Blog éclectique & sans sujet précis - Mot-clé - nationalisme<p>Si ça me passe par la tête, si ça n’intéresse que moi, alors c’est peut-être ici. Ou pas.</p>2024-02-13T09:44:49+01:00L'éditeur est le propriétaire du domaineurn:md5:bf83720a7189bba489682d945b972671Dotclear« La Seconde Guerre Mondiale vue d'ailleurs » (Claude Quétel & co)urn:md5:5983bb4c0c678e0517867a40bedb620a2023-11-05T20:04:00+01:002023-12-30T11:27:59+01:00ChristopheHistoireAllemagneapocalypsecatastropheChinechristianismecommunismedilemmedémocratieEuropeGuerre Froideguerre saintegéographiegéopolitiquehistoireHistoire de Francelivres lusnationalismeperspectiveRussieSeconde Guerre MondialetempsÉtats-Unis<p>Il est toujours bon de faire un pas de côté quand on s’intéresse aux grands événements internationaux. Fatalement, nous portons tous un biais lié à l’histoire de notre pays et notre éducation. La Seconde Guerre Mondiale ne s’est pas limitée à l’Occupation, à la Shoah, au 6 juin et à Hiroshima. L’optique de chaque peuple est différente. Et parfois changeante.</p>
<p><a href="https://www.buchetchastel.fr/catalogue/la-seconde-guerre-mondiale-vue-dailleurs/"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.La_Seconde_Guerre_Mondiale_vue_d_ailleurs-Claude_Quetel_m.jpg" alt="La Seconde Guerre Mondiale vue d’ailleurs (Claude Quétel &amp; co)" class="media-right" /></a> Pour qui s’intéresse un peu au conflit (et ça pourrait être un lycéen), ce livre ouvre vraiment des perspectives. Même si on a fait l’effort de s’informer hors du monde franco-hollywoodien, on a peu l’occasion de savoir ce que pensaient Marocains ou Suédois des hostilités. Chaque chapitre traite d’un pays, par un auteur différent. Je me demande dans quelle mesure il est fiable de résumer si vite cinq ans (souvent plus) de la vie d’un pays dans ce genre de période, mais c’est bien plus que ce qu’on peut lire dans la plupart des livres et magazines d’histoire.</p>
<p><em>Comme d’habitude, j’essaie de résumer, mais l’italique est avis personnel.</em></p>
<h2>Maroc</h2>
<p>En 1939, le sultanat est un protectorat français (et espagnol dans le nord), et toute révolte contre l’ordre établi pouvait être durement réprimée (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_du_Rif">le Rif en sait quelque chose</a></em>). Le royaume reste pourtant fidèle à la France, fournissant nombre de soldats de valeur à la IIIᵉ République comme à la France Libre. Peut-être par intérêt bien compris : les Français partis, le pays risque de se faire dévorer par l’Espagne ou l’Allemagne… <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Nogu%C3%A8s">Noguès</a>, résident français d’Afrique du Nord, préfère rester fidèle à Vichy, mais le Maroc devient un refuge pour nombre de Juifs, et accueille favorablement les Anglo-Saxons qui débarquent en 1942.</p>
<p>Cette fidélité est mal récompensée : les demandes d’accès à l’indépendance totale après la guerre sont impitoyablement rejetées et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Protectorat_fran%C3%A7ais_au_Maroc#Manifeste_de_l'ind%C3%A9pendance_(1944)">il faudra l’attendre jusque 1956</a>.</p>
<h2> Égypte</h2>
<p>Le royaume est indépendant depuis 1922 mais le protectorat britannique n’est pas tout à fait terminé. Le Canal de Suez est une artère vitale de l’Empire britannique sur la route de l’Inde, il ne doit pas tomber. L’élite égyptienne, cosmopolite et occidentalisée, est partagée entre Axe (y compris apparemment le roi Farouk) et pro-britanniques : mais ces derniers sont-ils encore en mesure de protéger l’Égypte ? Officiellement l’Égypte reste neutre, mais bienveillante envers les Britanniques, et les Allemands sont internés. Puis les villes se prennent assez de bombes allemandes pour provoquer des paniques. Les militaires égyptiens n’ont qu’un rôle de supplétifs dans les opérations : les Britanniques se méfient d’eux, et ne leur ont vendu aucun équipement moderne.</p>
<p>Une fois Rommel écarté, la paix revient, et le roi Farouk prépare l’indépendance totale. L’Égypte fait partie de ces nations qui n’ont déclaré la guerre à l’Allemagne en 1945 que pour compter parmi les fondateurs des Nations-Unies.</p>
<h2> Suède</h2>
<p>Neutre pendant toute la guerre, la Suède n’a peut-être pas soldé son passé de collaboration avec l’Allemagne nazie. Certes, en 1940-45, cerné de toute part par l’Axe, traumatisé par les privations pendant la guerre précédente malgré sa neutralité, le pays n’a pas trop le choix. Les nazis continuent à profiter pendant toute la guerre du fer ou des roulements à bille suédois (ces derniers sont d’ailleurs vendus aux deux camps).</p>
<h2> Suisse</h2>
<p>Neutre et cernée elle aussi, la Suisse a toujours clamé que son indépendance a été préservée grâce à son armée toujours prête. Pour Irène Herrmann, c’est une légende : les qualités militaires de la Suisse sont des conséquences de sa pauvreté originelle, et les Nazis n’auraient fait qu’une bouchée d’elle.</p>
<p>Mais les Allemands n’y pensent pas sérieusement, puisque l’économie suisse fonctionne essentiellement pour l’Allemagne, et les banques sont accommodantes dans leurs prêts. Les représailles anglo-saxonnes sont puissantes (gel des avoirs aux États-Unis…), mais par la suite les nécessités de la reconstruction et de la Guerre Froide font oublier cette page peu glorieuse.</p>
<h2>Irlande</h2>
<p>Pays pauvre tout juste sorti de sa guerre d’indépendance et d’une guerre civile, encore aux prises avec l’IRA, l’Irlande fait le choix d’une neutralité totale. Malgré la pression des Anglais, et encore plus des Américains, le pays refuse toute collaboration… officielle. La population (comme le président Valera) reste de fait favorable aux Alliés, et les Allemands n’arrivent jamais à exploiter la rancœur envers les Britanniques. Des dizaines de milliers de volontaires rejoignent même les forces britanniques. Économiquement, le pays souffre beaucoup.</p>
<h2>Canada & Québec</h2>
<p>Indépendant mais toujours fidèle à la couronne britannique, le Canada la suit dans la guerre. Caroline D’Amours nous sort beaucoup de chiffres pour montrer que le Québec, connu pour avoir été très réticent envers la conscription, a fait sa part. Une bonne partie de la retenue québécoise tient au fossé linguistique que doivent franchir les francophones. Pendant la guerre, le Québec, comme une bonne part du Canada, devient une gigantesque usine de chars et munitions pour l’Empire britannique.</p>
<h2>Australie</h2>
<p>Pays-continent, à l’identité toute fraîche trempée dans le sang pendant la Première Guerre Mondiale, et indéfendable, l’Australie se sait liée au Royaume-Uni pour sa défense, et lui est donc fidèle. Si l’engagement militaire reste faible au début, la menace japonaise devient palpable dès la chute du « verrou de Singapour ». On sait à présent que les Japonais ont vite renoncé à envahir l’Australie, ayant déjà assez de ressources (et de problèmes) après la prise de contrôle de l’Indonésie et de la Nouvelle-Guinée.</p>
<p>Se tournant bien sûr vers les Américains, le pays devient une gigantesque base arrière de la Guerre du Pacifique, non sans quelques soucis de cohabitations : chez sept millions d’Australiens conservateurs débarquent pas moins d’un million de jeunes soldats américains « <em>overpayed, oversexed and overhere</em> » (à la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Battle_of_Brisbane">bataille de Brisbane</a>, il n’y avait pas de Japonais.)</p>
<p>L’Australie fait partie des rares pays sortis renforcés du conflit.
L’impact sur le pays est profond : modernisation, renforcement des liens avec les États-Unis, ouverture à l’immigration non-anglo-saxonne, puis non-européenne, pour renforcer la population.</p>
<h2>États-Unis</h2>
<p>Le chapitre expose surtout l’évolution de l’isolationnisme américain. Si les Américains n’ont effectivement aucune envie d’envoyer les <em>boys</em> à nouveau se faire tuer en Europe, les Nazis n’y acquièrent jamais aucune sympathie, et Roosevelt n’a pas trop de mal à faire des États-Unis l’arsenal (et le banquier !) de la Grande-Bretagne. En partie parce que la prospérité de l’Amérique se base encore sur la sécurité des mers assurée par la marine britannique, et la chute de ce dernier est donc inenvisageable ; mais aussi et surtout à cause des liens culturels ; enfin à cause des souffrances des Britanniques (les Chinois bénéficient de la même sympathie). Et l’industrie de l’armement se met à recréer beaucoup d’emplois.</p>
<p>Sans aller jusqu’à la guerre, les Américains avancent leurs pions : les débarquements au Groenland et en Islande visent à sécuriser les routes atlantiques, pleines de sous-marins allemands pas encore ennemis. Washington utilise aussi largement les menaces de blocus, et la tension monte ainsi avec le Japon à cause de son invasion de la Chine, puis de ses visées vers les possessions européennes en Asie, devenues sans défense en 1940. Le Japon fait l’erreur monumentale d’attaquer les États-Unis aux Philippines (Pearl Harbor n’étant qu’un raid pour couler la flotte). Churchill craint un temps que cela ne distrait les ressources américaines vers le Pacifique mais Hitler prend la décision assez étonnante de déclarer lui-même la guerre aux États-Unis. Ceux-ci, s’étant fait forcé la main, peuvent jeter tout leur poids dans la guerre.</p>
<h2>URSS</h2>
<p>Les régimes autoritaires adorent détourner l’Histoire, et les régimes totalitaires la réécrivent. Si le rôle majeur de l’Union Soviétique dans la destruction du nazisme a longtemps été rabaissé en Occident pour cause de Guerre Froide, et réévalué depuis, les évolutions n’ont jamais cessé dans le monde (ex-)soviétique.</p>
<p>Évidemment, pendant la guerre, il est dangereux pour quiconque de faire mention du faustien Pacte germano-soviétique ou de la purge des généraux avant-guerre. Cela reste valable après la guerre. Mais il y a une progression entre l’époque stalinienne, tenant à marquer le génie de Staline, à ne pas honorer les anciens soldats, et à nier l’intérêt des livraisons occidentales (par exemple la moitié des camions de l’Armée Rouge, entre autres…), et la détente sous Khroutchev (qui, lui, avait fait la guerre aux premières loges, comme son successeur Brejnev) : le jour de la Victoire redevient férié, et les anciens combattants sont mis en valeur.</p>
<p>Sous Poutine, la Grande guerre patriotique devient un des piliers du rassemblement de ce qui reste de la Russie en ruine autour de son nouveau chef, thème utilisé jusqu’à l’absurde en 2022 quand il déclare vouloir dénazifier une Ukraine dirigée par un Juif. Il n’est pas impossible que l’occultation, voire la négation du sort particulier réservé aux Juifs par les Allemands joue un rôle : pour les Soviétiques, c’est le peuple entier qui a (énormément) souffert, il est hors de question qu’il y ait quelque particularisme.</p>
<h3>Les Juifs en Russie</h3>
<p>Un chapitre s’étend sur le sort des Juifs côté soviétique. Les Allemands à l’est ne s’embarrassent d’aucune précaution pour masquer leurs charniers, et les liquidations massives commencent dès le début de la conquête de l’URSS, avant le choix définitif de la Solution finale. Vue l’ampleur de la tâche, les populations locales sont enrôlées, au moins pour la logistique et combler les fosses. Les Allemands sont bien accueillis, et les pogroms spontanés, dans nombre d’endroits victimes récentes du stalinisme (Ukraine affamée, États baltes annexés…), renommé « judéo-bolchevisme ».</p>
<p>Staline est donc parfaitement au courant de l’ampleur de l’extermination, mais ne la met pas spécialement en avant : les Juifs sont noyés parmi beaucoup d’autres victimes, et il n’est pas question de faire des Juifs des martyrs plus que les autres, surtout quand des Soviétiques sont complices. D’un autre côté, les massacres servent à mobiliser la communauté juive à l’étranger (États-Unis en tête) au profit de l’URSS. Un premier comité juif créé en 1942 est envoyé au goulag car trop international, et le Kremlin en recrée un autre. Promoteur de la culture juive, il récolte de l’argent à l’étranger.</p>
<p>La libération progressive du territoire révèle les charniers et rend la Shoah palpable, mais fait aussi ressortir les compromissions… et l’antisémitisme, y compris au sommet. L’URSS, devenue un Empire dont la victoire s’est basée sur le nationalisme, n’a plus besoin de Juifs. Dès la fin de la guerre, Staline étouffe tout, la parution du <em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Livre_noir">Livre noir</a></em> (une compilation de témoignages) est annulée, les membres du comité sont exécutés en 1952. Il n’y aura pas de monuments commémoratifs sur les charniers. Lors de la perestroïka, les Russes ont d’autres sujets de réflexion et d’autres chats à fouetter. Puis Poutine réinstrumentalise la Grande Guerre Patriotique, qui n’a pas besoin de victimes juives. Les anciennes républiques soviétiques rebâtissent souvent leur identité en réaction au communisme sans place particulière pour leurs Juifs.</p>
<h2> Mers el-Kébir</h2>
<p>L’attaque de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_de_Mers_el-K%C3%A9bir">Mers el-Kébir</a> (en Algérie française) a fait couler beaucoup d’encre depuis juillet 1940 : Churchill ordonne alors à sa flotte de couler la partie de la flotte française qui y est stationnée, de peur qu’elle ne passe aux mains des Allemands. Avant l’armistice, Darlan avait promis aux Anglais que la flotte passerait dans leur camp, ou au pire se saborderait. Mais il se fait acheter par Vichy. Certes, la flotte n’est effectivement pas livrée aux Allemands et se saborde en 1942. Mais qui en a la garantie en juillet 1940 ?</p>
<p>Bernard Costaglia apporte quelques nouveaux éléments aux débats : Churchill ne suit pas juste ce qui est devenu la version officielle (trahis par Darlan, épouvantés par l’idée d’une flotte française alliée aux nazis, les Anglais choisissent à regret la plus sûre solution). Entrent en compte le besoin d’infliger un revers, même indirect, à l’Axe ; de marquer la résolution britannique à un moment où le pouvoir de Churchill n’est lui-même pas si assuré ; le fait qu’il faut un an pour former l’équipage si les Allemands mettent la main sur les navires (à l’appui, un document de Churchill de… la guerre précédente) ; le message ainsi envoyé aux Américains (message reçu) qu’il est critique qu’ils livrent des navires ; peut-être le besoin de punir les Français ; voire de les vexer pour qu’ils réinvestissent dans leur armée, même vichyssoise. Mais encore : l’occasion est unique pour frapper. Les navires sont en position de faiblesse à ce moment, alors qu’à long terme, si l’Angleterre veut poursuivre le blocus du continent, une bataille est inévitable. L’encre n’a pas fini de couler.</p>
<h2>Italie</h2>
<p>L’Italie n’a pas gagné une grande bataille de toute la Seconde Guerre Mondiale. Le chapitre redore le blason des troupes italiennes, qui ne se rendent pas sans combattre, et qui sauvent parfois les fesses de Rommel en Afrique. Lequel Rommel leur impute en retour certains de ses échecs.</p>
<p>Mais le problème fondamental de l’Italie est au sommet : Mussolini, velléitaire, voit beaucoup trop grand, veut recréer un Empire, et agit sans coordination avec son allié (qui ne fait pas grand cas de lui), allié vite devenu protecteur suite à toutes ces mauvaises décisions. En effet : déclarer la guerre aux Alliés en 1940, c’est couper Somalie et Éthiopie de la métropole (et la reconquête alliée commencera par là en 1941). L’attaque sur la Grèce vire à la catastrophe, Hitler doit intervenir. (<em>C’est un succès, mais Barbarossa est retardé : Mussolini a peut-être sauvé Moscou.</em>) Rebelote en Égypte.</p>
<h2>Pologne</h2>
<p>S’il y a un État au centre des « terres de sang » de cette période, et victime des deux totalitarismes, c’est bien la Pologne. Attaqué par le Reich et l’URSS en même temps, à nouveau dépecé, le pays voit ses élites liquidées, sans parler des Juifs. La Résistance culturelle tente de préserver l’éducation, mais politiquement les succès sont très limités. Le gouvernement en exil est impuissant.</p>
<p>L’insurrection désespérée du ghetto de Varsovie en 1943 est un acte de désespoir, et l’insurrection de Varsovie en 1944 mène à la destruction de la ville et de la Résistance par les Allemands, au plus grand profit des Soviétiques qui ne lèvent pas le petit doigt. Les Alliés ne peuvent rien faire quand Staline installe son propre gouvernement polonais, vassalise peu à peu le pays, et décale ses frontières arbitrairement.</p>
<h2>Vatican</h2>
<p>Le comportement du pape Pie XII (élu en 1939) face au nazisme continue de faire débat. Pie XI dénonce l’attitude du régime nazi en 1937, mais son successeur fait partie de ceux qui espère préserver la paix et il ne s’exprime pas ouvertement. La principale raison de la prudence de Pie XII est sans doute la crainte de représailles sur les millions de catholiques allemands (raison pour laquelle il essaie plus tard de modérer les Alliés qui rasent l’Allemagne jusqu’à obtenir une reddition sans condition). Il est clair que ce choix l’a tourmenté.</p>
<p>La guerre ne modifie pas la tradition de neutralité de l’Église, qui se veut universelle, médiatrice, et pourvoyeuse de secours. Les chrétiens sont dans chaque camp, et sont censés obéir à leur gouvernement local. Le Saint-Siège s’est toujours accommodé des régimes autoritaires s’ils respectaient les catholiques, et toujours mal vu les régimes libéraux, bien qu’encourageant la démocratie en 1945. Évidemment, il abhorre le communisme et l’URSS depuis longtemps. Mais Pie XII ne croit pas que Hitler soit un rempart contre Staline, et refuse d’approuver la croisade nazie contre le bolchevisme. Et tant mieux si ces deux maux s’annihilent mutuellement.</p>
<p>Cette guerre est différente des précédentes par son idéologie et son ampleur, et des pressions pour prendre partie pour les Alliés se font jour dans l’Église même, par exemple chez les jésuites. Bien informé sur les massacres de Juifs, Pie XII n’en parle timidement que dans deux discours en 1942 et 1943, sans consigne ferme aux fidèles. Il laisse la responsabilité d’agir aux épiscopats locaux. Face aux persécutions contre les Juifs dans des pays très catholiques comme la France de Vichy ou la Hongrie, l’Église est juste résignée et fait peu. L’antisémitisme traditionnel a évidemment joué plus ou moins consciemment, avant comme pendant la guerre.</p>
<h2>Pacifique & Japon</h2>
<p>1941 marque la bascule de la guerre européenne vers une guerre mondiale. Frank Michelin remarque que l’indépendance de l’Indochine française, et de nombre d’États de la région, fait suite à l’invasion japonaise. C’est en Asie du Sud-Est que les conséquences politiques de la guerre sont les plus radicales.</p>
<p>Chaque pays voit cette face du conflit selon prisme. Pour les Japonais il y a la guerre de quinze ans (d’abord contre la Chine dès 1931), dont la seconde partie est la guerre d’Asie-Pacifique. La « grande guerre européenne » est plutôt un conflit séparé qui ne les a pas concernés.</p>
<p>L’expansion japonaise aux dépens de la Chine débute avec l’annexion de la Corée puis Taïwan en 1894. À partir de l’invasion de la Mandchourie, la guerre est permanente. Les Japonais occupent la plupart des zones peuplées mais le gouvernement chinois (provisoirement allié aux communistes) ne s’avoue jamais vaincu, et la Chine est gigantesque. Rediriger l’expansion vers la Sibérie n’est plus une option après la raclée de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Khalkhin_Gol">Nomohan</a> en 1939 face aux Soviétiques.</p>
<p>Pour étouffer la Chine, le Japon lance un blocus et fait pression pour occuper l’Indochine de Vichy, sans défense et forcée d’obéir. Ce mouvement vers le sud menace directement Singapour et l’Inde, perles de l’Empire britannique.
Les États-Unis menacent de sanctions (pétrole…) potentiellement mortelles. L’Indonésie (elle aussi sans défense depuis l’invasion des Pays-Bas) devient donc une cible majeure, qui implique de renforcer le contrôle de l’Indochine, voire d’affronter les Britanniques (protecteurs de l’Indonésie mais sur la défensive face aux Allemands), voire les États-Unis (propriétaires des Philippines et alliés inconditionnels des précédents).</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px.png" title="Expansion du Japon 1937-42"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.GM2-Japon_1937-1942-CCSA4_via_Wikimedia-1280px_m.png" alt="Expansion du Japon 1937-42" class="media-right" /></a>Le processus de décision japonais est peu clair et résulte de nombreuses luttes d’influence entre armée et marine, voire de faits accomplis de généraux locaux. Finalement, l’option choisie continue la fuite en avant : attaque de Singapour, des Philippines, et raid sur Pearl Harbor, en espérant sécuriser assez de ressources et de territoires avant la contre-attaque anglo-saxonne.</p>
<p>Les Japonais vont effectivement conquérir en six mois un espace immense, des frontières indiennes aux Aléoutiennes.
S’ils sont des occupants brutaux, ils détruisent l’ordre occidental, pour le plus grand profit des indépendantistes locaux. Les Européennes ne réussiront pas à reprendre le contrôle après-guerre. En Chine, les communistes profitent de l’épuisement des troupes nationalistes pour prendre le pouvoir.</p>
<h2>Chine</h2>
<p>Le point de vue chinois est bien sûr focalisé sur la guerre de quinze ans contre le Japon, fondateur devenu un mythe fondateur de la Chine actuelle.</p>
<p>En 1900, le pays est en déliquescence depuis des décennies face aux Occidentaux. Puis le Japon annexe Taïwan et la Corée, et enfin le sud de la Mandchourie après avoir évincé les Russes en 1905 (première grande défaite d’une puissance blanche).
