhin, si vite qu’elles se croisent involontairement (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Undertone" hreflang="fr">opération Undertone</a>).</p>
<h3>Le franchissement du Rhin</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Crossing_of_the_Rhine.jpg" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Crossing_of_the_Rhine_m.jpg" alt="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" /></a></p>
<p>La suite est une longue agonie pour les Allemands. La logistique de l’opération britannique au-dessus du Rhin, nommée <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Travers%C3%A9e_du_Rhin" hreflang="fr">Plunder</a>, avec divisions aéroportées, est massive, même surdimensionnée. Les auteurs expliquent que les Anglo-Américains n’ont jamais eu de progression aisée, que Montgomery veut tirer la couverture médiatique à lui, et effacer son premier échec sur le Rhin à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Market_Garden#Arnhem_2" hreflang="fr">Arnhem</a> en 1944.</p>
<p>En face, la plaine est défavorable à la défense. Si les effectifs allemands font encore illusion, il n’y a plus guère d’officiers expérimentés ni d’armes ni de munitions. Les Anglais doivent combattre mais leur organisation est impeccable et leur progression est rapide.</p>
<p>Les Américains de leur côté ne prennent aucun repos et, en plus de Remagen, franchissent le Rhin plus au sud également, et eux sans préparation, par un « coup de main » ! Patton veut là avoir un prétexte pour éviter de prêter des divisions à l’opération de Montgomery, et faire pièce au succès de ce dernier ; mais il a aussi raison de vouloir profiter d’une défense devenue presque inexistante. Mais par endroit les Allemands s’accrochent encore et les envahisseurs doivent être prudents.</p>
<p>Au final, la Ruhr finit encerclée par les deux armées le 3 avril. Le Reich n’a plus d’industrie.</p>
<h3>Après la Ruhr</h3>
<p>Les Alliés n’ont jamais cherché à battre les Soviétiques dans la course à Berlin. Pourtant, la Ruhr prise, c’était le dernier objectif possible, politique cette fois. Cette décision, prise très tardivement par Eisenhower, a fait couler beaucoup d’encre. Un éventuel « réduit alpin » (condamné d’avance, mais avec les nazis on ne sait jamais) n’aurait pas mobilisé beaucoup de troupes. Les coûts et l’impact sur l’après-guerre étaient des décisions politiques, pas militaires.</p>
<p>Après bien des explications vient la théorie des auteurs : Eisenhower a décidé pour une fois d’affirmer son autorité, a favorisé l’armée de son ami et compatriote Bradley, et ne voulait pas que Montgomery entre à Berlin (les troupes britanniques étaient les mieux placées pour cela). Roosevelt mourant, c’est une période de flottement, et Churchill ne peut changer faire changer d’avis Marshall, seul supérieur d’Eisenhower.</p>
<p>Les Anglo-Canadiens se sont donc contentés de foncer sur la Baltique pour barrer l’accès au Danemark aux Soviétiques. Les Américains ont poussé jusqu’à Leipzig. Au passage ils découvrent les camps de concentration, ce qui ôtera ensuite à certains leurs scrupules à bombarder des villes (Erfurt).</p>
<p>La résistance allemande subsiste ponctuellement, désorganisée, mais l’organisation étatique nazie ne s’effondre jamais. Il faudra attendre la mort d’Hitler pour que Dönitz signe la capitulation. Les détails précis de l’agonie de l’Allemagne ne sont pas le sujet ici -- là-dessus j’avais déjà chroniqué l’excellent <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw">The End</a></em> de Kershaw.</p>
<h3>Conclusion</h3>
<p>Dans cette histoire m’ont frappé les dissensions entre généraux des trois nationalités, leurs mesquineries dignes de cours d’école. Celles-ci n’ont cependant pas eu d’effet sur les opérations. Bref, les Allemands n’avaient aucune chance contre le rouleau compresseur anglo-américain, très bien huilé techniquement, que la logistique n’a plus bridé en 1945.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-campagne-du-Rhin-Les-Alli%C3%A9s-entrent-en-Allemagne#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/852Francis Carsacurn:md5:a1a4641b796f8db94b9580b910c9c2502018-09-14T18:30:00+02:002021-08-12T10:10:17+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesanthropomorphismeapocalypsecataclysmecatastrophecivilisationcolonisationcommunicationconquête spatialedéshumanisationextraterrestresimpérialismelivres lusmulticulturalismenationalismeracismesciencescience-fictionsociétés primitivesspace opera<p>Il y a 13 ans, dans un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/./lectures/liste_livres_lus.html">autre recoin de ce coin de web</a>, j'écrivais à propos de <em>Ce monde est nôtre</em> :</p>
<blockquote><p>C’est un vieux classique par un vieux routard de la SF française des années 60, et la suite de <em>Ceux de nulle part</em>, que j’ai apprécié en tant qu’ado. Ici revient l’intrigue assez classique d’un explorateur d’une civilisation intergalactique plongé dans une guerre sur une planète médiévale. Pas trop mal mené, mais les thèmes et surtout le style ont mal encaissé les années.</p></blockquote>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_1.jpg" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_1_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" /></a> Adolescent, j'aimais bien les trois Carsac que j'avais lu, notamment dans un recueil du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Club_du_livre_d%27anticipation">Club du Livre d'Anticipation</a> de mon père, entre les <em>Robots</em> d'Asimov et <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/13/291-l-empire-de-l-atome-et-le-sorcier-de-linn-d-ae-van-vogt">l'Empire de l'Atome</a></em> de Van Vogt. L'été dernier, j'ai trouvé chez beau-papa l'intégrale parue il y a 20 ans chez <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lefrancq_(maison_d%27%C3%A9dition)">Lefrancq</a> et je lui ai empruntée.</p>
<p>Sur la forme : cette intégrale contient moultes coquilles, quelques bout de phrases déplacés, des sauts de paragraphe manquants et même une mention erronée de <em>Terre en fuite</em> sur le tome 1 (à la place de <em>Ce monde est nôtre</em>). Je sais certes que l'on peut relire mille fois un texte et qu'il restera toujours des coquilles, mais bon. De plus, les commentaires du fils de l'auteur, pas inintéressants dans le tome 1 pour éclairer un peu l'œuvre, manquent totalement du tome 2.</p> <ul>
<li>Pour la biographie de Carsac, plus connu en fait sous son nom de François Bordes, paléontologue reconnu : <a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">voir Wikipédia</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pour une liste détaillée des œuvres avec les couvertures originales au mythique Rayon fantastique : <em>cf</em> le blog <em><a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">En terre étrangère</a></em>.</li>
</ul>
<p>Les différents romans sont parus dans les années 1950 et 60, et en portent la marque, différemment. Je fais parfois mon blasé parce que j'ai lu beaucoup depuis de choses publiées entre temps, mais, globalement, on reste sur le dessus du panier de la SF française de l'époque. Et bonne nouvelle : chaque roman est meilleur et plus complexe que le précédent. Les trois dont je me souvenais depuis le siècle dernier (<em>Les robinsons du Cosmos</em>, <em>Ceux de nulle part</em>, <em>Ce monde est nôtre</em>) le méritaient.</p>
<p>Par ordre plus ou moins chronologique :</p>
<h3>Sur un monde stérile</h3>
<p>Un groupe de jeunes amis embarquent dans l'astronef fabriqué en secret dans son garage par l'un d'eux, débarquent sur Mars sans préparation, sinon des armes, beaucoup d'armes, et rencontrent trois peuplades martiennes qui se livrent une guerre éternelle. Comme il est très clair d'entrée qui sont les beaux et gentils et qui sont les affreux et méchants, ils prennent parti, sinon le commandement, et participent au génocide final des mauvais.</p>
<p>C'est typiquement l'œuvre de jeunesse (écrite vers la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ce qui doit expliquer des choses) sortie des fonds de tiroir bien plus tard, sans intérêt autre que comme témoignage d'une époque. Le scénario ne manque pas de rythme mais l'histoire est prévisible, le manichéisme brutal, le savant un peu trop génial, et la psychologie des personnages basique. L'enchaînement des opérations militaires lasse. Carsac lui-même n'aimait pas ce roman de débutant qui n'a pas été publié de son vivant.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile.jpg" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile_m.jpg" alt="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" /></a></p>
<h3>Les robinsons du Cosmos</h3>
<p>Par contre, cette histoire a marqué mon adolescence, en partie par les dessins de Moebius dans l'édition du Club. Il paraît qu'elle eut un grand succès en Union Soviétique à l'époque.</p>
<p>L'idée n'est pas bête, de déporter un village entier sur une autre planète, par un tour de passe-passe soudain dans l'espace-temps. (Cela rappelle un peu un vieil Hamilton, <em><a href="https://www.noosfere.org/icarus/livres/niourf.asp?numlivre=2146560676">la Ville sous Globe</a></em>, mais l'histoire est plus intéressante, les personnages moins caricaturaux et les filles sont armées.) Comme dans toute bonne SF post-apocalyptique, les ennemis les plus dangereux ne sont pas les hydres volantes ou les indigènes, mais d'autres humains, et cela d'entrée.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" /></a> Ce problème réglé, nos déportés explorent et s'installent, rencontrant une peuplade de centaures, et on tombe plus ou moins dans le roman d'exploration-colonisation à la gloire des ingénieurs et techniciens.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" /></a>J'ai été un peu agacé par ce côté « dictature éclairée des scientifiques », très fréquent chez Carsac, ainsi que par le sort très expéditif réservé aux « méchants » (mais je n'ai pas combattu pendant la Seconde Guerre Mondiale comme l'auteur, moi). Comme je cherche toujours la petite bête, je suis un peu resté sur ma faim sur le côté pratique (à partir d'un gros village et d'une usine, comment reconstruit-on une civilisation ? à quoi doit-on renoncer ?). Le narrateur est un dirigeant, un scientifique-qui-sait, la piétaille reste dans l'ombre.</p>
<p>Malgré ces peccadilles, une bonne lecture.</p>
<h3>Ceux de nulle part</h3>
<p>Voici un autre très bon souvenir de lecture de jeunesse que j'ai relu avec plaisir. Écrit en pleine mode des soucoupes volantes, <em>Ceux de nulle part</em> relate l'enlèvement, un peu par hasard, du docteur Clair par des extraterrestres (les Hiss, quasi-humains à peau verte, pour ne pas faire original), et la découverte de leur civilisation et de celle des planètes amies.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" alt="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" /></a>Civilisation où le bon docteur prendra une place importante, puisqu'il est de la première espèce à sang rouge découverte par ses kidnappeurs ; particularité qui le rend insensible au rayonnement des maléfiques misliks.</p>
<p>Les misliks sont constitués de métal pur, éteignent les étoiles, et sont une des meilleures inventions de Carsac : l'Ennemi, le Mal absolu, qui éteint la lumière et la vie, qui nous est totalement étranger, avec qui on ne pourra jamais trouver d'arrangement. (Dans la fameuse <a href="https://spacearchaeology.org/?p=79" hreflang="en">classification des aliens d'Orson Scott Card</a>, ils seraient les « varelses » ou même les « djurs », quand les hiss et leurs nombreuses espèces amies sont des « ramens », voire plus proches encore).</p>
<p>Civilisation intergalactique pacifique, chocs culturels, traditions différentes, mélange même des espèces, puisque Clair rencontre une charmante quasi-humaine d'Andromède (sans surprise, le charme exotique opère), sans supériorité humaine : était-ce si fréquent dans la SF française des <em>fifties</em> ?</p>
<h3>Ce monde est nôtre</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" alt="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" /></a><em>Ceux de nulle part</em> pourrait être vu comme une longue introduction à l'univers de <em>Ce monde est nôtre</em>, dont la thématique commence à être nettement plus complexe.</p>
<p>Quelques siècles après l'arrivée de Clair chez les Hiss, un de ses descendants, Akki, a pour tâche d'inspecter les planètes encore barbares. L'une d'elle, au stade médiéval, est peuplée de deux civilisations humaines ennemies, plus une troisième proche des Hiss. Or la loi de fer de la grande civilisation galactique et paternaliste est impitoyable : il ne doit y avoir qu'une humanité par planète — l'expérience montre que, sinon, cela finit toujours par dégénérer. Quels peuples vont devoir être déportés sur une autre planète ? Pour tous, cette terre est celle de leurs ancêtres, ils sont chez eux.</p>
<p>Très loin de la neutralité, Akki va se faire entraîner dans la politique interne d'un camp — évidemment il y a une jeune et belle duchesse en danger — puis la guerre entre les deux factions humaines, pour commencer. Enfin arrivera le choix de ceux qui resteront et ceux qui partiront.</p>
<p>C'est bien mené, on est loin du scénario linéaire, les personnages se cassent le crâne à savoir quelle est la chose juste à faire, et il n'y a pas de solution miracle. Le chapitre final est de trop, et je suis un peu dubitatif sur cette grande et sage civilisation galactique qui s'autorise à génocider les peuples les plus agressifs.</p>
<p>On a vu des relents de guerre d'Algérie dans cette histoire pourtant écrite avant, mais le fils de Francis Carsac explique qu'il s'agit plutôt d'un parallèle avec la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers" hreflang="fr">Guerre des Boers</a>. Hélas, on peut tracer un parallèle avec un très grand nombre de zones de conflits passés et présents, probablement futurs.</p>
<p>Bref, une bonne lecture aussi sur un thème éternel.</p>
<h3>Terre en fuite</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72.jpg" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72_s.jpg" alt="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" /></a>Roman un peu bâtard, un peu énervant par le côté « je suis un super-scientifique et je deviens le dictateur qui sauve l'humanité » (ah, si c'était même possible !). Un homme d'un futur lointain s'incarne dans un ingénieur de notre époque, et raconte son épopée, rien moins que la migration de la Terre et de Vénus, transformés en vaisseaux spatiaux, autour d'une autre étoile.</p>
<p>Les histoires s'enchaînent comme des épisodes différents sans grand fil conducteur, les problèmes techniques sont vite évacués, les opposants sont d'infâmes fanatiques sans subtilité, le reste de la population est docile, et comme souvent j'ai l'impression qu'elle n'existe pas vraiment. Je l'avais lu il y a bien longtemps, je comprends pourquoi il m'a laissé un souvenir flou.</p>
<h3>Pour patrie, l'espace</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" alt="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" /></a>Bien plus complexe est l'histoire de ce militaire d'élite d'un Empire terrien en pleine guerre civile, recueilli par une civilisation d'astronefs-villes nomades, à tendance anarchistes, où on lui fait bien comprendre qu'il est un plouc. Mais on a besoin de ses qualités militaires et techniques.</p>
<p>Le choc culturel est violent, les relations avec la gente féminine pleines de méfiance. Racisme, égoïsme, tout y passe. Peut-être peut-on reprocher un manque de subtilité, mais ce militaire n'est <em>pas</em> subtil.</p>
<p>Ce n'est pas déplaisant. Il y a une <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/07/27103626.html">chronique enthousiaste sur SF Emoi</a>.</p>
<h3>La vermine du lion</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_2.gif" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_2_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" /></a>Cette dernière histoire est la plus longue, dense et complexe écrite par Carsac (surtout avec les deux prologues, ajoutés par la suite si j'ai bien compris). Fondamentalement en fait, c'est un mélange de western (Carsac était fan) et de roman d'aventure coloniale, transposé dans le futur, sur une autre planète ; où l'on rejoue une fois de plus le thème de la très méchante méga-entreprise sans âme qui veut exploiter une planète en pressurant ses employés, en soudoyant les colonialistes au gouvernement, et en liquidant les autochtones s'ils gênent, quitte à encourager leurs dissensions internes et manipuler leurs fanatiques religieux. Cela pourrait se passer au XIXè siècle comme de nos jours, et devait résonner d'autant plus fort à l'époque de la décolonisation. En fait, la science-fiction n'apporte pas grand-chose à cette histoire.</p>
<p>Notre héros est la caricature du surhomme à la Carsac, physiquement et mentalement, devenu un cow-boy redresseur de tort, défenseur de ses amis les « sauvages » sans trop d'égard pour la loi et les grands principes vus les enjeux. Il est flanqué d'un lion intelligent, fort pratique pour se défendre ou livrer une justice expéditive, mais un peu sous-exploité. L'histoire est parasitée par plusieurs dames qui ne peuvent rester insensibles à son charme, aux motivations parfois floues. Hélas, là encore, Carsac ne semble savoir résoudre les problèmes de cœur de ses personnages que par l'élimination physique de certains protagonistes. Pour ce dernier roman, il ne se croit pas obligé au <em>happy end</em>.</p>
<p>Je fais la fine bouche, mais je suis d'accord avec la chronique ébahie de <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/10/27121855.html">SF Emoi</a>.</p>
<h3>Nouvelles</h3>
<p>Le tome 2 de l'intégrale se finit par quelques nouvelles, un peu inégales, en taille comme en valeur ou en originalité, mais pas désagréables. Beaucoup tournent autour du voyage dans le temps jusque l'époque paléolithique (la spécialité de François Bordes) et du choc entre hommes civilisés et « sauvages ».</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Francis-Carsac#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/851« Le Français qui possédait l’Amérique : la vie extraordinaire d’Antoine Crozat, milliardaire sous Louis XIV » de Pierre Ménardurn:md5:62a7adf8c4d5f7ea631f306bb6c5951d2018-01-30T18:26:00+01:002018-07-24T09:15:23+02:00ChristopheHistoireAmériqueargentcolonisationcoup bascynismedéshumanisationesclavagefoutage de gueulehistoireHistoire de Franceimpérialismelivres lusmémoireParispolitiquespéculationténacitévaleuréconomie <p>Toulousain, Antoine Crozat avait un père d’origine modeste, mais qui s’était déjà énormément enrichi sous Louis XIV. Bénéficiant de ses réseaux puis développant les siens, il atteignit un niveau de fortune monstrueux, prêtant même au Roi, allant jusqu’à se voir octroyée toute la gestion de la Louisiane française. Ce ne fut pas sa meilleure affaire.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Antoine_Crozat.jpg" title="Antoine Crozat, par Wikimédia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Antoine_Crozat_s.jpg" alt="Antoine Crozat, par Wikimédi)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Antoine Crozat, par Wikimédia" /></a> Sa richesse ne provenait pas que du commerce transcontinental, en plein boom, et d’innombrables trafics, y compris d’esclaves. Ajoutons la spéculation sur les monnaies, en des temps où l’État jouait en permamence avec leur valeur, et les premiers billets à ordre et de banque, aux valeurs aléatoires. Ou le copinage avec les plus grandes familles nobles, auxquelles ce snob rêva toute sa vie de s’allier (il y parvint) ; la mise en coupe réglée de pans entiers du commerce, avec des monopoles légaux ; l’achat et la revente des charges publiques, à titre personnel ou comme intermédiaire de l’État ; et le financement des corsaires ; ou encore la contrebande de grand style : les réseaux financiers se jouaient déjà des frontières.</p>
<p>Mais, surtout, le système fiscal de l’Ancien Régime était un tel bazar qu’une bonne partie était quasiment sous-traitée à de riches personnes avançant l’argent à l’État, parfois à l’avance et se débrouillant pour récupérer cet argent. Rémunérateur, le poste était comme tant d’autres une « charge » vendue par l’État, que l’on pouvait revendre ensuite. Il n’était d’ailleurs pas sans risque financier, et valait aussi en retour la haine du peuple — en plus du mépris que récolte tout parvenu dans une société si hiérarchisée.</p>
<p>Le Régent remit un peu d’ordre dans ces choses (malgré l’échec de la banque de Law). Crozat comme nombre de confrères, fut poursuivi, mais, de fait indispensable, il s’en tira mieux que d’autres, avec une monstrueuse amende.</p>
<p>Crozat est mort vieux, dans son lit, ayant marié ses enfants aux plus anciennes familles. Il fait partie de ces gens éloignés de toute politique ou idéologie mais égoïstes qui ont modifié l’histoire, pas forcément pour le mieux, et que l’on a très vite oubliés (pourtant il a fait construire les futurs Ritz et Palais de l’Élysée !).</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Fran%C3%A7ais-qui-poss%C3%A9dait-l-Am%C3%A9rique#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/840« Ravage » de Barjavelurn:md5:145f601f59d23413fcf25318a57c57a52017-01-22T22:19:00+01:002017-03-04T22:00:32+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationanalogieapocalypseauto-organisationautodestructioncataclysmecatastrophechaoscivilisationcouragedéshumanisationexaptationlivres luslyrismenaturenostalgieperspectivepessimismesciencescience-fictionSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeutopieécologieénergieévolution <p>Dans la SF française, qui ne s’appelait pas encore comme cela en 1942, c’est un classique et la première œuvre d’un de nos plus grands auteurs. Mais noyés dans les odeurs de cendres surnagent quelques relents un peu nauséabonds. C’est une des difficultés des anciens livres : discerner ce qui vient de l’air de son temps, ce qui est deuxième degré, et ce qui est vrai choix de l’auteur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Barjavel_Ravage.jpg" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.Barjavel_Ravage_m.jpg" alt="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Ravage - Barjavel, ed. Folio, illustration Constantin" /></a> Dans le Paris de 2052, tel qu’imaginé juste avant-guerre, l’électricité disparaît inexplicablement. Pendant que la civilisation s’écroule puis que le monde flambe, le jeune François sauve sa jeune, innocente, belle et naïve Blanche, puis monte une expédition pour rejoindre la région rurale isolée où ils ont grandi.</p>
<p>Comme dans toute anticipation dont la date est dépassée ou proche, certaines pages font sourire. La nourriture ne provient que de la synthèse chimique, personne ne sait plus à quoi ressemble un poulet, mais les ouvriers meurent toujours à 50 ans à cause de la dureté de l’usine. Le « plastec » omniprésent n’est pas si loin de la réalité actuelle, et les trains à haute vitesse sillonnent l’Eurasie, mais les avions ne semblent pas voler plus loin qu’en 1939. Le téléphone est en 3D mais il faut toujours se déplacer dans la pièce où il sonne. Les mœurs nous sembleront surannées : Blanche suit une école pour futures « mères d’élite » et elle obéit sans mot dire à son homme. Il est facile de se moquer après coup, je pense que mes éventuelles prédictions pour 2117 feraient rire mes descendants (voire moi-même ?).</p>
<p>La partie la plus intéressante reste la description de la société qui s’effondre, du chaos et des méthodes de survie. On a sans doute fait mieux dans le domaine depuis 1942, mais le passage des individus policés aux bandes barbares reste convaincant : un sage a bien dit que la différence entre la civilisation et la barbarie n’était que de quelques repas, et je le crois volontiers.</p>
<p>Par certains côtés <em>Ravage</em> m’a rappelé <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Malevil">Malevil</a></em> de Robert Merle : destruction totale, barbarie des survivants, héros reconstituant une bande.</p>
<p>Tout cela a d’ailleurs un avant-goût assez inquiétant : combien de temps durerait notre civilisation si l’électricité, pour une raison ou une autre, disparaissait pour longtemps à une échelle continentale ? Sommes-nous certains d’être à l’abri du danger ? Saurions-nous rester assez disciplinés et éviter le chaos ? Barjavel a peut-être été inspiré en partie par l’Exode, tout proche.</p>
<p>Le personnage de François fait froid dans le dos par son adaptation froide à la barbarie de la situation. C’est l’« homme providentiel » par excellence, le guide-né sans lequel les autres ne sont que moutons stupides, et contesté par personne. C’est par lui que l’on retrouve peut-être le pétainisme à la mode en 1942. Barjavel a certes travaillé pour Denoël qui était collaborationniste et publié chez lui, mais il y travaillait avant guerre ; et si <em>Ravage</em> cadrait dans la philosophie de Vichy, le reste de l’œuvre de Barjavel n’a rien à voir. On peut ne voir dans <em>Ravage</em> que méfiance envers un progrès incontrôlé et regret de la France rurale, comme encore parfois aujourd’hui ; ce qui ne veut pas dire que l’on souhaite la destruction de la société moderne. Doit-on voir dans le chapitre final une apologie du bonheur par l’obscurantisme, ou un avertissement ? C’est sur cette grosse ambiguïté que se finit le livre. Même si le futur de cette société, entrevu dans le <em>Voyageur imprudent</em> paru peu après, ne fait pas rêver.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Ravage-de-Barjavel#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/836« Frontières d’acier — Histoire de la fortification permanente en Lorraine et en Alsace 1871-1945 » de Michaël Séramoururn:md5:8cb2d8cdff4423a66516e76daccabb332015-10-04T22:07:00+02:002018-08-22T15:14:21+02:00ChristopheHistoireAllemagneAlsacebombe atomiquecatastrophechâteauxcomplexitécoup bascouragedommagedéshumanisationgigantismeGuerre FroidehainehistoireHistoire de FrancelibertéLibérationlivres luslégendes urbainesmortmèmemémoireparadoxeperfectionnismePremière Guerre MondialeracléerecyclageréseauSeconde Guerre Mondialesécuritétempstourismetravail <p>Je ne pensais pas un jour acheter un livre de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8ge_%28militaire%29">poliorcétique</a>, mais je résiste parfois difficilement aux impulsions chez mon <a href="http://www.illauxtresors.com/">libraire favori</a>.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Frontieres_d_acier.jpg" title="Frontieres_d_acier.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Frontieres_d_acier_s.jpg" alt="Frontieres_d_acier.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<p>Le sujet est simple et compliqué à la fois : les fortifications à la frontière franco-allemandes de 1870 jusqu’à après la Seconde Guerre Mondiale. La ligne Maginot vient à l’esprit, mais aussi les forts de Verdun ou en face ceux de Metz... construits alors qu’elle était allemande. Certaines installations ont donc servi deux camps : les Allemands se sont aussi cassé les dents sur certaines parties de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_Maginot">ligne Maginot</a> en juin 1940, qu’ils ont utilisée pour ralentir notablement les Américains à l’automne 1944 !</p>
