Je reviens de la capitale où je suis allé dire bonjour à la famille émigrée là-bas, et où j’ai suivi une formation sur un logiciel cher très à la mode (ça a payé mon billet de TGV).
Paris reste Paris, son métro toujours aussi pratique reste résolument hostile à quiconque possède poussette, lourde valise, ou n’est pas un bon marcheur, jeune, pétant de santé, ou a du mal à tolérer les écarts de température et les courants d’air chargés de toute la poussière des voies et remuées par des millions de pieds quotidiens. Et je n’ai toujours pas compris la logique de portiques qui transforment un espace public en camp retranché quand les métros de Prague ou Berlin se contentent d’aligner vaguement quelques poinçonneuses. Très pratique quand on est chargé ou pressé, bravo. Vive le tram !
La déception la plus cruelle fut la visite des parcs de la ville, derniers îlots de verdure au sein d’un océan d’immeubles. Le Parc du Luxembourg est certes très joli, et le Jardin des Plantes aussi. Idéal, pensions-nous, pour emmener un Petit Rémi gambader un peu entre des marches forcées stoïques dans les rues et le métro, et le confinement dans la chambre d’hôtel ou les exigus appartements locaux.
D’abord, au Jardin du Luxembourg, les jeux sont payants. Super. Y compris pour les adultes accompagnant leur progéniture, histoire de bien exploiter le filon. Ensuite ils ferment à 16h30. Ils ferment si tôt parce que le parc, lui, ferme à 17h00 en hiver. Je veux bien qu’il faille suivre l’horaire du coucher du soleil, mais à 17h00 début novembre à Paris il fait encore jour, et le dimanche, le parc est encore noir de monde à cette heure. Les policiers chargés de purger la place, à grands coups de sifflets à roulette totalement scandaleux dans ce cadre un peu grouillant mais encore paisible, ont fort à faire (et sont les premiers à reconnaître la stupidité de la mesure).
Même cirque au Jardin des Plantes le lendemain : à 17h00 on boucle tout. Pas de vivarium pour Rémi, et une visite au trot. Bravo le service public. Je n’ose penser aux opinions des touristes.
Je suis encore sur le cul. Mon beau-frère m’a confié avoir déjà planifié de quitter le boulot plus tôt que d’habitude juste pour pouvoir aller au parc (un besoin vital pour lui). Je n’arrive pas à trouver en ligne les horaires des jardins strasbourgeois mais je ne m’en suis jamais fait « jeter » comme ce fut le cas à Paris. Idem à Nancy, où j’ai le souvenir de « nocturnes » à la Pépinière (horaires d’été d’après nancy.fr : 06h30-22h30, à comparer au royal 7h30-21h30 du Luxembourg au solstice d’été).
Après ça, faut pas s’étonner que les autochtones soient si stressés, si on leur enlève leur dernière chance de voir de la verdure. J’avais beaucoup apprécié de me retrouver en famille dans un coin sympa du XIVè, mais cette histoire me rappelle une fois de plus pourquoi je n’ai jamais voulu devenir parisien.
J’ai eu deux explications sur ces horaires :
- les 35 heures : il faudrait voir quelle était la situation avant 1998 ; de plus je doute que le soleil, base des horaires du Luxembourg, soit passé aux 35 h aussi, et ça n’explique pas qu’à Nancy ou Strasbourg la fermeture y soit plus tardive alors que la nuit y vient facilement une demi-heure plus tôt[1] ;
- la chasse aux SDF et autres taggeurs de bancs, qui serait bien plus délicate si on devait attendre la nuit : l’explication serait bien dans la logique sécuritaire actuelle aussi incarnée par les
pont-levisportiques du métro : hors de question de sembler laisser la moindre chance aux non-intégrés, quitte à pourrir la vie à tout le monde.
Je n’ai pas encore écrit à Delanoë ou Contassot, je suis curieux d’avoir l’avis des Parisiens...
Notes
[1] Il y a un demi-fuseau horaire entre Paris et le Rhin, sisi.
3 réactions
1 De jid répond au courrier - 08/11/2007, 16:13
Chez nous, ce sont les employés municipaux qui ferment les jardins publics.
Comme ils sont chargés de plusieurs jardins chacun, si le dernier doit fermer à 19h00, ils fermeront l'avant-dernier à 18h30, et celui d'avant à 18h00,...
Mais bon, ils font attention quand même, ils font des roulements dans l'ordre de fermeture
2 De Cécile de Quoide9 - 20/11/2007, 07:02
L'avis d'une parisienne : je m'en fous complètement des horaires d'ouverture et de fermeture des parc et jardins (et pas seulement parce que je n'ai pas d'enfants) et je n'ai jamais entendu qui que ce soit dans mon entourage (avec ou sans enfants) s'en plaindre.
Je m'en fous tout simplement parce que je ne trouve pas ça important et parce que si je voulais de la verdure, je ne vivrais pas ici mais en province et parce que je ne considère pas les jardins comme des lieux où voir de la verdure (pour ça il y a le bois de Vincennes ou de Boulogne) mais comme des lieux de culture (les statues m'intéressent plus que les arbres), de lecture, de repos éventuel. Moi ce que je trouve important c'est qu'ici (à Paris), on peut acheter des huîtres ou manger au resto à 3h du matin, on peut faire ses courses au supermarché à 23h00, il y a la plus forte densité de cinéma et de théâtres au monde, les plus beaux et les plus grands musées.
Je suis toujours stupéfaite que les provinciaux soient tellement enclins à calquer leur mode de pensée (et de vie) sur le notre. Beaucoup de parisiens ne sont pas stressés, beaucoup d'autres AIMENT le stress : ça n'est pas nécessairement une contrainte, ça peut être positif, ça peut être une façon d'être et de vivre. Certains ont besoin de sport, certain ont besoin d'adrénaline, certains ont besoin de l'effervescence des grandes villes.
J'ai la chance de vivre à Paris par choix, de me sentir comme un poisson dans l'eau dans ma ville que j'adore. Est-ce si difficile à comprendre ? Suis-je une bête curieuse ?
Ca me rappelle un peu cet étudiant américain en échange scolaire à Rouen qui s'étonnait que les voitures françaises soient si petites et disait "pourtant les français sont de la même taille que les américains" sans songer une seule seconde que peut-être le rapport des français à leur voiture n'était pas le même que les américains, que peut-être le prix des véhicules, de l'essence et la taille des voies de circulation n'étaient pas les mêmes non plus, etc. Bref, il ne voyait que "sa" logique sans songer une seule seconde que son cadre de références n'était pas forcément universel.
Parfois quand je lis ou entends des commentaires de provinciaux à propos de Paris, j'ai l'impression qu'ils font une expérience ethnologique pénible à chaque fois qu'ils viennent ici et ça me stupéfie toujours parce que je considère ça un peu comme une forme d'intolérance.
Accessoirement le champs de Mars est ouvert 24h/24.
@ +
3 De Le webmestre - 20/11/2007, 20:57
@Cécile : C’est bien ce que je me dis depuis longtemps, il y a bien un fossé culturel entre Paris et le reste du pays :-)
Mais pourquoi vous n’allez pas jusqu’au bout et que vous ne les bétonnez pas ces parcs inutiles ? Des pistes de skates, des parkings ou des HLM, y en a jamais trop.