La République chinoise s’enfonce dans une guerre civile avec les communistes. L’invasion complète de la Mandchourie survient en 1931, sur une initiative des nationalistes japonais de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arm%C3%A9e_japonaise_du_Guandong">armée du Kwantung</a>. Les Japonais rêvent d’une alliance contre les Soviétiques mais Staline soutient plutôt l’union sacrée qui apparaît en Chine. En 1937, une nouvelle attaque japonaise va jusque Shangaï et Nankin.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/GM2/.Japanese_Occupation_1940-US_Army_via_Wikimedia-dompub_s.png" alt="Carte de l’occupation japonaise en Chine, 1940" class="media-right" /></a></p>
<p>Les crimes de guerre systématiques (le massacre de Nankin étant l’éternel symbole) n’ont pas raison de la résistance chinoise. Le nombre pur, et le soutien anglo-saxon ou soviétique, ne compensent toutefois pas le dénuement de l’armée chinoise. Sa façade maritime occupée, la Chine ne peut recevoir de soutien que par l’Indochine et la Birmanie, nouvelles cibles du Japon (voir ci-dessus). La guerre monte en intensité. L’URSS n’aide plus la Chine dès 1941 (elle signe un traité de non-agression avec le Japon pour couvrir ses arrières face aux nazis) mais l’aide américaine s’intensifie (« Tigres volants », pont aérien depuis la Birmanie).</p>
<p>Communistes et nationalistes mènent séparément la guerre contre le Japon. À la capitulation japonaise et au départ précipité des occupants, la guerre civile reprend jusque 1949. Toutes ces guerres coûtent environ vingt millions de morts, très majoritairement des civils.</p>
<p>La Chine ne recommence à exploiter la corde nationaliste, mémorielle et anti-japonaise qu’à la fin des années 80, à l’effondrement du bloc soviétique. Le manque de remords officiels du Japon envenime les choses. Xi Jinping appuie à fond sur le nationalisme, l’exploitation de la Seconde Guerre Mondiale, où le rôle de la Chine a été sous-évalué (première victime en taille et durée et enlisement du Japon), et la victimisation (un siècle d’humiliation). Le pouvoir déforme le rôle du Parti communiste (secondaire pendant contre le Japon) et les souffrances des autres pays. D’autres sons de cloche émergent cependant. Mais même entre les autres pays de la zone, une mémoire transnationale du conflit a du mal à émerger.</p>
<h2>Allemagne & dénazification</h2>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5.png" title="Division de l'Allemagne vaincue, 1945"><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/histoire/.Map-Germany-1947-Wikipedia-52_Pickup-CC-BY-SA-2.5_s.png" alt="Division de l'Allemagne vaincue, 1945" class="media-center" /></a></p>
<p><em>Der Fragebogen</em> est le succès de librairie allemand de 1951, sur le questionnaire que tous les ouest-allemands ont dû remplir sur leur activité sous le nazisme : un monument de déni (par un auteur d’extrême-droite (<em>comme par hasard !</em>))), réduisant le soutien nazi à celui de la classe dirigeante, et mélangeant camps d’internement américain et de concentration. Sans aller jusque là, l’Allemand de base trouve vite que la dénazification s’attaque aux petits et laisse filer les gros, et la perçoit comme une justice des vainqueurs.</p>
<p>Dans l’après-guerre, la dénazification ne peut être qu’imparfaite. Les dirigeants, les politiques, les membres de la Gestapo, les SS partent immédiatement au trou, mais trop de gens ont participé à l’administration du IIIè Reich, sa justice et sa politique criminelle pour les arrêter tous. À peu près tout le monde, de gré ou de force, a fini dans une organisation nazie. Le but principal des Alliés est que le retour de la démocratie ne soit pas sapé par des nazis restés à des postes-clés politiques ou économiques. L’interdiction des organisations, l’annulation de nombreuses lois, sont la partie facile. L’expérience américaine de « défascisation » en Italie depuis 1943, ou celle de l’épuration en France, sert. Les gouverneurs des quatre zones d’occupation sont chargés de l’exécution de mesures prises en commun, mais chacun fait un peu à sa sauce.</p>
<h3>À l’ouest</h3>
<p>Arrive donc le fameux questionnaire pour juger du niveau d’implication de chacun (chez les Américains, car les Britanniques ont plus ciblé) : coupable principal, compromis/bénéficiaire, moins compromis, simple suiveur, exonéré ? La masse à traiter implique que les Allemands se jugent au final souvent entre eux, avec compréhension. Le contexte de Guerre Froide naissante, comme le chaos économique, font passer l’épuration politique second plan. Des nazis encartés écopent de peines légères car économiquement nécessaires, au lieu d’être condamnés à finir leur vie comme manœuvre. Les plus jeunes et les suiveurs les moins riches, ou les prisonniers de guerre, sont rapidement amnistiés d’office. Le système est aussi perverti par les <em>Persilscheine</em>, attestations de bon comportement, souvent réciproques entre connaissances. Tout le monde a sa justification pour avoir plus ou moins suivi (mais pas plus !) le Führer.</p>
<p>Les Églises freinent aussi des quatre fers : une épuration trop massive gênerait la rechristianisation de l’Allemagne. Les partis politiques voient aussi un vivier d’électeurs dans tous ces dénazifiés plus ou moins repentis, qui se considèrent plutôt comme des escroqués et donc des victimes. En 1950/51, la nouvelle République Fédérale rouvre les portes des administrations à presque tout le monde. L’Allemagne fédérale voit sa dénazification comme un échec relatif, mais au moins sa culture politique a-t-elle été rebâtie.</p>
<h3>À l’est</h3>
<p>Les communistes ont la main beaucoup plus lourde et déportent jusqu’en URSS. C’est aussi le moyen de mettre le pays politique au pas. Mais là aussi l’épuration s’arrête vite par besoin de main d’œuvre.</p>
<h2>Du souvenir de cette guerre</h2>
<p><em>C’est un fil rouge : le souvenir de la guerre dépend des pays, y compris relativement aux autres conflits.</em></p>
<p><em>Si pour les Américains la Seconde Guerre Mondiale est d’abord celle du Pacifique et de la reconquête de l’Europe de l’Ouest, les Russes ou les Chinois ont des perspectives très différentes,marquées par la ligne variable du Parti. Les Suédois et les Suisse préfèrent regarder ailleurs. Les Australiens restent plus marqués par la Première Guerre Mondiale, où ils eurent beaucoup plus de victimes et participèrent à des batailles majeures.</em></p>
<p><em>À l’inverse, l’Allemagne a été totalement traumatisée par l’anéantissement qu’elle a subi, et la mémoire allemande me semble plus tournée vers le long cauchemar du front russe et les derniers mois de guerre que par la Première Guerre Mondiale, la Normandie ou les victoires des débuts.</em></p>
<p><em>Manquent forcément quelques pages : il y aurait beaucoup à écrire sur l’ex-Yougoslavie (avec ses conséquences jusque dans les années 90), les États baltes, la Finlande, l’Afrique (exploitée par les Alliés), la Syrie, l’Irak ou l’Iran…</em></p>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-Seconde-Guerre-Mondiale-vue-d-ailleurs-Claude-Qu%C3%A9tel-co#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/873« Le monde d'hier » de Stefan Zweigurn:md5:f41a7b4cef6d81753e0a4bee446e679c2021-07-31T15:16:00+02:002023-03-13T10:52:49+01:00ChristopheSur mes étagères alourdiesabominationAllemagneapocalypseautodestructionAutrichecataclysmecatastrophechaoscivilisationculturediscriminationdécadencedémocratiedéshumanisationguerregéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmulticulturalismemémoirenationalismeperspectivePremière Guerre MondialeracismeSeconde Guerre Mondialetempstotalitarisme<blockquote><p><em>Und ich mußte immer an das Wort denken, das mir vor Jahren ein exilierter Russe gesagt: »Früher hatte der Mensch nur einen Körper und eine Seele. Heute braucht er noch einen Paß dazu, sonst wird er nicht wie ein Mensch behandelt.«</em></p>
<p>
Et je me souviens toujours de ce mot, que m'avait dit un exilé russe, des années auparavant : « Autrefois l'homme n'avait qu'un corps et une âme. Maintenant il lui faut encore un passeport, sinon il n'est pas traité comme un homme. »</p>
<p>
<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Stefan_Zweig" hreflang="fr" title="Stefan Zweig : page Wikipédia">Stefan Zweig</a></em>, Die Welt von Gestern. Erinnerungen eines Europäers</p></blockquote>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-vers_1912-via_Wikipedia.png" alt="Stefan Zweig vers 1912 (via_Wikipedia)" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Stefan Zweig était de ces Européens d'avant l'heure, cosmopolites d'avant la Première Guerre Mondiale, voyageurs sans passeport, passeurs de la culture entre les pays et à travers les langues, et qui, hommes déjà mûrs, ont vu s'effondrer leur monde dans la haine, les mouvements de masse, les frontières, l'exil, la guerre. <em>Le monde d'hier</em> est le testament de Zweig, rédigé juste avant son suicide en 1942.</p> <p>Certes son « monde d'avant » était privilégié : la jeunesse dorée d'une capitale impériale, polyglotte, avide de littérature, de théâtre, de musique, d'art. S'il décrit la Vienne d'avant 1900 comme conservatrice et trop respectueuse de l'âge, il appréciait l'ambiance de son époque : la stabilité, le progrès en marche, l'amélioration progressive de la condition de tous, l'avenir sûr et radieux. Les grandes guerres du XIXè siècle étaient déjà loin, les sociétés évoluaient, dans un Empire presque millénaire.</p>
<p>Cette vitalité et cette confiance furent un piège (à ajouter au dossier de <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark">Sleepwalkers</a></em>) :</p>
<blockquote><p><em>Jeder Staat hatte plötzlich das Gefühl, stark zu sein und vergaß, daß der andere genauso empfand, jeder wollte noch mehr und jeder etwas von dem andern. Und das Schlimmste war, daß gerade jenes Gefühl uns betrog, das wir am meisten liebten: unser gemeinsamer Optimismus.</em></p>
<p>
Chaque État avait soudain le sentiment d'être fort, et oubliait que les autres se sentaient de même ; chacun en voulait encore plus, et chacun quelque chose de l'autre. Et le plus grave est que c'est justement ce sentiment que nous aimions le plus qui nous abusait : notre optimisme à tous.</p></blockquote>
<p>Effaré, Zweig voit tous ses amis happés par l'hystérie collective nationaliste.
Incapable de voyager loin, militairement « planqué », il collabore en Suisse à un collectif d'écrivains européens contre la guerre, conscients de parler dans le vide.</p>
<p>Il assiste aux derniers instants de l'Autriche impériale, en croisant l'Empereur Charles de Habsbourg en exil à la frontière suisse.
De Salzbourg, il assiste au chaos économique, au bouillonnement culturel et au complet renversement des valeurs de la nouvelle Autriche — le seul pays que l'on ait jamais forcé à être indépendant.</p>
<p>Les Années Folles se passent mieux (c'est au tour des Allemands de souffrir économiquement). Son succès littéraire déjà naissant avant guerre se renforce.</p>
<p>S'impose progressivement Hitler, que personne en Autriche ne voit venir. En Allemagne, son ami l'homme politique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walther_Rathenau" hreflang="fr" title="Walter Rathenau sur Wikipédia">Rathenau</a> est assassiné. Les chemises brunes sèment le chaos. L'ordre moral et légal, les bases de la société, que même la Première Guerre Mondiale avait à peu près préservées : tout cela s'envole. Sous l'unité de façade du pays face à la menace, Zweig sait que beaucoup, par peur ou prudence, sont déjà préparés à l'Anschluß.</p>
<p>Zweig est un des premiers à fuir, bien avant le rattachement au IIIè Reich. Pour en ajouter aux pertes matérielles (livres, collections) ou immatérielles (amis, famille), il est déchu de sa nationalité en 1938 : il se retrouve apatride. Ce qui semblait un rêve pour un citoyen du monde se transforme vite en cauchemar administratif.
En Autriche, sa vieille mère mourante n'a même plus le droit de se reposer sur un banc lors de ses promenades : interdit aux Juifs.</p>
<p>En Angleterre, impossible de convaincre ses interlocuteurs que la perte de l'Autriche entraînera la chute de toute l'Europe. Zweig assiste à l'euphorie à l'annonce des accords de Munich, et à la consternation rapide quand la population réalise que tout a été abandonné à Hitler. L'ambiance se plombe, la guerre s'annonce, certaine.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26.jpg" title="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Stefan_Zweig-Le_Petit_Parisien-1942-02-26_m.jpg" alt="Le Petit Parisien, 26 février 1942 (via Wikipédia)" style="display:table; margin:0 auto;" /></a></p>
<p>Le livre est un document. Quelques petits travers énervent, comme le <em>name dropping</em> permanent : Sigmund Freud, Richard Strauss, Romain Rolland, Bernard Shaw, H. G. Wells, Walter Rathenau, Charles Ier… Certaines visions semblent un peu idylliques (le Paris d'avant-guerre !), en tout cas réservées aux gens des classes aisées ; mais c'est le propre de la nostalgie. Ce livre décrit certes un monde perdu et son auteur, mais sa famille est quasiment oubliée, et il est surprenant que les prénoms de ses deux femmes ne soient même pas cités.</p>
<p>Zweig n'a pas vu la guerre se retourner, ni la reconstruction de l'Europe. Il en aurait sans doute été un des rebâtisseurs. Notre époque, qui remet des frontières partout, fait la chasse aux migrants, et à nouveau en prise à la stupidité de masse, ne lui aurait pas plu. Et il n'aurait pu s'empêcher de retisser des parallèles avec la chute de l'Europe un siècle plus tôt.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/860« La chute du Japon » de William Craigurn:md5:1477cf6bde729463b434ee59a1c292032020-09-27T21:21:00+02:002020-09-27T21:21:00+02:00ChristopheHistoireabominationAmériqueapocalypseautodestructionbombe atomiquebon senscataclysmecatastrophechaosChinecivilisationdécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegigantismeGuerre FroidegéopolitiquehainehistoirehiérarchieimpérialismeLibérationmortnationalismeoh le beau cas !ouverture d’espritperspectiveracléescienceSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unis<p>Loin de l'histoire militaire pleine de bruits, il y a la petite grande histoire, celle qui se déroule dans des réunions feutrées, ou dans des consciences déchirées entre devoirs, intérêts, peurs et réalisme. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Nagasaki_nuage_1945-Charles_Levy-domaine_public-via_Wikipedia_m.jpg" alt="" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> C'est plutôt celle-là que William Craig choisit de décrire. En 1967, ce livre rapportait les souvenirs des survivants des dirigeants de l'Empire japonais pendant les jours les plus terribles de son histoire. Si quelques pages décrivent les événements militaires de la toute fin de la guerre ou s'étendent sur la mission qui a failli ne pas lâcher la deuxième bombe atomique sur Nagasaki, l'essentiel tourne autour des discussions, tergiversations et affrontements des divers dirigeants japonais.</p> <p>Les ministres, amiraux, officiers... sont évidemment nombreux, et l'Occidental moyen qui les découvre tous ensemble aura du mal à suivre. Heureusement, les photos aident un peu à mémoriser.</p>
<p>Le jeu se déroule essentiellement entre quelques membres du gouvernement, le conseil des anciens Premiers Ministres, et le Conseil suprême, donc beaucoup de militaires et quelques politiques : très peu de personnes au final. Leur poids est écrasant. On est à l'été 1945, Okinawa est tombé, les grandes villes sont rasées sous les bombes incendiaires, et même les plus fanatiques ne croient plus à la victoire. La seule discussion porte sur les termes d'un arrêt des hostilités. Notamment : le maintien de l'Empereur, la non-occupation du Japon, le refus de faire juger des criminels de guerre par l'extérieur.</p>
<p>Dans ce cadre, le dernier ultimatum allié, la <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Potsdam_Declaration" hreflang="en">déclaration de Potsdam</a>, demandant une reddition sans conditions sous peine d'anéantissement, est inacceptable. L'espoir des jusqu'au-boutistes : une résistance opiniâtre et des pertes terribles amenant les Américains à plus de concessions. Les Japonais avaient d'ailleurs prévu correctement le plan d'invasion américain par le sud de l'archipel. (<em>On sait que les prévisions de pertes américaines pour l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Downfall" hreflang="fr">invasion de l'archipel</a> se chiffraient en millions. Cela n'effrayait apparemment pas les planificateurs du Pentagone.</em>). Un passage surréaliste : un maréchal revenant d'Hiroshima annonce que la bombe A n'est pas aussi destructrice, des abris souterrains pourraient résister.</p>
<p>Mais d'autres facteurs pèsent : d'abord, les bombes atomiques.
<a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia.png" title="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.Atomic_bomb_1945_mission_map-fr-by_Skimel-CC_BY_SA-Wikimedia_m.png" alt="Bombardements atomiques1945, Skimel, CC_BY_SA via Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Craig consacre beaucoup de pages à décrire le lancement du projet, l'entraînement des pilotes pour cette délicate mission, le choix des cibles... Étonnamment, il passe vite sur Hiroshima (6 août), dont l'attaque se déroule comme à l'exercice, pour se concentrer sur Nagasaki (9 août). Contrairement aux bombes A précédentes à l'uranium, il s'agit là d'une bombe au plutonium, donc non encore testée. La mission fut un cauchemar : problème de carburant dès le départ ; difficulté de rendez-vous avec les avions d'observation ; conditions mauvaises au-dessus de la cible, Kokura ; changement d'objectif ; carburant trop limité pour un deuxième passage et mauvaises conditions, toujours. Il fallait que le bombe tombe juste pour avoir un impact majeur. Mais il y eut une trouée, et Nagasaki disparut. Le bombardier se posa de justesse à Okinawa. La description du sort des habitants de Nagasaki dans les jours suivants est dantesque. Certains victimes étaient des soldats alliés prisonniers. D'autres bombes atomiques étaient en cours d'assemblage.</p>
<p>Depuis plusieurs mois, des vagues de B-29, basés près du Japon, tapissent de bombes les villes japonaises. Même sans bombe atomique, l'industrie japonaise est déjà en train de disparaître. La société, dans des villes rasées où tout manque, se délite.</p>
<p>Les tentatives d'ouverture de divers diplomates dans plusieurs chancelleries pour entamer des négociations de paix échouent pathétiquement. Il est effarant de voir à quel point les deux belligérants possèdent peu de moyens pour communiquer l'un avec l'autre, et combien sont rares les gens bilingues. La déclaration de Potsdam, discutée en interne, reste d'abord sans réponse — ce qui est interprété comme un rejet par les Américains.</p>
<p>Le coup de bambou est sans doute soviétique : les Japonais comptaient sur la neutralité de Staline, voire son intermédiation. Mais celui-ci tient la promesse faite à Roosevelt : l'URSS envahit la Mandchourie au moment où tombe la bombe de Nagasaki, et en un temps record.</p>
<p>Le 10 août, après d'âpres discussions dans un abri antiaérien sous le palais impérial, aucun consensus entre les dirigeants n'est obtenu. Le vieux Premier ministre <a href="ttps://fr.wikipedia.org/wiki/Kantar%C5%8D_Suzuki">Suzuki</a> pousse, contre toute tradition, l'Empereur à intervenir. Hirohito tranche et décide d'accepter la déclaration de Postsdam. Les irréductibles ne peuvent s'y opposer, mais sauvent la face, puisqu'il faut obéir à l'Empereur.</p>
<p>Les Alliés sont contactés via la Suisse et la Suède. L'acceptation par le Japon ajoute la réserve que les prérogatives du souverain régnant seront préservées. Truman et ses conseillers discutent de cette entorse à la « capitulation sans conditions » exigées. Le pragmatisme l'emporte : l'Empereur sera un moyen de faire pression sur les derniers extrémistes dispersés dans les possessions japonaises ; il faut tenter de libérer les prisonniers de guerre le plus vite possible ; plus la guerre durerait, plus l'influence soviétique grandirait. Il faut aussi consulter les Alliés. Les Soviétiques tentent en vain un bluff pour avoir une part du commandement du Japon occupé.</p>
<p>La réponse américaine annonce que toute l'administration japonaise sera subordonnée au commandant suprême allié pour mettre en œuvre les conditions de la capitulation, que le peuple japonais choisira lui-même la forme de son futur gouvernement, et que le Japon sera occupé jusque là. Ce la ne calme pas les partisans de la guerre à outrance, surtout que les Russes et les Chinois veulent explicitement la tête de l'Empereur. Faut-il accepter cette note ? Là encore, il faut que Hirohito tranche à nouveau, le 14 août, pour que l'acceptation soit envoyée aux Américains.</p>
<p>Pendant ces quelques jours, la situation reste floue. Nagasaki brûle toujours. Les extrémistes continuent de lancer aux troupes des appels à la résistance à la radio. Les Japonais annoncent la fin de leurs offensives. Les Américains suspendent leurs bombardements dès le 10 août, se contentant de lâcher des tracts. Le temps passant, quelques bombardiers repartent à l'attaque juste avant le cessez-le-feu définitif.</p>
<p>Au-dessus des responsables japonais planent depuis des décennies les menaces de coup d'État militaire et d'assassinat par des officiers fanatiques. (Ce fut le cas, entre autres, lors de l'<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Invasion_japonaise_de_la_Mandchourie" hreflang="fr">invasion de la Mandchourie en 1931</a>). À ce moment encore, certains généraux sont ouvertement poussés au putsch par leurs officiers. Ce n'est pas une révolte contre l'Empereur, celui-ci est juste est mal conseillé. Les extrémistes voient notamment le général <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Korechika_Anami" hreflang="fr">Anami</a>, hostile à une capitulation sans conditions, mener un coup d'État. Mais Anamu se plie à la décision finale d'Hirohito, refuse de se révolter, et se suicide comme tant d'autres. Plusieurs autres renoncent, parce qu'ils savent que le coup d'État est voué à l'échec. Le cas de l'ancien Premier Ministre <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hiranuma_Kiichir%C5%8D" hreflang="en">Hiranuma</a> surprend : partisan de la paix, il change d'avis quand il voit que la personne de l'Empereur n'est pas garantie.</p>
<p>Les derniers extrémistes ne se suicident pas tous. Un dernier groupe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_de_Ky%C5%ABj%C5%8D">va jusqu'au bout</a> et, le 14 août, attaque le Palais impérial. Le disque où Hirohito a enregistré son adresse au peuple n'est pas retrouvé. Le Premier ministre Suzuki manque d'être assassiné. L'essentiel de l'armée ne suit pas. Le putsch échoue, les derniers insurgés se suicident. Le discours d'Hirohito est diffusé le 15 août. Certains Japonais ont du mal à comprendre le message, puis à y croire.</p>
<p>La capitulation se diffuse difficilement. Les combats continuent quelques jours aux Philippines. Quand elle parvient, les réactions sont parfois violentes. Des prisonniers de guerre sont exécutés. Des kamikazes décollent, dont plus personne n'entend parler. Par la suite, il faut encore calmer quelques excités.</p>
<p>Suivent les détails techniques, parfois triviaux, comme l'échange de fréquences radio pour communiquer. Les Japonais envoient les ordres d'arrêt des hostilités à toutes leur troupes, demandent des sauf-conduits pour les officiers et membres de la famille impérial envoyés les confirmer. MacArthur demande l'envoi à Manille d'officiers pour planifier l'occupation. Au moins le transfert d'autorité devait-il se faire dans l'ordre : la mission japonaise s'envole dans le secret et la peur des kamikazes, et arrive le 20 août. L'ambiance, d'abord lourde, se détend un peu. La délégation japonaise apprend le plan américain, qui prévoit des débarquements dès les jours suivants (!). Elle réclame du temps pour mettre au pas les derniers fanatiques, nombreux dans les bases aériennes... et obtient le retrait d'un tableau prévoyant un nombre de femmes de chambres au service d'officiers supérieur ! Au retour, l'avion de la délégation doit amerrir !</p>
<p>Entre les chapitres s'intercalent des passages sur les opérations en vue de la libération des prisonniers. Craignant à juste titre des représailles sur les prisonniers de la part de Japonais désespérés, certains commandos américains, parachutistes et OSS, se positionnent en urgence, prêts à bondir vers les camps de prisonniers à l'annonce de l'arrêt des hostilités. Des difficultés avec les militants communistes sont prévues, et il y a des accrochages : la guerre civile va reprendre en Chine. À ces endroits, les premiers contacts entre Américains et Japonais après l'annonce de la capitulation sont très tendus, mais globalement la libération des prisonniers se déroule sans trop de problèmes.</p>