<p>Les premiers chapitres traitent de l’évolution de ces forts. Les villes fortifiées à la Vauban étant dépassées, les fortifications éclatées assez éloignées des centres urbains deviennent à la mode, comme autour de Metz ou tout autour de Strasbourg. En France, cet ensemble est désigné sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_S%C3%A9r%C3%A9_de_Rivi%C3%A8res">Séré de Rivières</a>. L’artillerie progressant à pas de géants après 1870 et la Première Guerre Mondiale, l’obsolescence est rapide : si les premiers ensembles ont de beaux frontons en pierre, par la suite les forts s’éloignent, se couvrent de béton, les communications s’enterrent, les tourelles se fondent dans le paysage, se terrent derrière de profondes meurtrières, voire s’éclipsent :
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg" title="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.320px-Fort-15-28-19_s.jpg" alt="Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Fort-15-28-19.jpg">Tourelle de 75R - Fort d'Uxegney près d’Épinal - Photo Thomas Bresson sur Wikipédia Commons</a>
<a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif" title="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Manoeuvre_tourelle_s.jpg" alt="Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons" style="display:table; margin:0 auto;" /></a> <a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manoeuvre_tourelle.gif">Plan de manoeuvre de la tourelle de 75 mm du bloc 3 à Schoenenbourg - Association des Amis de la Ligne Maginot (AALMA) * CC BY-SA 2.0 fr, via Wikimedia Commons</a></p>
<p>Les désastres du début de la Première Guerre Mondiale semblent montrer l’inutilité de ces fortifications. L’auteur s’insurge : les Allemands sont passés par la Belgique justement à cause des forts entre Verdun et Belfort, et Verdun notamment a fixé de gros effectifs allemands pendant la bataille de la Marne. Le haut commandement français dégarnit pourtant ces bastions « inutiles » en hommes et en canons dont le manque se fait cruellement sentir ailleurs... ce qui facilite l’offensive allemande de 1916 sur Verdun. Les fortifications tiennent pourtant durablement quand elles sont bien équipées, et le coût pour l’assaillant en obus est délirant par rapport aux pertes (humaines) infligées au défenseur. La guerre de mouvements reprend en 1918, mais les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Forts_de_Metz">forts allemands de Metz</a> n’ont guère l’occasion de montrer leur efficacité avant l’armistice.</p>
<p>La France de l’entre-deux guerres, démographiquement exsangue, voit dans la ligne Maginot une protection efficace. Plus encore que pour les fortifications de 1914, tout est enterré ; les forts sont reliés par des tunnels et se soutiennent entre eux. Cette ligne, surtout, rompt avec le principe des grandes places, et court sur tout la frontière... sauf devant la Belgique <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. La France vise le long terme : abritée derrière la ligne, il faut continuer le réarmement et laisser agir le blocus envers l’Allemagne, et n’attaquer que plus tard. Les généraux allemands aussi s’attendent à une guerre longue : le <em>blitzkrieg</em>, « <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/L-Histoire-sp%C3%A9cial-d-avril-2010-France-1940-autopsie-d-une-d%C3%A9faite">acte de désespoir du niveau opérationnel pour sortir d’une situation désespérée au niveau stratégique</a> », fruit du bluff de l’audace de bons généraux, monté en épingle par la propagande, se casse les dents sur la ligne Maginot quand la Wehrmacht l’attaque de front. Globalement, les forts ont tenu malgré un déluge de feu — certains sacrifiés pour préserver le symbole d’un mur infranchissable alors que les Allemands l’avaient déjà contourné. À l’armistice, trahison : les équipages invaincus partent en captivité, exigence allemande contre la menace d’occuper Lyon.</p>
<p>Là encore, la ligne Maginot a rempli sa mission, puisque l’agresseur a dû la contourner — conformément aux plans français. Au sud, la partie alpine de la ligne (non traitée ici) a bloqué toute progression italienne.</p>
<p>Quand Patton arrive sur la Moselle en 1944, il n’imagine pas que les fortifications de Metz (certains morceaux datent d’avant 1870 !) et d’autres parties de la ligne Maginot tenues par les Allemands vont lui poser un gros problème. Il faut plusieurs semaines, de nombreux morts et le recul du front en d’autres endroits <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Metz">pour que Metz tombe</a>. Pendant ce temps, la Wehrmacht se replie en bon ordre. Là encore, les fortifications jouent leur rôle.</p>
<p>L’armée française conserve ce qui reste de ligne Maginot encore quelques années après la Seconde Guerre Mondiale, jusqu’à ce que la bombe atomique la rende inutile. Puis s’ensuit le démantèlement d’une grande partie des installations (vente aux enchères, ensevelissement, retour à la nature des abords...). Aujourd’hui, grâce aux associations locales, de bonnes parties peuvent encore se visiter. On en croise encore bien des fragments dans la campagne alsacienne quand on sait où chercher, et j’ai bien l’intention de visiter assez vite la <a href="http://www.fort-mutzig.eu/pages/_menu/menu_f.html">forteresse allemande de Mutzig</a>, celle de Metz, ou le <a href="http://www.lignemaginot.com/ligne/schoen.htm">fort de Schoenenbourg</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Les Belges ayant déclaré leur neutralité en 1936, un peu tard pour prolonger la ligne.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Fronti%C3%A8res-d-acier#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/797« Tambov » (livre collectif) : les Malgré-nous alsaciens & mosellans prisonniers des Russesurn:md5:51f62e95a930a56a31069825f917239c2013-11-02T11:52:00+01:002016-07-08T11:47:59+02:00ChristopheHistoireAlsacecatastrophechaoscommunismecynismedommagedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnageguerrehistoireHistoire de FranceLibérationlivres lusmémoireparanoïaracléeRussieRésistanceSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/Tambov.jpg" alt="Tambov.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" />
Tambov ne dira rien à la plupart des Français, mais il réveillera quelques souvenirs de famille douloureux à nombre d’Alsaciens et Mosellans (voire Luxembourgeois). C’était pourtant « simplement » un camp de prisonniers au milieu de la Russie d’Europe, où, à partir de 1942, les Soviétiques ont regroupé les prisonniers « allemands » originaires de l’Alsace et de la Moselle annexées par le Reich, et incorporés de force dans la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. De ce camp, certains sont repartis dans des unités françaises, mais la plupart sont restés jusqu’à la fin de la guerre, ou y périrent.</p>
<p>Tambov n’était pas un camp de concentration, encore moins d’extermination comme en existait dans le camp d’en face : pourtant nombre de prisonniers y moururent ou survécurent dans des conditions misérables. Encore ces derniers figurent-ils parmi les plus chanceux : des 120 ou 130 000 Malgré-nous, incorporés de force dans la Wehrmacht, un tiers n’est pas revenu du front. Sur le front, les déserteurs risquaient l’exécution sommaire aussi bien par leurs camarades allemands que par des Soviétiques rarement au courant de leur situation, ou peu enclins à faire des prisonniers. Ils leur fallait aussi survivre au transfert vers le camp, dépouillés de tout ce qu’ils avaient pu posséder, et sans guère de possibilité de communiquer avec leur famille.</p>
<p>Le camp lui-même était au-delà de l’insalubre : baraques semi-enterrées sans chauffage, mal aérées, où l’on pataugeait parfois dans l’eau. 15 500 Français seraient passés à Tambov, et on ne saura jamais combien y sont morts, sans doute entre 3000 et 5000. Certains anciens accusent le système soviétique ; d’autres excusent les Russes, eux-mêmes réduits à la disette. Le <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/coulage">coulage</a> au fil des intermédiaires explique sans doute beaucoup de choses, ainsi que l’impossibilité de l’administration à remonter des mauvaises nouvelles dans le cadre du système stalinien <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>. Pour couronner le tout, comme il n’y avait pas d’officiers parmi les Alsaciens (les nazis se méfiaient !), il se mit en place dans le camp une hiérarchie bancale. Des décennies après, les conséquences tragiques de certains copinages ne sont pas pardonnées.</p>
<p>La libération des prisonniers a été instrumentalisée par les Soviétiques. Un premier groupe (les « Quinze Cents ») quitta la Russie par l’Iran dès juillet 1944, et l’URSS communiqua largement là-dessus, mais il ne fut pas suivi immédiatement d’autres. Les premiers libérés, une fois hors de portée du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/NKVD">NKVD</a>, vidèrent parfois leur sac à propos des conditions de détention. Cela ne plut pas au Kremlin. Ajoutons des tractations pour récupérer en échange des Soviétiques passés dans le camp allemand pour diverses raisons, et le fait que les ministres français de l’immédiat après-guerre étaient parfois communistes : si l’essentiel des détenus rentrèrent dès l’automne 1945, le dernier Malgré-nous ne revint à Strasbourg qu’en 1955, après avoir été condamné pour espionnage ! Les Soviétiques avaient aussi tenté de convertir certains prisonniers en agents, apparemment en vain.</p>
<p>Ces libérations au compte-goutte, l’isolement du camp, les lacunes dans les listes soviétiques, les destructions d’archives, le chaos apocalyptique et les pertes énormes de la fin de la guerre en Allemagne... laissèrent un illusoire espoir à beaucoup de familles pendant des années. L’activité fut intense lors du retour des prisonniers pour obtenir des précisions sur le sort de ceux qui n’étaient pas revenus.</p>
<p>Les archives se sont ouvertes massivement dès 1991. Les Soviétiques, en bons bureaucrates, avaient tout gardé, et la chute de l’URSS fut trop brutale pour qu’une destruction méthodique d’archives ait été entreprise par les dirigeants déchus. Le travail de dépouillement, délicat et fastidieux, continue encore de nos jours, alors que les survivants disparaissent.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>En cas de refus ou de fuite, la famille des déserteurs partait en camp de concentration. On devient beaucoup moins rebelle et héroïque dans ces conditions.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>C’est le syndrome « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tout_va_tr%C3%A8s_bien_madame_la_marquise_%28chanson%29">tout va très bien, Madame la Marquise</a> », ou encore « surtout pas de vague », typique de nombre de bureaucraties.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Tambov#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/755« Guerres & Histoire » n°15 d’octobre 2013 : l’assassinat de la Luftwaffe, les châteaux forts japonais, Andrinople, la guerre du Kippoururn:md5:40afaf14fbe55fb16c3b8e60eed27eea2013-10-25T16:56:00+02:002016-07-07T13:24:48+02:00ChristopheHistoireAfriqueAllemagneAntiquitébon senscatastrophechâteauxcoup bascynismedommagedéshumanisationEmpire romainespionnageEuropegigantismeGrandes InvasionsguerregéopolitiquehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationlivres luslogistiquemercenairemobilitéMoyen ÂgeorganisationperspectivePremière Guerre MondialeprovocationpétroleracléesaturationSeconde Guerre MondialespéculationsécuritétotalitarismeténacitéuchronieÉtats-Unis <p>Avec « l’assassinat de la Luftwaffe » en gros titre, <em>G&H</em> fait dans le racolage digne de ces revues militaires qui bavent devant le matériel, surtout celui avec croix gammée. Si je ne connaissais pas le sérieux de la revue et son manque d’admiration pour la Wehrmacht <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, je me serais méfié.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_13.jpg" alt="GuerreEtHistoire_13.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>En fait, point d’hagiographie des ailes allemandes, mais la description de l’opération soigneusement planifiée visant à briser la chasse allemande début 1944, en utilisant les bombardements sur l’Allemagne comme appât, et dans le but de conquérir la maîtrise du ciel avant le Débarquement.</p>
<p>À part ça, excellent numéro, avec les analyses de fond habituelles. Je suis à chaque fois fasciné par les tendances de fond ou les modèles mentaux des différents adversaires qui expliquent bien des événements. Et en même temps, bien d’autres choses ont tenu à si peu...</p>
<p><em>Comme d’habitude, les remarques personnelles sont en italique.</em></p>
<h3>Le prisonnier miraculé</h3>
<p>Le soldat soviétique Sacha Volkov raconte sa terrible odyssée dans l’interview qui ouvre le numéro. Prisonnier à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Koursk">Koursk</a> en 1943, il subit les terribles marches vers les camps de prisonniers, eux-mêmes souvent des mouroirs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, pour finir à Buchenwald. Il a survécu, mais il insiste sur sa chance.</p>
<h3>La guerre des Boers</h3>
<p>Entre 1899 et 1902, les Anglais en ont bavé pour mettre au pas et annexer deux États sud-africains fondés par d’anciens immigrants néerlandais (et français, des huguenots chassés par Louis XIV !). Ces teigneux fermiers, bien équipés en matériel allemand, n’ont été mis au pas que grâce au blocus naval, à la terreur, à la déportation des familles dans des camps de concentration au taux de mortalité effroyable. Un avant-goût des horreurs du XX <sup>è</sup> siècle...</p>
<h3>Opération Pointblank</h3>
<p>En 1943, les Alliés décident de se débarrasser de la Luftwaffe, condition <em>sine qua non</em> pour tenter un débarquement l’année suivante. L’année 1943 montre aussi que les bombardements massifs ne suffiront pas à faire plier le Reich, une illusion longtemps entretenue avant guerre (<em>en 1940, le Blitz avait pourtant montré que bombarder les villes ne cassait pas le moral des agressés, au contraire</em>). Pire, ils ont un coût humain effroyable pour l’attaquant : les forteresses volantes (B 17) ont beau être hérissées de mitrailleuses et voler en formation, mais sans escorte, elles se font souvent hacher menu (parfois plus de 30% de pertes).</p>
<p>La solution : escorter ces bombardiers par une chasse capable de les accompagner jusqu’à Berlin. Étonnamment, ce n’était pas prévu jusqu’ici : les réservoirs d’essence largables, pas si faciles à mettre au point sans altérer les capacités de l’avion, ne seront prêts que fin 1943, et l’avion idéal (P-51 Mustang) en 1944.</p>
<p>Cette escorte ne sert en fait pas à protéger les bombardiers. Début 1944 sa mission devient la destruction de la chasse allemande : les bombardiers ne sont plus qu’un appât. Les missions s’enchaînent, toujours plus massives (culminant en une bataille aérienne entre 2000 appareils le 24 février 1944 !). Les Allemands sont obligés d‘affecter des ressources énormes à la défense aérienne de leurs villes, et en quelques semaines de pilonnage intensif, la chasse allemande est laminée.</p>
<p>Göring n’avait pas prévu ces escortes lointaines et les chasseurs lourds allemands ne sont pas prêts face à la chasse allié. Ils deviennent la cible principale alors qu’eux-mêmes visent d’abord les bombardiers. Puis le cercle infernal s’enchaîne pour la Luftwaffe : pénurie de chasseurs, peu favorisés jusque là par la Luftwaffe au profit des bombardiers ; appareils pas assez vite construits par des usines elles-même cibles majeures, certes pas aussi gravement touchées que le pensent les Alliés, mais dispersées par crainte des bombardements ; pénurie de pilotes, de plus en plus vite et mal formés <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> ; siphonnage de tous les appareils disponibles pour la défense aérienne ; réquisition par la DCA de nombreux gros canons et de précieuses munitions qui manqueront sur le front...</p>
<p>L’opération Pointblank se révèle un succès total : en quelques semaines la Luftwaffe a perdu ses meilleurs pilotes de chasse et des milliers d’appareils, et peine à remplacer les avions quand les usines américaines tournent à plein. Les bombardiers se concentrent alors sur les voies de communications vers la zone du Débarquement, et le pétrole. La chasse allemande, dispersée sur trois fronts, laisse la totale maîtrise du ciel aux Alliés jusqu’à la fin de la guerre, ce qui facilitera grandement leur victoire.</p>
<p>Pointblank ne sera jamais rééditée. L’US Air Force acquiert son indépendance, et se concentre sur le bombardement, notamment atomique, revenant ainsi aux erreurs des débuts de la guerre. Le Vietnam et l’amélioration des défenses sol-air (guerre du Kippour) montrent que la supériorité aérienne n’est jamais un acquis. Surtout, les États-Unis considèrent le ciel comme leur chasse gardée et la base de leur puissance : on peut les considérer comme une <em>ouranocratie</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</p>
<h3>Guerre du Kippour</h3>
<p>Les espions annonçaient une attaque imminente, l’ennemi cachait à peine ses préparatifs, et ils avaient une connexion discrète sur ses communications : pourquoi la guerre du Kippour de 1973 fut-elle une telle surprise pour les Israéliens ? L’article rejette l’essentiel de la faute sur un péché d’orgueil (sous-estimer les Arabes après les victoires précédentes, et considérer que les Égyptiens n’attaqueraient pas tant qu'ils ne disposeraient pas de certains moyens de bombardements), et le refus du chef des renseignements extérieurs de ne pas activer ses « moyens spéciaux » (cette bretelle sur les communications égyptiennes) de peur de les griller. Israël croit à un exercice jusqu’au dernier moment, et passe à deux doigts de la catastrophe.</p>
<p>(<em>Cette peur de trahir ses sources au point qu’on ne les utilise même plus est courante chez tous ceux qui sont sur la défensive et ont peu d’atouts, comme les Anglais avec Enigma pendant la Seconde Guerre Mondiale.</em>)</p>
<h3>Andrinople</h3>
<p>Cette bataille marque peut-être la fin de l’Antiquité : les Goths écrasent l’armée romaine tout prêt de Constantinople. Pourtant les Goths étaient déjà des alliés (fédérés), venaient en réfugiés pacifiques, et on leur avait promis des terres en Thrace. La cupidité d’un gouverneur et l’incompétence de l’administration les poussent à la révolte <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.</p>
<p>Sous-estimation de l’adversaire (en partie déjà formé à la romaine !), incapacité de l’Empire à lever de grandes armées, stratégie inadaptée, indiscipline de troupes, et rôle décisif de la cavalerie lourde goth : c’est un désastre et l’empereur Valens y laisse la vie. Les conséquence directes sont finalement faibles (les Goths n’arrivent pas exploiter leur victoire, et le nouvel empereur d’Orient, Théodose, leur donne ce qui avait été promis au départ), mais symboliquement tout a changé : ni le prestige ni l’armée de Rome ne s’en remettront jamais, les Goths iront finalement piller les Balkans, Rome... et la cavalerie lourde dominera à présent les champs de bataille, comme tout au long du Moyen-Âge.</p>
<h3>Les châteaux forts japonais</h3>
<p>Même cause, mêmes effets : le Japon du XVè siècle se fragmente en seigneuries en guerre permanente, et comme en Europe un demi-millénaire plus tôt apparaissent des châteaux forts, à la fois résidence d’une lignée, centre de pouvoir et point de résistance majeur. Pourtant, le Japon connaît déjà l’artillerie, qui est à l’origine de la disparition des châteaux forts en Europe au même moment !</p>
<p>Le château fort japonais diffère cependant par sa structure. En raison des tremblements de terre, il se rapproche déjà plus de la cité fortifiée aux très épaisses murailles, quasiment des bastions, que des hauts châteaux élancés. L’artillerie ou la sape se révèlent donc beaucoup moins efficace. La conquête de ces châteaux pleins de pièges coûte très cher aux assaillants. (<em>Vauban aurait été ravi.</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Le <strong>colonel Brémond</strong> devrait être aussi connu que Lawrence d’Arabie. Il commandait les quelques troupes françaises qui ont rendu de fiers services à la rébellion arabe de 1916. Mais la métropole lui accorda peu de moyens, et son talent littéraire était plus faible. (<em>J’adore les faces cachées des légendes.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Projet Habbakuk</strong> : en 1942, un projet de porte-avion géant insubmersible, à base de glace mélangée à de la pâte à papiers, enthousiasme Lord Mountbatten et Churchill. Le projet capote, à cause des difficultés techniques, et surtout parce qu’en 1943 les Alliés reprennent déjà le contrôle de l’Atlantique. <br />(<em>Encore un de ces projets fous pour les amateurs d’uchronie. D’un autre côté, si certains projets ont échoué, c’est effectivement qu’ils étaient vraiment infaisables ou avec un rapport bénéfice/coût trop faible. Un des avantages des Alliés sur les nazis était de savoir arbitrer en faveur du fiable/pas cher/facile à maintenir face au monstrueux/prestigieux/coûteux.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong><em>Joukov, l’homme qui a vaincu Hitler</em></strong> : les chroniqueurs m’ont donné l’envie de me ruer sur cette biographie du maréchal soviétique (<strong>2014</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">chroniquée ici</a>) . Il n’avait reçu aucune instruction mais s’est révélé plus doué que les généraux allemands pour la guerre moderne ; il a survécu à toutes les guerres de la Russie et de l’URSS, et même au stalinisme. <br />(<em>Seul bémol : l’auteur comme le rédacteur de la critique font tous les deux partie du comité éditorial de la revue. Même si c’est ouvert, ça fait quand même un peu mauvais mélange des genres.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>J’aime bien la chronique dialoguée de Charles Turquin, à la fin : Waterloo et Bir Hakeim sont des victoires anglaise et française, mais... d’où venaient en fait les troupes ? <br />(<em>Rien de neuf sous le soleil. Aux Champs catalauniques, les Germains étaient majoritaires dans les troupes d’Attila comme dans celles d’Aetius.</em>)</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Un des numéros précédents avait décrit les lacunes fondamentales de l’armée allemande, notamment la recherche systématique des batailles décisives, un concept anachronique au XXè siècle. Les gaffes stratégiques majeures des nazis (guerre sur deux fronts, fascination pour le gros matos invulnérable mais trop coûteux à produire...) n’a été qu’une seconde couche.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Le traitement des prisonniers de guerre soviétiques relevait de l’extermination : 3,3 millions de morts, notamment de faim, et surtout en 1941-42 avant que les nazis se disent qu’il faudrait plutôt les faire travailler.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Pendant ce temps les Américains développent des moyens de formation considérables, retirent leurs pilotes expérimentés du front et les utilisent comme formateurs.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Terme forgé sur le modèle de la thalassocratie athénienne. C’est logique puisque les transports sont forcément aériens à l’échelle d’une superpuissance planétaire. Google ne connaît bizarrement qu’une occurrence du mot — comme quoi il n’indexe pas tout. Et je me demande si un jour il y aura une spatiocratie ou une cosmocratie ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Je sens comme une résonance avec notre époque...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/754« Frankenstein » de Mary Shelleyurn:md5:3f8aacb1653001484ddab0c6e6d5b8172013-10-14T17:20:00+02:002016-07-07T13:06:48+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationanthropomorphismeapparenceculturecynismediscriminationdommagedéshumanisationintelligenceintelligence artificiellelivres luslégendes urbainesoh le beau cas !prise de têtepsychologiepériméquêteracismesciencescience-fiction <p>L’histoire de Frankenstein a été totalement déformée par le cinéma, les dessins animés, bref toute la culture populaire du XXè siècle, sachant que ce livre a déjà deux siècles.</p>
<p>Frankenstein n'était pas le monstre, mais son créateur. Ledit créateur n'était pas un savant chenu et cinglé, mais un jeune homme brillant, qui ne perd la tête que progressivement.</p>
<p>La conception de la créature n’est évoquée que furtivement. Très frustrant.</p>
<p>Le monstre n’a rien de la brute épaisse et stupide souvent décrite. Au contraire : un an après sa création, il maîtrise déjà deux langues, sait lire et disserter mieux que l’essentiel de la population actuelle. Le monstre est parfaitement capable de rationaliser son comportement cruel, en résumé : « je suis malheureux parce que tout le monde me rejette, donc je deviens un méchant assassin parfaitement conscient de tuer des innocents pour me venger de mon créateur et de pauvres gens plus gâtés que moi par la nature » (donc encore un niveau de culpabilité au-dessus du <em>serial killer</em> psychopathe standard). Il maîtrise parfaitement le chantage.</p>
<p>Bizarrement, le génial jeune Frankenstein agit de manière impulsive, et bien que ses pérégrinations durent des mois, il est incapable de réfléchir à une échappatoire, d’appeler à l’aide, ou d’imaginer de protéger sa famille. Puis il met en danger la vie de ses proches de la manière la plus crétine possible. Il n’y a pas besoin d’avoir vu <em>Scream</em> pour savoir qu’un personnage secondaire isolé a de très mauvaises chances de survie quand le monstre rôde, on tient peut-être là l’origine de ce cliché des films d’horreur.</p>
<p>Le style a sacrément vieilli (et je ne pense pas que la traduction française soit la cause), mais je suppose qu’il reflète son époque. Autre tic de l’époque, les histoires imbriquées lassent : Untel raconte son voyage au Pôle (sans lien avec le reste de l’histoire), où il rencontre Frankenstein, qui au cours de son récit reprend un long monologue du monstre sur ses premiers mois d’existence, dont l’histoire (grotesquement et longuement hors sujet) de Français exilés en Suisse à cause d’une histoire avec une jeune Turque... <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Frankenstein-de-Mary-Shelley#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> Et manifestement, à cette époque, une engueulade consistait en un échange de tirades de dix phrases sans interruption — on savait vivre.</p>
<p>L’influence romantique joue à plein (on est en 1818 !) et les sentiments sont étonnamment extrêmes. Nombreux sont les personnages qui tombent malades pendant des mois suite à une grosse contrariété. Le monstre a même lu <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Souffrances_du_jeune_Werther">Werther</a></em>, c’est dire.</p>
<p>Ah oui : ça finit mal.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Frankenstein-de-Mary-Shelley#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Avec une touche de racisme implicite, mais ça aussi c’était l’époque...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Frankenstein-de-Mary-Shelley#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/753« World War Z », de Max Brooks (le bon livre, pas le navet au cinéma)urn:md5:864d70343e0a2e56a292e9b1e4ac83722013-08-31T19:57:00+02:002016-07-07T12:40:00+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationapocalypsecataclysmecatastrophechaosChinecouragedommagedéshumanisationgaspillageguerreintelligencelivres luslégendes urbainesoptimismeprise de têteracléesolidaritéspéculationsurréalismesécuritéténacitéÉtats-Unis <p>Les histoires de zombie sont à la mode, on frise même la saturation. Le film récemment sorti s’inspire de ce très prenant livre, mais hormis le thème (les zombies attaquent et la société ne s’effondre pas totalement) et quelques bonnes idées il n’y aucun rapport. Non, je n’ai pas vu le film mais j’ai lu <a href="http://www.nioutaik.fr/index.php/2013/07/19/651-world-war-z-la-critique-pourrie">cette très longue critique de Nioutaik</a>, écrite au napalm, et je me sens autorisé à faire le parallèle.</p>
