Nous avons vu récemment que la complexité des ERP, combiné à un lourd passé, en faisaient des monstres ruineux et techniquement assez cryptiques.
En tant que développeur il y a bien pire que les termes barbares du système à assimiler : il faut comprendre ce que l’utilisateur veut faire avec le système. (Comme de plus c’est lui qui paye, c’est lui qui commande).
Pour le naïf technicien qui débarque en plein dans un flux logistique, le monde un peu flou de la vente et des livraisons prend soudain sa pleine dimension. Au début il s’imagine qu’une commande ne doit pas être si tordue à concevoir dans un modèle de données bien propre :
- on commence par un en-tête avec quelques informations : le client, son adresse, le numéro de la facture ;
- on enchaîne avec les lignes de commandes : un objet ou un service, une quantité, un prix unitaire ;
- on termine en sommant les lignes, on rajoute la TVA ;
- il reste éventuellement à livrer à l’adresse du client…
Commençons par les adresses. Si on veut tout prévoir, il faut distinguer d’abord l’adresse de livraison de l’adresse de facturation. N’importe quel site de commerce en ligne est à présent capable de gérer la différence : vous pouvez ainsi envoyer un cadeau de Noël à votre chère grand-mère tout en recevant vous-même la facture papier.
Mais cela peut être encore plus compliqué ; par exemple :
- l’usine
TARTEMPION
, en France ; - peut recevoir une commande de
TOTO GmbH
(« donneur d’ordres » européen) ; - au nom de la PME brésilienne
PEDRO
(« destinataire final » des biens physiques) ; - à facturer à
TOTO Bizness International
(entité comptable du groupeTOTO
, « destinataire de la facture ») ; - et qui sera effectivement payée par
TOTO Bank Ltd
(« payeur ») ; - à
VITENCAISSE
, société d’affacturage deTARTEMPION
, qui lui sous-traite la facturation (relances, frais, avance, garantie de paiement…) ; - la livraison ne sera pas à envoyer directement au Brésil, mais à un intermédiaire logistique (« client délivré »), disons
FedDHL
à Amsterdam.
Les ordinateurs de TARTEMPION, se doivent donc, pour une unique commande, créer chacune de ces entités, et ne pas perdre les liens entre elles. Il est mal vu et parfois coûteux d’envoyer une facture papier au lieu d’une palette, ou de réclamer le paiement à celui qui sert juste de livreur.
Renseigner tout cela à la main devient vite pénible, d’autant plus que les ERP sont rarement des monstres d’ergonomie 1. Mais on atteint le cauchemar lorsque la création d’adresses ou clients doit être automatisée et que les données adéquates doivent se remplir spontanément sur les écrans informatiques de l’administration des ventes. Au passage on se demande qui là-dedans est vraiment le sacro-saint « client » 2.
Avec le jargon adéquat, mélangé à l’anglais imposé par certaines multinationales à leurs filiales, on aboutira au final à la conclusion que TOTO Bank Ltd est le PayTo From de PEDRO, et TOTO Bizness International le BillTo Of de TOTO GmbH 3. Le CRM a des joies cachées pour les amateurs de puzzle, de casse-têtes et de barbarismes linguistiques.
Ce n’est que le début. Inutile de dire que PEDRO, TOTO Bank ou VITENCAISSE ont chacun une demi-douzaine d’adresses physiques (prévoir la notion d’« adresse primaire »), chacune dédiée à un rôle différent, ou pas (rajoutons une table des « usages d’adresse »). Certaines de ces adresses peuvent être celles d’une autre entité d’ailleurs (stock déporté par exemple).
8 réactions
1 De anteane - 28/09/2006, 17:08
Bonjour,
Je viens de rédiger un article sur les grandes étapes de la mise en place d’un ERP( www.anteane.fr/dotclear/... Je prends l’exemple de PMI SOFT. Je pense qu’aujourd’hui les ERP s’ouvrent vers de nouveaux marchés, les PME par exemple et que la mise en place se simplifie de plus en plus tout en gardant l’essentiel et surtout la fonctionnalité et l’efficacité. J’attends des réactions à ce sujet.
merci
2 De Le webmestre - 01/10/2006, 15:31
Corrigé le lien...
3 De Nicolas MARTIN - 10/05/2007, 14:24
il semblerait que www.anteane.fr/dotclear/i... fonctionne...
4 De anteane - 06/12/2007, 19:22
Je reviens sur ce post ou j'avais ecrit ce petit billet pour vous dire que nous avons mis en ligne un article traitant de la rédaction d'un cahier des charges gpao avec un exemple complet de cahier des charges à télécharger :
www.anteane.fr/index.php/...
5 De Jerome F. - 05/09/2009, 11:23
Travaillant dans le domaine des ERPs des problèmes de ce genre j'en vois souvent. Les clients ont des processus très complexes et espèrent sérieusement les gérer avec un logiciel standard.
Souvent la solution de loin la moins chère à ce type de besoin c'est le développement spécifique d'un programme hors de l'ERP. Mais cela casse le principal argument de vente de ces usines à gaz : elles sont sensées tout faire.
6 De Le webmestre - 05/09/2009, 11:54
@Jerome F : Quoi qu'en disent les commerciaux, un ERP ne sait pas tout faire, vu que chaque entreprise a ses habitudes, ses combines, sa tradition, et des clients qui ont aussi les leurs. Il y a aussi ce qui possible manuellement, et ce qu'on aimerait bien automatiser selon des règles maison.
Éternel dilemme : soumettre l'entreprise à la logique de l'ERP ou patcher l'ERP pour l'adapter à l'entreprise ? Parle-t-on paramétrage (SAP est le roi) ou programme spécifique ? Un spécifique doit être maintenu à chaque migration et est une nouvelle source de bugs. J'ai vu une société qui avait tellement amendé SAP qu'elle était devenue incapable de migrer à la version suivante. Je n'en ai vu aucune SANS spécifique.
À la base je dirais que les spécifiques doivent :
- automatiser les tâches répétitives qui ne le sont pas déjà (rôle de l'informatique en général) ;
- porter sur le cœur de métier, les spécificités de l'entreprise, ce qui fait sa valeur ajoutée : par exemple une entreprise de logistique mettra sa compta dans l'ERP, mais créera ses propres logiciels logistiques.
7 De Jerome F. - 07/09/2009, 17:45
"soumettre l'entreprise à la logique de l'ERP"
Ca c'est une bien mauvaise idée : l'informaticien (et consultant) que je suis est incapable de dire au responsable logistique, production, commercial,... comment ils doivent travailler. C'est pas crédible. C'est le genre de situation que j'ai du mal à supporter.
"Je n'en ai vu aucune SANS spécifique."
Mette du spécifique dans l'ERP c'est pas forcement la meilleure solution. Le spécifique interfacé avec l'ERP mais hors ERP, partageant dans l'idéal la base de données (en écrivant dans les tables de l'ERP via des APIs) c'est plus souple.
"automatiser les tâches répétitive, (rôle de l'informatique en général)" 100% d'accord avec vous.
8 De Le webmestre - 07/09/2009, 20:49
@Jérôme F : Oui, l'informaticien de base ne peut dire au client ce qu'il veut. C'est pour cela que le métier de « fonctionnel », plus financier/logisticien/chef de produit qu'informaticien est là : il connaît tout le paramétrage possible (y a des cours pour ça) et comprend les besoins.
Un bon spécifique, oui, il communique par API et par les endroits prévus. Tout gros ERP a des endroits privilégiés pour cela, plus ou moins intrusifs.