<p>Très tendu aussi le premier débarquement de soldats américains au Japon, le 28 août, sur une base aérienne auparavant dédiée aux envols des kamikazes. Les Américains arrivent plus tôt que prévu, même retardés de deux jours par la météo. Si l'ambiance reste fraîche, tout se déroule cependant avec un minimum de bonne volonté réciproque, et la première base américaine commence à voir déferler des milliers de soldats vainqueurs, dont MacArthur.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia.jpg" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.USS_Missouri-domaine_public-via_Wikimedia_s.jpg" alt="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="USS Missouri, domaine public, par Wikimedia" /></a>La brève cérémonie signature officielle de la capitulation, en présence de tous les représentants galonnés des nations vainqueurs, n'a lieu sur le <em><a href="https://en.wikipedia.org/wiki/USS_Missouri_(BB-63)" hreflang="en">Missouri</a></em> que le 2 septembre. Le choix du bateau tient dans la rivalité MacArthur/Nimitz, ou plutôt Army/Navy : MacArthur étant signataire, le lieu doit être un navire, et est disponible celui du nom de l'État de Truman. Les Américains débarquent alors à Tokyo, et les emprisonnements de responsables suspects de crimes commencent. Au fur et à mesure que les nouveaux maîtres s'installent, les principaux problèmes sont plutôt des chocs culturels, ou des problèmes de disciplines récurrents dans une armée d'occupation, que les deux camps veulent éviter au maximum.</p>
<p>Le livre raconte aussi l'histoire de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Marcus_McDilda" hreflang="en">Marcus McDilda</a>, pilote de chasse prisonnier : aux Japonais qui croient qu'il savait des choses sur la bombe atomique, il donne une théorie et des chiffres fantaisistes — qui ont peut-être fait peur en haut lieu. Et celle du major <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jonathan_Mayhew_Wainwright_IV" hreflang="fr">Wainwright</a>, ancien second de MacArthur, prisonnier depuis la prise de Manille en 1942, et retrouvé à temps pour être présent, squelettique, à la signature de la capitulation. Ou du drame de l'Indianapolis, coulé après avoir livré la bombe A, dont l'équipage naufragé est décimé par les requins <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p><em>Une question que je me pose : Craig s'est basé sur les souvenirs des dignitaires japonais survivants et des témoins, mais pas de l'Empereur. Celui-ci apparaît de manière très furtive. Son rôle dans le fonctionnement de l'Empire japonais est totalement minimisé. Cela colle avec la théorie plus ou moins officielle, après guerre, d'un Empereur traditionnellement sans rôle politique, impuissant face à la caste militaire toute-puissante, théorie <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hirohito#Question_de_la_responsabilit%C3%A9_personnelle_de_l'empereur">remise en cause depuis</a>. On l'a vu, les généraux en faisaient à leur tête ; mais Hirohito se serait laissé pour le moins laissé convaincre, et aurait approuvé la politique d'agression japonaise. Vue la manière extrêmement cérémoniale dont Hirohito communiquait avec ses ministres, on se demande même quelle pouvait être sa vision du monde.</em></p>
<p>Titre original : <em>The Fall of Japan</em></p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Le récit d'un survivant est une des pires scènes des </em>Dents de la me'r' de Spielberg.''</p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-chute-du-Japon-de-William-Craig#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/858« La campagne du Rhin : Les Alliés entrent en Allemagne (janvier-mai 1945) » de Daniel Feldmann & Cédric Masurn:md5:c68ad5398703e89ace8912eae64179472019-02-03T18:50:00+01:002020-02-08T17:50:24+01:00ChristopheHistoireAllemagneAlsaceAmériqueapocalypseautodestructioncataclysmechaoscomplexitédéshumanisationEuropegigantismeguerre saintegéographiegéopolitiquehainehistoireHistoire de FrancehiérarchieimpérialismejusticenationalismeorganisationracléeSeconde Guerre MondialetempsténacitéÉtats-Unis<p>(<em>Encore une chronique de mes lectures, pour changer...</em>)</p>
<p><a href="https://www.economica.fr/livre-la-campagne-du-rhin-janvier-mai-1945-feldmann-daniel-mas-cedric,fr,4,9782717868807.cfm"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.feldmann-mas-campagne-du-rhin_m.jpg" alt="feldmann-mas-campagne-du-rhin.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a> Il n’y avait apparemment pas de livre dédié aux opérations des Occidentaux début 1945. Le sujet intéresse moins que le rouleau compresseur russe à l’Est, la prise de Berlin, ou la décision d’Eisenhower de ne <em> pas</em> aller à Berlin. Ce livre, assez austère mais relativement facile à lire pour l’amateur éclairé, comble le vide. La vision est plus celle des états-majors, globale et technicienne, que celle anecdotique du soldat de terrain.</p>
<p>Il s’agira essentiellement ici des armées anglo-américaines, et de la canadienne.</p> <p>Quelques chapitres parle de la petite armée française, pas vraiment en bien. C’est un mélange instable de Français libres, d’unités de l’armée de Vichy de France ou d’Afrique du Nord ayant rejoint les Alliés parfois assez tard, de troupes nord-africaines aguerries, et d’anciens FFI courageux mais sans formation militaire. Le manque de matériel est complet et la dépendance envers les Américains totale. Son chef, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/De Lattre" hreflang="fr">https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_de_Lattre_de_Tassigny</a> aura besoin d’eux pour réduire la poche de Colmar et ne semble pas vouloir ce qu’il veut en Forêt Noire et à Stuttgart. Leclerc et la 2è DB préféreront être sous les ordres d’un général américain.</p>
<p>Quant aux Russes, ils sont de l’autre côté, rouleau compresseur en train de broyer la Wehrmacht et de conquérir l’Europe de l’Est. Rappelons que pendant que les Occidentaux débarquaient en Normandie, il entamaient la reconquête de la Pologne (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Bagration" hreflang="fr">opération Bagration</a>). Fin 1944, ils ont déjà entamé la conquête de terres allemandes.</p>
<h3>Les généraux</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dwight_D._Eisenhower" hreflang="fr">Eisenhower</a> le diplomate, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bernard_Montgomery" hreflang="fr">Montgomery</a> l’égocentrique... : tous sont alors connus, environnés de journalistes, et très conscients à l’époque d’écrire l’Histoire. Les rivalités plus ou moins sportives entre généraux s’ajoutent à la rivalité anglo-américaine : les calculs politiques en vue de l’après-guerre s’additionnent au besoin de gloriole et de prestige. Les auteurs sont assez critiques, et tout le monde au sommet en prend pour son grade.</p>
<p>Les moyens et les choix d’offensive sont en permanence arbitrés entre le front nord (anglo-canadien) et centre et sud (américain), et des unités américaines passent alternativement d’une armée à l’autre selon les besoins. S’ajoute le style : Montgomery aime préparer ses offensives et réclame toujours plus de forces ; les Américains ont plus de moyens, plus de chance aussi dans leurs adversaires (les dernières unités allemandes sont très inégales), et foncent volontiers.</p>
<h3>Situation fin 1944 & plan de bataille</h3>
<p>Fin 1944, après une difficile percée en Normandie, un débarquement en Provence, les armées alliées ont reconquis rapidement presque toute la France et la Belgique. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes" hreflang="fr">bataille des Ardennes</a> en décembre 1944 est la dernière grande offensive de la Wehrmacht à l’Ouest, péniblement repoussée. Si celle-ci n’a ensuite plus les moyens de rééditer une telle opération, cela ne veut pas dire que la suite sera un chemin pavé de rose.</p>
<p>Le front début janvier 1945 suit à peu près les frontières allemandes de 1939. Au nord, les Allemands tiennent encore de gros morceaux des Pays-Bas, dont l’embouchure du Rhin. Au sud, la bataille continue en Alsace : Colmar et Rouffach sont encore occupés, et Wissembourg le redevient (l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a> ramène la Wehrmacht jusque Haguenau).</p>
<p>La supériorité matérielle alliée est totale : chars, canons, avions, hommes, et aussi pétrole, à l’est comme à l’ouest. Dans les airs, la Luftwaffe use ses dernières réserves. La coordination interarmes alliée est rodée.</p>
<p>On a gardé l’image d’une armée alliée aux moyens inépuisables, mais ce moment est une crise. D’abord la logistique est cauchemardesque, mais cela s’arrangera quand le port d’Anvers sera à nouveau opérationnel. L’armée britannique est expérimentée mais l’Angleterre est épuisée et les effectifs manquent, il faut même dissoudre des divisions. Même l’armée américaine a des problèmes de remplacement : les pertes en France ont été plus importantes que prévues, et les troupes disponibles sont déjà toutes en ligne. Mais comme 13 % seulement des 2,7 millions d’hommes sont des troupes offensives, une réorganisation et l’embauche de civils pour certaines tâches permettra de parer au problème.</p>
<p>La météo est exécrable, avec un hiver rigoureux. Les périodes de redoux ne sont pas plus faciles, car la boue gêne les offensives d’ampleur et détruit les routes, parfois étroites. Pendant tout le livre revient le problème de faire passer des divisions entières par des chemins vite embourbés et saturés.</p>
<p>Le chemin pour la conquête de l’Allemagne n’est pas évident : des massifs montagneux comme l’Eifel sont difficiles à conquérir (les Américains s’y useront inutilement) ; des barrages permettent d’inonder des zones entières (autour de la Roer) ; la ligne Siegfried protège bien certains endroits ; la supériorité numérique n’est pas assez écrasante pour une attaque partout à la fois ; enfin les chemins faciles n’offrent pas de possibilité d’exploitation évidente vers des objectifs importants. Les raisons des choix stratégiques sont les parties les plus intéressantes du livre.</p>
<p>Assez vite se dégage l’idée qu’il vaut mieux conquérir toute la rive gauche du Rhin, et y détruire les dernières forces allemandes, avant de tenter de franchir le fleuve. La cible principale sera ensuite la Ruhr, poumon industriel de l’Allemagne.</p>
<p>Les auteurs s’attardent à décrire ce à quoi s’attendent les Allemands. Ils n’ont plus guère de réserves, mais n’abandonnent pas le terrain pour autant. Mais le renseignement est défaillant et la coordination des unités n’est plus ce qu’elle a été. Les ordres débiles d’Hitler de ne jamais reculer, fidèlement retransmis, parfois obéis, et la faible qualité des dernières recrues (trop jeunes, trop vieilles, inaptes...), en plus du manque de matériel et de carburant, obèrent toute initiative stratégique. Si beaucoup de divisions n’existent plus que sur le papier, quelques unités restent solides, le régime nazi tient le pays et punit de mort toute idée de reddition : la débandade générale n’interviendra qu’après le passage du Rhin.</p>
<h3>L’Alsace</h3>
<p>La poche de Colmar et plus globalement l’Alsace n’ont pas une grande importance stratégique, mais elles fixent beaucoup d’unités alliées. Au milieu d’un froid glacial, Français et Américains doivent d’abord repousser une attaque allemande (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Nordwind" hreflang="fr">opération Nordwind</a>) qui menace Strasbourg. Eisenhower prévoit même au début de l’abandonner avec tout le Bas-Rhin, à la fureur des Français. Il cède à la pression politique et fournit les troupes. Puis il faut reprendre Rouffach et Colmar, difficilement. L’armée allemande se retire par Brisach en bon ordre. Le front alsacien ne bougera plus avant le printemps.</p>
<h3>La Rhénanie</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public.png" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) "><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Campagne_Rhin_Veritable-Grenade-1945_Wikipedia_Westpoint_domaine_public_m.png" alt="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Opération Veritable (source: US Army, Westpoint, via Wikipédia, domaine public) " /> </a></p>
<p>C’est le 8 février, par Nimègue et l’extrême nord, qui a l’avantage d’être plat et dépourvu de cours d’eau, que démarre l’invasion de la Rhénanie par les Anglo-Canadiens (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Veritable" hreflang="fr">opération Veritable</a>). Malgré une longue préparation, ils tombent sur des troupes allemandes de qualité et bien commandées, et l’avancée est très difficile.</p>
<p>Les Américains entrent un peu plus tard en lice au sud, depuis l’extrême sud de la Hollande. Ils auront auparavant eu du mal à sécuriser les barrages de la Roer, et seront ralentis par les inondations provoquées par les Allemands. La suite sera pour eux plus facile que pour les Anglais, et un rouleau compresseur impeccablement huilé se déploie sans anicroche jusqu’au Rhin et Düsseldorf.</p>
<p>Ces opérations détruisent en un mois les dernières capacités allemandes à l’ouest. Ce sont des unités très diminuées qui retraitent derrière le Rhin.</p>
<p>Les auteurs étudient la décision de ne pas profiter du succès pour franchir le Rhin tout de suite : sécuriser la tête de pont et mener l’exploitation aurait nécessité trop de troupes, sans compter la difficulté de batailles dans la zone urbaine de la Ruhr.</p>
<h3>Remagen</h3>
<p>Début mars, Patton profite de l’effondrement allemand pour sortir enfin du massif de l’Eifel, encore un peu plus au sud (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Lumberjack" hreflang="fr">opération Lumberjack</a>), et border le Rhin jusqu’à la Moselle, Bonn et Coblence. La progression est si facile et rapide qu’un pont, par chance et incompétence allemande, tombe aux mains des Américains à Remagen. Ce n’est pas le meilleur endroit pour créer une tête de pont, mais Eisenhower donne l’autorisation de consolider la tête de pont. Le point de franchissement du Rhin n’a donc pas été planifié, les Alliés s’attendaient à ce que tous les ponts aient été détruits !</p>
<p>Les Allemands ont beau faire, ils ne repoussent pas la tête de pont américaine. L’impact n’est pas tant stratégique que psychologique : la Wehrmacht ne peut même plus espérer souffler un temps derrière le Rhin.</p>
<h3>Sarre & Palatinat</h3>
<p>Les Allemands sont encore au sud de la Rhénanie, à la frontière française, car évacuer ce saillant impliquerait de perdre le charbon de la Sarre. Les armées de Patton et Patch s’enfoncent facilement au nord de la Lorraine et du Bas-Rhin, si vite qu’elles se croisent involontairement (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Undertone" hreflang="fr">opération Undertone</a>).</p>
<h3>Le franchissement du Rhin</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/Crossing_of_the_Rhine.jpg" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM2/.Crossing_of_the_Rhine_m.jpg" alt="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Franchissement du Rhin, 22-28 mars 1945, US Army, domaine public, via Wikipédia" /></a></p>
<p>La suite est une longue agonie pour les Allemands. La logistique de l’opération britannique au-dessus du Rhin, nommée <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Travers%C3%A9e_du_Rhin" hreflang="fr">Plunder</a>, avec divisions aéroportées, est massive, même surdimensionnée. Les auteurs expliquent que les Anglo-Américains n’ont jamais eu de progression aisée, que Montgomery veut tirer la couverture médiatique à lui, et effacer son premier échec sur le Rhin à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Market_Garden#Arnhem_2" hreflang="fr">Arnhem</a> en 1944.</p>
<p>En face, la plaine est défavorable à la défense. Si les effectifs allemands font encore illusion, il n’y a plus guère d’officiers expérimentés ni d’armes ni de munitions. Les Anglais doivent combattre mais leur organisation est impeccable et leur progression est rapide.</p>
<p>Les Américains de leur côté ne prennent aucun repos et, en plus de Remagen, franchissent le Rhin plus au sud également, et eux sans préparation, par un « coup de main » ! Patton veut là avoir un prétexte pour éviter de prêter des divisions à l’opération de Montgomery, et faire pièce au succès de ce dernier ; mais il a aussi raison de vouloir profiter d’une défense devenue presque inexistante. Mais par endroit les Allemands s’accrochent encore et les envahisseurs doivent être prudents.</p>
<p>Au final, la Ruhr finit encerclée par les deux armées le 3 avril. Le Reich n’a plus d’industrie.</p>
<h3>Après la Ruhr</h3>
<p>Les Alliés n’ont jamais cherché à battre les Soviétiques dans la course à Berlin. Pourtant, la Ruhr prise, c’était le dernier objectif possible, politique cette fois. Cette décision, prise très tardivement par Eisenhower, a fait couler beaucoup d’encre. Un éventuel « réduit alpin » (condamné d’avance, mais avec les nazis on ne sait jamais) n’aurait pas mobilisé beaucoup de troupes. Les coûts et l’impact sur l’après-guerre étaient des décisions politiques, pas militaires.</p>
<p>Après bien des explications vient la théorie des auteurs : Eisenhower a décidé pour une fois d’affirmer son autorité, a favorisé l’armée de son ami et compatriote Bradley, et ne voulait pas que Montgomery entre à Berlin (les troupes britanniques étaient les mieux placées pour cela). Roosevelt mourant, c’est une période de flottement, et Churchill ne peut changer faire changer d’avis Marshall, seul supérieur d’Eisenhower.</p>
<p>Les Anglo-Canadiens se sont donc contentés de foncer sur la Baltique pour barrer l’accès au Danemark aux Soviétiques. Les Américains ont poussé jusqu’à Leipzig. Au passage ils découvrent les camps de concentration, ce qui ôtera ensuite à certains leurs scrupules à bombarder des villes (Erfurt).</p>
<p>La résistance allemande subsiste ponctuellement, désorganisée, mais l’organisation étatique nazie ne s’effondre jamais. Il faudra attendre la mort d’Hitler pour que Dönitz signe la capitulation. Les détails précis de l’agonie de l’Allemagne ne sont pas le sujet ici -- là-dessus j’avais déjà chroniqué l’excellent <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw">The End</a></em> de Kershaw.</p>
<h3>Conclusion</h3>
<p>Dans cette histoire m’ont frappé les dissensions entre généraux des trois nationalités, leurs mesquineries dignes de cours d’école. Celles-ci n’ont cependant pas eu d’effet sur les opérations. Bref, les Allemands n’avaient aucune chance contre le rouleau compresseur anglo-américain, très bien huilé techniquement, que la logistique n’a plus bridé en 1945.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-campagne-du-Rhin-Les-Alli%C3%A9s-entrent-en-Allemagne#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/852Francis Carsacurn:md5:a1a4641b796f8db94b9580b910c9c2502018-09-14T18:30:00+02:002021-08-12T10:10:17+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesanthropomorphismeapocalypsecataclysmecatastrophecivilisationcolonisationcommunicationconquête spatialedéshumanisationextraterrestresimpérialismelivres lusmulticulturalismenationalismeracismesciencescience-fictionsociétés primitivesspace opera<p>Il y a 13 ans, dans un <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/./lectures/liste_livres_lus.html">autre recoin de ce coin de web</a>, j'écrivais à propos de <em>Ce monde est nôtre</em> :</p>
<blockquote><p>C’est un vieux classique par un vieux routard de la SF française des années 60, et la suite de <em>Ceux de nulle part</em>, que j’ai apprécié en tant qu’ado. Ici revient l’intrigue assez classique d’un explorateur d’une civilisation intergalactique plongé dans une guerre sur une planète médiévale. Pas trop mal mené, mais les thèmes et surtout le style ont mal encaissé les années.</p></blockquote>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_1.jpg" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_1_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 1" /></a> Adolescent, j'aimais bien les trois Carsac que j'avais lu, notamment dans un recueil du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Club_du_livre_d%27anticipation">Club du Livre d'Anticipation</a> de mon père, entre les <em>Robots</em> d'Asimov et <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/12/13/291-l-empire-de-l-atome-et-le-sorcier-de-linn-d-ae-van-vogt">l'Empire de l'Atome</a></em> de Van Vogt. L'été dernier, j'ai trouvé chez beau-papa l'intégrale parue il y a 20 ans chez <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lefrancq_(maison_d%27%C3%A9dition)">Lefrancq</a> et je lui ai empruntée.</p>
<p>Sur la forme : cette intégrale contient moultes coquilles, quelques bout de phrases déplacés, des sauts de paragraphe manquants et même une mention erronée de <em>Terre en fuite</em> sur le tome 1 (à la place de <em>Ce monde est nôtre</em>). Je sais certes que l'on peut relire mille fois un texte et qu'il restera toujours des coquilles, mais bon. De plus, les commentaires du fils de l'auteur, pas inintéressants dans le tome 1 pour éclairer un peu l'œuvre, manquent totalement du tome 2.</p> <ul>
<li>Pour la biographie de Carsac, plus connu en fait sous son nom de François Bordes, paléontologue reconnu : <a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">voir Wikipédia</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pour une liste détaillée des œuvres avec les couvertures originales au mythique Rayon fantastique : <em>cf</em> le blog <em><a href="https://ocyaran.wordpress.com/2013/01/04/un-auteur-francis-carsac/">En terre étrangère</a></em>.</li>
</ul>
<p>Les différents romans sont parus dans les années 1950 et 60, et en portent la marque, différemment. Je fais parfois mon blasé parce que j'ai lu beaucoup depuis de choses publiées entre temps, mais, globalement, on reste sur le dessus du panier de la SF française de l'époque. Et bonne nouvelle : chaque roman est meilleur et plus complexe que le précédent. Les trois dont je me souvenais depuis le siècle dernier (<em>Les robinsons du Cosmos</em>, <em>Ceux de nulle part</em>, <em>Ce monde est nôtre</em>) le méritaient.</p>
<p>Par ordre plus ou moins chronologique :</p>
<h3>Sur un monde stérile</h3>
<p>Un groupe de jeunes amis embarquent dans l'astronef fabriqué en secret dans son garage par l'un d'eux, débarquent sur Mars sans préparation, sinon des armes, beaucoup d'armes, et rencontrent trois peuplades martiennes qui se livrent une guerre éternelle. Comme il est très clair d'entrée qui sont les beaux et gentils et qui sont les affreux et méchants, ils prennent parti, sinon le commandement, et participent au génocide final des mauvais.</p>
<p>C'est typiquement l'œuvre de jeunesse (écrite vers la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ce qui doit expliquer des choses) sortie des fonds de tiroir bien plus tard, sans intérêt autre que comme témoignage d'une époque. Le scénario ne manque pas de rythme mais l'histoire est prévisible, le manichéisme brutal, le savant un peu trop génial, et la psychologie des personnages basique. L'enchaînement des opérations militaires lasse. Carsac lui-même n'aimait pas ce roman de débutant qui n'a pas été publié de son vivant.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile.jpg" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Sur_un_monde_sterile_m.jpg" alt="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Sur un monde stérile, dessin de l'auteur.jpg" /></a></p>
<h3>Les robinsons du Cosmos</h3>
<p>Par contre, cette histoire a marqué mon adolescence, en partie par les dessins de Moebius dans l'édition du Club. Il paraît qu'elle eut un grand succès en Union Soviétique à l'époque.</p>
<p>L'idée n'est pas bête, de déporter un village entier sur une autre planète, par un tour de passe-passe soudain dans l'espace-temps. (Cela rappelle un peu un vieil Hamilton, <em><a href="https://www.noosfere.org/icarus/livres/niourf.asp?numlivre=2146560676">la Ville sous Globe</a></em>, mais l'histoire est plus intéressante, les personnages moins caricaturaux et les filles sont armées.) Comme dans toute bonne SF post-apocalyptique, les ennemis les plus dangereux ne sont pas les hydres volantes ou les indigènes, mais d'autres humains, et cela d'entrée.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-hydre_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos-L'hydre, dessin de Moebius.jpg" /></a> Ce problème réglé, nos déportés explorent et s'installent, rencontrant une peuplade de centaures, et on tombe plus ou moins dans le roman d'exploration-colonisation à la gloire des ingénieurs et techniciens.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius.jpg" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Les_Robinsons_du_cosmos-centaures_par_Moebius_m.jpg" alt="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Les Robinsons du Cosmos : les centaures, dessin de Moebius.jpg" /></a>J'ai été un peu agacé par ce côté « dictature éclairée des scientifiques », très fréquent chez Carsac, ainsi que par le sort très expéditif réservé aux « méchants » (mais je n'ai pas combattu pendant la Seconde Guerre Mondiale comme l'auteur, moi). Comme je cherche toujours la petite bête, je suis un peu resté sur ma faim sur le côté pratique (à partir d'un gros village et d'une usine, comment reconstruit-on une civilisation ? à quoi doit-on renoncer ?). Le narrateur est un dirigeant, un scientifique-qui-sait, la piétaille reste dans l'ombre.</p>
<p>Malgré ces peccadilles, une bonne lecture.</p>
<h3>Ceux de nulle part</h3>