<p>Contrairement au film qui narre les aventures d’un représentant en produits capillaires <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, le livre est qu’une suite d’anecdotes et témoignages de survivants de tous les horizons, sans lien direct. Le panel est très large : politiques, militaires de tous bords, anciens petits et gros trafiquants, mères de famille, enfants, etc.</p>
<p>Bizarrement, dans un film de zombies, il ne faut pas s’attacher aux personnages : on sait qu’ils vont tous y passer. Mais pas ici, puisque les narrateurs sont des survivants d’après-guerre (il est clair d’entrée que l’invasion zombie a été repoussée et que le monde est en ruines). On peut alors s’intéresser à eux : ce sont leurs tripes qui parlent.</p>
<p>Le livre n’est pas trop américano-centré, ça change. Si les USA ne sauvent pas le monde, ils tiennent quand même beaucoup mieux le choc que les Russes ou les Chinois. Chaque pays s’en sort différemment (ou pas) : Islande, Cuba, Corée du Nord...</p>
<p>Comme dans tout film d’horreur, on sent le plaisir de l’auteur qui se paye la tête de ses lecteurs, passifs bourgeois aveugles à leur hallucinant niveau de confort — qu’ils vont perdre. Les pages sur les militaires américains obligés de lâcher leurs F22 et leurs rayons de la mort pour se limiter au fusil et la pelle valent le détour. Les habitants des autres pays n’en sortent pas tous grandis non plus. Certains passages semblent surréalistes, comme des guerre civiles, voire atomiques, en pleine invasion mondiale. D’autres histoires redonnent la pêche, certaines désespèrent.</p>
<p><em>World War Z</em> est bien plus optimiste que la (très bonne) BD <em>Walking dead</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>, même si on y retrouve un thème commun : en cas d’effondrement de la civilisation, le principal danger ce ne sont pas les zombies, mais parfois les autres survivants. Ici la civilisation ne disparaît pas, on est même relativement proche du « même quand la situation est désespérée, avec de l’intelligence et de la gniaque on s’en sortira » (oui, il y a un passage sur la propagande de guerre), même si les gâchis est monstrueux.</p>
<p>Évidemment, dans le monde réel, personne ne croit aux zombies, le concept n’a aucune plausibilité et il est étonnant qu’il ait tant de succès. <em>World War Z</em> est donc un excellent exemple de « <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Suspension_consentie_de_l%27incr%C3%A9dulit%C3%A9">suspension d’incrédulité</a> », puisqu’il est intelligemment construit, décrit des comportements humains souvent très rationnels, et n’en appelle pas qu’à nos peurs enfouies dans un but distrayant — du moins au premier abord.</p>
<p>Dans notre civilisation plus fragile que jamais, se poser la question de nos comportements collectifs et individuels en cas de très gros pépin ne peut être que salutaire. C’est peut-être le premier livre sur les zombies qui soit un tant soit peu optimistes sur <em>nous</em>, au moins sur le long terme. (D’un autre côté on ne fait ni bon film ni bon livre avec des pompiers qui éteignent les feux à temps.) Fautes d’ennemis vraiment identifiables (communistes, Japs, nazis...), avons-nous à présent besoin de nous inventer une menace encore plus incroyable que des extraterrestres ? Depuis Wells, l’envahisseur venu des étoiles est usé jusqu’à la corde, et n’offre pas le même niveau de mal pur qu’un zombie issu de nos propres rangs. Les zombies sont presque indestructibles et immortels (ah, ces zombies paumés qui se réveillent au dégel ou attaquent les scaphandriers dans les grands fonds !), n’ont aucune hiérarchie, ne se rendront <em>jamais</em> et il faudra les abattre jusqu’au <em>dernier</em>.</p>
<p>Étonnamment, il y a un point commun avec une vieillerie comme les <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/06/09/345-les-croises-du-cosmos-de-poul-anderson">Croisés du comos</a></em> de Poul Anderson, où c’est le plus stupidement agressif qui l’emporte sur le civilisé pacifique et embourgeoisé.</p>
<p>Les témoignages des victimes des zombies ou des soldats de la reconquête rappellent furieusement certaines des plus glauques heures de la Seconde Guerre Mondiale. Avons-nous besoin de fiction pour nous rappeler ce genre d’horreur ? Est-ce plus « réaliste » parce que situé dans notre monde actuel ? <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Bref : excellent bouquin, plus profond qu’il ne paraît au premier abord, et difficile à lâcher. Je ne regrette pas l’impulsion d’achat. Je l’ai lu en français, et les annotations sur quelques références culturelles américaines ne sont pas de trop. Évidemment ce n’est pas pour enfants.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Comme l’explique Nioutaik dans sa critique, il est clair que Brad Pitt ne sert qu’à convaincre ces dames à suivre leur mec dans une salle noire voir un film d’horreur.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Jamais vu la série télé.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Je suis en train de lire </em>Bloodlands<em>, livre d’histoire récente à dix mille morts par page, et il me faut bien reconnaître un certain sentiment d’irréalité...</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/World-War-Z-de-Max-Brooks#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/749« La mort du Melkine » d’Olivier Paqueturn:md5:d3922700503d70a877df2480858c2beb2013-08-04T12:57:00+02:002023-12-27T11:58:44+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesautodestructioncatastrophecivilisationcommunicationdéshumanisationenseignementimpérialismelivres lusmémoirescience-fictionspace operatotalitarismeutopieéducation <p>Ce roman de SF récemment paru m’est arrivé dans les mains un peu par hasard (merci Pédro). En tant que tome central d’une trilogie, il reste à peu près compréhensible indépendamment.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lamortdumelkine.jpg" alt="lamortdumelkine.jpg" class="media-right" /></p>
<p>Sur tous les mondes où il passe, un astronef-université, le <em>Melkine</em>, sauve une poignée d’élèves des pièges du conditionnement culturel. Cette dernière technique impose aux habitants de chaque planète des us et coutumes artificiels, bien qu’inspirés en général de civilisations terrestres passées. Bref, le <em>Melkine</em> tente d’ouvrir les esprits et de faire sauter les œillères imposées par ce conditionnement, tout cela très (trop ?) progressivement. Parallèlement, le transport et la communications instantanés apparaissent. En quelques années, les anciens élèves du <em>Melkine</em> dispersés constatent le début de l’effritement du conditionnement, certes souhaité, mais avec des conséquences indésirables. Il est clair qu’Olivier Paquet s’amuse dans la description de plusieurs civilisations basées sur l’Autriche impériale ou l’empire aztèque qui découvrent d’autres influences (un lien avec notre mondialisation culturelle ?).</p>
<p>À l’échelle de l’univers, les détenteurs des moyens de communications massifs, les Fréquences, s’affrontent pour l’hégémonie et la main-mise sur tout l’univers connu. <em>La mort du Melkine</em> s’achève sur le très attendu face-à-face entre les deux dernières Fréquences : la Technoprophète, grande méchante de service, à l’idéologie brutale et hélas peu décrite dans ce tome, et Ismaël, ancien élève du <em>Melkine</em>, surdoué et banni dans le premier tome.</p>
<p>Si j’en crois les critiques sur le web, le premier tome péchait par des personnages adolescents un peu sommaires. Quinze ans après, dans la <em>Mort du Melkine</em>, l’excès serait presque inverse, les rapports torturés entre les anciens, sinon leurs histoires de cœur, dominant presque trop les événements scientifico-politiques. Certes je n’ai pas lu le premier livre, et le troisième pourrait me donner une autre perspective.</p>
<p>Le personnage le plus intéressant reste bien sûr Ismaël, devenu superpuissance galactique, dont les scrupules tombent avec la montée en puissance. Son empire est parti d’une civilisation imitant l’ancienne secte des Assassins, mais ceux-ci semblent bien pacifiques voire douillets (« mon Dieu, j’ai abattu un astronef qui fonçait sur nous, n’a pas respecté les avertissements et était tellement mal entretenu qu’il a explosé au premier coup de semonce ! »). Est-ce une conséquence du manichéisme trop marqué entre les deux Fréquences ultimes ? (oui, en face la Technoprophète va jusqu’à torturer ses robots et buter les ingénieurs inefficaces.)</p>
<p>Quant au <em>Melkine</em>, symbole universel, c’est en fait le grand absent de l’essentiel de l’histoire, bien que présent dans tous les esprits.</p>
<p>Point faibles : l’action languit, surtout dans la première moitié, il faut un peu s’accrocher ; la méchante Technoprophète est sous-utilisée (quitte à avoir une psychopathe, autant l’utiliser) ; les angoisses existentielles de personnages en fait secondaires prennent trop le pas sur le reste. Je me demande s’il n’a pas simplement manqué deux cent pages à l’auteur pour développer toutes les facettes de son univers (l’inverse du problème de Robin Hobb). Et puis il y a ces petits trucs qui m’énervent et cassent ma suspension d’incrédulité : autant de prénoms français dans un monde futuriste, est-ce réaliste ? Les chefs des Fréquences semblent omnipotents, et pas du tout soumis à l’avalanche de tentatives de pression et d’arbitrages typique de tout chef d’État, absolu ou démocratique. Des opérations de conquête de planète semblent se planifier en quelques pages avec une poignée d’astronefs (il y a peu de repères temporels). De manière générale, il semble y avoir très peu de monde dans l’univers sinon les personnages et une masse de péquenots statiques. Certaines innovations technologiques semblent déjà dépassées pour nous (Google <del>Earth</del> Giverne sur écran tactile géant, ouaouh !).</p>
<p>Malgré tout il y plein de bonnes idées dans ce tome, et pour lire parfois la prose de l’auteur sur <a href="http://sf.emse.fr/Lists.html#SFFRANCO">SFFranco</a> je n’en attendais pas moins.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-mort-du-Melkine-d-Olivier-Paquet#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/748« The End » de Ian Kershaw : l’agonie de l’Allemagneurn:md5:8edf1de24e73d2fd8a75ab588386538b2013-07-24T21:59:00+02:002019-02-03T17:39:19+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsecataclysmecatastrophecommunismecoup bascynismedommagedécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegaspillagegigantismeguerrehainehistoireincohérenceLibérationlivres lusmortnationalismeoh le beau cas !panurgismeparadoxepeine de mortpessimismeracismeracléesabotageSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p>Au début j’avais titré « l’agonie du IIIè Reich ». Mais cela aurait été faux : c’est bien l’Allemagne toute entière qui a payé pour quelques mois de résistance inutile et sanglante, au mépris de toute logique militaire.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/the_end_kershaw.jpg" alt="the_end_kershaw.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’autodestruction</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ian_Kershaw">Ian Kershaw</a> s’étonnait qu’il n’y ait pas de livre sur ces derniers mois de la guerre vus du côté allemand ; il l’a donc écrit, et il analyse les raisons de cette incompréhensible obstination allemande à laisser anéantir son pays par le double rouleau compresseur allié — pour <em>rien</em>.</p>
<p>Pourtant, dès l’été 1944, en tout cas au plus tard début janvier 1945 (après l’échec allemand dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes">les Ardennes</a> et alors que les Soviétiques dévastent la Prusse Orientale) il aurait dû être clair que tout était perdu et qu’il valait mieux négocier une reddition. La stratégie de la lutte « fanatique » pied à pied ne pouvait mener à rien. La population était à bout de souffle, les réserves en hommes raclées jusqu’à l’absurde, l’économie étouffée (malgré les talents d’organisateurs de Speer), la Luftwaffe anéantie, les voies de communications en ruine, les villes rasées.</p>
<p>Les chiffres donnent le vertige : sur 18,2 millions de soldats allemands mobilisés en 1939-45, 5,3 millions sont morts, dont 2,6 millions après juillet 1944 — autant en dix mois que dans les quatre premières années de la guerre. Et parmi eux 1,5 million sur le front est : ils ne se sont donc pas défendu que contre les « bolcheviques ».</p>
<h3>Mécanisme pour un suicide collectif</h3>
<p>Dans les dernières semaines, 10 000 soldats tombaient chaque jour. Seuls les plus fanatiques croyaient encore aux « armes miracles » promises par Hitler, ou à l’éclatement de la coalition alliée. Alors pourquoi lutter ?</p>
<p>La réponse est complexe. Les dirigeants nazis étaient parfaitement au courant que les Alliés ne leur feraient aucun cadeau. Pour Hitler, les Allemands s’étaient montré faibles, ils devaient disparaître avec lui. Il est allé au bout de sa démentielle logique suicidaire, mais il a
bien été le seul avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Goebbels">Goebbels</a>. Mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Himmler">Himmler</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bormann">Bormann</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%B6ring">Göring</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Speer_%28p%C3%A8re%29">Speer</a>, les généraux, l’essentiel des <em>Gauleiters</em> (chefs de partis régionaux)... avaient bien l’intention de sauver leur peau, et ceux qui se sont plus tard suicidés allaient être fait prisonniers. Certains se voyaient un rôle dans l’Allemagne d’après-guerre (Speer), voire tentèrent très timidement de négocier dans le dos d’Hitler. La population, qui avait soutenu le nazisme durant une douzaine d’années, ne faisait plus confiance ni au Parti ni au Führer. Pourtant, pour bien moins, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_allemande_de_1918-1919">elle s’était soulevée en 1918</a>, et cela valait aussi pour les soldats.</p>
<p>Pourtant, il a fallu attendre encore une semaine après la mort d’Hitler pour que son successeur l’amiral <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_D%C3%B6nitz">Dönitz</a> jette l’éponge et signe la reddition sans condition face à toutes les armées alliées.</p>
<p>Dönitz, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guderian">Guderian</a>... : nombreux de généraux se peignirent dans leurs mémoires comme de simples exécutants apolitiques. Il est vrai qu’Hitler n’écoutait pas leurs conseils et refusait le moindre repli. Beaucoup rêvaient de sauver les meubles par une paix séparée avec les Occidentaux, mais ils exécutèrent ces ordres absurdes et menèrent le combat de leur mieux, sur les deux fronts et jusqu’à la fin. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Claus_von_Stauffenberg">Von Stauffenberg</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/[Dönitz">Rommel</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow">von Tresckow</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ludwig_Beck">Beck</a> avaient pourtant montré que des officiers, eux-mêmes très nationalistes, étaient capables d’agir — hélas ils étaient l’exception.</p>
<p>L’attentat raté de juillet 1944 est une des clés. D’abord il a remonté la cote d’Hitler auprès des Allemands, vacillante depuis l’enlisement en Russie, bien que le Führer soit resté plus populaire que le Parti nazi. Puis il a conforté le dictateur dans son idée que la Wehrmacht était remplie de traîtres, responsables de tous les échecs. Ensuite, il entraîne la mise en place d’un régime de terreur, réprimant toute déviance, tout défaitisme, toute méfiance envers le Führer, tout doute envers la victoire future.</p>
<p>Le souvenir de l’insurrection de 1918 hantait Hitler. Il avait décidé qu’il n’y aurait pas de réédition de ce « coup de poignard dans le dos ». Ce régime de terreur ira donc <em>crescendo</em>, s’accentuant avec chaque revers : peine de mort pour les déserteurs, les couards, les défaitistes, pour tous ceux osant évoquer une possible négociation avec au moins les puissances occidentales, ou tentant d’éviter d’inutiles combats dans leur ville ; cours martiales volantes exécutant elles-mêmes les condamnations ; massacres de civils affichant des drapeaux blancs... Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Werwolf_%28Freisch%C3%A4rlerbewegung%29" hreflang="de">Werwolf</a> devait mener une guérilla dans les zones occupées, et punir les « collabos » (au final sans grand succès, mais il y eut tout de même quelques milliers de morts selon Kershaw).</p>
<p>Parallèlement la pression sur la population s’accentua : Goebbels parvint à dégager des centaines de milliers d’hommes à envoyer au front <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, quitte à désorganiser l’économie et les productions d’armement, au grand dam de Speer. Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Volkssturm" hreflang="de">Volkssturm</a> enrôla des millions de vieux ou très jeunes Allemands dans une armée hétéroclite, mal habillée, très mal armée, sans efficacité militaire et au taux de perte terrible. Dans les zones proches du front, vieux, jeunes et femmes furent contraints de creuser des fossés qui n’ont pas stoppé l’Armée Rouge plus de quelques heures.</p>
<p>La bureaucratie civile laissa place à celle du Parti, omniprésente, sur fond d’affrontement larvé entre Speer et Goebbels, entre ceux qui pensaient à l’avenir et les partisans de la terre brûlée. Le Parti et les SS se mirent à dominer aussi sur le plan militaire (on confia une armée à Himmler, avec des résultats désastreux). On exigeait un sacrifice aveugle des soldats. Il y eut même des kamikazes nazis.</p>
<p>Ainsi la population se retrouva en tenaille entre un Parti punissant cruellement toute déviance ; des conditions de vie de plus en plus difficiles ; des exigences de service militaire ou paramilitaire démentielles ; la menace des bombardements alliés réduisant méthodiquement les villes en miettes ; à l’est la menace des Soviétiques. Les Allemands avaient perdu toute confiance en Hitler mais, épuisés, terrorisés, ils devinrent au mieux attentistes et fatalistes, priant pour que la fin arrive vite (<em>Besser ein Ende mit Schrecken als ein Schrecken ohne Ende</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>) et les plus chanceux dans les zones préservées ne portent pas grande aide aux réfugiés de l’est.</p>
<p>Les soldats ne valaient souvent pas mieux. Également épuisés, tiraillés entre le danger des combats, la perspective des camps en Sibérie ou la liquidation pour couardise, inquiets pour leurs familles dans les villes bombardées ou les zones envahies par l’URSS, ils continuaient le combat — sans illusion pour la majorité. Sur le front de l’est, la conscience de défendre concrètement leur pays et leur famille d’un envahisseur barbare maintenait plus la combativité qu’à l’ouest. La terreur nazie, la menace sur les familles (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sippenhaft">Sippenhaft</a></em>) mais aussi la cohésion avec les camarades limitaient les désertions, pourtant de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de l’avancée alliée.</p>
<p>Les comportements varièrent suivant les fronts. À l’ouest, on craignait les bombardements anglo-américains sur les villes, mais les troupes d’occupation, relativement disciplinées, n’inspiraient pas la peur. Nombre de villes voulurent se rendre pour éviter la destruction : leur sort se joua dans le rapport de force entre notables voulant épargner vies et biens, et nazis jusqu’au-boutistes prêts à sacrifier une bourgade pour stopper les Américains une heure. (Au passage, une pique sur le comportement des Français : leurs troupes n’ont pas été exemplaires et ont commis leur lot de pillages et viols. Kershaw note qu’il y a une amplification possible du phénomène dans la mémoire et les sources : les soldats étaient souvent issus des colonies.)</p>
<p>C’était bien pire à l’est. Les soldats mesuraient parfaitement la barbarie du comportement allemand en Europe de l’Est, et se doutaient, puis surent, que les Russes allaient leur faire payer. La propagande soviétique attisait la haine. Les soldats allemands prisonniers savaient que, même avec de la chance, ils passeraient des années en Sibérie (et une bonne partie n’est pas revenue). Quant aux civils, ils fuyaient en masse pour éviter viols (généralisés), pillage, voire destruction de villes entières. La peur des « Asiatiques », amplifiée par la propagande de Goebbels, mena à des scènes de suicides collectifs dignes des Japonais à Okinawa. Pour les habitants de Prusse ou de Poméranie le salut n’existait que dans la fuite, au milieu d’un hiver terrible — les plus fragiles mourront souvent. <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Les chefs du Parti donnèrent cependant rarement l’exemple du sacrifice qu’ils prônaient. Les premiers à punir toute reculade, ils étaient aussi les premiers à fuir dès que possible, sans oublier leurs biens. À côté de Göring et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hans_Frank">Hans Franck</a>, la palme revient peut-être à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Koch">Erich Koch</a>, à la tête la Prusse Orientale assiégée par les Russes : il refusa la moindre évacuation de civils, mais prit au tout dernier moment la fuite en bateau, en n’oubliant pas sa Mercedes.</p>
<p>Kershaw conclut que l’effarante résistance allemande tenait aussi bien à la structure du pouvoir nazi et à la terreur qu’aux rigidités de la mentalité des soldats allemands, sinon de tout l’appareil institutionnel. Si population et soldats étaient terrorisés et préoccupés par leur survie immédiate, les généraux risquaient bien moins (surtout d’être démis <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>). Si on peut comprendre que les circonstances ou le chaos rendaient un coup d’état impossible, pourquoi n’ont-ils pas au moins « levé le pied » ? Si les Russes et le communisme semblaient un danger tellement effroyable, pourquoi ne pas avoir ouvert le front à l’ouest pour sauver les meubles ? Le serment de fidélité au Führer, l’honneur militaire, toute une tradition militariste allemande d’ordre et d’obéissance inconditionnelle, leur interdisait de tenter quoi que ce soit contre la hiérarchie en place. Après tout, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6">même Canaris avait renoncé à s’attaquer à Hitler</a>. Ce n’est qu’à la mort d’Hitler que Dönitz (paradoxalement choisi par Hitler pour sa fidélité au national-socialisme) s’est senti autorisé à tenter une négociation puis à signer.</p>
<p>Pendant ce temps, l’administration continuait tant bien que mal de fonctionner, elle ne s’effondra pas brutalement. Les fonctionnaires considéraient que cela était leur « devoir », même dans des conditions difficiles, prolongeant ainsi la guerre et les destructions de plusieurs semaines.</p>
<h3>Et si...</h3>
<p>À la lumière de ce mécanisme Kershaw spécule : si Hitler était mort en juillet 1944, les conjurés auraient-ils pu réellement prendre le pouvoir ? Et s’ils avaient accepté la reddition sans condition, les SS auraient-ils suivi, dès 1944, surtout à l’est ? Une nouvelle légende du « coup de poignard dans le dos » serait née.</p>
<p>Pour Kershaw, l’exigence alliée d’une reddition sans condition n’a pas joué fondamentalement dans la prolongation de la guerre. Elle a souvent été présentée comme contre-productive car ne laissant aucune alternative aux Allemands que la lutte jusqu’au bout. Elle n’a cependant pas empêché la tentative de putsch de juillet 1944. C’est Hitler, relayé par son Parti, qui bloquait toute tentative de reddition, pas les généraux, même si ceux-ci obéissaient. En Italie, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Kesselring">Kesselring</a> n’a accepté la reddition de ses troupes qu’<em>après</em> le suicide du Führer. Et si la perspective de livrer des millions de soldats à l’Armée Rouge effrayait tout le monde, même Dönitz s’y est résolu quand Eisenhower a clairement dit qu’il n’y aurait pas d’alternative.</p>
<h3>Les victimes et les lâches</h3>
<p>Ian Kershaw parle aussi de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Dresde">Dresde</a>, qui se croyait protégée par sa valeur architecturale, mais était aussi une cible car nœud de communications et centre industriel. Il y eut pourtant pire, en nombre de victimes (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Operation_Gomorrha" hreflang="de">Hambourg</a>) ou en proportion (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Pforzheim#1918_bis_1945" hreflang="de">Pforzheim</a>).</p>
<p>En parallèle, Kershaw rapporte aussi le calvaire des prisonniers des camps de concentration, décimés dans des marches forcées en plein hiver, où beaucoup, sinon la plupart, trouvèrent la mort, et cela sans plus guère la moindre justification rationnelle pendant les derniers mois (ni otages ni force de travail). Apparemment ils n’obtinrent pas d’aide de la population, toujours abrutie de propagande.</p>
<h3>Après la guerre</h3>
<p>L’ampleur des pertes humaines et des destructions, le calvaire des réfugiés de l’est et la haine du Parti dans les derniers mois poussèrent plus tard les Allemands à se voir aussi comme des victimes du nazisme. Ce n’est pas complètement faux, pourtant ils l’avaient soutenu pendant des années malgré tous ses crimes. Certes une manière de se dédouaner lors de la dénazification, mais une réaction normale : le traumatisme a éclipsé dans l’inconscient tout ce qui l’a précédé. Le travail de mémoire a pris des années.</p>
<h3>Remarques personnelles</h3>
<p>On peut écrire des uchronies sur une fin de guerre différente. L’Allemagne actuelle est née de ce traumatisme : serait-elle devenue si démocratique et pacifique sans le cataclysme de 1945 ?</p>
<p>À la lecture des ordres hallucinants de cruauté et de mépris pour la population ou les soldats, on enrage que certains grands chefs s’en soient tirés : si Keitel a été pendu <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>, bien des généraux qui ont suivi Hitler jusqu’au bout n’ont même pas été condamné à perpétuité par la suite : Dönitz, <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Ferdinand_Sch%C3%B6rner" hreflang="de">Schörner</a>, Kesselring... alors qu’ils ont jusqu’au bout fait appliquer les ordres délirants et surtout la politique de terreur.</p>
<p>Quant à la forme du livre : rien à redire sur le texte, il est clair. La division en chapitre est chronologique, mais chacun traite successivement tous les thèmes. La masse de références à des travaux précédents est impressionnante. Hélas les notes sont en renvoi en fin de livre, et non en bas de page, ce qui est pénible. Or certaines sont très intéressantes et valent d’être lues.</p>
