Il n’a été révélé que bien après la guerre que les Britanniques étaient, à partir de 1941, capables de décoder l’essentiel des messages cryptés allemands, même ceux codés avec la fameuse machine Enigma. Alan Turing en tête, une équipe de Bletchley Park suait pour que Churchill en personne lise les messages d’Hitler à ses généraux avant même les destinataires (et au passage cette équipe inventait l’informatique).

De même, les Américains étaient capables de décoder à peu près tout ce que les Japonais envoyaient sur les ondes avant même leur entrée en guerre.

Par contre, quand les Allemands recouraient au courrier papier ou au téléphone, l’écoute était impossible.

L’utilisation des renseignements différaient assez nettement : les Anglais craignaient en permanence de trahir leur source, au point de ne pas utiliser les renseignements ! Si les Allemands s’étaient aperçu que leur code était éventé, ils en auraient changé, et rendu les Alliés aveugles.

À l’inverse, les Américains considéraient que les renseignements devaient être utilisés, et ne s’en sont pas privés. (Commentaire personnel : les Anglais considéraient peut-être avoir beaucoup moins de marges de manœuvre que les Américains.)

Une des révélations du livre pour moi porte justement sur l’utilisation de ces renseignements : le risque pour celui qui écoute est de trop réagir à ce qu’il entend, à trop tenter deviner les buts immédiats de l’ennemi, au risque de se faire intoxiquer et manipuler, ou de se noyer dans les jeux entre les différentes factions au sein des autorités adverses. Mieux vaut suivre une stratégie claire et n’en pas dévier (ce qui est plutôt la technique américaine) : c’est flagrant au moment des ultimes tentatives de négociations lors des agonies du IIIè Reich ou de l’Empire japonais.

Destremau insiste aussi beaucoup sur les multiples différences d’interprétations des divers hauts gradés et politiques au courant des décryptages. Entre Churchill, qui lisait les données « brutes » et certains adjoints, les analyses différaient parfois nettement. Entre alliés, voire entre services, l’échange d’informations n’était pas dénué d’arrière-pensées.

L’importance des messages Ultra dans le déroulement de la guerre a été capital, certains parlent d’années de guerre économisées. Il faut garder à l’esprit qu’à côté des échanges de haut niveau (ambassadeurs, généraux nazis...), les messages décodés livraient une foule d’informations tactiques très utiles pour la menée quotidienne des opérations (et parfois par la bande : les informations de Churchill sur les unités russes venaient des Allemands et se tarirent avec leur chute).

Christian Destremau découpe son livre en plusieurs chapitres dédiés à diverses phases de la guerre : Barbarossa, Pearl Harbor, le double jeu de Vichy, la Solution finale, l’assassinat éventuel d’Hitler, les bombardements sur l’Allemagne, l’agonie du Reich, la bombe atomique et la capitulation japonaise.

Webographie succinte

On pourra lire d’autres critiques sur le web :

Sur le site de la revue Le Banquet

Sur Histoforum

Et dans les prochains billets ici :

1-Résumé
2-Barbarossa
3-Pearl Harbor
4-Vichy
5-La solution finale
6-L’assassinat de Hitler
7-Le bombardement de l’Allemagne
8-L’agonie du Reich
9-La bombe atomique