<p>Voici un autre très bon souvenir de lecture de jeunesse que j'ai relu avec plaisir. Écrit en pleine mode des soucoupes volantes, <em>Ceux de nulle part</em> relate l'enlèvement, un peu par hasard, du docteur Clair par des extraterrestres (les Hiss, quasi-humains à peau verte, pour ne pas faire original), et la découverte de leur civilisation et de celle des planètes amies.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ceux_de_nulle_part.jpg" alt="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis_Carsac, Ceux de nulle part, le Rayon Fantastique.jpg" /></a>Civilisation où le bon docteur prendra une place importante, puisqu'il est de la première espèce à sang rouge découverte par ses kidnappeurs ; particularité qui le rend insensible au rayonnement des maléfiques misliks.</p>
<p>Les misliks sont constitués de métal pur, éteignent les étoiles, et sont une des meilleures inventions de Carsac : l'Ennemi, le Mal absolu, qui éteint la lumière et la vie, qui nous est totalement étranger, avec qui on ne pourra jamais trouver d'arrangement. (Dans la fameuse <a href="https://spacearchaeology.org/?p=79" hreflang="en">classification des aliens d'Orson Scott Card</a>, ils seraient les « varelses » ou même les « djurs », quand les hiss et leurs nombreuses espèces amies sont des « ramens », voire plus proches encore).</p>
<p>Civilisation intergalactique pacifique, chocs culturels, traditions différentes, mélange même des espèces, puisque Clair rencontre une charmante quasi-humaine d'Andromède (sans surprise, le charme exotique opère), sans supériorité humaine : était-ce si fréquent dans la SF française des <em>fifties</em> ?</p>
<h3>Ce monde est nôtre</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Ce_monde_est_notre.jpg" alt="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Ce monde est nôtre.jpg" /></a><em>Ceux de nulle part</em> pourrait être vu comme une longue introduction à l'univers de <em>Ce monde est nôtre</em>, dont la thématique commence à être nettement plus complexe.</p>
<p>Quelques siècles après l'arrivée de Clair chez les Hiss, un de ses descendants, Akki, a pour tâche d'inspecter les planètes encore barbares. L'une d'elle, au stade médiéval, est peuplée de deux civilisations humaines ennemies, plus une troisième proche des Hiss. Or la loi de fer de la grande civilisation galactique et paternaliste est impitoyable : il ne doit y avoir qu'une humanité par planète — l'expérience montre que, sinon, cela finit toujours par dégénérer. Quels peuples vont devoir être déportés sur une autre planète ? Pour tous, cette terre est celle de leurs ancêtres, ils sont chez eux.</p>
<p>Très loin de la neutralité, Akki va se faire entraîner dans la politique interne d'un camp — évidemment il y a une jeune et belle duchesse en danger — puis la guerre entre les deux factions humaines, pour commencer. Enfin arrivera le choix de ceux qui resteront et ceux qui partiront.</p>
<p>C'est bien mené, on est loin du scénario linéaire, les personnages se cassent le crâne à savoir quelle est la chose juste à faire, et il n'y a pas de solution miracle. Le chapitre final est de trop, et je suis un peu dubitatif sur cette grande et sage civilisation galactique qui s'autorise à génocider les peuples les plus agressifs.</p>
<p>On a vu des relents de guerre d'Algérie dans cette histoire pourtant écrite avant, mais le fils de Francis Carsac explique qu'il s'agit plutôt d'un parallèle avec la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers" hreflang="fr">Guerre des Boers</a>. Hélas, on peut tracer un parallèle avec un très grand nombre de zones de conflits passés et présents, probablement futurs.</p>
<p>Bref, une bonne lecture aussi sur un thème éternel.</p>
<h3>Terre en fuite</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72.jpg" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-Terre_en_fuite-Rayon_Fantastique_72_s.jpg" alt="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Terre en fuite, couverture Rayon Fantastique n°72" /></a>Roman un peu bâtard, un peu énervant par le côté « je suis un super-scientifique et je deviens le dictateur qui sauve l'humanité » (ah, si c'était même possible !). Un homme d'un futur lointain s'incarne dans un ingénieur de notre époque, et raconte son épopée, rien moins que la migration de la Terre et de Vénus, transformés en vaisseaux spatiaux, autour d'une autre étoile.</p>
<p>Les histoires s'enchaînent comme des épisodes différents sans grand fil conducteur, les problèmes techniques sont vite évacués, les opposants sont d'infâmes fanatiques sans subtilité, le reste de la population est docile, et comme souvent j'ai l'impression qu'elle n'existe pas vraiment. Je l'avais lu il y a bien longtemps, je comprends pourquoi il m'a laissé un souvenir flou.</p>
<h3>Pour patrie, l'espace</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-Pour_patrie_l_espace.jpg" alt="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Pour patrie l'espace" /></a>Bien plus complexe est l'histoire de ce militaire d'élite d'un Empire terrien en pleine guerre civile, recueilli par une civilisation d'astronefs-villes nomades, à tendance anarchistes, où on lui fait bien comprendre qu'il est un plouc. Mais on a besoin de ses qualités militaires et techniques.</p>
<p>Le choc culturel est violent, les relations avec la gente féminine pleines de méfiance. Racisme, égoïsme, tout y passe. Peut-être peut-on reprocher un manque de subtilité, mais ce militaire n'est <em>pas</em> subtil.</p>
<p>Ce n'est pas déplaisant. Il y a une <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/07/27103626.html">chronique enthousiaste sur SF Emoi</a>.</p>
<h3>La vermine du lion</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/Francis_Carsac-OEuvres_completes_2.gif" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/SF/Francis_Carsac/.Francis_Carsac-OEuvres_completes_2_m.jpg" alt="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Francis Carsac, Œuvres complètes, tome 2" /></a>Cette dernière histoire est la plus longue, dense et complexe écrite par Carsac (surtout avec les deux prologues, ajoutés par la suite si j'ai bien compris). Fondamentalement en fait, c'est un mélange de western (Carsac était fan) et de roman d'aventure coloniale, transposé dans le futur, sur une autre planète ; où l'on rejoue une fois de plus le thème de la très méchante méga-entreprise sans âme qui veut exploiter une planète en pressurant ses employés, en soudoyant les colonialistes au gouvernement, et en liquidant les autochtones s'ils gênent, quitte à encourager leurs dissensions internes et manipuler leurs fanatiques religieux. Cela pourrait se passer au XIXè siècle comme de nos jours, et devait résonner d'autant plus fort à l'époque de la décolonisation. En fait, la science-fiction n'apporte pas grand-chose à cette histoire.</p>
<p>Notre héros est la caricature du surhomme à la Carsac, physiquement et mentalement, devenu un cow-boy redresseur de tort, défenseur de ses amis les « sauvages » sans trop d'égard pour la loi et les grands principes vus les enjeux. Il est flanqué d'un lion intelligent, fort pratique pour se défendre ou livrer une justice expéditive, mais un peu sous-exploité. L'histoire est parasitée par plusieurs dames qui ne peuvent rester insensibles à son charme, aux motivations parfois floues. Hélas, là encore, Carsac ne semble savoir résoudre les problèmes de cœur de ses personnages que par l'élimination physique de certains protagonistes. Pour ce dernier roman, il ne se croit pas obligé au <em>happy end</em>.</p>
<p>Je fais la fine bouche, mais je suis d'accord avec la chronique ébahie de <a href="http://sfemoi.canalblog.com/archives/2013/05/10/27121855.html">SF Emoi</a>.</p>
<h3>Nouvelles</h3>
<p>Le tome 2 de l'intégrale se finit par quelques nouvelles, un peu inégales, en taille comme en valeur ou en originalité, mais pas désagréables. Beaucoup tournent autour du voyage dans le temps jusque l'époque paléolithique (la spécialité de François Bordes) et du choc entre hommes civilisés et « sauvages ».</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Francis-Carsac#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/851« Guerres & Histoire » n° 32 d’août 2016 : l’armée invincible d’Alexandre le Grandurn:md5:effea9c5e805582f883f07253649f26b2016-09-13T00:00:00+02:002020-02-08T18:02:38+01:00ChristopheHistoireAntiquitébon sensEmpire romainguerrehistoireimpérialismenationalismeoptimisationperspectiveraclée<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerresEtHistoire_32.jpg" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) "> <img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerresEtHistoire_32_s.jpg" alt="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerres & Histoire n°32 (août 2016) " /> </a> C’est le dossier principal de ce numéro. J’ai traité les autres thèmes dans le billet précédent. <em>Commentaires perso en italique.</em></p>
<p>D’un pays quasiment barbare, il a fait la première puissance mondiale de son époque : d’où vient le succès d’Alexandre le Grand ? Notes :</p> <h3>La Macédoine</h3>
<p>La Macédoine, à la limite de la culture grecque mais sous-développée, possédait d’<strong>abondantes ressources naturelles</strong> (dont des pâturages pour les chevaux)... et <strong>humaines</strong>.</p>
<p>L’armée macédonienne était celle d’un <strong>peuple en armes</strong>, sans mercenaires, manifestement avec aussi des professionnels, avec une bonne cavalerie noble. Plus tard, Alexandre utilise le nationalisme grec pour les unir contre les Perses (et châtie les mercenaires grecs rencontrés en face).</p>
<h3>Philippe</h3>
<p><strong>Philippe</strong>, le père d’Alexandre et véritable fondateur de la puissance macédonienne, s’inspire des <strong>phalanges de hoplites grecs</strong> (de lents rouleaux compresseurs) et améliore le système. Il essaie de refuser les grandes batailles, évite les longs sièges, préfère la « petite guerre » à base de petits combats et de surprise. Profitant des éternelles guerres entre cités grecques il soumet tout le monde. Déjà il vise la Perse.</p>
<p>Alexandre, formé par son père, sait faire fructifier l’héritage de son père et commence par mater les rébellions. Il hérite aussi de bons officiers.</p>
<p>Techniquement, <strong>la « phalange du pauvre » de Philippe</strong> vise à reprendre le principe des <strong>rangs serrés</strong> (jusque là invincibles face à la cavalerie) mais en <strong>allégeant</strong> le coûteux équipement et en <strong>allongeant les lances</strong>. Les sarisses, longues mais légères, ont une allonge supplémentaire face aux Grecs, écrasent les Perses trop légèrement protégés, et, dressées, offrent une protection contre les flèches. Ces phalanges moins lourdes sont bien plus <strong>mobiles</strong> que leur équivalent grec.</p>
<h3>La stratégie</h3>
<p>À côté des phalanges (l’enclume), les Macédoniens misent sur leur <strong>cavalerie</strong> (le marteau, négligé par les Grecs) qui s’occupe du choc : <strong>les cavaliers macédoniens osent charger l’infanterie</strong> ! La procédure exacte reste discutée : des chevaux ne chargent pas un mur de lances ! Il aurait pu suffire de les laisser approcher doucement (à revers) pour qu’ils passent entre les lances puis arrivent aux boucliers ennemis, pendant que les phalanges clouent l’ennemi d’un autre côté, jusqu’à dislocation de l’unité adverse.</p>
<p>L’armée macédonienne, autour des phalanges, utilise de <strong>nombreux autres types d’unités</strong>, pour protéger les flancs par exemple. Il le faut aussi pour intégrer des unités issues des pays conquis. Leur roi coordonne tout cela : Philippe et Alexandre maîtrisent le <strong>combat interarmes</strong>. La bataille ne se limite pas à un grand choc où les unités légères ne sont qu’accessoires.</p>
<h3>Préserver la conquête</h3>
<p>L’Empire perse (monstre de 50 millions d’habitants peut-être) a une dynastie à la légitimité fragile, une armée utilisant beaucoup l’infanterie légère, les archers et les mercenaires... grecs ! Les satrapes (gouverneurs) sont très autonomes : Alexandre sait les retourner pour assoir son propre pouvoir et assurer ses arrières.</p>
<h3>Mais aussi...</h3>
<p>Les ingénieurs grecs se montrent utiles pour l’artillerie de jet (innovation pendant les batailles) et les sièges (Tyr, Gaza).</p>
<h3>La fin</h3>
<p>L’Empire d’Alexandre n’a finalement comme limite que la fatigue de ses soldats après la conquête de la vallée de l’Indus. À la mort (de maladie ?) du conquérant, ses généraux se partagent les territoires. Puis il s’empressent de se faire la guerre pendant plus d’un siècle, avec des armées alourdies, moins formées, moins fiables.</p>
<p>Avant qu’une armée de citoyens-soldats sans général de génie mais encore mieux organisée, adaptable et manœuvrable mette tout le monde d’accord : la légion romaine.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-32-aout-2016-l-armee-d-alexandre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/827“The sleepwalkers — How Europe went to war in 1914” (« Les somnambules — Eté 1914 : Comment l’Europe a marché vers la guerre ») de Christopher Clarkurn:md5:2521e44836d265fb4a56207b0ef066e22015-04-19T22:25:00+02:002021-07-31T14:38:14+02:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypseautodestructioncataclysmecatastrophecolonisationdommagedéterminismeEuropeguerregéopolitiquehainehistoireHistoire de FranceimpérialismeincohérencenationalismeperspectivepessimismepolitiquePremière Guerre Mondialeprise de têteprovocationpsychologieRealpolitikRussieuchronie <blockquote><p>The outbreak of the war was a tragedy, not a crime. <br /> <em>Le déclenchement de la guerre fut une tragédie, pas un crime.<br /><br />Christophe Clark, </em>The Sleepwalkers<em>, Conclusion, p. 561</em></p></blockquote>
<p>L’Europe s’est suicidée sans que personne veuille vraiment la guerre : c’est la tragédie de la Première Guerre Mondiale, et une leçon pour le futur. Certaines causes résonnent encore au XXIè siècle.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/GM1/the_sleepwalkers.jpg" alt="the_sleepwalkers.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<p>La séquence d’introduction porte déjà la violence des conséquences lointaines (oui, le titre français est trompeur : Christopher Clark commence bien plus tôt que l’été 1914). En Serbie en 1903, des officiers ultranationalistes assassinent sauvagement le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Ier_de_Serbie">roi Alexandre</a> et sa femme. D’après la description de Clark, ce souverain n’était pas très sympathique, mais les tueurs ne le sont pas plus. Cette clique militaire régicide, notamment un certain colonel <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dragutin_Dimitrijevi%C4%87">Apis</a>, va acquérir une grande influence en Serbie dans les années suivantes, et, de manière à peu près autonome, semer le trouble dans la Bosnie-Herzégovine voisine (partiellement serbe mais annexée par l’Autriche), puis organiser l’assassinat de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois-Ferdinand_d%27Autriche">François-Ferdinand</a>, l’allumette qui embrasera le continent.</p>
<p>Toute cette partie sur la politique serbe, le nationalisme intense, le déni par exemple de l’existence même de Slaves non serbes en Bosnie et Croatie, les exactions pendant la conquête serbe de la Macédoine en 1912-13… rappellent furieusement ce qui s’est passé dans les années 1990 en Yougoslavie ; jusqu’au rôle de la Russie, ange gardien autoproclamé des Slaves des Balkans ; jusqu’au conflit est-ukrainien actuel (un russophone est-il forcément russe ?).</p>
<h3>Les acteurs</h3>
<p>Clark fait le tour de toutes les grandes puissances du moment, leurs gouvernants, leur organisation, leurs faiblesses, leurs relations mutuelles…</p>
<p>Tout le monde voyait la Russie, en croissance très rapide, comme la nouvelle superpuissance, malgré la défaite de 1905 face au Japon, malgré son gouvernement pas très stable et marqué par l’absolutisme — ce qui ne voulait pas dire que le Tsar donnait toujours le ton.</p>
<p>À l’inverse, l’Autriche-Hongrie semblait en décrépitude, paralysée par un gouvernement double et les revendications ethniques, malgré une économie florissante. Que serait-elle devenue si François-Ferdinand avait vécu, lui qui ne voulait pas de guerre et ambitionnait de créer un État fédéral ?</p>
<p>Le fantasque Kaiser ne dominait pas une Allemagne envieuse des empires coloniaux de ses voisins.</p>
<p>La France ne s’impliquait pas dans les Balkans, sinon par ses banques et ses exportations d’armes. Face à des Ministres des Affaires étrangères instables, les diplomates étaient devenus autonomes ; mais en 1914 Poincaré, Président, donnait le ton et prônait la fermeté face à l’Allemagne. Clark n’est pas tendre avec lui.</p>
<p>L’Angleterre (comme souvent…) ne tenait pas à s’engager irrévocablement, comme la France auprès de la Russie. Au Foreign Office, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Edward_Grey,_1st_Viscount_Grey_of_Fallodon" hreflang="en">Edward Grey</a> n’en faisait qu’à sa tête et lia son pays à la France.</p>
<p>L’Italie, théoriquement alliée aux puissances centrales, se rapprochait de plus en plus de l’Entente.</p>
<p>Les états des Balkans combattaient depuis 1912, contre l’Empire ottoman et entre eux.</p>
<h3>Les alertes et la déstabilisation</h3>
<p>La Grande Guerre n’a pas éclaté dans un ciel serein. Sans remonter jusqu’au conflit franco-allemand de 1870, les années d’avant-guerre virent plusieurs affrontements dont certains auraient pu dégénérer, et dont le souvenir influença les décideurs de 1914.</p>
<p>Allemagne et France s’accrochèrent notamment au Maroc (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coup_d%27Agadir">crise d’Agadir en 1911</a>), mais cela ne dégénéra qu’en marchandage (Maroc contre Cameroun). L’Allemagne remettait en cause la domination britannique sur les mers, mais ne l’inquiéta en fait jamais sérieusement. En Asie, les impérialismes russe et britanniques se heurtèrent plus d’une fois (Inde, Afghanistan, Iran…), sans conséquence majeure. En Afrique, les Anglais s’étaient heurtés aux Français (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_de_Fachoda">Fachoda en 1898</a>), et, juste après, lors de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Boers">guerre des Boers</a>, émergea fugitivement l’idée d’une alliance franco-germano-russe contre l’Empire britannique.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/627px-Balkan_1912.svg.png" title="627px-Balkan_1912.svg.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.627px-Balkan_1912.svg_m.png" alt="627px-Balkan_1912.svg.png" style="float:left; margin: 0 1em 1em 0;" /></a>La vraie déstabilisation commença en 1912 avec l’agression italienne contre l’Empire ottoman, qui perdit Lybie et Dodécanèse. Les jeunes et ambitieux États européens fraîchement émancipés de la tutelle turque (Serbie, Bulgarie, Grèce) se ruèrent sur l’Empire malade. Le partage tourna mal : la Bulgarie finit en guerre contre ses anciens alliés, et la Serbie menaça déjà de déclencher une guerre européenne en voulant croquer l’Albanie (et l’on parlait déjà de purification ethnique au Kosovo). Autriche et Italie considérèrent cela comme une ingérence dans leur sphère ; l’Autriche mobilisa partiellement ; la Russie aussi. On fut à deux doigts de la guerre ; puis les Serbes, sous la pression internationale, renoncèrent. Ces fausses alertes éloignèrent le spectre d’un conflit continental, et en 1914 les décideurs y crurent hélas moins.</p>
<h3>Des blocs non figés</h3>
<p>Tout n’était pas figé, et la guerre n’était pas inéluctable. Certes certains l’attendaient, par exemple certains Allemands effrayés de la très rapide (mais fragile) évolution industrielle et militaire russe, ou certains généraux autrichiens belliqueux. Mais il existait à l’inverse une multitude de facteurs de pacification : Guillaume II, tout fantasque qu’il ait été, reculait devant cette perspective ; ses relations avec Nicolas II étaient cordiales ; la rivalité navale entre Royaume-Uni et Allemagne avait déjà été gagnée par le premier ; François-Ferdinand ne voulait pas de guerre… Les guerres d’agression entre puissances européennes étaient impensables<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, même l’attaque autrichienne sur la Serbie nécessitait une justification. (<strong>Ajout de 2021</strong> : <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-monde-d-hier-de-Stefan-Zweig">voir ce qu’en dit Stefan Zweig dans <em>Le monde d’hier</em></a>.)</p>
<p>Enfin, les alliances étaient elles-mêmes mouvantes : la petite Serbie avait été protégée par l’Autriche avant de se retourner contre elle ; les alliés balkaniques de 1912-13 s’étaient entre-déchirés immédiatement après leur victoire ; la Russie et l’Angleterre avaient de nombreux points de friction coloniaux ; l’alliance de la France démocratique et de la Russie autocratique n’allait pas de soi ; la Russie s’était focalisée sur les Balkans en partie parce que sa cible prioritaire (Constantinople et les détroits) restait pour le moment inaccessible ; la Turquie avait un général allemand pour moderniser son armée, mais aussi un amiral anglais pour sa flotte ; etc.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png" title="800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/histoire/.800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg_m.png" alt="800px-Map_Europe_alliances_1914-fr.svg.png" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>
Cette instabilité des blocs provoqua d’ailleurs l’enchaînement inéluctable ! La France craignait que la Russie, puissance montante, n’ait plus besoin de son alliance, absolument vitale pour elle contre l’Allemagne : Poincaré l’assurait donc de son soutien indéfectible, y compris dans les Balkans, pourtant inutiles aux Français. Symétriquement, l’Allemagne ne faisait pas confiance à seul grand allié, l’Autriche, et la soutint donc inconditionnellement, là aussi dans les Balkans. La Russie se devait de soutenir son allié serbe, autrefois soumis à l’Autriche. L’Angleterre avait garanti la protection des côtes du nord de la France, dont toute la flotte croisait en Méditerranée : l’Angleterre se voyait donc entraînée par son alliée contre l’Allemagne.</p>
<h3>Tous ensembles vers l’abîme</h3>
<p>La Main Noire serbe, aidée par des services serbes, sans accord réel du plus haut niveau, place ses tueurs : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gavrilo_Princip">Prinzip</a> assassine l’archiduc François-Ferdinand. L’Autriche-Hongrie prend son temps pour l’enquête, finit par envoyer un ultimatum à la peu coopérative Serbie — ultimatum que Clark trouve presque acceptable, comparé à celui adressé par l’OTAN à la Serbie en 1999 ! La tradition occidentale veut que la Serbie ait quasiment accepté ces conditions coupant toute justification à l’attaque autrichienne ; en fait Clark qualifie la réponse serbe de « chef-d’œuvre d’équivoque diplomatique » (<em>a masterpiece of diplomatic equivocation</em>). L’Autriche menace d’attaquer, la Russie mobilise (complètement), donc l’Allemagne prend peur et mobilise, provoquant la mobilisation française. La rapidité de mobilisation et d’attaque pouvant décider du sort de la guerre, les hostilités commencent ; puis l’entrée du Reich en Belgique provoque l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne.</p>
<p>Cet enchaînement, tout le monde l’avait vu venir, mais personne ne le voulait et chacun croyait faire toutes les concessions possibles pour éviter la guerre. Dans les deux camps, chacun pensait que ceux d’en face la voulait, et y recourrait sans une volonté de fer en face — toute conciliation ou désaveu d’un allié serait donc un dangereux signe de faiblesse, de plus inutile puisque l’ennemi <em>voulait</em> la guerre. La fermeté protégeait donc la paix. Sans cela, difficile d’expliquer que Poincaré en Russie lie sciemment la France aux événements d’une zone aussi instable que les Balkans. Et chaque progrès d’une alliance effrayait l’autre, la poussant à se préparer au pire (un grand classique).</p>
<h3>Facteurs psychologiques</h3>
<p>Ils jouèrent massivement dans l’enchaînement de la crise. Les Serbes en voulurent trop dès 1912, et surestimèrent le poids du soutien russe. Les Autrichiens, exaspérés par les Serbes depuis des années, furent légers en les attaquant sans penser aux terribles conséquences. En cette période sans instance supranationale reconnue, tout abandon de souveraineté était inconcevable — les Serbes ne pouvaient <em>pas</em> accepter l’ultimatum. Les Russes ne comprirent pas que les Autrichiens ne pouvaient <em>pas</em> laisser passer impuni le meurtre du prince héritier. Les Autrichiens auraient pu attaquer dès après le meurtre, ce qui aurait été bien mieux accepté, mais le processus de décision de la double monarchie se traînait (les Hongrois notamment craignaient une invasion des Carpathes par la Roumanie). Les Russes auraient pu attendre pour mobiliser, laissant aux Serbes une chance d’accepter l’ultimatum, ou se contenter d’une mobilisation partielle contre l’Autriche pour ne pas effrayer l’Allemagne, mais leur logistique ne le prévoyait pas. Les Allemands auraient pu se contenter de n’envahir qu’une petite partie de la Belgique (<em>tout le monde</em> s’y attendait) : cela aurait donné une chance aux pacifistes dans le gouvernement anglais. Mais les militaires allemands (contrairement aux civils) sous-estimaient la Grande-Bretagne.</p>
<p>Clark ajoute une note : la « masculinité » du mâle européen semblait menacée à cette période précise par les évolutions de la société et, par réaction, le besoin de s’affirmer dur et endurant prenait le pas sur les vieilles valeurs aristocratiques, plus accommodantes.</p>