<p>Les termes sont tous traduits, il n’y a quasiment aucun texte en allemand, dommage pour les germanistes qui auraient préféré la version originale des citations.</p>
<p>La version française s’appelle logiquement <em>La Fin</em>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>J’ai connu un Allemand, lycéen à l’époque, qui a eu le choix entre s’engager volontairement dans la Wehrmacht, ou finir d’office dans les Waffen SS.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Plutôt une fin dans l’horreur qu’une horreur sans fin.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que le quart est du Reich devint polonais par la volonté de Staline : la frontière entre Germains et Slaves est donc revenue à la même position qu’en l’An Mil !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Pourtant Kershaw donne lui-même l’exemple d’un général dont la famille fut emprisonnée car il avait reculé sans autorisation. Et la famille de von Stauffenberg a fini en camp de concentration. Les étoiles ne protégeaient donc pas du pire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Pas fusillé comme tout militaire, mais bien </em>pendu<em>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/747« Pour la Science » de mai 2013 : complexité, créativité, médecine chinoiseurn:md5:f4b91406c03d0193a3b6bb4bc31775f32013-05-22T00:00:00+02:002016-07-06T12:00:26+02:00ChristopheScience et conscienceAntiquitéauto-organisationchaosChinecommunicationcomplexitéconquête de l’inutilecosmologiedémographiedéshumanisationenfantsentropieintelligencemathématiquesmèmemémoireoptimisationorganisationparadoxeperspectivesantésociétés primitivesécologieévolution <p>Notes rapides sur le dernier numéro avant qu’il ne soit chassé des kiosques, <em>et avis personnels en italique</em> :
<img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/pls_427_1ere_de_couv_w1.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>Créativité</h3>
<p>La créativité humaine, la capacité à innover de façon continue, ne remonte pas à si loin, mais la date fait débat. Les fossiles africains montrent des évolutions culturelles, puis des régressions apparentes pendant des dizaines de milliers d’années.</p>
<p>La taille du cerveau n’est pas un critère suffisant pour être créatif, il faut savoir utiliser ces neurones et les interconnecter. Les individus actuels les plus créatifs sont de grands rêveurs, dont l’esprit vagabonde pour faire des analogies inédites avant de revenir au mode analytique habituel. Les neurones plus nombreux rendraient les souvenirs plus précis et pérennes, permettant leur connexion. Un exemple : l’hominidé qui se blesse à un buisson épineux ferait le rapport entre sa chasse et cet épisode <em>via</em> la chair blessée, et aurait ainsi l’idée de l’arme pointue.</p>
<p>Mais l’origine de la créativité humaine pourrait aussi être l’explosion des interactions avec la progression démographique d’il y a 100 000 ans. Une expérience montre que des enfants de maternelle écrasent les singes à des exercices de casse-tête simplement parce qu’ils communiquent, partagent et s’encouragent.</p>
<p>Ah oui : c’est le repos du cerveau, libre de divaguer, qui engendre la créativité. (<em>Pas le stress hystérique de la vie moderne...</em>)</p>
<h3>La médecine traditionnelle chinoise</h3>
<p>Les traités médicaux chinois remontent bien avant Jésus-Christ, mais les médecins ont traîné leurs racines magiques et religieuses jusqu’au XXè siècle, et les théories étaient aussi fumeuses que celles des humeurs en Europe. La pharmacopée en constitue la colonne vertébrale.</p>
<p>Les gouvernements du début du XXè siècle, puis les communistes, affligés par l’état de leur médecine, admirant les succès techniques occidentaux, traumatisés par les succès japonais, imitateurs de l’Occident, décident de revoir toute cette médecine selon les normes scientifiques. La « médecine traditionnelle chinoise », pratique rationalisée d’inspiration traditionnelle, n’a donc que cinquante ans !</p>
<p>Au moment où la Chine s’ouvre à nouveau, certains Occidentaux découvrent cette médecine, et y voient le contrepoint du poids de la physique et de la chimie trop présents à l’Ouest. Ajoutons les problèmes de traduction, culturels, quelques experts ignares, la fascination pour du savoir millénaire, et un aveuglement parfois délibéré par rejet de la science : la mode prend.</p>
<p>Le gouvernement chinois est déchiré : d’un côté, cette passion occidentale pour sa médecine offre des perspectives d’exportation alléchante ; d’un autre côté il garde pour but d’extirper les superstitions et de rationaliser cette médecine, à l’occidentale. Si les anciens concepts fumeux reviennent en Chine même <em>via</em> l’Occident, on retourne à l’obscurantisme scientifique qui a mené la Chine à sa perte les siècles précédents. Les deux raisons poussent les Chinois à vouloir garder le contrôle sur l’enseignement de leur médecine, et n’en facilitent pas l’évaluation raisonnable.</p>
<h3>Complexités</h3>
<p><em>Bon cru pour l’article de Delahaye. Pour certains, ce seront des évidences réchauffées, mais j’ai une question existentielle de moins dans ma tête.</em></p>
<p>D’un côté il y avait la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Complexit%C3%A9_de_Kolmogorov">complexité de Kolmogorv</a>, où un objet pouvait être résumé au plus petit programme capable de le générer. En première approche, un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/ZIP_%28format_de_fichier%29">zip</a> d’un fichier estime cette complexité, elle est minimale dans les objets répétitifs, faible dans une fractale (le programme est simple), et maximale dans un nombre aléatoire, un circuit imprimé...</p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Profondeur_logique_de_Bennett">profondeur logique de Bennett</a> complète cette approche en tenant compte du temps de calcul nécessaire à ce programme : les motifs répétitifs restent simples ; les suites aléatoires, programmées avec une simple recopie de chiffres, redeviennent simples ; par contre la fractale ou le circuit imprimé exigent de longs calculs pour être reconstitués.</p>
<p>Suit un parallèle avec les arbres biologiques de créatures vivantes (indéniablement complexes), qui suivent un très long temps d’évolution/calcul. En conclusion : « On peut même rêver d'aboutir à une compréhension théorique profonde du développement de la complexité de l’univers et du vivant, qui rendrait définitivement caduques les élucubrations des créationnistes de l’<em>Intelligent Design</em>. » (<em>Personnellement, je doute que des équations mathématiques les convainquent...</em>)</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li><img src="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/f/fa/Latimeria_Chalumnae_-_Coelacanth_-_NHMW.jpg/320px-Latimeria_Chalumnae_-_Coelacanth_-_NHMW.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C5%93lacanthe">cœlocanthe</a>, ce poisson si proche des ancêtres des tétrapodes, redécouvert au XXè siècle alors qu’on le pensait disparu avec les dinosaures, ne survit pas en captivité. Des plongeurs sont allés le voir dans son milieu (<em>chapeau pour les heures de paliers de décompression à subir</em>) : c’est une bestiole placide, au métabolisme très lent, et curieuse.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pas compris grand-chose aux résultats de la <a href="http://public.planck.fr/">mission Planck</a>, sinon que le satellite a réussi l’exploit de mesurer une température proche du zéro absolu dans les profondeurs les plus lointaines de l’univers, avec un cent-millième de degré de précision. Les résultats vont servir à invalider certaines théories de physique très fondamentale.</li>
</ul>
<ul>
<li>On aurait trouvé un fossile de Néandertalien métis : ADN mitochondrial néandertalien, menton d’homme moderne !</li>
</ul>
<ul>
<li>La physique quantique en une minute, <a href="https://www.youtube.com/user/minutephysics" hreflang="en">c’est possible</a> ! <br /><em>Sympa, mais franchement, pas beaucoup d’infos de plus que dans une page écrite. Et à un débit qui ne rend pas forcément facile la mémorisation pour qui tout cela n’est pas déjà une évidence. Enfin, si ça peut aider certains...</em></li>
</ul>
<ul>
<li>On sait mettre au point du béton flexible : capital pour les zones sismiques !</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-de-mai-2013#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/746« Au Bonheur des Dames » d’Émile Zolaurn:md5:7f0d2f07e301cd938842edcd9095e2252012-10-31T00:00:00+01:002023-11-01T19:32:29+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesargentdéshumanisationgigantismehistoirelivres lusmicroéconomieperspectivepouvoir d’acheteréconomieévolution <blockquote><p>Classic – something that everybody wants to have read and nobody wants to read.<br /> <br /><em>Classique : ce que tout le monde veut avoir lu, et que personne ne veut lire.</em><br /> <br /><em>Mark Twain</em></p></blockquote>
<p>Et pourtant cet archi-classique vaut le coup.</p>
<p>Bon, j’ai toujours aimé Zola.</p>
<p>Mais cet opus particulier résonne encore. Le petit commerce qui coule, le rouleau compresseur du Grand Capital, les employés exploités... ça n’a pas disparu cent quarante ans après. Le XIXè siècle me fascine <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Au-Bonheur-des-Dames#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> par sa proximité et en même temps par sa différence sur certains points fondamentaux de civilisation (rôle de la femme, du travail...), et les résonances/résurgences avec notre époque, éventuellement dans d’autres pays.</p>
<p>Un peu vieillie et artificielle peut-être l’histoire d’amour entre le propriétaire coureur et la jeune-vendeuse-dure-travailleuse-qui-l’aime-mais-ne-veut-pas-se-l’avouer. Mais sans cela il n’y aurait plus guère d’histoire.</p>
<p>Il m’a donné envie de dévorer le reste des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Rougon-Macquart">Rougon-Macquart</a>, tiens. Dans le genre des sagas sur plusieurs générations, on fait difficilement mieux. Comme si je n’avais pas 2 m³ à lire par ailleurs.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Au-Bonheur-des-Dames#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Je sais, je suis facilement fasciné.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Au-Bonheur-des-Dames#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/704« Des milliards de tapis de cheveux » d’Andreas Eschbachurn:md5:15e93cf986295ac2178d40760055ec152012-09-16T00:00:00+02:002016-02-25T13:55:01+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagnecivilisationconquête de l’inutiledéshumanisationesclavagelivres luslyrismemèmeoh le beau cas !science-fictionspace operasurréalismetempsuniversvaleur <p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/51C74DET5HL._SL500_AA300_.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p><strong>Titre original</strong> : <em>Die Haarteppichknüpfer</em></p>
<p>La SF allemande avait connu un vent de renouveau avec ce livre à la toute fin du XXè siècle. Sa version française a été pour moi le premier roman dévoré après l’an 2000, un symbole. Et j’ai pris autant de plaisir à le relire que la première fois, bien que l’effet de surprise soit évidemment passé, les souvenirs étant nets.</p>
<p>Le thème ? La civilisation d’une planète pauvre et primitive se consacre entièrement à la création de tapis de cheveux humains pour décorer le palais d’un Empereur lointain, invisible, éternel, omnipotent. Depuis des millénaires, religion, mariage, fiscalité, tout tourne autour de ces fameux tapis, qu’un tisseur met une vie à créer.</p>
<p>Jusqu’au jour où un étranger (un hérétique !) proclame que l’Empereur est mort.</p>
<p>Il n’y a pas de personnage central. Tout se dévoile par petites touches étalées sur des années, et la perspective s’éloigne lentement.</p>
<p>On trouvera sans peine sur le réseau, et d’abord Wikipédia, critiques, enthousiastes ou déçues, pleines d’émécheurs <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Des-milliards-de-tapis-de-cheveux-d-Andreas-Eschbach#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Je me place du côté des enthousiastes-mais-juste-dommage-on-est-passé-à-côté-de-la-perfection.</p>
<p>Du même auteur, j’avais lu et apprécié aussi <em>Das Jesus Video</em> (en VO cette fois).</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Des-milliards-de-tapis-de-cheveux-d-Andreas-Eschbach#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em><a href="https://termexplore.wordpress.com/2009/03/03/traduire-spoiler-critique-des-arts-narratifs-et-cookie-informatique-internesque/">Il paraît que c’est le terme français pour</a> </em><a href="https://termexplore.wordpress.com/2009/03/03/traduire-spoiler-critique-des-arts-narratifs-et-cookie-informatique-internesque/">spoiler</a><em>. Je doute fortement de la capacité de pénétration, il y a un côté « allumage alcoolisé » dans le mot.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Des-milliards-de-tapis-de-cheveux-d-Andreas-Eschbach#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/709« Le Gauleiter Wagner, le bourreau de l’Alsace » de Jean-Laurent Vonauurn:md5:b35ff5a411081023de1b28e318390ba32012-07-15T18:28:00+02:002016-05-16T15:19:08+02:00ChristopheHistoireabominationAllemagneAlsacealsaciencataclysmecolonisationdéfense du françaisdéshumanisationesclavageguerrehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationnationalismeoh le beau cas !peine de mortRésistanceSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/41F7X8l9w%2BL._SL500_AA300_.jpg" alt="Image bouquin" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Image bouquin" /> Robert Wagner a dirigé l’Alsace pendant l’« annexion de fait » et, loin d’être un simple exécutant passif, a activement poussé la germanisation et la nazification. Il est allé au-delà des désirs d’Hitler dans l’incorporation de force de milliers d’Alsaciens — des milliers ne sont pas revenus du front russe.</p>
<h3>L’annexion de fait</h3>
<p>Wagner est un nazi de la première heure, accompagnant Hitler dès son putsch raté de 1923, y compris en prison. Intelligent, sans scrupule, sans éthique, Wagner incarne le parfait nazi.</p>
<p>En juin 1940, l’armée française est écrasée, et l’Alsace occupée. Mais l’Occupation n’y revêt pas le même sens que dans le reste de la France, et le Reich d’Hitler n’est pas celui d’avant 1914. Dès l’été, Wagner, Gauleiter (responsable du Parti et, de fait, de l’administration civile) de Bade, rattache l’Alsace à son Gau, puis commence le processus d’annexion et de germanisation complète de la région. Le gouvernement de Vichy proteste à peine. Il n’y aura jamais d’annexion officielle, mais ce sera tout comme. Wagner sera l’exécutant zélé de ce processus. Il promet de faire en cinq ans ce qu’Hitler jugeait faisable en dix — dont l’expulsion de 40% de la population <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p>Environ 135 000 personnes (réfugiées dans le centre de la France avant l’offensive) ne rentrent pas, et plus de 21 000 sont expulsées car françaises ou francophiles. Les noms de ville et de place changent très vite. Chaque ville se retrouve avec une <em>Adolf Hitler Straße</em>. Le français est interdit, les livres brûlés, les patronymes germanisés.</p>
<p>Les « nancéiens », des autonomistes avec un certain poids, sont placés à des postes de responsabilités. Les postes de douane sont déplacés vers l’ouest à la frontière de 1871. Les fonctionnaires doivent déclarer leur adhésion au national-socialisme ou perdre leur emploi. Le courrier est ouvert. Le parti étend son maillage étouffant sur tout le territoire <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</p>
<p>Économiquement, l’Alsace est spoliée. Le taux de change de 20 RM pour un 1 F est un scandale. De nombreux biens d’expulsés, émigrés et autres « ennemis du peuple » sont confisqués. Tous les postes clés passent aux mains d’Allemands de confiance, les banques et industries sont rattachées à des groupes allemands. Les salariés sont fichés. Les marchés agricoles, en raison des pénuries, sont très étroitement contrôlés. Au fur et à mesure que la guerre avance, les Alsaciens se retrouvent contraints de travailler uniquement pour l’industrie de guerre quand ils ne sont pas enrôlés. Beaucoup sont ruinés.</p>
<p>Pour Wagner, tout va bien. En 1942, 20% de la population alsacienne est encadrée par le parti nazi. En fait, pour les trois quarts il s’agit des Jeunesse Hitlériennes <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> et d’<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Deutsches_Frauenwerk" hreflang="de">organisations féminines</a>.</p>
<p>Le passage sur l’université de Strasbourg est abject : la vraie ayant été déplacée avant l’offensive à Clermont-Ferrand, et y étant restée, Wagner fait créer <em>ex nihilo</em> une nouvelle université, fer de lance contre l’Occident. Comme professeurs, on n’importe que des nazis convaincus<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup> triés sur le volet, et aucun Alsacien. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/August_Hirt">Dr Hirt</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup> fait des expériences et se constitue une collection de squelettes à partir de prisonniers des camps d’Auschwitz puis du Struthof.</p>
<p>Ajoutons un culte de la personnalité tout à fait dans la manière nazie. Certaines photos sont éloquentes.</p>
<h3>Les camps du Struthof et de Schirmeck</h3>
<p>Il existe un camp de concentration, parmi les pires, en Alsace, au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Camp_de_concentration_de_Natzwiller-Struthof">Struthof</a> (52 000 détenus d’un peu partout, 22 000 morts dont certains en chambre à gaz), mais il n’est pas vraiment sous la responsabilité de Wagner, ni destiné aux Alsaciens, sinon comme épouvantail. Pour eux, il y a le « camp de rééducation » de Schirmeck, pour tous les réfractaires, contestataires et suspects de francophilie, pour quelques jours ou à vie. Le camp est géré par la Gestapo et arrive au chiffre de deux mille internés. La ration alimentaire, insuffisante pour le travail demandé, et les brimades sadiques entraînent de fréquents décès.</p>
<h3>La résistance</h3>
<p>Dans un tel contexte, difficile de résister. Cependant il y a un « rapport d’Alsace » pour avertir Vichy et Londres de la situation : il montre au Gauleiter que son administration est noyautée. La Gestapo redouble d’efforts, la plupart des réseaux sont démantelés fin 1942.</p>
<p>Quand les tribunaux sont impliqués, il appliquent le droit allemand, et surtout la conception très particulière de la justice qu’ont les nazis. Wagner fait des exemples, les condamnations à mort pleuvent.</p>
<h3>L’incorporation de force</h3>
<p>L’incorporation de force est le plus grand crime reproché à Wagner. Il pousse auprès d’Hitler, contre l’avis de Keitel <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-6" id="rev-wiki-footnote-6">6</a>]</sup> à l’intégration rapide de classes d’âge entières. Il en verse même d’office dans les Waffen-SS <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-7" id="rev-wiki-footnote-7">7</a>]</sup>. Pour ce nazi convaincu, le sang versé et la communauté d’armes doivent accélérer l’intégration de l’Alsace au IIIè Reich. Il ne réussit qu’à braquer définitivement la population.</p>
<p>Au début on fait appel aux volontaires : l’échec est cuisant. L’incorportation devient donc obligatoire en août 1942. Les jeunes qui refusent de partir mettent leur famille en danger : des milliers de personnes sont ainsi « transplantées » dans le Reich <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-8" id="rev-wiki-footnote-8">8</a>]</sup>. Des milliers fuiront tout de même.</p>
<p>Les officiers alsaciens de l’armée française faits prisonniers en 1940 sont rapidement libérés s’ils se reconnaissent comme <em>Volksdeutsch</em> (ethniquement allemands). Mais par la suite, on impose leur passage dans les Waffen-SS.</p>
<h3>Le procès</h3>
<p>La deuxième moitié du livre est consacrée à son procès en 1946. Il donne au passage un bon aperçu de la manière dont fonctionne la justice lors de l’épuration, et ses limites. L’auteur est juriste, il se fait aussi plaisir.</p>
<p>Wagner a été livré aux Français par les Américains. Il est jugé avec cinq autres membres de l’administration et de la « justice » de la période d’annexion.</p>
<p>Bizarrement, sont d’abord reprochés à Wagner et consorts des crimes précis (la liquidation de quatre aviateurs britanniques prisonniers, la condamnation à mort de résistants et jeunes rebelles à l’incorporation...) et accessoirement l’incorporation de force. De manière générale, le procès ne semble pas très bien mené, et se révèle plutôt frustrant pour les Alsaciens.</p>
<p>La légalité de l’annexion revient périodiquement. Pas évoquée par la convention d’armistice de juin 1940, jamais entérinée par aucun traité, elle est légalement nulle. L’enrôlement des populations dans l’armée allemande viole donc toutes les conventions. Mais les nazis s’assoient sur le droit. Wagner a beau jeu de rappeler qu’en 1918, le retour de l’Alsace à la France a été précipité aussi, avant même le Traité de Versailles, et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alsace-Lorraine#L.27expulsion_des_Allemands">avec des expulsions d’Allemands à la clé</a>.</p>
<p>Wagner tente de se présenter comme un simple exécutant de la volonté du Führer. Les témoins ne cessent de montrer qu’au contraire il avait une grande marge de manœuvre, pouvait influencer même Hitler, voire passer outre à ses consignes, pouvait ordonner au système judiciaire des condamnations à mort , et avait la haute main sur les grâces et exécutions.</p>
<p>Tous les accusés sont condamnés à mort, sauf le procureur Luger, acquitté, lui qui avait pourtant requis plusieurs peines de mort devant le tribunal spécial alsacien... Fragile sur le plan strictement juridique, comme toute justice de vainqueur et pour crime contre l’humanité, cette condamnation est politiquement nécessaire pour les Alsaciens, qui ne voient pas d’autre issue possible après leur calvaire.</p>
<p>Sur la forme, le livre souffre de deux petits défauts : beaucoup trop de notes regroupées en fin de volume, quand elles auraient pu être en bas de page voire dans le texte même, et quelques passages et citations en allemand non traduites (moi je m’en fiche).</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Ce n’était qu’un début, les nazis avaient de grands projets de dépeçage de la France en cas de victoire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Je ne crois pas que des habitants des démocraties occidentales actuelles puissent même imaginer ce que doit être ce climat de suspicion complet qui règne d’ailleurs encore dans quelques pays.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que ce n’était </em>pas<em> volontaire comme pour les scouts...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Les autres avaient été virés du corps enseignant, de toute façon.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Cet infect personnage n’a même pas été jugé, il s’est suicidé en 1945, je ne crois pas que le livre le précise.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-6" id="wiki-footnote-6">6</a>] <em>Chef suprême de la Wehrmacht pendant la guerre. Pendu à Nuremberg. Pas fusillé, pendu.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-7" id="wiki-footnote-7">7</a>] <em>Et on n’avait pas forcément le choix entre SS et Wehrmacht « classique ». D’où la présence d’Alsaciens dans la division </em>Das Reich<em> coupable du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oradour-sur-Glane">massacre d’Oradour</a>, sujet encore sensible en Alsace soixante-dix ans après</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-8" id="wiki-footnote-8">8</a>] <em>Le livre ne le précise pas vraiment, mais une « transplantation » n’est pas un simple déménagement forcé, mais une <a href="http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2007-2-page-53.htm">quasi-déportation en camp de travail</a></em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/701Nestlé m’énerveurn:md5:b3fc298b4e7f02a0ca33df12508662d12011-12-09T16:51:00+01:002015-10-01T10:28:09+02:00ChristopheGuerre au marketingabominationaddictionanticonsumérismebon senscommunicationcoup bascynismediscriminationdommagedysfonctionnementdéshumanisationemmerdeursenfantsfichagefoutage de gueulehainemicroéconomieoh le beau cas !paranoïapeine de mortpessimismepouvoir d’acheterprovocationprécisionpériméquêteécologieéconomie <p>Bon, c’est pas nouveau, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/Petits-pots-pour-bébé">j’avais déjà été écœuré par la composition d’un de leurs petits pots pour bébé</a>.</p>
<p>Cette fois c’est à propos de Babivanille, une poudre aux céréales à rajouter dans le lait pour pousser la petite à finir son bib’ du matin quand elle chercherait plutôt à aller jouer, bouquiner ou à se rabattre sur le mélange de jus d’orange, pomme et carottes.</p>
<p>Composition : 3/4 de céréales, un peu de sucre (on a vu pire), des vitamines… et un truc qui fait tache : « huiles végétales »</p>
<p>En général, quand un fabricant indique pudiquement ça, c’est pour dire que ce n’est pas du beurre, et pour éviter de dire que c’est de l’<a href="http://forums.futura-sciences.com/sante-medecine-generale/134779-huile-de-palme-danger-sante-cauchemar-ecologique.html">huile de palme, dont la réputation est catastrophique</a>, pour des raisons aussi bien écologiques (déforestation) que nutritionnelles.</p>
<p>Je me dis que je vais la jouer naïve en posant direct la question sur leur site web, bebe.nestle.fr. Déjà je ne m’y sens pas à l’aise, la cible est clairement féminine, il semble qu’il ne soit pas arrivé au cerveau de tout le monde que Monsieur de nos jours est censé s’intéresser autant aux mômes que leur mère. Mais les marketeux qui commandent ces sites ciblent uniquement ceux qui les consultent principalement, le militantisme ils s’en fichent. Bref.</p>
<p><a href="http://www.bebe.nestle.fr/FR/Products/ProductCatalog/PetitsDejeuners/Pages/babivanille-400g.aspx">Rien sur la composition sur la page dédiée au produit</a>, ils disent juste que c’est 38% moins sucré que les poudres classiques. S’ils comparent à leur propre Nesquik <a href="http://www.nestleprofessional.com/france/fr/BrandsAndProducts/Brands/NESQUIK/Pages/NESQUIK_Plus_Boite.aspx">dont le sucre est le premier ingrédient</a>, il n’y a pas de quoi se vanter. En tout cas pas un mot sur l’huile végétale.</p>
<p>Le seul bouton que je vois pour poser une question est un « Nous contacter » tout en bas. Je clique ensuite sur « Contactez-nous en ligne». S’ensuit une page qui me demande mon email. Très bien… ah mais non, c’est pour m’inscrire à leur site ! Par curiosité et peut-être masochisme, je clique sur « Pourquoi m’inscrire ? ». En réponse on veut savoir les dates de naissance de mes bébés ! Et aussi si je veux être averti<strong><ins>e</ins></strong> (je suis clairement pas le bienvenu !) de diverses offres promotionnelles.</p>
<p>J’en suis resté là. De toute façon <a href="http://www.coradrive.fr/moulinslesmetz/tous-les-rayons/bebes/aliments-sucres-sales/petit-dejeuner/article/11170/nestle-ptit-dejeuner-babivanille-poudre-400g.html">la composition est sur le web en fouillant un peu</a>, et il y a bien de la palme.</p>