<p>Une chose finalement est sûre : attribuer à l’Allemagne la responsabilité totale de la guerre dans le Traité de Versailles, en plus d’une faute politique à l’époque, était purement et simplement une erreur factuelle. Si les Alliés s’imaginaient dès le début que l’intransigeance autrichienne venait de Berlin, la paranoïa régnait partout.</p>
<h3>Digestion</h3>
<p>C’est un pavé (pas loin de 600 pages en anglais sans les notes) et, forcément, les affrontements diplomatico-commerciaux subtils et pleins de sous-entendus ne sont pas la meilleure matière pour des rebondissements trépidants mêlés de réparties cinglantes, surtout quand on connaît déjà la fin. J’ai été un peu frustré par la relation du déclenchement des hostilités : Clark s’arrête aux mobilisations et ne relate pas l’assassinat de Jaurès, par exemple (est-il tellement important d’ailleurs, vu par un Anglo-Saxon ?) ni les réflexions des Français dans les derniers jours.</p>
<p>Si le passionné d’histoire trouvera son compte dans les causes plus ou moins immédiates de la mort de millions de soldats et l’effondrement de quatre empires, le dilettante risque de trouver la chose indigeste. <em>The Sleepwalkers</em> est pourtant déjà devenu une référence sur le sujet. Et comme je le disais au début, le XXIè siècle semble en rejouer des pans entiers.</p>
<p>Quant à l’amateur d’uchronies, il croulera sous les points de divergence potentiels…</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Contre les Turcs et autres non-Européens, on s’en donnait par contre à cœur joie.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-sleepwalkers-de-Christopher-Clark#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/786« Guerres & Histoire » n°20 d’août 2014 : qui a eu la peau de la Wehrmacht ? et le C-130 Herculesurn:md5:597db747fca5971493946d301b7d598f2014-09-03T22:55:00+02:002014-09-08T21:23:29+02:00ChristopheHistoireAllemagneautodestructioncatastrophecommunismeEmpire soviétiqueEuropeguerrehistoireLibérationlogistiquenationalismeorganisationRussieSeconde Guerre MondialetotalitarismeÉtats-Unisévolution <p>« Alliés ou Armée rouge : qui eu la peau de la Wehrmacht ? » : voilà un titre bien vendeur, comme si la défaite du Reich n’était dû qu’à l’un ou l’autre (et sans qu’aient pesé les combats en Italie ou dans les airs au-dessus de l’Allemagne). Le texte est plus sérieux (et ne répond pas à la question d’ailleurs). Un autre article s’étend sur l’increvable avion de transport (et plus) C-130 Hercules.</p>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/GuerreEtHistoire_20.jpg" title="GuerreEtHistoire_20.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/.GuerreEtHistoire_20_m.jpg" alt="GuerreEtHistoire_20.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a></p>
<h3>Overlord et Bagration : la tenaille</h3>
<p>La France a été libérée par les Anglo-Saxons à la suite du Débarquement de Normandie, et des combats se sont déroulés chez nous, il est donc normal que nous nous souvenions mieux de ces événements que de « Bagration », offensive soviétique lancée à peu près au même moment. La synchronisation des deux attaques date de la conférence de Téhéran de 1943, moment où Churchill doit abandonner sa stratégie « périphérique » (Italie, Balkans...) face aux Américains qui veulent foncer sur la Ruhr.</p>
<p>Le résumé d’Overlord n’apprend rien de neuf, et résume que la préparation de cette opération effroyablement complexe a été exemplaire, y compris les volets sur l’intoxication de l'ennemi (Fortitude...), et l’exécution en général saine.</p>
<p>À l’est, Staline et <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">Joukov</a> veulent profiter à fond de l’effet Overlord, et montent une opération bien plus ambitieuse que les précédentes. Ou plus exactement, suivant l’art soviétique de la guerre, une cascade d’opérations, de la Finlande à la Roumanie. Bagration, sur l’axe central en Biélorussie, n’est que la plus notable. Staline veut récupérer le maximum de territoires : sa paranoïa lui fait craindre un renversement d’alliances, notamment si Hitler est renversé. Le but ultime (atteint) est le passage de la Vistule, avec la moitié ouest de la Pologne et l’Allemagne en perspective.</p>
<p>Bagration et consorts alternent les attaques sur différents fronts, attirant les blindés allemands là pour attaquer ailleurs. Les Soviétiques, saignés pendant la guerre, compensent des effectifs plus réduits par une expérience croissante et surtout une écrasante supériorité en matériel (en partie américain). Les Allemands doivent lancer leurs réserves en France et ne peuvent résister.</p>
<p>L’effondrement du groupe d’armées Centre (Biélorussie) signe la pire catastrophe de l’histoire de la Wehrmacht, marquée par des paniques rarement vues jusque là. Hitler, fidèle à lui-même, retarde au maximum des retraites qui auraient permis de raccourcir le front. Le rouleau compresseur est lancé, il progresse sur des centaines de kilomètres, dépasse les frontières soviétiques de 1941, entre dans les Balkans, pour ne s’arrêter qu’à Varsovie. Les Allemands perdent un million d’hommes à l’est entre juin et fin août 1944. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Walter_Model">Model</a>, brillant tacticien envoyé par Hitler de la Biélorussie à la Normandie, ne peut que limiter les dégâts, mais porte des coups rudes aux unités trop avancées (Arnhem, Varsovie...).</p>
<p>Les Alliés exploitent à fond leurs deux percées : à la fin de l’été 1944, Hitler a perdu la France, la Belgique, la moitié de la Pologne et de la Grèce, quasiment tous les États baltes ; la Finlande, la Roumanie et la Bulgarie ont changé de camp ; les Soviétiques sont même entrés en Prusse orientale.</p>
<p>Mais après soixante-dix jours, quasiment simultanément en septembre 1944, Russes et Américains arrivent au bout de leur logistique après avoir libéré des pays aux ports et réseaux routiers et ferroviaires ruinés, et vont donner aux Allemands le temps de se ressaisir pour leurs dernières offensives.</p>
<p>Un article termine sur le complot du 20 juillet contre Hitler : son échec, au moment où la situation militaire est catastrophique sur deux fronts, soude le pays autour du Führer, renforce la répression, et élimine la résistance. La peur de la défaite, des Russes, d’une révolution communiste permettent au nazisme de tenir l’Allemagne plus que jamais. La seule issue est l’anéantissement.</p>
<p>Au passage, je signale <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/2014/07/jean-lopez-operation-bagration-la.html">cette page</a> sur le livre <em>Bagration</em> de Jean Lopez (auteur principal des articles résumés ici, et directeur de <em>Guerre & Histoire</em>), où <a href="http://historicoblog3.blogspot.fr/p/lauteur-du-blog-stephane-mantoux.html">Stéphane Mantoux</a> trouve de nombreux trous dans la bibliographie et fait de nombreuses remarques sur tel ou tels point. Manifestement il y a un contentieux entre lui et Jean Lopez, je ne peux juger, je note que le livre est au moins une bonne compilation, et lisible, des recherches issues d’autres langues.</p>
<h3>C-130</h3>
<p><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg"><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/aeronautique/.RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek_m.jpg" alt="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="'RAAF Lockheed C-130H Hercules AVV Creek' by Ian Creek - http://www.airliners.net/photo/Australia---Air/Lockheed-C-130H-Hercules/1195243/L/. Licensed under GNU Free Documentation License via Wikimedia Commons - https://commons.wikimedia.org/wiki/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg#mediaviewer/File:RAAF_Lockheed_C-130H_Hercules_AVV_Creek.jpg" /></a></p>
<p>C’est un nom mille fois entendu ou lu : le C-130 Hercules est la bête de somme multifonction de nombre d'armées. L’<a href="http://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-et-Histoire-n15-octobre-2013#rev-pnote-754-4">ouranocratie</a> américaine repose au moins autant sur cet avion de transport pas très <em>sexy</em> que sur les avions de chasse.</p>
<p>Soixante ans après sa conception, on le produit encore, évidemment remis au goût du jour et décliné en d’innombrables versions. Les avions conçu pendant la guerre avaient montré leurs limite pendant le pont aérien sur Berlin notamment, et l’Air Force avait commandé un avion conçu d’emblée comme militaire (et non une déclinaison militaire d’un avion civil), capable de remplir de nombreuses missions différentes.</p>
<p>Lockheed créa alors un avion « bien conçu, mais pas révolutionnaire ». Bref, une merveille d’ingénierie bien pensée. Par exemple, la fameuse rampe arrière permet de débarquer du matériel (parfois sans atterrir !) ou de larguer des parachutistes. Les ailes sont hautes et les trains d’atterrissage rangés dans des nacelles pour dégager la cabine. Il se contente de peu pour décoller et atterrir : c'est le plus gros appareil à avoir apponté et redécollé d’un porte-avion ! Et l’autonomie est respectable.</p>
<p>Transport de troupes, de matériel, parachutages, ravitaillement en vol, bombardier d’eau civil, lance-drone, batterie d’artillerie volante... : il fait tout. Et partout : c’est un énorme succès commercial (y compris en Iran, en Inde ou en France, qui l’utilise pour l’intervention au Mali).</p>
<p>Bref, un coucou qui volera encore un siècle après sa conception !</p>
<h3>Divers</h3>
<p>Sinon dans ce numéro :</p>
<ul>
<li>Un ancien pilote vietnamien raconte comment il a descendu un Phantom américain en 1972... et comment il a retrouvé l’un des pilotes et est devenu son ami. Quelque part, c’est totalement surréaliste.</li>
</ul>
<ul>
<li>Pendant l’évolution de l'espèce humaine, la face se serait aplatie pour mieux encaisser les coups de poings, au moment où la main devenait un poing bien percutant. Le mythe du bon sauvage en prend encore un coup. Nous descendons donc de ceux qui encaissaient — et donnaient — le mieux les coups. (<strong>Mise à jour</strong> : <a href="http://www.dinosauria.org/blog/2014/06/26/le-cassage-de-gueule-est-il-aux-origines-de-lhumanite/">une grosse objectction ici</a>)</li>
</ul>
<ul>
<li>Des photos des guerres balkaniques en 1912-1913 : un avant-goût de la Grande Guerre, y compris tranchées sur front bloqué, mitrailleuses et artillerie, qui aurait dû mettre la puce à l’oreille des grandes puissances sur ce qui les attendait.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les généraux sudistes n’étaient pas forcément meilleurs que ceux du Nord. Cependant, la culture aristocratique au Sud favorisait le métier des armes, et une bonne partie des officiers était donc sudiste, du moins au début.</li>
</ul>
<ul>
<li>La plupart des Français évacués à Dunkerque en 1940 étaient revenus en France avant même l’armistice : ils n’étaient donc pas « disponibles » pour de Gaulle.</li>
</ul>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerres-Histoire-n-20-la-peau-de-la-Wehrmacht-C130-Hercules#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/776« The End » de Ian Kershaw : l’agonie de l’Allemagneurn:md5:8edf1de24e73d2fd8a75ab588386538b2013-07-24T21:59:00+02:002019-02-03T17:39:19+01:00ChristopheHistoireabominationAllemagneapocalypsecataclysmecatastrophecommunismecoup bascynismedommagedécadencedéshumanisationEmpire soviétiquegaspillagegigantismeguerrehainehistoireincohérenceLibérationlivres lusmortnationalismeoh le beau cas !panurgismeparadoxepeine de mortpessimismeracismeracléesabotageSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p>Au début j’avais titré « l’agonie du IIIè Reich ». Mais cela aurait été faux : c’est bien l’Allemagne toute entière qui a payé pour quelques mois de résistance inutile et sanglante, au mépris de toute logique militaire.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/the_end_kershaw.jpg" alt="the_end_kershaw.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /></p>
<h3>L’autodestruction</h3>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ian_Kershaw">Ian Kershaw</a> s’étonnait qu’il n’y ait pas de livre sur ces derniers mois de la guerre vus du côté allemand ; il l’a donc écrit, et il analyse les raisons de cette incompréhensible obstination allemande à laisser anéantir son pays par le double rouleau compresseur allié — pour <em>rien</em>.</p>
<p>Pourtant, dès l’été 1944, en tout cas au plus tard début janvier 1945 (après l’échec allemand dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_Ardennes">les Ardennes</a> et alors que les Soviétiques dévastent la Prusse Orientale) il aurait dû être clair que tout était perdu et qu’il valait mieux négocier une reddition. La stratégie de la lutte « fanatique » pied à pied ne pouvait mener à rien. La population était à bout de souffle, les réserves en hommes raclées jusqu’à l’absurde, l’économie étouffée (malgré les talents d’organisateurs de Speer), la Luftwaffe anéantie, les voies de communications en ruine, les villes rasées.</p>
<p>Les chiffres donnent le vertige : sur 18,2 millions de soldats allemands mobilisés en 1939-45, 5,3 millions sont morts, dont 2,6 millions après juillet 1944 — autant en dix mois que dans les quatre premières années de la guerre. Et parmi eux 1,5 million sur le front est : ils ne se sont donc pas défendu que contre les « bolcheviques ».</p>
<h3>Mécanisme pour un suicide collectif</h3>
<p>Dans les dernières semaines, 10 000 soldats tombaient chaque jour. Seuls les plus fanatiques croyaient encore aux « armes miracles » promises par Hitler, ou à l’éclatement de la coalition alliée. Alors pourquoi lutter ?</p>
<p>La réponse est complexe. Les dirigeants nazis étaient parfaitement au courant que les Alliés ne leur feraient aucun cadeau. Pour Hitler, les Allemands s’étaient montré faibles, ils devaient disparaître avec lui. Il est allé au bout de sa démentielle logique suicidaire, mais il a
bien été le seul avec <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Goebbels">Goebbels</a>. Mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Himmler">Himmler</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bormann">Bormann</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%B6ring">Göring</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Speer_%28p%C3%A8re%29">Speer</a>, les généraux, l’essentiel des <em>Gauleiters</em> (chefs de partis régionaux)... avaient bien l’intention de sauver leur peau, et ceux qui se sont plus tard suicidés allaient être fait prisonniers. Certains se voyaient un rôle dans l’Allemagne d’après-guerre (Speer), voire tentèrent très timidement de négocier dans le dos d’Hitler. La population, qui avait soutenu le nazisme durant une douzaine d’années, ne faisait plus confiance ni au Parti ni au Führer. Pourtant, pour bien moins, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_allemande_de_1918-1919">elle s’était soulevée en 1918</a>, et cela valait aussi pour les soldats.</p>
<p>Pourtant, il a fallu attendre encore une semaine après la mort d’Hitler pour que son successeur l’amiral <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_D%C3%B6nitz">Dönitz</a> jette l’éponge et signe la reddition sans condition face à toutes les armées alliées.</p>
<p>Dönitz, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guderian">Guderian</a>... : nombreux de généraux se peignirent dans leurs mémoires comme de simples exécutants apolitiques. Il est vrai qu’Hitler n’écoutait pas leurs conseils et refusait le moindre repli. Beaucoup rêvaient de sauver les meubles par une paix séparée avec les Occidentaux, mais ils exécutèrent ces ordres absurdes et menèrent le combat de leur mieux, sur les deux fronts et jusqu’à la fin. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Claus_von_Stauffenberg">Von Stauffenberg</a>, <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/[Dönitz">Rommel</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Henning_von_Tresckow">von Tresckow</a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ludwig_Beck">Beck</a> avaient pourtant montré que des officiers, eux-mêmes très nationalistes, étaient capables d’agir — hélas ils étaient l’exception.</p>
<p>L’attentat raté de juillet 1944 est une des clés. D’abord il a remonté la cote d’Hitler auprès des Allemands, vacillante depuis l’enlisement en Russie, bien que le Führer soit resté plus populaire que le Parti nazi. Puis il a conforté le dictateur dans son idée que la Wehrmacht était remplie de traîtres, responsables de tous les échecs. Ensuite, il entraîne la mise en place d’un régime de terreur, réprimant toute déviance, tout défaitisme, toute méfiance envers le Führer, tout doute envers la victoire future.</p>
<p>Le souvenir de l’insurrection de 1918 hantait Hitler. Il avait décidé qu’il n’y aurait pas de réédition de ce « coup de poignard dans le dos ». Ce régime de terreur ira donc <em>crescendo</em>, s’accentuant avec chaque revers : peine de mort pour les déserteurs, les couards, les défaitistes, pour tous ceux osant évoquer une possible négociation avec au moins les puissances occidentales, ou tentant d’éviter d’inutiles combats dans leur ville ; cours martiales volantes exécutant elles-mêmes les condamnations ; massacres de civils affichant des drapeaux blancs... Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Werwolf_%28Freisch%C3%A4rlerbewegung%29" hreflang="de">Werwolf</a> devait mener une guérilla dans les zones occupées, et punir les « collabos » (au final sans grand succès, mais il y eut tout de même quelques milliers de morts selon Kershaw).</p>
<p>Parallèlement la pression sur la population s’accentua : Goebbels parvint à dégager des centaines de milliers d’hommes à envoyer au front <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>, quitte à désorganiser l’économie et les productions d’armement, au grand dam de Speer. Le <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Volkssturm" hreflang="de">Volkssturm</a> enrôla des millions de vieux ou très jeunes Allemands dans une armée hétéroclite, mal habillée, très mal armée, sans efficacité militaire et au taux de perte terrible. Dans les zones proches du front, vieux, jeunes et femmes furent contraints de creuser des fossés qui n’ont pas stoppé l’Armée Rouge plus de quelques heures.</p>
<p>La bureaucratie civile laissa place à celle du Parti, omniprésente, sur fond d’affrontement larvé entre Speer et Goebbels, entre ceux qui pensaient à l’avenir et les partisans de la terre brûlée. Le Parti et les SS se mirent à dominer aussi sur le plan militaire (on confia une armée à Himmler, avec des résultats désastreux). On exigeait un sacrifice aveugle des soldats. Il y eut même des kamikazes nazis.</p>
<p>Ainsi la population se retrouva en tenaille entre un Parti punissant cruellement toute déviance ; des conditions de vie de plus en plus difficiles ; des exigences de service militaire ou paramilitaire démentielles ; la menace des bombardements alliés réduisant méthodiquement les villes en miettes ; à l’est la menace des Soviétiques. Les Allemands avaient perdu toute confiance en Hitler mais, épuisés, terrorisés, ils devinrent au mieux attentistes et fatalistes, priant pour que la fin arrive vite (<em>Besser ein Ende mit Schrecken als ein Schrecken ohne Ende</em> <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>) et les plus chanceux dans les zones préservées ne portent pas grande aide aux réfugiés de l’est.</p>
<p>Les soldats ne valaient souvent pas mieux. Également épuisés, tiraillés entre le danger des combats, la perspective des camps en Sibérie ou la liquidation pour couardise, inquiets pour leurs familles dans les villes bombardées ou les zones envahies par l’URSS, ils continuaient le combat — sans illusion pour la majorité. Sur le front de l’est, la conscience de défendre concrètement leur pays et leur famille d’un envahisseur barbare maintenait plus la combativité qu’à l’ouest. La terreur nazie, la menace sur les familles (<em><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sippenhaft">Sippenhaft</a></em>) mais aussi la cohésion avec les camarades limitaient les désertions, pourtant de plus en plus nombreuses au fur et à mesure de l’avancée alliée.</p>
<p>Les comportements varièrent suivant les fronts. À l’ouest, on craignait les bombardements anglo-américains sur les villes, mais les troupes d’occupation, relativement disciplinées, n’inspiraient pas la peur. Nombre de villes voulurent se rendre pour éviter la destruction : leur sort se joua dans le rapport de force entre notables voulant épargner vies et biens, et nazis jusqu’au-boutistes prêts à sacrifier une bourgade pour stopper les Américains une heure. (Au passage, une pique sur le comportement des Français : leurs troupes n’ont pas été exemplaires et ont commis leur lot de pillages et viols. Kershaw note qu’il y a une amplification possible du phénomène dans la mémoire et les sources : les soldats étaient souvent issus des colonies.)</p>
<p>C’était bien pire à l’est. Les soldats mesuraient parfaitement la barbarie du comportement allemand en Europe de l’Est, et se doutaient, puis surent, que les Russes allaient leur faire payer. La propagande soviétique attisait la haine. Les soldats allemands prisonniers savaient que, même avec de la chance, ils passeraient des années en Sibérie (et une bonne partie n’est pas revenue). Quant aux civils, ils fuyaient en masse pour éviter viols (généralisés), pillage, voire destruction de villes entières. La peur des « Asiatiques », amplifiée par la propagande de Goebbels, mena à des scènes de suicides collectifs dignes des Japonais à Okinawa. Pour les habitants de Prusse ou de Poméranie le salut n’existait que dans la fuite, au milieu d’un hiver terrible — les plus fragiles mourront souvent. <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup></p>
<p>Les chefs du Parti donnèrent cependant rarement l’exemple du sacrifice qu’ils prônaient. Les premiers à punir toute reculade, ils étaient aussi les premiers à fuir dès que possible, sans oublier leurs biens. À côté de Göring et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hans_Frank">Hans Franck</a>, la palme revient peut-être à <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Erich_Koch">Erich Koch</a>, à la tête la Prusse Orientale assiégée par les Russes : il refusa la moindre évacuation de civils, mais prit au tout dernier moment la fuite en bateau, en n’oubliant pas sa Mercedes.</p>
<p>Kershaw conclut que l’effarante résistance allemande tenait aussi bien à la structure du pouvoir nazi et à la terreur qu’aux rigidités de la mentalité des soldats allemands, sinon de tout l’appareil institutionnel. Si population et soldats étaient terrorisés et préoccupés par leur survie immédiate, les généraux risquaient bien moins (surtout d’être démis <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup>). Si on peut comprendre que les circonstances ou le chaos rendaient un coup d’état impossible, pourquoi n’ont-ils pas au moins « levé le pied » ? Si les Russes et le communisme semblaient un danger tellement effroyable, pourquoi ne pas avoir ouvert le front à l’ouest pour sauver les meubles ? Le serment de fidélité au Führer, l’honneur militaire, toute une tradition militariste allemande d’ordre et d’obéissance inconditionnelle, leur interdisait de tenter quoi que ce soit contre la hiérarchie en place. Après tout, <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2007/10/07/424-biographie-de-l-amiral-canaris-par-andre-brissaud-6">même Canaris avait renoncé à s’attaquer à Hitler</a>. Ce n’est qu’à la mort d’Hitler que Dönitz (paradoxalement choisi par Hitler pour sa fidélité au national-socialisme) s’est senti autorisé à tenter une négociation puis à signer.</p>
<p>Pendant ce temps, l’administration continuait tant bien que mal de fonctionner, elle ne s’effondra pas brutalement. Les fonctionnaires considéraient que cela était leur « devoir », même dans des conditions difficiles, prolongeant ainsi la guerre et les destructions de plusieurs semaines.</p>
<h3>Et si...</h3>
<p>À la lumière de ce mécanisme Kershaw spécule : si Hitler était mort en juillet 1944, les conjurés auraient-ils pu réellement prendre le pouvoir ? Et s’ils avaient accepté la reddition sans condition, les SS auraient-ils suivi, dès 1944, surtout à l’est ? Une nouvelle légende du « coup de poignard dans le dos » serait née.</p>
<p>Pour Kershaw, l’exigence alliée d’une reddition sans condition n’a pas joué fondamentalement dans la prolongation de la guerre. Elle a souvent été présentée comme contre-productive car ne laissant aucune alternative aux Allemands que la lutte jusqu’au bout. Elle n’a cependant pas empêché la tentative de putsch de juillet 1944. C’est Hitler, relayé par son Parti, qui bloquait toute tentative de reddition, pas les généraux, même si ceux-ci obéissaient. En Italie, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Kesselring">Kesselring</a> n’a accepté la reddition de ses troupes qu’<em>après</em> le suicide du Führer. Et si la perspective de livrer des millions de soldats à l’Armée Rouge effrayait tout le monde, même Dönitz s’y est résolu quand Eisenhower a clairement dit qu’il n’y aurait pas d’alternative.</p>
<h3>Les victimes et les lâches</h3>
<p>Ian Kershaw parle aussi de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bombardement_de_Dresde">Dresde</a>, qui se croyait protégée par sa valeur architecturale, mais était aussi une cible car nœud de communications et centre industriel. Il y eut pourtant pire, en nombre de victimes (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Operation_Gomorrha" hreflang="de">Hambourg</a>) ou en proportion (<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Pforzheim#1918_bis_1945" hreflang="de">Pforzheim</a>).</p>
<p>En parallèle, Kershaw rapporte aussi le calvaire des prisonniers des camps de concentration, décimés dans des marches forcées en plein hiver, où beaucoup, sinon la plupart, trouvèrent la mort, et cela sans plus guère la moindre justification rationnelle pendant les derniers mois (ni otages ni force de travail). Apparemment ils n’obtinrent pas d’aide de la population, toujours abrutie de propagande.</p>
<h3>Après la guerre</h3>
<p>L’ampleur des pertes humaines et des destructions, le calvaire des réfugiés de l’est et la haine du Parti dans les derniers mois poussèrent plus tard les Allemands à se voir aussi comme des victimes du nazisme. Ce n’est pas complètement faux, pourtant ils l’avaient soutenu pendant des années malgré tous ses crimes. Certes une manière de se dédouaner lors de la dénazification, mais une réaction normale : le traumatisme a éclipsé dans l’inconscient tout ce qui l’a précédé. Le travail de mémoire a pris des années.</p>
<h3>Remarques personnelles</h3>
<p>On peut écrire des uchronies sur une fin de guerre différente. L’Allemagne actuelle est née de ce traumatisme : serait-elle devenue si démocratique et pacifique sans le cataclysme de 1945 ?</p>
<p>À la lecture des ordres hallucinants de cruauté et de mépris pour la population ou les soldats, on enrage que certains grands chefs s’en soient tirés : si Keitel a été pendu <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup>, bien des généraux qui ont suivi Hitler jusqu’au bout n’ont même pas été condamné à perpétuité par la suite : Dönitz, <a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Ferdinand_Sch%C3%B6rner" hreflang="de">Schörner</a>, Kesselring... alors qu’ils ont jusqu’au bout fait appliquer les ordres délirants et surtout la politique de terreur.</p>
<p>Quant à la forme du livre : rien à redire sur le texte, il est clair. La division en chapitre est chronologique, mais chacun traite successivement tous les thèmes. La masse de références à des travaux précédents est impressionnante. Hélas les notes sont en renvoi en fin de livre, et non en bas de page, ce qui est pénible. Or certaines sont très intéressantes et valent d’être lues.</p>
<p>Les termes sont tous traduits, il n’y a quasiment aucun texte en allemand, dommage pour les germanistes qui auraient préféré la version originale des citations.</p>
<p>La version française s’appelle logiquement <em>La Fin</em>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>J’ai connu un Allemand, lycéen à l’époque, qui a eu le choix entre s’engager volontairement dans la Wehrmacht, ou finir d’office dans les Waffen SS.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Plutôt une fin dans l’horreur qu’une horreur sans fin.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que le quart est du Reich devint polonais par la volonté de Staline : la frontière entre Germains et Slaves est donc revenue à la même position qu’en l’An Mil !</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Pourtant Kershaw donne lui-même l’exemple d’un général dont la famille fut emprisonnée car il avait reculé sans autorisation. Et la famille de von Stauffenberg a fini en camp de concentration. Les étoiles ne protégeaient donc pas du pire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Pas fusillé comme tout militaire, mais bien </em>pendu<em>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-End-de-Ian-Kershaw#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/747« Les Alsaciens et le Grand Tournant de 1918 » de Christian Baechlerurn:md5:62cd3b8068a646b3494354b8c5d0c3692013-06-01T22:53:00+02:002016-07-06T12:56:48+02:00ChristopheHistoireAllemagneAlsacealsaciendommagedémocratieguerrehistoireHistoire de FranceLibérationnationalismepanurgismepolitiquePremière Guerre Mondiale <p>Il y a pas mal de littérature sur l’annexion de l’Alsace-Loraine par l’Allemagne nazie (par exemple <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace">ce livre-là</a>). Mais il n’y a pas grand-chose sur la transition précédente, celle du retour à la France en 1918, après 48 ans de domination allemande.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/les-alsaciens-et-le-grand-tournant-de-1918.jpg" alt="les-alsaciens-et-le-grand-tournant-de-1918.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" />Le petit livre de Christian Baechler comble un peu le vide. Je lui reprocherais de plonger directement dans les événements de l'extrême fin de la Première Guerre Mondiale, et de s’étendre un peu trop sur les sources journalistiques et les querelles politico-politiciennes alsaciennes, pour passer trop rapidement sur l’annexion concrète. Mais ça n’en reste pas moins très instructif.</p>
<p>En 1914, avec les nouvelles générations nées après 1870, la germanisation de l’Alsace progressait. Cependant, les Alsaciens et Lorrains restaient un peu des Allemands de seconde zone : pas d’autonomie régionale, comme pour les autres États allemands, au mieux des discussions sans fin sur un rattachement à la Prusse ou la Bavière. Ce n’est que pendant la Première Guerre Mondiale que la création d’un Land à proprement parler est évoquée. C’est bien tard ; de plus au même moment la région est considérée comme terre occupée à cause de la guerre, et germanisée de force : en quelques mois a été dilapidé le capital sympathie accumulé depuis Bismarck.</p>
<p>À partir d’octobre 1918, pendant que les troupes alliées avancent, que la révolution gronde dans toute l’Allemagne, et que le gouvernement du Reich semble céder aux exigences du Président Wilson, il devient clair que les Français vont revenir. Le premier problème qui agite les politiciens alsaciens, de gauche comme de droite ou du centre catholique, concerne la représentativité des députés du Land : si l’Alsace veut avoir son mot à dire pendant les négociations de paix, ses députés sont-ils légitimes ? Le gouvernement français n’en aura de toute façon cure et rien ne sera négocié à Versailles.</p>
<p>Plus important, l’avenir de l’Alsace : les événements de l’automne 1918 provoquent bien des retournements de veste. Qui était farouchement pour le maintien dans le Reich devient autonomiste, partisan d’un État neutre entre les deux puissances — statut précaire, et pas qu’économiquement, et probablement source de querelles internes futures. L’Église vomissait la France laïque mais la préfère finalement à une Allemagne virant spartakiste. La question religieuse est un point d’inquiétude, ainsi que le changement des circuits économiques.</p>
<p>Faut-il un plébiscite ? Au final, personne n’en voudra. Le gouvernement allemand, se doutant d’un résultat défavorable, ne veut pas que cela ferme définitivement la porte au retour, un jour, de l’Alsace en Allemagne (cela n’aurait probablement pas arrêté Hitler, cela dit). La France considèrera que, par l’accueil enthousiaste de la population aux troupes françaises, le plébiscite est fait.</p>
<p>Cet accueil enthousiaste par une population germanique et regermanisée a été analysé, notamment par les Allemands (mauvais joueurs) : résignation, volonté de se retrouver dans le camp vainqueur, rejet des méthodes de terreur des militaires allemands pendant la guerre, effet des privations de la guerre, espoir que la France protège l’Alsace du chaos et de la famine, atmosphère extatique, « hypnose collective », volonté de choisir son destin au lieu d’être un objet de tractation, calcul politique, rejet de la rigidité prussienne, idéalisation de la France... Si les foules étaient énormes en ville, on ne sait rien de l’avis du paysan ou de l’ancien soldat à son retour.</p>
<p>La situation est compliquée par le retour de mutinés alsaciens de la marine de guerre, en pleine agitation révolutionnaire (mourir dans un baroud d’honneur contre la Royal Navy ne leur disait rien). C’est l’époque des conseils de soldats et des soviets ouvriers, et <a href="http://www.agoravox.fr/culture-loisirs/etonnant/article/novembre-1918-le-drapeau-rouge-46891">le drapeau rouge flotte sur la cathédrale</a>. À Strasbourg, ce soviet entre en concurrence avec la municipalité qui a choisi pour maire <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Peirotes">Jacques Peirotes</a>, un francophile. La cohabitation ne se passe pas si mal (les soviets sont aussi un moyen de canaliser l’agitation...). Tout le monde appelle au calme pour faciliter le ravitaillement de la population. Les révolutionnaires partent avant l’arrivée en fanfare des troupes françaises peu après l’armistice.</p>
<p>L’Alsace se convertit très vite au français, pourtant parlé par une minorité. Si le respect des particularismes religieux sera finalement acquis (et vaut encore aujourd’hui aux curés, rabbins et pasteurs alsaciens et mosellans de profiter de nos impôts, et aux enfants d’avoir le choix entre religion et morale à l’école), le bilinguisme est nié autant que possible. Nombre d’Allemands ou de personnes suspectes sont expulsés. C’est le retour de la centralisation à la française : aucun statut particulier n’est envisagé pour les trois nouveaux départements, même si le remplacement des lois allemandes par les françaises n’a jamais été achevé : en plus de la religion, il reste encore pas mal de spécificités en matière notariale, de droit des associations, du travail, de sécurité sociale plus favorable qu’outre-Vosges, etc.</p>
<p>Quelques semaines après son arrivée, l’administration française gagne déjà une réputation d’inefficacité, un peu imméritée vu le chaos entraîné par la guerre et le remplacement de tous les fonctionnaires. De plus, le taux de chômage s’envole avec le retour des soldats. Les comptes bancaires sont gelés, le temps de régler la question du taux de change, et la rupture de liens financiers et économiques avec l’Allemagne désorganisent l’économie. Il n’y a plus d’assemblée unique, mais trois départements.</p>
<p>Des commissions de triage se mettent en place pour expulser ou internés les personnes non fiables. Cette épuration mène à une masse de dénonciations intéressées. Le remplacement des fonctionnaires allemands expulsés par des Français est une autre cause du « malaise alsacien », qui mènera à la création de mouvements autonomistes.</p>
<p>À lire en ligne, <a href="http://w3.dna.fr/dossiers/2008/grande-guerre/20081118_noeuds-malaise-alsacien.php">une interview de l’auteur sur les DNA</a>.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Les-Alsaciens-et-le-Grand-Tournant-de-1918-de-Christian-Baechler#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/743« 1941-1942 : Et si la France avait continué la guerre… »urn:md5:6044450b72d481d1becc7d092454558a2013-05-18T00:00:00+02:002016-07-05T12:35:57+02:00ChristopheTemps et transformationsAllemagneAmériqueapocalypsechaoscommunismecomplexitéconquête de l’inutilecouragedéterminismeEmpire soviétiqueEuropegéopolitiquehistoireHistoire de Franceimpérialismelivres lusmémoirenationalismeperspectiveracismeracléeRussieSeconde Guerre MondialesimulationspéculationtempstotalitarismeténacitéuchronieémerveillementÉtats-Unis <p>Ceci est la suite d'une uchronie que j'avais pas mal appréciée, <em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre">la France continue la Guerre</a></em>, issue d'une <a href="http://www.1940lafrancecontinue.org/forum/">réflexion collective</a>.</p>
<p>Le point de divergence avec notre histoire portait sur le refus d'un armistice en juin 1940. <a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/1940-Et-si-la-France-avait-continué-la-guerre">Dans le premier tome était conté comment le Grand Déménagement emmène gouvernement et armée en Afrique du Nord</a>. La France entière est envahie, et la Royale et l'aviation continuent le combat vaille que vaille aux côtés des Britanniques. Ceux-ci connaissent une bataille d'Angleterre moins violente, et la Lybie italienne puis la Sardaigne tombent tout de suite aux mains des Alliés. Le théâtre des opérations se centre autour de la Méditerranée bien plus que dans la trame historique réelle. Le premier tome finissait fin 1940.</p>
<p><img src="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/images/livres/lafrancecontinue-2.jpg" alt="lafrancecontinue-2.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" /><em>1941-1942</em> prend la suite immédiate, pendant presque un an et demi. Presque jour par jour s'écoulent les opérations en Sardaigne, Corse puis Grèce (similaires mais différentes de ce qui s'est réellement passé en 1941) ou dans l'Empire italien ; en Asie et à Pearl Harbor ; et enfin en Russie. Les grosses différences concernent l'Indochine (menacée par les Japonais, alors que Vichy avait coopéré avec eux) et Barbarossa.</p>
<p>Ce livre se lit avec Wikipédia à côté pour goûter toute les différences entre la trame réelle et celle-ci fantasmée, bien similaire mais souvent subtilement différente. Accessoirement on apprendra des choses (qui se souvient qu'en 1941 nous avons mené une guerre contre la Thaïlande, ou que les Britanniques ont envahi l’Irak et l’Iran par précaution ?). Petites friandises : les allusions à des personnages dont le destin a basculé ou des films qui se seront inspiré des événements (que devient <em>Un taxi pour Tobrouk</em> dans un monde où Rommel sévit dans une Grèce enneigée ?).</p>
<p>C'est dans la postface que réside l'intérêt majeur. Jacques Sapir et ses confrères décrivent les choix qu'ils ont fait, leurs réflexions, leurs simulations. Tout en reconnaissant une part d'arbitraire, et que la probabilité de tomber juste se réduit au fur et à mesure que s'éloigne le point de divergence avec le réel, ils défendent les positions adoptées.</p>
<p>Économiquement tout d’abord : la France, forte de ses réserves d’or, pouvait se réarmer auprès du gigantesque « arsenal des démocraties » américain. Peinant encore à sortir de la crise de 1929, celui-ci ne demandait que cela, et l'argent et les ingénieurs français auraient stimulé la montée en puissance des États-Unis encore plus que dans la réalité : les nombreuses commandes de 1939 ou 1940 auraient été poursuivies, les Britanniques, soulagés d’une partie de l’effort, auraient pu rétrocéder des avions, et d'autres notables investissements auraient pu être faits pour les Français.</p>
<p>Les points de discussion principaux portent évidemment sur l'attaque japonaise généralisée de décembre 1941 sur les possessions occidentales (et accessoirement Pearl Harbor). Il n’y a pas de raison que les relations entre Japon et États-Unis, exécrables à cause des exactions en Chine, soient meilleures. Quel que soit le prétexte (ici l’intimidation des Japonais envers une France qui n’abandonne pas l’Indochine), étaient inéluctable l’embargo américain, puis l’affrontement armé : attaque des possessions occidentales en Asie, et raid sur Pearl Harbor. La Guerre du Pacifique commence de manière similaire, mais on nous promet une fin bien différente.</p>
<p>En Europe, la stratégie des Alliés est contrainte : ils sont forcés de contre-attaquer, et ne peuvent le faire qu’en Méditerranée, qui devient le champ de bataille principal, et en espérant détacher l’Italie de l’Axe. Même s’ils n’ont pas les moyens de leur ambition, cela ne fait pas l’affaire d’Hitler qui, lui, ne pense qu’à l’attaque de l’URSS.</p>
<p>C’est dans le premier tome que Sapir & compagnie avaient justifié le maintien de Barbarossa : la psychologie d’Hitler doit rester la même. La conquête du <em>Lebensraum</em> aux dépens de ces sous-hommes de Slaves <em>est</em> le but fondamental de sa guerre. Les Anglais et Français laisseraient tomber quand il aurait à sa disposition toutes les ressources de l’URSS, et ce n’était pas ces Américains enjuivés et négrifiés qui allaient changer grand-chose...</p>
<p>Toujours est-il que même le Führer doit se rendre à l’évidence : les combats en Méditerranée mobilisent trop de moyens et l’attaque doit être reportée d’un an <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Une année qui, la postface le décrit fort bien, a réellement manqué justement à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Joukov-l-homme-qui-a-vaincu-Hitler">Joukov</a> pour réorganiser l’Armée Rouge et la préparer au combat. Une Allemagne plus fatiguée attaquant une URSS bien mieux préparée : on nous promet des conséquences « cataclysmiques » pour le Reich.</p>
<p>Pour la forme, on retrouvera les mêmes défauts que pour le premier tome : une action trop détaillée quant aux opérations militaires et aux événements politiques au jour le jour, qui ne laisse pas assez de place pour les réflexions de fond, la vie des civils, les évolutions technologiques, l’impact du maintien des Français sur les opérations. Il est vrai que le pavé est déjà assez lourd... Les cartes manquent, et celles présentes renseignent peu. On aimerait plus de moyens de détecter les variations avec la réalité que la lecture parallèle de livres ou de Wikipédia.</p>
<p>Les premières salves de Barbarossa démarrent dans les dernières pages, et j’attends le tome 3. Par rapport à la réalité, comment les lignes de front finales se positionneront-elles ? Les Russes à Strasbourg, et les Japonais soumis <em>avant</em> de recevoir des bombes atomiques sur la tête ? Comme les habitants de ce monde fantasmé, il faudra patienter encore quelques temps...</p>
<p>PS : Voir aussi la <a href="http://alias.codiferes.net/wordpress/index.php/et-si-la-france-avait-continue-la-guerre-tome-2-1941-1942/">critique d’Alias</a>, fan du projet.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Rappelons que cela n’est qu’une extension de la trame historique : les Italiens ont réellement attaqué la Grèce fin 1940, et se sont fait raccompagner à la frontière. Ce qui motiva une intervention allemande en 1941, incluant l’invasion de la Yougoslavie. Militairement un succès foudroyant, mais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Op%C3%A9ration_Barbarossa#Plans_.C3.A9labor.C3.A9s_d.C3.A8s_1940">tout cela retarda de quelques semaines l’attaque de l’URSS...</a>, semaines qui manquèrent peut-être pour prendre Moscou, atteint et raté trop tard dans l’hiver. La ténacité grecque a peut-être fait perdre la guerre à l’Allemagne.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/1941-1942-Et-si-la-France-avait-continu%C3%A9-la-guerre#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/739« Guerre & Histoire » n°10 de décembre 2012 : Guerre de Cent Ans, Crimée, Pologne, Maison Blanche brûléeurn:md5:fae08c2dd2296d59b49fc4da560252912013-02-04T22:13:00+01:002016-03-21T12:59:32+01:00ChristopheHistoireAllemagneAntiquitécatastrophechâteauxEmpire romainGrandes InvasionsguerreGuerre de Cent AnsgéopolitiquehistoireHistoire de FranceMoyen ÂgemythemémoirenationalismeperspectivepolitiquePremière Guerre MondialesaturationSeconde Guerre Mondialeuchronieévolution <p><img src="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/images/livres/GuerreEtHistoire_10.jpg" alt="GuerreEtHistoire_10.jpg" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Guerre & Histoire n°10" /></p>
<p>J’aime bien ce magazine : à l’école ou dans les livres, on parle très peu de la science militaire alors que son rôle été capital. De plus, les auteurs ne se limitent pas à admirer les « gros tanks de la Wehrmacht qui auraient gagné la guerre si les Alliés avaient gentiment attendu 10 ans qu’ils les construisent en série », comme d’autres magazines, mais traitent aussi d’économie et de société : un précédent numéro parlait du rôle du pétrole dans la Seconde Guerre Mondiale<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Ici, ce sont les évolutions sociales pendant la Guerre de Cent Ans, avec les conséquences jusqu’à nos jours, qui font la couverture.</p>
<h3>Kippour, Crimée, Pologne, Maison Blanche cramée</h3>
<p>Rapidement, ce dont parle aussi ce numéro :</p>
<ul>
<li><strong>Un ancien jeune tankiste israélien</strong> raconte comment en 1973, surpris dans le Golan par l’attaque syrienne, son petit groupe de 13 chars a tenu tête, sans perte, à 450 tanks syriens, et en a détruit la moitié ! La formation, la motivation, et 6° de différence dans l’orientation du canon vers le bas, peuvent littéralement faire des miracles.</li>
</ul>
<ul>
<li>En France, la <strong>guerre de Crimée</strong> (1853-56) a été zappée de la mémoire collective, oblitérée par la défaite de 1870. Il ne reste que quelques noms de lieux, de stations, à Paris. Et pourtant, ce fut le premier conflit photographié. Les clichés présentés ici semblent surréalistes.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La cavalerie polonaise n’a jamais été assez stupide pour charger les panzers de la Wehrmacht en 1939 !</strong> Elle combattait normalement à pied, les chevaux n’étant que des moyens de transport adaptés à un pays aux mauvaises routes. Quelques rencontres imprévues ont été grossies par la propagande allemande, et le mythe perdure encore de nos jours.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>La Guerre de 1812 entre États-Unis et Angleterre</strong> marqua sans doute le premier acte impérialiste américain, et ça a plus mal fini encore qu’en Irak. À cause notamment du blocus napoléonien et des mesures de rétorsion anglaises, et voulant « libérer » le Canada sous-peuplé, des « faucons » poussent le Président Madison à l’attaque au nord. Mais l’armée américaine n’est pas organisée, alors que les Canadiens, bien que majoritairement francophones, restent fidèles à la couronne britannique, ainsi que leurs alliés indiens ; enfin la Royal Navy domine les mers. Humiliation, la Maison Blanche flambe. En 1815, les deux camps signent le match nul, la chute de Napoléon éteignant la cause du conflit (et libérant nombre de ressources anglaises...).</li>
</ul>
<ul>
<li>En 451, la célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_des_champs_Catalauniques_%28451%29">bataille des Champs Catalauniques</a>, mythique sauvetage par le « dernier des Romains », <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aetius">Aetius</a>, des reste de l’Empire romain face aux hordes hunniques d’Attila, a plutôt ressemblé à une bataille entre d’une part des Germains soumis aux Huns (Ostrogoths surtout, Hérules, Gépides, Francs...) et d’autre part des Germains alliés aux Romains (Wisigoths, Alains, d’autres Francs...), sans beaucoup de légions romaines par contre, mais quelques mercenaires huns avec Aetius. Au final, Aetius laisse filer Attila pour éviter une hégémonie wisigothe en Gaule. Attila ira encore piller l’Italie et Aetius, trop puissant, sera liquidé par l’Empereur en personne.</li>
</ul>
<ul>
<li>L’Angleterre a connu au XVIIè siècle sa période républicaine, d’un puritanisme extrême assez difficile à comprendre de nos jours (est-ce qu’on pourrait rapprocher ce mélange de théocratie et de parlementarisme avec l’Iran d’aujourd’hui ?). Cromwell, homme fort du Parlement, a pu s’imposer et écraser l’armée royale grâce à sa <em>New Model Army</em>. Sans stratégie vraiment originale, elle se fondait d’abord sur le mérite et non le sang bleu, sur une base nationale et non régionale, et enfin une part de fanatisme puritain. Assez pour prendre le pouvoir, pas assez pour consolider un régime pérenne qui ne survivra pas à Cromwell.</li>
</ul>
<ul>
<li>Les <strong><em>Liberty ships</em></strong> : ces milliers de bateaux de transport identiques construits à la chaîne en quelques dizaines de jours parfois sont l’exemple parfait de la toute-puissance industrielle américaine au service des Alliés.</li>
</ul>
<ul>
<li>Le <strong>Plan Schlieffen de 1914</strong> n'aurait pas été, comme on le pensait, vraiment conçu pour éviter la guerre sur deux fronts, mais était à l’origine le plan allemand contre... l’Angleterre (et non la Russie). Avec dans les deux cas la France comme adversaire secondaire à éliminer rapidement <em>via</em> la Belgique.</li>
</ul>
<h3>La Guerre de Cent Ans</h3>
<p>C’est une période charnière, chaotique, pleine de transformations douloureuses : une époque donc « intéressante » selon les critères de la vieille malédiction chinoise. Toutes les cicatrices ne sont pas refermées d’ailleurs, les vagues d’anglophobie et francophobie persistent encore parfois. (Rappelons qu’<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/03/18/318-les-guerres-oubliees-2">on peut considérer qu’il y a eu trois Guerres de Cent Ans</a>...)</p>
<h4>Chronologie</h4>
<p>Rappelons les grandes lignes de ce long massacre entre 1328 et 1453, en soulignant que les campagnes au Moyen Âge étaient brèves et entrecoupées de nombreuses trèves, d’où la durée.</p>
<ul>