<p>Y a pas de raison que mon avis change sur Nestlé, qui a tout de la grosse multinationale tête à claques qui aurait dû être dissoute après le scandale du lait en poudre lourdement promu dans les années 1970 à des Africains loin d’avoir tous sous la main l’eau saine adéquate. Ça semble continuer encore, <a href="http://www.suisse.attac.org/IMG/pdf/Nestle_le_dossier_noir.pdf">Attac a tout un dossier à charge sur eux</a>. Mais pas facile de boycotter ce monstre, <a href="http://www.ledetracteur.com/scandale-nestle-boycott/">ils sont partout</a> (diantre, même les <em>After Eight !</em>).</p>
<p>Et puis surtout <a href="http://groquik.zemax.net/">ils ont tué Groquik</a>, et ça ceux de ma génération ne pourront pas le pardonner.</p>
<p>Je me demande s’il y a un équivalent au magasin bio du coin, ou si elle peut se passer de ça. J’ai bien réussi à me sevrer du Nesquik après une remarque de mon médecin sur mon taux de cholestérol :-)</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Nestl%C3%A9-m-%C3%A9nerve#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/6699 mois pour une mutuelle (vive l’informatique moderne)urn:md5:34335855d5320d93aa667fd512b25cef2011-03-20T15:08:00+01:002015-08-21T14:29:16+02:00ChristopheInformatique lourdeadministrationbase de donnéesbon sensbugcommunicationcomplexitédysfonctionnementdéshumanisationergonomiefoutage de gueuleincohérenceinformatiquemétainformationoh le beau cas !organisationpessimismeprise de tête<p>Super, ma mutuelle m’informe que les échanges informatiques entre elle et la Sécu fonctionnent ! Ça ne fait jamais que 9 mois que j’attendais cela.</p> <p>En juillet dernier, mon employeur bascule la mutuelle groupe obligatoire de Gras Savoye vers Vivinter. Je ne sais pas pourquoi, et en fait je m’en fiche. Depuis trois ans la précédente ne m’avait pas causé de souci.</p>
<p>Il eut été agréable que la transition se fasse de manière transparente. Mais vu que notre système de santé implique deux étages pour le remboursement, chacun avec ses systèmes, administrations et lourdeurs, et que ces systèmes devaient communiquer, ce ne pouvait pas être aussi simple. Évidemment, j’étais dans une situation extrêmement compliquée, nulle part vue ailleurs : salarié depuis toujours au régime local alsacien, deux enfants rattachés à moi, point barre.</p>
<p>Le processus normal aurait dû être : déconnexion au 1er juillet de l’ancienne mutuelle auprès des ordinateurs de la CPAM, connexion à la même date de la nouvelle, et les transmissions de remboursements auraient dû suivre.</p>
<p>Pour les enfants, soyons juste, tout se passe bien Le site de la nouvelle mutuelle (<a href="http://vivinter.fr/">Vivinter</a>) étant pas trop mal fichu bien que fleurant bon l’institutionnel<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, et les remboursements étant véloces, je constate que la varicelle de la petite et la grippe du grand, puis la varicelle du grand et la grippe de la petite, sont remboursées rubis sur l’ongle.</p>
<p>Pour moi, rien. Je suis connu du système mais la « connexion Noémie »<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup> échoue. Le site m’informe par un logo de l’échec… parce que je l’ai consulté. Il eut été trop simple de m’envoyer un <del>mail</del> mél<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> pour me signaler le problème.</p>
<p>Je téléphone à Vivinter. Ils me disent que c’est la Sécu qui rejette leur demande de me rattacher car il y a déjà une autre mutuelle dans leurs ordinateurs. Gras Savoye s’accroche donc. Le site de ce dernier étant une plaisanterie, j’en suis réduit au téléphone (je n’ai bien sûr que ça à faire de mes journées, surtout en plein dans un projet au planning hystérique). La personne que je parviens à contacter semble très sympathique mais vu le résultat (aucun, et aucun retour ou message), elle aurait pu aussi bien éviter de décrocher.</p>
<p>Je contacte aussi la Sécu, et une voix beaucoup moins sympathique (sous-entendu : « comment ça vous connaissez pas les procédures par cœur ? ») me confirme que oui, je suis connecté à deux mutuelles à la fois et, non, ils ne peuvent rien corriger, il faut une attestation écrite de l’ancienne mutuelle qu’il y a un problème, et là peut-être on peut passer en manuel. Les mutuelles savent sans doute mieux que leurs clients qui doit payer. En fait, c’est le contraire du <em><a href="http://www.01net.com/editorial/239899/le-tourbillon-de-la-net-economie/slamming-sur-l-adsl-./">slamming</a></em>, ou simplement une stratégie pour l’éviter en préférant l’excès inverse.</p>
<p>Nouvelle tentative auprès de Gras Savoye (ça doit faire le troisième courrier papier). Silence radio, jamais eu aucune réponse. Au mieux, un anonyme pion a recliqué sur « déconnecter », n’a jamais regardé le résultat par la suite (il ne peut pas, ce sont au mieux des traitements quotidiens nocturnes), la Sécu a refusé la déconnexion pour les mêmes raisons obscures qu’auparavant, le rejet a dû tomber dans un fichier de log à côté de milliers d’autres que l’on ne regarde jamais, et il n’est sans doute pas prévu que l’on renseigne les simples clients de l’échec de leur demande.</p>
<p>Quelques temps après, j’ai fait ce que j’aurais dû faire bien longtemps avant : écrire sur papier à la Sécu, dire que l’ancienne mutuelle fait la morte, que la nouvelle est la seule et unique à prendre en compte. Un certain nombre de jours par la suite, courrier de la Sécu : ils confirment que c’est réglé. Cependant, la nouvelle mutuelle n’a toujours rien pris en compte dans le site. Je ne suis jamais arrivé à savoir si leur demande de connexion était systématique et quotidienne ou uniquement sur demande. Énième demande de connexion auprès d’eux <em>via</em> le site. Un certain nombre de jours plus tard : un mail me dit oui, c’est bon, c’est connecté !</p>
<p>Je vais enfin pouvoir envoyer mes feuilles de soins et les relevés de remboursements. Heureusement que la connexion s’était faite instantanément pour les enfants, que je suis en régime local (Sécu élevée et mutuelle donc réduite), sans problème de fin de mois et en bonne santé, sinon ça aurait pu faire un joli petit pactole…</p>
<p>Moralité : le para-public est encore pire que le public pour ce qui est du respect et de l’information du client. Ici, c’est encore la Sécu qui a été la plus carrée (certes l’accueil téléphonique y était un peu abrupt mais je préfère du factuel brut à des robots sympas qui racontent n’importe quoi). À l’époque des <em>web services</em>, des ETL et des bases téraoctets, il semble aberrant que des échanges pour savoir qui est connecté à quoi 1) prennent autant de temps et 2) échouent sans même que l’on cherche à savoir pourquoi. Pour avoir travaillé quelques temps au cœur d’entités similaires, je sais que le problème n’est pas technique, oh non, mais principalement organisationnel, voire culturel, et pas au bas de la hiérarchie...</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Ah, l’animation inutile d’entrée avec un bouton « Rejouer » qui n’a dû servir qu’au concepteur et aux commanditaires de la comm’, qui par contre ont raté le fait que l’accès ne se fait pas si on néglige le <code>www</code> dans l’URL (soyons juste : c’est corrigé)… Je ne parle pas non plus du mot de passe par défaut que toute personne connaissant mon n° de sécu, une donnée hautement confidentielle, aurait pu deviner — je ne m’énerve même plus depuis que j’ai vu bien pire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/09/03/224-codes-projets">nom de projet typiquement institutionnel</a></em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] Nous sommes dans l’institutionnel et le para-public, là, causons son verbiage. Il y aurait aussi « courriel » mais c’est trop récent.</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/9-mois-pour-une-mutuelle#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/644« Pour la Science » d’octobre 2010urn:md5:ee10a8ad1bd7e2826f0db83c02822fb42010-10-07T22:14:00+02:002015-08-20T13:11:20+02:00ChristopheScience et conscienceabominationanthropieanticonsumérismeargentastronomiebon sensbullechiffrescitationcivilisationclimatconquête de l’inutileconquête spatialecosmologiecoup bascourt termecynismedommagedémocratiedéshumanisationeaueffet de serreesclavageEuropefichagefootformationfoutage de gueulegaspillagegigantismegravitationgéologieinformatiquemanipulationmathématiquesmortmétainformationpanurgismepeine de mortperfectionnismepessimismeprise de têtesciencesociétés primitivesspéculationtempstravailvaleurécologieéconomieémerveillement<p>Alors en vitesse pour ce numéro encore en kiosque (<em>comme d’hab’, en italique mes commentaires</em>)...</p> <h3>Décompte</h3>
<p>À propos du pitoyable débat sur les nombres de manifestants (<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Décompte-des-manifestants">qui m’avait déjà mis hors de moi</a>), Didier Nordon déclare :</p>
<blockquote><p>« La presse ne remplit pas sa fonction lorsqu’elle se contente de rapporter sans se compromettre les versions contradictoires des parties au conflit. Répéter n’est pas informer. »</p></blockquote>
<p>(<em>Il faut reconnaître que ce matin (seulement !) j’ai entendu des reportages tentant de tirer au clair la manière dont les manifestants sont comptés. D’accord, j’écoute une radio pas supposée être à droite, mais c’était assez consternant…</em>)</p>
<h3>Cocorico</h3>
<p>La liste des médaillés Fields, Gauss ou Chern honore les mathématiques françaises.</p>
<p>(<em>Mais les médias n’en parleront pas, nos millionnaires incapables de jouer correctement à la baballe les passionnent plus. Impossible de comprendre de quoi traitent leurs travaux ; c’est toujours comme ça avec les maths, on se dit que c’est totalement vain et puis quelques siècles plus tard une théorie fondamentale de la nature, ou une bête optimisation d’ingénieur, utilise ces inutiles théorèmes.</em>)</p>
<h3>Prédation</h3>
<p>Ivar Ekeland évoque les <em>dark markets</em>, des marchés financiers où les listes de ventes et d’achats ne sont pas publiques, ce qui coupe l’herbe sous le pied à certains spéculateurs. Ils ont été inventés car le marché normal aux carnets d’ordre publics permet de créer des algorithmes redoutablement rapides et efficace et cela coûte cher à de gros acheteurs (<em>pourtant c’est pas comme ça que c’est censé marcher un marché théorique pleinement efficient ? où les gens pressés et gros consommateurs payent forcément plus chers que les patients peu gourmands ?</em>).</p>
<p>De petits malins ont vite compris comment utiliser ces « marigots obscurs » pour savoir quels gros acheteurs ferrer sur les marchés ouverts et à quel prix. Conclusion d’Ekeland : tous ces gens hyper-brillants qui passent leur temps à optimiser la finance ne seraient-ils pas mieux employés par la société à des choses utiles ?</p>
<p>(<em>Ça me rappelle une remarque lue tout récemment je ne sais où : <strong>notre économie est passée d’une recherche de l’équilibre des ressources et besoins et de répartition du travail à un système d’optimisation de la prédation</strong>.</em>)</p>
<h3>SF théorique</h3>
<p>Les « super-Terres », des planètes rocheuses un peu plus grosses que la Terre sont détectés depuis quelques temps autour de diverses étoiles. Pour savoir si elles peuvent être habitables, une étude de ce que peut être leur géologie, leur tectonique des plaques a été faite.</p>
<p>La pression au centre est plus élevée et elles sont plus chaudes : la convection dans le manteau est donc accélérée et la tectonique des plaques plus rapides. Paradoxalement la croûte est plus fine, et le cycle du carbone rallongé. L’atmosphère est également mieux retenue. Cette stabilité rend ces planètes encore plus favorables à la vie que la nôtre (<em>C’est rare ça ! En général on s’extasie devant l’improbable perfection de notre petit monde.</em>) Il se pourrait que la Terre soit en fait tout en bas de la gamme de masses des planètes habitables, Vénus et Mars n’ayant pas les bonnes caractéristiques.</p>
<p>Par contre, leur noyau est devenu probablement complètement métallique, et le champ magnétique protecteur n’est donc pas là. La super-Terre n’est pas forcément à la bonne distance de son étoile et bien orientée (on en connaît une qui présente toujours la même face à son étoile : la silice s’évapore de cette fournaise pour retomber sur la face cachée.)</p>
<p>Il existe aussi sans doute des super-Terres recouvertes d’un océan, dont le fond est un manteau de glace sous très forte pression. La quête et l’étude des super-Terres ne fait que commencer.</p>
<h3>Violations de sépultures ou enquête criminelle ?</h3>
<p>Nos ancêtres du Néolitihique (il y a 6000 ans), dans une bonne partie de l’Europe, enterraient leurs morts dans des tombes circulaires. Certaines, à côté du défunt principal en position fœtale, contenaient aussi d’autres cadavres jetés plus négligemment. Seule hypothèse acceptable pour l’auteur : il s’agissait d’esclaves sacrifiés au décès de leur maître. Cette coutume effroyable était connue sous diverses formes sur tous les continents plus récemment, elle n’a pas épargné l’Europe…</p>
<h3>La minute du matheux ultime</h3>
<p>La chronique de Jean-Paul Delahaye parle notamment du site <em><a href="http://primes.utm.edu/" hreflang="en">The Prime Pages</a></em> (et du livre associé <em><a href="http://www.amazon.fr/Prime-Curios-Dictionary-Number-Trivia/dp/1448651700/ref=sr_1_1?ie=UTF8&s=english-books&qid=1286353199&sr=1-1">Prime Curios! The Dictionary of Prime Number Trivia</a></em>). C’est bien là que se trouvent des gens capables de trouver que 313 est un premier remarquable entre autres parce que c’est le plus petit nombre de personnes qui, prises au hasard, ont plus de 50% de chances que cinq d’entre elles aient le même jour anniversaire<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-octobre-2010#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> ; ou que 3539 est aussi un premier remarquable car donne la formule de la nitroglycérine (C3H5N3O9) ; ou que le 16719è siècle sera le premier à ne comporter aucune année égale à un nombre premier ; et mille autres propriétés affolantes.</p>
<p>En prime une réflexion sur les nombres premiers illégaux : il est possible de créer des premiers contenant tout chaîne arbitraire, et donc tout texte illégal (appel à la haine raciale…) correspond à un nombre premier donc illégal (il y a aussi l’exemple du <a href="http://decss.zoy.org/" hreflang="en">DeCSS</a>). Et il existe aussi des nombres premiers contenant votre nom<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-octobre-2010#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</p>
<h3>Divers</h3>
<ul>
<li>Nos muscles se « souviennent » des entraînements passés car les multiples noyaux cellulaires ne disparaissent pas avec l’inactivité et l’atrophie ; donc ils regonflent plus vite ensuite. (<em>Dans mon cas, y a rien à se souvenir.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>On a identifié le gène de la respiration à la naissance. (<em>Évidemment la sélection naturelle l’a lourdement favorisé.</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Les vrais jumeaux n’ont pas les mêmes empreintes, car elles sont liées à certaines périodes de la vie utérine. On pourrait même repérer par les empreintes certains traumatismes vécus par la mère pendant la grossesse.</li>
</ul>
<ul>
<li>Sondage fait auprès de scientifiques (19% de doctorants !) : ils font nettement plus confiance aux scientifiques qu’aux politiques ou aux religieux pour obtenir des informations exactes. (<em>Sans blague ?!</em>)</li>
</ul>
<ul>
<li>L’espèce humaine a failli disparaître il y a moins de 200 000 ans, étant réduite à une poigne d’individus dans une Afrique rendue inhabitable par une glaciation. L’auteur pense avoir découvert un des refuges des survivants : des grottes en Afrique du Sud près du Cap, au bord de la mer.</li>
</ul>
<ul>
<li>En comparant des photos des années 1940 et des récentes, des scientifiques américains ont étudié l’évolution de la flore dans un coin d’Alaska. L’évolution suit ce qu’on pourrait attendre des conséquences du réchauffement climatique : la toundra voit fleurir des arbustes, la taïga (forêt boréale) progresse vers le nord et brunit dans le sud. Les rétroactions sont multiples et difficiles à modéliser.</li>
</ul>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-octobre-2010#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Alors que tout le monde sait que c’est le numéro de la voiture de Donald.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-octobre-2010#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Ça me rappelle l’histoire des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Nombre_univers">nombres univers</a> qui contiennent toute chaîne de chiffres possibles, donc n’importe quel texte, donc plein de versions de l’histoire de votre vie en de multiples langues, y compris inexistantes, y compris des versions fausses par un détail ou qui divergent totalement à partir du moment où vous avez gagné au loto.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-octobre-2010#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/633Coupe du Monde de Foot : victoire de l’Allemagne par 7 à 1 !urn:md5:367b899747d54944b55c8d76fa7d640a2010-07-01T22:08:00+02:002015-08-19T16:34:31+02:00ChristopheInformatique militante et technologieanthropomorphismeauto-organisationcomplexitéconquête de l’inutiledéshumanisationfootinformatiqueintelligence artificielleperspectiverobotssciencescience-fictionémerveillement <p>(J’en entends déjà qui doivent se dire : « ça y est, il est tombé dans le piège des paris sportifs en ligne, le dernier impôt et arnaque aux pigeons à la mode. » Meuh non.)</p>
<p>De la même manière qu’il y a quatre ans, (et <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/08/16/203-la-coupe-du-monde-des-robots">j’en avais parlé</a>), la RoboCup a eu lieu, cette fois à Singapour, et dans la catégorie <em>Humanoid Kid Size</em>, celle des humanoïdes format <del>Sarko</del> bambins découvrant la marche (pas seulement par la taille), c’est l’équipe allemande de Darmstadt qui a écrasé par 7 à 1 d’autres Allemands, les FUmanoids, après bien d’autres massacres dans les poules.</p>
<p>Ci-dessous la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=4wMSiKHPKX4">vidéo de la finale</a>. J’adore la démarche un brin pataude de ces bestioles, leur stabilité assez relative (mais ils savent se relever seuls), et la technique du grand écart des gardiens de but, capables de pas mal d’anticipation.</p>
<p>Je n’ai pas vu les autres catégories, mais pour le moment, il n’y a pas encore de quoi faire peur à grand-monde, même à l’équipe de France actuelle. Rappelons que le but réel de la compétition est de faire naître une équipe de robots humanoïdes capable de battre l’équipe championne du monde 2050 humaine (qui n’est pas encore née elle non plus d’ailleurs).</p>
<center>
<object width="640" height="385"><param name="movie" value="http://www.youtube.com/v/4wMSiKHPKX4&color1=0xcc2550&color2=0xe87a9f&hl=fr_FR&feature=player_embedded&fs=1"></param><param name="allowFullScreen" value="true"></param><param name="allowScriptAccess" value="always"></param><embed src="http://www.youtube.com/v/4wMSiKHPKX4&color1=0xcc2550&color2=0xe87a9f&hl=fr_FR&feature=player_embedded&fs=1" type="application/x-shockwave-flash" allowfullscreen="true" allowScriptAccess="always" width="640" height="385"></embed></object>
</center>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Coupe-du-Monde-de-Foot-victoire-de-l-Allemagne-par-7-%C3%A0-1#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/620Balistique relativiste et diplomatie interstellairesurn:md5:840200b4528307a26b60c725ec1410c52010-06-10T00:00:00+02:002015-07-29T12:47:29+02:00ChristopheParadoxe de Fermi et Exobiologieabominationapocalypseastronomieautodestructionbombe atomiquecataclysmecatastrophecivilisationcommunicationconquête spatialecosmologiecoup bascynismedilemmedommagedéshumanisationemmerdeursextraterrestresgigantismegravitationguerregéologiegéopolitiquehard scienceimpérialismeintelligencepanspermieparanoïapeine de mortperspectivepessimismeprise de têtepsychologieracléesciencescience-fictionSetispace operaspéculationsécuritétempsterrorismeuniverséonsévolution<p>Issue d’<a href="http://science.slashdot.org/comments.pl?sid=1453440&cid=30199506" hreflang="en">un petit bout de discussion</a> qui a dérivé du sujet initial (l’envoi d’un inutile message interstellaire depuis un iPhone), voici une petite application de la théorie des jeux à ajouter au dossier du <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2008/06/08/54-le-paradoxe-de-fermi">paradoxe de Fermi</a>.</p> <h5>Prudence paranoïaque</h5>
<p>Une civilisation A se met à émettre dans l’espace, délibérément ou non. Une civilisation B plus avancée sur une autre planète capte cela et déduit l’existence de A. Elle ne sait rien de A. Elle peut se douter cependant qu’à la réception du message, c’est-à-dire quelques siècles plus tard, l’autre civilisation aura sans doute progressé. B peut faire rapidement l‘analyse suivante :</p>
<ul>
<li>soit elle reste coi et ne signale pas sa présence en retour, sachant que le contact aura forcément lieu plus tard d’une manière ou d’une autre si les voyages interstellaires sont possibles ;</li>
<li>soit elle décide de signaler sa présence, au risque de se retrouver face à une puissance agressive qui lui fera la peau ;</li>
<li>soit elle opte pour l’option la plus sûre, l’Arme Balistique Ultime (si elle en a les moyens) : <strong>un météore de bonne taille, accéléré à une vitesse proche de celle de la lumière</strong>, précipité sur la planète émettant le signal.</li>
</ul>
<p>Cette dernière arme a plusieurs avantages : aisément disponible (les planétoïdes sont pléthores), propre (pas de radiations qui empoissonnent tout à dix parsecs aux alentours), sans protection possible (un bouclier assez costaud n’existe pas), et surtout sans préavis car, par définition, un objet qui s’approche à la vitesse <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vitesse_de_la_lumière">c</a></em>-ε ne peut être détecté avant d’être reçu dans la tronche. Rappelons qu’à vitesse relativiste, l’énergie de l’impact sera bien supérieure au classique ½mv² ; un modeste astéroïde suffira pour transformer n’importe quelle planète rocheuse en ceinture de poussière d’astéroïdes.</p>
<p>La question de savoir comment accélérer un caillou à une telle vitesse est laissée en exercice, mais les militaires financeront sans problème la chose à la première occasion.</p>
<p>Reste un problème : l’attaquant ne recevant les émissions de la victime que des décennies, des siècles voire des millénaires après leur émission, elle ne peut deviner si, au moment de l’impact, l’agressé n’aura pas déjà colonisé quelques autres mondes et évolué assez vite, ce qui lui fournirait hypothétiquement la possibilité de rendre la monnaie de sa pièce à l’agresseur. Celui-ci se trouve donc forcé de détourner l’attention de son propre système en attaquant depuis un autre ou en faisant dévier le projectile pour masquer sa provenance. Cela suppose que l’agresseur est déjà un empire interstellaire (en fait évident pour quelqu’un capable de déplacer de telles masses à de telles vitesses), mais ajoute beaucoup aux délais puisque l’ordre doit être envoyé à une vitesse forcément limitée par <em>c</em>, ou le voyage bien allongé, d’où sursis supplémentaire pour l’agressé.</p>
<h5>Mauvais voisin</h5>
<p>Il existe un autre inconvénient à cette politique du « je me tais et je désintègre balistiquement tout ce qui apparaît autour » : d’autres civilisations évoluées pourraient découvrir ce qui se passe. Et, bien que pacifiques, décider que la communauté galactique peut se passer de membres paranoïaques agressifs et régler le problème de la même manière. Selon que la première civilisation à se répandre sera prudente-paranoïaque ou coopérative-justicière dépend le sort de toutes les autres civilisations.</p>
<p>En arrière-plan figurent les hypothèses que l’on peut faire sur la cohérence d’une civilisation multi-planétaire où les communications sont limitées par la distance (répétition, en pire, des problèmes au sein des Empires européens à l’heure de la conquête de l’Amérique), et les durées se comptant en décennies : le temps que l’astéroïde arrive sur sa cible, ou que celui de la Revanche parvienne, la situation politique et philosophique de l’agresseur peut avoir évolué. L’Allemagne actuelle mérite-t-elle d’être anéantie pour les abominations d’Hitler ?</p>
<p>Si cela se trouve, la galaxie est actuellement parcourue par des centaines d’astéroïdes tueurs envoyés par des civilisations peureuses jouant au <em>sniper</em> interstellaire. La Voie lactée semble vide car ceux qui ne se taisent pas rencontrent très vite un rocher relativiste. Pendant ce temps, une autre civilisation fait peut-être les choses en grand et allume des supernovas dans tous les recoins favorables à la vie, la stérilisant par millions de parsecs-cube à la fois.</p>
<p>À l’inverse, chaque civilisation peut faire ce raisonnement, constater que l’astéroïde tueur est (relativement) simple à mettre en œuvre mais que des représailles sont également faciles, et dans le doute s’abstenir. Collectivement, on arriverait à un « équilibre de la terreur » galactique équivalent à celui de la Guerre Froide. Le « donnant-donnant » deviendrait donc la règle, comme après tout c’est à peu près le cas dans le monde actuel… à quelques timbrés éventuels près qui pourraient faire du dégât mais seraient plus aisément « traitables » par la collectivité. (Ce dernier cas m’interroge : les distances galactiques et le coût des déplacements empêchant les vrais conflits d’intérêt, quelles seraient les motivations pour attaquer ses voisins ? Fondamentalisme religieux ? Régime délirant à la nord-coréenne ?)</p>
<h5>En conclusion</h5>
<p>Einstein disait qu’il ne connaissait pas les armes de la Troisième Guerre Mondiale mais celle de la Quatrième : les cailloux. Je ne sais pas s’il pensait à cette variante-là de la fronde.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Balistique-relativiste-et-diplomatie-interstellaires#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/616« Pour la Science » d’avril 2010urn:md5:58a86e0aaa47083a427871ff086d2f782010-04-04T21:22:00+02:002015-06-10T12:28:29+02:00ChristopheScience et conscienceabominationanthropomorphismeapocalypseastronomieBiblecitationcivilisationclimatcomplexitéconquête de l’inutileconquête spatialecosmologiedinosauresdéshumanisationeffet de serregravitationhard sciencehistoireintelligencemathématiquesmortmythenaturepanspermiepeine de mortpollutionreligionsantétempsuniverséconomies d’énergieénergie<p>Dernier numéro de ma revue non informatique préférée. Un bon cru. Petit problème : je n’ai pas trouvé le poisson d’avril !!!</p> <p><img src="http://www.pourlascience.fr/e_img/boutique/full/_done_20100311_144826_PLS-2010-avril_390-fu-pls_390_couv.jpg" alt="Couverture Pour la Science n°310" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" />En vrac et en développant selon l’importance, mon temps disponible et le petit bonheur :</p>
<ul>
<li><em>Dixit</em> <strong>Didier Nordon</strong>, entre moults paradoxes :</li>
</ul>
<blockquote><p>La première [consigne affichée dans les lieux publics] est : « <em>Gardez votre calme, ne criez pas au feu.</em> » Donc si vous entendez un cri effrayé « <em>Au feu !</em> », continuez à vaquer tranquillement à vos activités, sûr qu’il n’y a aucun incendie dans les parages. ''</p></blockquote>
<ul>
<li>L’<strong>axe d’Uranus</strong> est hors norme (couché sur l’orbite, pôle pointé vers le Soleil), sans doute à cause d’un satellite disparu depuis. Encore une découverte de <a href="http://www.imcce.fr/Equipes/ASD/person/Laskar/Laskar.html">Laskar</a>, un veinard qui fait des simulations gravitationnelles toute la journée.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Israël de l’Ancien Testament (Xè siècle av. J.-C.), décrit comme une « <strong>terre de lait et de miel</strong> », possédait bien des ruches. Pour une fois, la Bible est à prendre au pied de la lettre.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <a href="http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actualite-les-poissons-baleines-du-cretace-24482.php">pachycormidés</a> occupaient à l’époque des dinosaures la niche écologique de la baleine (« Je suis énorme et je me goinfre de plancton en fonçant droit devant la gueule ouverte. »)</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Toutankhamon</strong> est bien le fils d’Akhénaton, mais pas de Nefertiti. (C’est plutôt le dernier <em><a href="http://www.science-et-vie.com/">Science & Vie</a></em> qu’il faut lire si le sujet vous passionne autant que Petit Rémi.)</li>
</ul>
<ul>
<li>Il existe des papillons migrateurs. J’ignorais.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le rôle de l’appendice n’est toujours pas clair (à la rigueur, réservoir de bactéries pour renouveler la flore intestinale après une maladie ?).</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La vie est-elle possible dans d’autres univers ?</strong> : l’article le plus éthéré, le plus spéculatif. Il est connu (?) qu’une toute petite variation des constantes physiques (masse du proton, ratio des différentes forces de la nature entre elles...) rendrait l’univers actuel invivable, par exemple en interdisant l’existence même d’atomes. La question « pourquoi sommes-nous justement dans <em>cet</em> univers improbable ? » n’a qu’une réponse anthropique au sein d’un multivers (il y a une infinité d’univers avec chacun ses lois, et nous ne pouvons évidemment apparaître que dans celui propice à la vie). <br />Les auteurs battent l’idée en brèche, en faisant varier plusieurs paramètres à la fois sans voir s’effondrer le monde. Ils vont jusqu’à développer le cas où la force faible (qui joue dans la cohésion des atomes) n’existe carrément pas : les étoiles auraient pu se former, alimentées par la fusion du deutérium et non de l’hydrogène ; elles seraient simplement plus froides et moins énergétiques. Même si les éléments supérieurs au fer ne pouvaient exister (certaines supernovas seraient physiquement impossibles), la chimie évoluée resterait possible, et donc potentiellement la vie. <br />De même les rapports des masses des différents quarks pourraient varier sans empêcher l’existence d’atomes aux propriétés certes différentes mais qui n’interdiraient pas la chimie organique à base de carbone tétravalent. <br />Ces spéculations peuvent sembler vaines, elles n’en sont pas moins vertigineuses, et, qui sait ? seront peut-être à la base de la physique en l’an 5000 (ou, mieux, en 45 000 000 000, quand il faudra songer à quitter notre univers gagné par l’entropie).</li>
</ul>
<ul>
<li>Vous connaissiez les <strong>Mochicas</strong> ? Peuple précolombien du Pérou, avant les Incas, ils avaient des coutumes <a href="http://www.sciencepresse.qc.ca/archives/2005/cap0509053.html">assez barbares</a>, aussi saignantes que celles des Aztèques. La tombe décrite dans l’article contient par exemple une adolescente sacrifiée pour l’enterrement. Belle mentalité.</li>
</ul>
<ul>
<li>En Afrique, les « <strong>maladies tropicales oubliées</strong> », souvent à base de parasites, tuent peu mais handicapent lourdement des pans entiers des populations, les enferrant dans la pauvreté : faiblesses, cécité, ralentissement du développement des enfants... Les traitements existent, sont pratiques et peu coûteux, mais ces maladies sont bien moins médiatisées que le SIDA, alors que leur prise en compte massive auraient un excellent « retour sur investissement ».</li>
</ul>
<ul>
<li>Vous connaissez les <strong>téléostéens</strong> ? Ils représentent l’écrasante majorité de la poiscaille actuelle de la carpe à l’hippocampe, à part requins, raies, esturgeons et une poignée d’autres, et même la moitié des espèces de vertébrés à eux seuls. Leur arbre phylogénétique a beaucoup évolué ces derniers temps.<br />Ce qui semble d’abord une question de spécialistes en cladistique (différencier les polymiixiformes des uranoscopidés) devient aussi un problème fondamental : « <strong>c’est quoi un poisson ?</strong> » <br />Sachant qu’un groupe est défini par un ancêtre commun et ses descendants, et que nous sommes plus proches de la carpe qu’elle du requin (l’ancêtre commun des tétrapodes et de la carpe n’est déjà qu’un cousin des requins), si carpe et requins sont des poissons, alors nous aussi. (De la même manière, si on définit de la même manière les dinosaures, les oiseaux en sont car ils descendent d’une de leurs espèces). <br />Bref, la définition courante ne tient pas compte des groupes qui se sont monstrueusement différenciés de leurs ancêtres, et la définition rigoureuse n’est pas du gâteau.</li>
</ul>
<ul>
<li>Glaçant : <strong>le péril du méthane</strong>. Le sujet n’est pas neuf mais développé en détail : <strong>la Sibérie fond</strong>, et des millénaires de matières organiques mortes (feuilles comme rhinocéros laineux) figées dans le sol gelé sont en train de passer progressivement au-dessus de 0°C, de fermenter, et de dégager des quantités astronomiques de méthane. Lequel est un puissant gaz à effet de serre et amplifie donc le réchauffement.<br />L’auteure peut carrément allumer des feux de méthanes au-dessus des lacs en formation, mais la récupération est économiquement illusoire. Il existe des projets de réserve naturelle pour ralentir le dégel en transformant ces terres en pâturages, mais le seul moyen réaliste d’enrayer le phénomène est de stopper le réchauffement déjà en cours (rêvons !), sinon ce sera 0,3°C de plus à la fin du siècle. (Rappelons que s’arrêter à +2°C serait déjà un exploit.)<br />Pour se faire encore plus peur, un encadré rappelle que les hydrates de méthane au fond des mers polaires représentent un danger encore plus grand, évoqué ici deux fois déjà : en SF (<em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/10/09/249-la-mere-des-tempetes-de-john-barnes">La mère des tempêtes</a></em> de John Barnes) et comme cause possible de l’<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/09/19/405-l-extinction-du-permien">extinction massive du Permien</a>.<br />Brrrr...</li>
</ul>
<ul>
<li>Un article sur <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Terence_Tao">Terence Tao</a>, mathématicien sino-australien multi-primé, un génie de notre époque. Le plus frappant est que bien qu’aussi précoce et doué que Mozart sur son créneau, c’est apparemment un être humain tout à fait agréable et sociable.<br />(Ne me demandez pas de comprendre ce sur quoi il travaille, je suppose que ce sera très utile un jour comme toutes les branches incompréhensibles des maths.)</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Pour-la-Science-d-avril-2010#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/602Plus d’histoire en terminaleurn:md5:fece58e2cad69f31836d0e4282b622aa2009-12-11T21:46:00+01:002009-12-11T21:47:02+01:00ChristopheRes publicaabominationAllemagneapocalypseautodestructionbon senscatastrophecitationcivilisationcommunicationconquête de l’inutilecoup basculturecynismedécadencedémocratiedéshumanisationenfantsenseignementexpertisefoutage de gueulegéographiegéopolitiquehistoireincohérenceintelligencelibertémèmemémoirenationalismeouverture d’espritpanurgismeperspectivepessimismepolitiqueprovocationSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeéconomie de l’attention <p>Dans le cadre de l’hallucinant débat sur la consternante proposition de supprimer l’histoire-géo en terminale :</p>
<blockquote><p><em>Those who cannot remember the past are condemned to repeat it.</em><br /> <br />Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter. <br /> <br /><a href="http://en.wikiquote.org/wiki/George_Santayana" hreflang="en">George Santayana</a>, <em><a href="http://www.gutenberg.org/files/15000/15000-h/vol1.html" hreflang="en">The Life of Reason</a></em>.</p></blockquote>
<p>J’avais trouvé cette citation très connue en en-tête de <em><a href="http://www.amazon.fr/Rise-Fall-Third-Reich-History/dp/0671728687/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=english-books&qid=1260563359&sr=1-2en">Rise and fall of the Third Reich</a></em> (<em>Le Troisième Reich : Des origines à la chute </em>) de William L. Shirer.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Plus-d-histoire-en-terminale#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/595Déménagement de ma ligne Free : le boulet France Télécom (suite)urn:md5:ade6995ebce43d37e5daa18690468c092009-10-31T19:14:00+01:002011-06-05T20:29:45+02:00ChristopheMoi, ma vie, mon egoanticonsumérismecommunicationCRMcynismedommagedysfonctionnementdéshumanisationfoutage de gueulehaineprise de tête <p>J’avais réclamé auprès de France Telecom <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Déménagement-de-ma-ligne-Free-:-le-boulet-France-Télécom">à propos des délais totalement imputables à eux et eux seuls, bien que je sois chez Free, qui avaient amené à un retard sur l’installation de ma ligne ADSL</a>.</p>
<p>J’ai reçu une réponse :</p>
<blockquote><p><em>...Nous avons bien pris en compte votre demande.<br />Nous vous invitons à prendre contact avec votre opérateur pour toute réclamation concernant votre dossier qui n’est pas géré par Orange France Télécom.</em></p></blockquote>
<p>Traduit-résumé :</p>
<blockquote><p><em>Puisque de toute façon vous êtes chez la concurrence, allez vous faire foutre.</em></p></blockquote>
<p>La seule chose que je me demande, c’est si le pion qui a lu mon courrier a fait l’effort de le comprendre.</p>
<p>Bon, et bien je change d’opérateur mobile le plus tôt possible. Ça tombe bien, les mobicartes sont vides.</p>
<p><a href="http://www.zdnet.fr/actualites/telecoms/0,39040748,39703699,00.htm">Vivement la 4è licence</a>.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com-suite#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/592Le dur chemin vers l’acte authentiqueurn:md5:50266b7a7f4ec75bc55991e51039181a2009-09-21T13:07:00+02:002015-09-01T13:18:42+02:00ChristopheRes publicaadministrationanticonsumérismeargentbon senscomplexitécoup basdommagedysfonctionnementdéshumanisationemmerdeursfoutage de gueulegaspillagehaineincohérencemicroéconomieMurphyorganisationparadoxeperspectivepessimismepouvoir d’acheterprise de têteprovocationsabotagesantétempsténacitééconomie<p>Quand j’ai commencé à boucler mon prêt pour la maison, j’étais optimiste : bon apport, premier achat déjà aux 3/5 payés, situations stables. Notre situation financière n’a effectivement jamais posé problème, mais le chemin vers la signature de l’acte définitif fut long et ardu. Nous avions pourtant déjà été échaudés il y a quelques années.</p> <p>(Pour les locataires : l’acte authentique marque le transfert de la propriété d’un bien, et le notaire doit donc avoir reçu tous les fonds, y compris ceux prêtés par la banque.)</p>
<p>Leçons qui peuvent servir à qui passera par là aussi :</p>
<ol>
<li>Les trois mois de délai entre le <a href="http://www.paruvendu.fr/I/Tout-savoir-sur-le-compromis-de-vent">compromis de vente</a> et l’<a href="http://www.paris.notaires.fr/art.php?cID=181&nID=296">acte authentique</a> final ne sont pas de trop. Si ça ne urge pas, de toute façon ça traînera.</li>
<li>Ne perdez jamais UN jour. Les autres en perdront assez pour vous.</li>
<li>Ne comptez sur les autres que si vous ne pouvez pas faire le travail vous-même.</li>
<li>Vous avez un bel apport, une bonne santé ? C’est bien, le dépassement des délais ne devient pas une certitude.</li>
<li>Même quelqu’un en bonne santé a des chances d’avoir un problème bénin ou passé qui nécessitera un certificat médical. En l’occurrence, préparez tous les certificats médicaux le plus vite possible. (Merci à l’allergologue pour avoir accordé un rendez-vous en trois jours, même s’il a attendu une semaine avant d’envoyer le papier...)</li>
<li>On est au XXIè siècle, email et téléphone portable sont des outils merveilleux. Mais comment faisaient-ils au XXè siècle ?<br />(De toute manière, tous les documents les plus importants, les plus urgents, voyagent par courrier, exceptionnellement par fax.)</li>
<li>Une grosse partie des déménagements se faisant l’été, les demandes de prêts se font donc vers mai (plein de ponts géants et de congés) et les actes authentiques en juillet-août (où personne ne travaille).</li>
<li>En conséquence, dans vos calculs de délai, ne comptez ni le mois de mai ni la moitié de l’été. Pensez à demander les dates de congés de vos interlocuteurs et les noms des assistantes et remplaçants.</li>
<li>L’accord de prêt doit être renvoyé AU MOINS dix jours après l’avoir reçu (la loi est rigide) ! Hors de question de gratter du temps là-dessus.</li>
<li>Une fois l’accord de prêt signé et reçu par la banque, restent les surprises :
<ol>
<li>dans la flopée de papiers, lequel a été oublié/mal signé ? ;</li>
<li>les garanties-surprises exigées auprès du notaire (comme un engagement de récupération du prêt relai sur la vente du bien précédent) ;</li>
<li>le temps pour débloquer les fonds.</li>
</ol></li>
<li>Toutes les banques sont aussi nulles, dixit la notaire (sauf paraît-il le Crédit Mutuel qui gèrerait tout au niveau de l’agence ; les autres centralisent dans des services dédiés, d’où des délais ; mon acheteur a effectivement eu son prêt très vite — même si un papier manquait quand même le jour de la signature de l’acte, je suppose que cela dépend fortement des personnes précises impliquées et de leurs dates de congés...).</li>
<li>Il y a toujours des clauses surprenantes à découvrir dans l’accord de prêt final, qu’on ne peut plus refuser faute de temps.</li>
<li>Il manquera toujours un tampon quelque part. Vous oublierez toujours de signer un obscur coin d’un quelconque papier.</li>
<li>Le gain financier (finalement dérisoire) des prêts à taux zéro, PEL, CEL... sera annulé par le coût de mise en place (énervement, nuits blanches, téléphone portable, accessoirement argent...).</li>
<li>Les clauses les plus inquiétantes d’un contrat d’assurance ne sont connues que lorsqu’il est trop tard pour reculer.</li>
<li>Toutes les personnes rencontrées au téléphone et physiquement seront aimables, serviables, ponctuelles, mais faillibles et débordées. Mais pris dans sa globalité, le <em>back-office</em> de la banque, de l’assurance... n’est, lui, que lent, faillible et débordé<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</li>
<li>Si quelqu’un dit « je m’occupe de tout », inquiétez-vous.</li>
<li>J’ai découvert avec fascination que personne ne connaît vraiment tout le flux exact (ça change avec chaque banque, chaque assureur...). Par contre tout le monde s’attend à ce que VOUS le maîtrisiez (« Ah, il faut un chèque de banque ? »).</li>
<li>Une banque est paranoïaque et ne lâche pas un kopeck si elle n’est pas sûre de le récupérer intégralement même si vous vous tuez ET que le prix de l’immobilier chute de 95% un mois avant la fin du prêt ET que vous avez perdu toutes vos économies. <br />À force de vous interroger sur ce que ce vampire va bien demander encore comme garantie, vous trouverez plein d’idées de choses que la banque ne vérifie pas et qui ouvriraient d’intéressantes perspectives à des gens moins honnêtes que vous ; ou simplement qui vous font regretter d’être honnête et franc, ce qui coûte cher en délais (au moins vous serez tranquille plus tard<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>).</li>
<li>La Communauté urbaine a autre chose à faire que faxer des certificats d’urbanisme (faxer, oui, en 2009<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup>), y compris le jour de la signature, deux mois après la première demande et après trois relances.</li>
<li>Ayez une pensée pour les gens qui ont moins d’apport que vous, des problèmes de santé et ne peuvent pas fouetter banquier, notaire ou assureur au téléphone pendant les heures ouvrables. Et on se demande pourquoi les transactions immobilières baissent.</li>
<li>Si vous êtes déjà propriétaire, cet apport sera fortement minoré par la banque. J’ai eu de la chance, j’ai vite eu un acheteur dont le banquier a vite pu produire un accord de principe de prêt. (Si possible, vendez, louez, et achetez ensuite, ou débrouillez-vous pour ne pas avoir de prêt relai.) (Un de mes collègues a tout de même réussi le <em>même jour</em> à remplir le camion de déménagement, signer les actes authentiques de vente et d’achat, et à vider le camion dans sa nouvelle maison. Chapeau. Dangereux.)</li>
<li>Tout montage conclu avec votre diligent commercial attitré a de bonnes chances d’être dénoncé par le service crédit — un mois après.</li>
<li>Scannez et gardez sur vous dans une clé USB tous les justificatifs.</li>
<li>Si comme moi vous avez une flopée de comptes d’épargne (historique chargé de deux personnes), centralisez le plus vite possible l’argent sur un minimum de comptes pour éviter de dégainer des dizaines de pages d’extraits de comptes justificatifs à chaque visite chez le banquier.</li>
<li>Un courtier (CAFPI...) peut être un gain de temps si vous ne faites pas vous-même le tour des banques, ou pour un dossier tordu. Rappelez-vous cependant que c’est un commercial qui doit trouver des clients aux banques partenaires. Si vous avez un bon dossier, le courtier peut au moins servir à mettre la pression sur vos banques favorites.</li>
<li>Le taux n’est pas tout. Cela peut coûter beaucoup de frais dès le départ pour espérer gagner un peu bien plus tard. Un taux intéressant sur le prêt principal est parfois la contrepartie d’un crédit relai riquiqui (la banque vous oblige à emprunter plus sur le prêt principal) et de pénalités de remboursement anticipées systématiques<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>.</li>
<li>Une banque veut vous prêter le maximum le plus longtemps possible : les remboursements anticipés sont une obscénité. Vous n’aurez pas de clause intéressante là-dessus si vous ne l’avez pas exigée.</li>
<li>Dans le système actuel, les banquiers se plaignent des clients qu’ils ne voient plus que pour quémander un prêt, et qui partent pour une faible différence de taux. Les clients savent que les banquiers ne sont là que pour les plumer.</li>
<li>Une promesse orale de banquier vaut moins que le papier sur laquelle elle est écrite.</li>
<li>Si se présente un « conseiller » quelconque, c’est forcément un commercial.</li>
<li>Chaque banque a ses règles de calcul, estimation, garantie, prêt relai, conditions de remboursement anticipé... Mais toutes croit que les autres font pareil qu’elle.</li>
<li>Simuler et comparer des crédits est un excellent exercice de maniement d’Excel ou Calc. Ne cherchez pas à retomber sur les mêmes chiffres que votre banquier, il y aura toujours un écart et on ne vous donnera jamais tous les chiffres.</li>
<li>Actuellement les banques veulent gagner de l’argent avec le crédit, pas juste conquérir un client : si un taux est trop bas et trop intéressant, il y a toujours un loup.</li>
<li>La domiciliation de revenus est illégale, mais ils l’exigent toujours<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.</li>
<li>Même si vous n’êtes pas bloqué par la date fixée pour les déménageurs, ou la rentrée des enfants, votre vendeur sera lui très pressé de voir son argent, et l’acheteur de votre précédent bien très pressé d’emménager.</li>
<li>Un acheteur à x k€ tout de suite vaut mieux qu’un hypothétique acheteur à x+10 k€ dans deux mois — ou jamais.</li>
<li>Rappelez-vous que l’argent que l’on vous prête est le vôtre. Mais l’État a prêté aux banques, pas à vous.</li>
<li>Les derniers banquiers honnêtes ont déjà sauté du haut de leur tour pendant le dernier krach.</li>
<li>(<strong>Ajouts de 2011</strong>) <br />Finalement j'ai fait une erreur : tout ce cirque pour maximiser le prêt relai pour ne pas avoir à emprunter plus que prévu a été inutile, dans une maison il y a toujours 20 k€ de travaux de plus que prévu (le prévu était : zéro). Au pire, emprunter un peu plus permet d’avoir un matelas qui fructifiera à la banque. Et le prêt sera plus facile à décrocher avec un taux un peu plus intéressant.</li>
<li>N’oubliez pas que tout gain sur les taux se répercutera sur l’assurance, il faut bien que la banque se rattrape quelque part.</li>
</ol>
<p>Une fois l'étape du prêt bouclée, mes douleurs à l’épaule (attribuées d’abord au clavier, mais aussi à ce stress non professionnel) se sont presque totalement envolées. Quel est l’impact sur la Sécu de toute la paperasse banquière ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#wiki-footnote-6" id="rev-wiki-footnote-6">6</a>]</sup></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Que des systèmes composés de gens relativement dévoués et sérieux soient aussi souvent lents et bureaucratiques, sinon carrément cafouilleux, m’« émerveille » tous les jours.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Mouais. À vérifier.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Il paraît que le fax a une valeur légale que l’email n’a pas encore.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>J’ai une objection de principe aux pénalités de remboursement anticipé, c’est vraiment un concept de vampire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Il n’y aurait pas moyen de tirer de juteuses amendes de toutes ces clauses sciemment caduques ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#rev-wiki-footnote-6" id="wiki-footnote-6">6</a>] <em>Le médecin m’a raconté avoir vu une fois les futurs habitants de tout un lotissement, tous avec les mêmes pathologies. Sans doute pas uniquement à cause des banquiers, mais l’exemple est révélateur.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-dur-chemin-vers-l-acte-authentique#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/580La Déclaration du Droits du Développeururn:md5:00f7c5442cab96869509215550361fa42009-09-11T00:00:00+02:002018-05-19T11:17:26+02:00ChristopheInformatique : l’art du développementbesoinbon senscommunicationcouragecynismedysfonctionnementdéshumanisationergonomieexpertiseinformatiqueintelligencelibertélogiciel librelogistiquemobilitémytheoffshoreoptimisationoptimismeOracleorganisationouverture d’espritpanurgismeperfectionnismepouvoir d’acheterprise de têtepsychologierésolutionsSSIItravailutopievaleuréconomieéconomie de l’attention<p>Droit à deux moniteurs, à une machine rapide, de faire bien son travail, de causer avec le commanditaire… : gadget ou nécessité ?</p> <p>Deux déclarations des Droits du Développeur<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> existent dans le monde anglo-saxon à ma connaissance :</p>
<ul>
<li>sur <a href="http://www.codinghorror.com/blog/archives/000666.html" hreflang="en">Codinghorror.com</a></li>
<li>chez <a href="http://c2.com/cgi/wiki?DeveloperBillOfRights" hreflang="en">Cunningham & Cunningham</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</li>
</ul>
<p>Elles diffèrent, je traduis/condense/commente :</p>
<h4>Le droit à deux moniteurs sur son bureau</h4>
<p>Souvent utile, parfois gadget.</p>
<p>Ça dépend vraiment de l’application. Qui passe son temps à écrire du code d’un côté et à vérifier l’exécution de l’autre aura plus l’utilité de deux petits moniteurs que votre serviteur suant devant Business Objects et sa ribambelle de panneaux et onglets. Je préfèrerais alors un seul très grand et très large écran, sauf dans mes périodes de rédaction de docs et support, où un A4 vertical serait optimal.</p>
<p>Il est clair que l’investissement de 200 € dans un écran est dérisoire par rapport au temps regagné ensuite.</p>
<p>(<strong>Ajout de 2010</strong> : Et pourtant, j’ai vu des clients où même les chefs de projet informatiques en étaient resté au tube cathodique. En France à la fin de première décennie du siècle, oui.)</p>
<h4>Le droit à une machine rapide</h4>
<p>Tout à fait d’accord, dans les limites raisonnables évidemment. Le temps perdu à compiler, à attendre que s’ouvre une grosse application, le <em>swap</em>, le manque de réactivité... concourt à perdre du temps pur, à casser la concentration, et à un certain stade le gain en temps ne devient pas que quantitatif, mais aussi qualitatif.</p>
<p>Si je ne me plains pas de ma machine de bureau actuelle, ce serait probablement le cas avec un portable : les gros logiciels serveur comme Oracle ou Business Objects XI se lancent beaucoup plus lentement sur le disque dur escargostesque du portable courant. Et je ne parle pas de VMware.</p>
<p>Même si RAM et disque dur se rajoutent facilement à peu de frais, le PC de bureau n’est pas tout. Il est toujours agréable d’avoir sa base Oracle sur une vraie machine dédiée, ou de disposer d’une collection de machines virtuelles toutes prêtes rapidement accessibles sur un serveur VMware ESX bien taillé qui ne sature pas les entrées-sorties au <em>boot</em> d’une machine virtuelle.</p>
<p>D’un autre côté, n’avoir <em>que</em> des machines rapides pousse à la fainéantise, et masque certaines grosses lacunes en réactivité pénibles pour le client final. Dans un monde idéal, le développement aurait lieu sur une machine récente, et les tests utilisateur s’effectueraient sur une configuration relativement ancienne, limitée en processeur, mémoire, éventuellement disque.</p>
<h4>Le choix de la souris et du clavier</h4>
<p>100% d’accord. Je fulmine de voir que l’ergonomie de ces outils critiques est le cadet des soucis de toutes les entreprises où je suis passé. (Par contre, certains de mes clients investissent visiblement au niveau des bureaux, chaises, support pour portables plus que pour le clavier à proprement parler ; mais je ne suis qu’un simple prestataire qui hérite plus souvent qu’à son tour de la machine la moins récente, le clavier le plus crade, et d’une chaise non réglable.)</p>
<h4>Le droit à une chaise confortable</h4>
<p>À raison de huit heures par jour de résidence, cet endroit doit être non seulement tolérable mais aussi <em>confortable</em> (“<em>Sure, you hire developers primarily for their giant brains, but don't forget your developers’ </em>other<em> assets.</em>”)</p>
<p>(<strong>Ajout de 2018</strong> : et même au-delà : la chaise est <strong>capitale</strong>. Pour certains ce sera même un balon. Vu le coût pour la Sécurité Sociale de séances de kiné interminables pour des milliers d’informaticiens ou commerciaux en voiture, il n’y a aucune tolérance à avoir : uniquement le meilleur.)</p>
<h4>Le droit à une connexion internet rapide</h4>
<p>Vue mon utilisation massive de Google et des divers sites de docs et d’aide en ligne ou de support, un internet asthmatique provoque vite frustration, énervement, et perte de productivité.</p>
<p>De nos jours, le réseau fonctionne en général bien, et si Youtube n’est peut-être pas vraiment nécessaire professionnellement, je dois parfois télécharger des gigaoctets de bases de données de client, ou d’outils d’Oracle à tester.