<li><strong>Contexte</strong> : Les Capétiens, plus puissante monarchie d’Europe, devaient fatalement un jour rentrer en conflit ouvert avec les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plantagen%C3%AAt">Plantagenêt</a>, qui en plus de l’Angleterre possèdent de gros morceaux de la France (Normandie et Guyenne surtout). Il y avait déjà eu pas mal d’explications musclées avant que Philippe Auguste ne montre qui était le patron un siècle plus tôt. Finalement, des raisons économiques (Flandres) s’ajoutent, et ce sera une querelle dynastique qui déclenchera les festivités. Pour les détails, se référer à <a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis//index.php?post/2005/11/21/34-les-rois-maudits-contexte-ii">mon billet sur le contexte des Rois maudits</a>.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase I</strong> : Les Anglais ne cherchent qu’accessoirement la conquête, ils sont d’abord là pour piller. À Crécy les archers anglais écrasent l’armée de Philippe III. À Poitiers c’est carrément le fils de ce dernier, Jean II, qui se fait capturer, et comme rançon doit abandonner la moitié de son royaume à l’Anglais (mais il garde son trône). Autre catastrophe, la Peste Noire emporte un tiers de la population.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase II</strong> : Plus fûté que son chevalier de père, Charles V délègue au célèbre Du Guesclin les opérations militaires. Celui-ci préfère guérilla et harcèlement aux grandes chevauchées, et le résultat est là : les Anglais reperdent tout leurs gains. Fin du premier round et trève de quelques décennies.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase III</strong> : Le nouveau roi de France, Charles VI, devient progressivement fou. Les querelles pour sa tutelle mènent à une guerre civile entre ses oncles, cousins, et leurs descendants, divisés entre Armagnacs et Bourguignons. Le nouveau roi anglais Henri V en profite, s’allie aux Bourguignons, et prouve que les nobles français n’ont rien retenu de Crécy en les massacrant à Azincourt. La moitié de la France est occupée, et Henri V se fait reconnaître comme héritier de Charles VI, lequel déclare le Dauphin illégitime. Les deux rois meurent en même temps.</li>
</ul>
<ul>
<li><strong>Phase IV</strong> : Le Dauphin et son « royaume du Bourges » résistent un temps à l’envahisseur, puis arrive le catalyseur : Jeanne d’Arc. Charles VII sacré à Reims, la réconciliations avec les Bourguignons signée, la reconquête commence, pendant que l’Angleterre connaît à son tour la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Deux-Roses">guerre civile</a>. Les Anglais ne gardent que Calais. Fin du Moyen Âge.</li>
</ul>
<h4>Évolutions sociétales</h4>
<p>En un siècle, les armées féodales (temporaires, dominées par la chevalerie, peu soudées) sont devenues professionnelles (permanentes), puis modernes (disciplinées, avec beaucoup d’infanterie, de l’artillerie...).</p>
<p>Les Anglais innovent avec leurs fameux archers, issus des rangs des petits propriétaires. Malgré un entraînement étalé sur des années, ils étaient beaucoup moins chers que les lourds chevaliers français, forcément nobles, et beaucoup plus nombreux (l’Angleterre était bien moins peuplée que la France à l’époque).</p>
<p>L’entraînement d’autant d’archers et leur équipement nécessitaient une logistique, une planification, une proto-industrie et une quasi-conscription assez incroyables pour l’époque. Voilà pourquoi il y a tant de gens nommés Archer ou Stringer outre-Manche. Cette <em>gentry</em> a en conséquence gagné en poids fiscal puis politique : sont apparus alors les <em>Commons</em>, à côté des <em>Lords</em>, qui constituent encore aujourd’hui les deux chambres du Parlement britannique.</p>
<p>La France n’a pas compris ni cherché cette évolution. La levée en masse n’a jamais été à l’ordre du jour. La noblesse méprisait et la piétaille et ses ennemis, et était allergique au commandement unique : cela mena à Crécy, Poitiers puis finalement au massacre d’Azincourt.</p>
<p>L’armée permanente avait bien été inventée par Charles V, mais c’est l’élimination physique de nombreux nobles à Azincourt qui permet à Charles VII de moderniser le fonctionnement de l’ost royal, y compris son financement (la taille devient annuelle) et son recrutement (« gens d’arme » rattachés directement au roi, puis « francs archers » recrutés dans la population).</p>
<p>Enfin c’est l’artillerie qui fonde la puissance du roi de France : la noblesse n’a pas les moyens de se l’offrir, et ses châteaux ne résistent pas aux boulets. Bien qu’enrôlé, le peuple n’a toujours rien à dire. La suite, en caricaturant : absolutisme et Révolution violente.</p>
<p>Noter que cette émergence du peuple comme force militaire et politique était déjà ancienne et générale (milices italiennes qui fondent l’indépendance des cités ; communes des Flandres qui flanquent la pile à Philippe le Bel en personne ; cantons suisses...), et se poursuivra encore longtemps. Au passage, cela mènera à des batailles bien plus saignantes : fini l’esprit chevaleresque où on voulait d’abord des prisonniers à rançonner. (À rapprocher des Aztèques attaquant les Espagnols avec le même esprit...)</p>
<h4>Le nationalisme</h4>
<p>On savait déjà que le sentiment national français date de cette époque. Je me disais aussi que toute uchronie où les Anglais gagnaient impliquait une assimilation de l’Angleterre par la France : la noblesse anglaise étant parfois plus française qu’anglo-saxonne, ses conquêtes françaises auraient accentué le phénomène, et la différence démographique aurait fait le reste.</p>
<p>J’ai appris par contre que le sentiment national anglais a joué aussi, et contre eux : une victoire et la fusion des deux royaumes aurait mené à l’absorption par des Français honnis. J’aurais aimé plus de détails sur ce point...</p>
<h4>Évolutions technologiques</h4>
<p>L’armée anglaise est organisée autour de leur fameux arc, l’arme de destruction massive de l’époque, adapté à l’attaque par « saturation ». En face, les archers génois engagés par les Français misent sur la précision de leurs arbalètes, mais leur lenteur de réarmement les rend en fait plus adaptées aux sièges et aux batailles maritimes. L’arc perdra cependant de son importance suite à l’amélioration des cuirasses françaises à la toute fin de la guerre et plus tard à cause des armes à feu (plus chères mais plus faciles à maîtriser).</p>
<p>En face, les Français n’utilisent sérieusement l’artillerie qu’à la toute fin.</p>
<h4>La fin</h4>
<p>Quand Bordeaux tombe, Charles VII met fin à trois siècles d’affrontement entre Capétiens et Plantagenêt. Et c’est aussi par l’artillerie qu’au même moment les Turcs prennent Constantinople et achèvent l’Empire romain. Aux deux extrémités de l’Europe sonne ainsi la fin la fin du Moyen Âge.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Article d’ailleurs qui noie dans l’huile la crédibilité de toute uchronie où le Japon ou l’Allemagne gagne la guerre : dans une guerre archi-mécanisée, Américains et Russes avaient quasiment tout le pétrole, et ce que l’Axe a pu ou aurait pu atteindre était trop loin pour le ramener.</em> </p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Guerre-Histoire-n-10#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/728« Le Gauleiter Wagner, le bourreau de l’Alsace » de Jean-Laurent Vonauurn:md5:b35ff5a411081023de1b28e318390ba32012-07-15T18:28:00+02:002016-05-16T15:19:08+02:00ChristopheHistoireabominationAllemagneAlsacealsaciencataclysmecolonisationdéfense du françaisdéshumanisationesclavageguerrehistoireHistoire de FranceimpérialismeLibérationnationalismeoh le beau cas !peine de mortRésistanceSeconde Guerre Mondialeterrorismetotalitarisme <p><img src="http://ecx.images-amazon.com/images/I/41F7X8l9w%2BL._SL500_AA300_.jpg" alt="Image bouquin" style="float:right; margin: 0 0 1em 1em;" title="Image bouquin" /> Robert Wagner a dirigé l’Alsace pendant l’« annexion de fait » et, loin d’être un simple exécutant passif, a activement poussé la germanisation et la nazification. Il est allé au-delà des désirs d’Hitler dans l’incorporation de force de milliers d’Alsaciens — des milliers ne sont pas revenus du front russe.</p>
<h3>L’annexion de fait</h3>
<p>Wagner est un nazi de la première heure, accompagnant Hitler dès son putsch raté de 1923, y compris en prison. Intelligent, sans scrupule, sans éthique, Wagner incarne le parfait nazi.</p>
<p>En juin 1940, l’armée française est écrasée, et l’Alsace occupée. Mais l’Occupation n’y revêt pas le même sens que dans le reste de la France, et le Reich d’Hitler n’est pas celui d’avant 1914. Dès l’été, Wagner, Gauleiter (responsable du Parti et, de fait, de l’administration civile) de Bade, rattache l’Alsace à son Gau, puis commence le processus d’annexion et de germanisation complète de la région. Le gouvernement de Vichy proteste à peine. Il n’y aura jamais d’annexion officielle, mais ce sera tout comme. Wagner sera l’exécutant zélé de ce processus. Il promet de faire en cinq ans ce qu’Hitler jugeait faisable en dix — dont l’expulsion de 40% de la population <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>.</p>
<p>Environ 135 000 personnes (réfugiées dans le centre de la France avant l’offensive) ne rentrent pas, et plus de 21 000 sont expulsées car françaises ou francophiles. Les noms de ville et de place changent très vite. Chaque ville se retrouve avec une <em>Adolf Hitler Straße</em>. Le français est interdit, les livres brûlés, les patronymes germanisés.</p>
<p>Les « nancéiens », des autonomistes avec un certain poids, sont placés à des postes de responsabilités. Les postes de douane sont déplacés vers l’ouest à la frontière de 1871. Les fonctionnaires doivent déclarer leur adhésion au national-socialisme ou perdre leur emploi. Le courrier est ouvert. Le parti étend son maillage étouffant sur tout le territoire <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-2" id="rev-wiki-footnote-2">2</a>]</sup>.</p>
<p>Économiquement, l’Alsace est spoliée. Le taux de change de 20 RM pour un 1 F est un scandale. De nombreux biens d’expulsés, émigrés et autres « ennemis du peuple » sont confisqués. Tous les postes clés passent aux mains d’Allemands de confiance, les banques et industries sont rattachées à des groupes allemands. Les salariés sont fichés. Les marchés agricoles, en raison des pénuries, sont très étroitement contrôlés. Au fur et à mesure que la guerre avance, les Alsaciens se retrouvent contraints de travailler uniquement pour l’industrie de guerre quand ils ne sont pas enrôlés. Beaucoup sont ruinés.</p>
<p>Pour Wagner, tout va bien. En 1942, 20% de la population alsacienne est encadrée par le parti nazi. En fait, pour les trois quarts il s’agit des Jeunesse Hitlériennes <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-3" id="rev-wiki-footnote-3">3</a>]</sup> et d’<a href="https://de.wikipedia.org/wiki/Deutsches_Frauenwerk" hreflang="de">organisations féminines</a>.</p>
<p>Le passage sur l’université de Strasbourg est abject : la vraie ayant été déplacée avant l’offensive à Clermont-Ferrand, et y étant restée, Wagner fait créer <em>ex nihilo</em> une nouvelle université, fer de lance contre l’Occident. Comme professeurs, on n’importe que des nazis convaincus<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-4" id="rev-wiki-footnote-4">4</a>]</sup> triés sur le volet, et aucun Alsacien. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/August_Hirt">Dr Hirt</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-5" id="rev-wiki-footnote-5">5</a>]</sup> fait des expériences et se constitue une collection de squelettes à partir de prisonniers des camps d’Auschwitz puis du Struthof.</p>
<p>Ajoutons un culte de la personnalité tout à fait dans la manière nazie. Certaines photos sont éloquentes.</p>
<h3>Les camps du Struthof et de Schirmeck</h3>
<p>Il existe un camp de concentration, parmi les pires, en Alsace, au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Camp_de_concentration_de_Natzwiller-Struthof">Struthof</a> (52 000 détenus d’un peu partout, 22 000 morts dont certains en chambre à gaz), mais il n’est pas vraiment sous la responsabilité de Wagner, ni destiné aux Alsaciens, sinon comme épouvantail. Pour eux, il y a le « camp de rééducation » de Schirmeck, pour tous les réfractaires, contestataires et suspects de francophilie, pour quelques jours ou à vie. Le camp est géré par la Gestapo et arrive au chiffre de deux mille internés. La ration alimentaire, insuffisante pour le travail demandé, et les brimades sadiques entraînent de fréquents décès.</p>
<h3>La résistance</h3>
<p>Dans un tel contexte, difficile de résister. Cependant il y a un « rapport d’Alsace » pour avertir Vichy et Londres de la situation : il montre au Gauleiter que son administration est noyautée. La Gestapo redouble d’efforts, la plupart des réseaux sont démantelés fin 1942.</p>
<p>Quand les tribunaux sont impliqués, il appliquent le droit allemand, et surtout la conception très particulière de la justice qu’ont les nazis. Wagner fait des exemples, les condamnations à mort pleuvent.</p>
<h3>L’incorporation de force</h3>
<p>L’incorporation de force est le plus grand crime reproché à Wagner. Il pousse auprès d’Hitler, contre l’avis de Keitel <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-6" id="rev-wiki-footnote-6">6</a>]</sup> à l’intégration rapide de classes d’âge entières. Il en verse même d’office dans les Waffen-SS <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-7" id="rev-wiki-footnote-7">7</a>]</sup>. Pour ce nazi convaincu, le sang versé et la communauté d’armes doivent accélérer l’intégration de l’Alsace au IIIè Reich. Il ne réussit qu’à braquer définitivement la population.</p>
<p>Au début on fait appel aux volontaires : l’échec est cuisant. L’incorportation devient donc obligatoire en août 1942. Les jeunes qui refusent de partir mettent leur famille en danger : des milliers de personnes sont ainsi « transplantées » dans le Reich <sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#wiki-footnote-8" id="rev-wiki-footnote-8">8</a>]</sup>. Des milliers fuiront tout de même.</p>
<p>Les officiers alsaciens de l’armée française faits prisonniers en 1940 sont rapidement libérés s’ils se reconnaissent comme <em>Volksdeutsch</em> (ethniquement allemands). Mais par la suite, on impose leur passage dans les Waffen-SS.</p>
<h3>Le procès</h3>
<p>La deuxième moitié du livre est consacrée à son procès en 1946. Il donne au passage un bon aperçu de la manière dont fonctionne la justice lors de l’épuration, et ses limites. L’auteur est juriste, il se fait aussi plaisir.</p>
<p>Wagner a été livré aux Français par les Américains. Il est jugé avec cinq autres membres de l’administration et de la « justice » de la période d’annexion.</p>
<p>Bizarrement, sont d’abord reprochés à Wagner et consorts des crimes précis (la liquidation de quatre aviateurs britanniques prisonniers, la condamnation à mort de résistants et jeunes rebelles à l’incorporation...) et accessoirement l’incorporation de force. De manière générale, le procès ne semble pas très bien mené, et se révèle plutôt frustrant pour les Alsaciens.</p>
<p>La légalité de l’annexion revient périodiquement. Pas évoquée par la convention d’armistice de juin 1940, jamais entérinée par aucun traité, elle est légalement nulle. L’enrôlement des populations dans l’armée allemande viole donc toutes les conventions. Mais les nazis s’assoient sur le droit. Wagner a beau jeu de rappeler qu’en 1918, le retour de l’Alsace à la France a été précipité aussi, avant même le Traité de Versailles, et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alsace-Lorraine#L.27expulsion_des_Allemands">avec des expulsions d’Allemands à la clé</a>.</p>
<p>Wagner tente de se présenter comme un simple exécutant de la volonté du Führer. Les témoins ne cessent de montrer qu’au contraire il avait une grande marge de manœuvre, pouvait influencer même Hitler, voire passer outre à ses consignes, pouvait ordonner au système judiciaire des condamnations à mort , et avait la haute main sur les grâces et exécutions.</p>
<p>Tous les accusés sont condamnés à mort, sauf le procureur Luger, acquitté, lui qui avait pourtant requis plusieurs peines de mort devant le tribunal spécial alsacien... Fragile sur le plan strictement juridique, comme toute justice de vainqueur et pour crime contre l’humanité, cette condamnation est politiquement nécessaire pour les Alsaciens, qui ne voient pas d’autre issue possible après leur calvaire.</p>
<p>Sur la forme, le livre souffre de deux petits défauts : beaucoup trop de notes regroupées en fin de volume, quand elles auraient pu être en bas de page voire dans le texte même, et quelques passages et citations en allemand non traduites (moi je m’en fiche).</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Ce n’était qu’un début, les nazis avaient de grands projets de dépeçage de la France en cas de victoire.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-2" id="wiki-footnote-2">2</a>] <em>Je ne crois pas que des habitants des démocraties occidentales actuelles puissent même imaginer ce que doit être ce climat de suspicion complet qui règne d’ailleurs encore dans quelques pays.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-3" id="wiki-footnote-3">3</a>] <em>Rappelons que ce n’était </em>pas<em> volontaire comme pour les scouts...</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-4" id="wiki-footnote-4">4</a>] <em>Les autres avaient été virés du corps enseignant, de toute façon.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-5" id="wiki-footnote-5">5</a>] <em>Cet infect personnage n’a même pas été jugé, il s’est suicidé en 1945, je ne crois pas que le livre le précise.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-6" id="wiki-footnote-6">6</a>] <em>Chef suprême de la Wehrmacht pendant la guerre. Pendu à Nuremberg. Pas fusillé, pendu.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-7" id="wiki-footnote-7">7</a>] <em>Et on n’avait pas forcément le choix entre SS et Wehrmacht « classique ». D’où la présence d’Alsaciens dans la division </em>Das Reich<em> coupable du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Oradour-sur-Glane">massacre d’Oradour</a>, sujet encore sensible en Alsace soixante-dix ans après</em>.</p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#rev-wiki-footnote-8" id="wiki-footnote-8">8</a>] <em>Le livre ne le précise pas vraiment, mais une « transplantation » n’est pas un simple déménagement forcé, mais une <a href="http://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2007-2-page-53.htm">quasi-déportation en camp de travail</a></em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Le-Gauleiter-Wagner-le-bourreau-de-l-Alsace#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/701« La guerre et la paix » de Léon Tolstoïurn:md5:ddefbe9a9950c3c78da216c77e7d684c2011-09-11T15:59:00+02:002015-09-14T13:02:01+02:00ChristopheSur mes étagères alourdiesauto-organisationchaoscomplexitéEuropegigantismeguerrehistoireimpérialismelivres lusmythenationalismepanurgismeRussie<p>Déjà, dit-on <em>Guerre et paix</em> ou <em>La guerre et la paix</em> ? En russe l’article n’existe pas, et la traduction français pourrait subir l’influence du <em>War And Peace</em> qui est dans le même cas. Je reprends lâchement le titre de mon bouquin, une édition de presque cinquante ans. Deux fois plus de 700 pages en poche, écrit petit. Ça m’a occupé tout l’été.</p> <h3>Résumé à la <a href="http://www.quotationspage.com/quote/36.html" hreflang="en">Woody Allen</a></h3>
<p>Ça parle de la Russie.</p>
<h3>Résumé moins sommaire</h3>
<p>Ne cherchez pas l’intrigue, il n’y en pas pas.</p>
<p>C’est un des côtés furieusement modernes de ce roman, remontant pourtant à l’époque de la libération des serfs russes (1861) : le fil conducteur est très ténu — ou plutôt il est multiple.</p>
<p>Car si les mêmes personnages reviennent entre 1805 et 1820 (le prince Vassili, la famille du comte Rostov, le prince André, Pierre…), on en suit plus certains au départ, pour s’accrocher ensuite à d’autres. Il y a de la place pour nombre d’histoires dans un pavé de cette ampleur.</p>
<p>Tout ce beau monde ou presque fait partie de la très haute société russe, celle qui possède plusieurs palais dans différentes villes, compte sa fortune en âmes (de serfs), considère que le vrai monde tourne autour des bals et réceptions mondaines, et parle autant français que russe (!). Les serviteurs, précepteurs et nounous ont droit à quelques mentions, le reste, hors militaires, n’existe quasiment pas.</p>
<p>La vie suit son cours : pendant que le rouleau compresseur napoléonien passe sur l’Europe pour refluer après Moscou, la petite et trop gâtée Natacha Rostov grandit, découvre l’amour et en fait n’importe quoi ; Pierre, un bâtard sur qui la fortune est tombée brusquement, passe le livre à essayer de découvrir ce qu’il veut faire de sa vie ; Nicolas Rostov gagne ses galons sur les champs de bataille ; Boris le fauché, forcé d’être arriviste, grimpe dans la société et choisit sa femme pour son argent… La vie à cette époque est dure, des personnages meurent à qui le lecteur s’était attaché, à la guerre ou en couche, en deux lignes ou en cent pages.</p>
<p>La conquête de l’Europe par Napoléon constitue l’arrière-plan, puis au deuxième tome l’avant-plan avec l’invasion de la Russie, Borodino, la prise de Moscou, la retraite… Les personnages participent à quelques batailles plus ou moins complètement décrites.</p>
<p>C’est tout d’abord Austerlitz, un grand chaos où, comme le répète plusieurs fois Tolstoï, personne ne sait vraiment ce qui s’est passé, et en tout cas cela n’avait rien à voir avec les plans des généraux des deux camps.</p>
<p>La boucherie de Borodino (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_la_Moskova">la Moskowa</a> pour nous Français) est plus importante. C’est à la fois une victoire et une défaite : Napoléon a forcé le passage de Moscou, à un prix effroyable, son armée étant en fait blessée à mort. Pour le général en chef russe Koutouzov (Tolstoï a manifestement beaucoup de tendresse pour ce vieil homme qui avait compris qu’il fallait plutôt éviter de livrer bataille), Borodino est une victoire… avec des pertes tellement énormes qu’il ne peut contre-attaquer immédiatement et doit livrer Moscou aux Français.</p>
<p>La fuite devant les armées françaises puis l’exode de la population moscovite (vu de l’exaspérante lorgnette des nobles qui déménagent carrément) constituent des passages assez glauques. Au passage : Moscou abandonnée devait « forcément » brûler : la ville était en bois !</p>
<p>Durs également les passages sur la retraite des Français en pleine débandade, et l’armée russe qui les poursuit (inutilement, l’ennemi fuyant le plus vite possible) tout en subissant l’hiver et les privations autant qu’eux. Les souffrances des soldats « de base » ne sont pas négligées.</p>
<p>L’épilogue se déroule quelques années après le départ des Français, et est suffisamment long pour que je ne me frustre pas<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-guerre-et-la-paix-de-L%C3%A9on-Tolsto%C3%AF#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup>. Le tout dernier chapitre est une longue réflexion de Tolstoï sur la manière dont on écrivait l’histoire en son temps, histoire beaucoup trop centrée sur les chefs d’État et les militaires. Pour lui, Napoléon n’a rien fait, il n’aurait rien fait sans des peuples entiers dans le même mouvement. Son échec en Russie tient aussi au soulèvement du peuple russe entier, pas à ses dirigeants.</p>
<p>De même, une bataille ne peut être dirigée, y compris par Napoléon, c’est l’action de chacun des combattant, les paniques collectives et les enthousiasmes contagieux, qui font le résultat des batailles, dans le chaos le plus complet. Les généraux ne contrôlent rien même au niveau stratégique ; par exemple la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Campagne_de_Russie_(1812)#La_marche_sur_Moscou">politique de la terre brûlée</a> était plus une conséquence du mouvement rapide des Français qu’une volonté réelle. De toute manière Tolstoï dépeint les états-majors comme des paniers de crabes où, dans les situations les plus désespérées, prime la mesquine recherche des avantages personnels. Le fatalisme (typiquement russe ?) parcourt tout le livre, y compris dans beaucoup de destins personnels (Pierre épouse Hélène parce que tout le monde s’y attendait).</p>
<p>(Les champs de bataille ont bien évolué depuis cette époque où les colonnes avaient du mal à se situer mutuellement, à savoir où elles étaient, et où les transmissions se faisaient par messager à cheval ; et depuis longtemps on sait que l’histoire tient souvent plus aux peuples et à l’économie qu’aux chefs. Quoique. Je laisse le sujet aux historiens.)</p>
<p>Bref : un grand roman avec du souffle, de l’Histoire, du romantisme, du panache, du réalisme, et de la Russie.</p>
<p>Ceux qui voudront dire qu’ils l’ont lu sans le faire peuvent se limiter à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_et_Paix">la page Wikipédia</a>.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-guerre-et-la-paix-de-L%C3%A9on-Tolsto%C3%AF#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>L’épilogue vite expédié après la victoire finale est un problème récurrent je trouve dans beaucoup de sagas modernes : </em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/Harry-Potter-and-the-Order-of-the-Phoenix#pnote-579-2">Harry Potter</a><em>, </em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/The-Farseer-Trilogy-de-Robin-Hobb">L’assassin royal</a>… </p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/La-guerre-et-la-paix-de-L%C3%A9on-Tolsto%C3%AF#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/659Plus d’histoire en terminaleurn:md5:fece58e2cad69f31836d0e4282b622aa2009-12-11T21:46:00+01:002009-12-11T21:47:02+01:00ChristopheRes publicaabominationAllemagneapocalypseautodestructionbon senscatastrophecitationcivilisationcommunicationconquête de l’inutilecoup basculturecynismedécadencedémocratiedéshumanisationenfantsenseignementexpertisefoutage de gueulegéographiegéopolitiquehistoireincohérenceintelligencelibertémèmemémoirenationalismeouverture d’espritpanurgismeperspectivepessimismepolitiqueprovocationSeconde Guerre Mondialetempstotalitarismeéconomie de l’attention <p>Dans le cadre de l’hallucinant débat sur la consternante proposition de supprimer l’histoire-géo en terminale :</p>
<blockquote><p><em>Those who cannot remember the past are condemned to repeat it.</em><br /> <br />Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter. <br /> <br /><a href="http://en.wikiquote.org/wiki/George_Santayana" hreflang="en">George Santayana</a>, <em><a href="http://www.gutenberg.org/files/15000/15000-h/vol1.html" hreflang="en">The Life of Reason</a></em>.</p></blockquote>
<p>J’avais trouvé cette citation très connue en en-tête de <em><a href="http://www.amazon.fr/Rise-Fall-Third-Reich-History/dp/0671728687/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=english-books&qid=1260563359&sr=1-2en">Rise and fall of the Third Reich</a></em> (<em>Le Troisième Reich : Des origines à la chute </em>) de William L. Shirer.</p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/Plus-d-histoire-en-terminale#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/595“The electric telegraph made possible - indeed, inevitable - the United States of America.”urn:md5:75d7f49f877b5f6c5d6f82bedd5b1a8b2009-09-08T00:00:00+02:002011-06-03T21:44:40+02:00ChristopheCitationsAmériqueauto-organisationcitationcivilisationcommunicationconquête spatialedéveloppementguerregéographiegéopolitiquehistoiremèmenationalismeoptimismeorganisationperspectivepessimismepolitiquesciencescience-fictionsolidaritéÉtats-Unisévolution <blockquote><p>“<em>A hundred years ago, the electric telegraph made possible — indeed, inevitable — the United States of America. The communications satellite will make equally inevitable a United Nations of Earth; let us hope that the transition period will not be equally bloody.</em>”<br /><br />« Il y a cent ans, le télégraphe électrique a rendu possibles — en fait, inévitables — les États Unis d'Amérique. Les satellites de télécommunication rendront aussi inévitables les Nations Unies de la Terre ; espérons que la période de transition ne sera pas aussi sanglante. »<br /> <br />Arthur C. Clarke, <em>First On The Moon</em>, épilogue (1970)</p></blockquote>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/The-electric-telegraph-made-possible-indeed%2C-inevitable-the-United-States-of-America#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/575« Le fantôme de Staline » de Vladimir Fédorovskiurn:md5:b9af76e6a22197838d5c8519c19d10b42009-03-16T00:00:00+01:002023-12-27T12:01:32+01:00ChristopheHistoireabominationcommunismecynismedécadencedémocratiedéshumanisationEmpire soviétiqueespionnagefichageguerreGuerre Froidegéopolitiquehistoireimpérialismelivres lusmanipulationmythenationalismeparadoxepolitiquepsychologieRealpolitikRussieSeconde Guerre Mondialetotalitarisme<p>Ce n’est pas un roman, « juste » un livre d’histoire sur la Russie et l’URSS, de Lénine à Vladimir Poutine. <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vladimir_Fédorovski">Vladimir Fédorovski</a> sait de quoi il parle, il était du sérail sous Brejnev et Gorbatchev.</p> <p>Les deux tiers du livre traitent de <a href="http://www.fsa.ulaval.ca/personnel/vernag/leadership/disk/russie2_index.htm">Staline</a>, maître du pays de 1924 à 1953, du pouvoir totalitaire, de la terreur, héritée de Lénine et amplifiée, qu’il infligea à son peuple — deux fois (déjà avant la guerre, puis à nouveau celle-ci terminée : la sanglante Seconde Guerre Mondiale paraît paradoxalement une époque de liberté pour les Soviétiques !), et de la permanence de certaines tendances de l’histoire russe, notamment le besoin d’un pouvoir central fort.</p>
<p>Le parallèle entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ivan_le_Terrible">Ivan le Terrible</a> et Staline ne date pas d’hier : le Tsar Rouge lui-même voyait dans la lutte impitoyable d’Ivan IV contre les boyards le parallèle avec son propre besoin d’éliminer toute opposition — jusqu’à l’absurde, jusque dans sa propre famille ! La mécanique de terreur stalinienne, basée sur l’espionnage généralisé, la responsabilité collective, le changement permanent de la Ligne, est bien démontée.</p>
<p>Quasiment en aparté, Fédorovski parle de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Boris_Pasternak">Boris Pasternak</a>, Prix Nobel de littérature 1958 et connu en Occident notamment pour le <em>Docteur Jivago</em><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#wiki-footnote-1" id="rev-wiki-footnote-1">1</a>]</sup> — on saura tout sur les amours du poète, et notamment <em>qui</em> est Lara. Bizarrement, Pasternak a été plutôt protégé par Staline.</p>
<p>Même si Poutine partage la couverture avec son sinistre prédécesseur, il n’est question de lui qu’à la toute fin du livre, après que Fédorovski ait déroulé la manière dont le système totalitaire soviétique (sous une forme bien moins sanglante) s’est perpétué sous Khroutchev, Brejnev, Andropov, comment il a tenté de se réformer sans lâcher son emprise, comment il a échoué. Remarquable aussi la manière dont les services secrets (outil sous Staline, entité autonome sous Andropov, quasiment indépendante par la suite) se sont retrouvés les seuls en mesure de reprendre le contrôle d’une Russie en décomposition, que Gorbatchev et Eltsine ont laissé être dépecée par des groupes financiers et mafieux.</p>
<p>Vladimir Poutine — un inconnu au départ, choisi par un Eltsine finissant comme héritier pour garantir la survie de son clan — faisait partie de l’élite de la Russie soviétique, destinée forcément au KGB. Ses contacts lui ont permis de reprendre le contrôle de son pays, et de surfer entre les différents clans qui se le partagent. Comme Staline, il sait parler à la fameuse « âme » de la Russie, à son nationalisme, son besoin de grandeur, son impression d’être différente, ni européenne ni asiatique. Comme Staline, les dérives sont effrayantes.</p>
<p>Un grand résumé d’histoire russe du XXè siècle, très accessible.</p>
<div class="footnotes"><h4>Note</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#rev-wiki-footnote-1" id="wiki-footnote-1">1</a>] <em>Je n’ai pas (encore) lu le livre mais vous </em>devez<em> voir le film si ce n’est déjà fait. Une bonne impression du chaos de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_civile_russe">Guerre civile de 1918-21</a>.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2009/03/08/%C2%AB%C2%A0Le-fant%C3%B4me-de-Staline-%C2%BB%C2%A0de-Vladimir-F%C3%A9dorovski#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/541« Dis-lui bien que si j’ai pu tirer c’était par nécessité... »urn:md5:abc11d1ce507eb66185d81742aa3e8802008-11-11T12:13:00+01:002009-04-13T09:31:01+02:00ChristopheCitationscataclysmecitationguerrehistoireHistoire de FranceimpérialismenationalismepessimismePremière Guerre Mondiale <blockquote><p>« Fais que notre enfant soit digne de toi et de ses grand-parents : elle n’aura pas à rou­gir de son nom, dis-lui bien que si j’ai pu tirer dans ces affreux moments c’était par néces­sité mais que je n’ai jamais sacri­fié une vie inu­ti­le­ment, que je réprouve ces meur­tres col­lec­tifs, que je les con­si­dère comme pires que des assas­si­nats, que je n’ai haï que ceux qui les ont voulu. »<br /> <br />Marin Guillau­mont, ins­ti­tu­teur auver­gnat, <br /> let­tre à sa femme depuis le front pour la nais­sance de sa fille, 14 décem­bre 1914.<br />Gazé, il décède en 1926.<br />Cité dans <em><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Poilu">Paro­les de Poi­lus</a></em></p></blockquote>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2008/11/11/dis-lui-bien-que-si-j-ai-pu-tirer-c-etait-par-necessite#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/486Une grande victoireurn:md5:7b06eaf564bfb3efa5bc59c92612db302007-09-17T21:00:00+00:002011-04-26T08:17:05+00:00ChristopheInclassable & inclassébon sensjeunationalismeoptimismepanurgismeperspective<p>Victoire française en rugby contre la Namibie : faut-il sauter de joie comme le font les journalistes ?</p> <p><a href="http://www.latribune.fr/info/Rugby--France-Namibie---le-match-de-la-renaissance--selon-Jo-Maso-029-~-AP-RUGBY-MONDIAL-FRANCE-MASO-$Db=News/News.nsf-$Channel=Sport-$SubChannel=Rugby">Ils sont contents, ils ont vaincu la Namibie</a>. Une véritable renaissance. Un triomphe. La fin de la période noire.</p>
<p>Mais c’était la Namibie, nom de Zeus ! La <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Namibie">NAMIBIE</a> ! Même pas deux millions d’habitants<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/17/413-une-grande-victoire#pnote-370-1" id="rev-pnote-370-1">1</a>]</sup>, dont 7% de Blancs qui semblent quasiment les seuls à s’intéresser au rugby vue la carnation des joueurs, un pays qui est surtout une plage géante de 200 à 500 km de largeur et pas grand-chose d’autre, sans boue pour s’entraîner au plaquage.</p>
<p>Sans vouloir dénigrer les Namibiens (et surtout pas le joli sprint en dernière minute qui a mené à leur seul essai), il faut dire qu’ils ne sont pas spécialement dans les favoris de la Coupe du Monde. Pour se qualifier, la Namibie a dû <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Coupe_d'Afrique_de_rugby_à_XV_2006">écraser en 2006</a> des puissances majeures du rugby mondial comme le Swaziland ou le Maroc (l’Afrique du Sud n’a dégainé que son équipe amateur, probablement par esprit sportif).</p>
<p>Donc se glorifier d’avoir battu le petit poucet... Ah, si Schumacher avait hurlé sa joie d’avoir battu une Clio de série avec sa F1, ou si l’équipe de France de foot se glorifiait d’avoir écrasé le <a href="http://perso.orange.fr/stat2foot/champ0607/cfaga.htm">Schiltigheim Sporting Club</a>, les journalistes auraient été moins mielleux, voire ironiques.</p>
<p>On verra contre les Irlandais. Eux arrivent en quart de finale en général.</p>
<p><strong>PS</strong> : Que ceux qui me connaissent se rassurent, la fin de France-Namibie est à peu près tout ce que j’ai vu en rugby depuis le début du siècle. Mais vu ce que j’entends à la radio, je me dis que moi aussi je pourrais être commentateur sportif - ou plutôt non, je ne pourrais pas, vu le chauvinisme ambiant.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/17/413-une-grande-victoire#rev-pnote-370-1" id="pnote-370-1">1</a>] <em>Bon, ça ne veut rien dire. Les Tonga et leurs cent mille habitants ont mis la pâtée aux États-Unis forts de 300 millions d’âmes.</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2007/09/17/413-une-grande-victoire#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/370L’Allemagne sous la botte napoléonienneurn:md5:1a4dfa13b3be691a279e20d47a9969502006-08-14T20:57:00+00:002010-11-03T20:38:07+00:00ChristopheHistoirehistoireHistoire de FranceimpérialismenationalismeRealpolitik<p>Un des raisons des succès européens de Napoléon est la coopération de nombreux princes allemands. Cette alliance vira vite à une mise sous tutelle durable de l’Allemagne entière, dont la cartographie politique fut radicalement simplifiée.</p> <p><em>Ce billet est inspiré par un dossier du magazine allemand </em><a href="http://www.pm-magazin.de/de/aktuellehefte/pm_history.htm" hreflang="de">PM History</a><em>, numéro 8/2004 (magazine d’histoire grand public). </em></p>
<h3>La liquidation d’un Empire anachronique</h3>
<p>On parle peu de l’action de <a href="http://www.napoleon.org/fr/home.asp">Napoléon Ier</a> en Allemagne dans nos cours d’histoire (si même on parle de Napoléon tout court) ; en général on retient que l’Empereur a pulvérisé militairement tous ses adversaires sauf les Anglais, jusqu’à l’erreur majeure de tenter d’envahir la Russie.</p>
<p>Malgré la puissance militaire de la France du Consulat puis de l’Empire, cette hégémonie sur le continent s’explique difficilement. Une des clés est la <strong>coopération que Napoléon sut obtenir de la part des princes allemands</strong> (Prusse exclue).</p>
<p>L’Allemagne - ou plutôt le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Empire_romain_germanique">Saint-Empire Romain Germanique</a> (<em><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Heiliges_R%C3%B6misches_Reich" hreflang="de">Heiliges Römisches Reich</a></em>) - d’avant la Révolution française était une constellation de micro-États. On peut trouver <a href="http://www.euratlas.net/history/europe/1700/fr_index.html">une carte de 1700 chez Euratlas</a>.
<br />À côté de grandes principautés comme la Bavière, ou de royaumes comme la Prusse ou l’Autriche, existaient une <strong><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Heiliges_R%C3%B6misches_Reich#Reichsst.C3.A4nde" hreflang="de">pléthore (environ 350 !) d’entités autonomes</a></strong> : chevaliers indépendants qui ne relevaient que de l’Empereur, évêchés et autres domaines détenus directement par l’Église, villes d’Empire libres.... <br />L’autorité impériale n’était plus à cette époque ce qu’elle avait été sous Charles Quint. Les plus grands États (Prusse et Autriche) détenaient d’énormes territoires <em>hors</em> des limites théoriques du Saint Empire. Ces deux puissances ne se gênaient pas pour tenter de s’étendre aux dépens des autres principautés allemandes.</p>
<p>Bonaparte s’imposa d’abord par des <strong>victoires militaires face à l’Autriche notamment </strong> (guerre d’Italie). La France révolutionnaire victorieuse annexa également purement et simplement la Belgique et toute la rive gauche du Rhin. (Voir <a href="http://www.euratlas.net/history/europe/1800/fr_index.html">la carte de 1800</a>.)</p>
<p>Le Saint Empire, vieux de plus de huit cents ans, fut dissout de fait en 1806 lors d’un ultimatum de Napoléon à l’Autriche, détentrice du titre impérial. L’Empereur <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/François_Ier_d%27Autriche">François II</a> déposa son titre et immédiatement érigea l’Autriche en Empire - impossible que le souverain de l’Autriche soit à un niveau inférieur à l’Empereur français. (Le <em>Reich</em> sera reconstitué autour de la Prusse en 1870.)<br />Napoléon remplaça l’Empire allemand par la <strong><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Confédération_du_Rhin">Confédération du Rhin</a></strong> (<em><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Rheinbund" hreflang="de">Rheinbund</a></em>), alliance essentiellement militaire des États allemands (hors régions annexées, Prusse et Autriche), inféodée à son Empire, et faisant tampon face aux Prussiens, Autrichiens et Russes.</p>
<h3>La soumission des princes allemands</h3>
<p>L’alliance et la soumission des petits États allemands s’obtint facilement. D’abord, la France semblait simplement imbattable en infligeant des défaites répétées aux autres grandes puissances coalisées jusque 1812. <br />Ensuite, Napoléon protégeait les petits États allemands, de l’Autriche notamment. Certains s’érigèrent en grands-duchés voire royaumes (Bavière, Wurtemberg). <br />Enfin, il les <strong>dédommagea de leurs pertes</strong> sur la rive gauche du Rhin en leur transférant non seulement des territoires confisqués à l’Autriche ou au Saint Empire liquidé, mais aussi la souveraineté sur les chevaliers indépendants (« médiatisation »), et surtout les <strong>biens ecclésiastiques</strong> de la rive droite.</p>
<p>C’est ainsi que se transmit en Allemagne le processus de <strong>sécularisation des biens de l’Église</strong>, déjà effectué en France révolutionnaire. Le mouvement était cependant européen puisque déjà entamé depuis longtemps en Angleterre, Espagne ou Portugal. Même l’Autriche procéda à cette confiscation généralisée, essentiellement pour renflouer ses caisses. Le déroulement hâtif (déplacement autoritaire des moines et religieuses, confiscation des bâtiments et de leur contenu) eut un grand coût en terme artistique (monastères abandonnés, bibliothèques et œuvres d’art dispersées...) et social (disparition de toute une infrastructure servant au soutien des pauvres et à l’éducation, que l’État central ne sut pas remplacer), pour des recettes assez faibles (ventes bâclées).<br /><a href="http://de.wikipedia.org/wiki/Salzburg#Salzburg_nach_der_S.C3.A4kularisation" hreflang="de">Salzbourg</a> par exemple, où régnait un archevêque, fut sécularisée en 1803, réunie à l’Autriche en 1805, et annexée par la Bavière en 1810 après la victoire napoléonienne de 1809 sur l’Autriche.</p>
<p>Par son <strong>protectorat sur toute l’Allemagne de l’Ouest</strong>, la France pouvait puiser en Allemagne des dizaines de milliers de soldat. De nombreux soldats allemands participèrent par exemple à l’invasion de la Russie<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#pnote-180-1" id="rev-pnote-180-1">1</a>]</sup>.</p>
<h3>Naissance du nationalisme allemand</h3>
<p>Napoléon força l’admiration de nombre d’Allemands (Goethe, Beethoven...), au moins au début. Le grand général invincible qui avait su imposer des réformes radicales à l’Allemagne (liquidation des restes de féodalité, code civil, rationalisation de l’administration, simplification de la carte politique...) devint après son couronnement l’image du tyran (Beethoven renomma alors sa <em>Symphonie héroïque</em>), et il favorisa l’apparition d’un phénomène nouveau : le <strong>nationalisme allemand</strong>, enfant de l’occupation française et du romantisme en plein développement. D’abord rêve de poètes et d’intellectuels, le phénomène s’amplifia avec les années.</p>
<p>Après <strong>1812</strong> et la désastreuse retraite de Russie, le <strong>vent commença à tourner</strong> pour l’Empereur, et les États allemands soumis à Napoléon changèrent de camp un à un. En 1813 Napoléon subissait une nouvelle <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Leipzig">défaite cinglante à Leipzig</a><sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#pnote-180-2" id="rev-pnote-180-2">2</a>]</sup>, qui signa la fin de sa domination sur l’Allemagne : les combats allaient se continuer en France.</p>
<h3>Après Napoléon</h3>
<p>Le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Congr%C3%A8s_de_Vienne">Congrès de Vienne</a> redessina la carte de l’Europe post-révolutionnaire selon les conceptions des rois vainqueurs. Autriche et Prusse se taillèrent la part du lion, et reprirent à la France de Louis XVIII la plupart des annexions d’après 1792.</p>
<p>L’Allemagne ne s’unifia pas immédiatement, Autriche comme Prusse cherchant à exercer la domination. Mais l’idée d’État-nation propagée par la Révolution persista, et dans bien d’autres pays d’Europe aussi<sup>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#pnote-180-3" id="rev-pnote-180-3">3</a>]</sup>. Le <em>Reich</em> ne fut refondé autour de la Prusse, sans l’Autriche, qu’en 1870.</p>
<div class="footnotes"><h4>Notes</h4>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#rev-pnote-180-1" id="pnote-180-1">1</a>] <em>Et quand les Allemands envahirent la Russie en 1941, ils eurent eux-mêmes de nombreux supplétifs italiens, roumains, hongrois, parfois français. La Russie est trop grande pour une seule armée.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#rev-pnote-180-2" id="pnote-180-2">2</a>] <em>Et sanglante : 110 000 morts au total.</em></p>
<p>[<a href="https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#rev-pnote-180-3" id="pnote-180-3">3</a>] <em>Et là, l’amateur d’uchronie se demande « Et si Napoléon n’avait pas sévi ? Si la Révolution avait été paisible sans toutes ces guerres ? Le nationalisme était-il une évolution inéluctable au XIXè siècle ? »</em></p></div>
https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/08/14/199-l-allemagne-sous-napoleon#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/180Des versions originales des citations (4) : Les sources fugacesurn:md5:1a57c5d0f3f768b3156523390d99e13f2006-06-14T13:52:00+00:002010-10-31T09:34:22+00:00ChristopheCitationscitationcynismedémocratieEuropeguerrehainelivres lusnationalismepolitiquequêtesauvegardes<p>La version originale de nombre de citations n’a pas été imprimée, et les retrouver est donc délicat.</p> <p>Les citations ne viennent pas que des livres. Nombre d’entre elles proviennent de magazines. Par bonheur, une partie est en ligne... mais les archives sont payantes. De plus, je n’ai souvent qu’une traduction en français (c’est l’inconvénient de <a href="http://www.courrierinternational.com/">Courrier International</a>) . Donc si une bonne âme avait la générosité de griller quelques dollars pour vérifier que l’article suivant contient bien la citation ci-dessous, et pour savoir quelle en est la version anglaise, je serais très content :</p>
<blockquote><p>« Les déshérités se résigneront toujours à leur sort. Personne ne le dit ouvertement, mais c’est ce que pensent la plupart des gouvernements. » <br /> <br />Ronald Steel, <em><a href="http://www.nytimes.com/" hreflang="en">The New-York Times</a></em>, <br />édition du 100ème anniversaire, 29 juillet 1996</p></blockquote>
<p>Par contre, pour cette classique de l’anti-militarisme, il faudra recourir aux microfilms :</p>
<blockquote><p>« On croit mourir pour la patrie : on meurt pour des industriels. » <br /> <br />Anatole France, <em>L’Humanité</em>, 18 juillet 1922</p></blockquote>
<p>Et encore : pour ces deux citations-là, une source précise (au jour près) est fournie ; le problème est de trouver le support, le reste suit. La tâche est rarement aussi simple ! À ma connaissance, la numérisation complète des archives des journaux n’est pas à l’ordre du jour, mais ce sera peut-être économiquement réalisable dans vingt ans, et Google pourra enfin me dire quelle est la <em>vraie</em> version de cet autre classique, qu’on retrouve en plusieurs variantes sur la toile :</p>
<blockquote><p>« Les guerres, ce sont des gens qui ne se connaissent pas et qui s’entretuent parce que d’autres gens qui se connaissent très bien ne parviennent pas à se mettre d’accord. »<br /> <br />Paul Valéry</p></blockquote>
<p>Plus grave encore, <strong>la citation <em>jamais</em> imprimée</strong> : phrases extirpées d’un discours par un journaliste, rapportées de vive voix... Déformation garantie, traçabilité nulle. Quand ce ne sont pas des inventions complètes de journalistes. Il existe plusieurs versions de ce célèbre échange :</p>
<blockquote><p>Lady Astor à Winston Churchill : “If you were my husband, I’d put arsenic in your coffee.”<br />Winston Churchill à Lady Astor : “If I were your husband, I’d drink it!”</p></blockquote>
<p>La <strong>radio</strong> est un média également fugace ; tout n’est pas stocké, et en tout cas n’est pas en ligne, et encore moins indexé. Donc pour ceci j’ai dû faire une aveugle confiance à ma femme :</p>
<blockquote><p>« On a parfois l’impression que les Anglais ont pour principale occupation de jouer à être anglais. »<br /> <br />Philippe Meyer, <em>France Inter</em>, janvier 1997</p></blockquote>
<p>Les citations orales posent un autre problème : où pose-t-on la <strong>ponctuation</strong> ? L’exemple des discours de Churchill n’est pas forcément bon, car des versions imprimées « officielles » existent (ne serait-ce que les minutes au Parlement), mais pour le reste ? Le problème est mineur mais réel.</p>
<p>Pour toutes les raisons déjà citées, les livres de compilations de citations que l’on trouve dans le commerce sont en général douteux ; ils peuvent être utiles quand on cherche de nouvelles citations, mais les sources sont en général absentes, et sytématiquement sujettes à caution.<br />On fera une exception des <strong>recueils de maximes d’un personnage précis</strong> ; là on peut espérer que l’anthologiste s’est abreuvé directement aux sources écrites d’abord, ou auprès de rapporteurs de première main (aux dires par essence invérifiables, mais que l’on considérera comme sources fiables jusqu’à l’invention de la machine à remonter le temps). Par exemple :</p>
<blockquote><p>« Perdez votre temps, mon vieux ! Feriez mieux de réfléchir sur une mappemonde ! »<br /> <br />Charles de Gaulle,<br />à un officier penché sur une carte de l’Europe, à Londres (Rapporté comme attribué au Général par Marcel Jullian dans <em>De Gaulle, Traits d’esprits</em>)</p></blockquote>
<p><em><a href="https://www.coindeweb.net/blogeclectique/index.php?post/2006/06/15/166-des-versions-originales-des-citations-5-la-tour-de-babel">À suivre...</a></em></p>https://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?post/2006/06/14/165-des-versions-originales-des-citations-4-les-sources-fugaces#comment-formhttps://www.coindeweb.net/blogsanssujetprecis/index.php?feed/atom/comments/151« Si la Tyrannie et l’Oppression s’imposent dans ce pays... »urn:md5:fddd735ec25de76175806dd7fd12764a2006-04-15T14:55:00+00:002010-10-28T19:51:03+00:00ChristopheCitationscitationmanipulationnationalismepanurgismeparanoïapolitiquepsychologieracismetotalitarismeÉtats-Unis <blockquote><p>“If Tyranny and Oppression come to this land,
it will be in the guise of fighting a foreign enemy.”</p>
<p>
« <em>Si la Tyrannie et l’Oppression s'imposent dans ce pays,</em>
<em>ce sera sous le couvert du combat contre un ennemi étranger.</em> »</p>
<p>
<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/James_Madison">James Madison</a>,<br />quatrième Président des États-Unis</p></blockquote>