Pêchent souvent par contre les liaisons VPN vers les clients, avec un désastreux impact sur la productivité : dans le cas extrême d’une liaison inutilisable, un débogage se passe vingt fois plus lentement par téléphone, ou nécessite un déplacement parfois lointain coûteux en temps, fatigue, euros et CO₂<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup>.</p>
<p>De plus, il n’y a pas que les <em>digital natives</em> à tomber rapidement en état de manque du réseau et de sa mine d’informations plus ou moins utiles. Couper Internet aux informaticiens, c’est s’assurer une fuite des cerveaux.</p>
<h4>Un coin au calme</h4>
<p>À l'agence je vis dans un <em>open space</em>. Chez beaucoup de clients aussi. Les bureaux à trois ne sont pas non plus terribles pour la productivité. Il n’y a pas de formule idéale, ou plutôt une formule qui change avec la tâche : <em>war room</em> pour les projets tendus ou en phase de test, et bureaux isolés pour rester concentrés ou pour téléphoner, ce qui suppose que les ordinateurs soient portables.</p>
<h4>Le droit de bien faire son travail</h4>
<p>Voici à présent les revendications non matérielles, les plus délicates.</p>
<p>Combien de fois a-t-il fallu torcher quelque chose vite fait par manque de temps ? N jours ont été vendus au client, 2N auraient été nécessaires pour tout faire calmement, donc on a tout fait en même temps, développé des morceaux sur des bases instables, testé avant la fin du développement, déployé avant la fin des tests préliminaires, et formé avant d’avoir finalisé les spécifications.</p>
<p>Évidemment dans ce cas les développeurs dépensent plus de temps et d’énergie à resserrer les boulons et à s’insulter mutuellement qu’ils n’en auraient pris à faire les choses proprement d’entrée. Bien sûr, la date de livraison a été fixée pour des raisons de politique interne au client, et/ou un temps fou a été paumé en administratif, et/ou tout a été décidé au dernier moment. Au final, personne n’est content du résultat et rejette la faute sur les autres.</p>
<h4>Le droit de choisir ses outils</h4>
<p>« On reconnaît le bon ouvrier à ses outils » dit le proverbe. Je ne me souviens pas de beaucoup de moments où j’ai pu librement choisir quelle base, quel langage, quel ETL, quel outil, quelle machine... serait utilisé. Les critères de choix portent plus souvent sur le tarif ou la compatibilité avec l’existant que sur l’aisance de développement. (Le choix de l’outil étant souvent « structurant » et engageant l’entreprise pour longtemps, je comprends parfaitement que l’opinion du développeur ne soit qu’un facteur parmi d’autres — mais rares également sont ceux qui m’ont demandé mon avis.)</p>
<p>Quand on parle de technique, et de choses pas trop chères (disque dur, RAM), il suffit parfois de demander pour avoir (à supposer que l’accord du chef suffise). Dès qu’il y a des coûts de licence impliqués, le programmeur de base n’a plus trop le choix. Les logiciels libres ont l’immense avantage de n’impliquer aucune bataille bureaucratique pour débloquer quelques euros de licence.</p>
<h4>Le droit de savoir ce qu’on lui demande, avec des priorités claires</h4>
<p>Arf arf arf.</p>
<p>Soyons juste, j’ai vu le pire comme le meilleur, des specs au crayon sur une feuille comme des dossiers archi-précis. Il y a forcément toujours des zones d’ombres, et le demandeur n’est pas toujours conscient lui-même de la complexité intrinsèque de son projet ou de l’incohérence parfois catastrophique de ses données source (<em>garbage in, garbage out</em> si logiciel != Google, et encore).</p>
<p>Mais les commanditaires doivent savoir répondre aux questions, corriger les incohérences remontées, connaître leur métier, savoir ce qu’ils veulent, accepter de vivre avec des contraintes techniques, et (ô qualité rare) arbitrer !</p>
<h4>Le droit à une communication claire et directe avec le client, l’utilisateur comme le « commanditaire »</h4>
<p>J’ai toujours haï l’effet « téléphone arabe » et les incompréhensions parfois catastrophiques nées de l’éloignement.</p>
<p>Autant j’abhorre passer mon temps sur la route pour aller chez des clients lointains, autant je sais que dans les situations un peu tendues ou floues la communication en face à face est dix fois plus efficace que mail et téléphone pour diverses raisons :</p>
<ul>
<li>les <strong>non-dits</strong> : l’interlocuteur muet après une question directe, ou affichant une moue, livre une information, un avertissement, montre un souci ; celui qui ne répond pas à un mail... peut ne pas l’avoir lu ou pas compris ;</li>
<li>la <strong>nullité de beaucoup de personnes pour s’exprimer par email</strong>, alors qu’oralement tout va bien (moi c’est l’inverse) ;</li>
<li>à l’inverse, <strong>l’incapacité de beaucoup de gens à lire un mail de plus de trois lignes</strong> (par manque de temps parfois, de cellules grises rarement, de capacité d’attention souvent) ;</li>
<li>les <strong>insinuations</strong> et autres vacheries plus ou moins gratuites que l’on n’oserait jamais par mail ;</li>
<li>la <strong>franchise entre quatre yeux</strong>, sans témoin ni trace écrite, qui permet des explications parfois très saines en cas de conflit (purement technique le conflit parfois) ;</li>
<li>la <strong>solidarité entre « gens du front »</strong> d’entités différentes mais cohabitant dans le même bureau, soudés face à leurs chefs respectifs pour le bien du projet ;</li>
<li><strong>« radio moquette »</strong> à la machine à café : on y apprend beaucoup sur un peu tout le monde, les qualités et défauts des uns et des autres, les contraintes, les <em>vraies</em> raisons de ci ou ça, le vocabulaire local (capital !), la culture du client (caricature de fonction publique ? <em>start-up</em> hystérique ? ingénieurs pointilleux ? commerciaux-girouettes ?), l’historique (toujours chargé), les <em>vrais</em> arbitrages à faire, la politique interne (de quel chef se méfier ? lequel fera pression ? lequel est ennuyé par le projet ?), les hiérarchies officielles et officieuses, les personnalités (quel chef se battra pour le projet ? lequel est une carpette ?), etc. ;</li>
<li>le <strong>contact direct avec l’utilisateur</strong> : on lit très vite un <em>brain overflow</em> sur un visage, alors que personne ou presque n’écrira « je ne comprends pas » ;</li>
<li>le <strong>lien entre humains</strong>, tout simplement : on se décarcasse beaucoup plus pour Jacquot avec qui on a déjà sympathisé autour d’un café, une secrétaire sympa qui a dépanné l’imprimante avec le sourire, un voisin de bureau qui a conseillé sur le choix d’une voiture, un utilisateur régulier dont on comprend le martyre quotidien devant un logiciel foireux... que pour des noms abstraits sur un écran.<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup></li>
</ul>
<p>Le pire des cas ? La spécification retransmise à un développeur lointain (indien ou français, ce n’est pas le problème) <em>via</em> un intermédiaire obligé ignorant du sujet<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>.
À l’inverse, je me rappelle avec émotion de sessions de développement avec des utilisateurs demandeurs deux bureaux plus loin, qui savaient ce qu’ils voulaient, répondaient aux questions, et testaient. Même avec des specs-brouillon.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Traduction imparfaite du </em>Bill Of Rights<em> qui amende la Constitution américaine, alors que la Déclaration des Droits de l’Homme constitue le préambule de toute Constitution française digne de ce nom. Différence philosophique ou simple héritage de la philogénie du droit ?</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>On remarque les vétérans du réseau à un nom de domaine avec </em>deux<em> lettres seulement.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Le CO₂ et la fatigue, l’employeur s’en fiche, bien sûr.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Je pense que réside là une des explications des dérapages de grandes entreprises : le client contacté uniquement par web ou email devient immédiatement abstrait.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>L’intermédiaire c’était moi et je n’ai pas du tout aimé.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9claration-des-droits-du-d%C3%A9veloppeur#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/569Déménagement de ma ligne Free : le boulet France Télécomurn:md5:ccfaf0ce5f9b99cea037d78cd7c7f1cc2009-08-17T15:09:00+02:002011-06-03T21:06:17+02:00ChristopheMoi, ma vie, mon egoanticonsumérismebesoincommunicationCRMcynismedommagedysfonctionnementdéshumanisationfoutage de gueulehaineprise de tête<p>Comment les procédures débiles d’un prestataire historique dont on voudrait bien se débarrasser entraînent des délais inexcusables.</p> <p>Je viens de déménager. Entre autres problèmes mineurs je me suis retrouvé sans Internet pendant deux semaines. Ouch.</p>
<ul>
<li>15 juillet : on signe et on a les clefs.</li>
<li>Juste avant, je demande à Free le transfert de l’abonnement. Vu que je veux en même temps changer la version de la Freebox, c’est en fait une annulation plus une résiliation, pas un simple déménagement. J’aurais pu demander plus tôt mais la date de déménagement a longtemps été assez incertaine<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#pnote-586-1" id="rev-pnote-586-1">1</a>]</sup>.</li>
<li>La ligne France Télécom est introuvable, bien que l’ancien propriétaire ait été chez Orange, mais apparemment Orange également fait dans le dégroupage total (paradoxal !)<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#pnote-586-2" id="rev-pnote-586-2">2</a>]</sup>.</li>
<li>Il faut donc prendre rendez-vous auprès de FT pour reconstruire la ligne. 20 € pour ma pomme, mais c’est plus encore pour Free.</li>
<li>Premier appel de FT le mardi 21, à 9 h 01. J’étais au volant, une voie féminine sur le répondeur dit qu’ils rappelleront demain. <strong>Elle ne laisse aucun numéro où rappeler.</strong></li>
<li>Je regarde les adresses des agences FT, toutes en centre-ville de Strasbourg, aucune accessible en banlieue.</li>
<li>En dessous des adresses figure le conseil de contacter le 1014. Je m’y fais rembarrer : il faut voir mon problème avec Free, même en insistant que de toute façon, c’est EUX qui veulent/doivent prendre rendez-vous avec MOI, Free ou pas. La fille dit n’avoir aucun moyen de contacter les équipes responsables.</li>
<li>Le lendemain mercredi, une autre voix féminine laisse un message sur mon portable au moment où je suis aux toilettes. Elle rappellera « ultérieurement ».</li>
<li>Free, contacté<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#pnote-586-3" id="rev-pnote-586-3">3</a>]</sup>, me dit ne pas avoir de moyen de contacter FT. Apparemment ils ne peuvent le faire que quand ils reçoivent un message automatisé comme quoi le candidat abonné est injoignable. Je me demande comment ils font avec les gens sans portable...</li>
<li>Jeudi, pas d’appel.</li>
<li>Vendredi, pas d’appel.</li>
<li>Samedi, pas d’appel (c’eût été trop beau).</li>
<li>Dimanche, pas d’appel (ce qui m’aurait franchement étonné).</li>
<li>Lundi, rien non plus.</li>
<li>Le mardi, en plein dans un des multiples voyages entre la nouvelle maison et la déchetterie, le portable sonne, je me gare en catastrophe (coup de bol, j’étais en ville ; dix secondes avant c’était rapé, ou j’étais bon pour une prune). Une voix assez bizarre mais compréhensible prend enfin rendez-vous... pour le mardi une semaine après, le 4 août, entre 8 et 10 h.</li>
<li>Une semaine plus tard, <del>à peine</del> pas encore remis du déménagement quatre jours plus tôt, en plein dans la longue et épuisante phase de rangement-questionnement-« mais il est passé où ce machin ? »-bricolage de mille détails, malgré la chaleur désastreuse pour le sommeil, nous nous levons tôt pour être sûrs d’accueillir le technicien de FT au cas où ils se pointe aux aurores convenues.</li>
<li>Évidemment, il est arrivé à 15 h. Il est heureux que j’ai encore été en congé et que nous nous soyons organisés pour maintenir une présence permanente, sans illusion, mais à tout hasard. Il ne s’excuse pas du retard, si ça se trouve il n’était pas au courant de l’horaire convenu. Il n’est pas de France Telecom, c’est un sous-traitant. Je ne fais pas de remarque (déjà bien content qu’il soit là) et le laisse bidouiller les fils pendant vingt minutes. Il dit que ça fonctionne, je signe.</li>
<li>Le surlendemain, SMS de Free : la Freebox est en route !</li>
<li>Entretemps je reviens au boulot. Je peux accéder à mon webmail chez l’hébergeur : Squirrelmail hurle qu’il y a trop de mails pour afficher quoi que ce soit ! Dont 95% de <em>spam</em> bien sûr.</li>
<li>Réception le lundi. Le paquet est imposant (deux boîtiers, deux Freeplugs, télécommande, câbles...) mais le plus important est <strong>qu’au premier branchement ça marche !</strong></li>
</ul>
<p>Bref. Trois semaines pour avoir le réseau, dont une semaine juste pour prendre rendez-vous avec FT, et une semaine d’attente de leur technicien. Le reste est délai postal ou acceptable.</p>
<p>Je ne sais pas comment ça se passe pour les gens qui choisissent Orange mais je parierais que ça aurait été plus rapide. Ce n’est pas avec ce genre de comportement qu’ils vont récupérer ma clientèle. Dans quelle mesure est-ce délibéré ou un simple artefact de la méthode « standardisons au maximum le système, remplaçons tout par des “processus” standards, et supprimons la moindre parcelle d’autonomie aux pions du standard », ou un bug du logiciel de CRM ? Je ne sais.</p>
<p><strong>Ajout ultérieur</strong> : J’adore le site d’Orange ; les pubs pour les forfaits ont leur place, mais :<br />- le premier mot en haut à gauche en-dessous du bandeau : Harry Potter (au moment où j’en ai eu besoin ; à présent c’est « Ligue 1 » et « Secret Story »...) ;<br />- la fonction « Rechercher »... recherche sur le web, pas sur leur site ! Il y a bien un bouton Assistance, mais comme il faut un login, et que je suis client mobile, il ne me cause que du mobile.</p>
<p><strong>Ajout d’octobre</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Déménagement-de-ma-ligne-Free-:-le-boulet-France-Télécom-suite">non-réponse de France Télécom suite au courrier…</a></p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#rev-pnote-586-1" id="pnote-586-1">1</a>] <em>Une histoire en soi. Fichus banquiers paranos.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#rev-pnote-586-2" id="pnote-586-2">2</a>] <em>À proprement parler ce n’est pas du dégroupage puisqu’on reste chez FT, mais plutôt de l’ADSL nu vendu moins cher pour éviter une saignée de clients vers Free et consorts..</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#rev-pnote-586-3" id="pnote-586-3">3</a>] <em>Là aussi j’ai eu du mal à trouver le bon numéro. Au moins m’a-t-on vite aiguillé vers le bon.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/D%C3%A9m%C3%A9nagement-de-ma-ligne-Free-%3A-le-boulet-France-T%C3%A9l%C3%A9com#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/586“From Hell” d’Alan Moore et Eddie Campbellurn:md5:8041e75a7db65c1093057ee6d33e44242009-05-03T00:00:00+02:002011-06-03T18:26:16+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationbande dessinéedéshumanisationlivres lusmort<p>C’est une BD de cinq cent pages, mais une des plus glauques que j’ai lues. Sujet : l’histoire sordide de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Jack_l'éventreur">Jack l’Éventreur</a>.</p> <p>Alan Moore a d’entrée choisi la théorie la plus romanesque : celle de la conspiration qui fait du chirurgien royal, Sir Gull, le coupable, exécuteur fou des ordres d’une Victoria qui voulait « simplement » éviter le scandale du mariage secret de son petit-fils avec une roturière ; le tout avec la complicité carriériste de francs-maçons. Moore reconnaît ne pas croire plus que cela à la théorie. À ma connaissance, Jack l’Éventreur reste inconnu, et ce n’est pas faute d’avoir cherché (Wikipédia vous livrera tous les suspects).</p>
<p>L’abord n’est pas spécialement facile, le début semble un peu décousu et je trouve le trait de Campbell assez moche. Par contre il rend parfaitement l’ambiance extrêmement glauque de Whitechapel, un quartier immonde de Londres. C’est le XIXè siècle finissant, ultralibéral, divisé en castes, et débordant de misère humaine, qui est le véritable thème du livre.</p>
<p>Dans l’annexe finale, Moore décrit quasiment page par page ses sources et les libertés qu’il a prises avec la réalité (connue).</p>
<p>Dur, pessimiste, souvent très cru (et pas que dans les scènes de charcuterie), un bon livre pas du tout pour les enfants.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/From-Hell#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/536« Le fantôme de Staline » de Vladimir Fédorovskiurn:md5:b9af76e6a22197838d5c8519c19d10b42009-03-16T00:00:00+01:002023-12-27T12:01:32+01:00ChristopheHistoireabominationcommunismecynismedécadencedémocratiedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnagefichageguerreGuerre Froidegéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmanipulationmythenationalismeparadoxepolitiquepsychologieRealpolitikRussieSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Ce n’est pas un roman, « juste » un livre d’histoire sur la Russie et l’URSS, de Lénine à Vladimir Poutine. <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vladimir_Fédorovski">Vladimir Fédorovski</a> sait de quoi il parle, il était du sérail sous Brejnev et Gorbatchev.</p> <p>Les deux tiers du livre traitent de <a href="http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/leadership/disk/russie2_index.htm">Staline</a>, maître du pays de 1924 à 1953, du pouvoir totalitaire, de la terreur, héritée de Lénine et amplifiée, qu’il infligea à son peuple — deux fois (déjà avant la guerre, puis à nouveau celle-ci terminée : la sanglante Seconde Guerre Mondiale paraît paradoxalement une époque de liberté pour les Soviétiques !), et de la permanence de certaines tendances de l’histoire russe, notamment le besoin d’un pouvoir central fort.</p>
<p>Le parallèle entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ivan_le_Terrible">Ivan le Terrible</a> et Staline ne date pas d’hier : le Tsar Rouge lui-même voyait dans la lutte impitoyable d’Ivan IV contre les boyards le parallèle avec son propre besoin d’éliminer toute opposition — jusqu’à l’absurde, jusque dans sa propre famille ! La mécanique de terreur stalinienne, basée sur l’espionnage généralisé, la responsabilité collective, le changement permanent de la Ligne, est bien démontée.</p>
<p>Quasiment en aparté, Fédorovski parle de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Boris_Pasternak">Boris Pasternak</a>, Prix Nobel de littérature 1958 et connu en Occident notamment pour le <em>Docteur Jivago</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> — on saura tout sur les amours du poète, et notamment <em>qui</em> est Lara. Bizarrement, Pasternak a été plutôt protégé par Staline.</p>
<p>Même si Poutine partage la couverture avec son sinistre prédécesseur, il n’est question de lui qu’à la toute fin du livre, après que Fédorovski ait déroulé la manière dont le système totalitaire soviétique (sous une forme bien moins sanglante) s’est perpétué sous Khroutchev, Brejnev, Andropov, comment il a tenté de se réformer sans lâcher son emprise, comment il a échoué. Remarquable aussi la manière dont les services secrets (outil sous Staline, entité autonome sous Andropov, quasiment indépendante par la suite) se sont retrouvés les seuls en mesure de reprendre le contrôle d’une Russie en décomposition, que Gorbatchev et Eltsine ont laissé être dépecée par des groupes financiers et mafieux.</p>
<p>Vladimir Poutine — un inconnu au départ, choisi par un Eltsine finissant comme héritier pour garantir la survie de son clan — faisait partie de l’élite de la Russie soviétique, destinée forcément au KGB. Ses contacts lui ont permis de reprendre le contrôle de son pays, et de surfer entre les différents clans qui se le partagent. Comme Staline, il sait parler à la fameuse « âme » de la Russie, à son nationalisme, son besoin de grandeur, son impression d’être différente, ni européenne ni asiatique. Comme Staline, les dérives sont effrayantes.</p>
<p>Un grand résumé d’histoire russe du XXè siècle, très accessible.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Je n’ai pas (encore) lu le livre mais vous </em>devez<em> voir le film si ce n’est déjà fait. Une bonne impression du chaos de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_civile_russe">Guerre civile de 1918-21</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/541L’échec du CRM ?urn:md5:7ec424ffc7df88aceae312b0054c99b22007-08-21T07:54:00+00:002011-04-25T21:12:44+00:00ChristopheInformatique lourdeadministrationanticonsumérismebase de donnéesbon senscommunicationcomplexitéCRMdommagedéshumanisationergonomieERPinformatiqueperspectivetravail<p>Grandeur et malheurs d’un <em>buzzword</em> adoré des vendeurs de logiciels.</p> <p>« Les clients se disent victimes des systèmes de GRC<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/08/21/366-l-echec-du-crm#pnote-70-1" id="rev-pnote-70-1">1</a>]</sup> » : l’article qui dénonce est ici :
<a href="http://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-les-clients-se-disent-victimes-des-systemes-de-grc-22970.html">http://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-les-clients-se-disent-victimes-des-systemes-de-grc-22970.html</a>.</p>
<p>Questions :</p>
<p>- Quelle est la part de l’enquête, et la part de l’envie de faire un titre un peu provocant de la part du journaliste ? Ou d’Accenture, qui a fait l’étude, et qui doit se demander quoi vendre après avoir fait l’apologie de tous les systèmes de gestion à la mode depuis un bout de temps ?</p>
<p>- On accuse le logiciel de dégrader la qualité des prestations de service au client, mais le logiciel est-il coupable quand le processus entier exige souvent des téléopérateurs et -vendeurs sous-traités et payés au lance-pierre qu’ils se comportent comme des robots et ne s’intéressent qu’à réduire au maximum la durée des appels (au pire), ou sont des petits jeunes sans expérience chargés de fourguer au client le maximum de produits (au mieux) ?</p>
<p>- Pour avoir vu fonctionner avec succès deux CRM d’assez près (support interne d’un service après-vente d’un fabricant d’électronique, et télévente de « matière première » à des professionnels de la restauration), je sais que le paramétrage d’un tel monstre est une entreprise titanesque. Les CRM sont <em>vraiment</em> flexibles, mais il faut beaucoup de réflexion et de temps. Évidemment, à l’autre bout, les besoins des clients sont infinis, donc jamais totalement couverts, et immédiats. Je me demande si ces trucs ne sont pas <em>trop</em> compliqués pour être totalement maîtrisés.</p>
<p>- L’une des plaies de notre société est le saucissonnage des tâches : un client a rarement le même interlocuteur de A à Z quand il a un problème, ce qui impose un système de suivi mais augmente les chances de « tomber au travers » et dépersonnalise la relation. Rien de logiciel là-dedans.</p>
<p>- La « relation client » est par définition la part la plus « humaine » de tout ce que peut faire une entreprise. Faut-il vraiment automatiser ça à fond ?</p>
<p>Bref, le problème est-il lié aux logiciels ou à la philosophie actuelle du service au client ?</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/08/21/366-l-echec-du-crm#rev-pnote-70-1" id="pnote-70-1">1</a>] <em>GRC est le tout aussi imprononçable équivalent français de CRM : </em>Customer Relationship Management<em> ou </em>Gestion de la Relation au Client<em>, au choix. Un concept très à la mode qui a fait la fortune des actionnaires de Siebel, SAP, Salesforce.com et consorts.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/08/21/366-l-echec-du-crm#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/70Baratin commercial à signal nulurn:md5:38eae7caca3b92a035c4858e8f0966342006-12-17T20:13:00+00:002014-02-26T11:00:48+00:00ChristopheGuerre au marketingabominationanticonsumérismecommunicationdommagedéfense du françaisdéshumanisationemmerdeursexpertisefoutage de gueuleincohérenceintelligencemèmemétainformationpanurgismeparadoxeperspectivepollutionprise de têteprovocationprécisionpsychologiesabotageSAPsaturationsignifiésurréalismevaleurvirtueléconomieéconomie de l’attention<p>Des gens payés cher en tartinent des sites web et pourtant ça ne veut <em>rien</em> dire.</p> <p>Un de mes défauts récurrents consiste à chercher systématiquement un sens aux textes que je lis, et à accorder bien plus d’importance à ce sens qu’à la manière dont il est formulé. Les belles formules <em>marketing</em> me hérissent, mon mauvais esprit y recherche automatiquement le mot creux, l’allusion mensongère, la récupération, le mensonge par omission, le vocabulaire-qui-en-jette-mais-ne-veut-rien-dire.</p>
<p>(Au passage, cela explique en quoi j’ai adoré <em><a href="https://www.coindeweb.net/lectures/liste_livres_lus.html#impostures_intellectuelles">Impostures intellectuelles</a></em> de Sokal et Bricmont. Aride mais jouissif.)</p>
<h3>Signal obscur mais pur</h3>
<p>En informatique, mon domaine, règnent les termes abscons et les acronymes incompréhensibles. Cependant ces derniers sont des abréviations de termes techniques précis : la compréhension de TCP/IP, FTP, ou SQL ne nécessite que l’effort d’une recherche sur Google, et pas un doctorat en scolastique médiévale, en psychanalyse du lapsus ou en sémantique des sociétés secrètes. <br />L’informaticien passe au contraire l’essentiel de son temps à expliciter sa pensée pour amener ce fichu ordinateur à enfin faire exactement ce que veut l’utilisateur final, et à supplier ledit utilisateur d’expliciter clairement et totalement son besoin. Le flou est source de bug, la qualité se juge au rapport signal/bruit.</p>
<h3>Quand les marketeux s’en mêlent</h3>
<p>Cependant, même en informatique, sévit le n’importe-quoi <em>marketing</em>, masquant par de jolis mots, de clinquantes marques, ou de profonds sigles, une absence de concret.</p>
<p>Dans le grand public, ont sévi par exemple le <a href="http://www.zdnet.fr/actualites/informatique/0,39040745,39338700,00.htm?xtor=200">Viiv</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#pnote-205-1" id="rev-pnote-205-1">1</a>]</sup>, dont je n’ai jamais compris ce qu’il était concrètement, apparemment à juste titre, le <a href="http://www.fredcavazza.net/index.php?2005/08/24/808-web-20-une-premiere-definition">Web 2.0</a>, concept assez fumeux acquérant déjà un sens péjoratif voire <em>has been</em>, le matraquage de Microsoft sur chaque peaufinage subtil d’Office depuis dix ans<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#pnote-205-2" id="rev-pnote-205-2">2</a>]</sup>, les slogans de compagnies, notamment le récent et prétentieux “<em><a href="http://www.hp.com/personalagain/us/en/index.html" hreflang="en">The computer is personal again</a></em>” pour de bêtes PC, etc.</p>
<h3>Zéro</h3>
<p>Mais on peut descendre encore plus bas : le <strong>degré zéro</strong> du signifiant, le <strong>bruit</strong>, dégagé même de la connotation symbolique ou « qui en jette » d’une formule bien enlevée ou d’une marque bien choisie. La tautologie pure. C’est courant en informatique d’entreprise où la concurrence est rude et le critère « pognon » primordial (impossible de jouer sur l’humour, le <em>design</em> ou de décorer la publicité avec des nymphettes de synthèse en bikini<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#pnote-205-3" id="rev-pnote-205-3">3</a>]</sup>).</p>
<p>Le site d’un certain petit fournisseur de logiciels d’entreprise (logiciel fort utile par ailleurs bien qu’inutilement complexe) contient le texte suivant :</p>
<blockquote><p>« <em>(Nom du logiciel)</em> dynamise les pratiques de facturation en proposant une solution qui améliore la rentabilité et la qualité du service à la clientèle. »</p></blockquote>
<p>Connaissez-vous un logiciel destiné à détruire la rentabilité ou à dégrader un service à la clientèle ?<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#pnote-205-4" id="rev-pnote-205-4">4</a>]</sup> Que veut dire réellement « dynamiser » ?</p>
<p>Une pub d’un gros constructeur de baies de stockage énonce fièrement : “<em>When information comes together, everybody feels much better.</em>” <br />Un gros consommateur de silicium fait dans le lèche-botte : “<em>What drives smarter technology is actually smarter customers.</em>” <br />(Exemples tirés d’un magazine américain, je ne connais pas la version francophone.)</p>
<p>Autre exemple, un <em>très</em> gros éditeur de logiciels d’entreprise européen<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#pnote-205-5" id="rev-pnote-205-5">5</a>]</sup>, dont les supports informatifs me donnent l’impression de lire sans comprendre un traître mot, un peu comme prononcer une langue étrangère sans en avoir le vocabulaire :</p>
<blockquote><p>“<em>With ...’s composition platform, you can deploy enterprise service-oriented architecture to increase your flexibility with innovative business solutions, leverage existing investments to deliver competitive advantage quickly, and consolidate technologies to lower TCO.</em>”</p></blockquote>
<blockquote><p>“<em>... is enhancing its market-leading governance, risk, and compliance (GRC) portfolio, which is based on a holistic approach to managing GRC. Three new applications will help ... solutions deliver more simplicity and increase GRC process and cost efficiency, accountability, and control.</em>”</p></blockquote>
<p>On saluera la haute concentration de <em>buzzword</em> par ligne de texte. Ce genre de rengaine émaille site, plaquette, CDs promotionnels. La cible est le <em>manager</em>, pas le développeur ; je ne suis pas dans la cible. La traque d’informations techniques précises peut être longue sur le site (ergonomiquement mal foutu).</p>
<h3>Message subliminal</h3>
<p>En fait je suis mauvaise langue. Le véritable message est à deux niveaux.</p>
<p>Le premier est une formulation pour <em>managers</em> de « <em>ce truc qu’on veut vous vendre est bien, il va vous faciliter la vie et vous rapporter un max de thune</em> ». <br />Le deuxième est sous-entendu : « <em>Vous voyez, on parle le même langage creux qui en jette que vos chefs, même si c’est de l’informatique</em> », et : « <em>Nous n’avons aucune originalité, ce ne sont pas des zazous barbus qui dirigent ici </em>».</p>
<h3>Pour du service</h3>
<p>Les sites des SSII et autres sociétés de service diverses sont dans le même cas :</p>
<blockquote><p>«<em> (Nom de la société) vous invite à partager le dynamisme d’une entreprise dont les projets n’ont d’égal que les conquêtes. Parce que demain se décide aujourd’hui, décidez-vous pour ....</em> »</p></blockquote>
<blockquote><p>« <em>S’appuyant sur une forte expérience des fonctions de l’entreprise et des processus métiers, (nos consultants) proposent aux maîtrises d’ouvrage et aux maîtrises d’œuvre une démarche de conseil structurée afin de prendre rapidement les bonnes décisions pour atteindre leurs objectifs. </em>»</p></blockquote>
<p>Là aussi un monceau d’évidences qui n’apportent aucun message. Il faut concéder aux entreprises du milieu qu’il est difficile de se démarquer les unes des autres au sein d’un même créneau, et que l’originalité est toujours un risque.</p>
<p>Ce qui ne veut rien dire des gens sur le terrain, un site « institutionnel » n’est jamais fait par ceux qui font le boulot. Il faut juste ne pas se faire d’illusion sur le contenu informatif. Je ne connais pas de société de service qui ose écrire : « <em>Nous sommes une société de service comme il en existe tant d’autres, spécialisée dans tel domaine. Nous serions très heureux de vous facturer nos prestataires pour n’importe quel projet ; nous trouverons leurs CVs sur Monster dès que notre commercial vous aura contacté et les embaucheront dès signature du contrat.</em> »</p>
<h3>Information nulle</h3>
<p>Il y a cependant encore pire : la face « ressources humaines » du site institutionnel de sociétés de service, destiné à attirer les <del>meilleurs</del> plus naïfs pour qu’ils viennent travailler dans ladite société. Un exemple parmi d’autres :</p>
<blockquote><p>« <em>Notre société a toujours placé « l’humain » au centre de ses préoccupations. Nous pensons qu’une entreprise se définit avant tout par les membres qui la composent, la représentent et lui donnent toute sa dimension. (...) Gestion individualisée des carrières, entretien annuel permettant d’effectuer un bilan sur l’année écoulée, plans de formation adaptés aux besoins de chacun... tout est mis en œuvre afin que de nos consultants se sentent reconnus au sein de notre organisation. (...)<br />Afin de maintenir un lien social essentiel au bon fonctionnement de ..., nous avons élaboré une politique de communication que nous souhaitons la plus efficace possible : des newsletters sont régulièrement adressées aux collaborateurs (...), des réunions mensuelles permettent de réfléchir ensemble à des problématiques projets, des séminaires d’entreprise sont organisés annuellement ainsi que des dîners ou des sorties.<br />Rejoindre ... c’est intégrer une équipe où chaque individu a sa place. </em> »</p></blockquote>
<p>Cette rengaine figure dans le baratin de <strong>toutes</strong> les SSII que je connais, sur le site, la plaquette ou dans la présentation orale lors de l’entretien de recrutement. Les connaisseurs du milieu des services savent donc qu’il s’agit d’un mélange de minimalisme (des <em>newsletters</em> : idéal pour « créer du lien » ! entretiens annuels : qui n’est pas censé les faire ? n’est-ce pas un peu léger ?) et de pipeau d’autre part (la mentalité « facturation et marge avant tout » annihile vite toute bonne volonté d’un chef de former au-delà du strict nécessaire).</p>
<p>(<strong>Mise à jour du 18 décembre</strong>) Pour bien signifier que cela ne veut rien dire, j’ai entendu des gens qui y travaillent dire beaucoup de bien de la société de service en question (paie, formation, ambiance...). Comme quoi même en négatif on ne peut se fier au verbiage !</p>
<h3>Non-baratin anti-commercial à bruit nul</h3>
<p>L’excès inverse existe, c’est celui du site d’un logiciel de et pour <em>geek</em> sans aucun texte de présentation sommaire, dont la première page est une liste de nouvelles dont la plus récente a six mois, et annonçant le support de la libgkxthml 3.42. À la rigueur une F.A.Q. disserte de subtils problèmes de compilation selon la version de <a href="http://gcc.gnu.org/" hreflang="en">gcc</a> ou de l’inscription à une liste de diffusion des développeurs.</p>
<p>Dans ce cas le rapport signal/bruit est infini, mais le signal lui-même est ténu...</p>
<div class="footnotes"><h4 class="footnotes-title">Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#rev-pnote-205-1" id="pnote-205-1">1</a>] <em><strong>Mise à jour de juin 2009</strong> : vous vous en souvenez ? Pas moi !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#rev-pnote-205-2" id="pnote-205-2">2</a>] <em>Si je ne voulais pas être accusé d’être un anti-Microsoft primaire, j’ajouterais <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/08/13/159-les-retards-de-vista">Vista</a>, dont le contenu a semblé très flou jusque récemment, et se révèle finalement réellement creux.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#rev-pnote-205-3" id="pnote-205-3">3</a>] <em>Courant dans les pubs pour cartes graphiques...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#rev-pnote-205-4" id="pnote-205-4">4</a>] <em>En dégât collatéral, peut-être, mais en tout cas pas vendu </em>pour ça.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#rev-pnote-205-5" id="pnote-205-5">5</a>] <em>Les habitués de ce blog savent de qui je veux parler.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/17/229-baratin-commercial-a-signal-nul#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/205Amusons-nous avec le télémarketing : l’article que j’aurais voulu écrire.urn:md5:1826a37501864b2a8b6abb7eb639bd342006-12-08T11:40:00+00:002009-07-04T14:34:32+00:00ChristopheGuerre au marketinganticonsumérismecommunicationcoup bascynismedommagedéshumanisationemmerdeursesclavagefoutage de gueulegaspillageguerrehainehowtolibertéoffshoreparanoïaperspectivepouvoir d’acheterprovocationpsychologierésolutionssabotageécologieéconomieéconomie de l’attention<p>Un guide pour lutter contre le harcèlement téléphonique.</p> <p>Je viens de découvrir cette perle de Raton laveur : <em><a href="http://ratonlaveur.free.fr/articles/telemarketing.html">Amusons-nous avec le télémarketing</a></em>. C’est presque exactement l’article que j’aurais voulu écrire sur le thème de ces <del>enfoir</del> gentils <del>parasit</del> commerçants qui vous <del>dérange</del> appellent pour vous <del>fourgu</del> proposer leur <del>mer</del> jolie marchandise <del>dont vous ne voulez pas</del> si pratique et utile.</p>
<p>Hors quelques idées de riposte en cas de coup de fil indésirable, et d’astuces pour repérer l’ennemi, l’article contient de judicieuses remarques sur les motivations et la personnalité <del>des pions</del> <del>des désespérés</del> de ceux qui vous appellent. En gros : pauvres hères qui ont besoin de manger, il faut les considérer comme des êtres humains et pourrir le système, et non leur vie, quitte à rajouter un peu de surréalisme dans leur existence.</p>
<p><a href="http://ratonlaveur.free.fr/editotaku/index.php?itemid=1105">Les commentaires sont possibles</a> (et intéressants).</p>
<p>À lire d’urgence !</p>
<p><em>(Merci à celui qui a indiqué le lien sur son blog, je regrette d’avoir oublié qui... Qu’il se dénonce s’il lit ceci.)</em></p>
<p><strong>Post-scriptum</strong> : Éric m’indique un <a href="http://blog.monolecte.fr/post/2006/12/04/Et-la-politesse-Bordel">autre lien très intéressant sur le sujet</a>, écrit par quelqu’un qui a connu le milieu, demande pitié pour les pauvres hères qui appellent, et continue sur notre société où chacun aime enfoncer plus malheureux que lui. Je suis d’accord pour ne pas confondre commanditaire et esclave, il n’empêche que le seul moyen de réduire cette nuisance est de rendre le système économiquement foireux, donc de faire en sorte que les personnes qui appellent ne décrochent <em>rien</em> - donc on leur fait perdre leur temps, fatalement.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/08/208-amusons-nous-avec-le-telemarketing-l-article-que-j-aurais-voulu-ecrire#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/186Ubu et réservation aérienneurn:md5:a1abf6cac1c2fd8ecee7a161e1198ed42006-11-14T11:37:00+00:002023-12-27T11:04:23+00:00ChristopheGuerre au marketingabominationanticonsumérismeargentbon sensbugchaoscommunicationcomplexitécynismedommagedysfonctionnementdécadencedéshumanisationemmerdeursfoutage de gueulegaspillageincohérenceinformatiquelibertémicroéconomiemèmeoptimisationorganisationperspectivepessimismepouvoir d’acheterprise de têteprovocationsabotagetravailvaleuréconomie<p>Le calvaire aérien d’une collègue, typique des travers de notre époque.</p> <p>Je dis toujours que les compagnies aériennes constituent l’illustration parfaite de la différence entre <strong>sécurité</strong> et <strong>fiabilité</strong> : s’il est effectivement très peu risqué de prendre un avion (bien moins que sa voiture ou son vélo), les chances d’arriver en temps et en heure sans une contrariété quelconque évoluent plus près de 50 % que de 99,999 %. <br />Je vole peu, pourtant j’ai déjà ma part d’histoires de vols annulés, retardés, pour raisons techniques ou sociales, plus souvent pour des bouchons sur les pistes (typiquement à Orly le vendredi soir). <br /><a href="http://www.lgv-est.com/">Vivement le TGV</a> (et je dis ça peu après une grève de la SNCF). (<strong>Ajout de 2010</strong> : Le TGV on l’a et c’est super, mangez-en !)</p>
<h3>Les différents intervenants</h3>
<p>Une collègue vient de nous raconter son calvaire. <br />Elle utilise une compagnie très connue pour les vols intérieurs (appelons-là, disons, Air Gaule). Notre employeur commun nous <del>demande</del> ordonne de commander tous nos billets (ferroviaires, aériens…) par une agence de voyages assez connue qui fait aussi dans les services financiers ; appelons-la Antarctic Express.</p>
<p>Le passage par cette agence de voyages permet apparemment de gagner 20 € sur le prix du billet. Quand je dis « gagner », c’est l’agence qui encaisse 35 € de frais, au lieu de 15 € par Air Gaule.<br />En échange, nous disposons d’un joli site web qui stocke nombre d’informations confidentielles à notre sujet, et nous refuse des vols qui ne couvrent pas la « politique voyage ». (Ce sont des interdictions du genre : « non, tu ne traverseras pas la moitié de la France en avion, faudrait le faire en train et y passer quatre fois plus de temps au total et payer une nuit supplémentaire à Lutèce. » Bon, les <em>bigs chefs</em> valident systématiquement la dérogation aux critères sans doute pondus par un acheteur à la Défense qui ne doit pas aller souvent en clientèle hors d’Île-de-France. Bref.)</p>
<h3>Clouée au sol</h3>
<p>À notre époque, les billets sont tous électroniques, en fait juste un numéro quelque part pour qu’à l’enregistrement il soit possible de retrouver notre trace dans l’ordinateur au cas où le vol, le nom et le numéro de la pièce d’identité ne suffisent pas. L’inconvénient est qu’il n’existe plus aucune garantie <em>physique</em> au client que son billet est valable.</p>
<p>La collègue en question a donc été fort marrie quand, après une longue queue devant le guichet, l’humeur maussade comme on l’est à six heures du matin après s’être levé à quatre, la charmante hôtesse<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> ne l’a pas trouvée parmi les passagers recensés par le Grand Serveur Central : l’agence n’avait pas transmis la réservation. <br />Adrénaline, queue au guichet vente, re-queue devant l’enregistrement, obligation de se contenter des dernières places (ni hublot ni couloir) si même il y a encore de la place, retard éventuel, etc.</p>
<p>Ce genre d’incident est pénible la première fois ; mais bosser dans l’informatique enlève toute illusion sur la fiabilité absolue de tout ce qui est électronique, et rend philosophe.</p>
<p>La deuxième fois c’est encore plus pénible.</p>
<p>La troisième fois, on se demande si on ne va pas lâcher l’agence de voyages<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.<br />Surtout quand, au moment de re-réserver le billet qui n’a jamais été transmis, on s’aperçoit que l’abonnement à Air Gaule a été bloqué pour un papier jamais arrivé, jamais transmis apparemment par l’agence de voyage. Air Gaule proteste de sa bonne foi en avertissant qu’ils ont averti l’agence de voyages… qui n’a jamais averti sa cliente.<br />Le paiement, lui, a bien été transmis.</p>
<p>(Au passage : cette même collègue s’est fait « ensacheter » deux dangereux bâtons de rouge à lèvre par les services de sécurité. Coup de chance, ils n’ont pas vu ses médicaments, elle n’avait pas l’ordonnance.)</p>
<p>La même collègue a rapporté le cas d’un autre utilsateur d’Antarctic Express, qui un jour manqua son vol départ pour une raison quelconque. Après s’être débrouillé seul pour prendre un autre vol (sur le même billet affaire donc décalable), et avoir fait ce qu’il avait à faire là où il allait, le malheureux a découvert à l’enregistrement la disparition de son voyage retour : informée de son absence au départ originel, l’agence avait annulé le retour.</p>
<p>Ces problèmes, paraît-il, n’existaient pas avec l’agence de voyage locale utilisée encore il y a quelques années. Ces gens-là n’avaient pourtant pas de centre d’appel continental avec des employés dressés comme des robots à lire leur script et à ne surtout pas prendre d’initiative, et qui changent à chaque contact. Comment diable pouvaient-ils être compétitifs ?</p>
<h3>Moralités</h3>
<p>Que le malheur des uns serve de leçon aux autres : ces exemples pointent un problème de plus en plus courant à notre époque. Ici on ajoute un <strong>intermédiaire qui est censé fournir les mêmes services que le fournisseur final</strong>. Il ne s’agit pas ici de cas où une agence de voyages vous mitonne un Dijon-Christchurch<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> <em>via</em> quatorze correspondances et huit compagnies, en choisissant parmi sept mille trajets possibles (rôle de courtier en quelque sorte), mais du cas très courant dans le métier de vols sur des lignes du principal opérateur national.</p>
<p>Intermédiaire inutile également car Air Gaule, non content de faire voler ses clients, fournit service web, centre d’appel, etc. <em>a priori</em> moins dysfonctionnels que tout intermédiaire puisque la compagnie a la maîtrise des machines et l’accès direct aux données et logiciels. (Quoique avec la vogue actuelle de décentralisation et filialisation, ce serait à vérifier…)</p>
<p>Bref, un cas typique de notre époque où <strong>les couches s’amoncellent, et les problèmes de communication (inévitables, même à l’époque d’Internet) vont avec la complexité du flux</strong>.</p>
<p>Bizarrement, la facturation ne tombe jamais en panne. Elle est même la seule à faire du zèle.</p>
<p>Je ferais volontier le parallèle avec <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/10/14/246-des-millions-de-lignes-a-travers-le-millefeuille">mes problèmes très techniques et très personnels de sabotage mutuel entre trois outils qui essaient tous les trois de faire la même chose</a>…</p>
<p>Pour finir, revenons à la justification de l’utilisation de l’agence de voyage : il paraît qu’en fonction du chiffre d’affaire généré avec elle, notre groupe encaisse une ristourne. Cette ristourne est invisible sur les avances de fonds que nous, petits consultants migrants, faisons<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup> (avances débitées après le remboursement des frais, à quelques jours près, si le secrétariat ne fait pas d’erreur et est alimenté en feuilles de frais suffisamment à temps). Elle est aussi invisible sur les billets à titre privé que nous serions tentés de commander <em>via</em> Antarctic Express. On pointe là un autre problème, celui de la <strong>séparation entre l’effort et le bénéfice</strong>. La conscience professionnelle et la volonté de réduire les coûts de son employeur ont leurs limites quand les contraintes s’accumulent et que les gains ne sont jamais, même symboliquement, partagés.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Je brode, c’était peut-être un très moche </em>stewart<em>.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>D’ailleurs elle a annoncé ne plus l’utiliser. Vue l’ambiance à l’agence, je ne pense pas qu’il y ait jamais de sanction pour cette violation des procédures.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Nouvelle-Zélande.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/11/14/270-ubu-et-reservation-aerienne#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Oui, dans ma <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/07/31/187-les-joies-de-la-ssii-1-angoisse-existentielle">SSII</a> </em>(c’était en 2006, mon nouvel employeur paie lui-même l’avion. - Note de 2007)<em>, nous devons avancer </em>tous<em> les frais de déplacement sur nos deniers personnels, </em>via<em> la carte de crédit à débit différée fournie par l’entreprise et débitée sur notre compte personnel. Cela implique surtout d’assumer les risques qui vont avec toute transaction quelle qu’elle soit.</em></p></div>
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